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12/3/2015
Métier de barbèch : les prémices d’un avenir meilleur !
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Collecte des déchets recyclables
• Ils sont près de 8000 hommes et femmes à exercer ce métier pénible
Le regard déterminé et le geste vif, Dalila, 42 ans, exerce l’un des métiers les plus pénibles
et les plus vieux au monde. Pour nourrir son fils de deux ans ainsi que son frère et sa soeur
qui sont à sa charge depuis le décès de leurs parents en 2002, cette mère célibataire sans
diplôme n’a eu d’autre choix que de devenir « berbécha ». Ce mot tiré du dialecte tunisien et
qui signifie littéralement « celle qui fouille », est l’équivalent féminin de chiffonnier. Ce métier,
version moderne de « roubavikia » (robba vecchia), consiste à faire du porte à porte pour
collecter différents matériaux recyclables et objets usagés. Ayant connu son apogée à la fin
du 19ème siècle, cette libre collecte a totalement disparu dès les années soixante dans
certains pays, notamment en France. En Tunisie, ils sont actuellement près de 8000
hommes et femmes à exercer le métier de chiffonnier et contribuent à hauteur de 60% dans
la collecte de déchets recyclables. Informel et longtemps marginalisé, ce secteur est pourtant
doté d’un fort potentiel économique. Mais heureusement pour les berbéchas, les choses
sont en train de bouger et dans le bon sens !
Dalila: parcours d’une barbécha
Depuis des années, Dalila sillonne les rues de Hay Etadhamen et fouille les poubelles en
quête de bouteilles en plastique, de canettes, de déchets en aluminium, de pièces
mécaniques... Son vieux sac usé sur le dos, elle collecte hardiment ici et là tout type de
matériaux recyclables et les revend par la suite. Au début, elle s’adressait à une dame de
son quartier qui lui rachetait sa collecte hebdomadaire pour une poignée de dinars. Bien que
la soupçonnant de fraude lors de la pesée, Dalila ferme les yeux et n’ose pas le lui dire car
elle a besoin de chaque centime qu’elle reçoit pour faire vivre sa petite tribu. Elle déclare:
« J’exerce ce métier depuis de longues années. Certes, ce n’est pas agréable de fouiller
dans les poubelles mais je préfère qu’on me surnomme berbécha plutôt que mendiante. Le
regard des autres est parfois impitoyable mais il m’importe peu du moment que je gagne
mon pain à la sueur de mon front. Beaucoup pensent que ce métier est facile. Au contraire !
Outre la saleté et les odeurs fétides, nous sommes continuellement exposés au danger. On
n’est jamais à l’abri d’une blessure causée par du verre cassé, une barre de fer rouillée, une
lame tranchante... Chaque jour, je marche de longues heures à pied pour collecter entre
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deux et trois kilos de déchets et je revends le tout en fin de semaine. Les prix varient selon la
nature des matériaux. Le kilo de plastique est revendu à 500 millimes, celui de canettes et
boites de conserve à 1,5 DT, celui de pièces mécaniques et électroniques à 150 millimes. Le
gros sachet de pain est revendu entre 6 et 7 dinars. »
Espoir d’un avenir meilleur
Sans statut professionnel, sans couverture sociale, sans source de revenus fixe, Dalila
vivotait dans une perpétuelle angoisse et redoutait les aléas que pouvait lui réserver un
avenir incertain. Mais heureusement pour elle, le vent semble lui être désormais favorable et
plus précisément depuis qu’elle a adhéré à l’Association des berbéchas d’Ettadhamen­
Mnihla, présidée par Ahmed Fakraoui collecteur de bouteilles en plastique depuis plus de 14
ans. Contactée par Hsan, le trésorier de l’association, Dalila a appris qu’elle pouvait
bénéficier, gratuitement, d’un appui matériel et didactique. Depuis, elle et près de soixante­
dix autres barbéchas des zones de Hay Ettadhamen, d’El Mnihla et des Jardins d’El Menzah
ont assisté à trois jours de formation accélérée, sur des thèmes variés tels que le code du
travail, le financement des petites activités, les micro­crédits, le payement des impôts,
l’affiliation à la CNSS, la couverture sociale... Tous ont également reçu une tenue de
sécurité, consistant en une tenue de travail, des chaussures adaptées, une casquette et des
gants. Aujourd’hui, Dalila porte en elle l’espoir secret d’un avenir meilleur pour tous les
barbéchas de Tunisie. Elle nous confie: « Depuis que je porte ma tenue bleue et le badge de
l’association, je me sens fière d’exercer ce métier. Dimanche dernier, j’ai reçu l’un des plus
beaux cadeaux de ma vie. Voyant à quel point je souffrais pour transporter le lourd sac
rempli de bouteilles et de matériaux, Hsan m’a offert une brouette. Je suis si heureuse car je
pourrais ainsi collecter une plus grande quantité et gagner un peu plus d’argent. » Projets à profusion
Hsan Bouallag est berbèch de père en fils. Grâce à ses économies et sa parfaite
connaissance des rouages et des ficelles du métier, il est devenu collecteur en peu de
temps. C’est lui qui rachète désormais les déchets recyclables des barbéchas de Hay
Ettadhamen et ses alentours. Après le tri, il les revend aux usines concernées et avoue en
tirer un bon bénéfice. « Je vis bien et ma situation est aisée. J’ai pu me marier et fonder une
famille grâce à mon travail.», déclare­t­il. Il occupe aujourd’hui le poste de trésorier au sein
de l’Association des berbéchas d’Ettadhamen­Mnihla. Parmi les projets en cours, Hsan
explique que l’association travaille sur un éventuel partenariat avec des institutions
proposant des micro­crédits pour que les barbéchas puissent, dans un avenir proche,
s’acheter des tricycles qui faciliteront l’exécution de leur travail. Autre objectif, offrir
gratuitement une vaccination antitétanique à tous les adhérents de l’association pour éviter
toute complication en cas de blessure ou de contact avec des objets rouillés et qui peut
mener jusqu’à une amputation. En parallèle, des campagnes de sensibilisation, placées
sous le thème « Trier, c’est aider », sont régulièrement organisées. Lors de ces journées
d’informations, les barbéchas font du porte à porte pour expliquer aux citoyens la nature de
leur travail et son impact écologique. Des résultats très satisfaisants ont été enregistrés suite
à une première journée de sensibilisation, organisée il y a deux semaines, au quartier 2
mars à Ettadhamen. Les citoyens ont majoritairement fait preuve d’un grand intérêt et se
sont engagés à trier désormais les déchets dans des sacs différents et les réserver dans un
coin en attendant le passage des barbéchas chaque dimanche. Fructueux partenariats
L’Association des berbéchas d’Ettadhamen­Mnihla ainsi que celle de la Marsa ont été
créées dans le cadre du projet pilote « Intégration Structurelle du Secteur Informel dans la
Gestion Communale des Déchets en Tunisie». Décliné sur ces deux communes, il a été
initié grâce à une fructueuse collaboration entre les deux municipalités l’ANGED, le
gouvernement allemand à travers la coopération technique allemande(GIZ) et le réseau
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régional d’échange d’informations et d’expertise sur les déchets solides dans les pays du
Maghreb et du Mashreq (SWEEP­ Net). Quatre quartiers sont actuellement concernés par ce
projet, en attendant sa généralisation dans d’autres zones et communes. Rym BENAROUS
Mots­clés: tunisie
2015
barbèch
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Vendredi 6 Mars 2015
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