Kursaal, le littoral en lumière
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Kursaal, le littoral en lumière
Solutions LUMIÈRE Dunkerque Haut lieu des activités dunkerquoises, le Kursaal avait besoin d’un coup de jeune. A l’issue d’un concours d’architecture, en plus de bâtiments remis aux normes et agrandis, la ville de colonnes lumineuses originales. Kursaal, le littoral en lumière C’ année s’y déroulent des bals de Carnaval, devenu une véritable institution dans la ville. Mais c’est également la plus grande salle de concert de l’agglomération, et il sert parfois de cadre à des congrès, comme les Assises nationales de l’énergie de 2004. Un bâtiment intégré dans l’histoire de la ville A l’issue d’un concours organisé par la ville en 2000 pour le bâtiment, le cabinet Luc Delemazure s’est mis au travail. « Le projet que je présentais choisissait d’unifier le petit et le grand Kursaal par l’intermédiaire d’une façade cohérente. Cela permettait de créer un espace supplémentaire entre ces deux bâtiments, espace destiné à une salle d’exposition, indique l’architecte. Le métal de la façade renvoie aux industries métallurgiques du Dunkerquois ; la forme en boîte rappelle le container, et donc le port de Dunkerque. » Le concept de boîte est le fil conducteur de l’architecture, une boîte où lumière naturelle et artificielle se répondent. Construit parallèlement au PHOTOS AGENCE LUC DELEMAZURE ARCHITECTES - JEAN-PIERRE DUPLAN EST un vaste parallélépipède de verre, une unité de transparence, qui barre toute la place. Le Kursaal version 2005 est sans doute l’un des seuls palais des congrès/ salle de spectacle implanté à quelques mètres de la mer. « Nous profitons de cet environnement pour jouer avec la lumière. Elle n’est jamais banale, systématique ; elle évolue au cours de la journée, créant des effets autour et dans le bâtiment. Le projet a été pensé avec sa lumière, naturelle d’abord, puis artificielle, pour produire des effets différents le jour et la nuit », explique Luc Delemazure, l’architecte du nouveau Kursaal. Un projet qui a permis de coordonner tous les bâtiments de cette partie du front de mer. Car il y a peu, ici, des bâtiments hétéroclites se succédaient. En regardant vers la mer, on pouvait voir le Kursaal à gauche, et à droite son extension, le petit Kursaal. Entre ces deux constructions en briques marron, aux angles apparents, s’insérait un bâtiment au toit courbé, d’un vert vif : le casino. Le Kursaal est l’un des lieux les mieux connus des Dunkerquois. Chaque PHOTOS AGENCE LUC DELEMAZURE ARCHITECTES - JEAN-PIERRE DUPLAN Dunkerque a gagné une salle d’exposition. Plus une place aux 30 LUX N° 234 SEPTEMBRE/OCTOBRE 2005 lumière SOLUTIONS front de mer, le Kursaal possède une face orientée vers la mer et une face orientée vers la ville. Côté ville, le bâtiment présente de larges surfaces vitrées, derrière lesquelles de grandes lettres blanches indiquent les manifestations à venir. Dominant l’ensemble, le « signal » est une haute structure de verre et d’acier qui dessine la forme de la lettre K. Côté mer, se démarque la large stature de la cage de scène du Kursaal. Ce cube noir imposant s’emboîte dans une large baie vitrée. Eclairage des façades intérieures Un code couleur différencie les quatre fonctions du bâtiment : le Kursaal, le petit Kursaal, la salle d’exposition et les salles de conférences, l’ensemble des couloirs et murs étant peints uniformément selon leur fonction. De nouveaux locaux administratifs réservés à la gestion du centre prennent place derrière la façade de verre, côté ville. « Cette surface vitrée est elle-même une boîte qui englobe des structures aux “terminaisons” spécifiques : les bureaux sont fermés et donnent accès à une passerelle le long des vitres. Un accès nécessaire pour changer les annonces des manifestations », indique Luc Delemazure. L’éclairage intérieur contribue fortement à valoriser cette structure tout en relayant la lumière naturelle lorsque la nuit tombe. Ainsi, visibles depuis l’extérieur, les luminaires encastrés à sources fluorescentes des bureaux ont été choisis pour leur discrétion et leur esthétique (des tubes fluorescents T5 à ballast électronique, équipés d’une optique à grille Synto). Mais surtout les façades intérieures des bureaux, situées derrière la paroi vitrée qui emboîte le bâtiment, sont illuminées par des spots halogènes de 70 W, 3 000 K. Dans le hall, situé derrière la paroi de verre, et reliant la salle d’exposition, le petit et le grand Kursaal, l’architecte a installé des spots suspendus qui forment comme un ciel. Une constellation de spots halogènes 150 W suspendus, qui diffusent une lumière à 3 000 K. Avec leur faisceau étroit, ils créent simultanément un éclairage d’accentuation au service du concept architectural : « Les appareils suspendus mettent en valeur les banques d’accueil, elles aussi en forme de boîtes, et qui sont traitées comme des objets muséographiques », précise Luc Delemazure. 2 700 m2 et cinq puits de lumière M M M Mais c’est dans la toute nouvelle salle d’exposition qu’il faut se poser pour apprécier le travail ciselé de l’architecte. Longue de 78 m et large de 50, sous 9 m de plafond, elle reçoit à flots la lumière La lumière en colonnes C’est un bien curieux spectacle qui a lieu chaque soir sur la place du Casino, à Dunkerque. Les 47 colonnes blanches, translucides, qui sont réparties sur toute l’étendue, deviennent lentement lumineuses, à mesure que le soir arrive. L’obscurité devenant plus profonde, elles se démarquent les unes des autres : l’une prend une teinte orangée, l’autre prend une belle couleur bleue, tandis que la troisième se pare de rouge. Certaines restent blanches. Toutes semblent se répondre, entretenir une danse immobile. Mystérieux temple aux colonnes rassurantes, dispersées sans ordre. C’est à la suite d’un concours organisé, en 2003, par la communauté urbaine de Dunkerque pour la réalisation du parking et de la place concomitants au Kursaal, que Light Cibles a conçu ce dispositif. « Nous avons pris le parti d’accompagner le piéton avec des colonnes lumineuses plutôt que d’inonder de lumière ce large espace minéral, explique Emmanuel Clair (Light-Cibles). Nous préférons une ambiance ludique créée par la luminance de nombreux points d’éclairage à une ambiance fonctionnelle sans ombre ni contraste qui s’apparente à celle des parkings. Ces objets lumineux animent l’espace et rassureront le piéton. » L’objet est inédit. La source est invisible, et seule apparaît cette colonne de lumière de 2 m de haut, d’une trentaine de centimètres de diamètre, surmontée d’un mince disque métallique. Contrairement à d’autres produits du même type, la diffusion de la lumière commence dès le niveau du sol, et se continue de façon homogène tout au long du luminaire. La couleur est donnée par un filtre de verre placé sur le spot. « J’ai travaillé avec Targetti pour développer ce concept. C’est un accessoire pour spot encastré dans le sol. Il ne nécessite pas d’adaptation particulière de l’encastré. Il est interchangeable. Il n’est pas nécessaire de changer tout le luminaire, la colonne est indépendante », poursuit le concepteur lumière. Une coque en polycarbonate transparent lavable protège l’accessoire. Le produit est simple, pratique et esthétique. « Je ne lui ai pas encore donné de nom, et je n’ai pas encore envisagé de commercialisation à plus grande échelle », précise-t-il. Sur toute la place, le sol noir renvoie peu de lumière ; des inscriptions guident le visiteur vers les différents lieux du Kursaal. Deux flèches bleues, en spots à LED encastrés, indiquent les entrées. En face du Kursaal, sur l’autre extrémité de la place, 12 mâts métalliques servent de supports à des spots qui parachèvent l’éclairage. A mi-hauteur, répartis une fois sur deux, 6 projecteurs à gobos et 6 projecteurs « rainbow » complètent le spectre de couleur des colonnes. En tête de mât, 12 projecteurs de 150 W viennent rehausser la luminosité globale du bord de la place. SEPTEMBRE/OCTOBRE 2005 LUX N° 234 31 Solutions M M M LUMIÈRE naturelle. Côté mer, un deck surélevé parqueté en bois occupe toute la largeur, fermé par une baie vitrée. Côté ville, la clarté entre après avoir été filtrée par le hall. Ces deux sources basses de lumière naturelle sont complétées par 5 puits de lumière créés dans le plafond. La salle peut être séparée en deux, en quelques minutes ; la partie côté mer reçoit alors l’éclairage aux 2 puits de lumière. « Ces puits sont formés par de larges vitres qui surplombent le toit. Elles forment des boîtes à lumière. Le flux rayonne vers le sol puis est renvoyé vers les parois blanches », explique Luc Delemazure. Le concept de boîte poursuit sa déclinaison dans des niches rouges qui s’extrudent sur une passerelle grise sur le côté droit de la salle. Ces ouvertures carrées en saillie laissent voir les circulations, le rouge correspondant au code couleur défini pour cet espace. Elles participent ainsi à la fois à la vie de la salle – à laquelle elles apportent leurs propres éclairages (artificiels) et leur teinte chaude – et à la cohérence « emboîtante » de l’architecture. En chiffres Dunkerque Kursaal regroupe 3 activités : spectacles (6 000 personnes assis/debout), salons grand public et professionnels (jusqu’à 6 200 m2), congrès associatifs et conventions d’entreprises (de 30 à 3 800 personnes). Il reçoit 250 000 visiteurs par an. Dates : • 1983 : salle de spectacle de 3 500 places assises ; • 1998 : petit Kursaal (512 places assises) ; • 2002 : construction du nouveau casino ; • réfection de 2002 à 2005. Salle d’exposition, livrée en 2005 : un total de 2 700 m2, plus deux salles de réception de 420 m2. Nouvelle scène de 600 m2 dans le grand Kursaal. 32 LUX N° 234 SEPTEMBRE/OCTOBRE 2005 L’éclairage artificiel est ici assuré par 55 projecteurs 400 W aux iodures métalliques (température de couleur 4 500 K) : 17 appareils possèdent une lampe auxiliaire aux iodures métalliques, à recyclage rapide, pour maintenir un minimum d’éclairement en cas de coupure de courant. « Ces lampes auxiliaires restent éteintes en situation normale, et peuvent s’allumer immédiatement pour prendre le relais si l’éclairage normal est défaillant. » Le deck et la partie droite de la salle sont éclairés par des downlights à lampes fluocompactes 2 x 26 W. Boîte ouverte, le Kursaal l’est plus que l’on ne peut imaginer. Au point d’en faire oublier ses murs. Si la salle de spectacle n’a pas connu de changement majeur dans ses éclairages, en revanche elle fait venir la mer du Nord jusqu’aux fauteuils du public. « La cage de scène a été agrandie, elle peut s’ouvrir sur la mer. L’élément marin s’invite comme un ingrédient supplémentaire du spectacle », indique l’architecte. Côté ville, c’est I Maître d’œuvre : Ville de Dunkerque un autre tableau, où le concept (bâtiments), direction des bâtiments poursuit sa vie obstinée. Un et communauté urbaine de Dunkerque parking souterrain a été construit. (parking et place du Casino) Sur la place qui le couvre, les I Maître d’ouvrage : Cabinet Luc entrées du parking sont des boîtes Delemazure ; Lidéric Veauvy colorées, qui guident le visiteur I Mise en lumière : Cabinet Luc vers le Kursaal. Des luminaires Delemazure. Light-Cibles : originaux (voir encadré page 31) Emmanuel Clair ont été installés pour animer la I Bureau d’étude : Pingat – Ingénierie place dès que le soir tombe. SAS : Agence de Lille Les intervenants FRÉDÉRIC TOURNEUR I Installateur : SET Tertiaire