Simulation d`images

Transcription

Simulation d`images
Simulation d’images
Chapitre 6. Exploitation du modèle :
Simulation d’images
125
Simulation d’images
6.1 Introduction
Dans l’objectif de disposer d’une référence entièrement numérique, nous étudions dans
ce chapitre la possibilité de simuler des images à partir du modèle dynamique de thorax et de
cœur que nous avons développé. L’intérêt est alors de pouvoir agir sur de nombreux
paramètres relatifs à l’anatomie et la dynamique des organes mais aussi aux dispositifs
d’acquisition d’images afin d’évaluer des algorithmes d’analyse d’images dans des
configurations très diverses. Nous généralisons dans ce sens les travaux développés dans le
cadre de la thèse de N. Pauna [Pauna-04] qui portaient sur l’évaluation de méthodes de
recalage en imagerie cardiaque TEP et IRM à partir d’une référence numérique statique. Nous
décrivons ci-après la simulation réaliste d’images des modalités IRM et TEP à partir de notre
modèle de thorax et de deux simulateurs disponibles à CREATIS : SIMRI (IRM1) et SORTEO
(TEP2).
6.2 Modèle numérique commun
Les deux logiciels de simulation ont en commun qu’ils utilisent en entrée une image
3D labellisée, c'est-à-dire où chaque structure anatomique est identifiée. Nous réalisons donc
une opération de binarisation des maillages des différentes structures pour obtenir une image
3D labellisée. Pour tous les instants du cycle respiratoire, nous pouvons donc obtenir des
images 3D du type présenté en Figure 6-1. Les images 3D obtenues sont de dimension
256x256x330 avec une résolution de 1.25 × 1.25 × 1 mm3.
Structure
Étiquettes
Fond
0
Thorax Extérieur
1
Thorax Intérieur
2
Poumon Droit : PD
3
Poumon Gauche : PG
4
Colonne Vertébrale
5
Moelle Épinière
6
Péricarde
7
Aorte
8
OG
9
VG
10
OD
11
VD
12
OD
PD
VD
Aorte
VG
OG
PG
Thorax
Colonne Vertébrale
Moelle Épinière
Figure 6-1. Structures anatomiques associées aux labels (à gauche) et coupe transverse d’une image 3D
labellisée de thorax (à droite)
1
2
Un rappel sur la technique IRM est disponible en annexe A.
De même, un rappel sur la technique TEP est disponible en annexe B.
126
Simulation d’images
6.3 Simulateur IRM : SIMRI
Un simulateur IRM appelé SIMRI3 a été co-développé par Creatis et le laboratoire de
RMN [Benoit-Catin-05]. Ce simulateur génère des images par RM 3D et est basé sur
l’équation de Bloch, l’approche la plus réaliste actuellement pour simuler la majorité des
phénomènes et artefacts pouvant se produire pendant la formation d’une image par RM. Codé
en langage C, il a été de plus installé sur une ferme de PC ce qui lui permet de travailler en
parallèle sur plusieurs processeurs et ainsi réduire les temps de calcul. Il permet notamment de
simuler des acquisitions en écho de spin ou en écho de gradient 2D ou 3D suivant des
séquences paramétrables à partir d’un volume de voxels décrivant l’objet à imager et
contenant les informations nécessaires pour calculer le vecteur de magnétisation local. Ainsi à
chaque voxel de notre fantôme labellisé, nous associons trois valeurs: la densité de proton (ρ)
et les deux constantes de relaxation T1 et T2.
La simulation sous SIMRI demande la pré-configuration d’une séquence. Les
séquences prennent en entrée une quinzaine de paramètres. Nous n’indiquerons ici que les
paramètres les plus importants :
• B0 : Champ magnétique statique principal en tesla
• seqname : SE2D, SE3D, GE2D ou GE3D (Séquences Spin Echo et
Echo Gradient pour images 1D, 2D et 3D).
• TE : Temps d’écho en ms
• TR : Temps de répétition en ms
• tacq : Temps d’acquisition en ms
• teta : Angle de bascule en degrés
• size : taille de l’image à traiter : 32, 64, 128, 256 …
Les valeurs de ces paramètres sont disponibles dans les en-têtes DICOM de nos
données originales, ce qui doit nous permettre de simuler des images dans les mêmes
conditions que l’acquisition réelle. Le problème principal est en fait de déterminer les
paramètres (T1,T2 et ρ) pour chaque structure. Dans ce but, une recherche bibliographique a
été réalisée. Après confrontation des données issues de plusieurs études [Spiller-00, Stadler05], les valeurs indiqués dans le tableau de la Figure 6-2 ont été retenues.
3
http://www.creatis.insa-lyon.fr/menu/ivolumique/segmentation/simri-hbc/index-us.html
127
Simulation d’images
Structure
Composante
ρ (%)
T1(ms)
T2(ms)
Fond
Air
0
0
0
Thorax Extérieur
Graisse, peau, os
73
754
68
Thorax Intérieur
Muscle
70
963
60
Poumon Droit
Poumon
27
1199 (insp) / 1333 (exp)
56.5
Poumon Gauche
Poumon
32
1199 (insp) / 1333 (exp)
56.5
Colonne Vertébrale
Tissue conjonctif, os
54
350
49
Moelle Épinière
Moelle
56
585
70
Péricarde
Myocarde
70
1100
50
Aorte
Sang
57
1600
100
OG
Sang
57
1600
100
VG
Sang
57
1600
100
OD
Sang
57
1600
100
VD
Sang
57
1600
100
Figure 6-2. Valeurs de ρ, T1 et T2 utilisées lors de la simulation du Thorax pour un B0 de 1.5T
Afin de juger du réalisme des images simulées, nous sélectionnons les mêmes paramètres de
séquence que pour les séries d’images par RM acquises pour construire notre modèle de
thorax 4D :
• Type de séquence : écho de gradient
• Temps de Répétition (TR) : 3.4886 ms
• Temps d’Écho (TE) : 1.7443 ms
• Angle de bascule: 90°
Le temps de répétition est ici très court et très inférieur aux temps T2 des différentes
structures. Par ce temps de relaxation T2 couplé à l’angle de bascule de 90°, la pondération
est d’un type assez particulier en T1/T2, caractérisé par exemple par la dominante blanche du
sang (rapport T1/T2 plus important) sur ces images (Figure 6-3(a)). Cependant SIMRI ne
semble pas encore être en mesure d’effectuer des simulations avec de tels paramètres, les
images obtenues après simulation ne respectant pas ce contraste en T1/T2 (Figure 6-4).
Nous avons donc utilisé une autre séquence IRM comme référence avec des paramètres plus
«standards» :
• Type de séquence : écho de gradient
• Temps de Répétition (TR) : 872.1 ms
• Temps d’Écho (TE) : 12.0 ms
• Angle de bascule: 90°
• Espacement entre coupes : 8 mm
• Matrice : 512 × 512 pixels
128
Simulation d’images
• Résolution spatiale : 0.98 × 0.98 mm²
• Champ de vue (FOV) : 502 × 502 mm²
Ces paramètres (TR long, TE court) sont caractéristiques d’une pondération essentiellement
dépendante de la densité de proton. Le sang apparaît noir sur des images acquises avec de tels
paramètres (Figure 6-3 (b)).
(a)
(b)
Figure 6-3. (a) Image par RM en pondération T1/T2. (b) Image par RM en pondération ρ
Nous avons réalisé des simulations 2D en utilisant ces derniers paramètres sur la même coupe
de notre modèle de thorax à différents instants des cycles respiratoire et cardiaque (Figure
6-4).
Figure 6-4. Coupe IRM simulée à 117 mm d’élévation à différents instants des cycles cardiaque et respiratoire
129
Simulation d’images
Les images obtenues présentent une échelle de contraste très proche des images par RM
réelles (Figure 6-3(b)). En relevant les valeurs de chaque région et en considérant que le
thorax extérieur est la structure présentant la luminosité la plus élevée et les poumons la plus
faible, nous pouvons calculer la valeur d’intensité relative moyenne de chaque structure
(Figure 6-5).
Structure
Image IRM réelle
Image IRM simulée
Thorax extérieur
100 %
100 %
Moelle
50 %
55 %
Tissu conjonctif
50 %
60 %
Thorax intérieur
40 %
45 %
Myocarde
34 %
38 %
Sang
9%
15 %
Poumon
0%
0%
Figure 6-5. Valeurs d’intensité relative moyenne des différentes structures exprimées en pourcentage
Nous pouvons donc en conclure que les images de simulation obtenues sont qualitativement
très proches de la réalité. Elles restent bien sûr très dépendantes de la segmentation initiale du
modèle.
Enfin, des temps de simulation sur un Pentium 3 GHz sont indiqués dans le tableau de la
Figure 6-6.
Séquence IRM
Taille du fantôme
Temps de calcul
GE2D
32²
1 seconde
GE2D
64²
10 secondes
GE2D
128²
140 secondes
GE2D
256²
55 minutes
GE3D
64²
10 heures
Figure 6-6. Temps de simulation avec SIMRI sur un P4 3GHz – 2Go de RAM
130
Simulation d’images
6.4 Simulateur TEP : SORTEO
Le laboratoire CERMEP4 (Centre d’Exploration et de Recherche Médicales par
Émission de Positon) de Lyon a développé le simulateur SORTEO (Simulation Of Realistic
Transmission and Emission Object) [Reilhac-04]. Il repose sur la méthode de Monte Carlo et
permet d’intégrer la plupart des phénomènes physiques intervenant en imagerie TEP. Dans
cette méthode, les processus physiques sont simulés par des modèles statistiques : on crée des
interactions avec le modèle physique du système basées sur des probabilités d’occurrence
connues. Le simulateur TEP Monte Carlo permet de générer avec une bonne précision les
projections des distributions d’un traceur radioactif en tenant compte des caractéristiques du
scanner et de la distribution des milieux atténuants. En effet, à partir d’une description
spatiale et temporelle 3D des milieux émetteurs et atténuants, le programme permet de
simuler tous les phénomènes menant à l’obtention des sinogrammes (enregistrements) TEP :
désintégration, annihilation, atténuation, interactions multiples… (Voir annexe B). Les
sinogrammes servent à la reconstruction (analytique ou itérative) d’images 3D.
PET-SORTEO permet une simulation complète d’un examen dynamique TEP en 2D
ou en 3D, incluant deux types d’acquisition en émission et en transmission. La mesure en
transmission permet en fait, pendant la reconstruction de l’image d’émission, de corriger les
effets de l’atténuation dus aux milieux traversés. Nous devons donc créer un protocole pour
chacune des acquisitions en définissant les paramètres suivants :
Protocole de transmission :
• Choix et configuration de l’imageur
• Définition du volume d’atténuation : passage en paramètre de notre fantôme au
format ECAT7 et définition de la nature des différentes régions. Une vingtaine
de structures types sont prédéfinies : os, air, muscle, poumon, eau, graisse ...
Protocole d’émission :
• Choix et configuration de l’imageur
• Définition des images d’émission : nombre et durée
• Définition du volume d’émission : passage en paramètre de notre fantôme au
format ECAT7 et définition de l’élément radioactif injecté dans chaque région,
ainsi que sa concentration et son profil d’évolution pendant la durée
d’acquisition d’une image.
Le code de ce simulateur a été validé par rapport au tomographe ECAT EXACT HR+ (CPS
Innovations, Knoxville, TN, U.S.A.). Ce simulateur est écrit en langage C et possède des
commandes optionnelles MPI (Message Passing Interface) permettant son exécution en
parallèle.
4
www.cermep.fr
131
Simulation d’images
Une structure apparaît d’autant plus intense sur l’image reconstruite que le nombre
d’événements comptabilisés (détection de photons) est grand, donc que sa concentration en
élément radioactif est importante et que l’acquisition est longue (une concentration de 1800
Bq/cc correspondant par exemple à 1800 annihilations par cm3 par seconde).
On obtient un ensemble de sinogrammes par simulation (émission et transmission). La
reconstruction des images simulées à partir des sinogrammes peut s’effectuer selon deux
méthodes : une méthode analytique ou une méthode itérative. Le principe de la reconstruction
est d’inverser la transformée de Radon pour retrouver l’image source à partir des données
projetées (sinogrammes). Les algorithmes analytiques sont basés sur les solutions
mathématiques exactes de la transformée inverse de Radon. Un grand nombre de ces
algorithmes analytiques sont disponibles dans la littérature, celui utilisé ici étant l’algorithme
de rétro projection filtrée (filtered backprojection ou FBP en anglais).
Les méthodes itératives sont basées sur un critère statistique et estime l’image
reconstruite à partir des données projetées et une estimation initiale du volume (souvent une
distribution uniforme, mais on peut aussi « aider » l’algorithme en lui fournissant un volume
initial proche du volume final). Des projections sont ensuite calculées à partir de l’image
estimée et comparées aux projections obtenues par le processus d’acquisition. L’image
estimée est finalement mise à jour en tenant compte de la différence entre les projections
calculées et mesurées. On poursuit cette opération jusqu’à ce qu’un critère de similitude
choisi soit satisfait. Ces méthodes demandent plus de temps de calcul mais permettent de
reconstruire des modèles plus complexes. L’algorithme disponible ici est le « OrderedSubsets Expectation- Maximization (OSEM )» [Hudson-94].
Dans nos tests, nous avons sélectionné les paramètres par défaut du simulateur
correspondant à une acquisition standard. Les acquisitions en émission durant habituellement
entre 20 et 40 minutes, nous avons effectué des simulations d’une trentaine de minutes soit
2000 secondes.
En nous appuyant sur les travaux de Pauna et al. [Pauna-03, Pauna-04] qui seront ici
notre référence, nous utiliserons les valeurs de fixation d’un traceur radioactif (le Fluor-18 )
dans les différentes structures indiquées dans le tableau de la Figure 6-7 et qui ont été
obtenues à partir de mesures sur des examens réels. La nature des différents milieux
atténuants est également précisée en Figure 6-7.
132
Simulation d’images
Organe/Structure
Radioactivité spécifique (Bq/cc)
Milieu atténuant
Graisse
3000
Graisse
Muscle
1800
muscle
Poumons
1500
Poumon
Os
3600
Os
Sang
4000
eau
Myocarde
11000
muscle
Figure 6-7. Valeurs de fixation du Fluor-18 et choix des milieux atténuants utilisés pour la simulation du
Thorax avec SORTEO.
La fixation du fluordesoxyglucose (Fluor-18) est très variable d’une région à l’autre du
corps : ainsi le métabolisme des poumons nécessite beaucoup moins de glucose que celui du
myocarde où le F18 sera donc plus présent. Pour la simulation en transmission, c’est le Ge-68
qui est utilisé comme source radioactive externe. Les images obtenues, après reconstruction
des sinogrammes simulés avec SORTEO, sont des matrices 16bits de dimensions 128 × 128 ×
63 voxels. La dimension d’un voxel pour une image du thorax est 2.57 × 2.57 × 2.43 mm3.
Des simulations en émission ont été effectuées pour un modèle sain et pour un modèle dont
une partie du myocarde est ischémique et qui présente une hypo-fixation du fluor (où la
radioactivité spécifique est de 6600 Bq/cc ce qui correspond à une captation du F-18 dans le
myocarde à 40% de sa valeur initiale). On présente en Figure 6-8 des images en transmission
réelle et simulée, et en Figure 6-9 et Figure 6-10 des images en émission simulées. Des
images obtenues par N. Pauna sont également présentées pour comparaison.
Figure 6-8. A gauche : Image TEP réelle de transmission. Au milieu : Image TEP de transmission simulée
obtenue par N. Pauna [Pauna-03, Pauna-04]. A droite : Image TEP de transmission simulée que nous avons
obtenue pour un cas sain.
133
Simulation d’images
Figure 6-9. A gauche : Image TEP d’émission simulée obtenue par N. Pauna [Pauna-03, Pauna-04]. A droite :
Image TEP d’émission simulée que nous avons obtenue
Coupe
Transverse
Coupe
Sagittale
Vue 3D
Figure 6-10. A gauche : Image TEP d’émission simulée pour un modèle sain. A droite : Image TEP d’émission
simulée pour un modèle ischémique (captation du F-18 dans le myocarde à 40% de sa valeur initiale).
134
Simulation d’images
Pour réaliser une acquisition dynamique, la simulation est répétée pour différentes
configurations du modèle animé déformé au cours du temps.
Enfin, des temps de simulation sur une grappe de 7 machines Pentium 3 GHz sont disponibles
dans le tableau de la Figure 6-11.
Séquence
3D
3D
Taille du fantôme
256 × 256 × 330
128 × 128 × 64
Traceur radioactif
Non
Durée d’acquisition
2000s
2000s
Temps de calcul
~ 1 jour
~ 2 jours
F-18 11000 Bq/cc dans le
myocarde
Figure 6-11. Temps de simulation avec Sorteo sur une grappe de 7 machines P4 3GHz – 2Go de RAM
En conclusion de ce chapitre, nous avons montré comment il est possible de faire subir à notre
modèle numérique dynamique un examen virtuel en imagerie IRM et TEP grâce à des
simulateurs de ces modalités. Les possibilités de ces simulateurs étant considérables et en
constante évolution, il est envisageable de réaliser des acquisitions dans de nombreuses
configurations différentes en testant par exemple diverses séquences IRM.
Les images simulées obtenues sont réalistes et comparables aux images réelles ce qui
permet d’envisager de les introduire dans une stratégie d’évaluation d’algorithmes d’analyse
d’images cardiaques et thoraciques. Nous envisageons ainsi d’évaluer les performances d’un
algorithme de segmentation spatio-temporelle par modèle déformable élastique [Schaerer-05]
et d’algorithmes d’estimation de mouvement dans des séquences d’IRM cardiaques [Delhay06]. Un autre cadre d’évaluation concerne les algorithmes d’estimation du mouvement
respiratoire des structures thoraciques. Dans ce cas, des images 4D sont acquises en
tomodensitométrie à rayons X ce qui nécessite de prendre en compte un simulateur de cette
modalité. Nous envisageons d’exploiter le simulateur SINDBAD du LETI-CEA [Glière-98].
135

Documents pareils