L`homme, le nouveau sexe faible ?

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L`homme, le nouveau sexe faible ?
Éditorial
L’homme, le nouveau
sexe faible ?
Dr Thierry Favrod-Coune et Pr Jean-Michel Gaspoz
Articles publiés
sous la direction de
Thierry
Favrod-Coune
Jean-Michel
Gaspoz
Service de médecine
de premier recours
Département de
médecine
communautaire, de
premier recours et
des urgences
Département
facultaire de santé et
médecine
communautaires
HUG, Genève
En mai 2015, The Economist jetait un pavé
Les médecins de premier recours ont un nou­
veau rôle à jouer auprès de cette frange de la
dans la mare en réalisant un numéro critique
population. Ces médecins, femmes et hom­mes,
sur la place de l’homme dans les sociétés
qui rencontrent chaque année 80 % de la po­
­occidentales modernes.1 Les hommes ont long­
pulation ont une place privilégiée pour aider
temps tenu le devant de la scène et pourraient
ces hommes à risque ou déjà touchés par des
encore donner l’impression de le faire : plus
problèmes de santé spécifiques. Les hommes
de 90 % des présidents d’états ou des premiers
ont un profil de risque augmenté pour les
ministres sont des hommes et ces derniers
maladies cardiovasculaires ; ce risque accru
sont également prédominants dans la finance,
est entre autres lié au fait qu’ils
le sport, la technologie ou la mu­
sique. Le fait d’être un homme
consomment plus de substances
Les médecins
confère encore des avantages sur
psychotropes, avec un ratio de
de premier
le plan politique (sous-représen­
deux tiers d’hommes pour un tiers
­recours ont
tation des femmes dans les par­
de femmes. Les questions liées à
un nouveau
lements, notamment en Suisse :
la santé sexuelle des hommes
rôle à jouer
15,2 % de femmes au Conseil des
sont cruciales : sexualité à risque,
auprès de cette
Etats, en régression depuis 2003
dysfonction érectile, risque de
population
et 32 % au Conseil National) ou
cancer de la prostate. Quant au
professionnel (accès aux postes
suicide, il peut découler de la dé­
pression masculine qui présente des formes
plus facile, avantage salarial de 15,1 % supé­
rieur dans le secteur privé et de 12,3 % dans le
particulières, rendant son diagnostic délicat.
public).2
Finalement, la violence est un thème impor­
Pourtant, avec l’évolution des sociétés durant
tant chez l’homme, souvent auteur, mais aussi
le 20e siècle et de l’égalité entre hommes et
parfois victime, ou poussé à la violence phy­
sique par la violence psychologique.3
femmes, une partie des hommes s’est retrou­
vée déboussolée. Les hommes occidentaux
Après des âges de domination masculine,
ont plus de risque de vivre éloignés de leurs
perdurant encore dans certains domaines ou
enfants, d’être emprisonnés ou de commettre
régions, une partie des hommes pourrait dé­
sormais faire partie des populations vulné­
un suicide. Ils ont un risque 1,5 fois plus élevé
rables et à risque accru pour leur santé. Il
de ne pas terminer leur scolarité obligatoire
était donc logique de tenir l’engagement pris
et ils possèdent moins de titres universitaires
il y a un an dans notre numéro dédié à la santé
que les femmes.1 Un groupe particulièrement
exposé est celui des hommes de la classe sociodes femmes et d’en réaliser un sur la santé
culturelle inférieure ; ces derniers sont à
des hommes, qui devront s’adapter à une
risque de perdre leur emploi, de ne plus en
nouvelle réalité sociétale, apprendre à recon­
naître leur vulnérabilité, retrouver leurs res­
retrouver, de ne plus être attractifs pour les
sources et considérer leur réalité avec la
femmes et de finir sans emploi, sans famille
nuance du Ying et du Yang.
et sans perspectives.
www.revmed.ch
28 septembre 2016
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Bibliographie
1
www.economist.com/
news/leaders/21652323blue-collar-men-richcountries-are-troublethey-must-learn-adaptweaker-sex
2
Confédération Suisse,
Statistiques suisses.
www.bfs.admin.ch/bfs/
portal/fr/index.html
3
Stalder H. Violences
physiques vs violences
psychologiques. Bulletin
des médecins suisses
2015;96:812.
1595
22.09.16 10:21