La finance de marché n`a pas dit son dernier mot

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La finance de marché n`a pas dit son dernier mot
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Crowdfunding
La finance de marché n’a pas dit son dernier
mot
Rifkin rattrapé par Adam Smith ? Ou comment la finance de marché est en train de
phagocyter l'économie collaborative (ou sharing economy).
L'auteur
•
Hubert de Vauplane
• Avocat associé
Kramer Levin Naftalis & Frankel LLP
http://www.revue-banque.fr/print/risques-reglementations/chronique/finance-marche-...
06/01/2015
La finance de marché n’a pas dit son dernier mot
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Revue de l'article
Cet article est extrait de
Revue Banque n°779
Numéro double 779-780 : Rétrospective 2014 - Prospective 2015
Pour Jeremy Rifkin, « un nouveau système économique entre sur la scène mondiale : les
communaux collaboratifs ». L'auteur, gourou de l'économie collaborative et consultant à succès,
prédit ainsi « l'éclipse du capitalisme », du fait de l'émergence du digital et d'une nouvelle forme
de l'économie, celle du partage. Les formes d'économie collaborative sont nombreuses : le
financement participatif (crowdfunding), les offres réciproques d'hébergement chez l'habitant
(couchsurfing), ou de covoiturage (carsharing), de voyage partagé (peer to peer travel
experience), la production par les particuliers d'énergies vertes, la création de monnaies
alternatives (bitcoin), l'enseignement à distance (MOOC)... Tous ces nouveaux modes
économiques se caractériseraient, d'une part, par des productions à coûts décroissants et, d'autre
part, par le partage de cette production, le plus souvent dans ce que l'on appelle des « places de
marché » ; en conséquence de quoi, la valeur d'usage par l'accès primerait sur la détention par la
propriété. Comme le dit si bien Jean-Michel Servet, « la durabilité l'emporte sur le consumérisme
[…], la coopération subsumerait la concurrence ». Autrement dit, l'« esprit du capitalisme » qui
aurait comme fondement le seul intérêt personnel et comme moteur le gain matériel, serait en
train d'être supplanté par un nouveau mode économique dont les motivations seraient motivées
par des intérêts collaboratifs et « dynamisés par un désir profond de relation avec les autres et le
partage ». Ce que Rifkin appelle le changement de paradigme économique : « nous vivons
manifestement les premières phases d'un changement des règles du jeu. Au crépuscule de l'ère
capitaliste, un nouveau modèle économique émerge, mieux faire pour organiser une société ou
toujours plus de biens et de services sont presque gratuits ». Surfant sur un sentiment
anticonsumériste post-crise, un ras-le-bol vis-à-vis d'une économie financière et des
préoccupations générationnelles quant au devenir des ressources de la planète et plus
spécifiquement des sources d'énergie, le mouvement touche aujourd'hui une part de plus en plus
importante de la population des pays occidentaux. La thèse a été popularisée par Rifkin, mais
surtout par le livre de Rachel Botsman et Roo Rogers dans What's Mine is Yours: The Rise of
Collaborative Consumption (2010), ou celui de Lisa Gansky dans The Mesh: Why the Future of
Business is Sharing (2010). De nombreuses organisations ont été créées pour promouvoir ce
concept au sein de la société : The People Who Share, OuiShare, The Mesh, Prove Trust. Ce
mouvement hétéroclite (où les intuitions du professeur de Harvard Yochai Benkler sur l'open
source rejoignent les préoccupations d'un Jean-Claude Michéa sur la société de consommation)
est-il en train de bouleverser les modèles économiques traditionnels ?
Le choc du crowdfunding
L'un des exemples de cette nouvelle économie est la finance participative ou crowdfunding. On en
connaît les principes de fonctionnement : le cercle des amis et de la famille soutient un projet
(d'investissement, de financement ou le plus souvent de don) social ou entrepreneurial présenté
sur Internet, grâce à quoi la foule apporte elle aussi son soutien à ce même projet.
Ce nouveau mode de financement désintermédié bouleverse le modèle traditionnel de
financement bancaire, en particulier auprès des start-up. La logique du financement participatif
tient justement dans l'esprit collaboratif de son fonctionnement : le porteur de projet ne peut arriver
à lever la somme qu'il souhaite (et ce, quel que soit le montant) que s'il arrive d'abord à mobiliser
ses cercles proches. Et ceux-ci suivront le projet parce qu'ils veulent manifester une empathie. Ce
n'est qu'à cette condition que la foule suivra ; et ce, selon le principe que la foule (qui, selon
James Surowiecki, est plus sage que les experts) fait confiance à l'engagement des proches.
Toujours selon la même logique, les projets financés le sont sous forme de dons ou de prêts
d'honneur (gratuits). En effet, la rémunération attendue par les internautes n'est pas financière
mais avant tout sentimentale.
La finance de marché en embuscade
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06/01/2015