l`expérience du récit

Transcription

l`expérience du récit
L’EXPÉRIENCE
DU RÉCIT
ÉPISODE 5
JOURNÉES D’ÉTUDE
LORIENT
MERCREDI 20
JEUDI 21 AVRIL 2016
École européenne supérieure d’art de Bretagne
Brest Lorient Quimper Rennes
Roland Decaudin, directeur
Yannick Liron, professeur de culture
générale, histoire des arts
Dans le cadre du projet pédagogique
de l’École européenne supérieure
d’Art de Bretagne-site de Lorient
« La pratique des récits et les
littératures », nous avons souhaité
initier un temps d’échange en invitant
quatre personnalités à partager
leurs réflexions à partir de leurs
pratiques artistiques, de leurs analyses
ou de leurs lectures d’œuvres plastiques
et littéraires.
PROGRAMME
Mercredi 20 avril 2016
9h30
Marie Adjedj
« Récit de soi et mémoire
projective »
Jeudi 21 avril 2016
9h30
Laurent Buffet
« Le tournant narratif
de l’art contemporain »
CONTACT
www.eesab.fr/lorient
[email protected]
02 97 35 31 70
LIEU
Auditorium de l’EESAB-Lorient
1, Avenue de Kergroise
56100 Lorient
14h30
Laetitia Badaut Haussmann
« Toutes ces choses auraient pu
être des histoires »
LUCILLE ASLOUN & TIPHAINE LACROIX
DIRECTION/PROGRAMMATION
MARIE ADJEDJ
LAETITIA BADAUT HAUSSMAN
RÉCIT DE SOI ET MÉMOIRE PROJECTIVE
TOUTES CES CHOSES AURAIENT PU ÊTRE DES HISTOIRES
Au tournant des années 1970 apparaît une nouvelle
figure du monde de l’art : le curateur. Ni conservateur de
musée ni critique d’art, le curateur développe une pratique
qui défie les disciplines académiques. Après avoir dessiné les
contours du curatoriat et déterminé la nature des ruptures
opérées, nous nous intéresserons plus particulièrement
à la parole de certaines de ses figures historiques. Plus
précisément, nous analyserons les récits de fondation élaborés
par Harald Szeemann, Seth Siegelaub ou encore Lucy Lippard,
qui déploient une narration ponctuée d’événements qui sont
autant d’étapes dans l’évolution de leurs pratiques.
Objets trouvés ou fabriqués, films, photographies,
installations, performances : au-delà de leur diversité formelle,
les œuvres de Laëtitia Badaut Haussmann proposent une
nouvelle étude du champ de l’image, une redéfinition de la
dimension historique, photographique, voire scénographique
de ce que nous voyons, selon des critères de
recontextualisation et de réception.
Nous étudierons également les stratégies et dispositifs mis en
œuvre par chacun d’entre eux afin de s’inscrire durablement
dans l’histoire de l’art contemporain. Le positionnement de
cette communication n’est pas de proposer une histoire
du curatoriat, ni une histoire événementielle de l’exposition,
mais d’analyser le récit comme une modalité d’inscription
historiographique des pratiques curatoriales, ce que, dans le
sillage de Michel Foucault, nous nommerons des « formations
discursives » qui établissent l’énonciation et amorcent la
circulation des discours.
Marie Adjedj est professeure en théorie de l’art moderne
et contemporain à l’École Supérieure d’Art et de Design ToulonProvence-Méditerranée ; chargée de programmation du lieu
d’exposition et d’expérimentation Le Pressing
( la Seyne-sur-Mer, Var ) ; membre du Projet de Recherche
« Égalité, Hybridité, Ambivalence » de l’ESADTPM.
Accordant une place essentielle à la mémoire et à l’histoire,
Laëtitia Badaut Haussmann convoque des phénomènes
d’apparition et de réminiscence, d’amnésie, d’effacement ou
de recouvrement. Le temps, abordé de manière conceptuelle
et contextuelle, devient dès lors motif à créer des mises en
abyme historiographiques. Particulièrement influencée par
l’esthétique du modernisme, elle entremêle dans sa pratique
les vocabulaires cinématographique, littéraire, architectural ou
du design, ouvrant un espace propice à l’émergence de nœuds
narratifs. Laëtitia Badaut Haussmann procède par recadrage,
appropriation, décalage ou citation, développant un travail
porté par une réflexion sur les formes du récit, les rapports
d’analogies et de macrostructures. L’exposition est constitutive
de l’œuvre : pensée comme un lieu d’affranchissement,
elle forme in fine un espace critique et réflexif autant que
d’appréhension et de sublimation du réel.
Laëtitia Badaut Haussmann est née en 1980. Elle vit
et travaille à Paris. Diplômée de l’École Nationale Supérieure
d’Arts de Paris-Cergy en 2006, elle a intégré le programme
du Pavillon/Palais de Tokyo en 2011-2012. Lauréate de la
résidence de l’Institut français à la Villa Kujoyama à Kyoto,
Japon ( 2016 ), elle a été présentée en solo par la Galerie Allen
à la FIAC–secteur Lafayette ( Grand Palais, Paris ) en octobre
2015. Son travail a déjà fait l’objet de plusieurs expositions
personnelles et collectives en France et à l’étranger.
LAURENT BUFFET
LE TOURNANT NARRATIF DE L’ART CONTEMPORAIN
L’usage de la narration peut être considéré comme
particulièrement caractéristique du tournant contemporain
de l’art, inauguré entre les années 1960 et 1970. Plus qu’une
simple modalité du discours sur l’art, le récit devient, à
l’âge contemporain, une modalité privilégiée du discours
de l’art. Ancré dans une autonomie garantie par le respect
des spécificités génériques héritées de la Renaissance,
le modernisme entendait rompre avec une narrativité
considérée comme le propre du régime littéraire. L’art
contemporain réinvestit au contraire le domaine de la
narration, sans toutefois illustrer des récits préexistants
( mythes, textes sacrés, événements historiques ) comme le fit
l’art prémoderne, mais en configurant ses propres intrigues
narratives, qu’elles soient réelles ou fictives.
Le récit intervient alors sous des formes très variées : comme
cadre interprétatif sur le fond duquel l’œuvre se détache
( ex. : l’aventure tatare de Joseph Beuys ), comme instance
documentaire relatant le déroulement d’une action ( les
nombreux films, photographies et textes de l’art dit
« processuel » ), comme élément pseudo-documentaire
intégré à une installation ( ex. : Ilya Kabakov ), comme mode
d’existence de l’œuvre ( le Narrative art et ses dérivés ), etc.
En considérant le rôle prédominant que le langage revêt dans
ce tournant narratif de l’art, sans doute n’est-il pas exagéré de
dire que l’époque contemporaine renoue, par delà le Laocoon
de Lessing qui en avait marqué l’abandon, avec la vulgate
dominante à l’époque de la Renaissance, inspirée de la célèbre
phrase d’Horace : Ut pictura poesis ( « la poésie est comme
la peinture » ). La conférence sera l’occasion d’évoquer cette
histoire de la narration artistique, afin d’en dégager les enjeux
actuels.
Laurent Buffet est Docteur en philosophie de l’art
( Paris 1 Panthéon-Sorbonne ), critique d’art et professeur
d’esthétique à l’ESAM Caen / Cherbourg. Dans le prolongement
de sa thèse de doctorat sur les « Pratiques itinérantes dans
la littérature et l’art contemporains », il a dirigé en 2012
la publication d’un ouvrage collectif : Itinérances, l’art en
déplacement ( De l’Incidence éditeur ), et assuré le commissariat
de l’exposition 1, 2, 3 Soleil, de l’itinérance à l’exposition
( 18 janvier -22 février 2013, Ecole Supérieure d’Art et Médias
Caen / Cherbourg ). Il est aussi commissaire de l’exposition
Légende au Frac Franche-Comté ( 6 février- 8 mai 2016 ).
Auteur d’articles sur l’art contemporain, il participe
régulièrement à la rédaction d’ouvrages collectifs et de
catalogues monographiques.