Mutuelle Et Santé Mtrl Id
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LA REVUE DE LA MTRL REVUE TRIMESTRIELLE D’INFORMATION DE LA MTRL – N° 73 – MARS 2012 – 1 ¤ Mutuelle et Santé Oh ! les beaux jours La Revue de la MTRL Mutuelle et Santé n° 73 VIE DE LA MTRL • Brèves • Conférence Laboratoires Boiron • Séminaire ADES 3 GESTION DES SOINS Régulation téléphonique dans la demande de soins 7 SOINS ET SANTÉ Mycoses et vaginites : la réponse homéopathique 8 ÉCONOMIE DE LA SANTÉ La situation des infirmières en France 10 SAVOIR Le pied de l’enfant 13 CONNAÎTRE Tissu adipeux et inflammation 14 ZOOM Les intolérances alimentaires (1re partie) 17 BIEN VIVRE “Le cerveau a besoin de plus qu’un sudoku…” 20 PRATIQUE Presbytie : des solutions pour tous 22 Photo de couverture : Pál Szinyei Merse, Déjeuner sur l’herbe (1873). Galerie nationale de Budapest. La Revue de la MTRL - Mutuelle et Santé est la publication officielle de la Mutuelle de la région lyonnaise, 126-128, rue Pierre-Corneille 69421 Lyon Cedex 03 Tél. : 04 72 60 13 00. Fax : 04 72 60 13 01 N° Azur : 0 810 030 033 Internet : mtrl.fr et reflexe-prevention-sante.mtrl.fr e-mail : [email protected] et [email protected] N° de CPPAP : 0412M05960. 19e année – trimestriel – mars 2012 – n° 73 Le numéro : 1 ¤, dans tous les bureaux et agences de la MTRL. Abonnement annuel : 4 ¤. Directeur de la publication : Romain Migliorini. Administrateur : Thierry Thévenet. Éditeur délégué : Les Éditions du Chaland. ISSN : 1253-921X Impression : IMAYE Graphic, 53000 Laval. ÉDITORIAL « Mieux vaut chômer que mal moudre » « D EUX MILLIARDS D’ EUROS , tel est le montant des dépassements d’honoraires (sur 18 milliards d’euros d’honoraires totaux), dont les deux tiers pèsent directement sur les ménages, après intervention des organismes d’assurance complémentaire. Constatant une augmentation importante des dépassements au cours de la dernière décennie, la mission cherche, d’une part, à analyser les raisons d’un tel phénomène susceptible de remettre en cause certains des principes sur lesquels repose le système de soins. Elle avance, d’autre part, des arguments pouvant permettre de réformer la pratique des dépassements. Sur la base de cette évaluation, la mission a retenu 4 scénarios : aménagement du dispositif existant (mieux informer, mieux évaluer, mieux contrôler, quelle que soit la réforme engagée) ; modulation des possibilités de dépassements en fonction de la réalité de l’offre locale ; plafonnement des dépassements en volume et/ou en valeur ; suppression totale ou partielle de la possibilité des dépassements ou aménagement des contreparties réelles en termes de santé publique. » Telle était la présentation, faite dans La Documentation française, d’un rapport de l’Inspection générale des affaires sociales, remis au ministre de la Santé, Xavier Bertrand, en… avril 2007 ! Ce que 60 millions de consommateurs révèle aujourd’hui sur le même sujet n’apporte guère d’éléments nouveaux, sinon que la somme des dépassements en secteur 2 – honoraires libres – est passée à plus de 2,5 milliards d’euros annuels, toujours aux frais des patients et de leurs complémentaires. La Fédération hospitalière de France s’indigne, et le ministre de la Santé évoque des sanctions afin de mettre « un terme aux dépassements qui sont délibérément excessifs », ayant sans doute oublié que la loi sur l’hôpital (HPST), de 2009, n’avait même pas osé aborder la question. Toutes affaires cessantes, le gouvernement vient de transmettre, pour avis, à la Caisse nationale d’assurance maladie et à l’Union nationale des caisses d’assurance maladie le texte d’un décret sur la création d’un secteur optionnel censé limiter les dépassements d’honoraires : les médecins spécialistes acceptant d’adhérer à ce nouveau secteur ne pourraient dépasser 50 % du tarif de convention ; la différence serait totalement prise en charge par les mutuelles, qui ne pourraient refuser “sous peine de perdre les aides fiscales liées aux contrats responsables”. Outre le refus de ces deux organismes d’approuver le texte du ministre, jugeant le projet incomplet et inefficace, la menace à l’égard des mutuelles nous plonge dans un abîme de perplexité : là encore, notre ministre semble ne s’être pas aperçu que son collègue du Budget, à deux reprises l’an passé, avait taxé les mutuelles de 3,5 % à chaque fois, soit 7 % au total, l’exonération pour raison de contrats responsables ayant donc totalement disparu ! En résumé, un projet bâclé unanimement retoqué par les parties concernées, un chantage à l’obéissance à l’égard d’organismes payeurs sous peine de leur reprendre un “avantage” qui a cessé d’exister, autant dire qu’il est plus sûr d’attendre le résultat des courses électorales de printemps pour envisager une réforme sérieuse de la rémunération des actes médicaux. Le président, Romain Migliorini Vie de la MTRL LE NOUVEAU SIÈGE DE LA MTRL Après plus de 40 ans dans les mêmes locaux administratifs, le siège de la MTRL vient de déménager, grâce à l’acquisition, par notre Groupe, de locaux spacieux et adaptés. En effet, les 350 m2 que nous occupions rue PierreCorneille, dans une immeuble d’habitation, étaient progressivement devenus inadaptés tant aux conditions de travail qu’aux besoins et à l’organisation des espaces utilisables. Il était devenu nécessaire de disposer d’un siège social moderne, parfaitement fonctionnel permettant d’accueillir tous nos services. A compter du 2 avril 2012, l’adresse du siège de la Mutuelle est désormais 37, avenue Jean-Jaurès, 69007 Lyon (métro SaxeGambetta). Nos coordonnées téléphoniques sont inchangées, et vous pouvez joindre nos équipes au 0 810 030 033 (N°Azur, prix d’un appel local). L’agence Lyon-Servient, elle, reste dans les locaux rénovés du 34, rue Servient, 69003 Lyon. INAUGURATION DE L’AGENCE LYON JEAN-JAURÈS Couplé à l’acquisition du nouveau siège de la Mutuelle, nous disposons également d’un vaste local commercial qui a été converti en agence mutualiste. La MTRL dispose donc d’une nouvelle agence, 37 avenue Jean-Jaurès (au rez-de-chaussée du siège social). Flambant neuve et spacieuse, elle est située au cœur d’un quartier très animé et commerçant. Cette implantation complète donc notre réseau lyonnais (3 bureaux). L’agence Lyon Jean-Jaurès est ouverte depuis le 28 février. Elle a été inaugurée ce même jour par M. Jean-Pierre Flaconnèche, maire du 7e arrondissement de Lyon, les membres du conseil d’administration et les équipes MTRL. N°Azur (prix d’un appel local) : 0 810 030 033 CONFÉRENCE DE SANTÉ SUR L’HOMÉOPATHIE À MÂCON Dans le cadre des conférences de santé organisées par la MTRL en Bourgogne, un prochain événement se déroulera le jeudi 12 avril 2012, à 18 h 30 à Mâcon (amphithéatre Guillermin, 18 cours Moreau, 71000 Mâcon) sur le thème « Homéopathie : le respect de votre santé ». La conférence sera animée par le docteur Christelle Charvet, médecin gynécologue. Entrée libre. Inscriptions en contactant l’agence MTRL de Mâcon : 03 85 20 06 70 ou [email protected] La Revue de la MTRL 䉬 mars 2012 䉬 numéro 73 3 Vie de la MTRL RÉNOVATION DE L’AGENCE LYON-SERVIENT Dans le cadre du programme de rénovation de ses bureaux, l’agence MTRL Lyon-Servient a été totalement modernisée et réaménagée. Cette transformation était indispensable car ces locaux, inchangés depuis une quinzaine d’années, n’étaient plus adaptés à la qualité d’accueil due à nos adhérents. Toutes les agences MTRL seront ainsi rénovées. Ce fut le cas de Villeurbanne, de Mâcon et de Montceau-les-Mines. Grâce à ces travaux, les agences proposent un espace chaleureux, lumineux et des bureaux individualisés pour un dialogue personnalisé entre les conseillers MTRL et nos adhérents. L’agence Lyon-Servient a été inaugurée le 8 février par M. Thierry Philip, maire du 3e arrondissement de Lyon et conseiller général, en présence des administrateurs et du personnel de la MTRL. « DEVENIR DE LA MÉDECINE GÉNÉRALE » ET « DIFFICULTÉS DE L’ HÔPITAL », COMPTE - RENDU DU COLLOQUE MTRL En octobre dernier à Lyon, la MTRL organisait son premier colloque d’économie de la santé sur les deux thèmes précédemment cités, en présence de nombreux professionnels. La Revue de la MTRL en a proposé un compte rendu détaillé dans sa dernière édition, mais la Mutuelle, avec le concours du Tout Lyon, a également édité l’intégralité des exposés et du débat sous forme d’un livret, dispoPERMANENCE DU PRÉSIDENT nible à son siège, avenue Jean-Jaurès. Ce document, gratuit, est à disposition Le président de la MTRL, à l’écoute des des adhérents souhaitant le recevoir. mutualistes, peut recevoir les adhérents qui Contact : 04 72 60 13 08. ont font la demande dans le cadre de permanences prévues à cet effet. Dans ce cas, adressez votre demande et les motifs souhaités par mail à : [email protected] ou par courrier à MTRL, Monsieur le Président, 37 avenue Jean-Jaurès, 69007 Lyon. 4 La Revue de la MTRL 䉬 mars 2012 䉬 numéro 73 Vie de la MTRL Conférence-débat organisée par les laboratoires Boiron sur le thème : « Oncologie, soins de support, homéopathie » Ce 12 janvier, le président Migliorini était invité à assister à cette conférence sur le sujet énoncé plus haut. Le docteur Christelle Charvet, dont les lecteurs de notre revue apprécient régulièrement les articles, participait à ce débat. Elle a bien voulu en assurer également le reportage, ce dont nous la remercions vivement. médicales en accompaes laboratoires Boiron ont par la prise en charge gnant le patient qui suit réuni autour d’un thème individuelle et globale des thérapeutiques à actuel – les soins de support en du patient, raison pour visée oncologique. Elle oncologie et l’homéopathie – plus laquelle le thème aide le patient à supde cent professionnels de santé, « oncologie, homéopaporter les effets seconmédecins et pharmaciens dont thie et soins de supdaires de ces thérapeu24 universitaires, professeurs et maî- port » avait été choisi. tiques pour en faciliter Participaient notamtres de conférences des facultés de l’observance. pharmacie française, mais aussi des ment à cette conféAnne-Cécile Begot, représentants de la cancérologie en rence-débat le Dr Jean- Jean-Claude Karp milieu hospitalier, des oncologues Philippe Wagner, médecin oncologue auteur de Médecines parallèles et espagnols et italiens, des médecins et à Strasbourg, prescripteur régulier de cancers (L’Harmattan), a présenté pharmaciens de la région lyonnaise, médicaments homéopathiques, le une étude qualitative concernant les des associations de patients. L’objec- Dr Jean-Claude Karp, médecin géné- différents types de tif de cette réunion était d’échanger raliste homéopathe, consultant en patients qui ont eu des regards d’experts multidiscipli- homéopathie dans le service d’onco- recours à des traitenaires sur les pratiques complémen- logie du centre hospitalier de Troyes, ments complémenM. François Roux, pharmacien en taires pour se faire taires autour de l’oncologie. La soirée s’est déroulée dans l’am- officine à Toulouse et Mme Anne- aider. Pour certains, phithéâtre Boiron de la faculté de Cécile Begot, sociologue à Paris. Le le recours à une Dr Wagner, prise en charge médecine et de maïeutique Lyon Sud le Dr Karp et h o m é o p a t h i q u e Charles-Mérieux. F r a n ç o i s leur permet de La conférence a débuté par une Roux ont redevenir acteurs de Anne-Cécile Begot interview filmée du Pr Ivan Krainsisté sur la leur santé. kowsky, président de l’Association Ces témoignages d’experts ont nécessité française des soins oncologiques de d ’ i n t é g r e r montré toute l’intelligence de la support, qui exerce à Nancy. Il définit l’homéopa- médecine qui se dessine pour les soins de support, comme « l’enthie dans les demain, toute la complémentarité semble de soins Jean-Philippe Wagner soins de sup- des professionnels de santé, l’alliance et soutiens François Roux port pour des médicaments homéopathiques et nécessaires aux p e r s o n n e s apporter une qualité de vie à des allopathiques pour préserver la santé malades paral- patients qui voient leur existence pro- des patients. L’aventure ne fait que lèlement aux longée par les nouveaux traitements commencer, et les perspectives sont t r a i t e m e n t s oncologiques. Ils ont précisé que enthousiasmantes… 䊓 oncologiques ». l’homéopathie doit être considérée L’homéopathie comme une médecine « complémens’intègre dans taire » plutôt que « parallèle », cette définition puisqu’elle fait partie des stratégies L La Revue de la MTRL 䉬 mars 2012 䉬 numéro 73 5 Vie de la MTRL Séminaire organisé par l’ADES sur le thème : « Savoirs partagés, certitudes et incertitudes dans la recherche en sciences de la vie » Ce 8 mars, à l’invitation de Mireille Bernard, ingénieur en biologie (Univ. Bordeaux Segalen) – auteur pour notre revue d’un article en deux volets sur “l’alimentation crétoise” (nos 66 et 67) –, le président Migliorini a assisté à un séminaire, sur le campus universitaire de Bordeaux, organisé par le laboratoire ADES, sur le thème cité plus haut. A l’initiative de Denis Retaillé, directeur de l’unité mixte de recherche 5185 ADES, et de Mireille Bernard, ce séminaire comportait cinq interventions, dont nous retiendrons plus particulièrement celle du docteur Michel de Lorgeril (Après le scandale du Mediator, celui des anticholestérols) et celle de Mireille Bernard (De la bataille du lait aux recommandations sur la prévention des fractures). Nous n’en dirons pas plus à ce stade, car nous avons eu l’assurance, par les conférenciers, que ces deux sujets feraient l’objet de deux prochains articles dans notre M. de Lorgeril revue. Comme le revendique son directeur, l’ADES vise à rassembler un éventail très large de compétences disciplinaires, proposant, dans cet esprit, de confronter les savoirs les plus éloignés en apparence, ceux de la recherche biomédicale et ceux de la recherche en sciences humaines et sociales. La vérité établie en laboratoire ou à l’hôpital, celle de l’expertise scientifique, n’est pas 6 nécessairement la même que celle de l’individu, de l’être social, objet de la recherche. La quête des “bonnes pratiques”, en la matière, procède souvent de cet examen contradictoire. Mireille Bernard, chargée de l’organisation du séminaire, insiste sur la volonté des participants d’éclairer le savoir médical par des chercheurs ayant une formation particulière en sociologie des sciences, pour ne pas dire en “philosophie des sciences”. Des chercheurs biomédicaux acceptent de soumettre leur conception de la construction du savoir scientifique à la sagacité et aux connaissances des spécialistes en sciences humaines et sociales qui constituent le laboratoire ADES. Tous font la démarche d’exposer leurs hypothèses et les expériences successives dans leurs travaux de recherche, sans occulter leurs propres tâtonnements. Au niveau clinique, il faut sûrement au médecin, comme au malade, optimisme et parfois courage pour certaines prises de décision. Au niveau préventif, mieux vaut que les recommandations à la population générale soit établies sur des preuves solides ; la prévention de la santé concerne tout le long de la vie, aussi les recommandations doivent-elles être assez prudentes pour ne pas être délétères. Cette déclaration d’intention annonçait un exposé particulièrement percutant à l’égard des politiques nutritionnelles dans leurs incitations répétées à la prise de suppléments calciques, sans une analyse sérieuse de leur bien-fondé, communication iconoclaste dont nous bénéficierons d’un large développement dans un prochain numéro de la revue. Quant au cardiologue Michel de Lorgeril, le titre de plusieurs de ses ouvrages, qui ont fait grand bruit, à la fois auprès d’un large public et dans la communauté scientifique – Cholestérol : mensonges et propagande, entre autres –, ne laissait planer aucune ambiguïté sur la teneur de son propos, véritable réquisitoire contre un monde médical complice, volontaire ou non, d’une industrie pharmaceutique dont la propagande, voire les pressions, pour l’utilisation à tout-va des statines procure à celle-ci un enrichissement – peut-être ? – criminel… Nous en espérons également un article futur dans Mutuelle et Santé. 䊓 La Revue de la MTRL 䉬 mars 2012 䉬 numéro 73 Gestion des soins Place et évolution de la régulation téléphonique dans la demande de soins Depuis la création des centres 15 en 1977, le dispositif centré sur la réponse aux appels urgents évolue chaque année avec des appels concernant les demandes de soins sans caractère d’urgence. Actuellement, le centre 15 de Lyon reçoit près d’un million d’appels par an, alors que le nombre de sorties SAMU reste stable, entre 3 000 et 4 000 par an. Qui vous répond au 15 ? Ce sont d’abord des auxiliaires de régulation, qui évaluent rapidement une demande extrêmement urgente, créent la fiche informatique et orientent l’appel vers les urgences ou la permanence de soins. Associés dès la création des centres 15, les médecins généralistes sont de plus en plus nombreux à être présents auprès : 䉴 de leurs confrères hospitaliers spécialistes de l’urgence, 䉴 des auxiliaires de régulation, 䉴 des sages-femmes pour la régulation des accouchements, 䉴 des infirmiers, des ambulanciers et des pompiers, qui coopèrent pour prendre en charge les urgences. Actuellement, de façon expérimentale, les médecins seront bientôt rejoints par des infirmières puéricultrices, qui seront à même de prendre le temps d’expliciter les conseils de prise en charge de la pathologie courante des plus jeunes enfants. On voit par là que les équipes s’étoffent, pour répondre à une demande qui évolue. Cette évolution de la demande risque de voir saturer à certaines heures la capacité de traitement des urgences véritables. Pourquoi appelle-t-on le 15 aujourd’hui ? La demande croissante de la population concerne désormais des avis médicaux sur la nécessité de soins ou des informations sur les possibilités du système sanitaire et même social. Pour répondre à ces demandes, a été mis en place dans de nombreux centres 15 un numéro autre que le 15 (à Lyon, le 04 72 33 00 33), mais qui est différent dans chaque centre 15 et payant, ce qui constitue parfois une limite pour les populations précaires. En Franche-Comté, a été mis en place un numéro à 4 chiffres, le 3966, adopté aussi en Bourgogne. Pour ma part, je milite pour l’adoption d’un numéro 16, qui permette de répondre à la demande d’avis médical sans urgence et sans saturer les capacités de réponse urgente du centre 15. L’expérience que nous en avons acquise depuis 2004 à Lyon montre que la population est tout à fait apte à distinguer une urgence d’une demande d’avis. Quand appelle-t-on le 15 ? En dehors de situations urgentes, qui surviennent de façon inopinée, les appels affluent aux heures de la permanence des soins – quand les cabinets des médecins généralistes sont fermés – car, depuis 2003, les appels relevant de la permanence des soins doivent tous être régulés sous la responsabilité du centre 15. Ainsi, les appels sont au maximum les samedis, dimanches et fériés, avec l’épineux problème du samedi matin, qui n’est pas encore officiellement inclus dans la permanence des soins, alors que la pratique des médecins généralistes à cet égard diffère. Les soirs de semaine, les appels augmentent dès 18 heures, ce qui correspond souvent aux horaires de fermeture des secrétariats des médecins. On constate aujourd’hui que ces demandes débordent de plus en plus les horaires de la permanence des soins, probablement du fait d’une insuffisance de la capacité de réponse des professionnels mais aussi d’un manque de connaissance du bon usage des soins et des structures de soins. Compte tenu de la pénurie annoncée en médecins généralistes, la population a besoin, à la fois : 䉴 de messages clairs sur le bon usage des structures de soins, 䉴 d’avis médicaux en journée. Je plaide pour l’extension des moyens de la régulation médicale en journée, avec pour missions : 䉴 d’évaluer le degré d’urgence des demandes, 䉴 d’apporter les conseils simples permettant de reporter les soins éventuels au lendemain, 䉴 et, a contrario, d’orienter les demandes de soins vers les structures adaptées devant le développement des services d’urgence spécialisés, comme la prise en charge des infarctus, des accidents vasculaires cérébraux, des plaies de la main, qui sont de véritables urgences à orienter sans perdre le temps d’un passage dans un service d’urgence généraliste. 䊓 Dr Pascal Dureau coordonnateur des médecins généralistes URPS médecins de Rhône-Alpes La Revue de la MTRL 䉬 mars 2012 䉬 numéro 73 7 Soins et santé Chlamydiae trachomatis Mycoses et vaginites : la réponse homéopathique ombreuses sont les patientes qui souffrent d’un inconfort vulvo-vaginal, se traduisant par des démangeaisons, des brûlures, des rougeurs, des pertes gênantes. La cause peut être une simple irritation, une vaginose bactérienne, une mycose, beaucoup plus rarement une infection gynécologique grave. Le traitement de la première crise est en général aisé, consistant en une application de crème ou d’ovules, mais les récidives sont fréquentes ; le rôle de l’homéopathe est de préciser la cause des récidives et de modifier le terrain par des conseils d’hygiène et des prescriptions de médicaments homéopathiques adaptés. Nous aborderons ici uniquement la prise en charge des mycoses et des vaginoses bactériennes à répétition. N Pourquoi surviennent ces mycoses et vaginoses ? Le vagin est un organe non stérile qui abrite des milliards de bactéries constituant la flore vaginale normale, en particulier des bacilles lactiques ou bacilles de Doderlein. Son pH est acide. Tout déséquilibre – modification du pH vaginal par certains savons, problème hormonal, prises d’antibiotiques, grossesse, pilule… – va contribuer à la prolifération de germes normaux mais dont la supériorité en nombre, par rapport à la flore normale, va créer les symptômes : citons les champignons (Candida albicans ou non albicans) responsables de mycoses, les bactéries 8 (streptocoques, staphylocoques, Gardnerella, Escherichia coli, klebsielles, mycoplasmes, Ureaplasma urealyticum…), agents des vaginoses bactériennes (anciennement appelées vaginites aspécifiques)… Le tabac et le stress sont des facteurs de modification de l’immunité vaginale et, à ce titre, peuvent entretenir un déséquilibre de la flore vaginale. Comment poser un diagnostic de vaginite mycosique ou de vaginose bactérienne à répétition ? Il s’agit de la répétition fréquente de symptômes vulvo-vaginaux gênant la vie quotidienne, la vie sexuelle et nécessitant une prise en charge. Toute récidive de symptômes impose un examen médical. Le diagnostic est avant tout clinique ; l’interrogatoire précise les symptômes. Des pertes blanches, démangeaisons et rougeur vaginale sont très évocatrices d’une mycose. Des pertes odorantes (odeur de poisson, d’œuf pourri), épaisses, sans démangeaison, font penser à la présence de Gardnerella vaginalis. Les diagnostics différentiels des mycoses peuvent être un eczéma, un psoriasis, c’est-à-dire des maladies de peau, une simple irritation de contact ou une véritable allergie (protègeslips, papier toilette, crèmes dépilatoires, beaucoup plus rarement latex des préservatifs ou sperme). La présence de douleurs pelviennes, de fièvre nous alerte sur le risque d’infection de l’utérus (endométrite) ou des trompes (salpingite) et doit imposer des examens complémentaires à la recherche de bactéries dangereuses, en particulier Chlamydiae trachomatis, qui doit être traitée par antibiotiques. Le prélèvement vaginal est nécessaire en cas de récidive ou de doute diagnostique, car il n’est pas rare de trouver plusieurs germes ; il permet aussi de juger de la qualité de la bonne flore vaginale et de vérifier l’absence de germes plus dangereux. Comment prendre en charge ces mycoses ou vaginoses bactériennes ? Les consignes d’hygiène 䊉 Ne pas utiliser de savons détergents. L’utilisation de savons liquides « spéciaux hygiène intime » est possible mais non obligatoire et certainement pas répétée plusieurs fois par jour. Privilégier des savons à pH neutre. 䊉 Proscrire tout produit non prévu pour la vulve (gels douche), ainsi que les douches vaginales. 䊉 Eviter les épilations complètes, qui suppriment la protection physiologique vulvaire. 䊉 Choisir des sous-vêtements adaptés : pas de strings, culottes en coton. 䊉 Limiter les bains en piscine : le chlore détruit la flore vaginale normale. 䊉 Proscrire, sauf nécessité extrême, les antibiotiques (qui décapent aussi la flore vaginale). En cas de prise obligatoire d’antibiotiques, se faire prescrire également un ovule imidazolé. La Revue de la MTRL 䉬 mars 2012 䉬 numéro 73 Soins et santé 䊉 Ne traiter le partenaire qu’en cas de symptômes péniens (rougeurs, brûlures, démangeaisons). Les traitements probiotiques Ils sont particulièrement indiqués dans les problèmes vaginaux récidivants. Les probiotiques sont « des micro-organismes vivants qui, lorsqu’ils sont consommés en quantité suffisante, améliorent la santé de l’hôte » (définition de l’OMS) ; ces probiotiques stimulent l’immunité, neutralisent les substances toxiques. En gynécologie, les principaux probiotiques vaginaux sont les lactobacilles : L. casei, L. acidophilus, L. rhamnosus, et L. bifidus. Ces probiotiques sont commercialisés sous forme d’ovules, de tampons imprégnés à placer pendant les règles ou de comprimés à avaler. Les traitements allopathiques 䉴 En cas de mycose récidivante, les traitements allopathiques consistent en l’application répétée tous les mois de crème et d’ovules antimycosiques, par exemple econazole (Gyno-Pevaryl®), serticonazole (Monazol®), fenticonazole (Lomexin®). En cas d’intolérance à ces produits, un traitement par la bouche est possible par fluoconazole (Triflucan®, Béagyne®) ; ce produit est contreindiqué en cas de grossesse, une contraception efficace doit être prévue pendant la durée du traitement, qui est de 6 mois. 䉴 En cas de vaginite à Gardnerella, la prise d’imidazolés (Secnol® ou Fasigyne® ou Flagyl®) en prise unique est possible lorsque les récidives ne sont pas trop fréquentes. Ces médicaments ne doivent jamais être absorbés en même temps qu’une boisson alcoolisée, sous peine de provoquer des douleurs digestives. La démarche homéopathique dans la prise en charge des mycoses et vaginites à répétition Elle présente un double intérêt : l’efficacité au long cours et le respect de la flore vaginale. L’objectif est de rééquilibrer la flore vaginale de façon durable : pour cela, il faut identifier la cause du déséquilibre et la prendre en charge. 䉴 Trouver la cause du déséquilibre ; outre les facteurs de déséquilibre cités précédemment, il n’est pas rare d’identifier dans ces vaginites à répétition une problématique sexuelle (rapports non désirés par exemple, situation conjugale non satisfaisante). La démarche homéopathique, qui donne une grande importance à l’écoute, permet aux patientes de livrer des informations très personnelles. Enfin, il existe des terrains prédisposés que nous décrirons plus loin 䉴 Eliminer les facteurs de risque par des conseils adaptés, prescrire des probiotiques pour réensemencer la flore vaginale. 䉴 Traiter les patientes par des médicaments homéopathiques. En cas de mycoses à répétition 䊉 Monilia albicans 15 CH : 5 granules par jour est une solution simple pour prévenir les mycoses à répétition ; je le prescris systématiquement en cas de 2e mycose. 䊉 Les médicaments de terrain (liste non exhaustive) – Patiente à peau claire, obsessionnelle d’une hygiène rigoureuse, consommatrice de sucré : Pulsatilla 15 CH, une dose globules par semaine ou 5 gr par jour pendant 3 mois. – Patiente maigre, ne supportant pas les graisses, migraineuse, alternant La Revue de la MTRL 䉬 mars 2012 䉬 numéro 73 infections urinaires et mycoses : Sepia 15 CH, une dose globules par semaine ou 5 gr par jour 3 mois. – Patiente ronde, docile, aimant bien manger, peu tonique, facilement dépressive, antécédents d’asthme, polypes, fibromes : Calcarea carbonica 15 CH une dose globules par semaine ou 5 gr par jour 3 mois. – Patiente aux antécédents d’allergies cutanées, infections ORL à répétition, migraines, anxiété, fatigue et surtout désespoir de guérir : Psorinum 15 CH une dose globules par semaine ou 5 gr par jour 3 mois. En cas de vaginites aspécifiques (Gardnerella, streptocoques, staphylocoques, Escherichia coli…) – Possibles Sepia, Calcarea carbonica, Pulsatilla cités précédemment mais aussi : – Patiente ayant suivi des traitements antibiotiques répétés, pertes nauséabondes : Medhorrinum 15 CH une dose globules par semaine. – Patiente aux antécédents d’infections récidivantes ORL, respiratoires, cutanées avec retentissement sur l’état général, sueurs malodorantes la nuit : Mercurius solubilis 15 CH une dose globules par semaine ou 5 gr par jour 3 mois. Les mycoses et vaginoses bactériennes à répétition sont bénignes mais peuvent entraîner des symptômes gênants. Les médicaments homéopathiques respectent la flore vaginale et permettent d’individualiser le traitement en identifiant le terrain de la patiente. Tous les traitements doivent être accompagnés d’explications sur la cause de ces affections et de conseils d’hygiène de vie. La patiente est ainsi actrice de sa santé. 䊓 Dr Christelle Charvet gynéco-obstétricienne et homéopathe 9 Économie de la santé La situation des infirmières en France (1re partie) M Pénurie d’infirmières : son chiffrage et ses causes On comptait environ 520 000 infirmières (88 % de femmes) en France au 1er janvier 2010, selon le répertoire ADELI2. Leur âge moyen est de 40,5 ans pour les hommes et 40,3 pour les femmes, 6 % ayant plus de 55 ans. Les infirmières – et infirmiers – salariées représentent 88 % du total3, et les libérales les 12 % restants. Sur les 88 % de salariées, 49 % le sont en hôpital public, 14 % en hôpital privé, 4 % sont salariées d’un établissement pour personnes âgées et 21 % sont salariées d’autres structures, comme le sont les médecins scolaires, les médecins du travail, les médecins de collectivités locales, ou en intérim… En effectifs, on dénombre donc environ 327 000 infirmières en hôpitaux, publics et privés, et 62 000 libérales. La densité totale est donc de 8 infirmières, tous emplois, pour 1 000 habitants, dont 5 d’infirmières d’hôpitaux et 1 infirmière libérale. Les effectifs infirmiers4 évoluent plus vite que la population française. Ils étaient de 300 000 en 1990, pour une population de 58 millions d’habitants, soit une densité de 5,17 pour 1 000 habitants, contre 8 aujourd’hui. La DREES5 prévoit une aug- mentation durable de cette densité, atteignant 9,5 pour un effectif d’environ 1,2 million en 2030. La France se situe toutefois assez bas dans la densité d’infirmières par rapport aux autres pays de l’OCDE6. Les pays nord-européens ont une densité plus élevée de 25 % que la densité française. A noter la situation paradoxale de l’Espagne, qui est « exportatrice » d’infirmières alors que sa densité est faible ! Cette augmentation rapide et durable du nombre d’infirmières et de leur densité tient évidemment à l’augmentation des besoins en soins infirmiers. D’abord parce que la population vieillit, et qu’un nombre croissant de personnes ont besoin de ces soins, qu’ils soient à l’hôpital ou à domicile, qu’ils soient temporaires ou durables. Autre cause de l’augmentation de la densité d’infirmières : les progrès de la médecine, qui se traduisent par des soins nouveaux, plus précoces, plus PERSPECTIVE DE L’ÉVOLUTION DES EFFECTIFS INFIRMIERS EN FRANCE Effectifs Densité 800 000 760 000 720 000 680 000 640 000 600 000 560 000 520 000 480 000 440 000 400 000 1 400 1 300 1 200 1 100 1 000 Effectifs 900 Densité 800 700 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019 2020 2021 2022 2023 2024 2025 2026 2027 2028 2029 2030 étier récent que celui d’infirmières1 ! Si la médecine existe – ou a recommencé d’exister – comme science universitaire, au XIe siècle en France et Italie, le métier d’infirmière n’est apparu qu’au XIXe siècle. Les premières écoles d’infirmières ont été créées en 1836 en Allemagne et 1878 à Paris. Jusque-là, les malades étaient soignés, sous la conduite de médecins, dans les institutions religieuses, et les sœurs faisaient fonction d’infirmières. Le diplôme d’Etat d’infirmière est apparu en France en 1951. Le double recrutement des infirmières a persisté jusqu’en 1960, les personnels de la Croix-Rouge, notamment, étant recrutés auparavant sur base religieuse. Deux thèmes vont être approfondis dans cet article : pourquoi manque-ton d’infirmières, en France comme dans d’autres pays ? Que revendiquent les infirmières dans leurs relations avec les médecins, les hôpitaux et les malades, et quelle pourrait être l’évolution de leur rôle, réglant en partie, éventuellement, le problème de la pénurie ? 1. Nous utiliserons systématiquement le féminin dans ce texte, en sachant toutefois que 12 % des personnels infirmiers sont des hommes. 2 et 3. Etudes et résultats, n° 759, mai 2011. 4. DREES. Document d’études et recherches, Barlet Muriel et Cavillon Marie, nov. 2010. 5. Etudes et résultats, n° 760, mai 2011. 6. OCDE. Panorama de la santé, 2011. 10 La Revue de la MTRL 䉬 mars 2012 䉬 numéro 73 Économie de la santé DENSITÉ D’INFIRMIÈRES DANS CERTAINS PAYS DE L’OCDE Statistiques OCDE sur le personnel infirmier (pour 1 000 habitants) Islande Suisse Belgique Danemark Norvège Allemagne Suède Etats-Unis Royaume-Uni Finlande Japon Pays-Bas France Autriche Portugal Espagne Corée Grèce Brésil Chili Nombre d’infirmières pour 1 000 habitants Ratio infirmiers/ médecins 15,3 15,2 14,8 14,8 14,2 11 11 10,8 9,7 9,6 9,5 8,4 8,2 7,6 5,6 4,9 4,5 3,3 0,9 0,5 4,2 4 3,1 4,3 3,5 3 3 4,2 3,6 3,5 4,4 3,9 2,5 1,6 1,5 1,4 2,3 0,5 0,5 0,5 nombreux ou plus durables. On inclut ici les soins palliatifs, qui constituent évidemment un progrès mais exigent un personnel qualifié, avec surveillance permanente du patient, et qui ne peuvent, faute de moyens, être offerts qu’au tiers des patients qui pourraient en bénéficier7, 300 000 personnes en étant privées en France. Enfin, cette augmentation en nombre est censée compenser la lente baisse de la durée du travail des infirmiers salariés. Ils cherchent, comme tous les travailleurs, et aussi les jeunes médecins, à gagner autant en travaillant un peu moins. Sur ce point, il y a là, évidemment, une différence entre les infirmières salariées en hôpitaux et les infirmières libérales. Aux premières a été accordé, en 2000, l’avantage des 35 heures, mais en 2008 leur temps effectif de travail était encore de 38 heures et le temps déclaré de 35,5 heures, ce qui, ipso facto, a posé le problème de l’accumulation des RTT. Incidemment – mais que le lec- au sud et en Bretagne, que l’on ne teur n’y voie aucune critique –, peut pas ne pas lier à l’héliotropisme, selon un ancien directeur général et une sous-densité au nord. Pour les des hôpitaux, lors du remplacement infirmières salariées, la densité est des religieuses par des infirmières heureusement mieux répartie, diplômées d’Etat – en notant que dépendant évidemment des offres nombre de religieuses avaient ce d’emploi des hôpitaux, avec des titre elles aussi –, il a fallu trois infir- départements du centre et de l’est mières laïques pour remplacer une bizarrement mieux dotés (densités de infirmière religieuse… La foi soute- 9 à 12), et des départements du sud nait évidemment une productivité pas favorisés. très élevée, impossible pour des mères de famille ! DENSITÉ D’INFIRMIERS LIBÉRAUX Malgré cette hausse de la ET SALARIÉS AU 1 ER JANVIER 2009 densité d’infirmières, Libéraux nombre de pays, et la Densité par bassin de vie ou canton ou ville France au premier chef, constatent encore une pénurie dans ce domaine. On peut risquer une évaluation de cette pénurie par comparaison avec les pays où la densité d’infirmières est la plus élevée. Chiffrons donc à 11 (voir tableau OCDE ci-dessus) cette densité moyenne supérieure, qui peut constituer un objectif pour la France. Le besoin en densité supplémentaire serait donc de 3, soit, à durée du travail constante, Champs : Infirmiers libéraux, âgés de moins de 65 ans, en activité au 1 janvier 2009, France métropolitaine. et sur la base de la populaSource : Répertoire Adeli. ©IGN – DREES 2011 tion actuelle, en gros 150 000 infirmières, ce Salariés Densité départementale d’infirmiers salariés qui porterait leur effectif à 670 000 (520 000 + 150 000). Ce chiffre n’est pas incompatible avec le chiffre prospectif de la DREES pour les années 2015-2020 évoqué plus haut. Mais cette pénurie globale n’est pas du tout également répartie sur le territoire. Le mieux pour la déterminer, ce sont ces deux cartes DREES-IGN8. Elles montrent clairement, pour les infirmières libérales, une surdensité 7. « Fin de vie : un premier état des lieux ». Observatoire national de la fin de vie, févr. 2012. 8. Etudes et résultats, n° 759, mai 2011. La Revue de la MTRL 䉬 mars 2012 䉬 numéro 73 er Champs : Infirmiers salariés, âgés de moins de 65 ans, en activité au 1er janvier 2009, France métropolitaine. Source : Répertoire Adeli. ©IGN – DREES 2011 11 Économie de la santé Cette insuffisance de l’offre globale est très clairement mise en évidence par le fait que la pente de croissance des effectifs n’a pratiquement pas marqué d’accélération à la suite de la forte hausse des quotas de 2003 à 2006 (hausse de 17 000 à 27 000 puis à 30 000). Manifestation d’infirmières dans toute la France, le 12 mai 2011. © Jiémel Mais il y a d’autres raisons à cette faiblesse de l’offre de travail infirmier. La première est la pénibilité réelle du travail dans certains secteurs. Cette pénibilité, c’est d’abord la surcharge de travail pour les hospitalières, publiques ou privées, plus particulièrement dans certains services, comme les urgences, les blocs, les divers services chirurgicaux. Elles sont souvent contraintes aux heures supplémentaires et accumulent donc les RTT. On les rappelle fréquemment durant leurs congés. On voit cependant que cette surcharge est liée à une durée du travail sensiblement inférieure à celle de pays dont le système social est souvent jugé supérieur à celui de la France ! Revendication identique à celles des étudiants en université. Face à cette pénibilité, à cette soif de reconnaissance, à ce coût de formation, à cette « désutilité » du travail infirmier, à des milieux géographiques et climatiques plus ou moins agréables, quelle est, comme disaient les économistes d’autrefois, l’« utilité » du revenu des infirmières ? Selon le site emploi de la Santé et du Social, le salaire d’une infirmière hospitalière dans le secteur public, en début de carrière, est de 1 484 ¤ (1 515 avec les primes, 18 180 ¤ par an) et, en fin de carrière, de 2 393 ¤ (2 550 avec les primes, 30 500 ¤ par an). Les salaires des infirmières des cliniques privées sont de 10 % inférieurs. Toutefois, à la suite de l’accord sur l’allongement de 55 à 60 ans de l’âge de départ en retraite, signé en avril 2010, un supplément de 2 000 ¤ par an a été accordé. On peut donc combiner les deux données pour fixer un salaire moyen des infirmières françaises à 24 000 ¤ par an. Ce salaire moyen des infirmières françaises est plutôt bas par rapport aux salaires infirmiers dans les pays de l’OCDE. 䊓 Pénibilité du travail et manque de considération Sans doute eut-il été judicieux, lors du passage aux 35 heures, de séparer le cas des personnels hospitaliers de celui des autres fonctionnaires, puis, peut-être, de lier la durée de cotisation pour une pleine retraite à la fixation d’une baisse plus lente de la durée hebdomadaire du travail. La pénibilité existe aussi chez les infirmières libérales ; déplacements, montées d’escaliers, patients difficiles, quartiers dangereux et, dans certains cas, soulèvement de malades pondéreux, sont quand même des éléments de pénibilité. Mais elles ont le degré essentiel de liberté de choix et du nombre de patients qu’elles traitent. La seconde raison de cette faiblesse de l’offre est, au dire des intéressées elles-mêmes, le manque de « reconnaissance », de considération, notamment de la part de certains médecins. Lors du mouvement infirmier de 1988, les revendications portaient effectivement sur cette reconnaissance de leur identité professionnelle, ce qui se traduisait par la demande d’équivalence universitaire à « bac + 3 ». C’est ainsi qu’est née la Coordination infirmière. Nous reviendrons sur ce thème à propos, justement, du partage des tâches entre les médecins et elles. Une troisième raison avancée par les associations d’infirmières est le coût des trois ans d’études. Jean Matouk agrégé de sciences économiques, professeur des universités DURÉE DU TRAVAIL DES INFIRMIÈRES EN EUROPE (base 100, définie ici pour la France) Moyenne horaire annuelle travaillée Infirmière Infirmière spécialisée au bloc opératoire Infirmière spécialisée en anesthésie Infirmière spécialisée en puériculture Privé Public Privé Public Privé Public Privé Public Allemagne Belgique Danemark Espagne France Italie Norvège Suède Suisse Royaume Uni 1 656,6 h 1 748 h 1 620,6 h 1 747,2 h 1 575 h 1 672 h 1 695 h 1 676,2 h nc 1 685,2 h 97 104 110 110 119 108 119 119 111 113 102 100 102 91 102 100 167 161 194 170 194 154 194 170 93 124 101 119 101 108 101 119 100 100 100 100 100 100 100 100 91 100 87 87 87 79 84 89 167 161 194 170 194 154 194 170 153 137 172 141 172 128 169 141 196 188 214 214 204 184 168 173 113 110 104 104 117 112 117 123 Stéphane Desmichelle, sept. 2010, ActuSoins-toute l’actualité infirmière. 12 La Revue de la MTRL 䉬 mars 2012 䉬 numéro 73 Savoir Le pied de l’enfant Le pied est une structure composée de 26 os, 66 articulations et 214 ligaments qui lui permettent de supporter le poids du corps, de s’adapter à la surface du sol tout en absorbant à chaque pas les chocs. L’étape de la petite enfance est primordiale es os sont consolidés vers l’âge de 18 ans en moyenne. Le pied du nouveau-né est essentiellement constitué de cartilage mou, souple qui se transforme progressivement en os au fur et à mesure de l’avancée en âge. La marche intervenant plus ou moins entre 10 et 18 mois, la voûte plantaire n’est pas visible et le pied semble plat, mais c’est normal car physiologique. Vers l’âge de 4 ans, les muscles et les tendons vont se renforcer. Il est conseillé de consulter à cet âge un podologue qui sensibilisera les parents aux gestions de bonne santé du pied et orientera, si nécessaire, vers un professionnel de santé approprié (pédiatre, orthopédiste…). Il est recommandé de laisser les pieds le plus souvent libres, de ne pas les brider dans des chaussures car la préva- C La Revue de la MTRL 䉬 mars 2012 䉬 numéro 73 lence des pieds plats est de 8,6 % chez les enfants portant des chaussures plus de 8 heures par jour alors qu’elle est seulement de 2,8 % chez ceux qui marchent le plus souvent pieds nus. Cette marche pieds nus permet aux muscles d’agir sans contraintes. De l’importance d’un chaussage approprié Le podologue effectuera un examen clinique complet au travers de tests et de jeux qui lui permettront de poser un diagnostic sur la statique de l’enfant, d’évaluer les amplitudes articulaires (pieds plats, genoux déviés, genu valgum, chutes trop fréquentes, usure anormale des chaussures…), de contrôler le chaussant afin de conseiller les parents sur un chaussage approprié. Le podologue proposera un plan thérapeutique et un suivi. Il faut examiner régulièrement le pied des enfants au niveau : 䊉 de la peau : toute apparition de rougeurs ou de rugosités sur les voûtes plantaires ou sous l’os de la cheville, voire de rougeurs entre les orteils, d’ampoules sur l’arrière du talon, doit faire l’objet d’une visite chez le podologue ; 䊉 des ongles : l’apparition d’une inflammation autour de l’ongle doit être prise au sérieux car elle peut être le signe d’une infection, voire créer un ongle incarné à cause d’une malformation d’un ou de plusieurs ongles ou à cause des bourrelets latéraux des orteils ; 䊉 de déformations des orteils, qui peuvent générer des lésions cutanées ou unguéales ou des déséquilibres au niveau de la posture ; il est nécessaire de consulter le podologue, qui pourra proposer le port d’orthoplasties (petit appareil sur mesure destiné à corriger les malformations du pied), d’orthèses plantaires avec un suivi régulier. Consulter le plus tôt possible Le pied des adolescents est également à surveiller, une fois par an par le podologue, en particulier s’il souffre de pathologies liées à la croissance. Une consultation précoce est indispensable pour qu’un bon diagnostic soit porté dès que possible, qui permettra une prise en charge pluridisciplinaire adaptée, si nécessaire. Les activités sportives en excès peuvent être responsables de retard de croissance, de retard de maturité, de douleurs. Dans le cas de troubles statiques et dynamiques du pied, le podologue pourra proposer un plan thérapeutique incluant la prescription d’orthèses plantaires, un suivi et des conseils en matière de chaussage en fonction du sport pratiqué. Il convient d’avoir un bon diagnostic initial, d’où l’importance d’une consultation précoce et régulière chez le podologue. C’est le plus souvent le retard du diagnostic qui est la cause de complications qui retentiront sur l’appareil locomoteur de l’adolescent et de l’adulte. 䊓 Odette Vaudray Fédération nationale des podologues 13 Connaître Surpoids, tissu adipeux, et inflammation : un epuis une vingtaine d’années, la vision du tissu adipeux a profondément changé. Classiquement, le tissu adipeux chez les humains est constitué d’adipocytes dits « blancs », par rapport aux cellules graisseuses dites « brunes » chez l’animal. Chez les animaux mammifères, la graisse brune joue un rôle important dans la thermorégulation. Le tissu adipeux blanc humain joue un rôle endocrine, c’est-à-dire qu’il est maintenant considéré comme une authentique glande interne, qui sécrète des hormones se déversant dans le sang. Tout de suite, on appréhende son importance : si j’ai 30 kg en trop, j’ai vraiment une très très très grosse glande adipeuse… mais si je pèse 34 kg tout habillé pour être envisageable dans un casting de pub, sans doute quelque chose de très important me manque, non ? D Rôle et composition du tissu adipeux Le premier rôle dévolu à ce tissu adipeux – abhorré, négligé ou adoré – est évidemment le plus visible : celui du stockage ; et secondairement il fait fonction d’isolant thermique. Dans cette période de changement climatique, voilà qui a de quoi faire réfléchir ! Le tissu adipeux est localisé dans la zone sous-cutanée et tout autour de nombreux organes internes, ce que l’on sait moins ; il est essentiellement constitué de cellules graisseuses adultes appelées adipocytes, mais d’autres cellules sont présentes, telles les pré-adipocytes fibroblastiques, les cellules endothéliales formant les capillaires sanguins et les mastocytes – globules blancs qui fabriquent des substances très bioactives comme l’histamine, l’héparine, la sérotonine, la bradykinine. 14 Donc l’idée d’un tissu gras constitué uniquement de cellules spécifiques stockeuses de graisse appartient au passé : le tissu adipeux comprend plusieurs lignées cellulaires différentes et distinctes. Rien ne va plus ! Présence de cellules inflammatoires Chez la personne grosse, on retrouve en plus dans le tissu graisseux un grand nombre de cellules appelées macrophages. La présence de ces macrophages infiltrant le tissu adipeux signe clairement leur intervention dans le processus inflammatoire. Ces cellules sont impliquées dans les interactions entre adipocytes adultes et pré-adipocytes, et libèrent une grande quantité d’hormones locales. Les hormones du tissu adipeux Les adipocytes fabriquent toute une famille d’hormones eux aussi : les adipokines, dont on connaît maintenant une bonne soixantaine de membres. La première adipokine fut découverte en 1994 : c’est la leptine – du grec leptos signifiant mince –, fabriquée par les adipocytes adultes uniquement ; produit du gène lep chez l’homme – gène ob chez la souris –, sa mutation est à l’origine d’une obésité. Sa découverte fut en quelque sorte une véritable révolution. La leptine exerce une action sur l’hypothalamus. L’hypothalamus est une zone située au centre du cerveau – dont il représente moins de 1 % du volume total –, au-dessus de l’hypophyse, avec laquelle il est relié par une « tige », la tige pituitaire. Il assure un double rôle de contrôle des sécrétions hormonales de la glande hypophyse (considérée comme le « chef d’orchestre » des autres glandes de l’organisme et de la taille d’un petit pois Structure cristallisée de l’ACRP30 (Adipocyte Complement-Related Protein). extra-fin non surgelé) et de régulation de l’homéostasie (maintien des paramètres biologiques de l’organisme). L’hypothalamus intervient également dans le comportement sexuel et les émotions. Il fait partie d’un système appelé le système limbique (impliqué dans les émotions). Chez l’homme, l’obésité est associée à des taux élevés de leptine, ce qui laisse à penser qu’il existe une résistance éventuelle à son action ou une diminution du passage de la leptine du sang au cerveau. Certains chercheurs avancent également qu’il existerait une anomalie des récepteurs cérébraux de la leptine. Normalement, l’action de la leptine provoque une diminution de l’appétit par apparition de la satiété, ce qui explique son pouvoir amaigrissant physiologique. Chez l’individu gros, cette action satiétogène n’existe plus. Adiponectine et adipokines On a très vite mis en évidence une autre hormone de la même famille, et fabriquée elle aussi exclusivement par des adipocytes matures, c’est l’adiponectine. Celle-ci est déversée puis circule bien sûr dans le sang, mais à dose La Revue de la MTRL 䉬 mars 2012 䉬 numéro 73 Connaître flore intestinale conflit génétique ? inversement proportionnelle à la quantité de tissu adipeux ; donc peu de graisse, beaucoup d’adiponectine, et inversement. Oui, mais cette adiponectine est une protéine antiinflammatoire, elle augmente la sensibilité à l’insuline et améliore la fonction endothéliale : elle lutte donc contre le diabète en modulant le taux de sucre sanguin et protège beaucoup les vaisseaux sanguins. D’autres adipokines régulent la tension artérielle, le métabolisme lipidique, l’appétit et la balance énergétique. Autant dire que les adipokines sont des hormones de tout premier ordre dans l’organisme. Enfin, on sait maintenant que les adipokines jouent un rôle central dans l’inflammation et l’angiogénèse (fabrication de nouveaux vaisseaux sanguins) et participent plus ou moins directement au processus cancéreux (sans doute plus que moins). Inflammation, cancer et tissu adipeux Les liens existant entre adipokines, obésité et inflammation sont très étudiés. L’obésité – mais aussi le surpoids – se caractérise par un état chronique d’inflammation à bas bruit (dit de bas grade) mais parfaitement objectivé par des niveaux élevés de protéines Acides gras et cellules immunitaires Statégies anti-inflammatoires, nutritionnelles et médicales Tissu adipeux Inflammation Stress oxydant La Revue de la MTRL 䉬 mars 2012 䉬 circulantes telles la C-Reactive Protein, l’interleukine 6, l’haptoglobine, l’orosomucoïde ou SAA, le TNF alpha, la MCP-1 et le MIF. Il est très intéressant de noter qu’un amaigrissement normalise automatiquement les taux de ces marqueurs du sang ! Le tissu adipeux péritumoral de certaines tumeurs – du sein en particulier – libère aussi un grand nombre d’adipokines pro-inflammatoires ; les adipokines se mettent au service de la tumeur pour modifier profondément le tissu péritumoral et mettre à profit du cancer le maximum des ressources tissulaires environnantes. Toutes ces hormones pro-inflammatoires diminuent également la réponse à l’insuline des pré-adipocytes et inhibent leur différenciation en adipocytes adultes : en fait, on voit ici que l’inflammation peut déclencher, entretenir et/ou aggraver un diabète et/ou un état apparenté comme le syndrome métabolique – associant anomalies lipidiques sanguines, surpoids, hypertension. D’autre part, on ne peut s’empêcher de penser aux liens épidémiologiques constatés dans la population : surpoids-inflammation-cancer. On sait, depuis 70 ans, que l’inflammation chronique fait le lit du cancer, et maintenant de façon certaine que le tissu adipeux est une source majeure d’inflammation. On sait aussi que le déséquilibre de la flore intestinale induit une inflammation corporelle et augPathologies mente le stockage lipidique du sujet. Comment ne pas voir que Biothérapies l’obésité, le diabète et le cancer sont intimement liés ? Or ces trois numéro 73 affections présentent un lien social étroit : on parle à leur propos d’épidémie ! Ça ne vous interpelle pas ? Une autre « couche » supplémentaire d’inflammation pourrait être une réponse au stress déclenché par une hypoxie locale. Les capillaires sont littéralement écrasés, pincés sous le poids du tissu adipeux, bloquant le flux sanguin, donc l’arrivée d’oxygène, entre autres. D’autre part, l’adipocyte mature est une très grosse cellule d’une taille comprise entre 150 et 200 microns, supérieure à la distance de diffusion de l’oxygène : il y a donc localement carence en oxygène disponible – risque presque immédiat de mort cellulaire – et donc mise en route d’un phénomène de sauvetage d’urgence appelé néoangiogénèse tissulaire : le tissu adipeux réagit, comme d’autres tissus, à la situation de carence en fabriquant de nouveaux capillaires sanguins de suppléance : l’oxygène arrivera de nouveau, et les cellules peuvent continuer à vivre. Ouf, il était temps. Un lien entre flore bactérienne et obésité ? Le rôle du microbiote intestinal dans le stockage des graisses et dans l’obésité est un champ très actif en pleine phase de recherche. Des résultats montrent que le microbiote effectue une meilleure digestion des résidus alimentaires, tout en contribuant à l’absorption par l’hôte de glucides et de lipides, et en favorisant le stockage des graisses. Des équipes de chercheurs montrent en effet que les souris sans microbiote mangent davantage mais accumulent moins de graisse au bout du compte. 15 Connaître De plus, le transfert de flore intestinale de souris obèses à des souris sans flore – dites axéniques – induit une augmentation de l’extraction énergétique des aliments ingérés et donc une prise de poids de l’ordre de 40 % supérieure à celle induite par le transfert d’un microbiote issu de souris minces. Il a été montré que l’humain obèse présente un déséquilibre de flore intestinale, avec un rapport firmicutes/bacteroïdes de l’ordre de 100/1 – c’est-à-dire qu’il existe un important déficit en bacteroïdes –, identique à celui observé chez des souris obèses génétiquement déficientes en leptine. La perte de poids est par ailleurs corrélée à l’augmentation de la proportion de bacteroïdetes – ratio qui tend alors vers 10/1. Hallucinant ! Incontournable insuline Au cours de l’évolution, l’homme a été confronté à une insuffisance de nourriture (mais est-ce vraiment différent aujourd’hui ?) : l’insuline est alors là pour stocker de l’énergie (en prévision de la fermeture inopinée, mais bien improbable, du Mac Do par exemple), et il est très clair que l’évolution de l’homme et de sa flore intestinale a favorisé l’extraction optimale de l’énergie nutritionnelle. Cette symbiose est devenue trop efficace dans les nouvelles conditions de vie de nos contemporains (souvenez- vous, la pizza arrive en cyclomoteur dans les 20 min !). Voilà à mon sens une des explications fondamentales de l’obésité actuelle, évoluant dans un contexte inflammatoire cancérigène et bourré de dommages collatéraux. L’insuline, ce si puissant facteur de croissance humain, sans doute le plus puissant de notre organisme car d’action ubiquitaire, est parfois redondante avec une autre hormone trop peu prise en compte : l’hormone de croissance, la GH. Faisons une connexion très rapide mais incisive avec la fameuse hormone T3 de la thyroïde, et globalement le décor et les mécanismes des maladies de civilisation sont plantés : tout y est. Nous en reparlerons. Je suis sûr que vous sentez intuitivement bien les choses. L’inflammation sécrète des molécules attirant d’autres macrophages, augmentant l’état inflammatoire du tissu adipeux ; et, partant de là, de notre corps entier, à travers leur sécrétion sanguine de molécules inflammatoires ; mais aussi du fait de leur interaction avec les adipocytes, sécrétant à leur tour des protéines de l’inflammation. Tous ces produits inflammatoires ne sont pas du tout spécifiques d’un tissu ou d’un système ou d’un type cellulaire : une fois produits et sécrétés, ils sont capables d’affecter tous les systèmes fonctionnels et tissulaires de l’organisme. Déclarer la guerre totale à l’inflammation Les complications métaboliques de l’obésité représentent la plus grande part des coûts de la maladie. En effet, le diabète est la comorbidité dont le risque relatif augmente le plus avec l’obésité, car ce risque commence à augmenter pour un indice de masse corporelle de 21, soit bien avant le seuil de 30 qui définit l’obésité. C’est pourquoi la prévention du diabète est absolument prioritaire. Le rôle du médecin de famille apparaît essentiel à ce niveau. Chez les sujets non diabétiques, le syndrome métabolique associant obésité abdominale, hypertension et dyslipidémie est associé à un risque de pathologies cardio-vasculaires comparable à celui des diabétiques avérés. Le diagnostic de ce syndrome et la prise en charge nutritionnelle de la prévention des affections cardio-vasculaires chez ces sujets sont donc tout aussi prioritaires : on touche des millions de sujets, ne l’oublions pas. Enfin, le rôle de l’environnement « obésogène » est relatif au mode de vie occidental et doit être directement dénoncé, avec l’influence de la télévision, de l’ordinateur, de la consommation de boissons sucrées et d’aliments riches en graisse – à la maison et à l’école, y compris dans l’enseignement supérieur –, et de la sédentarité. La prévention de l’obésité chez l’enfant est un domaine capital où malheureusement on n’avance guère. Nous sommes en présence d’un phénomène typique de cercle vicieux : prise de poids, inflammation, cancer, diabète… Tout est relié ! Comment intervenir tout de suite ? Il y va de notre entière responsabilité : vous, lecteur mutualiste informé, que faites-vous ? Nous verrons cela une prochaine fois. 䊓 Philippe Fiévet Médecin nutritionniste Maître en sciences et biologie médicales 16 La Revue de la MTRL 䉬 mars 2012 䉬 numéro 73 Zoom Les intolérances alimentaires (1re partie) N’allons pas croire que notre intestin est un organe anodin. Selon des études récentes, il a été mis en évidence qu’il est responsable de la plupart de nos problèmes de santé. Analyse de processus complexes n effet, l’intestin joue un rôle prépondérant dans l’apparition de nombreuses pathologies semblant n’avoir aucune relation avec les problèmes intestinaux habituellement décrits : surpoids, envie d’aliments sucrés, stress, déprime, insomnie, migraines, psoriasis, eczéma, problèmes de la sphère ORL, problèmes pulmonaires, maladies auto-immunes, infections, etc. Le système immunitaire intestinal est le plus important de notre organisme. Il a pour fonction de faire barrage à tous les indésirables : bactéries, moisissures, substances toxiques, virus et autres xénobiotiques. Il a été démon- E La Revue de la MTRL 䉬 mars 2012 䉬 numéro 73 tré que les aliments en cause étaient les plus courants de notre alimentation quotidienne. En découlent une production massive et régulière d’anticorps anti-aliments et l’accumulation nocive des déchets dans les tissus, avec toutes les conséquences que cela entraîne. Progression constante des maladies allergiques Selon les maladies répertoriées par l’OMS, les intolérances alimentaires et les maladies allergiques sont en constante progression puisqu’elles occupent désormais le quatrième rang, par ordre de fréquence. On estime que 15 à 20 % de la population a été confrontée ou sera confrontée à une maladie allergique. C’est dire à quel point ce véritable enjeu de santé publique concerne tous les âges et touche tous les organes, alternativement ou simultanément. Si l’on considère le nombre impressionnant de gens qui fréquentent les magasins de diététique à la recherche de produits sans gluten, sans caséine, sans additifs alimentaires, sans œufs, on peut évoquer une forte évolution des symptômes ou des pathologies liés aux intolérances alimentaires. Dès la naissance, le nourrisson peut déjà être sensibilisé à divers aliments, 17 Zoom y compris au lait de sa mère et, à plus forte raison, au lait de vache. Tout d’abord, il est indispensable de distinguer l’allergie de l’intolérance, En cas d’allergie, la manifestation est immédiate et extériorisée – conjonctivite, diarrhée, rhinorrhée –, parfois violente – choc anaphylactique. Ce sont les immunoglobulines E ou anticorps qui en sont le support immunologique. L’intolérance alimentaire est une réaction lente qui se produit au-delà de deux jours et peut durer des années en générant de lourdes séquelles au niveau digestif. Par exemple, on peut être intolérant à la levure de boulanger, au blanc d’œuf ou aux cacahuètes sans avoir conscience ni des symptômes ni de la cause. Les immunoglobulines G sont la toile de fond de cette dérégulation immunologique. Alors, comment devient-on intolérant ? Les causes étant multifactorielles, il est difficile d’apporter une réponse claire et précise, tant certaines pistes restent encore à explorer. Cependant, grâce aux avancées de la science et la mise au point de tests spécifiques, nous pouvons aujourd’hui identifier les aliments mis en cause dans les processus d’intolérance. En observant le phénomène des intolérances alimentaires, à tout âge, on observe une amplification générale de toutes les pathologies allergiques ainsi que l’industrialisation des produits alimentaires, dont la structure moléculaire ne correspond plus à la nourriture de nos ancêtres. Pour expliquer cette croissance vertigineuse, on peut raisonnablement avancer plusieurs hypothèses. La théorie de l’hygiène La communauté scientifique est unanime sur le concept de l’hygiène. ll a été constaté que l’exposition précoce – dès la néo-natalité – à des microbes et autres infections stimulait le système immunitaire du nouveau-né, lui permettant de reconnaître les substances étrangères nuisibles à son organisme et de neutraliser ses allergènes et ses antigènes. Le fait que nous évoluons aujourd’hui dans un envi18 ronnement de plus en plus aseptisé, où la propreté est de rigueur, n’est pas favorable au développement de l’immunité. Les jeunes enfants ne sont plus autant exposés qu’avant aux micro-organismes destinés à renforcer ultérieurement leurs défenses naturelles. En dehors des facteurs d’hygiène, on peut incriminer aussi la prise systématique d’antibiotiques chez les enfants en bas âge, qui, en neutralisant les microbes, empêchent l’organisme de déployer sa stratégie immunitaire et d’organiser sa propre défense. Force est de constater que ces enfants, dans les années qui suivent, sont plus enclins à développer des pathologies infectieuses, des allergies et des intolérances sur un terrain inflammatoire et affaibli. L’introduction précoce de nourriture Un autre aspect important à souligner, dans le développement de plus en plus fréquent des allergies et intolérances alimentaires chez les bébés, est l’introduction trop précoce d’une nourriture variée et antigénique, alors que leur système immunitaire n’a pas atteint fa maturité nécessaire pour la tolérer. Rappelons le rôle essentiel du système digestif dans le développement de l’immunité, puisqu’il lui faut plusieurs mois pour atteindre sa maturité. C’est ainsi que, en raison de l’immaturité de son système digestif lors du passage des aliments allergènes à travers la muqueuse intestinale, l’absence de formation d’anticorps dans le sang ne peut s’opposer à l’invasion de ces éléments étrangers. Aliments et fruits nouveaux L’émergence des fruits exotiques sur le marché français a généré l’apparition de nouvelles allergies et intolérances. C’est ainsi que, depuis deux à trois décennies, l’importante production française de kiwis est source d’allergies assez courantes, mais aucun principe de précaution n’a été mentionné avant de présenter ces aliments nouveaux sur les étals des Le mangoustan. primeurs – agrumes, noix de cajou, grenade, avocat, mangue, mangoustan, ananas, pousses de bambou. En dehors des fruits exotiques, nous pouvons signaler l’allergénicité bien connue de la moutarde, un ingrédient présent dans nombre de sauces. L’ensemble des épices présente également un risque d’allergie méconnu. Notons que les intolérances aux épices représentent 6 % de l’ensemble. L’industrie agro-alimentaire L’industrie alimentaire, pour affronter une concurrence de tous les instants, développe sans cesse de nouvelles niches de marché. La composition des nouveaux produits qu’elle conçoit sans relâche est de plus en plus complexe et bien souvent allergénique, On en constate les effets pervers avec l’introduction systématique d’additifs, et de contaminants protéiques. En effet, l’allergénicité des protéines provient de nombreuses technologies alimentaires : aromates et arômes industriels, mixages composites, addition de nombreuses épices, divers procédés de cuisson, etc. Les ingrédients protéiques résultent de l’alimentation moderne. Il s’agit de Des bonbons pour vos enfants : rien que du naturel ! La Revue de la MTRL 䉬 mars 2012 䉬 numéro 73 Zoom toutes les substances utilisées dans la fabrication d’une denrée alimentaire et qui restent présentes dans le produit fini. Ce sont des allergènes déguisés sous les étiquettes, que le consommateur ne va pas démasquer s’il n’étudie pas attentivement la composition du produit. On les trouve dans les protéines isolées d’aliments : les hydrolysats de protéines, les huiles, auxquelles s’ajoutent les composants non protéiques et les contaminants non alimentaires (acariens, nickel, etc.). Les traitements spécifiques de protéines, comme la texturisation, provoquent des transformations de la structure moléculaire. La cuisson des aliments La cuisson des aliments modifie la structure des protéines d’où une déstructuration, puis une désorganisation aboutissant à une agrégation protéique, ainsi qu’à des liaisons covalentes avec des lipides oxydés ou des produits dérivés des sucres. Dès qu’il y a cuisson, on assiste à la formation de molécules de Maillard. Ces dernières ne sont pas assimilables par l’organisme humain et donc pathogènes, puisque notre métabolisme ne les reconnaît pas. L’association d’une molécule sucrée et d’une protéine déclenche la réaction de Maillard et d’acides aminés oxydés, dite de stress oxydant des protéines par les glucides, ou encore glycation. Lors de la cuisson, les sucres se polymérisent, les huiles s’oxydent, se polymérisent et se cyclisent d’autant plus aisément qu’elles sont insaturées, raison pour laquelle il est préférable de ne pas chauffer les huiles de maïs, de tournesol ou de colza, riches en acides gras insaturés, afin de prévenir la formation d’isomères. Nos enzymes n’agissent effectivement que sur la substance originelle et naturelle, et non sur l’isomère, souvent non reconnu par l’organisme. L’allergénicité s’en trouve modifiée. À noter que la carence en vitamine B6 favorise la glycation, notamment chez les diabétiques de type II. Tous ces aliments cuits et, a fortiori, les médicaments chimiques et La Revue de la MTRL 䉬 mars 2012 䉬 numéro 73 autres xénobiotiques sont confrontés à la barrière immunitaire intestinale où veillent les cellules présentatrices d’antigènes, véritables chiens de garde à l’affût de la moindre molécule étrangère. Les polluants environnementaux Les six principaux polluants sont l’aluminium, le baryum, le plomb, le mercure, le phosphore et le manganèse, les trois derniers cités étant les plus dangereux. Avec l’émergence de nouveaux produits de synthèse, la liste des polluants environnementaux neurotoxiques ne cesse de s’allonger. L’intoxication lente aux métaux lourds est due principalement aux rejets industriels de mercure et de plomb dans l’atmosphère, à la présence de divers métaux dans les amalgames dentaires (mercure, étain, cuivre, béryllium, argent…), aux cigarettes (cadmium), aux vaccins en général (aluminium), dont le plus dangereux est le ROR (rougeole-oreillonsrubéole) à cause de sa teneur en mercure. Les métaux lourds, en s’accumulant dans l’organisme, neutraliseraient une classe d’enzymes (les peptidases) dont le rôle est de détruire un ensemble de protéines alimentaires provenant du gluten et des caséines du lait. Ils ont la capacité d’induire un phénomène d’auto-immunité en plus des dépôts silencieux qui se figent dans les organismes. Les pays industrialisés sont particulièrement concernés par une hausse des troubles du comportement et de la personnalité liés au mercure : hyperactivité, autisme, schizophrénie, épilepsie, repli sur soi… Dès lors que ces systèmes enzymatiques sont inhibés, les aliments ne sont plus assimilés et les nutriments deviennent toxiques. De ce fait, lorsque les protéines des céréales contenant du gluten et celles du lait de vache ne sont pas complètement dégradées, elles franchissent la paroi intestinale et passent dans le flux sanguin, du fait de la perméabilité exagérée de l’intestin. Ces peptides atteignent les récepteurs du cerveau spécifiques à ces substances, sous forme d’opioïdes, et vont se comporter dans l’organisme comme certains morphiniques. En occupant et en saturant les récepteurs opiacés, les peptides provenant du gluten et de la caséine vont provoquer un ensemble de troubles comportementaux et dérégler la gestion des neurotransmetteurs (la sérotonine et la dopamine). 䊓 Dr Jean-Pierre Willem Les voitures, de plus en plus inopportunes en centre ville. 19 Bien vivre “Le cerveau a besoin de plus qu’un sudoku…” Alzheimer, dépendance et sénilité nous font peur, et avec raison. Le public réalise que la santé de notre cerveau est de première importance lorsqu’il s’agit de vieillir en bonne santé otre culture doit à Descartes la séparation du corps et du cerveau. Le cerveau, organe noble, serait le siège de l’intelligence et des fonctions élevées de la réflexion. Il est donc logique de penser que, pour exercer et entretenir son cerveau, il convient de s’adonner à des jeux de réflexion stimulant l’abstraction, la mémoire. Un sudoku et un peu de calcul mental chaque jour suffiront pour garder toute notre tête. Vraiment ? N Dichotomie Pourtant, la séparation claire faite entre le cerveau et le corps peut paraître étonnante à quelqu’un qui possède des bases d’embryologie. Sans entrer dans des détails compliqués, on peut dire que le système nerveux est meneur dans le développement du fœtus et que la croissance du corps s’organise autour de sa croissance. De ce fait, le cerveau est partout. Le cerveau n’est pas cloisonné à notre crâne, il est la moelle épinière, il est les nerfs périphériques qui s’étendent dans les membres, les organes. Il « est » les myriades de différents capteurs qui le renseignent sur la position de nos membres, la vitesse de ceux-ci, l’état des muscles, des organes, qui produisent la sensation de douleur, mesurent la chaleur, l’humidité… Le cerveau va jusqu’au bout des doigts. Il devient alors difficile de séparer le cerveau du corps. D’autant qu’il semblerait que le dessein du cerveau ne soit pas la gamberge. Le Dr Wolpert, de l’université de Cambridge, va même jusqu’à dire 20 que la raison d’exister du cerveau est de produire des contractions musculaires en série complexes et coordonnées. Il cite, pour illustrer son propos, l’exemple des tuniciers qui sont de petits êtres marins qui, lors de leur début d’existence, sont amenés à se mouvoir dans l’océan et possèdent un système nerveux. Devenus adultes, ils se fixent sur un rocher et continuent leur existence ainsi. Cependant, leur première adaptation à cet état nouveau est de phagocyter leur propre système nerveux. Ils ne bougeront plus, donc ils peuvent se passer d’un cerveau. “Un imbécile qui marche ira toujours plus loin qu’un intellectuel assis” (M. Audiard) Le cerveau se serait développé dans le but de produire des mouvements coordonnés et fluides basés sur des prédictions faites sur la base d’informations stockées par la mémoire, qui est nourrie par la faculté d’apprendre. Le Dr Wolpert prend aussi en exemple les difficultés de la robotique à produire des mouvements coordonnés et fluides dans un environnement incertain, alors que les ordinateurs sont aujourd’hui capables de battre des champions du monde d’échecs. Si on y pense, toutes les activités dites intellectuelles requièrent des contractions musculaires. Ecrire, parler. La pensée, pour s’exprimer, a besoin de l’action formidablement coordonnée des muscles de l’expression orale. Un neurone, pour survivre, a besoin de nutriments mais aussi et surtout d’information. Un neurone qui ne reçoit pas d’information – d’impulsions – et donc n’en produit pas mourra. La majorité de l’activité du cerveau est consacrée à cacher à notre conscient la gigantesque masse d’information qu’il reçoit des millions de récepteurs disséminés dans le reste du corps pour ne filtrer que l’information pertinente à notre but présent. Ce point est important, car cette masse d’information nourrit les neurones, leur garde une raison d’être. Le mouvement est donc essenLa Revue de la MTRL 䉬 mars 2012 䉬 numéro 73 Bien vivre tiel au maintien en bonne santé de notre cerveau, car il augmente le flux d’information en arrivage et en partance du cerveau. L’inactivité physique contribue à la dégénérescence cérébrale ! 10 000 pas par jour L’effet préventif d’une pratique quotidienne a même été démontré chez des sujets génétiquement prédisposés à la maladie d’Alzheimer. On connaît donc aujourd’hui un lien direct préventif. Mais il existe un lien sur les facteurs indirects causant toutes les maladies cognitives. Il existe une relation, aujourd’hui connue, entre le diabète de type 2 et la maladie d’Alzheimer. Une étude récente dégage même un risque accru de toute maladie cognitive chez les sujets qui voient leur glucose sanguin trop augmenter à la suite de repas. La relation est forte pour les sujets souffrant de diabètes mais existe aussi – bien qu’un peu moins forte – chez les prédiabétiques. D’autre part, une autre étude a forcé des sujets physiquement actifs à devenir inactifs pendant quelques jours. Ces sujets ont vu leur glucose sanguin augmenter après les repas comme chez les prédiabétiques. Il semble que le niveau d’activité minimum nécessaire pour maintenir une réponse insulinique de qualité soit de 10 000 pas par jour ! 10 000 pas représentent à peu près 7 à 8 km à pied par jour. Notre métabolisme a besoin pour fonctionner correctement d’une grande quantité d’activité physique. De plus, des études sur les rats montrent que l’exercice améliore la capacité du cerveau à absorber le glucose, qui est le substrat énergétique qu’il utilise pour fonctionner correctement. Toutes ces évidences sont-elles suffisantes pour vous convaincre que notre mode de vie est par trop sédentaire, qu’il influence défavorablement l’évolution de nos capacités cognitives au cours des années et que les sudokus et autres mots croisés ne suffisent sûrement pas à maintenir notre cerveau en santé ? La Revue de la MTRL 䉬 mars 2012 䉬 numéro 73 Se bouger, mais pas inconsidérément ! Maintenant convaincu de l’importance de l’exercice, on prend ses baskets, on va dehors, on se met à courir. Las ! au bout de quelques semaines/ mois les douleurs apparaissent, et on revient à l’inactivité précédente avec des douleurs en plus qui diminuent encore notre mobilité. Que faire ? Tout le monde peut marcher, tout le monde peut monter les escaliers au lieu de prendre l’ascenseur, les transports en commun en ville au lieu de la voiture. Si votre métier vous tient assis pendant des heures, levez-vous à espace régulier. Cependant, il vous faudra probablement consacrer du temps à l’exercice. Quiconque allume sa télévision durant la semaine perd le droit de dire qu’il manque de temps ! Ce qui est important, c’est de garder une bonne capacité de mouvement le plus tard possible dans notre vie. Il ne s’agit pas de courir des marathons. D’ailleurs, la pratique trop intensive de l’endurance a de nombreux effets indésirables, qui vont des troubles musculo-squelettiques aux problèmes inflammatoires et cardio-vasculaires. La qualité de base du mouvement est la force. La force se définit comme la capacité de notre corps à produire des tensions plus ou moins importantes. Avec l’âge, l’inactivité cause une fonte musculaire qui nous rend trop faibles pour nous mouvoir de façon suffisante et supporter un métabolisme sain. Nous avons vu plus haut que les prérequis d’activité physique pour un métabolisme sain représentent une quantité de travail physique non négligeable. Il faut encourager la pratique du renforcement musculaire, qui maintient – ou même augmente – la force des muscles ainsi que leur masse totale. Le renforcement musculaire peut être entrepris à tout âge et produit des résultats positifs même dans la 8e décennie. Les études montrent que la perte de masse musculaire – sarcopénie – est un facteur de risque majeur pour toute cause de mortalité chez les sujets en maison de retraite. La lecture de cet article devrait clairement en éclairer les raisons et la cascade dégénératrice : 䊉 L’inactivité entraîne la perte de masse musculaire, qui provoque la perte de force, qui diminue la capacité à se mouvoir, qui empêche de bouger assez pour maintenir un métabolisme sain. 䊉 Un métabolisme altéré entraîne, après des années, des maladies cognitives. La mauvaise nouvelle est que les maladies cognitives sont loin d’être les seules affections qui sont la conséquence grave de cette inactivité. Mais la bonne nouvelle, c’est que certains des effets de l’inactivité sont réversibles ! Commencez à bouger maintenant et les facteurs de risque diminueront. 䊉 Les exercices mentaux sont loin d’être les seuls requis pour vieillir « avec toute sa tête ». Il faut se bouger et bouger beaucoup. Pour cela, puisque nos modes de vie ne nous y obligent plus, il faut pratiquer des exercices de renforcement qui entretiennent et augmentent notre force et notre masse musculaire afin d’être capables de produire assez de mouvement pour maintenir un métabolisme sain. Le cerveau n’est pas séparé du corps, ils ne font qu’un. Allez, au travail ! 䊓 Jérôme Simian La marche nordique à petits pas… 21 Pratique Presbytie : des solutions pour tous Les premiers signes de la presbytie sont toujours les mêmes, on peine à déchiffrer un texte, on allonge de plus en plus les bras pour lire le journal. Ce n’est pas un drame, juste une fatalité : le poids des ans seul en est la cause. Que faire ? Essayons d’y voir plus clair, c’est le cas ici de le dire… ous finissons tous par voir difficilement de près. Les raisons en sont simples. L’œil est un organe et, à ce titre, il vieillit et s’use normalement. Au début de la vie, le cristallin est souple. Il permet, comme le zoom d’un appareil photo, de faire des mises au point très nettes et à toutes les distances. On appelle cela « l’accommodation ». Au fil des années, le cristallin commence à perdre en souplesse et en élasticité, mais c’est à partir de la quarantaine (il n’y a pas de vérité précise en ce domaine et ce peut être quelques années plus tard) que l’accommodation devient plus difficile et perd en précision. On visualise moins bien d’abord les objets les plus proches. Ce phénomène classique apparaît souvent plus tôt chez les hypermétropes et un peu plus tard chez les myopes, mais tout le monde est concerné. A un moment ou à un autre. Les hommes comme les femmes. N Quand les premiers signes se manifestent… Lorsque l’on commence à ressentir le besoin d’allonger les bras pour lire, que l’on écarquille les yeux et que l’on opère un léger recul pour voir quelque chose de près, quand on force sa vue au risque d’avoir mal à la tête, que les yeux piquent… on peut alors dire que la presbytie s’installe. Il est temps de consulter un médecin ophtalmologiste pour éviter des efforts inutiles et de plus en plus pénibles : un examen des yeux permettra 22 de déterminer le degré d’altération de la vue et la correction nécessaire. Les visites « chez l’ophtalmo » vont devenir un pèlerinage régulier, tous les ans, tous les deux ou trois ans au mieux, jusqu’à ce que la presbytie se stabilise mais seulement, en général, vers le milieu de la soixantaine. Jusqu’à cet âge donc, elle a tendance à s’accentuer progressivement, sans à-coups majeurs, ce qui nécessite un changement d’équipement optique environ tous les deux à trois ans. Faire un point régulier avec le spécialiste permet en outre de dépister d’autres problèmes oculaires éventuels : tension anormale, sécheresse oculaire, début de cataracte, de glaucome, diabète… Les verres progressifs En matière de presbytie, on a le choix entre lunettes et lentilles de contact. Les lunettes à verres progressifs représentent les équipements les plus courants. Les verres progressifs sont en effet la solution la plus simple et incontestablement la plus efficace. Ils permettent de voir net à toutes les distances, car leur puissance optique varie de façon progressive entre la partie supérieure du verre, réservée à la vision de loin, et la partie inférieure, destinée à la vision de près. Les verres progressifs ne cessent de s’améliorer, et ils s’adaptent de mieux en mieux aux particularités de comportement dans la vision de près, même si, pour la lecture ou des travaux de précision, ils ne peuvent toujours pas rivaliser avec les lunettes spécialisées (demi-lunes ou autres) dans la vision de près. La recherche aujourd’hui permet d’aboutir à des verres progressifs de plus en plus adaptés à la diversité des types de presbytie, tout en étant également capables de corriger d’autres troubles visuels. S’ils nécessitent souvent un petit temps d’adaptation, leur confort et leurs performances sont incontestables. Les verres unifocaux Ces verres (également appelés « simple foyer ») ont la même puissance sur toute leur surface. Ils sont la solution pour les personnes qui ne s’adaptent pas aux verres progressifs ou qui ne souffrent que d’une légère presbytie. Ce type de verres ne corrige que la vision de près et ne s’adresse en quelque sorte qu’aux presbytes « débutants », qui ne portent leurs lunettes que de façon occasionnelle. Et qui les enlèvent pour voir de loin car, avec les verres unifocaux, la vision n’est pas bonne au-delà de quelques dizaines de centimètres. La Revue de la MTRL 䉬 mars 2012 䉬 numéro 73 Pratique On peut, à ce stade de l’« infirmité », se contenter de lunettes « demi-lunes », dont les verres sont réduits de moitié, qui corrigent la vision lorsque l’on regarde vers le bas et qui ne gênent pas la vision de loin lorsque l’on relève les yeux, pour voir par-dessus les lunettes. Notons que les demi-lunes ne corrigent que la presbytie et ne sont pas adaptées si vous avez d’autres troubles de la vue. Les verres bifocaux Egalement appelés verres à double foyer, ils sont de moins en moins utilisés ; ils se composent de deux parties : l’une permet de voir de près et l’autre de loin. Ils se portent en permanence. Toutefois, ils n’offrent qu’une vision intermédiaire assez peu satisfaisante. En sus, ils sont très inesthétiques et, de ce fait, de plus en plus délaissés. Les lentilles de contact Un certain nombre de porteurs de lunettes « potentiels » n’ont pas envie de ce type d’équipement et « fuient » cet accessoire autant que faire se peut… Considération esthétique avant tout mais pourquoi pas ? En effet, il existe désormais des lentilles pour presbytes. 150 000 presbytes seulement, pour l’heure, sur environ 22 millions de sujets atteints en ont fait le choix. Les lentilles multifocales Appelées lentilles progressives, elles représentent la solution idéale : copiées sur les verres du même nom, elles permettent de voir quelle que soit la distance et conviennent à tout le monde, que l’on ait eu une vue parfaite avant la presbytie ou que l’on soit, en plus, myope ou hypermétrope. Toutefois, il faut un temps d’adaptation, de l’ordre d’un mois environ, et ce sont des lentilles souples jetables. Elles restent d’un coût élevé, et il faut compter de 75 à 120 ¤ chez l’ophtalmo pour le forfait adaptation. Il convient d’y ajouter le coût des verres de contact et les produits d’entretien. La Sécurité sociale n’intervient pas sur ce type de prestations, et c’est donc votre mutuelle qui vous proposera une prestation dans le cadre des garanties prévues dans votre contrat. Les lentilles rigides à double foyer Elles sont plus anciennes et moins agréables à utiliser mais en constants progrès. Comme les verres du même nom, elles sont divisées en deux parties : l’une pour voir de près et l’autre pour voir de loin. Elles permettent de corriger tous les défauts visuels associés à la presbytie et notamment les plus complexes. LA CHIRURGIE Longtemps approximatives, elles sont aujourd’hui performantes et offrent une excellente façon de se passer de lunettes ! Mais le choix des lentilles reste encore très minoritaire, même s’il est appelé à se développer : La Revue de la MTRL 䉬 mars 2012 䉬 numéro 73 Si l’opération de la myopie au laser continue de se développer (lentement mais sûrement), la chirurgie de la presbytie – également au laser – n’en est qu’à ses débuts, et elle ne donne toujours pas entière satisfaction. En effet, cette technique chirurgicale nécessite actuellement d’être renouvelée tous les deux ans jusqu’à 65 ans, âge où la presbytie tend à se stabiliser. C’est donc une chirurgie de confort contraignante, coûteuse et encore perfectible. ETRE ASTIGMATE L’œil astigmate présente une anomalie de courbure de la cornée qui revêt une forme ovale au lieu d’être ronde. Dans ce cas, les rayons lumineux qui arrivent à l’œil se focalisent en des points différents en arrière et en avant de la rétine, ce qui provoque une déformation de l’image. La vision s’en trouve imprécise à toutes les distances, avec allongement des lignes verticales et horizontales, et la confusion de lecture de lettres telles que H, M, N et de chiffres comme 8 et 0. En cas de myopie, par exemple, le fait d’être également astigmate accroît le trouble oculaire. Cela se corrige par un équipement optique adapté, verres spécifiques, lentilles de contact et même chirurgie au laser, selon le degré. Les lentilles à simple foyer Elles utilisent le système de bascule. On porte une correction différente sur chaque œil, dont l’une pour voir de près. Elles sont de moins en moins prescrites car elles ne donnent pas entière satisfaction. Et elles sont peu commodes à l’usage. Lentilles + lunettes Les lentilles permettent-elles l’économie d’une paire de lunettes ? Pas absolument. En effet, à la moindre sensation anormale telle qu’œil rouge, vision floue, conjonctivite, irritation, il faut ôter les verres de contact et les remplacer, au moins momentanément, par des verres classiques. En insistant, vous pouvez laisser s’installer des complications sévères. En tout état de cause, mieux vaut toujours conserver près de soi une paire de lunettes, au moins de secours. Vous les apprécierez aussi le soir chez vous, après avoir enlevé les lentilles pour laisser reposer vos yeux. N’oubliez pas, au moment d’envisager un achat optique, de vous faire faire un devis et de consulter votre mutuelle pour connaître à la fois le montant de votre remboursement et celui restant à votre charge. 䊓 23