urgence sur les depassements d`honoraires

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urgence sur les depassements d`honoraires
DOSSIER DE PRESSE
- 4 juin 2008 -
URGENCE
SUR LES DEPASSEMENTS D’HONORAIRES !
I/ Principes de fonctionnement de la Convention médicale liant
médecins conventionnés et Assurance Maladie
1234-
Les secteurs d’activité des médecins (p.2)
La convention : un contrat très favorable aux professionnels de santé (p.3)
La répartition des médecins vis-à-vis de la convention (p.3)
Les dispositions réglementaires de la convention devant permettre le contrôle des pratiques
financières des professionnels de santé (p.3)
5- Les instances conventionnelles qui assurent le fonctionnement de la convention. Le rôle des
conseillers (p.4)
6- Les autres moyens disponibles pour la régulation des anomalies financières (p.5)
7- Les caisses disposent de toutes les informations pour identifier les anomalies (p.5)
II/ Etats des lieux des dépassements d’honoraires et explications
sur leur inflation
1- Les informations recueillies par le CISS (p.6)
- Carte de France des réponses apportées par les CPAM
- Les enseignements des résultats transmis
2- Autres sources démontrant l’inflation préoccupante des dépassements d’honoraires et le
risque qu’ils font porter sur l’accès aux soins (p.12)
3- Les raisons expliquant l’inflation des honoraires (p.12)
III/ Propositions du CISS
dépassements d’honoraires
pour
encadrer
et
controler
les
1- Améliorer l’information des usagers (p.13)
2- Militer pour que les représentants des usagers siègent au sein de la section sociale des
Commissions paritaires locales (p.14)
3- Fixer un plafond conventionnel au-delà duquel les dépassements d’honoraires seraient
réputés « nuls et non avenus » (p.16)
4- Encourager le glissement du paiement à l’acte vers un « autre mode de rémunération » moins
inflationniste, plus juste et bien encadré, dans l’intérêt des (trois) parties à la convention
médicale (p.17)
Principes et fonctionnement de la
CONVENTION MEDICALE
liant médecins conventionnés et Assurance Maladie
1/ LES SECTEURS D’ACTIVITE DES MEDECINS
Pour la plupart d’entre nous, l’accès aux soins est subordonné à un remboursement
substantiel de nos dépenses de santé.
En ce qui concerne les soins ambulatoires, afin de parvenir à cet objectif, l’assurance
maladie a proposé des « contrats » (les conventions) aux professionnels de santé libéraux,
contrats par lesquels ces derniers s’engagent à respecter, notamment, les règles tarifaires.
La convention des médecins (la dernière date de 2005) comporte quatre secteurs tarifaires :
-
Le secteur 1 où l’application des tarifs conventionnels est impérative (sauf exigence
particulière du malade)1. Avec l’instauration du parcours de soins (obligation d’une
coordination par le médecin traitant), les médecins spécialistes consultés directement
peuvent dépasser les tarifs.
-
Le secteur 1+DP avec un droit permanent à dépassements (avant 1980, les
médecins disposant d’une notoriété reconnue obtenaient cette dérogation). Cette
particularité a été supprimée en 1980, mais les praticiens qui l’avaient obtenue l’ont
conservée.
-
Le secteur 2 où les honoraires ne sont plus soumis aux limites des tarifs
conventionnels. Ce secteur a été ouvert en 1980 et fermé en 1990. Mais les
praticiens qui avaient opté pour ce statut l’ont conservé. Toutefois, les médecins
possédant des titres universitaires (essentiellement des spécialistes) et s’installant
pour la première fois peuvent opter pour le secteur 2.
-
Le secteur « option de coordination » réservé aux médecins du secteur 1+DP et à
ceux du secteur 2 qui s’engagent à limiter leurs dépassements (30% des honoraires
sans dépassements et un dépassement limité à 15% des tarifs conventionnels).
Cette option n’a rencontré qu’une faible adhésion (fin 2006, 3,8% des généralistes et
3% des spécialistes du secteur 2).
3
Quant aux médecins qui n’ont pas adhéré à la convention, très peu nombreux, ils ne
subissent pas les règles conventionnelles.
NB : Tous les médecins, quel que soit leur statut et leur secteur, doivent respecter « le tact et
la mesure »2 dans la fixation de leurs honoraires.
1
L’acte médical doit avoir été accompli dans des « … circonstances exceptionnelles de temps ou de lieu dues à
une exigence particulière du malade non liée à un motif médical ».
2
Le tact et la mesure (obligation déontologique et conventionnelle) sous-entendent que les honoraires doivent
être adaptés aux ressources du patient et ne pas être excessifs. Dans un arrêt, le Conseil d’Etat avait estimé que
le doublement des tarifs conventionnels constituait un manquement à cette règle.
Dossier de presse : Urgence sur les dépassements d’honoraires – 4 juin 2008
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2/ LA CONVENTION : UN CONTRAT TRES FAVORABLE AUX
PROFESSIONNELS DE SANTE
En contrepartie du respect des règles tarifaires, la convention offre d’importants avantages à
ses adhérents (les professionnels de santé). En premier lieu, en permettant un
remboursement substantiel des honoraires médicaux, elle solvabilise une clientèle qui, à
défaut, aurait des difficultés pour se soigner. Pour les médecins du secteur 1 et ceux de
l’option de coordination pour les honoraires sans dépassements, l’assurance maladie
contribue pour 2/3 au paiement des cotisations sociales. Les conventions qui se sont
succédées ont augmenté la participation des régimes aux frais de fonctionnement de la
médecine libérale : formation permanente, permanence des soins, assurances civiles
professionnelles, rémunération des transactions magnétiques, etc…En outre, les
augmentations tarifaires ont été conséquentes au cours des dernières années : + 31,2%
pour la consultation du généraliste entre 2002 et 2008 ; + 25,2% en secteur 1 et 13,7% en
secteur 2 pour la chirurgie entre octobre 2004 et septembre 2005.
3/ LA REPARTITION DES MEDECINS VIS-A-VIS DE LA CONVENTION
Le tableau figurant ci-dessous présente la répartition des médecins en moyenne nationale à
la fin de l’année 2004 (dernière publication de la CNAMTS).
Secteurs
Secteur 1 (%) Secteur1+DP (%) Secteur 2 (%) Non Conv.
Généralistes
86
0,1
12,7
1,3
Spécialistes
61,3
1,2
37,3
0,2
Ces chiffres cachent de fortes disparités dans les régions et dans les spécialités.
Exemples :
- 30% de généralistes en secteur 2 dans l’Ile de France, mais 4% dans le Limousin ;
- 60% de spécialistes secteur 2 en Ile de France, 11,6% en Bretagne ;
- dans les spécialités : 82% des urologues sont en secteur 2, seulement 4% pour les
néphrologues.
Au sein même des départements, la répartition des secteurs tarifaires est très hétérogène,
les centres urbains concentrant davantage d’options pour le secteur 2.
4/ LES DISPOSITIONS REGLEMENTAIRES DE LA CONVENTION DEVANT
PERMETTRE LE CONTROLE DES PRATIQUES FINANCIERES DES
PROFESSIONNELS DE SANTE
Les caisses disposent, en théorie, de différents moyens pour exercer le contrôle des
pratiques financières des professionnels de santé.
C’est la convention établie par les deux parties qui énonce les règles tarifaires. Elle à valeur
réglementaire puisqu’elle est agréée par arrêté ministériel.
- Le § 4.3.détermine les secteurs et les règles tarifaires attachées à chacun d’eux (Cf. « I/
LES SECTEURS D’ACTIVITE DES MEDECINS »). Ce paragraphe stipule que ces règles
constituent « un terme essentiel de la convention ».
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- Le § 5.4. énonce les procédures à mettre en œuvre lorsque les praticiens ne respectent
pas les règles :
+ La caisse constate les anomalies à ces règles. Elle adresse un avertissement aux
intéressés.
+ Si les pratiques ne se sont pas modifiées dans le délai d’un mois, les caisses
adressent le relevé de leurs constatations aux médecins concernés. En outre, elles
communiquent le dossier aux deux sections de la Commission Paritaire Locale.
+ Les médecins disposent d’un mois pour présenter leurs observations ou être
entendus par le Directeur de la CPAM
+ La CPL émet son avis dans le même délai.
+ Si elle le juge nécessaire, la CPL peut communiquer le dossier à la « Formation
Médecins » pour complément d’information. Cette instance à un mois pour réunir les
compléments d’information.
+ La Formation Médecin émet son avis dans ce même délai.
+ A l’issue de ce délai, les Caisses décident de l’éventuelle sanction.
- Le § 5.4.1.2. définit les sanctions encourues :
+ Ces sanctions vont de la suspension du droit à pratiquer des tarifs différents (après
décision du Conseil de l’Ordre), à la mise hors convention pour une durée variable,
en passant par la suspension de la participation des Caisses au paiement des
cotisations sociales.
Ces sanctions sont susceptibles d’appel devant les Commissions Paritaires
Régionales ou Nationale.
Pourtant, les diverses institutions chargées du contrôle de l’assurance maladie (Cours des
Comptes, IGAS) ont déjà dénoncé la regrettable inefficacité des organismes d’assurance
maladie dans la régulation des honoraires médicaux.
5/ LES INSTANCES CONVENTIONNELLES QUI ASSURENT LE FONCTIONNEMENT DE
LA CONVENTION. LE ROLE DES CONSEILLERS
Les instances conventionnelles sont constituées aux niveaux nationaux, régionaux et locaux.
Il s’agit des Commissions Paritaires, qui sont composées :
-
d’une section sociale : Régime général : 3 administratifs, 3 conseillers, 2 médecins
conseils - Régime agricole : 1 conseiller, 1 médecin conseil - Régime des
indépendants : 1 conseiller, 1 médecin Conseil.
-
d’une section professionnelle : 6 généralistes, 6 spécialistes désignés par les
syndicats signataires de la convention.
Ces commissions paritaires sont associées à une Formation Médecins composée :
-
des douze professionnels formant la section professionnelle de la commission
paritaire.
-
des quatre médecins conseils siégeant à cette commission paritaire (ils détiennent 12
voix)
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Comme on peut le constater, les Conseillers sont les acteurs du processus de régularisation
des honoraires médicaux. Les sections sociales des commissions paritaires étant des
émanations des Conseils des organismes, c’est au nom desdits Conseils qu’elles agissent.
6/ LES AUTRES MOYENS DISPONIBLES POUR LA REGULATION DES ANOMALIES
FINANCIERES
L’article L. 145-1 du Code de Sécurité Sociale : Les caisses peuvent soumettre les
anomalies financières au Conseil de l’Ordre des médecins.
Au titre de l’article L. 145-2, dans le cas d’abus d’honoraires, le Conseil de l’Ordre peut
prononcer le remboursement du trop perçu à l’assuré.
7/ LES CAISSES DISPOSENT DE TOUTES LES INFORMATIONS POUR IDENTIFIER LES
ANOMALIES
Le Système National Inter Régimes (sous produit de la liquidation des prestations)
communique régulièrement aux organismes le bilan individuel de l’activité des praticiens et
de leurs pratiques financières. Les dépassements apparaissent en nombre et en montant.
Chaque professionnel de santé peut être comparé à la moyenne de son groupe. A partir de
ces informations, un tri des anomalies peut être facilement effectué.
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Etat des lieux des
DEPASSEMENTS D’HONORAIRES
et explications sur leur inflation
1/ LES INFORMATIONS RECUEILLIES PAR LE CISS
Au 3 juin 2008, sur les 82 Caisses Primaires d’Assurance Maladie qui ont été sollicitées, 22
CPAM ont apporté une réponse à la demande d’information sur les dépassements
d’honoraires médicaux qui leur a été adressée par les représentants du CISS siégeant au
sein de leur conseil.
Pour rappel, notre demande portait sur « la communication des documents suivants :
- productions statistiques décrivant le nombre de médecins coutumiers de la
pratique dite des « dépassements d’honoraires »
- productions statistiques décrivant les tarifs moyens appliqués au sein de chaque
spécialité médicale »
Les réponses apportées au CISS par les CPAM au 03 juin 2008 :
REPONSE
EXPLOITABLE
9 CPAM
PAS DE REPONSE
REPONSE
PARTIELLE
61 CPAM
8 CPAM
REPONSE
INDIGENTE
PAS DE SOLLICITATION
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5 CPAM
44 CPAM
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Les enseignements des résultats transmis :
Si le nombre trop restreint de réponses apportées par les CPAM ne nous permettent
malheureusement pas d’établir un panorama de la situation des dépassements d’honoraires
sur l’ensemble du territoire, nous pouvons malgré tout en tirer un certain nombre
d’enseignements.
DES REPONSES INDIGENTES
• A Charleville Mézières, on invite notre conseiller à consulter le site ameli.fr et à solliciter la
plateforme de service de la CPAM des Ardennes.
• Dans le Tarn, on nous renvoie au rapport IGAS, à la loi de Finance de la Sécurité Sociale, à
la plateforme « infosoins ».
• Dans le Vaucluse, aucune info. Là aussi, on nous oriente vers le rapport IGAS et vers le
service téléphonique de la CPAM.
• A Tours, Indre et Loire, le directeur de la CPAM estime que la base légale de notre saisine
est incorrecte et qu’elle ne nous ouvre pas l’accès aux données requises… Cela étant, « la
Direction de la caisse est particulièrement vigilante quant au respect des textes ».
• A Strasbourg, un observatoire des dépassements d’honoraires est en cours de constitution,
mais en attendant, aucun résultat ne nous sera communiqué.
Ces réponses en disent long sur la reconnaissance des usagers en qualité de conseillers. Le
site internet de l’assurance maladie, le rapport de l’IGAS ainsi que la LFSS recèlent des
informations pertinentes mais largement insuffisantes pour analyser localement la pratique des
dépassements d’honoraires. Ces renvois à des vecteurs d’information destinés au grand public
ne peuvent pas nous satisfaire. Les représentants d’usagers siègent dans les conseils des
CPAM et, pour exercer leurs prérogatives, ils doivent pouvoir accéder à toutes les informations
disponibles collectées par les caisses d’assurance maladie.
DES REPONSES TROP PARTIELLES
Certaines caisses ne nous ont communiqué que les résultats des pratiques en secteur 1
(Côtes-d’Armor, dans l’Ain, à Chambéry, à Lyon). Intéressant quand on sait que les
praticiens exerçant dans ce secteur n’ont le droit de facturer des dépassements qu’à titre
exceptionnel (pour exigences de temps et de lieu du malade) !
En Saône-et-Loire, la CPAM nous envoie un dossier de 7 pages pour décrire la pratique des
généralistes secteur 1 et des chirurgiens, tous secteurs confondus.
A Montbéliard, la réponse de la caisse tient en 2 paragraphes. On ne peut y lire que le
pourcentage des actes qui sont facturés avec un dépassement. Rien sur le montant moyen des
dépassements et silence sur le nombre de médecins coutumiers de cette pratique.
Dans les Deux Sèvres, les résultats présentent un intérêt relatif car le tableau joint ne permet
pas de faire la distinction des tarifs en fonction du secteur conventionnel. Les chiffres
correspondant à des moyennes, on comprend facilement que l’interdiction des dépassements
en secteur 1 « édulcore » la moyenne globale : les faibles dépassements en secteur 1 peuvent
en effet venir compenser la moyenne des montants des dépassements facturés par les
praticiens du secteur 2.
A Valence, dans la Drôme, on nous envoie plusieurs tableaux dont les entrées nous
renseignent sur la pratique des médecins du secteur 1, qu’ils soient généralistes ou spécialistes,
en fonction de la nature des actes (cliniques ou techniques). Ces chiffres nous permettent de
mesurer les dépassements hors D.A (dépassements autorisés).
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DES REPONSES EXPLOITABLES
La caisse de Longwy, en Lorraine a été la première caisse à accéder à notre demande. Hyper
réactive puisque sa réponse nous parvenait 72 heures après envoi de la requête par notre
conseiller. Sous la forme d’un tableau unique, nous pouvons lire le montant des dépassements
des médecins conventionnés en euros par secteur d’activité.
Les résultats transmis par la CPAM de Belfort rendus sous la forme de plusieurs tableaux
renseignent le nombre de spécialistes, secteur par secteur, dont plus de 10% des actes
comportent des dépassements, ainsi que la répartition de ces spécialistes par rapport à leur
taux de dépassements.
Le directeur de la CPAM du Val-de-Marne nous a communiqué plusieurs feuillets faisant
apparaître un tableau et des graphiques qui illustrent le montant moyen des dépassements pour
l’ensemble des actes des généralistes et des spécialistes de secteur 2.
Les champs sont renseignés spécialité médicale par spécialité. Ils sont clairs et permettent
également de mesurer l’évolution des tarifs entre 2006 et 2007.
Le Service Relation Partenaires Santé de la CPAM de Pau nous communique deux tableaux, le
premier concerne le premier trimestre de l’année 2008, pour les médecins du secteur 2. Ce
tableau réserve 2 champs distincts pour les actes cliniques et les actes techniques. Le second
chiffre les dépassements des médecins des secteurs 1 et 2 pour 2006. Ce deuxième tableau qui
brasse les données des deux secteurs ne nous donne pas l’occasion d’évaluer l’ampleur des
dépassements secteur par secteur en 2006.
La CPAM de Haute-Vienne a elle aussi communiqué une réponse en plusieurs volets qui nous
permettent de distinguer les pratiques en secteur 1 et en secteur 2, selon le type d’actes (actes
techniques ou consultations), spécialité par spécialité. Une colonne donne la proportion de
praticiens ayant pris des dépassements, un autre chiffre les montants totaux des
dépassements.
En Corrèze, un courrier de trois pages nous donne des détails, spécialité par spécialité, secteur
par secteur, sur le nombre d’actes facturés avec dépassements sans motif ainsi que sur le
montant des dépassements (fourchette).
La réponse de la CPAM du Val-d’Oise consiste en un texte divisé en plusieurs paragraphes. Le
premier porte sur la répartition des médecins spécialité par spécialité, secteur par secteur, en
2006 et en 2007. Le suivant précise le pourcentage des dépassements d’honoraires pris par
l’ensemble des médecins des secteurs 1 et 2.
Elle se distingue des autres caisses en consacrant une partie de son analyse aux actions qu’elle
réalise à l’encontre des médecins spécialistes, secteur 1 qui « pratiquaient de façon abusive des
dépassements d’honoraires ».
La CPAM de la Meuse se singularise par la consistance de sa réponse : un « mémoire » de
plus de 100 pages avec des annexes qui font un point précis sur « les dépassements
d’honoraires des médecins libéraux meusiens en 2004, 2005 et 2006 pour les régime général
hors sections locales mutualistes ». Ces chiffres résultent d’une étude approfondie réalisée par
une caisse engagée dans une « démarche d’observation » qui a « souhaité mesurer les freins
financiers que les dépassements d’honoraires peuvent constituer dans l’accès aux soins pour
les assurés sociaux ». Cette initiative s’inscrit dans la mission de régulation d’assurance
maladie et devrait être, selon nous, développée dans toutes les caisses. Cette réponse, qui
nous paraît marginale, est bien celle que nous nous attendions à recevoir de la part de toutes
les CPAM contactés.
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La caisse du Gard nous transmet des résultats particulièrement fouillés, sur plusieurs pages de
graphiques commentés. La lecture des résultats se fait par secteur conventionnel, par spécialité
et par type d’établissement (clinique et hôpital). La CRAM du Languedoc-Roussillon ayant été
citée dans le rapport de l’IGAS parmi les caisses les plus impliquées dans le contrôle des
professionnels, nous ne sommes pas surpris par la qualité de la réponse de la CPAM du Gard.
LE SECTEUR 1, TOUJOURS GARANT DU SECTEUR OPPOSABLE ?
Nous posons cette question, provocante à dessein, pour mettre l’accent sur des pratiques
itératives qui suscitent particulièrement notre inquiétude.
En effet, à la lumière des résultats reçus, il apparaît que les médecins exerçant dans le cadre
conventionnel du secteur 1 soient nombreux à pratiquer des dépassements d’honoraires,
parfois même en contravention des prescriptions de la convention médicale.
Quand ils exercent un droit, exceptionnel, qui leur est accordé par la convention médicale,
personne ne s’y oppose. En revanche, quand cette option de dépassement est dévoyée et
utilisée non plus pour répondre à une exigence particulière du patient mais pour augmenter les
revenus de l’activité médicale, nous dénonçons un détournement de droit.
Ces situations, quand elles sont objectivées, en Saône-et-Loire par exemple, sont
inacceptables tant elles compromettent l’accès aux soins des usagers.
La caisse primaire d’assurance maladie le déplore elle-même, « 71,5% des dépassements
pratiqués par les médecins du secteur 1 ne sont pas autorisés ».
La situation à Belfort nous laisse dubitatifs : les résultats de la caisse font apparaître que deux
spécialistes en secteur 1 pratiquent des dépassements dont les montants sont équivalents au
montant du tarif opposable. Exigence du patient facturé à 25 euros, il fallait vraiment qu’elle soit
particulière ! Sérieusement, on voit bien ici que cette option, destinée à être utilisée avec
parcimonie, ouvre une boîte de Pandore à certains professionnels qui cherchent à majorer le
coût de leurs consultations.
Sur l’année 2007, les dépassements d’honoraires rapportent gros pour certains spécialistes du
secteur 1. Citons, à titre d’exemple, le cas des dermatologues à Longwy (Lorraine) qui
totalisent chacun près de 8400 euros de dépassements en moyenne sur 2007. Dans cette
même ville, les rhumatologues pratiquent en moyenne près de 5000 euros de dépassements !
En Corrèze, au cours du 1er trimestre 2008, 2338 actes réalisés par les généralistes ont déjà fait
l’objet d’un dépassement sans motif. Le montant de ces dépassements peut atteindre 542
euros ! Nous aimerions connaître les raisons invoquées par le généraliste qui applique un tel
tarif au mépris de toute autorisation.
En pneumologie, ce sont 2,7% des actes qui sont pratiqués avec un dépassement non autorisé,
7% en stomatologie. « Non autorisés », la formule utilisée par l’assurance maladie est impropre,
disons plutôt que certains médecins facturent des dépassements en toute illégalité.
Dans la Drôme également, plus de 96% des généralistes facturent des dépassements
d’honoraires non autorisés. Les spécialistes de dermatologie, gynécologie obstétrique, gastroentérologie, oto-rhino laryngologie, pneumologie et beaucoup plus encore, ont TOUS cette
pratique, interdite, faut-il le rappeler…
Qui plus est, ces dépassements sont, dans certains cas élevés, souvent compris entre 5 et 10
euros pour les généralistes et supérieurs à 30 euros pour les cardiologues et neurologues
notamment.
Dans la Meuse, pour les visites à domicile du patient, le nombre de généralistes pratiquant des
dépassements d’honoraires compris entre 1 et 5 euros est passé de 26 en 2004 à 98 en 2006.
Pour les consultations, 40 généralistes facturaient des dépassements de 1 à 5 euros en 2004,
ils étaient 106 en 2006.
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Les gynécologues, ophtalmologues et psychiatres du secteur 1, en 2006, tous actes confondus,
sont nombreux à pratiquer des actes soumis à dépassements. Il semblerait que cette
observation soit une constante dans toutes les CPAM. Là où les chiffres nous troublent, c’est en
ce qu’ils font état du nombre toujours plus important de dépassements réalisés sans
autorisation par rapport au nombre des dépassements autorisés. C’est donc « sans motifs » que
ces spécialistes effectuent la plupart de leurs dépassements !
EN SECTEUR 2, LA DERIVE EST CONTINUE
Dans le Gard, on nous informe que les dépassements d’honoraires peuvent atteindre 325 euros
par acte technique réalisé par un neuropsychiatre de secteur 2 exerçant en clinique. D’ailleurs,
dans les cliniques du Gard, des dépassements sont systématiquement facturés aux patients. La
chirurgie cancérologique détient un record : les dépassements d’honoraires pour les actes
pratiqués en clinique ont augmenté de 64% entre 2005 et 2007 alors qu’ils ont progressé de 2%
pour la chirurgie.
Dans le Val-de-Marne, la précision des réponses données nous permet d’identifier certaines
spécialités gloutonnes comme la gynécologie obstétrique (40 euros de dépassement moyen), la
gynécologie médicale (26 euros), la pédiatrie (plus de 19 euros et la stomatologie (près de 60
euros), l’oto-rhino-laryngologie (près de 26 euros) et la psychiatrie générale (près de 26 euros).
Les spécialités chirurgicales forment un ensemble solidaire à plus de 66 euros, pouvant aller
jusqu’à 195 euros.
A Longwy, la liberté d’honoraires est très largement exercée par les professionnels du secteur
2 : un stomatologue facture des dépassements qui avoisinent 286 000 euros sur 2007, un
dermatologue totalise plus de 27 000 euros sur la même année. Nous devons nous interroger
face à de telles « anomalies » : ces pratiques ne sont-elles pas constitutives d’un abus de
droit ? En fonction de quels critères les tarifs sont-ils fixés par les médecins ?
Dans le Val-d’Oise, il faut savoir, que la part des dépassements d’honoraires pour les ORL est
de 50 à 60% des honoraires conventionnels, 60 à 70% pour les rhumatologues, les
dermatologues et les gynécologues et de 70 à 80% pour les chirurgiens, les anesthésistes, les
ophtalmologues, les pédiatres et les psychiatres.
Les chiffres, touts récents, qui nous ont été transmis par la CPAM de Pau, montrent que le
montant moyen des dépassements s’élève à 99 euros pour les gynéco-obstétriciens, 130 euros
pour les urologues et 42 euros pour les ORL.
Deux types de praticiens attirent toute notre attention pour ce qui concerne le montant total des
dépassements réalisés au premier trimestre 2008 : les généralistes qui encaissent plus de 95
000 euros pour leurs seules consultations ainsi que les ophtalmologues qui, sur environ 2750
actes cliniques, dépassent pour plus de 66 000 euros.
En Corrèze, le montant des dépassements s’envole, aidés par la pratique de certains
ophtalmologues (jusqu’à 100 euros), des cardiologues (jusqu’à 140 euros), des stomatologues
(jusqu’à 400 euros), et de beaucoup d’autres.
LE PROBLEME SPECIFIQUE DE LA CHIRURGIE
Dans le Gard il apparaît que, sur 2007, aucun chirurgien général n’exerçait en secteur 1, que ce
soit à l’hôpital ou en clinique. On devine combien l’absence d’offre de soins à tarif opposable
limite l’accès aux soins des populations précaires et modestes.
Dans le Val-de-Marne, nous l’avons souligné plus haut, la spécialité chirurgicale forme un
peloton où les praticiens ont l’habitude de pratiquer d’importants dépassements.
Dossier de presse : Urgence sur les dépassements d’honoraires – 4 juin 2008
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A titre d’exemple, en moyenne, le dépassement moyen en chirurgie maxillo-faciale est de 107
euros, 114 euros en chirurgie vasculaire, 84 euros en chirurgie viscérale. Pour la chirurgie
plastique reconstructrice et esthétique, le dépassement moyen d’élève à 196 euros et a
progressé de plus de 22% entre 2006 et 2007.
En Haute-Vienne, le montant moyen du dépassement perçu par les chirurgiens est de 106
euros pour les actes techniques.
En Saône-et-Loire, où la CPAM nous a fourni des résultats relatifs aux montants moyens des
dépassements pour chaque spécialité chirurgicale, nous pouvons citer deux exemples : 95
euros en chirurgie thoracique et cardiovasculaire, 63 euros en chirurgie orthopédique et
traumatique.
Pour conclure, nous tenons à souligner que dans le département de la Meuse, les
dépassements d’honoraires sont maîtrisés, tant en volume que dans leur progression depuis
2004.
Les chiffres, extrêmement détaillés, ne montrent aucune déviance avérée dans les pratiques
tarifaires des médecins.
La maîtrise des honoraires est ici inscrite dans une véritable démarche de fond initiée par la
caisse depuis plusieurs années. Ce volontarisme tient-il de la personnalité du directeur ? De la
bonne organisation des services ?
Ce dossier statistique constitue le point de départ de sa mission de régulation et c’est à partir de
ce constat que le conseil a souhaité sensibiliser les médecins libéraux « tout en n’écartant pas
les éventuelles actions contentieuses nécessaires ».
L’implication de la CPAM de la Meuse, son inclinaison à sanctionner les abus, doivent avoir des
vertus dissuasives qui préviennent les médecins des suites auxquelles ils s’exposeraient en cas
de dépassements abusifs.
Cette situation démontre qu’une caisse primaire d’assurance maladie possède certains pouvoirs
pour réguler les pratiques des médecins et que le déploiement de ses moyens est de nature à
générer des résultats satisfaisants.
C’est donc possible !
Le but de ces contrôles n’est pas d’assouvir un besoin de répression mais consiste à
sauvegarder le principe supérieur de l’accès aux soins pour les assurés sociaux.
Dossier de presse : Urgence sur les dépassements d’honoraires – 4 juin 2008
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2/ AUTRES SOURCES DEMONTRANT L’INFLATION PREOCCUPANTE DES
DEPASSEMENTS D’HONORAIRES ET LE RISQUE QU’ILS FONT PORTER SUR
L’ACCES AUX SOINS
La masse des dépassements progresse vivement. Entre 1980 et 2004, elle augmente de 9%
par an en secteur 1 et de 14,1% en secteur 2, sous le double effet d’une augmentation du
nombre de spécialistes en secteur 2 (30% en 1985 et 40% en 2005) et d’une majoration du
montant des dépassements (spécialistes du secteur 2 : 25% en 1990, 43% en 2004)3.
Sachant que les taux moyens de dépassements s’élèvent avec la proportion des médecins
en secteur 2, la disparité règne sur ce plan également entre les spécialités4. Ex : 181% pour
les neurochirurgiens, 87% pour les chirurgiens, 86% pour les gynécologues.
Là aussi, les pratiques individuelles sont très différentes. Ex : pour la moitié des chirurgiens
du secteur 2, le taux de dépassement est au maximum de 49%, mais 10% d’entre eux
présentent un taux supérieur à 229 %.
Les dépassements tarifaires représentent 6 Milliards € en 2006 (médecins 2 Mds +
dentistes 4 Mds).
Les dépassements n’étant pas du tout pris en charge par l’Assurance Maladie, les 2/3 de ces
montants pèsent directement sur le budget des ménages après intervention des organismes
d’assurance complémentaire5.
Aussi, de façon encore plus marquée dans certaines régions (Ile-de-France, PACA…) et en
général dans les spécialités, notamment pour les soins onéreux (chirurgie en particulier), les
dépassements tarifaires constituent désormais un obstacle majeur pour l’accès aux
soins.
3/ LES RAISONS EXPLIQUANT L’INFLATION DES HONORAIRES
Plusieurs facteurs concourent à l’inflation des honoraires médicaux. L’IGAS les cite
dans son étude de 2007 :
-
L’inertie des organismes d’assurance maladie dans la répression des anomalies
tarifaires.
-
Les carences de l’assurance maladie dans l’information des assurés sociaux.
-
Le non respect par les médecins des obligations d’information sur les honoraires
pratiqués.
-
La complexité du dispositif tarifaire de la convention que le Conseil de l’Ordre a
qualifié de « labyrinthe ».
-
La difficulté pour les usagers de résister aux exigences financières de leur médecin.
-
L’absence de réelle régulation qu’instaure la liberté des honoraires (éventuellement
les abus) dans la norme.
3
Carnet stat. CNAMTS, 2006
Rapport IGAS Les dépassements d’honoraires médicaux, n°RM 2007-054P, avril 2007.
5
DRESS étude et résultats, n°490, mai 2006, « Les contrats d’assurance maladie complémentaire, une typologie
en 2003 »
4
Dossier de presse : Urgence sur les dépassements d’honoraires – 4 juin 2008
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Propositions du CISS pour
ENCADRER ET CONTROLER
LES DEPASSEMENTS D’HONORAIRES
1. AMELIORER L’INFORMATION DES USAGERS
Le rapport de l’IGAS postule pour l’amélioration de l’information des assurés à propos,
notamment, des tarifs des consultations, estimant, au regard des ses constations, que
l’assurance maladie néglige cet aspect de sa mission.
D’autre part, l’information à la charge des praticiens est largement perfectible compte tenu
des manquements à l’obligation d’établir un devis et de l’opacité de certaines pratiques
tarifaires.
ƒ D’après vous, combien d’assurés sociaux sont à même de définir secteur 1 et secteur 2,
tarifs conventionnels et honoraires libres, dépassements d’honoraires et dessous de
table ?
ƒ Combien de patients connaissent les possibilités de recours contre des tarifs irréguliers ?
ƒ Plus grave, combien de malades renoncent à dénoncer leur médecin parce qu’ils craignent
pour la qualité des soins qui leur seront administrés par suite ?
Il est clair que la méconnaissance des usagers amplifie leur subordination vis-à-vis des
médecins et ce déséquilibre survit à la loi Kouchner, renforcée qu’il est par des usages
intériorisés par les parties au contrat médical.
Le médecin, parce qu’il a fait beaucoup d’études, estime que son droit à dépassement se
justifie pleinement, au mépris des règles conventionnelles, des prescriptions déontologiques
et réglementaires. Le patient, de son point de vue de malade craignant pour sa santé,
consent souvent à honorer des tarifs qui exploitent des croyances, infondées pour le reste.
Certaines personnes n’hésitent pas à parcourir plusieurs centaines de kilomètres pour subir
une opération courante pratiquée par le ponte parisien qui use et abuse de sa notoriété. En
ont-elles pour leur argent ? Quelle preuve du rapport qualité-prix ?
Nous sommes en mesure d’affirmer que les caisses d’assurance maladie font l’économie de
véritables campagnes d’information pourtant nécessaires à un accès aux soins éclairé. Nous
refusons de croire à la connivence des caisses, préférerons penser qu’il s’agit plus de
désintérêt, peut-être de négligence.
Partant de là, nous proposons deux voies d’amélioration de l’information des
assurés :
Proposition 1. Valoriser le rôle d’information dévolu aux Caisses Primaires
d’Assurance Maladie
Redéfinir avec précisions les rôles des Caisses primaires d’Assurance Maladie dont une des
préoccupations majeures doit être l’information des usagers à côté de sa mission de
remboursement des soins.
Dossier de presse : Urgence sur les dépassements d’honoraires – 4 juin 2008
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Plusieurs informations doivent être mises à disposition des usagers :
- noms des médecins exerçant en secteur 1
- tarifs des médecins du secteur 2
- voies de recours en cas d’abus constatés
- références universitaires des praticiens.
Il appartient aux CPAM qui collectent ces éléments de les rendre accessibles au public et
pas seulement par le truchement d’ « ameli.fr » mais aussi par des campagnes d’affichage
par exemple.
Proposition 2. Faire en sorte que nos associations accompagnent mieux les usagers
dans l’exercice de leur droit de recours.
En vertu de l’article R4126-1, modifié par le décret du 13 avril 2007, les associations de
défense des droits des patients peuvent déposer plainte auprès du conseil national ou du
conseil départemental de l’ordre.
Cette disposition du code de la santé publique qui ouvre un droit de recours aux
associations, n’est, à ce jour, pas ou peu mis en œuvre.
L’inertie des juridictions garantes du respect des droits des assurés sociaux et des malades
en particulier nous oblige maintenant, en notre qualité de représentants des usagers, à
réagir en usant des prérogatives qui nous sont reconnues.
Les personnes que nous représentons doivent savoir que leurs droits ont une valeur et que
toute atteinte doit être dénoncée. Et ce d’autant plus qu’il existe un arsenal législatif et
réglementaire pour réguler les dépassements d’honoraires.
En ce sens, nous avons le projet de concevoir une fiche pratique dans laquelle nous
détaillerons les modalités de saisine des instances qui ont à contrôler les tarifs médicaux au
regard du droit positif.
Cette fiche a deux objectifs :
• Son contenu doit éclairer les usagers du système de santé, cela pour les informer de leur
droit de recours dés lors qu’un dépassement d’honoraire entrave leur accès aux soins en
raison de son caractère abusif,
• Elle invitera les usagers à se rapprocher d’une association de défense des droits des
patients, le CISS en particulier, afin d’y trouver un soutien dans la démarche du recours
devant le conseil de l’ordre.
2. MILITER POUR QUE LES REPRESENTANTS DES USAGERS SIEGENT AU
SEIN DE LA SECTION SOCIALE DES COMMISSIONS PARITAIRES LOCALES.
Théoriquement, lorsque la caisse constate des anomalies, elle adresse un avertissement
aux intéressés. Si les pratiques ne sont pas modifiées dans un délai d’un mois, les caisses
adressent le relevé de leurs déclarations aux médecins concernés. En outre, elles
communiquent le dossier aux deux sections de la Commission Paritaire Locale.
Les médecins disposent d’un mois pour présenter leurs observations ou être
entendus par le directeur de la CPAM. La CPL émet son avis dans le même délai. Si
Dossier de presse : Urgence sur les dépassements d’honoraires – 4 juin 2008
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elle le juge nécessaire, la CPL peut communiquer le dossier à la « formation
médecins » pour complément d’informations. Les Caisses décident, in fine, de
l’éventuelle sanction. Ces sanctions vont de la suspension du droit à pratiquer des
tarifs différents, après décision du Conseil de l’Ordre, à la mise hors convention pour
une durée variable, en passant par la suspension de la participation des Caisses au
paiement des cotisations sociales. Ces sanctions sont susceptibles d’appel devant
les Commissions Paritaires Régionales ou Nationale, comme l’indiquent les
dispositions règlementaires6. Les CPL sont composées d’une section sociale comprenant
des administratifs, des conseillers et des médecins conseils et d’une section professionnelle.
Proposition 3. Les usagers doivent se voir reconnaître une place au sein de ces
commissions qui veillent au respect des engagements conventionnels souscrits par
l’assurance maladie et la profession médicale.
Rappelons que depuis la loi de 2004, les représentants d’usagers que vous êtes sont invités
à siéger au sein des conseils et dans plusieurs commissions des CPAM. Pourtant, bien
qu’éligibles, vous restez exclus de la Commission Paritaire Locale.
La présence de trois conseillers étant requise pour constituer la section sociale de la CPL,
nous jugeons nécessaire d’imposer la présence d’un conseiller représentant des usagers a
minima parmi le collège des trois conseillers (issu de l’UNAF, de la FNATH ou du CISS).
Ainsi, le quorum de la section sociale de la CPL devrait requérir la présence obligatoire d’un
conseiller issu des associations de représentants d’usagers, a côté des deux conseillers
issus des syndicats d’employeurs et des syndicats d’employés.
Proposition 4. De façon plus ambitieuse, les usagers réitèrent leur volonté de siéger
au conseil de l’UNCAM.
La mission de ce conseil de l’UNCAM est triple :
• Conduire la politique conventionnelle
• Définir le champ des prestations admises au remboursement
• Fixer le taux de prise en charge des soins
Proposition 5. Le CISS demande à devenir partie à la convention médicale dans la
mesure où cette convention est opposable aux usagers qu’il représente et qu’elle
produit des effets juridiques sur eux.
N’oublions pas que les cotisations des assurés / usagers conditionnent les termes de la
négociation débouchant sur la fixation d’un tarif opposable. C’est à la fois en qualité de
payeur et de consommateur de soins que nous revendiquons un droit à participer à ces
concertations. Ne nous parle-t-on pas de « responsabilisation des patients » ? Un patient
responsable, ce n’est pas celui vers qui l’on transfert la charge de ses prestations médicales
ou de ses médicaments. Un patient responsable, c’est celui à qui l’on confie un véritable rôle
de partie prenante et à qui l’on octroie un pouvoir de contrôle à la hauteur de sa part
contributive dans le système de santé.
6
« La Commission Paritaire Locale assure le bon fonctionnement des dispositifs conventionnels et s'efforce de
régler les difficultés d'application. Elle conduit toute analyse concernant l'évolution de la consommation des soins
et les conditions d'accès aux soins des assurés. Elle est responsable de la mise en œuvre de la maîtrise
médicalisée et établit un contrat local d'objectifs. » (ameli.fr)
Dossier de presse : Urgence sur les dépassements d’honoraires – 4 juin 2008
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3. FIXER UN PLAFOND CONVENTIONNEL AU-DELA DUQUEL LES
DEPASSEMENTS D’HONORAIRES SERAIENT REPUTES « NULS ET NON
AVENUS »
Le CISS plaide pour la généralisation de l’option de coordination figurant dans la convention
du 12 janvier 2005 et qui prévoit le respect des tarifs opposables pour les actes cliniques
quand le patient consulte dans le cadre du parcours de soins, dans les situations d’urgence
ou pour les patients de moins de 16 ans. En ce qui concerne les actes techniques, le
praticien adhérent à l’option de coordination « s’engage à pratiquer avec tact et mesure des
dépassements maîtrisés, pour le patient qui entre dans le parcours de soins coordonnées,
applicables par acte facturé et plafonnés à 15% des tarifs opposables. Ce plafond sera, le
cas échéant, déclinable par spécialité et par région, dans le respect de l’encadrement
national. »
Outre l’engagement de tarifs maîtrisés par acte facturé, le praticien s’engage à respecter,
sur l’ensemble de son activité mais en distinguant consultations et actes techniques, un ratio
honoraires sans dépassements sur honoraires totaux qui devra être égal ou supérieur à
30%.
Toutefois, nous souhaitons l’abandon définitif du recours à la notion trop sujette à
appréciation de « tact et mesure ». Si nous soutenons l’idée du plafonnement des tarifs,
nous la voulons inscrite dans un décret en conformité duquel la convention médicale devra
être passée.
L’encadrement des tarifs médicaux, « par le haut » ne contentera pas la profession mais
l’inertie du régulateur, permettant trop d’abus, ne laisse pas beaucoup d’autres choix si l’on
s’attache à maintenir une offre de soins accessible à tous.
Cette restriction réglementaire, pour être suivie d’effets, devra être associée à un dispositif
de contrôle suffisamment efficace pour dissuader les pratiques déviantes, punitif juste ce
qu’il faut pour sanctionner les abus.
A titre de sanction, nous proposons :
Proposition 6. Une « restitution systématique du trop perçu » aux usagers.
Ces derniers sauront, grâce à l’information délivrée plus haut, que la pratique des
dépassements est encadrée par des normes claires.
Proposition 7. Un procès verbal adressé systématiquement à tout professionnel
« contrevenant» puisque transgressant un texte réglementaire.
La verbalisation avec amende forfaitaire enjointe pourrait être modélisée sur le traitement de
la délinquance routière. Nous pourrions en attendre autant d’effets salutaires… car nous
savons tous combien l’intimidation financière permet d’ordonner les pratiques et les usages.
Proposition 8. Un « déconventionnement » systématique de tout praticien qui, en
dépit des sanctions dont il a pu faire l’objet, persiste à pratiquer des dépassements
d’honoraires supérieurs à la limite autorisée.
Cette modalité est déjà prévue, nous l’avons vue, dans les cas où les Caisses Primaires
d’Assurance Maladie ont pu constater des abus. Ce qui change, c’est la marge
d’appréciation : nous la voulons réduite à son plus simple appareil. En effet, la sanction est
prononcée et adressée sans contradictoire, comme si le professionnel avait été « flashé » en
flagrant délit de facturation abusive. Ce n’est qu’après coup, comme le conducteur interpellé
Dossier de presse : Urgence sur les dépassements d’honoraires – 4 juin 2008
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à 160 km/heure, qu’il pourra faire entendre ses contestations auprès des instances de la
CPAM compétente. Là, une marge d’appréciation pourra être reconnue au juge du recours.
Quoi qu’il en soit, la notion de « tact et mesure » ne sera plus de nature à cautionner les
dépassements excessifs. Le médecin devra justifier sa pratique sur la base de faits concrets
qui pourront être versés au dossier pour une étude rigoureuse par la commission
comprenant des représentants d’usagers.
Proposition 9. La suspension de la prise en charge, par l’assurance maladie, des
cotisations sociales du professionnel qui ne respecte pas ses engagements
conventionnels
Dés lors qu’un médecin s’abstient de respecter ses engagements conventionnels,
l’assurance maladie est en droit de ne pas honorer ses propres obligations et notamment
celle qui consiste à prendre en charge, pour partie, les charges sociales des médecins.
Si la caisse négligeait l’exercice de son droit de suspension alors que l’inexécution fautive de
la convention médicale est constatée, on pourrait imaginer la possibilité d’une action
subrogatoire qui procurerait la qualité à agir aux représentants d’usagers pour contraindre
les médecins à respecter leurs obligations ou à réparer le préjudice subi par le versement de
dommages- intérêts.
Ce mécanisme propre au droit des obligations permettrait de pallier à l’inaction des caisses
qui, nous l’avons vu, ont tendance à abdiquer face à des pratiques professionnelles qui,
d’année en année, méprisent un peu plus leurs obligations.
Le coût des dépassements d’honoraires, faut-il le rappeler, ne reposent pas sur l’assurance
maladie qui n’a à rembourser les soins qu’à hauteur du tarif opposable. L’intérêt financier à
réguler ces pratiques ne mobilisent pas les caisses ; probablement ne se sentent-elles pas
concernées par cette inflation qui pèse directement sur les ménages.
Si nous souhaitions faire du mauvais esprit, nous irions même jusqu’à penser que
l’augmentation des tarifs par la voie des dépassements d’honoraires tait, d’une certaine
façon, les revendications des médecins quant à la revalorisation du tarif de base.
L’assurance maladie, en cautionnant l’évolution du coût des honoraires à la charge des
ménages, accorde de facto un avantage aux médecins d’autant plus facilement qu’elle
n’aura pas à le solvabiliser…
En actionnant le mécanisme subrogatoire, les représentants d’usagers, en la personne
morale de l’association partie à la convention médicale, pourraient se substituer à la caisse
« démissionnaire » et ainsi veiller efficacement à la régularité des pratiques médicales au
regard des engagements souscrits.
4. ENCOURAGER LE GLISSEMENT DU PAIEMENT A L’ACTE VERS UN
« AUTRE MODE DE REMUNERATION » MOINS INFLATIONNISTE, PLUS JUSTE
ET BIEN ENCADRE, DANS L’INTERET DES (TROIS) PARTIES A LA
CONVENTION MEDICALE
Pour toutes les raisons évoquées, nous estimons que le paiement à l’acte des médecins est
un système qui, s’il convoque le principe de liberté pour l’installation des médecins, la
fixation des honoraires et le choix du praticien pour les malades, présente des « anomalies »
que nous ne pouvons plus supporter, moralement et financièrement.
La généralisation de l’option de coordination est un moyen de réguler le coût et la répartition
de l’offre de soins. Il y en a d’autres.
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Proposition 10. Commençons par forfaitiser l’activité pluridisciplinaire organisée pour
prendre en charge les maladies chroniques…
Pour ce qui concerne la prise en charge des maladies chroniques, nous encourageons
l’élaboration de plans de soins annuels coordonnés. Seuls les opérateurs publics ou
privés garantissant un mode d’exercice pluridisciplinaire seraient éligibles aux appels d’offre
du fonds national de développement des actions d’accompagnement, d’aide à l’observance
et d’éducation thérapeutique.
Le mode de rémunération de cette activité pluridisciplinaire serait forfaitaire, proportionnée
aux exigences de la prise en charge et fonction de l’enveloppe disponible.
Proposition 11. … pour décliner, à l’avenir, d’autres modes de rémunération globale et
prédéfinie par type de pathologie ou par type de patient, le cas échéant.
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