L`Ecole française de géographie (Vidal de la
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L`Ecole française de géographie (Vidal de la
L'Ecole française de géographie (Vidal de la Blache et ses descendants) DOC 1 LE POSSIBILISME Une individualité géographique ne résulte pas de simples considérations de géologie et de climat. Ce n'est pas une chose donnée d'avance par la nature. Il faut partir de cette idée qu'une contrée est un réservoir où dorment des énergies dont la nature a déposé le germe, mais dont l'emploi dépend de l'homme. C'est lui qui, en la pliant à son usage, met en lumière son individualité. Paul Vidal de la Blache, extrait du Tableau de la géographie de la France, 1903 DOC 2 LES GENRES DE VIE DANS LA GEOGRAPHIE HUMAINE On sait que la physionomie d'une contrée est susceptible de changer beaucoup suivant le genre de vie qu'y pratiquent ses habitants. [...] Un genre de vie constitué implique une action méthodique et continue, partant très forte, sur la nature, ou, pour parler en géographe, sur la physionomie des contrées. Sans cloute, l'action de l'homme s'est fait sentir sur son « environnement » dès le jour où sa main s'est armée d'un instrument; on peut dire que, dès les premiers débuts des civilisations, cette action n'a pas été négligeable. Mais tout autre est l'effet d'habitudes organisées et systématiques, creusant de plus en plus profondément leur ornière, s'imposant par la force acquise aux générations successives, imprimant leur marque sur les esprits, tournant dans un sens déterminé toutes les forces de progrès. Si forte est cette action que nous risquons d'en être dupes. Les catégories tranchées que présentent à notre esprit l'état pastoral, l'état agricole ou telles autres classifications sociologiques, sont loin de correspondre à des contrastes aussi tranchés dans la nature. Ces contrastes tiennent à ce que pasteur et agriculteur, pour ne d'arrêter qu'aux deux genres de vie les plus évolués, sont deux être devenus socialement très différents par un ensemble d'habitudes et de conceptions nées précisément de la différence des genres de vie qu'ils pratiquent. Paul Vidal de la Blache, extraits des Annales de Géographie (191 1) DOC 3 FORMATION ET MAINTIEN DES COMMUNAUTES CANTONALES DES VALS JURASSIENS Entre les barres ou les crêtes de calcaire qui en dessinent l'encadrement, l'existence de ces populations des vals tient aux qualités du sol marneux, d'âge néocomien, qui en occupe le fonds. Assez argileux pour garder l'humidité, ce sol doit aux débris calcaires qui s'y combinent avec l'argile une abondance de sels fertiles et une facilité à se désagréger et à s'échauffer, qui le rendent très propre à la formation de prairies. Souvent, par bouquets épars, les arbres se mêlent aux près, et composent ainsi ces prés-bois où le feuillage filtrant les pluies, tamisant les rayons, prête son ombre aux vaches qui errent sur ces hauts lieux. C'est alors une impression de grande douceur. Des pâtis communaux s'étalent sur les versants rocailleux qui séparent le fond du val et le sommet des hauteurs. Enfin, bordant les cimes, des forêts de sapins et d'épicéas semblent isoler du reste du monde ce petit coin écarté. A la faveur de cette avantageuse combinaison de bois, de prairies, de pâturages, à laquelle s'ajoute la pierre à bâtir, naquit, sans doute au Moyen Age, sous l'influence des églises ou des seigneurs qui cherchèrent par des franchises à y attirer des colons, un type intéressant de vie pastorale. L'originalité de la géographie politique du Jura tient au développement harmonique qu'a pris ce mode d'existence. Les ressources des pâtis communaux se combinent avec celles des prairies. Pendant de longs hivers séparés du monde, une industrie domestique des plus variées a pu élire domiciles dans de belles et larges maisons de pierre (...). Ces cadres fermés de faible étendue ont rendu naturelle et facile la pratique des associations ou fruitières. (...) Cependant aux ressources locales traditionnelles s'ajoutaient, autrefois surtout, des habitudes d'émigration temporaire. Paul Vidal de la Blache, extraits du Tableau de la géographie de la France (1903) DOC 4 La Brie Pour le géographe et le cartographe la Brie est devenue une sorte de subdivision territoriale à laquelle il a bien fallu donner des limites précises et c'est ainsi qu'on la comprise entre la Seine et la Marne. L'agriculteur a d'autres préoccupations : peu lui importe que la Brie ait été à l'origine une forêt, ce qu'il appelle ainsi c'est le plateau qui couronnent les terres à céréales ; il n'éprouve pas le besoin de le délimiter exactement mais il en sait bien distinguer les bonnes et les mauvaises parties. Lucien Gallois, Extrait de Régions naturelles et noms de pays (1908)