Sarah Radulescu

Transcription

Sarah Radulescu
Sarah Radulescu
Dentellière, Saint-Mandé (94)
« J’ai une imagination très développée et j’ai toujours aimé broder, manier les différents matériaux et les
marier ensemble »
Sarah Radulescu réinvente la broderie traditionnelle d’Europe de l’Est en créant des châles, des parures
de cou, des bijoux qu’elle vend dans des salons et à de grands couturiers. Elle raconte sa passion et le
quotidien d’un métier pas comme les autres.
Comment avez-vous eu envie d’exercer un métier d’art ?
J’ai toujours aimé broder, manier les différents matériaux et les marier ensemble. À deux ans, j’essayais
déjà de broder, quand j’ai eu 8 ans, mes parents m’ont offert une petite machine à coudre… Nous avons
vécu en Israël, où je suis née, et au Cameroun. J’ai beaucoup voyagé et découvert d’autres cultures. Mes
parents n’étaient pas des artistes, mais ils savaient apprécier la création.
Avez-vous suivi des études artistiques ?
Mon père voulait que je devienne professeur. J’ai suivi l’école des arts appliqués où j’ai travaillé le bois et
le métal et où j’ai, par la suite, enseigné pendant deux ans. J’avais une imagination débordante, je rêvais
de créer et le cadre rigide de l’enseignement ne me convenait pas du tout. Un jour, j’ai présenté mes
patchworks à une enseigne d’articles pour bébés et j’ai conçu des accessoires pour ce secteur pendant
dix-sept ans, avant de m’installer en France.
D’où vient votre inspiration ?
J’ai eu un coup de foudre pour les broderies de Roumanie, le pays de mon mari. J’ai rencontré des vieilles
femmes qui m’ont transmis leur savoir. J’ai modernisé à ma manière les broderies traditionnelles de ce
pays et j’y retourne régulièrement pour apprendre de nouveaux points.
Comment se passe le travail pour la haute couture ?
J’ai eu la chance de travailler pour Christian Lacroix et Jean-Paul Gaultier. C’est la meilleure école qui soit
car leur niveau d’exigence est très élevé. Quand un couturier prépare une collection, il montre des feuilles
de tendance aux créateurs indépendants, qui lui font des propositions. C’est une période très intense,
pendant laquelle je travaille jour et nuit pour présenter des échantillons dont je ne sais pas s’ils seront
retenus ou non. Dans tous les cas, on gagne en assurance et en expérience, on apprend et on finit par
réussir.
Que conseilleriez-vous à un jeune qui voudrait exercer un métier d’art ?
Tout d’abord de faire une école d’art pour apprendre les bases, les couleurs, les matériaux, la manière
dont on monte une collection. Il en existe de très bonnes et les clients demandent toujours par quelle
école vous êtes passé.
Je lui conseillerais aussi de passer des concours, d’essayer d’obtenir des prix, pour se faire connaître et
pour perfectionner son travail.
Quelles sont les difficultés de ce métier ?
Il faut avoir conscience que le temps consacré à la création proprement dite est variable. Je dois gérer
l’achat du matériel, les ventes, les relations avec les salons : parfois je travaille sur mes créations toute la
journée, parfois juste deux heures.
Il faut aussi surmonter les aléas de l’activité. C’est très difficile de décrocher des commandes en haute
couture, difficile aussi de vendre des pièces uniques, et donc assez chères, en temps de crise. Mais je
pense que le besoin de créer ne supporte pas de compromis : quand on aime vraiment ce qu’on fait, on
surmonte les difficultés, quitte à prendre un petit travail pour compléter ses revenus.