Navette du 24 oct 2012 La Navette du 24 octobre 2012
Transcription
Navette du 24 oct 2012 La Navette du 24 octobre 2012
LA NAVETTE 24 octobre 2012 Sommaire ---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- La liste des plans sociaux continue de s'allonger Le Monde 24 octobre 2012 Pages 1 et 2 ---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Communiqué Section Cfdt Alcatel Lucent Source Le Monde 24 octobre 2012 Pages 3 et 4 ---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Plan social : Alcatel a la main lourde Libération 19 octobre 2012 Page 5 ---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Alcatel-Lucent fait porter l'essentiel des suppressions d'emplois sur la France Les Échos 19 et 20 octobre 201 Pages 6 et 7 ---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- PSA : Montebourg annonce une réunion tripartite le 25 octobre Le Monde 6 octobre 2012 Page 8 ---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- PSA : le gouvernement dégaine une potion magique Libération 24 octobre 2012 Pages 9 et 10 ---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Communiqué Inter Cfdt PSA Pages 11 et 12 ---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Un rapport appelle à une redéfinition de la stratégie française de l'automobile Les Échos 23 octobre 2012 Page 13 ---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- DOSSIER : QUEL AVENIR POUR L'AUTOMOBILE FRANÇAISE ? - Renault et PSA : des stratégies opposées - PSA-Renault : trente ans, de Billancourt à Aulnay Enjeux les Échos octobre 2012 Pages 14 à 28 ---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Les tout petits syndicats s'invitent dans les TPE Les Échos 11 octobre 2012 Page 29 ---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Emploi : le difficile parcours des enfants d'immigrés maghrébins Les Échos 11 octobre 2012 Page 30 ---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- INTERNATIONAL - Le chômage, pire qu'un casier judiciaire - Un algorithme va vous embaucher Courrier international 18 au 24 octobre 2012 Pages 31 à 33 La liste des plans sociaux continue de s'allonger P as une semaine sans annonce de plan de suppression d'emplois ou de fermeture de site. Dernier en date, lundi 22 octobre, la décision du suédois Electrolux de céder ou fermer dans les deux ans son usine de lavelinge à Revin (Ardennes), une annonce qui a provoqué la grève immédiate des 419 salariés. Lundi également, la direction du fabricant de meubles Cauval Industries, connu pour ses marques de matelas Dunlopillo et Treca, a indiqué qu'elle s'apprêtait à déposer le bilan de deux de ses filiales employant 530 salariés en Ile-de-France et dans l'Aube. Ces annonces avaient été précédées par celle d'Alcatel, le 18 octobre, de 1.430 suppressions d'emplois en France, soit 15% de ses effectifs hexagonaux. Les prochaines semaines seront rythmées par le déroulement des plans déjà annoncés et sur lesquels le gouvernement entend bien souvent peser. ---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- suite PAGES CULTURELLES - Pourquoi Abdessemed tape-t-il si dur ? Le Monde 5 octobre 2012 Pages 34 à 37 - Edward Hopper tel que vous l'ignoriez Le Monde 11 octobre 2012 ---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- LA NAVETTE supplément au dernier numéro du CFDT Métaux Paris Directrice de publication : Marie-Hélène Tiné ISSN 0299.1721 - N° CPPAP 1011508035 Imprimé au siège : 7-9 rue Euryale Dehaynin - 75019 Paris Mise en page et secrétaire de rédaction : Jocelyne Huthwohl Upsm 7/9 rue Euryale Dehaynin Téléphone : 01.53.38.48.48 - Télécopie : 01.53.38.48.49 Courriel : [email protected] PAGE 2 La liste des plans sociaux continue de s’allonger (suite et fin) PSA Mercredi 24 octobre, un Petroplus Le sursis s'achève lundi comité d'entreprise exceptionnel se réunira pour évoquer le plan social comprenant 8.000 suppressions d'emplois, dont 3.000 à Aulnaysous-Bois (Seine-Saint-Denis), site qui doit être fermé. Le lendemain, une réunion tripartite sera organisée réunissant, à l'initiative d'Arnaud Montebourg, ministre du redressement productif, l'Etat, la direction de PSA et les élus locaux et syndicaux des deux usines concernées par les suppressions d'emplois, Rennes et Aulnay. Presstalis Mercredi toujours, une 5 novembre. Le tribunal qui a prononcé la liquidation de cette raffinerie employant 470 personnes à Petit-Couronne (Seine-Martime) a accordé un délai pour trouver un repreneur. Selon les syndicats, sept projets seraient à l'étude. Le gouvernement est parti "en chasse", selon M. Montebourg. Fralib Le conseil des prudhom- mes de Marseille a mis sa décision en délibéré au 8 novembre concernant les salaires impayés de douze salariés de l'usine Fralib de Gémenos (Bouches-du-Rhône). En lutte contre la délocalisation de cette usine produisant les thé Lipton et les infusions Elephant, ces salariés et une centaine de leurs collègues occupaient le site. délégation de Presstalis doit être reçue par le cabinet d'Aurélie Filippetti, ministre de la culture et de la communication, pour évoquer le plan de restructuration du principal acteur de la distribution de la presse en France, qui prévoit ArcelorMittal Le 1er décembre se 1.200 suppressions d'emplois sur un décidera la fermeture définitive ou total de 2.500. non des deux hauts-fourneaux de Florange (Moselle) et la suppression Technicolor Le liquidateur judi- de 629 postes sur les 2.700 du site. ciaire de l'usine d'électronique La décision a été suspendue pour d'Angers (350 salariés) a assigné deux mois ; c'est le temps qu'a le devant la justice l'entreprise pour gouvernement pour retrouver un qu'elle finance un plan social, évalué repreneur. à 30 millions d'euros par le comité d'entreprise. Une audience est prévue vendredi 26. Sanofi Lundi 29, le tribunal de grande instance d'Evry étudiera le référé déposé par le comité central d'entreprise demandant l'arrêt du plan de restructuration du groupe pharmaceutique (914suppressions d'emplois d'ici à 2015). D'autre part, une mission ministérielle a été lancée par M. Montebourg sur le devenir du site de Toulouse (620 personnes). LA NAVETTE Édition de l'UPSM aux responsables de Syndicats DOMINIQUE GALDIS 24 octobre 2012 PAGE 3 suite LA NAVETTE Édition de l'UPSM aux responsables de Syndicats 24 octobre 2012 PAGE 4 LA NAVETTE Édition de l'UPSM aux responsables de Syndicats 24 octobre 2012 PAGE 5 Source Libération 19 octobre 2012 Plan social : Alcatel a la main lourde Le franco-américain va supprimer 5.490 postes dans le monde, dont 1.430 en France. I l y a deux jours, Shanghai Bell, la filiale chinoise d'Alcatel-Lucent (ALU), annonçait un contrat majeur avec China Mobile, pour déployer le nec plus ultra de la technologie : un début de réseau 4G (très haut débit mobile). Cela n'a pas empêché l'équipementier francoaméricain d'officialiser, hier, une restructuration dévastatrice pour l'emploi. Le plan, qui sera présenté ce matin au comité de groupe européen, prévoit 5.490 suppressions d'emplois sur un effectif mondial de 76.000 personnes. La France, avec 1.430 postes supprimés, paie le plus lourd tribut. "Massue". "Cela représente 15% des effectifs français", a dénoncé la CFDT qualifiant ce plan de "violent". Ce "coup de massue" n'a pas totalement cueilli à froid les syndicalistes. Dès juillet, Alcatel-Lucent avait annoncé la couleur avec son plan de réduction des coûts baptisé "Performance", lancé à cause du recul de ses ventes. La nouveauté, c'est que ce plan a été sérieusement revu à la hausse : Alcatel-Lucent vise désormais 1,25 milliard d'euros d'économies, soit 750 millions d'euros de plus que cet été. Le détail des sites touchés n'a pas été donné. La direction a seulement indiqué que les coupes touchaient prioritairement les fonctions support (ventes, marketing, finances), la recherche et développement devant être épargnée. LA NAVETTE Philippe Camus, le président du conseil d'administration, avait été reçu début septembre par ses ministres de tutelle, Arnaud Montebourg, (Redressement productif) et Fleur Pellerin (Economie numérique). Depuis, le gouvernement a dégainé un plan de soutien aux investissements dans le secteur. Il n'a su éviter la purge chez Alcatel-Lucent. "Nous avons besoin d'un environnement réglementaire et industriel qui favorise l'équipement dans le fixe et le mobile pour que l'Europe bénéficie d'un effet d'entraînement sur sa croissance", a insisté hier Yohann Bénard, le secrétaire général d'ALU. Management. Depuis que l'équipementier a changé de management, il y a quatre ans, les effectifs en France ont fondu d'un petit millier de personnes. Ce plan est le premier de grande ampleur touchant l'Hexagone. Alcatel-Lucent n'est pas le seul à souffrir. ZTE et Huawei, ses concurrents chinois, ont beau engranger des contrats en Europe, ils sont eux aussi à la peine et, pour la première fois, ZTE pourrait même annoncer une perte. Édition de l'UPSM aux responsables de Syndicats CATHERINE MAUSSION 24 octobre 2012 PAGE 6 Source Les Échos 19 et 20 octobre 2012 Alcatel-Lucent fait porter l'essentiel des suppressions d'emplois sur la France L'équipementier franco-américain va supprimer 1.430 emplois en France, soit 15% de l'effectif, sur un total mondial de 5.490 postes en moins. Le marché d'Alcatel-Lucent croît moins en Europe que dans le reste du monde. L e couperet est tombé hier : Alcatel-Lucent va réduire son effectif de 5.490 postes, plus que les 5.000 annoncés en septembre. Et la France sera la première victime de ce grand ménage, avec à elle seule 1.430emplois en moins. C'est le principal pays touché : en comparaison, la zone AsiePacifique, qui compte 22.000 emplois, n'en perdra que 990. C'est la consternation à Vélizy, chez les salariés du siège d'Alcatel-Lucent France, la plus grosse filiale du groupe dans l'Hexagone (plus de 7.000 emplois sur 9.000). "Nous sommes inquiets, car nous abritons une grande partie des fonctions support pour l'Europe, sur lesquelles les suppressions d'effectifs vont porter en priorité", explique Christophe Civit, représentant syndical CFDT à Vélizy. C'est ce qu'avait annoncé le PDG du groupe, Ben Verwaayen, en juillet, suite à la publication de mauvais chiffres : les ventes, le marketing, les ressources humaines, la finance ainsi que le service client et la maintenance seront les plus affectés. En revanche, il avait précisé que le budget de la recherche ne serait pas touché dans le cadre du plan d'économies de 1,25 milliard d'euros prévu d'ici à la fin de l'année. "Encore faut-il savoir ce qu'on nomme R&D", dit Christophe Civit. Et puis, s'il s'agit de préserver les postes chez Alcatel Shanghai Bell en Chine, ça n'arrange pas nos affaires ici." suite LA NAVETTE Édition de l'UPSM aux responsables de Syndicats 24 octobre 2012 PAGE 7 Alcatel-Lucent fait porter l’essentiel des suppressions d’emplois sur la France (suite et fin) "Malmené en Europe" Voilà un an qu'Alcatel-Lucent perd du terrain dans les réseaux mobiles en France, avec la défection coup sur coup de clients comme Bouygues Telecom et SFR ("Les Echos" du 12 octobre). Free Mobile lui a également préféré Nokia Siemens Networks et France Télécom, son partenaire historique, lui a retiré la région Île-de-France. D'ailleurs, si l'opérateur semi-public s'est interdit de travailler avec les équipementiers chinois dans son pays, il a tout de même acheté à Huawei des réseaux mobiles en Roumanie, en Pologne, en Belgique et dans plusieurs pays africains. " Le groupe est malmené en Europe, regrette Christophe Civit. Nous ne sommes pas soutenus par les opérateurs, le gouvernement, Bruxelles, alors qu'aux Etats-Unis, où Lucent est né, et en Chine, où nous avons une filiale, les opérateurs achètent nos produits et nous soutiennent" Sur ce point, syndicats et direction sont d'accord. Le secrétaire général du groupe, Yohann Bénard, rappelle que le chiffre d'affaires français a baissé de 24% entre 2008 et 2011. "Nous avions cru que l'Europe investirait plus rapidement et massivement dans la 4G et le très haut débit fixe. Mais le démarrage a été plus lent qu'annoncé. Cela a pesé sur nos résultats et nous a conduit à prendre nos responsabilités en annonçant un plan d'économies le26 juillet", explique-t-il. LA NAVETTE L'Europe va perdre au total 3.300 emplois. Et comme la France y est la principale plate-forme du groupe, elle est la première à souffrir. Le processus formel de consultation des partenaires sociaux n'a pas encore commencé, mais la direction a déjà prévenu qu'elle ne souhaitait pas fermer d'usine. Elle veut toutefois quitter Vélizy (plus de 2.000 salariés) pour regrouper plus de 5.000 salariés sur le site de Nozay, et ainsi y constituer un pôle de R&D d'envergure mondiale. Arnaud Montebourg et Fleur Pellerin ont annoncé hier "un plan d'action pour la filière des équipementiers télécoms" avec une relance des investissements dans le très haut débit. Les syndicats d'AlcatelLucent et la direction font pression pour que les chinois Huawei et ZTE soient évincés des réseaux français comme ils le sont déjà aux Etats-Unis, au motif de la "sécurité nationale". Ils demandent à l'Etat d'acheter européen, et au régulateur des télécoms de mieux prendre en compte le critère de l'emploi basé en France lorsqu'il attribue des licences pour opérer des fréquences. Édition de l'UPSM aux responsables de Syndicats SOLVEIG GODELUCK 24 octobre 2012 PAGE 8 Source Le Monde 6 octobre 2012 PSA : Montebourg annonce une réunion tripartite le 25 octobre L e ministre du redressement productif, Arnaud Montebourg, a annoncé samedi 6 octobre la tenue d'une réunion, le 25 octobre, entre la direction, les syndicats de PSA et gouvernement. Ce rendez-vous visera à "rediscuter" le plan de restructuration du constructeur automobile. "Notre souhait est d'engager une négociation au plus haut niveau" a expliqué M. Montebourg à la sortie d'une réunion d'une heure et demie, au Mondial de l'automobile à Paris, avec l'intersyndicale du site d'Aulnay de PSA. "Le gouvernement, Michel Sapin et moi-même, piloterons cette négociation tripartite", a-t-il dit à un groupe de salariés, précisant que celle-ci réunirait Philippe "Varin, le PDG de PSA et chacun des syndicats représentatifs dans le groupe". Doivent aussi être organisées deux autres réunions tripartites début novembre concernant les usines de Rennes et Aulnay-sous-Bois, sites les plus durement touchés par le plan de restructuration, qui prévoit en tout 8.000 suppressions de postes, ont précisé des représentants syndicaux. Arnaud Montebourg a souligné la nécessité de limiter l'ampleur et l'impact du plan autant que faire se peut : "Nous faisons un travail avec vos organisations syndicales pour que le plan social soit strictement proportionné aux nécessités de la relance de Peugeot. Il ne peut pas y avoir de dégâts sociaux, humains, industriels excessifs", a-t-il dit. "Pour nous, l'objectif, c'est de reformater, de rediscuter le plan social. Nous voulons également engager Peugeot dans un processus de relance, de reconquête et de remontée, a poursuivi le ministre. Nous avons besoin que PSA – qui est (...) un grand constructeur, qui a fait beaucoup pour la France, et la France a fait beaucoup pour Peugeot aussi – soit engagé sur le chemin de la relance." LE MONDE.FR avec AFP Des salariés de PSA Peugeot Citroën d'Aulnay-sous-Bois manifestent, le 15 septembre, dans les rues de Renne - REUTERS/STEPHANE MAHE LA NAVETTE Édition de l'UPSM aux responsables de Syndicats 24 octobre 2012 PAGE 9 Source Libération 24 octobre 2012 PSA : le gouvernement dégaine une caution magique En contrepartie d'une garantie financière à la banque interne de l'entreprise, l'Etat a obtenu du constructeur un adoucissement de son plan social. A près quatre mois de conflit autour du plan social de PSA, le gouvernement et le constructeur automobile ont signé, provisoirement au moins, l'armistice. Avec un compromis qui permet à chacun de ne pas perdre la face. L'exécutif reconnaît les graves difficultés financières de PSA et sauve la banque interne du groupe. En échange, le constructeur, qui avait jusqu'ici refusé toute concession, accepte d'adoucir son plan social et de réformer sa gouvernance. Tout s'est joué dans la nuit de lundi à mardi, lors d'une ultime négociation à Matignon, entre les conseillers du Premier ministre, de Pierre Moscovici (Economie), d'Arnaud Montebourg (Redressement productif) et le secrétaire général de PSA, Pierre Todorov. Ce dernier est sur les dents. Il veut boucler d'urgence l'aide à Banque PSA finance, qui ali-, mente ses concessionnaires et les crédits auto des clients de Peugeot et Citroën. PSA redoute que la présentation, aujourd'hui, de ses résultats trimestriels, conduise les agences de notation à dégrader une nouvelle fois le groupe. Cela reléguerait la banque interne, pourtant rentable, dans la catégorie "spéculative", et couperait son accès aux marchés. Avec, à la clé, une crise de liquidités catastrophique pour la banque et pour l'activité du groupe. Pour éviter ce scénario noir, l'Etat doit se porter garant des nouveaux emprunts émis par l'établissement. Le gouvernement a accepté, comme l'a révélé hier le Monde, d'apporter 5 à 7 milliards d'euros de garantie. Selon nos informations, PSA demandait 7 milliards (au lieu de 4 milliards la semaine dernière), signe que la situation est bien plus grave que prévu. D'abord réticent, le gouvernement en a accordé 5, avec la possibilité de monter à 7 si nécessaire. PSA, qui n'a pas souhaité faire de commentaires, pourrait officialiser la nouvelle aujourd'hui. "DANS LE BON SENS". En vertu du principe donnantdonnant, l'exécutif a demandé des contreparties, dévoilées hier par Arnaud Montebourg dans Libération. Elles auraient toutes été acceptées. Côté gouvernance, PSA devrait faire entrer à son conseil de surveillance un représentant des salariés et un administrateur "indépendant", qui représenterait en fait officieusement l'Etat. Le groupe a aussi accepté d'adoucir son plan de 8.000 suppressions de postes. Le gouvernement aurait obtenu, en plus des 1.500 reclassements internes prévus, que PSA préserve "plusieurs centaines d'emplois" supplémentaires, comme l'a réclamé Montebourg hier. Ce chiffre comprend une baisse des suppressions de postes (notamment dans la recherche) et une hausse du nombre de salariés reclassés au sein du groupe et en externe. Ces bonnes nouvelles seront annoncées demain, lors de la réunion tripartite entre Montebourg, la direction de PSA et les syndicats. Reste à savoir si ces derniers seront satisfaits. Jean-Pierre Mercier, de la CGT, estime que la garantie d'Etat est "une véritable provocation". Philippe Portier, de la CFDT, trouve que les contreparties sur la gouvernance vont "dans le bon sens", mais aurait voulu des engagements sur les "volumes de véhicules produits dans les usines françaises". suite LA NAVETTE Édition de l'UPSM aux responsables de Syndicats 24 octobre 2012 PAGE 10 PSA : le gouvernement dégaine une caution magique (suite et fin) "PAS ARBITRÉ". Reste un point clé à régler. PSA doit annoncer aujourd'hui, lors d'un comité de groupe européen, le projet industriel négocié avec son nouvel allié américain General Motors (GM). Selon des sources concordantes, PSA produirait dans ses usines deux modèles Opel, filiale européenne de GM : la citadine Corsa, ainsi qu'un véhicule de taille moyenne qui, lui, devrait être confié au site de Rennes, très touché par le plan social. Mais on ignore encore quelles voitures PSA va donner en échange à Opel... Un élément majeur pour l'avenir des usines françaises. Cette alliance inquiète le gouvernement et les syndicats. Comme l'a révélé la Tribune, PSA envisagerait de fusionner son activité automobile avec Opel, dans une société détenue à 50-50 avec GM. Ce qui pourrait se traduire par de nouveaux plans sociaux et fermetures de site, vu les pertes d'Opel et le fait que les deux constructeurs sont sur le même créneau. Selon nos informations, PSA ne communiquera pas aujourd'hui sur ce projet de fusion. "Ce n'est pas arbitré", indique un proche du dossier. Le projet ferait même l'objet d'un conflit ouvert au sein de la famille Peugeot, qui contrôle PSA. Avec, d'un côté, Thierry, président du conseil de surveillance, qui souhaite conserver l'activité auto créée par ses ancêtres il y a cent ans. Et, de l'autre, son cousin Robert, patron du holding familial FFP, dont il a déjà diversifié les investissements (dans l'immobilier, les autoroutes, l'aéronautique...). Selon un bon connaisseur de l'entreprise, Robert voudrait "que la famille sorte de l'automobile en vendant cette activité à GM, et achève de transformer la holding FFP en fonds d'investissement". Ce conflit a failli faire une victime : le PDG de PSA, Philippe Varin. Selon Challenges, Thierry Peugeot a voulu le débarquer il y a deux semaines, au prétexte qu'il irait trop loin avec GM. Avant d'en être dissuadé par ses cousins. "Suite à cet incident, Varin a failli claquer la porte", confirme-t-on de bonne source. Le feuilleton PSA est loin d'être terminé. YANN PHILIPPIN REPÈRES Le plan social de PSA, annoncé en juillet, prévoit 8.000 suppressions de postes : - 3.000 via la fermeture de l'usine d'Aulnaysous-Bois (Seine-Saint-Denis) en 2014, - 1.400 à l'usine de Rennes - et 3.600 chez les cols blancs. L'Etat a obtenu que le groupe adoucisse le plan à hauteur de "ptusieurs centaines d'emplois", en échange du sauvetage de la banque interne de PSA. 7 milliards C'est, en euros, la garantie financière maximale que l'Etat va accorder à Banque PSA finance, menacée par la dégradation de la note de sa maison mère. LA NAVETTE Édition de l'UPSM aux responsables de Syndicats 24 octobre 2012 PAGE 11 suite LA NAVETTE Édition de l'UPSM aux responsables de Syndicats 24 octobre 2012 PAGE 12 LA NAVETTE Édition de l'UPSM aux responsables de Syndicats 24 octobre 2012 PAGE 13 Source Les Échos 23 octobre 2012 Un rapport appelle à une redéfinition de la stratégie française dans l'automobile Le Cese doit adopter aujourd'hui un rapport appelant à la mise en place d'une véritable filière intégrant davantage les acteurs du secteur, qu'il s'agisse de l'Etat ou des industriels. C omment assurer la pérennité de l'industrie automobile française ? Alors que se joue cette semaine une bonne partie de l'avenir de PSA -le groupe donnera mercredi les détails de son alliance avec General Motors et négocie actuellement avec l'Etat le sauvetage de son activité PSA Finances -, le Conseil économique, social et environnemental (Cese) adopte aujourd'hui un rapport qui tente de répondre à cette question d'actualité. Le texte rappelle d'abord les réalités : dans le sillage d'une industrie qui recule dans le PIB français -celle-ci ne pesait en 2011 plus que 13% de la valeur ajoutée marchande française, contre 17% au début des années 2000 -, le poids de l'automobile s'affaisse dans un contexte d'effondrement du marché européen, de problèmes structurels de compétitivité, de concurrence des marques asiatiques et allemandes, et au final, de surcapacités industrielles... Si l'automobile reste un mastodonte de l'économie française - 700.000 emplois directs, deuxième secteur exportateur derrière l'agroalimentaire, avec 42 milliards d'euros en 2011 -, sa position s'effrite, comme le symbolise sa balance commerciale, passée dans le rouge depuis 2007. LA NAVETTE Sur le modèle du VDA allemand Comment rebondir, s'interroge le Cese ? Si la clef reste l'innovation -et notamment les voitures vertes -, la France ne fera pas l'économie d'une révision de sa politique industrielle en la matière, juge le rapport. "En théorie, nous avons tous les ingrédients constitutifs d'une filière, avec des constructeurs et équipementiers de premier plan (Renault, PSA, Valeo, Michelin, Faurecia...), et une activité en aval de distribution et services très dense. Mais, en pratique, les acteurs pourraient se parler davantage", note Patrick Bailly, rapporteur du texte et Édition de l'UPSM aux responsables de Syndicats par ailleurs président du CNPA (Conseil national des professions de l'automobile). S'il reconnaît que des progrès ont été faits ces dernières années, le rapport appelle à se doter d'une véritable filière sur le modèle du VDA allemand (Verband der Automobilindustrie) ou du Gifas pour l'aéronautique française, en intégrant davantage les équipementiers de rang 2. Mise en relation plus étroite des pôles de compétitivité liés à l'automobile, lancement d'un "plan de filière" à dix ans, co-construit avec tous les acteurs, organisation d'une conférence tripartite entre gouvernement, patronat, syndicats, "afin de sauvegarder l'existence de la filière automobile nationale et de la production sur le site France"... Le texte multiplie les idées pour faire converger les différents acteurs et donner à l'automobile le poids politique qui doit être le sien. "A l'échelle communautaire, l'automobile représente aujourd'hui 25% de la R & D privée. Or, l'aéronautique -qui ne représente qu'environ la moitié de l'automobile en R & D -capte 5 fois plus d'aides européennes", rappelle le rapport. MAXIME AMIOT 24 octobre 2012 PAGE 14 Source Enjeux les Échos Octobre 2012 Quel avenir pour l'automobile française ? Les deux constructeurs tricolores ont rarement suivi la même route : alliances durables ou ponctuelles, low-cost ou haut de gamme, électrique ou hybride. Dans un secteur automobile en crise, quelle stratégie sera la mieux adaptée à la survie ? E xclu du CAC40 ! Une véritable disgrâce pour PSA, valeur historique de l'indice parisien depuis sa création. Il est vrai que sa capitalisation ne dépassait plus qu'à peine... 2 milliards d'euros. Cinq fois moins qu'il y a dix ans, moitié moins qu'il y a un an et... 250 fois moins qu'Apple ! L'été meurtrier - s'est donc terminé de la plus douloureuse des façons pour le groupe automobile, contraint d'annoncer début juillet, à peine les élections terminées, un plan portant sur la suppression de 8.000 postes et la fermeture de l'usine d'Aulnaysous-Bois. Désignés à la vindicte publique, le président du directoire Philippe Varin et la famille Peugeot, actionnaire de référence, ne pouvaient que s'attirer les foudres du gouvernement, ministre du Redressement productif en tête. Et Arnaud Montebourg, dans l'histoire, n'a pas fait dans la dentelle. Depuis, à la suite du rapport Sartorius présenté mi-septembre, la tempérance a retrouvé droit de cité. Car l'automobile imprègne toujours autant les esprits que l'économie. Avec un coefficient multiplicateur des investissements légèrement supérieur à quatre (4,1), comparable à l'aéronautique (4,8) mais loin devant l'agroalimentaire (2,8) par exemple, le secteur pèse lourd dans les comptes nationaux, PIB et emploi confondus. Mais la nature du soutien à l'industrie annoncé dans la foulée des bonus pour véhicules propres aux effets à court terme limités montre bien l'étendue du problème : quand une mauvaise conjoncture un marché automobile européen atone, un contexte macroéconomique qui frise l'apoplexie-se conjugue avec la fragilité structurelle de la filière, les effets sont ravageurs et les solutions ne sont pas légion. La perte de vitesse de la construction automobile française ne date pas d'hier. Elle est continue depuis dix ans : de deuxième excédent industriel en 2002 (+7,4 milliards d'euros), le secteur est passé au rang de troisième déficit (-8,1 milliards) en 2011. Quant aux parts des trois marques Renault, Peugeot et Citroën, elles se sont érodées sur leurs marchés traditionnels, passant chacune nettement sous les 7% en Europe. S'ajoutent la mondialisation et l'éveil de nouveaux territoires - Chine, Brésil - qui déplacent les centres de gravité de la consommation et de la production. Tous les généralistes (Opel, Fiat...) souffrent d'une cruelle réalité : de 16,7 millions de véhicules en 2007, les ventes en Europe ont chuté à 13 millions environ. Conséquence : il y a bien trop d'usines dans la vieille Europe de l'Ouest, estiment les experts. Certains constructeurs, pourtant - les Allemands par exemple - s'en sortent mieux que d'autres. Car entrent en compte les forces et les faiblesses propres à chaque acteur : puissance et image de la marque, stratégie produit, réseau, coût du travail et productivité, alliances et croissance externe, position sur les marchés émergents, technologies pour l'avenir... Et en la matière, Renault et PSA montrent deux facettes radicalement opposées. Le premier a fait il y a quelques années des choix qui Mauvaise passe pour les semblent mieux le protéger que son généralistes vieux rival. Sa valeur boursière -11,3 Les racines du mal sont bien milliards d'euros à la fin de l'été, + identifiées. Il y a celles propres au 50% en un an - n'a pratiquement pas marché européen, modifié en varié en dix ans. profondeur par de nouvelles tendances de consommation et soumis aux à-coups provoqués par les multiples primes à la casse et autres bonus. suite LA NAVETTE Édition de l'UPSM aux responsables de Syndicats 24 octobre 2012 PAGE 15 Quel avenir pour l’automobile française ? (suite) Sous la houlette de Louis Schweitzer puis de Carlos Ghosn, le constructeur a engagé une mutation de grande envergure depuis 1999. Alliance avec le japonais Nissan, qui lui ouvre les marchés de la Chine et des Etats-Unis ; rachat du roumain Dacia et développement d'une gamme low-cost ; rachat du coréen Samsung Motors ; contrôle du russe AvtoVAZ (Lada) ; échange de capital (3,1%) en 2010 avec Daimler... Toutes marques confondues, l'ensemble Renault-Nissan pointe au troisième rang mondial en nombre de véhicules vendus. Venus trop tard à l'international Le groupe a dans le même temps délocalisé la production d'une partie de sa gamme destinée au marché européen. Résultat paradoxal pour une entreprise détenue à 15% par l'Etat : le "made in France" ne pèse plus que 25% du total. Au point que PSA, pourtant privé, apparaît plus "vertueux" en la matière, avec 44%. En retour, le constructeur de Sochaux paie la note de coûts qui rognent ses marges. Cela n'explique pourtant pas tout. Le développement hors d'Europe en a pâti. "Les Français sont venus trop tard à l'international", rappelle Rémi Cornubert, d'Oliver Wyman. PSA plus que Renault. Et le premier n'a pas su trouver d'autres relais de croissance. Jaloux de son indépendance, il est resté loin des grandes manœuvres du secteur, préférant engager de nombreux partenariats ciblés. C'est contraint que PSA a ouvert très récemment la porte de son capital à GM. Renault et PSA se distinguent aussi par des choix technologiques d'avenir opposés, comme dans les véhicules décarbonés, Renault pariant massivement sur la rupture avec le tout électrique, PSA jouant plutôt la continuité avec la motorisation hybride et l'amélioration des performances des moteurs traditionnels. Reste pour chacun à trouver la martingale qui permette de vivre des jours meilleurs. Entre un Renault "inventeur" du low-cost, et à la peine dans le haut de gamme qu'il entend relancer une énième fois, et un PSA qui veut faire du premium sur toute sa gamme, tout en abordant prudemment les modèles à bas coût, il y a quelques - rares - points de convergence... suite LA NAVETTE Édition de l'UPSM aux responsables de Syndicats 24 octobre 2012 PAGE 16 Quel avenir pour l’automobile française ? (suite) Renault et PSA: des stratégies opposées LES ALLIANCES Contrairement à Renault-Nissan, PSA a multiplié les collaborations ponctuelles. Un isolement que la marque paie cher aujourd'hui. Treize ans après l'alliance Renault-Nissan, c'est au tour de PSA Peugeot Citroën de s'engager dans un accord industriel et capitalistique d'envergure avec un concurrent : General Motors. Une stratégie imposée par la nécessité et qui intervient bien tard, estiment certains observateurs. Plutôt que multiplier les coopérations ciblées avec BMW (moteurs essence), Fiat (véhicule utilitaire), Ford (moteurs diesel), Mitsubishi (véhicule électrique, 4x4, usine en Russie) ou Toyota (petits formats en Slovaquie), la marque au lion aurait dû voir plus grand plus vite. Certes, la famille Peugeot avait déjà tenté en 2010 d'approfondir sa coopération industrielle avec Mitsubishi en nouant des liens capitalistiques. Les discussions avaient achoppé sur les valorisations respectives. Le besoin de capitaux pour financer les développements, la montée en gamme et l'internationalisation du groupe ont toutefois fini par convaincre les Peugeot de s'appuyer sur un industriel de poids. GM est-il pour autant le meilleur choix ? Certains membres de la famille regrettent que le président du directoire, Philippe Varin, n'ait pas présenté de réelle alternative à l'option américaine, ce partenaire souffrant lui-même de surcapacités en Europe. Synergies ou inerties ? S'il est encore trop tôt pour évaluer la pertinence de ce pari, ce rapprochement tarde cependant à produire des effets concrets. Excepté le mégacontrat de logistique des usines européennes de GM confié à Gefco, une filiale de PSA qui vient d'être cédée, les synergies peinent à se matérialiser. La différence de taille entre les partenaires peut être génératrice d'inerties. L'entrée du géant américain chez PSA interpelle également ses partenaires comme Ford, qui a préféré reprendre ses billes dans les moteurs diesel, ou BMW qui divorce de PSA dans la coentreprise créée dans les moteurs hybrides. Reste que GM devrait servir de fer de lance à PSA pour accélérer à l'international, comme en Inde où PSA a abandonné son projet d'implantation en solo pour se rallier au panache américain. Dans quelle mesure ce mariage rebat-il les cartes pour Renault ? Avec l'alliance, considérée dans le secteur comme la plus réussie, la marque au losange n'a pas grand-chose à lui envier. C'est aujourd'hui le quatrième acheteur mondial de composants. Et compte tenu des difficultés du marché européen, Renault ne peut que se féliciter d'avoir mis le cap sur l'international avec l'aide de Nissan, dont le redressement sauve aujourd'hui ses résultats (ainsi que Dacia). "Mais l'intégration n'a pas encore généré tout son potentiel", estime David Prunier, du cabinet de conseil Atradius. Certains rêvent de la mise en commun des équipes de recherche. Seul risque : que Nissan veuille un jour reprendre son indépendance. Cela a peut-être joué dans la décision de Renault de lancer un accord avec Daimler depuis deux ans. Premier produit commun : un nouvel utilitaire dont la production en série débutera en 2013. Déjà décidés, l'équipement de classes A d'un petit moteur diesel français et le partage d'une même plate-forme pour les prochaines Smart et Twingo. Mais Renault rêve aussi de revenir dans le haut de gamme avec une grande berline sur la plate-forme de la classe E. Carlos Ghosn l'a dit aux représentants des salariés français : "Vous allez voir, le partenariat avec Daimler sera aussi important pour Renault que l'alliance avec Nissan." A suivre... suite LA NAVETTE Édition de l'UPSM aux responsables de Syndicats 24 octobre 2012 PAGE 17 Quel avenir pour l’automobile française ? (suite) LA PRODUCTION Il y a trop d'usines en Europe de l'Ouest. PSA va fermer Aulnay, Renault vient d'inaugurer un site flambant neuf... à Tanger. Le plan de restructuration de PSA Peugeot Citroën annoncé début juillet a provoqué un véritable tollé. Et un énorme choc. L'hypothèse d'une fermeture du site d'Aulnay avait beau circuler depuis un an, l'ampleur des rationalisations - qui touchent toutes les fonctions de l'entreprise ainsi que l'usine de Rennes - a surpris. Les 8.000 suppressions de postes prévues sont rapidement devenues un sujet politique. Et les pouvoirs publics ne se sont pas privés de critiquer la stratégie de la direction de PSA et son actionnariat familial. Le groupe a pourtant continué à investir pendant la crise et davantage renouvelé son portefeuille produit que Renault. La défense du constructeur tient en un chiffre : l'entreprise brûle 200 millions d'euros de cash par mois depuis près d'un an. Le décrochage au premier semestre de 7% du marché européen et, encore plus sévère, celui des pays du Sud où le groupe est particulièrement présent, obère toute amélioration à moyen terme. Pas d'autre solution que d'adapter l'outil industriel, donc. Est-ce un mal commun à tous les constructeurs implantés en France ? Pour l'heure, Renault, qui a déjà procédé à des ajustements en 2011, n'envisage pas d'autres mesures. Mais il n'est un secret pour personne que l'usine normande de Sandouville fonctionne depuis des années à 40% de ses capacités ! Chez Toyota, les dernières nouvelles sont plutôt encourageantes pour le site de Valenciennes, où le constructeur a investi plus de 1 milliard d'euros depuis 2000. Ce site produira dès mai prochain des Yaris, notamment hybrides, qui seront aussi exportées en Amérique du Nord. Un beau signe de confiance dans le "made in France". "Ces volumes supplémentaires, soit l'équivalent de plus d'un mois de la production actuelle, devraient s'accompagner de plusieurs centaines de recrutements en 2013, sauf si le marché continue à se dégrader, estime le PDG de Toyota Motor Europe, Didier Leroy. Ce serait alors le moyen de compenser une baisse de régime." Un marché dopé par les primes à la casse La crise qui s'installe durablement sur le marché automobile européen devrait pousser d'autres généralistes à emboîter le pas de PSA. Les ajustements de capacité sont restés limités lors du trou d'air de 2008-09 comparé aux Etats-Unis où les restructurations sont allées bon train avec dix-huit fermetures de sites ! "Dopé par les primes à la casse, le rebond des ventes des deux dernières années a mis de côté les vrais problèmes structurels de surcapacités, rappelle David Prunier, d'Atradius. Mais sur les cinq dernières années, la production a décroché de 15% en Europe de l'Ouest. Et la France, comme l'Europe, affichent 25 à 30% de surcapacités structurelles." Selon Alix Partners, plus de 40% des usines sont sous-utilisées alors que le seuil critique, à partir duquel un site perd de l'argent, est de 75-80%. Et les perspectives restent sombres. "Le marché européen ne devrait pas retrouver son niveau de 2007 dans les quatre, voire cinq prochaines années, pronostique Nicolas Beaugrand, du cabinet de conseil. Et si bien des efforts ont déjà été faits notamment sur les besoins en fonds de roulement dans la période 2009-10, maintenant il faut aller plus loin." Il est question d'une fermeture de l'usine Opel de Bochum en 2016 et de cessations d'activité chez Fiat. Seuls les allemands et les coréens semblent échapper à cette problématique. Hyundai, qui vient d'augmenter de 20% la production de son site tchèque, a inauguré en mai dernier une usine en Turquie pour produire un concurrent de la Clio. suite LA NAVETTE Édition de l'UPSM aux responsables de Syndicats 24 octobre 2012 PAGE 18 Quel avenir pour l’automobile française ? (suite) LES MODÈLES Renault parie sur le low-cost, PSA veut monter en gamme. Mais tous les deux rêvent d'être présents sur tous les segments. Les français, après avoir suivi des stratégies très différenciées, semblent désormais converger et tenter de couvrir chacun l'ensemble des segments. "Inventeur" en 2004 du low-cost, un concept largement copié aujourd'hui, Renault rêve à nouveau d'un haut de gamme qui ne lui a jamais vraiment réussi. Inspiré par la recette de son partenaire Nissan avec Infiniti, il a décidé de relancer la griffe Initiale Paris, destinée d'abord aux marchés émergents, alors qu'Infiniti s'adresse à tous les pays. Renault parie également fortement sur l'électrique, avec le lancement cette année de la citadine Zoé et du scooter urbain Twizy. Le groupe dirigé par Philippe Varin, quant à lui, a présenté au printemps 2012 sa vision du low-cost pour les classes moyennes hors d'Europe : une berline familiale déclinée à la fois chez Peugeot (301) et Citroën (CElysée). Pour autant, le directeur des marques, Frédéric Saint-Geours, défend une vision très différente de son concurrent de Boulogne-Billancourt et réfute le terme de low-cost. "La 301 embarque les motorisations essence les plus récentes, celles de la 208 lancée cette année, insiste-til. Et non pas des composants déjà amortis sur d'anciennes générations de véhicules. Ce serait contradictoire avec notre stratégie de montée en gamme. Peugeot et Citroën font face à la fois aux marques premium, souvent allemandes, et aux marques low-cost. En restant au milieu, on prendrait le risque important d'être grignoté des deux côtés." Commercialisés à l'automne sur le pourtour méditerranéen, ces modèles pourraient être suivis par des gabarits plus petits. La limite ? "Tout le monde veut faire du Gucci, constate Bernard Jullien, directeur du cercle de réflexion universitaire Gerpisa (1). Mais le créneau est étroit et ne correspond pas à la réalité d'un marché friand de modèles aux tarifs plus abordables type Clio, 208 ou Yaris, le modèle le plus vendu de Toyota." De plus, si le groupe Volkswagen et le succès spectaculaire de son haut de gamme Audi font rêver les industriels tricolores, Bernard Jullien souligne que "la marque aux anneaux a mis vingt ans pour y arriver". Et qu'il n'y a pas de place pour deux VW en Europe. Ce pari du haut de gamme sert-il l'emploi en France ? Le bilan est mitigé. Oui pour les équipes de R&D françaises ainsi que certaines usines. Mais pour combien de temps ? Les DS3, DS4 et DS5 sont fabriquées respectivement à Poissy, Mulhouse et Sochaux, mais les trois prochaines silhouettes de la DS seront d'abord produites en Chine, son premier marché cible. Les sites français ont également profité du succès de la 3008 et de la 5008. Spécialisé dans le haut de gamme, Rennes n'a pas échappé pour autant au plan de réduction de capacité industrielle dévoilé en juillet, même si on lui promet un nouveau véhicule en 2016. Quant aux produits de milieu de gamme de PSA, ils seront fabriqués en Espagne où le groupe a l'avantage de détenir une usine très compétitive à Vigo, proche d'un port d'où ils peuvent être facilement exportés. Et Renault, où produira-t-il son haut de gamme ? A priori, sur le site de Douai (Nord). "Plutôt que viser le haut de gamme, où les généralistes challengent de plus en plus les ténors allemands historiques, les français devraient tenter une autre voie, estime Bernard Jullien. C'est aberrant que les petits modèles sexy sortent chez VW (Up) ou Opel et pas chez les français !" Pourquoi avoir fait une DS5 plutôt qu'une DSI plus adaptée aux besoins les plus larges ? Le livre blanc publié au début de l'été par l'Association des collectivités sites d'industrie automobile (ACSIA) plaide pour que les constructeurs français concentrent leurs forces dans ce type de modèles, plutôt que de concurrencer les allemands dans le haut de gamme. Le haut de gamme, un pari difficile Les échecs répétés dans le haut de gamme (coupé Avantime, grande berline Vel Satis aux allures de tank...) ont convaincu Renault d'emprunter une autre voie, à l'instar des japonais qui, avec Infiniti (Nissan) et Lexus (Toyota), ont créé des marques de toutes pièces. "Les constructeurs qui ont réussi sur l'ensemble de la palette l'ont fait avec des marques différentes", rappelle Sylvie Rucar, d'Alix Partners. Une approche différente de celle de Citroën qui a ressuscité avec un certain succès la ligne DS depuis 2009 (DS3, DS4 et DS5), dont plus de 200.000 exemplaires ont déjà été vendus. Mais Renault pourrait également revenir dans le haut de gamme en (1) Coauteur de Industrie automobile, la croisée des chemins, partageant la plate-forme de la classe E de Daimler. La Documentation française, et de L'Epopée Logan, Dunod. suite LA NAVETTE Édition de l'UPSM aux responsables de Syndicats 24 octobre 2012 PAGE 19 Quel avenir pour l’automobile française ? (suite) L'ENVIRONNEMENT En durcissant les normes de rejet de C02, Bruxelles favorise l'auto verte. PSA et Renault ont tout à y gagner, chacun à sa façon. Mi-juillet, en pleine "crise d'Aulnay", la Commission européenne a jeté un pavé de plus dans la mare déjà agitée de l'industrie automobile. Pas question de s'arrêter aux 130 grammes de C02 émis par kilomètre (moyenne de la gamme des constructeurs) imposés aux voitures neuves pour 2015, a annoncé la commissaire au Climat, la Danoise Connie Hedegaard: il faut viser 95 grammes à l'horizon 2020 ! Autrement dit - 27%, un véritable saut quantique. Pour autant, les constructeurs français, qui invoquent les efforts consentis pour l'échéance 2015, ontils tant à y perdre ? D'abord, le mouvement de décarbonation est inéluctable et irréversible. Japon, Chine, Etats-Unis : tous ces pays ont également fixé des objectifs contraignants, entre 10 ou 15% supérieurs à ceux préconisés par la Commission. Viser 95 grammes permettrait de sauvegarder l'avantage compétitif, mais tout juste. Ensuite, le cœur de gamme des constructeurs français est le segment B, celui des Clio et autres 208. Si c'est un inconvénient, notamment par rapport à l'Allemagne qui triomphe avec ses modèles premium et ses cylindrées haut de gamme, cela peut devenir un avantage car les nouveaux objectifs de Bruxelles seront plus difficiles à atteindre, puisque dès 2015 la totalité de la gamme devra être prise en compte, contre les deux tiers aujourd'hui. récemment l'ancien ministre Jean-Louis Borloo aux Echos. Une voiture sur cinq vendue en France au premier semestre émettait moins de 105 grammes et a donc bénéficié d'un bonus. Près de 60% des véhicules immatriculés en France et émettant entre 90 et 105 grammes de C02 sont produits dans l'Hexagone, précisait aussi le ministre du Redressement productif, Arnaud Montebourg, en présentant le plan automobile du gouvernement fin juillet. D'où le relèvement des bonus, de 100 à 200 euros, sur les voitures thermiques. Les objectifs 2020 de Bruxelles irritent les constructeurs qui craignent de devoir encore investir dans une mauvaise conjoncture. "Nous avons toujours plaidé que au lieu de mettre des normes de plus en plus dures, aux limites du mesurable et qui induisent des coûts, il était plus intelligent de s'occuper des vieilles voitures, responsables de 80% de la pollution", rappelle Frédéric Saint-Geours. Il est vrai que le renouvellement du parc prend entre quinze et vingt ans. Mais ces objectifs sont aussi une opportunité pour innover et conquérir des parts de marché, notamment dans les pays émergents de plus en plus sensibles à l'environnement. Bruxelles entend amplifier ses aides à la recherche et à l'innovation. Véhicules tout électrique ou hybrides, systèmes stop & start, baisse de poids avec les nouveaux matériaux mais aussi amélioration des moteurs thermiques avec le Les voitures françaises polluent moins downsizing, diminution des cylindrées et des émissions à Dans l'accord Renault-Daimler, c'est en partie cette performances égales, comme chez PSA avec la 208 : les compétence dans les petits modèles que l'allemand est solutions existent et les français sont plutôt bien placés allé chercher chez le français. "La France a le parc pour concevoir des véhicules propres, efficaces et automobile le moins polluant au monde", rappelait populaires. suite LA NAVETTE Édition de l'UPSM aux responsables de Syndicats 24 octobre 2012 PAGE 20 Quel avenir pour l’automobile française ? (suite) LE ZÉRO ÉMISSION PSA mise sur la continuité avec le choix de la technologie hybride. Renault joue la rupture avec le 100% électrique. On ne sait s'il s'agit d'une réelle volonté de lancer un marché qui broute en première ou de temporiser pour calmer les esprits après un début d'été meurtrier sur le front de l'automobile, mais les premières mesures de soutien sont allées quasi exclusivement à la propulsion électrique - partielle ou totale. De toutes les manières, c'est le watt que je préfère, semble dire le gouvernement. Un watt paré de toutes les vertus : vert, tourné vers l'avenir, plutôt favorable aux constructeurs français et... peu coûteux dans l'immédiat pour les caisses de l'Etat. Avec un bonus à l'achat d'un véhicule 100% électrique porté de 5.000 à 7.000 euros (avec un plafond à 30% du prix de vente, coût de la location de batterie sur trois ans compris, qui qualifie l'essentiel de l'offre française) et de 2.000 à 4.000 euros pour un véhicule hybride, les caisses publiques ne vont en effet pas être siphonnées. Pas plus en raison de l'engagement de l'Etat de commander un quart de ses véhicules en version électrique ou hybride, soit quelques milliers d'exemplaires. Au total, le relèvement des bonus devrait doper le marché de 75.000 véhicules, dans la proportion d'un tiers/deux tiers entre électrique et hybride, estime-t-on au ministère du Redressement productif. Pas de quoi affoler les compteurs mais avec l'intention affichée de relancer l'implantation d'un réseau de bornes de recharge, c'est là un signal positif envoyé aux constructeurs français. Des modèles électriques originaux Ceux-ci ont en la matière des stratégies radicalement opposées. Renault, qui pense davantage rupture technologique, a largement misé sur le tout électrique, arguant de 4 à 5 milliards d'euros déjà dépensés par l'alliance Renault-Nissan dans le "zéro émission". La firme au losange devrait proposer la Zoé en fin d'année, premier modèle qui ne soit pas la simple électrification d'un véhicule existant (Fluence et Kangoo). Cette berline cinq places (type Clio), citadine mais dont l'autonomie lui permet de s'échapper un peu du centre-ville (150 km annoncés en utilisation "normale"), sera l'avant-garde en France du modèle économique "scindé" défendu par Renault : un véhicule pas trop onéreux à l'achat (13.700 euros avec les nouveaux bonus, prix proche de celui d'un véhicule thermique comparable) complété par un abonnement mensuel pour les batteries (80 euros), lesquelles comptent encore pour à peu près la moitié du coût du véhicule. Un modèle testé avec la start-up de services américano-israélienne Better Place qui développe l'implantation de réseaux de recharge et/ou d'échange rapide des batteries et qui démarre en Israël avec des Fluence ZE. Mais alors qu'il était prévu de fabriquer les batteries à Flins en région parisienne, Renault a manifesté son intention de se tourner en soustraitance vers le coréen LG qui pourrait construire une usine en France. "Dans un schéma de rupture, Renault avait pourtant tout intérêt à investir massivement dans la batterie et sa seconde vie et à accumuler les chaînes de valeur sur la traction électrique et la batterie", regrette cependant Bernard Jullien, directeur du Gerpisa. LA NAVETTE Si l'idée, avec Zoé, est de montrer qu'une voiture électrique peut se glisser discrètement dans le trafic, comme une voiture normale, et rendre les mêmes services sans changer radicalement les habitudes, Renault entend explorer aussi le versant opposé avec TWizy, un quadricycle entre scooter et petite voiture doté de 50 à 80 km d'autonomie et au design très original. Le groupe vise les 20.000 commandes dans le monde à la fin de l'année pour ce véhicule non comptabilisé dans les statistiques électriques mais vecteur d'image pour la marque. Pourtant précurseur dans les années 90, PSA n'a pas développé ses propres véhicules mais préféré, en 2010, se fournir auprès de Mitsubishi, en vendant les iMiev du japonais sous les noms de iOn (Peugeot) ou C-Zero (Citroën). Spécialiste du diesel, il mise sur les moteurs hybrides électrique/thermique, technologie qui s'affranchit des contraintes du 100% électrique, et sur les technologies stop & start pour répondre aux normes environnementales. "L'hybride est la solution la mieux adaptée pour conserver la polyvalence de la voiture, estime le directeur des marques, Frédéric Saint-Geours. Notre pronostic est qu'il va représenter 15% du marché d'ici dix ans." L'hybridation de certains modèles avec la technologie Hybrid4 est en cours chez Peugeot (508RHX, 3008) et Citroën avec la DS5 fabriquée à Sochaux, à bord de laquelle le président de la République a descendu les Champs-Elysées le 15 mai dernier... "20% des commandes de Citroën DS5 sont des hybrides diesel", confie Frédéric Saint-Geours. D'autres constructeurs s'y mettent également. Le marché de l'hybride a en effet commencé à démontrer sa viabilité avec le pionnier Toyota, lequel a vendu près de 4 millions de Prius depuis 1997 et annoncé produire une Yaris hybride dans son usine française d'Onnaing, près de Valenciennes. Certains experts évaluent le marché annuel mondial à 1 million de véhicules. Non négligeable. Le risque : avoir raison trop tôt Tel n'est pas le cas du 100% électrique, même si le patron de l'alliance Renault-Nissan, optimiste, reste convaincu que sa part de marché atteindra les 10% du marché mondial en 2020, ses concurrents - comme PSA évoquant au mieux 5%. Le risque est d'avoir raison trop tôt. Aujourd'hui, la part des voitures électriques sur le marché français reste inférieure à 0,2%. PSA a récemment suspendu ses achats auprès de son fournisseur japonais, faute de pouvoir écouler ses modèles, l'objectif de vente étant à peine rempli à 50%. Les allemands, qui visaient un parc de 1 million de véhicules électriques en 2020, parlent désormais de la moitié. Pourtant, tout espoir n'est pas perdu. A preuve, les opérations de "déstockage" conduites par Citroën et Peugeot l'été dernier. Les offres de location à prix cassé de la C-Zero (90 euros par mois, contre 459 euros !) ont très vite trouvé preneur, au point que les tarifs ont été relevés jusqu'à 199 euros. Idem pour la iOn bradée à moins de 11.000 euros ! Si l'occasion fait le larron, elle montre aussi un certain appétit du client dès lors qu'il ne doit pas vider son livret A. Édition de l'UPSM aux responsables de Syndicats 24 octobre 2012 suite PAGE 21 Quel avenir pour l’automobile française ? (suite) LA CHINE Les français ont raté le coche : PSA a laissé sa présence s'éroder, Renault quasi absent compte sur son allié Nissan. La Chine, la Chine, la Chine ! Pas plus que la plupart des secteurs industriels, l'automobile n'échappe à cette rengaine. De fait, quand les marchés de l'Europe et de l'Amérique du Nord stagnent ou régressent, celui de l'empire du Milieu prospère à vitesse grand V La Chine est devenue le premier marché mondial en 2009, dépassant les Etats-Unis. Plus généralement, les marchés émergents absorbent désormais plus de la moitié des ventes de voitures neuves, contre 20% seulement au début du siècle. Ce n'est visiblement qu'un début : "Le marché automobile chinois croît de 8 à 10% par an. Selon nos projections, il sera égal à ceux des Etats-Unis et de l'Europe réunis dans dix ans. C'est un marché absolument clé", juge Frédéric Saint-Geours, directeur des marques chez PSA Peugeot Citroën. Car si le marché automobile mondial est passé de 70 millions de véhicules en 2007 à 77 millions en 2011, ce n'est pas à l'Europe (-2 millions), aux Etats-Unis (-2) ou au Japon (-3) qu'il le doit mais au reste de l'Asie et en particulier à la Chine: + 10 millions, estime Jacques Aschenbroich, le directeur général de Valeo. Certes, comme les autres, ce marché est sensible, et même très sensible, à la conjoncture et à la baisse relative de la croissance en Chine : après s'être envolées de 33% en 2010, les ventes n'ont augmenté que de 2,5% l'an dernier. Pour atteindre quand même 18,5 millions de véhicules. Mais avec moins de 100 véhicules pour 1.000 habitants, la Chine est encore très loin des 500 à 600 atteints dans les pays matures. Comment sont positionnés les acteurs français? Visiblement, ce sont les grands équipementiers (Valeo, Faurecia...) qui ont le mieux tiré leur épingle du jeu en accompagnant l'ensemble des grands constructeurs. "Nous avons des champions devenus mondiaux plus internationaux que leurs donneurs d'ordre français", rappelle ainsi Rémi Cornubert, d'Oliver Wyman. Valeo, présent depuis 1994, prévoit de doubler son chiffre d'affaires en Chine à l'horizon 2015 (1,5 milliard d'euros), portant à 11% la part de l'empire du Milieu dans son chiffre d'affaires, et de le doubler encore d'ici 2020 ! Quant à Faurecia, l'Asie - Chine en tête - est également une priorité. La filiale de PSA, très autonome vis-à-vis de sa maison mère, vise 50 usines sur place et 2,5 milliards d'euros de ventes en 2015 (0,45 en 2008) ! "Nous avons commencé à travailler avec les constructeurs chinois qui ont une chance d'acquérir une taille mondiale, notamment Geely", précise Yann Delabrière, PDG de Faurecia. Du côté des constructeurs, c'est plutôt la soupe à la grimace. A commencer par PSA. Entré, il y a un quart de siècle en partenariat (liquidé dix ans plus tard) avec Guangzhou, Peugeot a été un pionnier en Chine. Mais après un pic à 8% il y a une décennie - dans un marché beaucoup moins développé -, sa part n'y dépasse plus 3,4% aujourd'hui. Avec 404.000 véhicules, il est loin des 2,4 millions de GM en 2011 ou des 18% du marché détenus par Volkswagen ! Le constructeur français, il est vrai, n'a jamais vraiment pris la réelle dimension de ce marché, se contentant d'assembler sur place des modèles amortis et en fin de vie sur ses marchés matures. Car si la Chine est un marché clé, il est aussi exigeant et même haut de gamme. "Le prix moyen d'un véhicule premium est compris entre 25.000 et 50.000 dollars et l'Audi A6 est la berline qui se vend le mieux en Chine", indique-t-on chez Faurecia. Faute d'avoir adapté ses produits à la demande locale, PSA a vu ses positions s'éroder. Depuis quelque temps, il met les bouchées doubles. Mais la Peugeot 408, premier modèle conçu spécialement pour la Chine, n'a été lancée qu'en 2010. Et, effort louable de Citroën, la DS5 a été dévoilée cette année lors du Salon automobile de Shanghai en première mondiale. La marque aux chevrons lance également la C-Elysée, une C4 dédiée aux classes moyennes des pays émergents ou largement émergés et la C4L, version allongée. Quant à Renault, après l'échec d'une tentative d'implantation en 1993, il revient par la petite porte. Un accord-cadre a été signé en avril dernier, au Salon de Pékin, avec le chinois Dongfeng pour commencer à produire d'ici deux à quatre ans (4x4 Koleos, berline Talisman). Si ses ventes propres (environ 24.000 par an) sont marginales, Renault peut d'une certaine façon comptabiliser celles de son allié Nissan, entré sur le marché chinois en 2003, après la signature de l'alliance. Non sans résultats : la Chine, avec 1,25 million de voitures vendues en 2011, est le premier débouché de Nissan et le plus rentable. Carlos Ghosn, le PDG de Renault-Nissan, en annonçant la construction d'une quatrième usine (avec Dongfeng) a fixé la barre à 2 millions en 2015. Comme quoi, partir tard n'est pas un handicap rédhibitoire. A condition d'y aller avec des moyens... suite LA NAVETTE Édition de l'UPSM aux responsables de Syndicats 24 octobre 2012 PAGE 22 Quel avenir pour l’automobile française ? (suite et fin) LES ÉQUIPEMENTIERS Parce qu'ils ont su se remettre en cause et innover, Valeo, Faurecia et consorts affichent une santé qui détonne dans la filière. Restructurée, innovante, leader dans ses métiers, rentable et fortement internationalisée : la fine fleur des équipementiers français aborde la nouvelle crise économique dans une bien meilleure position que les constructeurs automobiles nationaux, dont certains ont sollicité dès juin des mesures de soutien des pouvoirs publics pour résister à la chute des immatriculations. Michelin, Valeo, Faurecia, Plastic Omnium, MGI Coutier et consorts sont en mesure d'apporter aux manufacturiers une solide capacité de développement sur les technologies et les lancements mondiaux, un atout de poids à l'heure où les constructeurs sont devenus très dépendants de leurs fournisseurs qui représentent 70% de la valeur du véhicule. Avec la crise, le rapport avec les donneurs d'ordre s'est rééquilibré. Ces derniers ont tout intérêt à moins jouer la concurrence entre équipementiers que des collaborations durables avec une poignée d'entre eux, solides financièrement, pour sécuriser leurs approvisionnements et profiter de leur créativité. PSA Peugeot Citroën, resté actionnaire de Faurecia, ne peut que se féliciter de cette évolution qui lui a permis de limiter la baisse de ses propres résultats en 2011. Entamée dès les premiers signaux de la crise de 2008, la rationalisation d'envergure menée notamment par Valeo, Faurecia et Plastic Omnium leur a permis d'abaisser leur point mort, tout en préservant leurs dépenses de R&D encore largement ancrées en France, et de profiter du rebond de la demande mondiale de 2010 et 2011. Un rebond alimenté par les nouveaux marchés des Bries, où ils multiplient les implantations pour suivre leurs clients traditionnels, mais aussi approvisionner une industrie locale en plein essor. "En trois ans, Valeo a doublé son chiffre d'affaires en Chine à 1 milliard d'euros", explique son directeur général, Jacques Aschenbroich, qui table sur un nouveau doublement d'ici 2015. Profitant de la consolidation de leur industrie, Faurecia comme Plastic Omnium n'ont pas hésité à acheter des parts de marché et des technologies à bon compte. LA NAVETTE La restructuration a également commencé parmi les acteurs de taille plus modeste, avec le concours des constructeurs, d'équipementiers de rang 1 et de l'Etat, via le fonds d'investissement dédié, FMEA, créé en 2008. "Il reste beaucoup à faire", déclare cependant Sylvie Rucar, du cabinet de conseil Alix Partners. Pour les petits de surface financière modeste, le FMEA tente d'intervenir en constituant des pôles d'excellence. "Nous nous attachons à développer la relation entre les rangs 1 et 2 en termes de compétitivité, d'innovation et d'accompagnement à l'international pour contribuer à la qualité et à la performance de l'ensemble de la filière", renchérit Arnaud de David-Beauregard, vice-président de la Fédération des industries des équipements pour véhicules (Fiev). Si la baisse des effectifs, surtout ouvriers, dépasse 20% sur trois ans, l'amélioration du mixproduit vers le haut de gamme tout comme l'exportation (52% de l'activité) ou le business développé à l'étranger ont compensé partiellement la décrue du chiffre d'affaires réalisé en France. C'est particulièrement vrai pour les pièces en plastique et caoutchouc qui voyagent facilement. Les champions français ont réduit leur dépendance vis-à-vis des marques nationales au profit des étrangères, allemandes, américaines et asiatiques. Au point que Volkswagen est devenu le premier client de Faurecia et de Plastic Omnium ! En 2011, le chiffre d'affaires de l'ensemble de la profession a crû de 4,2% à 18,6 milliards d'euros, selon la Fiev. Mais 2012 s'annonce moins faste avec déjà une baisse de 11% au premier semestre. Cette tendance devrait se confirmer sur l'année. Faute de visibilité, la fédération reste très prudente sur ces perspectives. Édition de l'UPSM aux responsables de Syndicats FLORENCE BAUCHARD ET CLAUDE VINCENT 24 octobre 2012 PAGE 23 Source Enjeux les Échos Octobre 2012 PSA-RENAULT : TRENTE ANS, DE BILLANCOURT À AULNAY 1984 Premier monospace conçu avec Matra et fabriqué à Romorantin, ouvrant ainsi un nouveau segment de marché en Europe. Nomination de Jacques Calvet (photo) à la présidence du directoire du groupe Peugeot. 1989 Les mois de septembre et d'octobre sont marqués par la dernière très grande grève connue dans les usines Peugeot, qui restent bloquées près de dix semaines. 1992 Louis Schweitzer succède à Raymond Lévy à la têle de Renault. Constitution d'une joint-venture avec Dongfeng Motors pour l'assemblage des Citroën ZX en Chine (DCAC) : une usine terminale est installée dans la province de Hubei, à Wuhan. Les activités mécaniques sont basées à Xiangfan. Le 31 mars, la production de Renault s'arrête dans l'usine de Billancourt sur Ille Seguin. 1994 Ouverture du capital à hauteur de 28,1% au public. Volvo en contrôle 11,4%. L'Etat descend à 53% des actions. 1996 Sortie du premier Scénic. Renault est privatisé. La part de l'Etat dans le groupe ramenée à 46%. suite LA NAVETTE Édition de l'UPSM aux responsables de Syndicats 24 octobre 2012 PAGE 24 PSA-RENAULT : trente ans, de Billancourt à Aulnay (suite) 1997 Nomination de Jean-Martin Folz (photo) à la présidence du directoire du groupe. Fermeture de l'usine belge de Vilvoorde. 1998 Acquisition de Sevel Argentina par PSA Peugeot Citroën. Conclusion d'une OPA amicale d'Ecia sur l'équipementier Bertrand Faure. Le nouvel ensemble, Faurecia, est contrôlé à plus de 50% par PSA Peugeot Citroën. Le groupe présente son moteur à injection directe Diesel common rail HDi qui sera commercialisé sur l'ensemble des gammes Peugeot et Citroën. Lancement de la 206 (photo) et de la Xsara Picasso. 1999 Accord avec Ford dans les moteurs diesel. Acquisition de 36,8% du capital du japonais Nissan, pour 33 milliards de francs. Renault devient le quatrième constructeur mondial. Renault prend le contrôle du roumain Dacia (51%). 2000 Acquisition de 70% de Samsung Motors et cession des camions au suédois Volvo. Présentation et lancement du système de filtre à particules (FAP) pour les moteurs diesel. 2001 Lancement de la 307 et de la Citroën C3. Nouvelle usine de Porto Real, au Brésil (photo) pour produire des Citroën Xsara Picasso et des Peugeot 206. Lancement de la Vel Satis fabriquée à Sandouville, pour relancer le haut de gamme de Renault. LA NAVETTE Édition de l'UPSM aux responsables de Syndicats 24 octobre 2012 suite PAGE 25 PSA-RENAULT : trente ans, de Billancourt à Aulnay (suite) 2002 L'Etat passe à 25,9% du capital de Renault. Accord de coopération avec BMW pour des moteurs à essence. Décès de Pierre Peugeot, président du conseil de surveillance. Lancement de la Citroën Elysée (photo). Signature de l'accord sur la deuxième phase de la coopération entre PSA Peugeot Citroën et Dongfeng Motors. DCAC devient DPCA (Dongfeng Peugeot Citroën Automobile) avec l'annonce du lancement d'un modèle Peugeot. 2003 Annonce de la création d'une nouvelle usine en Slovaquie. Le constructeur de matériel agricole allemand Claas prend le contrôle de Renault Agriculture. Renault arrête l'Avantime (photo) et Matra Automobile disparait. 2004 Lancement de la Logan pour les marchés émergents (photo). Doublement de la capacité industrielle en Chine. Lancement de la Peugeot 407 et de la Citroën C4. Inauguration du nouveau Centre de design à Vélizy, l'Automotive Design Network (ADN), regroupant l'ensemble des studios de style et d'innovation du groupe. 2005 Carlos Ghosn, déjà président de Nissan, succède à Louis Schweitzer à la tête de Renault. Inauguration de l'usine tchèque partagée avec Toyota à Kolin suite LA NAVETTE Édition de l'UPSM aux responsables de Syndicats 24 octobre 2012 PAGE 26 PSA-RENAULT : trente ans, de Billancourt à Aulnay (suite) suite LA NAVETTE Édition de l'UPSM aux responsables de Syndicats 24 octobre 2012 PAGE 27 PSA-RENAULT : trente ans, de Billancourt à Aulnay (suite) La part de l'Etat descend à 15% dans Renault. Signature en Israël d'un projet mondial de voitures électriques. Joint-venture avec l'indien Bajaj Auto pour fabriquer une voiture à 2.500 dollars. Lancement de la C4 (photo). Pose de la première pierre de l'usine de Kaluga (Russie). Signature d'un accord avec Mitsubishi Motors Corporation. 2009 Arrivée de Philippe Varin (photo), ancien de Pechiney et Corus, à la présidence du directoire, après la démission forcée de Christian Streiff. L'Etat prête 6 milliards d'euros à Renault (plus 500 millions pour Renault Trucks) et permet un nouvel accès au crédit à leurs filiales financières à hauteur de 1 milliard. En échange Renault et PSA s'engagent à ne pas fermer d'usines en France pendant cinq ans. Renault arrête la production de la Vel Satis, ce qui marque une pause durable dans les tentatives du constructeur sur le haut de gamme. Sortie du Scénic 3. L'Etat tente de susciter la constitution d'une filière électrique en impliquant Renault et Nissan ainsi que le CEA. 2010 Alliance entre Daimler et Renault-Nissan. Daimler détiendra 3,1% de Renault comme de Nissan, lesquels posséderont chacun 1,55% de l'industriel allemand. PSA négocie sans succès un accord capitalistique avec le japonais Mitsubishi avec lequel il entretient déjà plusieurs coopérations techniques. Signature d'une joint-venture avec China Changan Automobile Group en Chine (approuvée en juillet 2011 par les autorités chinoises). Lancement des nouvelles C5 et Peugeot 408. Et de la DS3. Sochaux fête son 20.000.000ème véhicule en décembre (photo). suite LA NAVETTE Édition de l'UPSM aux responsables de Syndicats 24 octobre 2012 PAGE 28 PSA-RENAULT : trente ans, de Billancourt à Aulnay (suite et fin) 2011 Renault s'engage à consacrer à la France 40% de ses prochains investissements. Fausse affaire d'espionnage : mise à pied de trois responsables accusés à tort d'avoir vendu des données confidentielles à l'extérieur. Le groupe au losange reconnaît l'ensemble de ses torts. Et nomme un nouveau numéro 2 Carlos Tavares (photo), à la place de Patrick Pélata. Sortie des premiers véhicules électriques accessibles à tous : Kangoo ZE (photo) et Fluence ZE, suivis de Twizy et Zoé. BMW et PSA Peugeot Citroën créent une joint-venture pour les technologies hybrides et y investissent 100 millions d'euros. PSA signe son retour en Inde après l'échec des années 90. Lancement du premier hybride diesel de PSA. 2012 Renault change de partenaire pour les batteries électriques. Le coréen LG et non plus Nissan sera chargé de les produire en France, mais pas à Flins pour des problèmes d'incompatibilité technique. PSA Peugeot Citroën et General Motors créent une "alliance stratégique mondiale". Le constructeur américain entre à hauteur de 7% dans le capital de PSA et devient son deuxième actionnaire après la famille. PSA annonce un plan de restructuration comprenant la fermeture d'Aulnay, des réductions de capacité à Rennes et des compressions de personnel. Suite à son effondrement en Bourse, PSA sort de l'indice du CAC40 à Paris. Lancement au printemps de la 208 (photo) à Mulhouse et Poissy. PSA renonce à son projet d'investissement direct en Inde en raison de la présence de General Motors surplace. LA NAVETTE Édition de l'UPSM aux responsables de Syndicats 24 octobre 2012 PAGE 29 Source Les Échos 11 octobre 2012 Les tout petits syndicats s'invitent dans les TPE C e sont les invités surprises des élections syndicales dans les TPE (moins de 11 salariés), du 28 novembre au 12 décembre. Lundi dernier, la Direction générale du travail a annoncé que, outre les candidatures des "gros" syndicats (CGT, CFDT, FO, CFTC, CGC, Unsa, Solidaires), celles de trois organisations quasi inconnues ont été retenues, portant à 10 le nombre de syndicats en lice pour ce scrutin, dernière étape de la réforme de la représentativité, qui vise à... clarifier le paysage syndical. On y retrouve d'abord, seule à disposer d'une petite notoriété, la Confédération nationale du travail (CNT), "anarchosyndicaliste et révolutionnaire", née en 1946 du départ de militants CGT refusant la mainmise du PC. Elle ne compte que 150 syndicats et 5.000 adhérents mais a fait montre de sa virulence dans les actions contre le CPE en 2006 et contre la réforme des retraites en 2010. La seconde, la Confédération autonome du travail (CAT), a, elle aussi, été créée en 1953, par des cégétistes claquant la porte, mais sur des bases opposées : elle est "réformiste" et rechigne au conflit, au point d'être parfois traitée de "syndicat jaune" (au service du patronat), ce qu'elle réfute. Elle revendique 20.000 adhérents et une présence dans 200 entreprises, dont Darty, Carrefour et la MAIE. LA NAVETTE Des critères souples Le dernier candidat mystère est aussi le dernier-né : le Syndicat antiprécarité (SAP) est apparu en 2008, à l'initiative de cégétistes "durs" de Veolia Transport, en conflit avec leur fédération. Concentrés dans l'Ouest parisien, ses... 400 adhérents luttent "contre la précarité de l'emploi" en misant sur l'action juridique, "trop délaissée par les gros syndicats". Le SAP a présenté une centaine de candidats aux élections prud'homales de 2008, obtenant un siège, à Nanterre. Que viennent-ils faire dans ce scrutin ? "Nous ne touchons aucune subvention et n'avons pas les moyens de communiquer. C'est une opportunité unique de se faire connaître gratuitement !" explique sans ambages Serge Bouakil, vice-président de la CAT. De fait, le ministère du Travail assurera l'envoi de la propagande électorale aux 4,6 millions de salariés électeurs. Ces trois organisations ont habilement profité de critères d'éligibilité souples fixés par la loi sur la représentativité (deux ans d'existence, indépendance, respect des valeurs républicaines) pour s'inviter dans l'enveloppe. Édition de l'UPSM aux responsables de Syndicats DEREK PERROTTE 24 octobre 2012 PAGE 30 Source Les Échos 11 octobre 2012 Emploi : le difficile parcours des enfants d'immigrés maghrébins D eux poids, deux mesures pour les jeunes Français issus de l'immigration. Le chemin qui mène à 1'e.mploi un fils ou une fille né en France de père ou de mère nord-africain, ou des deux, demeure bien plus escarpé que celui parcouru par un descendant d'immigré d'Europe du Sud. Avantage aux seconds, dont 82% - soit autant que de "descendants de natifs de France" - trouvent un emploi cinq ans après leur sortie du système éducatif, contre seulement 61% pour les premiers, signale l'Insee dans son dernier rapport consacré aux "Immigrés et descendants d'immigrés en France" et publié hier. Près d'un tiers des jeunes issus de l'immigration africaine (29%) ont dû traverser au moins deux années de chômage avant de décrocher un job. Les "descendants de natifs de France" sont presque trois fois moins nombreux dans ce cas (11%) et jouissent d'une plus grande sécurité de l'emploi : 74% finissent par décrocher un CDI cinq ans après leur sortie d'école. C'est 7 points de plus que pour les enfants d'immigrés maghrébins. Manque de relations sociales Explication : les descendants d'immigrés d'Afrique ont des parcours de formation plus courts. D'où un niveau de qualification plus faible. Près d'un tiers (30%) n'ont aucun diplôme, sinon le brevet. C'est deux fois plus que pour les enfants d'immigrés d'Europe du Sud ou de natifs de l'Hexagone. Les 12% peut les aider à trouver un emploi. A l'opposé, "les descendants de Portugais sont en situation d'intégrer le marché du travail dans des segments où leur réseau familial ou communautaire offre un accès plus rapide", poursuit ce sociodémographe. Les discriminations continuent d'exister, même si elles restent difficiles à apprécier. La prise en compte de certains facteurs, tels que l'origine sociale et le lieu de résidence, "permet d'expliquer 61% de l'écart entre le taux d'emploi des descendants d'immigrés d'Afrique et celui des descendants de natifs", signale l'Insee. N'ayant pas les réseaux de ces derniers, les jeunes d'origine maghrébine ont beaucoup plus souvent recours à la technique du CV pour décrocher un stage ou un premier emploi. Une démarche qui aurait tendance à les exposer à une sélection par l'origine. JOËL COSSARDEAUX LA NAVETTE Édition de l'UPSM aux responsables de Syndicats 24 octobre 2012 IN PAGE 31 Les entreprises ont peur d'embaucher des chômeurs de longue durée, qui risquent d'être dépassés par la technologie. The Daily Beast (extraits) - New York I l est difficile de trouver du travail quand on a un casier judiciaire. Mais, selon une enquête menée auprès de 1.500 recruteurs par le fournisseur [américain] de logiciels de recrutement Bullhorn, c'est encore pire quand on est au chômage depuis deux ans. Deux millions d'Américains sont dans ce cas. Et, au cours des deux dernières années, plusieurs millions d'autres ont travaillé à temps partiel de manière subie ou ont renoncé à chercher un emploi. L'économie américaine n'a créé que 96.000 emplois en août, un nombre insuffisant pour permettre de suivre la croissance démographique. Par ailleurs, la durée moyenne du chômage est actuellement de quatre mois et demi, la plus longue depuis le début de la récession, alors que le nombre de postes vacants n'a jamais été aussi élevé depuis 2009. Selon 36% des recruteurs interrogés par Bulhorn, dès six mois d'inactivité, il devient "difficile" de retrouver un emploi. Même les trous de moins de six mois sur un CV risquent d'anéantir toutes les chances d'un candidat, si l'on en croit 21% des sondés. En d'autres termes, "le chômage peut rendre inemployable". Sur un marché du travail déprimé, nombreux sont ceux qui survivent en passant d'un boulot à l'autre. Mais même cette instabilité forcée constitue un problème. Une personne âgée de 55 ans présentant une carrière stable décrochera plus facilement un poste qu'un trentenaire qui a quitté une entreprise avant d'y avoir passé un an. Cela malgré le fait que, pour 70% des sondés, les candidats âgés d'une trentaine d'années sont les plus faciles à placer. LA NAVETTE Quels sont les principaux handicaps à surmonter pour un chômeur ? L'instabilité, répondent 39% des professionnels interrogés. Etre sans emploi depuis plus d'un an, estiment 31% d'entre eux. Pour 28%, un déroulé de carrière interrompu par des périodes d'inactivité. Les mauvaises nouvelles ne s'arrêtent pas là. D'après 31% des recruteurs, si vos compétences "ne sont plus recherchées", vous êtes sans doute fichu. Pour 26% d'entre eux, le pire est de se retrouver "déconnecté des technologies modernes" ou du "monde du travail moderne". Cela apporte de l'eau au moulin de certains économistes qui estiment que le "déficit de compétences" explique pourquoi le marché du travail se redresse si lentement depuis la fin de la récession. Après avoir procédé à des coupes claires dans leurs effectifs durant la crise, les entreprises ont appris à se débrouiller en utilisant davantage de nouvelles technologies et moins de salariés. Les travailleurs peu qualifiés ne peuvent plus lutter. Enfin, 78% des recruteurs affirment qu'avoir subi un licenciement "est le facteur qui restreint le plus gravement les perspectives d'emploi d'un candidat". On le sait, le chômage nourrit le chômage. Mais, quand tous les traits caractéristiques de la population au chômage correspondent aussi précisément à ce qui effraie le plus les recruteurs, on commence à comprendre pourquoi l'ombre de la récession ne se dissipe pas. Édition de l'UPSM aux responsables de Syndicats ALEX KLEIN 24 octobre 2012 L Le chômage, pire qu'un casier judiciaire RNATION A TE Source Courrier international 18 au 24 octobre 2012 IN PAGE 32 L Un algorithme va vous embaucher RNATION A TE Source Courrier international 18 au 24 octobre 2012 Les logiciels de recrutement, prétendument objectifs, se généralisent. Mais les critères retenus par les tests de personnalité peuvent conduire à des discriminations. The Wall Street Journal (extraits) - New York N aguère, quand le fabricant d'imprimantes Xerox recrutait pour ses centres d'appels, il portait une attention particulière aux candidats qui avaient déjà fait ce genre de travail. Puis un programme informatique lui a expliqué qu'en réalité l'expérience n'avait aucune importance. D'après ce logiciel, ce qui définit un bon employé de centre d'appels - un employé qui ne démissionnera pas avant que la société n'ait amorti les 5.000 dollars qu'a coûté sa formation -, c'est sa personnalité. Les statistiques montrent ainsi que les individus créatifs ont davantage tendance à rester pendant les six mois requis que les individus curieux. Après un test de six mois, à l'issue duquel le taux de démission a baissé de 20%, Xerox a décidé de confier le recrutement pour ses 48.700 postes en centre d'appels à un logiciel qui demande aux candidats de choisir entre des déclarations comme "Je pose plus de questions que la plupart des gens" ou "Les gens ont en général confiance en ce que je dis". Dans un nombre croissant de sociétés, le responsable du recrutement est un algorithme. Les facteurs qu'il examine diffèrent de ceux auxquels les candidats sont habitués. Auparavant, les employeurs s'appuyaient sur l'examen du parcours professionnel et sur des entretiens ; aujourd'hui, ils font appel à des tests de personnalité et à l'analyse des données. Désireux de réduire les coûts et d'augmenter la productivité, ils cherchent à prévoir si tel candidat démissionnera trop tôt, réclamera une indemnité pour invalidité ou volera. Il y a longtemps que les tests de personnalité jouent un rôle dans le recrutement. Mais la nouveauté, c'est l'ampleur du phénomène. La puissance des ordinateurs et la sophistication des logiciels permettent désormais d'évaluer davantage de candidats, de recueillir davantage d'informations et de fouiller plus profondément dans la vie et les centres d'intérêt des intéressés. Certaines sociétés étudient des variables comme le rapport à l'alcool ou la distance entre le domicile et le lieu de travail. Cette démarche peut poser des problèmes juridiques si elle finit par exclure des personnes handicapées ou issues des minorités [plus susceptibles de vivre en lointaine banlieue]. Et, même si tel n'est pas le cas, elle peut sembler injuste, voire malsaine. "Les gens ne sont pas très à l'aise lorsqu'on fait appel à des facteurs extrinsèques ou personnels", explique Dennis Doverspike, professeur de psychologie industrielle et organisationnelle à l'université d'Akron, dans l'Ohio. De manière plus générale, les entreprises souhaitent collecter et analyser de plus en plus de données relatives aux salariés. Les budgets affectés aux logiciels dits de gestion des talents ont représenté dans le monde 3,8 milliards de dollars en 2011, soit 15% de plus qu'en 2010, selon le cabinet d'études Gartner. Les géants de l'informatique sont en train de se placer sur ce nouveau marché. En août, IBM a racheté Kenexa, une société qui aide les entreprises à recruter leurs salariés grâce à l'analyse statistique, pour 1,3 milliard de dollars. En février, Oracle a acquis le concepteur de logiciels de recrutement Taleo, pour 1,9 milliard de dollars ; et, en décembre 2011, l'allemand SAP avait racheté SuccessFactors, une société spécialisée dans l'évaluation, le recrutement et la rémunération, pour 34 milliards de dollars. suite LA NAVETTE Édition de l'UPSM aux responsables de Syndicats 24 octobre 2012 PAGE 33 Un algorithme va vous embaucher (suite et fin) Xerox travaille de son côté avec Evolv, une start-up de San Francisco spécialisée dans le recrutement des salariés payés à l'heure qui a défini le profil de l'employé idéal de centre d'appels : celui-ci habite près de son lieu de travail, dispose d'un moyen de transport fiable et utilise au moins un réseau social, mais pas plus de quatre. Il est créatif, mais pas particulièrement curieux ni empathique. Les candidats passent un test de trente minutes qui vise à déterminer leur personnalité et les place dans diverses situations de travail. Puis le logiciel crache le résultat : rouge pour faible potentiel, jaune pour potentiel moyen et vert pour fort potentiel. Xerox accepte certains jaunes s'il pense pouvoir les former, mais engage surtout des verts. Le recrutement a beau être un acte essentiel pour une entreprise, les méthodes conventionnelles sont trop peu rigoureuses, prétendent certains experts. Selon la personne qui prend la décision, les motifs d'une embauche peuvent varier considérablement - du niveau d'études à l'apparence, en passant par le parcours professionnel. Les recruteurs qui fonctionnent à l'instinct tombent parfois juste, mais leur intuition ne permet pas en général de prévoir ce qu'une personne donnera une fois embauchée. Les sociétés qui proposent une approche statistique du recrutement affirment pouvoir améliorer les résultats en réduisant l'influence des préjugés des recruteurs. Les grandes entreprises ne sont pas les seules à faire appel aux logiciels. Richfield Management, une société de traitement des déchets de Flint, dans le Michigan, qui emploie 200 éboueurs, souhaitait repérer les candidats susceptibles de se blesser et d'abuser des indemnités maladie. Il y a un an et demi, elle a adopté le test en ligne mis au point par une petite entreprise, Exemplar Research Group. Les candidats doivent choisir entre des déclarations comme "Quand je travaille pour une entreprise, je suis fier de contribuer à ce qu'elle soit aussi rentable que possible" et "Je ne me soucie que de ce que je peux retirer financièrement de mon emploi". L'objectif est d'évaluer leur stabilité émotionnelle, leur éthique professionnelle et leur attitude vis-à-vis de la drogue et de l'alcool. D'après Richfield, les demandes d'indemnités pour maladie ont chuté de 68% depuis qu'il utilise ce système. "Nous ne faisons aucune exception : si une personne a un mauvais résultat au test, nous ne l'embaucherons pas", affirme Fred Vezzetti, le directeur général. Le recrutement fondé sur l'analyse des données peut toutefois exposer une entreprise à des risques juridiques. Les systèmes qui éliminent, même involontairement, les candidats âgés ou issus des minorités peuvent enfreindre la législation fédérale sur l'égalité des chances. Si une méthode de recrutement est accusée en justice d'être discriminatoire, l'entreprise doit démontrer que les critères qu'elle utilise permettent effectivement de prédire l'adéquation de la personne au poste. Au sein du cabinet d'avocats Jackson Lewis, Matthew Camardella est de plus en plus sollicité par des entreprises qui souhaitent vérifier que leurs nouveaux outils informatiques respectent la loi. Plus les ensembles de données sont importants, plus le nombre de relations statistiques susceptibles d'exclure involontairement des groupes protégés est élevé, explique-t-il. Mais les entreprises peuvent aussi prouver plus facilement que les facteurs mesurés sont importants pour le poste à pourvoir. JOSEPH WALKER SONDAGE 92% des entreprises américaines auront utilisé les réseaux sociaux en 2012 pour trouver de nouveaux talents. Les plus prisés : Linkedln (93% des recruteurs), Facebook (66%) et Twitter (54%). Enquête réalisée auprès de plus d'un millier de responsables des ressources humaines par Jobvite, une société spécialisée dans le recrutement via les médias sociaux. LA NAVETTE Édition de l'UPSM aux responsables de Syndicats 24 octobre 2012 PAGE 34 Source Le Monde 5 octobre 2012 Pourquoi Abdessemed tape-t-il si dur ? A travers vingt-cinq oeuvres, dont six monumentales, le Centre Pompidou présente, jusqu'au 7 janvier à Paris, la première grande exposition consacrée à l'artiste français Adel Abdessemed. "Abdessemed adresse des directs aux images du monde. Comme le coup de poing du boxeur, il laisse le spectateur groggy", confie Alfred Pacquement, directeur du musée national d'art moderne. Who's Afraid of the Big Bad Wolf ?, 2011-2012, animaux naturalisés, acier, fils de fer. U ne rétrospective à 41 ans au Centre Pompidou, peu d'artistes peuvent se flatter d'une reconnaissance si prompte en ce lieu. Aux EtatsUnis et en Allemagne, où il n'est pas rare que des artistes encore jeunes soient ainsi mis en évidence, ce ne serait pas étonnant. Au Centre Pompidou, où l'on est timoré quand il s'agit de défendre des artistes de moins de 50 ans, surtout quand ils travaillent en France, le cas est exceptionnel. Adel Abdessemed ne l'ignore pas, mais quand on le lui fait remarquer, il répond sur le ton de la plaisanterie que 41 ans, ce n'est plus si jeune. Il n'ignore pas non plus qu'une trajectoire si rapide lui vaut des détracteurs qui veulent croire que son succès s'explique par le soutien de François Pinault. Pour l'exposition, celui-ci a en effet prêté Décor, les quatre Christs en fil de fer barbelé que le collectionneur a acquis au début de l'année lors de leur présentation dans la galerie David Zwirner, à New York, et qu'il a présentés cet été à Colmar à proximité immédiate du polyptyque de Grunewald, donc du Christ qu'Abdessemed a transposé de la peinture à la sculpture. suite LA NAVETTE Édition de l'UPSM aux responsables de Syndicats 24 octobre 2012 PAGE 35 Pourquoi Abdessemed tape-t-il si dur ? (suite et fin) Coup de tête — 2011-2012 Chez Zwirner, le collectionneur a pris aussi le groupe de marbre Coup de tête, d'après celui que Zinedine Zidane assena à Marco Materazzi, dont une version plus grande en bronze est placée devant le Centre le temps de l'exposition, et suscite d'innombrables photographies. Qui a visité à Venise la fondation de François Pinault sait combien il défend de longue date l'artiste. Lequel l'admet évidemment, tout en faisant observer qu'il a d'autres collectionneurs et que Who's Afraid of the Big Bad Wolf ? lui appartient et qu'il se refuse à le céder, fûtce à son prestigieux amateur. Or, l'œuvre est emblématique d'Abdessemed. C'est un panneau de 363 cm de haut et 779 de long couvert d'animaux sauvages naturalisés dont la fourrure a été légèrement brûlée à la flamme d'un chalumeau. Son efficacité visuelle est immédiate, en raison de ces dimensions et de ce qu'il a de farouche et de funèbre. Abdessemed précise que la plupart des bêtes – renards, lièvre... –ont été abattues en France, à l'exception des loups, qu'il a ajoutés aux EtatsUnis pour des raisons juridiques. Couchés les uns contre les autres, ces cadavres évoquent un massacre monstrueux, la folie d'un dépeupleur. Destruction de la nature par l'homme ? C'est l'interprétation première. Une deuxième, qui fait de l'œuvre une allégorie de tout carnage, se trouve renforcée quand on s'aperçoit que le panneau a les proportions du Guernica de Picasso, l'allégorie de la guerre la plus célèbre de toute l'histoire de l'art. les émigrations tragiques, celles du passé autant que celles d'aujourd'hui. Le Wall Drawing, composé de neuf cercles de barbelé, est aussi explicite : titre ironique, matériau cruel, perfection de la forme close. C'est sa force : Abdessemed invente des expressions plastiques à la fois intensément provocantes, simples à appréhender et vivement explicites. La démesure est l'une de ses meilleures alliées : accumulation d'animaux morts, terres cuites aux dimensions de voitures brûlées, vraies carcasses d'avions enlacées de Telle mère tel fils. Susciter un malaise physique est une autre de ses bonnes manières : ballet d'insectes et de serpents inquiétants dans la vidéo Usine ou jeune femme allaitant un cochon de lait dans Lise, autre vidéo sur grand écran. On se souvient, bien qu'il ne les remontre pas ici, de ses photographies de sangliers et de serpents sur un trottoir parisien, qui semblent prophétiser qu'après une catastrophe planétaire, les animaux sauvages envahissent les villes vidées de leurs populations. Abdessemed frappe dur, comme Zidane un certain soir. Pourquoi si fort ? Dans une société saturée de fausses images et hébétée de divertissements, son art de l'irruption et de la percussion est l'un des derniers modes de dénonciation qui puisse opérer encore. Il entend retourner contre la société du spectacle ses procédés habituels, avec ce que cela exige de violence. Le danger serait que cette société le récupère et fasse de lui un de ces artistes stars qu'elle aime d'autant plus que leurs productions sont anodines et consensuelles. Comme LA DÉMESURE POUR ALLIÉE suffisent à le suggérer les titres, l'auteur d'Also sprach C'est dire qu'Abdessemed n'hésite pas à se mesurer à des Allah et de God is Design ne risque pour l'heure rien de rivaux de premier plan, mais aussi qu'il revendique la tel. valeur symbolique de l'œuvre d'art. Ses quatre Christs en sont une autre preuve, ainsi que Hope, vieille barque chargée de sacs de plastique noir qui symbolise de toutes PHILIPPE DAGEN LA NAVETTE Édition de l'UPSM aux responsables de Syndicats 24 octobre 2012 PAGE 36 Source Le Monde 11 octobre 2012 Edward Hopper tel que vous l'ignoriez La rétrospective magistralement réalisée à Paris, au Grand Palais, rend au peintre américain son ampleur et sa variété Nighthawks "Oiseaux de nuit" 1942 P our son bonheur et son malheur, Edward Hopper (18821967) a peint en 1942 Nighthawks ("oiseaux de nuit") : une femme, deux hommes et le serveur dans un bar vivement éclairé, à un coin de-rue. Son bonheur : la toile est devenue l'emblème de la ville et de la vie américaines, assurant à son auteur une célébrité définitive. Son malheur : il en est de Nighthawks comme de la Joconde pour Vinci. A force d'être reproduite entière ou recadrée à des millions d'exemplaires, d'être affichée à l'état de poster ou d'affiche dans des millions d'endroits, la toile a fini par recouvrir à peu près entièrement l'œuvre, bien qu'elle soit très loin de la résumer. Elle fait office de couverture au catalogue de sa rétrospective au Grand Palais. Sans doute fallait-il un "visuel" qui frappe. Mais le choix n'en est pas moins regrettable, car le propos de l'exposition est - à l'inverse de ce que cette image laisse craindre - de rendre à Hopper son ampleur et sa variété, de donner à voir des parties entières de son travail méconnues et de le situer dans une histoire de la peinture à moitié américaine, évidemment, mais aussi à moitié française en raison des séjours de l'artiste à Paris. Ces trois buts sont atteints, et l'exposition est une réussite, bien construite dans ses choix et dont l'accrochage est d'une sobriété que les excès commis ailleurs actuellement ne rendent que plus précieuse. Ici, pas de rails au sol, ni de bruits de train ou de sirène enregistrés, ni de mannequin à l'effigie d'Humphrey Bogart dans Le Faucon maltais, qui sortit du reste un an avant Nighthawks. suite LA NAVETTE Édition de l'UPSM aux responsables de Syndicats 24 octobre 2012 PAGE 37 Edouard Hopper tel que vous l’ignoriez (suite et fin) La trajectoire d'Hopper n'en apparaît qu'avec plus de netteté. Elle commence par un talent précoce pour le dessin, puis c'est la New York School of Art, d'abord en classe d'illustration, puis en section "beaux-arts". Il y étudie avec Robert Henri, lui-même marqué par le réalisme européen, plutôt côté Courbet et Menzel que côté Manet. Il l'adapte à des sujets américains, principe qu'Hopper reprend vite à son compte mais dont il rafraîchit l'application en regardant de près l'impressionnisme, Degas, Pissarro et Renoir à Paris à partir de 1906. Dans cette partie, les œuvres d'Hopper sont justement confrontées à celles des Américains Henri, Eakins ou Bellows et des Européens Sickert, Vallotton ou Marquet. Whistler n'y aurait pas été inutile, d'autant qu'Hopper, entre 1915 et 1928, exécute une suite de gravures, aussi sèches et stylisées que celles de Whistler à Londres, marquant ses débuts à la première personne du singulier. Les principaux motifs de son œuvre à venir y sont : maisons dans des paysages vides, gares, homme seul dans une rue nocturne, fille dans sa chambre, nue devant la fenêtre ouverte. Sa manière y est aussi. La géométrie des façades, des trottoirs, des toits ou des poteaux électriques structure la composition par verticales et horizontales. Morceaux de nature, meubles et corps s'y trouvent pris, sans la moindre possibilité d'évasion. Sur ce point, la constance d'Hopper est flagrante des années 1920 à sa mort : d'Hôtel Room, en 1931, à New York Office, en 1962, le système ne faiblit pas. Chose plus remarquable encore : il s'applique aux vues d'extérieur aussi fermement qu'aux espaces clos. Les cimes des arbres tracent une droite, les herbes sont uniformément rases et l'électricité projette des triangles blancs sur le sol le long de la stationservice. Tout cela est logique, aussi logique que du Mondrian : puisque le monde nouveau est dirigé par les sciences exactes et leurs chiffres, la peinture de ce monde est commandée par des angles, des parallèles et des proportions. Hopper, à son insu, annonce la rigueur ultramoderne du minimalisme new-yorkais. Les couleurs sont divisées par des lignes continues et posées d'un geste régulier et neutre. Elles s'opposent durement ou s'accordent dans des harmonies claires d'une clarté de scialytique, de néon ou de soleil trop intense. Les visages y sont creusés d'ombres qui les défigurent, et la strip-teaseuse de Girlie Show, dans le cercle du projecteur, a moins l'air d'un être de chair que d'une création de plastique pop. Elle est un objet de consommation destiné à une, certaine fonction, ouvrière de l'érotisme. Tous les personnages, hommes et femmes, secrétaires et jardiniers, prostituées et retraités, sont semblablement réduits à une définition professionnelle, l'ordre social étant aussi strict que la géométrie des villes. Jusque dans les années 1940, Hopper peint ce désenchantement du monde et cette réification des humains avec un certain détachement, une sorte de discrétion perverse. Aussi la plupart des spectateurs et des critiques s'y trompent-ils alors et aiment en lui le chroniqueur de leur quotidien, sans se rendre compte qu'il leur en renvoie un reflet au mieux inquiétant, au pire effrayant. Sans doute pour dissiper enfin l'équivoque, il se risque dans ses dernières années vers des toiles de moins en moins descriptives, de plus en plus silencieuses. Excursion into Philosophy, Sun in an Empty Room, Second Story Sunlight sont les titres énigmatiques des chefs-d'œuvre de sa période métaphysique, à partir de 1959 - du Beckett en peinture. Leur réputation est de loin inférieure à celle de Nighthawks, mais ils n'en sont pas moins le sommet de sa création. PHILIPPE DAGEN Edward Hopper Grand Palais, Paris 8ème Du mercredi au samedi de 10 heures à 22 heures, le dimanche et le lundi de 10 heures à 20 heures. 12€. Jusqu'au 28janvier. rmngp.fr Couple Drinking 1906-1907 LA NAVETTE Édition de l'UPSM aux responsables de Syndicats 24 octobre 2012