Analyse du film
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Analyse du film
$ % , & ' - ( . $ ) / 0 * 1 + 2 3 4 5 6 Mardi 21 octobre 1997 ! " # ! Film suédois en noir et blanc. 1965. 84 min. Scénario Photographie Montage Musique Production Ingmar Bergman. Svan Nykvist. Ulla Ryghe Lars Johan Werle. Svansk Filmindustri. Interprétation Liv Ullmann Bibi Andersson Gunnar Björnstrand Margaretha Krook Elisabeth Vogler, l’actrice Alma, l’infirmière Vogler la doctoresse A dans 15 jours... Rien en fait mardi prochain(28 octobre) puisqu’il y a des vacances pour certains. Mais on reprend normalementdès la semaine suivante. Fini donc les séances plus ou moins traumatisantes et place à la comédie avec la Confession impudique, film japonais, couleurs, de Kon Ichikawa, 1959. Cette comédie absurde et dotée d’un zeste d’érotisme est adaptée d’un roman sulfureux de Tanizaki. Un célèbre historien souffre de ne plus pouvoir satisfaire sa femme, plus jeune que lui. Se servant de sa jalousie comme fortifiant, il essaie de provoquer une liaison entre elle et son médecin, qui est également le fiancé de leur fille. L’une des plus grandes comédies japonaises... Ce film a reçu le prix du jury à Une actrice de théâtre, Elisabet Vogler, quitte une représentation d’Electre et s’enferme dans un mutisme absolu. Elle est hospitalisée et Alma, une infirmière, l’emmène avec elle dans une villa au bord de la mer pour la soigner. Les deux femmes sont seules, et s’instaure en elles une forme singulière d’échange : au silence de la patiente s’oppose le flot de paroles de l’infirmière, qui se met à nu à travers ses récits. Le film s’inscrit dans la droite ligne de la trilogie métaphysique de Bergman du début des années soixante (A travers le miroir, Les Communiants, Le Silence) et occupe une place importante dans l’oeuvre du réalisateur. Il illustre notamment de façon paradigmatique sa volonté obsessionnelle de montrer comment la parole, dévoilant et voilant d’un seul geste, emporte les personnages au-delà de leur volonté première, celle du simple récit. C’est ainsi que le but professionnel de l’infirmière, celui de soigner, va se retourner contre elle. Pourquoi l’actrice se tait-elle? “ Elle a donc été comédienne - peutêtre peut-on se payer ce luxe? Puis, elle n’a pas ouvert la bouche. Rien d’extraordinaire à ça. “ Je dois commencer par une scène dans laquelle le docteur informe Alma, l’infirmière, de la situation. Cette première scène est fondamentale. Soignant et malade deviennent aussi proches que nerfs et chair. Seulement, elle ne parle pas, elle refuse sa propre voix. Elle ne veut pas, en effet, mentir. ” C’est ainsi que Bergman imagine son futur film, dans l’une des premières notes de son carnet de travail. On s’interroge sur le sens de ce silence : c’est le premier fil du film, croisé puis dominé par un autre fil, plus puissant. L’infirmière doit guérir Elisabet, élucider un mystère sur la recommandation d’une tierce personne. Mais le médecin-médiateur disparaît, il ne reste plus que la parole et le silence qui lui répond; le jeu se dédouble, ainsi que les implications de la psychanalyse. Car on sent très nettement l’influence de Jung sur l’approche de Bergman : le transfert de personnalité se fait symboliquement au moyen d’un conflit larvé puis apparent entre la persona, le masque extérieur, et l’alma, image de l’âme intérieure. Alma et Elisabet sont duelles, dans le sens où chacune est la moitié complémentaire de l’autre. Des événements marquants (réecritures ou mémoire de scènes originaires?) font surface : la scène de la lettre, irruption de la réalité au sortir d’un monde clos où vérité et illusion s’entremêlent. Mais aussi la nuit, où Alma entend sa patiente parler et s’approcher d’elle... Les désirs secrets d’Alma se révèlent, son amour pour Elisabet, mais où se situe la frontière entre le rêve et la réalité? La crise va se fondre en un échange d’identités, dans une scène extraordinaire : Elisabet devient Alma, Alma devient Elisabet au moment où elle reconstitue le chemin de l’actrice. Se glisse au fur et à mesure du film le thème du rapport amoureux entre femmes, liant désir et haine, fascination réciproque. Les hommes ne sont acteurs que dans les récits, n’ont servi que de catalyseurs, assistants passifs, indirects, du rapprochement affectif et de la progression de l’analyse. C’est en particulier dans ces deux scènes (la nuit - l’échange) que sont sollicités les procédés de réalisation les plus complexes : mêlant les images oniriques, les images du récit et celles qui apparaissent comme réelles, ils acquièrent un fondement de signification. Car Persona est aussi une réflexion sur l’art du cinéaste et les moyens qui sont à sa disposition pour mettre en valeur des éléments de vérité qui seraient inexprimables dans le champ d’action d’un autre art. Les scènes du début, représentations cauchemardesques intégrant des détails du mécanisme de la projection cinématographique, donnent un ton singulier au film : au questionnement sur la puissance affective de l’image se mêle une volonté de capture: saisie de la voix ou de son absence. En quoi le cinéma est-il capable d’accrocher la parole et le visage de l’autre? Bergman écrit : “ Il alla de soi que le cinématographe devînt mon moyen d’expression. Je me faisais comprendre dans une langue qui ne passait pas par le langage qui me manquait, par la musique que je ne dominais pas, par la peinture qui me laissait froid. J’avais soudain une possibilité de correspondre avec le monde autour de moi dans une langue qui se parle littéralement d’âme à âme dans des tournures qui, presque voluptueusement, se soustraient au contrôle de l’intellect. ” L’écran est alors une sorte de miroir à travers lequel le spectateur peut passer pour se retrouver dans un autre monde. Bergman manifeste sa réalité concrète pour interroger le potentiel de communication du film : par exemple Elisabet, dans les scènes sur l’île, entre dans le champ et photographie la caméra, c’est-à-dire le spectateur. Dans Persona, cette immédiateté du discours cinématographique, la force des sons, des visages, de la lumière et du mouvement, apparaissent en quelque sorte dans leur vérité. On comprend comment Bergman peut écrire : “ Je sens aujourd’hui que dans Persona - et plus tard dans Cris et chuchotements - je suis arrivé aussi loin que je peux aller. Et que j’ai touché là, en toute liberté, à des secrets sans mots que seul le cinéma peut découvrir. ” Carole Widmaier. Pour la petite histoire, il faut savoir que Bergman a tourné ce film après un séjour à l’hôpital pour une double pneumonie. Il est hanté par la mort et a expliqué qu’au cours d’un accès de fièvre, il a vu les deux infirmières qui se tenaient à son chevet fusionner pour n’en faire plus qu’une. Il a dès que possible noté ces visions, très vite sous forme de scénario, et pensait intituler le film Cinématographie. Ainsi s’explique le début, série composite d’images où revient le motif de la morgue et des cadavres. Il vit ensuite la création du film comme une véritable thérapie: “J’ai dit un jour que Persona m’avait sauvé. Ce n’était pas une exagération. Si je n’avais pas trouvé la force de faire ce film-là, j’aurais sans doute été un homme fini”. On pourra consulter - Ingmar Bergman, Images, éd. Gallimard. - Peter Cowie, Ingmar Bergman, Limelight Edition.