Je souhaiterais intervenir, en tant que professeur de lettres

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Je souhaiterais intervenir, en tant que professeur de lettres
Je souhaiterais intervenir, en tant que professeur de lettres classiques, sur la réforme du collège envisagée par le ministère pour la rentrée 2016, et tout particulièrement sur la situation qu’elle réserve au latin et au grec.
Cette réforme fait apparaître que l’Education nationale a décidé de supprimer le latin et le grec comme enseignements à part entière à la rentrée 2016.
Le ministère affirme que suite à la réforme, les langues anciennes seraient « renforcées » , et que « l’excellence sera ainsi mise à la portée de tous ».
En réalité, c’est le contraire qui se produirait si la réforme était mise en place.
Que prévoit la réforme ?
1) une initiation aux langues anciennes dans le cadre du cours de français Mais ceci est illusoire car la plupart des professeurs de français sont des professeurs de lettres modernes, qui n’ont pas été formés pour enseigner le latin, et encore moins le grec.)
2) des « Enseignements pratiques interdisciplinaires » autour de différentes thématiques, dont l’une s’intitule « Langues et cultures de l’Antiquité »
Mais cet enseignement aurait peu de chance d’être mis en place car il devrait se dérouler pendant les heures de cours des autres disciplines, puisque le latin et le grec ne figurent pas parmi les disciplines enseignées, et ne pourrait de toute façon aborder l’Antiquité que de façon très superficielle.
3) un « enseignement de complément » en latin et en grec que pourraient suivre tous les élèves souhaitant approfondir leurs connaissances
Mais la réforme ne prévoit aucun financement pour cet enseignement, et d’ailleurs il ne figure même pas dans les nouveaux programmes qui accompagnent cette réforme !
Cette réforme aboutirait donc de facto à la disparition du latin et du grec.
La suppression des langues anciennes répond en fait à une logique comptable, car elle permet de contribuer au financement de la réforme.
Elle émane aussi de certaines idéologies qui considèrent que les langues anciennes sont un enseignement encore réservé à l’élite sociale, qu’il faut donc supprimer. Or elles sont proposées à tous, y compris dans les collèges les plus défavorisés où de nombreuses expériences montrent leurs effets positifs. Lutter pour plus de justice sociale, cela consisterait plutôt à encourager l’étude des langues anciennes dans ces établissements pour faciliter l’accès des élèves à la culture, au lieu de les supprimer au prétexte qu’elles augmentent la réussite des élèves déjà favorisés par leur origine sociale.
Je souhaiterais justifier la nécessité de maintenir les langues anciennes comme enseignements à part entière, tel qu’ils existent aujourd’hui sous forme d’options :
1 Les langues anciennes sont le fondement de notre langue française.
2 Le latin est à l’origine de 80% des mots français (et de 60% des mots anglais) et son étude permet d’enrichir notre vocabulaire.
3 L’étude du latin induit un raisonnement grammatical qui mène à la maîtrise la grammaire française.
4 La maîtrise de la langue française est la condition première de la réussite scolaire et de l’insertion sociale.
5 La culture gréco-­‐latine est le fondement de notre culture et de notre histoire.
6 La culture gréco-­‐latine est commune aux pays de l’Europe et de la Méditerranée ; elle rassemble les peuples, au lieu d’accentuer les divisions.
7 L'accès à la culture doit rester possible pour tous les élèves qui souhaitent étudier ces langues et approfondir leurs connaissances : c’est une question de liberté.
8 Si les langues anciennes ne sont plus enseignées à l’école, seuls les enfants des milieux culturellement favorisés y auront accès : c’est une question d’égalité.
9 Former les enfants à la citoyenneté, c’est avant tout les instruire et les cultiver pour les rendre capables de penser la société.
10 L’école est le lieu privilégié de la transmission des savoirs et de la culture, qui sont indispensables à toute nation qui souhaite avoir sa place dans le monde.
Pour toutes ces raisons, je propose que chacun se mobilise contre la suppression des langues anciennes.
Pour plus de précisions, voir les sites des professeurs de langues anciennes :
avenirlatingrec.fr
cnarela.fr
arretetonchar.fr