Concepts et outils d`évaluation et de connaissance des situations de

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Concepts et outils d`évaluation et de connaissance des situations de
Plate‐forme d’observation sociale
des situations de handicap
et de perte d'autonomie
Pays de la Loire
ACTES DU SEMINAIRE
Concepts et outils d'évaluation
et de connaissance des situations de handicap
et de perte d'autonomie
30 novembre ‐ 1er décembre 2010
Maison des sciences de l'homme NANTES
DRJSCS ‐ Direction régionale
de la jeunesse, des sports et
de la cohésion sociale
Direction régionale de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale Agence régionale de santé Sommaire INTRODUCTION La classification internationale du fonctionnement, du handicap et de la santé : référence internationale pour l’élaboration d’outils d’évaluation des situations de handicap, Catherine BARRAL, EHESP, ............................................... page 5 GRILLES D’EVALUATION INDIVIDUELLE DES SITUATIONS DE HANDICAP Plate‐forme d’observation sociale PAYS DE LA LOIRE Handicap, perte d’autonomie 30 novembre er
1 décembre 2010 ‐ Nantes 1 Reconnaissance de l’invalidité et indemnisation des accidents du travail‐maladies professionnelles par la sécurité sociale, Dr Pierre TOUBOUL, service médical de l’assurance maladie de Nantes, ....................................................... page 13 Le « guide barème », outil d’évaluation des déficiences et incapacités des personnes handicapées, Dr Isabelle RENAUDEAU, MDPH du Maine‐et‐Loire, page 18 L’évaluation des besoins de compensation depuis la loi de 2005, le GEVA. Dr Pascale GILBERT, CNSA, .............................................................. page 22 L’évaluation de la dépendance à l’aide de la grille AGGIR, Dr Yannick L’HERMITTE, Conseil général du Maine‐et‐Loire, .................................................. page 31 PATHOS : outil médico‐économique d’évaluation de la charge en soins des structures accueillant des personnes âgées dépendantes, Dr Monique BITOUN, ARS, ................................................................................................ page 35 LES ENQUETES EN POPULATION Les enquêtes HID et Handicap‐Santé, Gérard BOUVIER, Insee, .......... page 37 La thématique des « aidants » dans l’enquête Handicap‐Santé, Sylvie EGHBAL‐
TEHERANI, Drees, ............................................................................ page 40 L’enquête « Santé, handicap, et travail », complémentaire de l’enquête emploi 2007, Valérie ULRICH, Dares, ........................................................... page 42 Mesurer l’autonomie des personnes vivant à domicile, Yara Makdessi, Séverine Dos Santos, Drees, .......................................................................... page 45 Evolution de l’espérance de vie sans incapacité, et déterminants sociaux du handicap, Emmanuelle CAMBOIS, Ined, ........................................... page 49 La compensation des incapacités : premières estimations des usages d’aides techniques, aménagements de logements et aides humaines d’après l’enquête Handicap‐Santé, Pascale ROUSSEL, CTNERHI, ................................... page 53 L’accès à l’emploi des personnes handicapées en 2007, Valérie ULRICH, Dares, page 58 Approche de la dépendance des personnes âgées par départements, Olivier LEON, page 61 SIGLES............................................................................................. page 65 PRESENTATION DE LA PLATE‐FORME .......................................... page 67 2 Direction régionale de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale Agence régionale de santé Geneviève LEBOUTEUX Direction régionale de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale (DRJSCS) Plate‐forme d’observation sociale PAYS DE LA LOIRE Handicap, perte d’autonomie 30 novembre er
1 décembre 2010 ‐ Nantes 3 Bonjour à tous et bienvenue pour ce deuxième séminaire organisé par la plate‐forme d’observation sociale des Pays de la Loire sur le thème des situations de handicap et de perte d’autonomie. Le premier séminaire, organisé par le Conseil général de Loire‐Atlantique et la CNSA, a été l’occasion de présenter le système d’information partagé CNSA‐MDPH (SIPaPH), qui nous situait déjà au cœur du partage de l’information dans le domaine du handicap et de la perte d’autonomie. Nous allons prendre aujourd'hui un peu de recul afin d’examiner en profondeur les différentes classifications, grilles d’analyse et enquêtes en population, qui permettent d’évaluer les situations de handicap et de perte d’autonomie, avec l’objectif de partager les concepts existants pour qu’ils servent de base à nos échanges. Un troisième séminaire va ensuite être organisé au printemps qui portera cette fois sur les systèmes d’informations existants au plan local. Un bilan sera effectué à l’issue de ces trois séminaires pour identifier les priorités de développer de ces systèmes au plan local, et rechercher les coopérations nécessaires pour développer leur utilisation. François TUFFREAU Observatoire régional de la santé des Pays de la Loire Il y a dix ans Pierre MORMICHE, statisticien à l’Insee, et un des principaux concepteurs de l’enquête HID, publiait un article dont le titre était « Le handicap se conjugue au pluriel ». Cette phrase est un peu le fil conducteur de nos journées. Les nombreuses exploitations de l’enquête HID ont permis d'illustrer la diversité des situations de handicap et de perte d’autonomie en termes de déficiences, limitations fonctionnelles, restrictions d’activité… autant d'approches qui sont irréductibles entre elles. Ces différents concepts ne se développent pas en effet comme des « poupées russes » qui s’emboîtent ; les déficiences aboutissant automatiquement à des limitations fonctionnelles, se traduisant elles‐mêmes par des restrictions d’activité. Les situations de handicap et de dépendance sont contingentes, les conséquences des déficiences et limitations fonctionnelles variant notamment en fonction des situations individuelles et des liens que les personnes entretiennent avec leur environnement aussi bien humain que matériel. Nous espérons qu’au bout de ces deux journées de travail, vous disposerez d’une meilleure compréhension de cette construction sociale qu’est le handicap. 4 Direction régionale de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale Agence régionale de santé La classification internationale du fonctionnement, du handicap et de la santé : référence internationale pour l’élaboration d’outils d’évaluation des situations de handicap Catherine BARRAL EHESP Plate‐forme d’observation sociale PAYS DE LA LOIRE Handicap, perte d’autonomie 30 novembre er
1 décembre 2010 ‐ Nantes 5 Evolution et enjeux des classifications du handicap De 1980 à 2001, trois classifications internationales du handicap sont produites : ‐ en 1980, la Classification internationale des déficiences, incapacités, handicaps (CIDIH, OMS) ; ‐ en 1991, le Processus de Production du Handicap (PPH) élaboré par le Comité Québecois pour la CIDIH, sous la direction de l’anthropologue Patrick Fougeyrollas ; ‐ en 2001, la Classification internationale du fonctionnement, du handicap et de la santé (CIF, OMS). L’histoire et l’enchaînement de ces classifications peuvent être abordés d’un triple point de vue : celui de leurs objectifs sociaux et politiques, celui de la causalité du handicap et des normes auxquelles chacune d’elles se réfère, celui de leur rapport au contexte international socio‐politique et scientifique évolutif des trente dernières années du XXe siècle, marqué par le rôle des mouvements sociaux de personnes handicapées, par celui de l’ONU et celui des chaires de Disability Studies. Etat des lieux en 1980 S'agissant du traitement social des personnes handicapées dans les années 1980, il est commandé par l’objectif de réadaptation, qui organise les pratiques et règlementations du champ médico‐
social. Adoptée en France depuis l’entre‐
deux guerres, l’approche réadaptative des personnes handicapées s’appuie sur une conception du handicap qui explique l’écart aux normes sociales par la déficience et les incapacités des personnes. Aussi la démarche réadaptative et le processus de normalisation qu’elle induit visent‐ils à adapter ou réadapter les personnes ayant des incapacités aux normes sociales d’apprentissage, de productivité, de comportement. Cette approche se traduit notamment par la catégorisation des personnes concernées par attribution d’un statut médico‐
administratif et la réglementation de leur prise en charge dans des établissements spécialisés. Cette construction du handicap et de la population ainsi désignée sur la base des écarts aux normes biomédicales et sociales a pour conséquences sociales l’exclusion de ces personnes des espaces ordinaires d’éducation, de travail et de vie1 et la stigmatisation de leurs particularités. Concernant les classifications de santé, jusqu’en 1980 on ne dispose que de la Classification internationale des maladies (CIM). Adoptée par l’OMS en 1947, et révisée tous les dix ans (11e révision actuellement en cours), la CIM est un outil diagnostique de description des maladies. C’est aussi un outil épidémiologique qui permet d’évaluer 1
Stiker H.‐J., Corps infirmes et sociétés ‐ Essais ème
d'anthropologie historique, Dunod, 2005, 3 édition.
l’état de santé des populations et d’établir les statistiques de mortalité et de morbidité. Mais cette classification s’avère insuffisante pour décrire les conséquences invalidantes de maladies chroniques, du vieillissement, de malformations congénitales, de séquelles de traumatismes... Aussi l’élaboration d’un nouvel outil classificatoire propre à décrire ces états de santé s’impose‐t‐elle alors à l’OMS. La Classification internationale des déficiences, incapacités, handicaps (CIDIH, OMS, 1980) A l’issue d’une dizaine d’années de travaux, menés sous la direction du Pr Philip Wood, l’OMS adopte à titre expérimental en 1980 la Classification internationale des déficiences, incapacités et handicaps (CIDIH). Comme l’indique son sous‐titre ‐« Manuel de classification des conséquences des maladies »‐, il s’agit d’une classification complémentaire à la classification des maladies. Le schéma conceptuel de la CIDIH décrit un enchaînement causal qui part d’un problème de santé (maladie, traumatisme, malformation, …) se traduisant par une ou des altérations de fonctions physiologiques ou de structures anatomiques (déficiences), lesquelles provoquent des limitations fonctionnelles (incapacités) qui ont pour conséquence sur le plan social, un désavantage dans la réalisation de rôles sociaux (handicap). Du point de vue des normes, la CIDIH se réfère à celles en vigueur dans l’ordre médical et réadaptatif : la déficience est appréhendée comme écart à la norme biomédicale ; l’incapacité est conçue comme l’écart à une norme fonctionnelle statistiquement moyenne dans les activités de la vie quotidienne ; le désavantage comme l’écart éprouvé par une personne dans la réalisation des rôles sociaux du fait de sa déficience ou de ses incapacités. Du point de vue des objectifs, la CIDIH répond pour l’OMS à des objectifs épidémiologiques et de santé publique. L’apport fondamental de cette classification tient à la clarification conceptuelle qu’elle propose en distinguant ces trois niveaux d’expérience ‐ déficience, incapacités, désavantage. Le second apport remarquable de la CIDIH réside dans l’identification de la dimension sociale du handicap comme désavantage. Pour autant la relation de cause à effet entre les déficiences et les désavantages fait porter au compte de leurs caractéristiques personnelles l’expérience sociale négative que vivent les personnes, ignorant la part que prennent les valeurs, attitudes et systèmes socio‐politiques dans la construction de cette expérience. Dans les années 1980, peu de pays se sont intéressés à cette classification ou l’ont utilisée. La France, en revanche, s’y intéresse dès sa parution (elle sera traduite par l’INSERM et publiée en français en 1988). La segmentation conceptuelle de la CIDIH correspond au découpage des politiques publiques auxquelles émarge le handicap : politique de santé répondant aux problèmes posés par la déficience, politique médico‐
sociale réadaptative traitant les problèmes liés aux incapacités et système de compensation traitant des aspects économiques du désavantage social. La CIDIH servira notamment de référence pour réformer et actualiser le principal des instruments réglementaires pour l’évaluation de l’éligibilité des personnes handicapées aux prestations : le guide barême. 6 Direction régionale de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale Agence régionale de santé Plate‐forme d’observation sociale PAYS DE LA LOIRE Handicap, perte d’autonomie 30 novembre er
1 décembre 2010 ‐ Nantes 7 Evolution conceptuelle dans le champ du handicap Les années 1970‐1980 voient l’émergence de trois formes convergentes d’action, vectrices de changements dans la conception du handicap. Sur le plan social et politique, des mouvements de personnes handicapées apparaissent, refusant les modes traditionnels de traitement du handicap, l’exclusion et la discrimination qui les accompagnent. Ces mouvements (dont les plus représentatifs sont le Independent Living Movement et Disabled Peoples’ International /Organisation mondiale des personnes handicapées) sont initiés principalement aux Etats‐Unis et en Angleterre. Leurs modalités d’action consistent d’abord, sur le plan social, à implanter dans la cité des espaces autogérés ambulatoires de soin, de réadaptation et de ressources, alternatifs à l’institutionnalisation (Independent living Centres), puis, à partir des années 1980, à engager des actions de lobbying auprès des gouvernements des pays dans lesquels ils sont implantés, mais aussi auprès des instances internationales où s’élaborent les normes et les orientations en matière de politique publique relative au handicap (ONU, OMS), pour faire connaître leurs revendications d’accès aux droits communs et faire reconnaître une définition du handicap selon laquelle ce ne sont pas tant les déficiences et les incapacités qui sont en cause que le rapport que la société entretient avec les personnes handicapées, les discriminations et les inégalités dans les droits. La représentation des mouvements de personnes handicapées sur les scènes politiques nationales et internationales et la reconnaissance progressive des revendications et de la conception du handicap dont ils sont porteurs conduisent à la reconnaissance des organisations représentatives de personnes handicapées comme experts et partenaires dans l’élaboration des orientations relatives au handicap qui se prennent au niveau international (OMS, ONU, U E). Ainsi par exemple, sera créé en 1996 le Forum européen des personnes handicapées (FEPH), instance consultative auprès de la Commission européenne, avec le slogan « Nothing for us without us », ou encore l’inclusion des associations de personnes handicapées au nombre des experts consultés par l’OMS pour la révision de la CIDIH et l’adoption de l’actuelle classification (CIF). En France, cette période 1970‐1980 est au contraire marquée par l’apogée de l’institutionnalisation des personnes handicapées et de l’establishment associatif composé des grandes associations (UNAPEI, APF,…) gestionnaires de l’équipement spécialisé en partenariat avec l’Etat, indifférentes ou ignorantes des mouvements qui agitent la communauté handicapée au‐delà de nos frontières, ou même en France en disqualifiant les quelques mouvements contestataires de personnes handicapées issus de Mai 19682, porteurs des mêmes revendications que les mouvements nord américains et européens. Pourtant si ce milieu associatif gestionnaire se consacre principalement à l’extension du parc institutionnel, il se caractérise aussi depuis l’entre‐deux guerres par un lobbying « à la française » revendiquant de meilleures conditions de compensation des personnes handicapées dans le cadre du système médico‐social. Sur cette même période, les normes internationales en matière de handicap prennent également un tournant décisif. Jusque dans les années 1970 les 2
P. Turpin, La lutte contre l’assistance pendant les années 1970, Les cahiers du CTNERHI‐Handicaps et Inadaptations, 1990, n°50, pp.83‐92. recommandations onusiennes en matière de droits concernant les personnes handicapées renvoient essentiellement au droit aux soins et à la réadaptation. Mais à partir des années 1980, c’est l’application des droits de l’homme aux personnes handicapées qui occupe désormais une place centrale dans le discours et les actions engagées par l’ONU. 1981 est proclamée première année internationale des personnes handicapées. Elle inaugure le Programme mondial d’action pour les personnes handicapées, sanctionné en 1993 par les Règles standard pour l’égalisation des chances des handicapés en 1993, puis en 2006 par la Convention des Nations Unies pour les droits des personnes handicapées, entrée en vigueur en 2008, et qui a pour objet de "promouvoir, protéger et assurer la pleine et égale jouissance de tous les droits de l'homme et de toutes les libertés fondamentales par les personnes handicapées". Dans le champ scientifique et académique enfin, des chaires universitaires de recherche et d’études sur le handicap (Disability Studies) se développent, principalement dans les universités nord‐américaines et anglaises. A la différence du système académique français organisé en champs disciplinaires, les sciences sociales et humaines dans les universités anglo‐saxonnes privilégient les approches transversales autour de questions sociales. C’est le cas des Disability Studies, qui entretiennent de plus des liens étroits avec les mouvements de personnes handicapées. Ce champ universitaire s’attache ainsi, depuis les années 1980, à formaliser les expériences concrètes menées dans la cité ‐qu’on dirait aujourd’hui inclusives ‐, en développant des conceptualisations du handicap qui mettent en question l’approche médicale fondée sur les déficiences et incapacités et mettent en lumière la responsabilité des dispositions sociales et politiques entrant en jeu dans la production du handicap. Ces « modèles sociaux » du handicap, alternatifs aux « modèles individuels », en mettant l’accent non plus sur les caractéristiques individuelles mais sur le traitement social des personnes handicapées, imposent une révision radicale de la question de la causalité du handicap. Causalité et modèles du handicap Les implications de la définition de la causalité du handicap sont d’une importance majeure tant sur le plan des représentations sociales du handicap que sur celui des normes de référence et des politiques publiques à promouvoir. Dans le cadre des Disability Studies de Toronto, Marcia Rioux3 a proposé une typologie des modèles conceptuels du handicap qui met en perspective le raisonnement causal qui préside à chacun d’eux ; synthétisée de la façon suivante par J.‐F. Ravaud4. Le modèle individuel du handicap considère le handicap comme une pathologie individuelle. L’unité d’analyse est l’individu ; la cible des interventions est la condition individuelle et l’intégration de la personne handicapée est une affaire privée. Cette approche comporte deux variantes : - La première se focalise sur l’origine biomédicale du handicap, ‐ extériorisée par la déficience‐. Le traitement vise à la guérison. Celle‐ci étant le plus souvent impossible, l’accent est mis sur la prévention aux moyens d’intervention 3
M.Rioux, The place of judgement in a world of fact, Journal of Intellectual Disability Research, 1997, 41 (2), pp. 102‐111. 4
J.‐F. Ravaud, Modèle individuel, modèle médical, modèle social : la question du sujet, Handicap‐
Revue de Sciences Humaines et Sociales, 1999, n° 81, pp. 64‐75. 8 Direction régionale de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale Agence régionale de santé Plate‐forme d’observation sociale PAYS DE LA LOIRE Handicap, perte d’autonomie 30 novembre er
1 décembre 2010 ‐ Nantes 9 biologiques ou génétiques (tel que le dépistage prénatal). La responsabilité sociale est d’éliminer ou réduire le handicap. - La seconde variante est centrée sur la dimension fonctionnelle ‐ les incapacités. Le traitement vise à la rééducation et repose sur les services de réadaptation fonctionnelle. La responsabilité sociale est d’améliorer les capacités fonctionnelles individuelles. Le modèle social du handicap considère celui‐ci comme une pathologie sociale. Le point de départ du raisonnement causal n’est plus la personne, ses déficiences et incapacités, mais les difficultés et le déficit de participation sociale auxquels elle est confrontée du fait des obstacles (architecturaux, culturels, économiques, sociaux) que dressent devant elle les environnements et le contexte socio‐
politique dans lesquels elle vit et évolue. L’unité d’analyse est l’organisation sociale, la cible des interventions l’environnement et les structures économiques, sociales et politiques. L’inclusion de la personne handicapée est un problème public et collectif. Ce modèle comporte également deux variantes : ‐ L’approche environnementale considère le handicap comme une conséquence du défaut d’accessibilité des environnements. Le traitement relève de la mise en accessibilité et de l’adaptation des environnements et des services. La responsabilité sociale est d’identifier et de supprimer les barrières à la participation sociale des personnes handicapées. ‐ La seconde variante considère le handicap comme une conséquence de l’organisation sociale et du rapport de la société à la personne handicapée. Le traitement est de nature politique et relève de l’application des droits de l’homme. La responsabilité sociale est de réduire les inégalités dans les droits et de lutter contre la discrimination pour permettre l’accès à une pleine citoyenneté des personnes handicapées. Ces quatre approches, qui montrent chacune un des aspects du problème, sont irréductibles les unes aux autres mais requièrent au contraire d’être articulées dans un modèle intégré. Révision des normes et des instruments internationaux de référence dans le champ du handicap Lorsque l’OMS publie en 1980, la Classification des déficiences, incapacités, handicaps (CIDIH), celle‐ci apparaît en profond décalage avec l’évolution conceptuelle internationale dans le champ du handicap. Ce que ne manquent pas de critiquer les mouvements de personnes handicapées militant pour la reconnaissance du modèle social du handicap, au premier rang desquels le Mouvement de défense des droits des personnes handicapées du Québec. Les deux principales critiques conceptuelles faites à la CIDIH portent d’une part sur la relation de cause à effet que la classification établit entre les caractéristiques individuelles (maladie, déficience, incapacité) et le désavantage social subi par la personne, qui revient à imputer les problèmes sociaux que rencontrent les personnes handicapées à leurs particularités, et d’autre part sur l’absence de la dimension environnementale et sociale également en cause dans la production du handicap. Dès 1991, la Société Canadienne pour la CIDIH (SCCIDIH) propose, sous la direction de Patrick Fougeyrollas, une classification alternative à la CIDIH : le Processus de Production du Handicap (PPH). Cette classification est la première à proposer un modèle systémique et interactif du handicap qui articule modèle individuel et modèle social. Elle s’appuie sur l’inversion du raisonnement causal au fondement de la CIDIH et du modèle individuel, en prenant pour point de départ non pas les caractéristiques de la personne mais les difficultés que celle‐ci rencontre pour réaliser ses habitudes de vie (participation sociale), puis en recherchant les causes possibles, physiques et environnementales, et leurs interactions. Une situation de handicap résulte ainsi de l’interaction entre les caractéristiques propres à la personne (systèmes organiques et aptitudes) et son environnement physique et social (facilitateur ou obstacle). L’unité d’observation et de description n’est plus la personne malade ou déficiente, mais la personne en société et c’est la situation dans laquelle se trouve la personne en difficulté pour réaliser une habitude de vie qui constitue la norme de référence. Pour P. Fougeyrollas et les promoteurs5 du PPH, l’objectif de cette classification est de nature socio‐
politique et vise un changement social, notamment en mettant cet outil au service de la politique « A part…égale » menée par l’Office des personnes handicapées du Québec, des programmes de réhabilitation à base communautaire de Handicap International, et d’enquêtes nationales sur les besoins des personnes ayant des incapacités6. C’est dans ce contexte évolutif que l’OMS enclenche à partir de 1995 un processus de révision de la CIDIH qui aboutira en 2001 à la Classification internationale du fonctionnement, du handicap et de la santé (CIF). Pour l’OMS, il s’agit de produire une classification qui réponde aux critiques faites à la CIDIH en intégrant les avancées conceptuelles tout en restant 5
RIPPH : Réseau international sur le Processus de Production du Handicap. http://www.ripph.qc.ca/ 6
Situation of people with disability in Kosovo, Gravir, asbl, Handicap International, Final report, Brussels/Lyon, 2002.
dans le domaine des classifications de santé, autrement dit qui satisfasse à ses objectifs épidémiologiques et de santé publique. La CIF se présente comme un modèle « biopsychosocial » organisé autour de quatre dimensions interactives : fonctions et structures corporelles, activités, participation et facteurs environnementaux7. L’unité d’analyse n’est plus limitée au seul individu mais englobe le fonctionnement d’une personne ayant un problème de santé dans son environnement. Le handicap constitue ainsi une modalité particulière du fonctionnement humain, résultat de l’interaction entre les caractéristiques de la personne et les facteurs environnementaux. A la différence de la CIDIH qui se référait aux seules normes biomédicales et fonctionnelles, la CIF utilise un système composite de normes : le fonctionnement du corps (fonctions et structures) reste référé à la norme biomédicale, la réalisation d’activités se réfère à la capacité moyenne et la participation à la performance individuelle en fonction de l’environnement (facilitateur ou obstacle). Les causes ne sont pas définies a priori, mais déduites des interactions entre chacune des dimensions et avec l’environnement. Avec la CIF, l’OMS renoue avec la définition initiale de la santé « état de 7
L’inclusion des facteurs environnementaux comme dimension intégrante de la classification a été obtenue de haute lutte par les experts représentants de mouvements de personnes handicapées et de quelques autres au sein du groupe de travail de l’OMS ; l’OMS aurait souhaité en effet que les facteurs environnementaux fassent l’objet d’une annexe à la classification plutôt que d’une dimension à part entière. 10 Direction régionale de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale Agence régionale de santé Plate‐forme d’observation sociale PAYS DE LA LOIRE Handicap, perte d’autonomie 30 novembre er
1 décembre 2010 ‐ Nantes 11 complet bien‐être physique, mental et social, et [ne consiste] pas seulement [en] une absence de maladie ou d'infirmité» 8, en apportant au concept de santé, en général entendu dans son interprétation biomédicale, le prolongement d’une approche fonctionnelle de la santé qui intègre les caractéristiques relatives au fonctionnement du corps mais aussi les domaines du fonctionnement qui ont une influence sur la santé et qui ne relèvent pas des systèmes de soins tels que les transports, l’éducation, l’emploi, etc… Applications de la CIF Outre son impact sur les législations nationales relatives au handicap, tel a notamment été le cas en France avec la loi de 2005, la CIF constitue un outil de référence dans les différents champs d’application de la politique publique du handicap : ‐ dans le domaine statistique, en particulier au travers de l’enquête Handicap‐Santé qui vous sera présentée demain ; ‐ dans le domaine clinique : l’approche de situations de handicap à travers la CIF peut permettre d’inverser le raisonnement traditionnel (qui consiste le plus souvent à prendre pour point de départ l’étiquette nosographique et les symptômes qui lui sont attachés), pour centrer plutôt l’analyse sur les situations dans lesquelles se trouve la personne et sur son degré de participation dans différents domaines, pour rechercher les causes possibles de restriction de participation en tenant compte de la nature et de la qualité des environnements (facilitateurs ou obstacles). Trop souvent en effet, le simple fait de désigner un enfant comme « autiste » par exemple suscite immédiatement chez les intervenants la représentation de symptômes, de disfonctionnements, d’incapacités qui vont déterminer la conduite à tenir, avant même d’avoir cherché à identifier les domaines et les activités concrètes dans lesquels l’enfant est impliqué. La CIF peut ainsi servir à l’élaboration d’outils d’évaluation des situations de handicap. On peut se référer à cet égard à la Checklist CIF (élaborée par l’OMS)9 ; ‐ dans le domaine de la veille sanitaire et des systèmes d’information : pour standardiser des procédures de collecte de données entre différents instruments et dans le temps, pour documenter des prévalences de problèmes de santé, des besoins en matière de création de services, de programmation d’interventions ; ‐ dans le domaine administratif : pour enregistrer des informations relatives à l’éligibilité à des prestations et leur suivi, tel que le volet 6 du GEVA par exemple, à la fois outil d’évaluation des besoins et capacités individuelles et potentiellement base de données, et qui va vous être présenté maintenant.
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Préambule à la Constitution de l'Organisation mondiale de la Santé, signé le 22 juillet 1946 et entré en vigueur le 7 avril 1948. La définition n'a pas été modifiée depuis 1946. Disponible sur le site : http://www.ccoms-fcicif.fr/ ECHANGES AVEC LES PARTICIPANTS Françoise JAN ‐ présidente du CREAI, présidente de l’URAPEI ‐ Il est vrai que la France a beaucoup tardé avant de prendre en compte le modèle social d’analyse du fonctionnement du handicap. Vous avez également eu raison de souligner combien tout le réseau ‐ au demeurant très performant ‐ des établissements spécialisés qui ont été mis en œuvre dans ce pays constitue aujourd'hui un frein pour rejoindre ce mouvement (si tant est que telle soit réellement l’intention générale…). Je vous rejoins totalement sur la nécessité d’appréhender les cas particuliers en partant avant tout de la participation. Pour les familles dont l’un des enfants est déficient intellectuel par exemple, aujourd'hui encore dans 40 % des cas l’étiologie médicale de la déficience est encore inconnue. Cette approche par les activités et par la participation, sans préjugé médical de départ, est donc susceptible de modifier radicalement l’appréhension des besoins d’accompagnement de ces enfants. 12 Direction régionale de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale Agence régionale de santé Reconnaissance de l’invalidité et indemnisation des AT‐MP par la sécurité sociale Dr Pierre TOUBOUL Service médical de l’assurance maladie ‐ Nantes J’évoquerai ici les différents modes de reconnaissance en invalidité et d’indemnisation des accidents du travail et des maladies professionnelles. L’arrêt de travail L’arrêt de travail constitue le plus souvent le prélude à la mise en invalidité, d’où sa présence en introduction de cet exposé. Plate‐forme d’observation sociale PAYS DE LA LOIRE Handicap, perte d’autonomie 30 novembre er
1 décembre 2010 ‐ Nantes 13 Les conditions administratives Pour bénéficier d’un arrêt de travail, une personne doit répondre à un certain nombre de conditions administratives : ‐ être affiliée à un régime de protection sociale, ‐ avoir travaillé un certain nombre d’heures pour bénéficier d’un droit ouvert aux indemnités journalières (IJ), ‐ faire l’objet d’un certificat d’avis d’arrêt de travail. Les trois premiers jours d’arrêt de travail ne font pas l’objet de versement d’indemnités journalières, contrairement aux risques accident du travail et maladies professionnelles. Les conditions médicales L’assuré doit être dans l’incapacité médicalement constatée de travailler. S’il constate un état clinique évolutif entraînant une incapacité temporaire de travail, le médecin prescrit un arrêt de travail et en apprécie seul l’opportunité et la durée. L’arrêt de travail avec reprise à temps partiel thérapeutique Il s’agit d’une notion importante et qui existe aussi bien dans le risque/maladie que dans le risque accident de travail/maladie professionnelle. Cette reprise à temps partiel est assez communément appelée « reprise à mi‐
temps » ou « mi‐temps thérapeutique », terme qui devrait être pourtant à proscrire. La reprise à temps partiel « thérapeutique » constitue, en effet, une possibilité offerte à l’assuré, après un arrêt de travail à temps plein, de reprendre à temps partiel si cette reprise est considérée comme étant de nature à favoriser l’accélération de la guérison ou de la reprise du travail. La reprise intervient donc quasiment comme un outil de traitement pour la personne en arrêt de travail. Cette reprise à temps partiel est également possible si l’assuré doit faire l’objet d’une rééducation ou d’une réadaptation professionnelle. Le montant des indemnités journalières ne peut être supérieur au salaire normal des travailleurs de la même catégorie. Cette formule de reprise nécessite une bonne coordination entre l’assuré (à qui il faut expliquer pourquoi il est de son intérêt de reprendre à temps partiel), le médecin traitant et surtout l’employeur, qui n’est pas automatiquement tenu de l’accepter. Le pendant de la reprise à temps partiel thérapeutique dans le risque/maladie renvoie, pour le risque accident de travail/maladie professionnelle, à la notion de « reprise d’un travail léger ». Les accidents du travail Est considéré comme un accident de travail, quelle qu’en soit la cause, l’accident survenu par le fait ou à l’occasion du travail à toute personne salariée ou travaillant à quelque titre que ce soit ou en quelque lieu que ce soit pour un ou plusieurs employeurs. L’accident du travail est assorti d’une présomption d’imputabilité : le lien entre le fait accidentel et les lésions constatées est présumé établi et l’assuré n’a pas à en apporter la preuve. L’accident du travail correspond à un fait survenu dans des conditions précises et localisables aussi bien dans le temps que dans l’espace. Cet événement doit revêtir un caractère professionnel, c’est‐à‐dire qu’au moment où l’accident est survenu il est possible de prouver que la personne était sous la subordination de l’employeur. Enfin, les lésions que l’assuré présente doivent être imputables à l’accident de travail. L’évolution de l’accident de travail peut se traduire par : ‐ une guérison dans les cas où la personne ne présente pas de séquelles fonctionnelles ; ‐ une consolidation (existence de séquelles fixées non susceptibles d’amélioration par un traitement), auquel cas il est procédé à une évaluation desdites séquelles pour voir si elles sont ou non indemnisables. La consolidation met fin au versement des indemnités journalières par la Caisse primaire d’assurance maladie (CPAM). ‐ éventuellement une rechute suite à cette consolidation, c’est‐à‐dire une aggravation des lésions imputables à l’AT ou l’apparition de nouvelles lésions, le tout nécessitant la reprise du traitement voire la révision du taux d’incapacité permanente après une nouvelle consolidation ; ‐ la mise en place éventuelle de soins post‐consolidation (cas d’un salarié devenu épileptique suite à une chute par exemple). Le rôle du médecin conseil est ici d’évaluer les séquelles éventuelles suite à l’accident de travail et de proposer un taux d’incapacité permanente (IP) partielle (avec, le cas échéant, possibilité d’une majoration tierce personne dès lors que le taux atteint 80 %). Les prestations s’entendent aussi bien en nature (prise en charge des soins imputables à l’AT, transport, réadaptation fonctionnelle, appareillage etc.) qu’en espèces au travers des indemnités journalières, lesquelles ne font l’objet d’aucun délai de carence. Les maladies professionnelles Les maladies professionnelles renvoient à des lésions qui sont la conséquence directe d’une exposition du travailleur à un risque qui peut être physique, chimique, biologique ou environnemental. Ainsi la maladie professionnelle peut également être la conséquence de l’exposition d’un salarié à des conditions dans lesquelles il exerce de façon habituelle son activité professionnelle. Nous retrouvons notamment là la problématique des troubles musculo‐squelettiques (TMS) pour les personnes qui exercent un même type de mouvement de façon très répétitive. La différence entre un accident du travail et une maladie professionnelle tient dans l’impossibilité de dater précisément le démarrage de cette dernière. Deux modes de reconnaissance existent : ‐ soit la maladie figure au tableau des maladies professionnelles ; ‐ soit elle n’y figure pas et dans ce cas l’assuré (qui doit justifier d’une incapacité permanente égale ou supérieure à 25 %) peut demander une reconnaissance au titre du système complémentaire devant le Comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles. L’intervention de ce Comité peut également être requise dans le cas de maladies du tableau pour lesquelles un des critères n’est pas rempli (critère de durée d’exposition par exemple). 14 Direction régionale de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale Agence régionale de santé Les phases d’évolution de la maladie professionnelle sont les mêmes que pour l’accident du travail (guérison, consolidation, rechute, soins post‐consolidation). Les prestations, en nature comme en espèces, sont également prises en charge par l’assurance maladie. Plate‐forme d’observation sociale PAYS DE LA LOIRE Handicap, perte d’autonomie 30 novembre er
1 décembre 2010 ‐ Nantes 15 L’invalidité L’invalidité est définie comme la «réduction de la capacité de travail ou de gain mettant l’assuré hors d’état de se procurer, dans une profession quelconque, un salaire supérieur à une fraction de la rémunération normale perçue dans la même catégorie ». Derrière cette définition un peu absconse se retrouvent en pratique des situations qui se caractérisent par une réduction des deux tiers de la capacité de travail de la personne. La mise en invalidité s’inscrit le plus souvent dans le droit fil d’un arrêt de travail de longue durée. Le versement des indemnités journalières peut durer trois ans au maximum mais dès lors que l’état de la personne se stabilise, la mise en invalidité intervient avant cette date butoir. Plus exceptionnellement, une demande de mise en invalidité peut avoir lieu au titre de l’usure prématurée de l’organisme sans qu’un arrêt de travail soit préalablement intervenu. La mise en invalidité répond évidemment à un certain nombre de conditions d’ouverture de droits. La demande peut provenir de l’assuré lui‐même ou de son médecin traitant, du service de contrôle médical voire de la CPAM à forclusion des droits au bout des trois ans. Les invalidités sont divisées en trois catégories selon la capacité ou non de la personne à exercer une activité rémunérée et selon la nécessité ou non d’avoir recours à une tierce personne pour effectuer les actes ordinaires de la vie. Le montant de la pension d’invalidité est fonction de la catégorie concernée. La pension d’invalidité est transformée en pension d’inaptitude au soixantième anniversaire (sous réserve de modifications à intervenir suite à la réforme des retraites votée à l’automne 2010) de la personne. Il est à noter que désormais le salarié ne bascule en inaptitude avant 65 ans que s’il en fait expressément la demande. L’inaptitude L’inaptitude au travail permet d’obtenir la liquidation de la pension vieillesse au prorata du nombre de trimestres cotisés et sans décote. Les conditions médicales requises pour bénéficier d’une inaptitude renvoient à l’existence d’une incapacité de travail définitive de 50 % et à un danger grave à poursuivre l’emploi considéré. La référence à cette gravité n’est pas utilisée pour les personnes qui n’exercent plus l’activité depuis plus de cinq ans. La majoration tierce personne est appréciée avant le 65e anniversaire. Une majoration pour conjoint à charge peut également intervenir selon les cas. Enfin, le constat d’une inaptitude anticipe dès 60 ans le versement de l’allocation de solidarité aux personnes âgées (ASPA) laquelle, dans les conditions habituelles permet d’élever le niveau de ressources de la personne à un niveau plancher à l’âge de 65 ans. ECHANGES AVEC LES PARTICIPANTS François TUFFREAU ‐ Sur quels outils s’appuyent les médecins de l’assurance maladie pour apprécier la réduction de la capacité de travail d’une personne qui permet de déterminer le taux d’incapacité ? Pierre TOUBOUL ‐ Que ce soit en matière d’accidents ou de maladies professionnelles, nous nous appuyons sur un barème indicatif d’invalidité. Ce barème national fixe, en fonction des déficiences et des séquelles relatives à telle ou telle affection une fourchette d’incapacité permanente à attribuer à la personne. Les fourchettes permettent de tenir compte de l’état général, de l’âge, des aptitudes professionnelles etc… de l’individu. Là où une lésion séquellaire d’un doigt pourra être considérée comme relativement bénigne chez une personne travaillant dans un bureau, il n’en sera évidemment pas de même si le dossier concerne un pianiste de profession. C’est pourquoi ce barème n’est qu’indicatif et que nous avons la possibilité de nous en éloigner moyennant, bien sûr, toutes les justifications correspondantes. Quant à l’invalidité, il n’existe pas de barème officiel. Nous nous servons évidemment du barème précédent pour référence mais sans pouvoir totalement nous appuyer dessus pour apprécier la réduction de capacité des deux tiers. C’est l’expérience du médecin conseil qui joue ici à plein, sachant que nous pratiquons aussi des revues de dossiers entre pairs de manière à confronter nos approches. François TUFFREAU ‐ L’appréciation apparaît, de fait, particulièrement subjective puisque même quand un barème existe, la loi vous autorise à vous en éloigner. Pierre TOUBOUL ‐ Nous ne pouvons toutefois le faire qu’en apportant les justifications nécessaires. Il ne faut pas oublier qu’en matière d’accident de travail ou de maladie professionnelle, il existe certes un bénéficiaire en la personne de l’assuré mais c’est aussi l’employeur qui paye. Les employeurs ont la possibilité, du reste, de contester l’appréciation du taux d’incapacité permanente partielle s’ils considèrent qu’il n’est pas justifié. François TUFFREAU ‐ Ce qui caractérise aussi le système de reconnaissance de l’invalidité est le principe de séparation entre l’évaluation médicale et l’évaluation administrative. Nous ne retrouvons pas cette séparation dans la fonction publique où la mise en invalidité est une décision administrative, prise après consultation toutefois d’un comité médical. Pierre TOUBOUL ‐ Dans notre système effectivement, à partir du moment où le service médical a donné un avis, la Caisse n’a pas d’autre choix que de le respecter dès lors qu’elle considère que les droits administratifs sont ouverts. François TUFFREAU ‐ Qu’entendez‐vous par la notion d’incapacité des « deux tiers » ? Pierre TOUBOUL ‐ Il s’agit des deux tiers de la capacité de gain. François TUFFREAU ‐ Je suppose que ces personnes ayant perdu les deux tiers de leur capacité de gain se trouvent très limitées dans leurs actes de la vie quotidienne. 16 Direction régionale de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale Agence régionale de santé Pierre TOUBOUL ‐ Assurément mais dans quelques cas spécifiques certaines d’entre elles peuvent malgré tout exercer une activité réduite (cas de la catégorie 1 d’invalidité). Nous pourrions notamment retrouver le cas d’un insuffisant respiratoire qui, une fois appareillé, pourrait mener un travail sédentaire pendant quelques heures par jour. Geneviève LEBOUTEUX ‐ L’assurance maladie diffuse‐t‐elle des statistiques concernant ses décisions annuelles de classification ou autres ? Pierre TOUBOUL ‐ Certaines statistiques existent au plan national comme le nombre de personnes exonérées du ticket modérateur, le nombre de personnes en invalidité ou en accident du travail avec la répartition des taux etc... Au plan local ensuite, nous pouvons nous appuyer sur des données issues de nos rapports d’activité mais qui n’ont de valeur que régionale. François TUFFREAU ‐ Les sources d’information concernant l’invalidité sont effectivement répertoriées dans le guide publié en 2010 par la CNSA. Le problème est que ces différentes données ne sont pas accessibles en ligne, et qu’il faut systématiquement solliciter les organismes concernés pour obtenir ces données. Plate‐forme d’observation sociale PAYS DE LA LOIRE Handicap, perte d’autonomie 30 novembre er
1 décembre 2010 ‐ Nantes 17 Le « guide barème », outil d’évaluation des déficiences et incapacités des personnes handicapées Dr Isabelle RENAUDEAU MDPH du Maine‐et‐Loire Evolutions du guide barème Mis en œuvre en 1993 (auparavant c’est le barème des anciens combattants qui était utilisé), le guide barème a connu depuis quelques modifications. Il reste applicable pour l’attribution d’un taux d’incapacité, lequel est indispensable pour l’attribution de l’allocation adulte handicapé (AAH), de l’allocation éducation enfant handicapé (AEEH), de la carte d’invalidité ou de priorité ainsi que pour le renouvellement ou la révision des ACTP et ACFP. Il ne s’agit pas d’un outil d’évaluation au même titre que le GEVA mais d’un outil d’éligibilité qui s’intègre dans le cadre général de l’évaluation menée par l’équipe pluridisciplinaire pour déterminer les besoins d’une personne handicapée. Utilisation du guide barème Le guide barème est un guide méthodologique qui conduit à définir trois fourchettes de taux utiles : un taux inférieur à 50 %, un taux compris entre 50 % et 80 % et enfin un taux supérieur à 80 %. Il est important de souligner le caractère non exclusivement médical de cet outil puisque c’est bien une équipe pluridisciplinaire qui évalue le taux d’incapacité. Tout dépend des maisons départementales mais cette équipe pluridisciplinaire est généralement composée d’un assistant social, d’un psychologue, d’un enseignant spécialisé, d’un coordonnateur, d’un médecin voire d’un pédopsychiatre, d’un ergothérapeute ou d’un spécialiste de la déficience sensorielle etc. en fonction des situations traitées. Ce n’est pas un barème précis comme il en existe, par exemple, dans la réparation du préjudice corporel ou en matière d’accidents du travail. Il permet cependant de fixer des fourchettes de taux d’incapacité. Le processus d’évaluation part d’une situation donnée avec des déficiences, des incapacités et des désavantages, le guide permettant de définir un taux d’incapacité qui débouche sur l’ouverture de droit à des prestations. Dans le même temps l’équipe pluridisciplinaire va également évaluer les capacités de travail de la personne ainsi que ses capacités d’autonomie (par le biais du GEVA), ses capacités de déplacement. L’évaluation globale de la situation conduit donc à l’ouverture de droit à des prestations voire à l’orientation vers tel ou tel établissement médicosocial. Ces propositions sont formulées à la personne ou à sa famille sous la forme d’un plan personnalisé de compensation (PPC). Caractéristiques du guide Là où le guide barème de 1993 était évidemment basé sur les concepts de la CIHID et sa décomposition en un schéma linéaire intégrant les notions de déficience/incapacité/désavantage, la CIF se doit désormais de fonder les pratiques autour d’un modèle beaucoup plus interactif. La CIF a notamment été largement citée comme support conceptuel de la loi de 2005. Elle cherche à décrire le handicap au sein d’un modèle universel et non discriminatoire du fonctionnement humain. Le nouveau schéma part dès lors d’un trouble ou d’une maladie qui ne sont pas nécessairement « étiquetés » avant 18 Direction régionale de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale Agence régionale de santé Plate‐forme d’observation sociale PAYS DE LA LOIRE Handicap, perte d’autonomie 30 novembre er
1 décembre 2010 ‐ Nantes 19 de passer à l’analyse des atteintes aux fonctions organiques qui vont elles‐
mêmes avoir une incidence sur les activités de la personne et donc sur sa participation, tous ces éléments étant eux‐mêmes en interaction. L’ancienne terminologie était un peu plus négative quand la nouvelle est beaucoup plus neutre. L’abord biomédical négligeait l’environnement, le schéma était considéré comme trop linéaire et les avantages insuffisamment détaillés. Au contraire la CIF comporte une liste des facteurs environnementaux tout en développant les interférences et en détaillant les modalités de participation. La loi du 11 février 2005 définit le handicap comme « toute limitation d’activité ou restriction de participation à la vie en société subie dans son environnement par une personne en raison d’une altération substantielle, durable ou définitive d’une ou plusieurs fonctions physiques, sensorielles, mentales, cognitives ou psychiques, d’un polyhandicap ou d’un trouble de santé invalidant ». Il s’agit donc de parler avant tout de la personne et de sa limitation d’activité avant d’évoquer l’altération de fonctions ou les troubles. Utilisation pratique du guide L’évaluation du taux d’incapacité s’opère en plusieurs phases avec tout d’abord une prise de connaissance du diagnostic lorsque celui‐ci existe puis un repérage des altérations de fonctions, une appréciation des limitations d’activités et enfin une analyse des restrictions de participation. Le diagnostic permet au médecin de l’équipe pluridisciplinaire de disposer d’informations sur le traitement, sur l’évolutivité et le pronostic de l’état de la personne. Il est aussi utile pour apprécier la cohérence des données présentées à l’appui du dossier. Cependant il ne permet pas à lui seul une évaluation de la situation de handicap dans sa globalité. Il ne peut y avoir de raccourci automatique entre un diagnostic et un taux d’incapacité. Le repérage des altérations de fonctions correspond à l’aspect lésionnel mais n’indique pas forcément l’existence d’une maladie. Les déficiences peuvent être temporaires ou permanentes. Elles désignent un écart vis‐à‐vis de normes définies par rapport à la moyenne d’une population donnée. Les déficiences continuent certes à constituer le point d’entrée dans les chapitres du guide barème mais le taux est fixé en fonction des incapacités et des limitations d’activité, désavantages ou restrictions de participation. Les limitations fonctionnelles d’activité qui sont appréciées peuvent être, elles aussi, temporaires ou permanentes, réversibles ou non, progressives ou régressives. Cette incapacité se traduit par des limitations pour la réalisation d’activités de la vie quotidienne telles que les soins corporels, la marche, la manipulation, la communication, le comportement etc… L’analyse des restrictions de participation renvoie aux désavantages qui résultent de la déficience et qui interdisent l’accomplissement d’un rôle normal en rapport avec l’âge, le sexe ou les facteurs sociaux et culturels de la personne. Nous sommes donc bien là sur l’interaction entre la personne porteuse de ces déficiences et son environnement. Fixation du taux d’incapacité Les personnes dont le taux se situe entre 50 % et 80 % sont celles qui connaissent une gêne notable dans leur vie sociale mais qui moyennant des moyens de compensation ou au prix d’efforts importants vont pouvoir suivre une scolarisation ou profiter d’une vie sociale relativement satisfaisante. Le taux de 80 % est atteint dès lors que l’autonomie individuelle de la personne est remise en cause pour les actes qualifiés d’essentiels de la vie quotidienne (comportement logique ou sensé, repères dans le temps et dans l’espace, assurer seul son hygiène corporelle, pratiquer un habillage adapté, passage aux toilettes, alimentation, capacité de déplacement etc...). L’approche est relativement globale et les taux mentionnés dans les différents chapitres ne s’ajoutent pas de façon arithmétique. Il est également important pour nous de prendre en considération l’âge de la personne ainsi que les contraintes liées à une rééducation précoce et intensive. Un enfant pourra, par exemple, se trouver théoriquement sur un taux d’incapacité tout juste en dessous de 50 % mais il sera tenu compte du fait que la famille est obligée de mettre en place des moyens importants de compensation (soins, rééducation, etc...) qui vont bousculer sa vie. Nous appliquerons dès lors un taux d’incapacité supérieur à 50 % pendant une période donnée, le temps justement de cette rééducation ou de ces soins. Il n’est pas nécessaire d’attendre que la situation médicale de la personne se soit stabilisée pour déterminer un taux d’incapacité. La durée prévisible des conséquences doit toutefois être au moins égale à un an pour déterminer le taux. ECHANGES AVEC LES PARTICIPANTS François TUFFREAU ‐ La modification du guide barème intervenue en 2007 dans la prolongation de la loi de 2005 procède‐t‐elle d’un réel changement ou s’agit‐il d’un simple habillage ? Nous voyons bien, en effet, que vous continuez d’utiliser les anciens concepts et que la démarche part toujours de la pathologie. Isabelle RENAUDEAU ‐ L’ancien guide barème existe toujours, c’est plus l’esprit dans lequel nous l’utilisons qui a changé. Nous essayons de faire évoluer les mentalités mais il est vrai que la tendance est encore très forte même chez les membres de l’équipe pluridisciplinaire de se tourner immédiatement vers le médecin pour s’enquérir du taux d’incapacité. Odile SOULAS ‐ Ce qui est frappant, c’est la disparité potentielle d’analyse d’une MDPH à l’autre. Qui coordonne au final l’ensemble de ces pratiques ? Isabelle RENAUDEAU ‐ Pour éviter ce risque de disparité, la CNSA entreprend un travail de formation des équipes pluridisciplinaires à l’utilisation du guide barème. De cette manière chaque équipe pluridisciplinaire travaille de la même façon d’un secteur à l’autre. Catherine BARRAL ‐ Je considère que cet outil ne s’inscrit pas dans la CIF mais répond, au contraire, strictement au mode de raisonnement propre à la CIHID. Surtout il ne permet pas d’évaluer les situations de handicap. A aucun moment il n’est question du rapport entre l’environnement et les incapacités de la personne. Tous les exemples que vous citez s’appuient sur la pathologie de départ. Il y a là une forme « d’imposture » de la part du Gouvernement à faire croire que ce modèle constituerait une forme d’évolution de la vision du handicap depuis 2005. La seule modification concerne la terminologie et encore n’intervient‐elle qu’en surface. 20 Direction régionale de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale Agence régionale de santé Pascale GILBERT ‐ Ce guide n’intervient qu’en tant que barème d’éligibilité, c’est‐à‐dire que la question de l’évaluation est plutôt traitée préalablement au travers du GEVA. La séquence du barème reste certes celle de la CIHID mais comme il vient d’être rappelé, l’équipe pluridisciplinaire essaie de prendre en compte la dimension de l’environnement en intégrant la situation globale et les contraintes de la famille. Catherine BARRAL ‐ Il vient justement d’être souligné que cette dimension est laissée au libre arbitre de chaque MDPH. Pascale GILBERT ‐ Tout cela figure dans le guide barème lui‐même. Si je vous rejoins quant à l’impression « d’habillage » dans la rédaction puisque seuls quelques mots ont été changés dans l’introduction, le guide barème prenait déjà en compte l’environnement non pas au regard du seul préjudice mais dans une logique de situation. Il est notamment tenu compte des contraintes qui pèsent sur la famille pour déterminer si la personne doit passer au‐dessus ou en dessous le taux « frontière » de 50 %. Au contraire les associations regrettent parfois qu’à tel diagnostic ou telle pathologie ne corresponde pas tel taux : c’est bien la preuve que la dimension de l’environnement de la personne est intégrée à la réflexion. Plate‐forme d’observation sociale PAYS DE LA LOIRE Handicap, perte d’autonomie 30 novembre er
1 décembre 2010 ‐ Nantes 21 L’évaluation des besoins de compensation depuis la loi de 2005 : le GEVA ‐ Guide d’évaluation des besoins de compensation des personnes handicapées Dr Pascale GILBERT CNSA La CNSA La Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA) créée par la loi de 2004 est un organisme national mais qui n’exerce pas de tutelle sur les services locaux comme peut le faire une Caisse primaire avec des caisses locales. Nous travaillons toutefois en partenariat très étroit avec les MDPH non seulement compte tenu de notre mission de financement mais également du fait des missions qui nous ont été confiées en matière d’égalité de traitement des personnes concernées sur l’ensemble du territoire. Pour ce faire, nous assurons une fonction d’expertise, d’information et d’animation auprès de ces mêmes MDPH. En ce sens la CNSA intervient à la fois comme une caisse et comme une agence. Nous multiplions également les échanges d’expérience et d’information entre les MDPH afin de diffuser les bonnes pratiques et d’adopter une démarche la plus ascendante possible. La CNSA n’est pas chargée d’élaborer les réglementations mais elle accompagne leur mise en place sur le terrain. Présentation du GEVA Du temps de la COTOREP, l’idée avait déjà germé de mettre en œuvre un dossier unique d’évaluation de la situation de la personne handicapée. Le fait d’être une instance administrative ouvrant des droits conduisait, en effet, à des évaluations très tronquées avec une vision généralement parcellaire des personnes. Les dossiers des mêmes personnes pouvaient, en outre, être examinés plusieurs fois dans l’année sous plusieurs angles différents, d’où une déperdition de moyens. Le GEVA intervient dès lors comme un outil pour l’évaluation des besoins d’une personne et non pas pour l’attribution d’une prestation. Il doit donc être clairement distingué des outils d’éligibilité comme le guide barème présenté plus haut. Comme le GEVA et le référentiel d’attribution d’éligibilité à la PCH ont émergé de manière concomitante avec en outre la mise en lumière de la notion d’activité dans nos référentiels, il n’est pas rare que l’amalgame soit fait entre les deux. Il s’agit pourtant bien de deux outils distincts, l’un s’intéressant à l’éligibilité c'est‐à‐dire aux conditions particulières d’accès à un droit et l’autre (le GEVA) à l’évaluation. Après une première version fournie à titre expérimental par la DGAS (Direction générale de l’action sociale devenue Direction générale de la cohésion sociale) en 2006 et retravaillée par la suite avec les acteurs de terrain, le GEVA10 a été finalement défini par le décret no 2008‐
110 du 6 février 2008 puis publié au Journal officiel par arrêté du 6 mai 2008. Les différents axes de la situation de la personne et de ses besoins y sont représentés respectant ainsi la définition du handicap, introduite par la loi de 2005 10
Les textes réglementaires, le GEVA mis en forme et son manuel sont disponibles sur http://www.cnsa.fr/rubrique.php3?id_rubrique=131 22 Direction régionale de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale Agence régionale de santé Plate‐forme d’observation sociale PAYS DE LA LOIRE Handicap, perte d’autonomie 30 novembre er
1 décembre 2010 ‐ Nantes 23 et qui s’appuie sur le vocabulaire de la CIF (à défaut d’en respecter totalement le modèle). Contrairement à la démarche antérieure qui prévalait du temps de la COTOREP, le principe du GEVA est déjà de se concentrer sur la « question » c'est‐à‐dire la description de la situation précise de la personne et la définition de ses besoins, avant de se prononcer sur la « réponse » qui pourra être apportée en termes de compensation, de prestations, d’orientation. Il s’agit de comprendre ce qui, dans la situation de telle personne, implique qu’elle a des besoins particuliers à couvrir. Ceci permet notamment de prendre en compte le « projet de vie » de la personne dont parle la loi, à savoir ses attentes et ses souhaits. La démarche présente également l’avantage de mettre en lumière l’existence éventuelle de plusieurs réponses possibles à un même besoin. Une fois les besoins mis en exergue par le GEVA, les outils d’éligibilité interviennent comme une sorte de « filtre » avant la définition de la réponse proprement dite, qui ne prendra pas nécessairement la forme d’une prestation. Nous pouvons notamment retrouver ici toute une série de leviers à utiliser pour l’accès aux droits, c’est‐à‐dire pour la mobilisation ou pour l’adaptation du droit commun. Il s’agit donc là d’une forme d’accessibilité qui n’est plus seulement physique mais aussi sociale, la loi de 2005 apportant un véritable changement de regard de ce point de vue. La France a longtemps construit pour les personnes handicapées des réponses ad hoc qui se sont aussi révélées des réponses « à part ». Le mouvement est en train de s’inverser autour de la notion d’inclusion mais cette nouvelle façon d’envisager la question nécessite avant tout de se détacher dans un premier temps de la connaissance que le décideur peut avoir des réponses existantes. La logique du GEVA Le « cœur » de l’outil correspond au volet n°6, qui se trouve être précisément la question centrale de la nouvelle définition du handicap au sens de la CIF, à savoir « les limitations d’activité et les restrictions de participation ». Le fait de partir de ces limitations et non plus de la déficience constitue, à l’évidence, un choc culturel très important en France où la tradition biomédicale est encore très prégnante. Autour de cette notion de participation gravitent ensuite tous les autres volets dont certains vont avoir trait aux caractéristiques personnelles (volet médical, volet psychologique) quand d’autres vont porter sur les aspects environnementaux, (volet familial social et budgétaire, volet habitat et cadre de vie). Deux autres volets renvoient à une vision beaucoup plus dynamique, à savoir ceux concernant les parcours de formation et les parcours professionnels. Le tout est soutenu, à l’intérieur du volet n°6, par une vision des facilitateurs et des obstacles au regard desquels les activités s’opèrent. Il s’agit là d’un ajout fondamental par rapport au modèle de 2006 et qui permet justement de prendre en compte cette dimension d’interaction entre les caractéristiques individuelles et l’environnement de la personne en tant que facilitateur ou en tant qu’obstacle. Malgré cette avancée conceptuelle, il convient de souligner que la définition légale du handicap en France reste encore au milieu du gué puisqu’elle parle des limitations d’activités et restrictions de participation subies par la personne « en raison des altérations de fonction… ». Le Législateur s’inscrit ainsi dans les habitudes et modes de raisonnement biomédicaux encore profondément ancrés dans nos mentalités. En ce sens, malgré ses limites, le GEVA présente au moins le mérite d’étayer cette nouvelle vision du handicap que la CIF entend promouvoir. Il faut souligner que les huit volets du GEVA n’ont pas vocation à être renseignés par un professionnel en particulier. Le principe est bien que l’évaluation s’opère par le biais d’une équipe pluridisciplinaire, faute de quoi l’objectif d’une réflexion axée sur la participation et l’activité a toutes les chances d’être mis de côté. Les huit volets ne sont pas non plus conçus pour attribuer une prestation particulière. Le GEVA ne constitue pas un outil d’éligibilité, pas plus qu’il n’intervient comme un questionnaire ou un outil d’autoévaluation. La question de la mise en œuvre d’un véritable outil d’autoévaluation comme il en existe par exemple au Québec, doit émerger. En effet, la loi de février 2005 introduit également la notion de projet de vie en tant que libre expression de la personne de ses attentes, de ses souhaits et de ses besoins. Le GEVA ne remplace pas les outils cliniques d’évaluation. Il intervient comme un outil de synthèse mais il ne produit pas lui‐même l’information, y compris pour les échelles de participation ou de type « qualité de vie ». Il convient de partir d’outils ad hoc avant d’en entrer, le cas échéant, les résultats dans le GEVA. Les MDPH sont elles‐mêmes conduites à développer des outils pratiques et complémentaires de cotation, par exemple sur les capacités fonctionnelles. De la même manière un outil de soutien à la visite au domicile serait certainement très utile. Quoi qu’il en soit le niveau de précision du GEVA est évidemment insuffisant pour chacun des professionnels. Le GEVA constitue l’outil de l’évaluation globale, de la synthèse et du langage commun. C’est lui qui va permettre à l’ensemble des intervenants de l’équipe pluridisciplinaire de partager des informations sur l’ensemble des dimensions de la situation de handicap. Conditions d’utilisation L’utilisation s’opère de façon individualisée. Le guide représente près de 40 pages au total mais toutes ne sont pas à renseigner selon les cas et selon le moment où l’évaluation se situe dans le parcours de vie de la personne. Si cette dernière s’adresse à la MDPH avec une priorité donnée à l’insertion professionnelle, l’analyse se portera plus particulièrement sur les informations y afférentes, sans pour autant ignorer le reste mais en le détaillant beaucoup moins. Le modèle même du GEVA renvoie à des considérations concernant le secret professionnel avec en particulier la problématique spécifique du secret médical. Des débats ont lieu fréquemment sur le sujet et cette question est loin d’être totalement tranchée. Quant à la problématique de l’accès à l’information, le droit est très clair sur ce point : l’individu a accès à toutes les données nominatives qui le concernent à partir du moment où ces éléments sont intégrés dans un document administratif ou considéré comme tel. Le problème se pose de la manipulation « pratique » de l’outil dans sa version papier et les acteurs des équipes pluridisciplinaires sont évidemment en très forte attente de l’arrivée d’une version électronique pour pouvoir échanger plus facilement leurs données. Cette informatisation prend du temps car les MDPH sont autonomes dans le choix de leurs systèmes d’information et de gestion, d’où des choix locaux d’applicatifs ad hoc qui sont intervenus en relais de l’ancien applicatif national. Ces développements locaux se sont d’abord concentrés sur ce qui avait trait à la gestion du flux des notifications et du 24 Direction régionale de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale Agence régionale de santé traitement des demandes. Ils devront donc être progressivement enrichis d’informations concernant le parcours de la personne. L’attente est très forte du côté des ARS vis‐à‐vis des MDPH sur ce point mais il s’agit là d’un chantier très conséquent. Plate‐forme d’observation sociale PAYS DE LA LOIRE Handicap, perte d’autonomie 30 novembre er
1 décembre 2010 ‐ Nantes 25 Au cœur du GEVA : le volet n°6 Ce volet n°6 est celui qui renvoie directement à la définition légale du handicap, au regard de l’environnement et des conditions dans lesquelles l’activité se déroule. Pour autant des améliorations seront certainement à apporter quant à la façon dont l’outil permet d’envisager les modalités concrètes de prise en compte de cette dimension. Les domaines d’activité définis sont, pour la plupart, issus de la CIF avec en outre quelques aménagements à l’intérieur des domaines. Des précisions ont notamment été apportées sur la distinction entre d’un côté la capacité fonctionnelle, et de l’autre l’activité réalisée. Les six domaines initiaux du GEVA, adaptés de la CIF (tâches et exigences générales, mobilité/manipulation, entretien personnel, communication, vie domestique et vie courante, application des connaissances) ont été enrichis au terme de la première période d’expérimentation de terrain en 2006, d’une focalisation particulière sur les tâches et exigences relatives à la scolarité et à la formation initiale. Un autre zoom porte sur les tâches et exigences liées au travail. Outre qu’ils ne sont pas tous à renseigner selon les situations, ces domaines peuvent aussi être déclinés en sous‐
catégories. L’item « gérer sa sécurité » pourra ainsi être distingué en « ne pas mettre sa vie ou celle des autres en danger » ou « réagir d’une façon adaptée dans une situation risquée », la seconde dimension ayant un caractère beaucoup plus actif. La cotation des activités La cotation s’opère de deux façons. Pour les capacités fonctionnelles, la première démarche consiste à renseigner les 19 activités répertoriées sans aucune aide et en situation « standard », car ces items sont le support de l’éligibilité à la prestation de compensation. Mais elles doivent aussi être renseignées sous l’angle de la réalisation effective, en indiquant si elles sont réalisées seules, avec assistance etc... La mise en évidence de besoins et de réponses de type « compensation » passe, en effet, par une analyse plus poussée concernant la réalisation effective de ces activités dans la « vraie vie », en fonction des facilitateurs et obstacles concrètement rencontrés par la personne. La cotation concernant les facteurs environnementaux mériterait d’être plus aboutie et plus adaptée en pratique. Elle se contente pour l’instant de reprendre les cinq types de réponses de la PCH (environnement humain, environnement technique, logement, services, environnement animal) et décline pour chacun de ces domaines les facilitateurs et les obstacles (salle de bain trop petite pour le logement par exemple). La rubrique « observation » est, de fait, la plus intéressante aujourd'hui puisque c’est elle qui permet de préciser dans quelles conditions l’activité se déroule. La rubrique permet également de souligner les souhaits de la personne ou de signaler les éventuelles réticences de sa part vis‐
à‐vis de telle ou telle solution. La rubrique est également très utile s’agissant de handicap psychique ou cognitif, ou lié à des maladies chroniques évolutives, pour décrire les fluctuations de difficultés et préciser dans quels types de circonstances les limitations vont pouvoir se retrouver aggravées. Les aides mises en œuvre figuraient dans un premier temps dans un volet à part mais pour des raisons d’utilisation pratique elles ont finalement été intégrées au volet n°6 à côté des activités. Là encore l’ensemble a encore vocation à évoluer, notamment dans la perspective d’une mise en œuvre sous format électronique. Le volet n°8 intervient en fin d’évaluation et présente la synthèse des éléments précédents, en présentant les besoins de compensation. Il sert également de lien entre l’équipe pluridisciplinaire et la CDAPH. Celle‐ci est chargée de la prise de décision proprement dite au regard du projet de vie de la personne, des résultats de l’évaluation et des propositions de réponse, le tout en tenant compte des critères d’éligibilité. La personne peut aussi demander à s’exprimer devant la commission. La question des besoins de compensation Toute la difficulté a été d’éviter d’inscrire dans cette rubrique des réponses toutes faites en fonction des solutions existantes. La personne n’a pas nécessairement besoin d’un service de soins à domicile dans son ensemble ou de telle ou telle institution mais d’aides dans les actes de la vie quotidienne ou pour accéder à tel ou tel élément. La façon de répondre à ce besoin précis est précisément ce qui doit créer le lien entre l’évaluation et la réponse individuelle. Trop souvent jusqu’à présent l’orientation s’est opérée en fonction de l’offre existante (ESAT etc...) sans chercher à explorer, en fonction des attentes de la personne, des solutions alternatives. Il en a découlé des listes d’attente sur ces mêmes institutions, d’où la tentation d’en créer de nouvelles pour répondre à un « besoin » qui aurait pu être satisfait d’une autre manière si la démarche s’était avant tout attachée aux besoins et attentes propres à la personne. Il existe donc tout un travail à opérer en matière de construction de nos réponses sur les territoires en regard d’une population donnée en prenant en compte l’existence de ces réponses « par défaut » qui finissent par s’autodévelopper. Pour la scolarisation des enfants par exemple, le lien entre scolarisation et demande d’AVS est trop souvent fait de manière automatique alors que dans certains cas une aide humaine ponctuelle combinée éventuellement à une aide technique pourrait aussi bien permettre l’accès à la scolarisation pour l’enfant. De plus, l’AVS n’est pas « la » réponse, mais l’une des réponses possibles, adaptée uniquement à certains types de besoins, et il est nécessaire d’envisager également les autres types de réponses : adaptations pédagogiques, appui d’un SESSAD, etc… Les enjeux Il s’agit ici de prendre réellement en compte le changement d’approche du handicap et des pratiques d’évaluation en facilitant la pluridisciplinarité et en refusant de considérer qu’une profession serait plus pertinente que l’autre pour évaluer la situation de handicap, en particulier sur le volet n°6. L’idée est donc de développer un langage commun au cœur même de la définition du handicap. Le GEVA doit également permettre de soutenir cette démarche qui consiste à partir de la participation plutôt que des déficiences. L’appropriation du GEVA Le décret de 2008 prévoyait que la CNSA établisse un bilan au bout d’un an l’utilisation. Ce bilan11 a été réalisé et remis au ministre en janvier 2010. Le constat est que l’outil était utilisé en 2008 par environ 75 % des MDPH et se 11
Disponible sur http://www.cnsa.fr/article.php3?id_article=761 26 Direction régionale de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale Agence régionale de santé Plate‐forme d’observation sociale PAYS DE LA LOIRE Handicap, perte d’autonomie 30 novembre er
1 décembre 2010 ‐ Nantes 27 trouvait en phase de généralisation. La plupart du temps cette utilisation s’opérait de façon encore partielle. Le volet n°8 intervient comme un outil de dialogue entre l’équipe pluridisciplinaire et la CDAPH d’une part mais aussi entre l’équipe pluridisciplinaire et les autres équipes de la MDPH. Les critiques portent sur la lourdeur de l’outil et les temps importants de renseignement ainsi que sur une inadaptation à certaines situations, notamment vis‐à‐vis des enfants et des personnes en situation de handicap psychique. Il convient de rappeler, à cet égard, que le GEVA n’a pas vocation à se substituer à d’autres outils plus spécifiques. Enfin, d’autres critiques portaient sur la complexité de l’outil pour la personne elle‐même mais à aucun moment il n’a été prévu que le GEVA pouvait être utilisé comme un outil d’autoévaluation qui serait rempli par l’intéressé. Un outil de cet ordre serait certes intéressant mais il reste encore à être mis en œuvre. Nous avons pu ainsi constater que le GEVA devait aussi être accompagné de toute une série d’outils annexes ‐ un outil d’autoévaluation en étant un exemple ‐ faute de quoi la tendance est forte de vouloir l’utiliser pour des missions qui ne sont pas les siennes. Les critiques relèvent surtout de la difficulté d’évaluer et de travailler en réelle interdisciplinarité autour des situations de handicap. Passer d’une situation où l’attribution des prestations était « saucissonnée » à une approche globale du sujet et de sa situation singulière dans son environnement de vie, a constitué un changement culturel très important. L’équipe pluridisciplinaire peut parfois se trouver confrontée à des situations très complexes qui sont à la fois les plus problématiques et en même temps celles qui justifient le plus l’utilisation d’un outil comme le GEVA. Certaines MDPH ont, du reste, choisi de n’utiliser le GEVA que pour les cas les plus complexes. Il reste toujours aussi difficile de distinguer la problématique de handicap et des besoins de compensation de la notion de « réponse », c’est‐à‐dire la préconisation que pourra faire l’équipe pluridisciplinaire au regard de cette situation et de ces besoins, en vue notamment de la prise de décision par la CDA. On a pu également au cours de ce bilan constater que la prééminence de la vision biomédicale du handicap continue de poser problème, même si les choses ont globalement bien évolué ces derniers temps. Des travaux sont en cours autour d’une appropriation encore un peu plus soutenue du GEVA avec en particulier des sessions d’échanges de pratiques entre les MDPH, des propositions de formation ou encore un appui direct à ces mêmes MDPH. Une maquette de GEVA sous format électronique a commencé à être mise en œuvre. Il reste à faire en sorte que les différents éditeurs de logiciels qui travaillent avec les MDPH incluent ce GEVA à l’intérieur de leur dispositif. Nous n’en sommes pas encore à élaborer telle ou telle fonctionnalité destinée à fluidifier l’évaluation puisqu’il reste à faire en sorte que soient déjà intégrées les nomenclatures et les variables. Le chemin est donc encore très long de ce point de vue. Un plan d’action a été établi d’ici 2012 de façon à accompagner les professionnels dans leur pratique pour permettre une meilleure utilisation de l’outil et surtout une meilleure évaluation de la situation des personnes. Il s’agit également de parvenir à un langage commun, indispensable à l’efficacité du système d’informations. La notion de « GEVA compatibilité » Les MDPH ne peuvent pas exercer leurs missions d’évaluation sans les autres partenaires. Le suivi de la situation d’une personne handicapée s’inscrit en général dans un parcours de longue, voire de très longue durée. Il faut donc absolument éviter que les MDPH réinventent, du haut de leur « tour d’ivoire » ce que les équipes de terrain ont sous les yeux tous les jours et évaluent elles‐mêmes tous les jours pour mettre en œuvre leurs actions. L’idée serait donc de s’accorder sur les types d’informations à échanger et donc de faire en sorte que les données les plus spécialisées puissent être lisibles de manière synthétique à travers la grille de lecture du GEVA. Le constat a également été établi que les MDPH faisaient souvent appel à des partenaires extérieurs, d’où la nécessité de pouvoir disposer d’un vocabulaire commun pour d’une part, passer correctement la « commande », d’autre part cadrer le niveau de réponse. La GEVA compatibilité s’inscrit à différents stades avec un premier niveau, celui du certificat médical. Toute demande déposée à la MDPH doit être, en effet, accompagnée d’un formulaire Cerfa dans lequel la personne exprime son projet de vie (ses attentes, besoins et souhaits) ainsi que du certificat médical, qui est la seule pièce « technique » jointe systématiquement à tout dossier. Cette obligation réglementaire tend d’ailleurs à renforcer le maintien d’un abord biomédical du handicap. Quoi qu’il en soit ce certificat médical a été remodelé pour que les médecins puissent y intégrer, outre des renseignements sur la pathologie ou sur les déficiences, un certain nombre d’informations sur le retentissement dans la vie quotidienne et dans les différents domaines de vie. Tous ces éléments ont évidemment été formulés de façon à être compatibles avec le GEVA. La compatibilité concerne aussi les experts missionnés par les MDPH mais également les équipes de soin au sens plus large. Par exemple, pour les personnes victimes d’un traumatisme crânien suite à un accident, des bilans sont réalisés par les professionnels qui suivent la personne au cours de la phase initiale de soins. Mieux vaut, par conséquent, que ces bilans (neuropsychologique par exemple) puisse être intégrés au GEVA sans avoir à reprendre tout ce qui a déjà été établi. Les partenaires accueillent, du reste, d’un assez bon œil ces initiatives des MDPH quand elles leur expliquent que la GEVA compatibilité vise à mettre en œuvre une culture commune sur le handicap. Il s’agit là d’un changement radical de vision, à l’opposé d’une structuration où le médico‐social constituerait « l’aval » du problème, les solutions d’accueil d’accompagnement s’apparentant à une forme de « déversoir » hors du champ sanitaire. Bien sûr cette GEVA compatibilité s’entend dans les deux sens, c’est‐à‐dire que les partenaires doivent aussi recevoir de la part de l’équipe pluridisciplinaire les informations les plus pertinentes en termes de préconisations ou de parcours de la personne. 28 Direction régionale de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale Agence régionale de santé ECHANGES AVEC LES PARTICIPANTS François TUFFREAU ‐ Le GEVA est‐il un outil « de plus » qui se superpose aux outils déjà existants, à savoir le guide barème par exemple ? Pascale GILBERT ‐ Le GEVA constitue le support pour le recueil des informations (informations sur les déficiences, sur la façon dont vit la personne etc...) nécessaires à l’utilisation d’autres outils comme le guide barème, ou le référentiel PCH etc. François TUFFREAU ‐ Vous avez souligné le fait que le GEVA n’était pas un outil d’autoévaluation mais à quel moment les personnes expriment‐elles leurs souhaits et leurs besoins ? Plate‐forme d’observation sociale PAYS DE LA LOIRE Handicap, perte d’autonomie 30 novembre er
1 décembre 2010 ‐ Nantes 29 Pascale GILBERT ‐ Telle que la loi est rédigée, la séquence voudrait que la personne exprime en premier lieu ses attentes. L’équipe pluridisciplinaire évalue ensuite sa situation et ses besoins, pose les réponses qui lui semblent les plus adaptées dans le cadre d’un plan personnalisé de compensation global, avant de laisser la CDAPH prendre les décisions correspondantes, la MDPH assurant quant à elle un suivi desdites décisions. En réalité les choses s’avèrent beaucoup plus compliquées puisque le fait de travailler la question de façon dynamique conduit souvent la personne à modifier la teneur même de son projet de vie initial. La loi prévoit, du reste, différents temps où la personne se trouve en interaction avec les professionnels des MDPH. Ces dernières ont également pour mission d’aider à la formulation du projet de vie, ce qui ‐ par parenthèse ‐ les place un peu en situation de juge et partie. Enfin la personne peut à tout moment demander à exprimer un nouveau besoin. Françoise JAN ‐ Vous avez souligné la dissociation entre évaluation et éligibilité mais pour ce qui est de la déficience intellectuelle, celle‐ci passe très difficilement dans le « filtre » d’éligibilité des prestations. Comme ces personnes ont néanmoins besoin d’être accompagnées pour beaucoup d’activités, la seule réponse qui reste est alors le placement en établissement. Ceci est très dommage car l’esprit de la loi était normalement tout autre. Pascale GILBERT ‐ Il s’agit là davantage d’une question de dispositif réglementaire et de calibrage des prestations. L’intérêt du GEVA peut être précisément de mettre en évidence l’existence de besoins aujourd'hui non couverts et qui n’étaient même pas visibles jusqu’à présent. J’ai cité tout à l’heure l’exemple des listes d’attente en ESAT qui conduisent elles‐mêmes à la construction de nouveaux établissements mais il faudrait surtout pouvoir mesurer l’écart entre les besoins et les propositions qui pourraient être émises hors contrainte de l’offre. Or aujourd'hui les équipes s’autocensurent de ce point de vue. Catherine BARRAL ‐ Les associations concernées n’auraient‐elles pas là un rôle important à jouer, en relation avec les MDPH ou avec la CNSA, pour parvenir à une meilleure évaluation des besoins pour les personnes ayant des difficultés cognitives ? Certains éléments sont très difficiles à objectiver et il existe certainement d’autres moyens d’appréhender au mieux la situation de ces personnes. Pascale GILBERT ‐ Les associations de personnes handicapées ont été intégrées à l’ensemble des travaux préparatoires du GEVA ainsi qu’aux différents comités de pilotage. Ce partenariat mériterait effectivement d’être renforcé mais d’une façon peut‐
être un peu moins dispersée qu’à l’heure actuelle. Un certain nombre d’outils collectifs sont en train de se mettre en place autour des SROMS ou des PRIAC mais il manque le lien avec l’échelon local. Le CDCPH (conseil départemental consultatif des personnes handicapées) devrait être ce lieu de débat sur la politique du handicap sur le territoire mais hormis quelques exceptions cette instance ne fonctionne pas comme elle devrait le faire. Odile SOULAS ‐ Vous avez indiqué que l’informatisation de l’outil et notamment du volet n°8 était en cours d’ébauche mais il s’agit là d’un élément essentiel si nous voulons parvenir à une meilleure adaptation de l’offre aux besoins. Nous ne pourrons pas décemment attendre encore deux ans avant de pouvoir disposer d’un système d’information digne de ce nom alors que l’enjeu d’évaluation des besoins et des attentes est absolument primordial. La question se pose aussi de savoir jusqu’à quel niveau le besoin sera couvert. S’agira‐t‐il seulement des besoins primaires de droit commun au sens de la pyramide de Maslow ou bien ces besoins pourront‐ils courir jusqu’à des activités de loisirs ou autre, auquel cas la problématique concernera tout autant les personnes en situation de précarité par exemple ? Pascale GILBERT ‐ La mise en place d’un système d’information est suffisamment importante pour que l’on accepte une fois pour toutes d’investir sur ce sujet. En 1988, avait été entreprise la mise en œuvre d’un système d’information pour les CDES suite à l’arrivée de la CIDIH afin de conserver des informations concernant les enfants qui passaient par ces commissions. La première version d’une fiche « médicale » a donc été testée mais il a fallu attendre 1993 pour que son informatisation commence. En 1998 l’informatisation de cette fiche a été généralisée dans le système de gestion des CDES, mais ce logiciel devenu obsolète devait être refondu. Le chantier n’a finalement été terminé qu’en 2005… c’est‐à‐dire au moment même où la mise en place des MDPH allait s’engager. Or comme la loi de 2005 ne prévoit pas la mise en place d’un système d’information identique dans toutes les MDPH, il faut maintenant travailler dans une nouvelle direction, celle du système d'information partagé (SipaPH). J’attire l’attention sur le fait que les MDPH n’opèreront pas un tel chantier toutes seules. Elles ne mettront « dans la boîte » que ce qu’elles auront pu récolter. La loi de 2002 prévoyait que les différents établissements médico‐sociaux se dotent de systèmes d'information compatibles mais ce n’est pas encore effectif. Avec le GEVA et l’arrêté de nomenclature sur le système d'information des MDPH qui est sorti en août dernier les différents acteurs disposent d’outils sur lesquels ils doivent absolument investir de façon pérenne et coopérative. Concernant le niveau de besoins couvert, cette question est très générale : cela représente un coût, jusqu’où sommes‐nous collectivement prêts à aller en termes de solidarité pour couvrir les besoins liés au handicap et à la dépendance ? quel « reste à charge » est acceptable ? le débat a déjà été engagé avec la création de la PCH et les « bornes » qui ont été arbitrées pour ce dispositif, il est d’actualité pour ce qui concerne le niveau de couverture des besoins des personnes âgées dépendantes… la notion de handicap, par contre, est bien définie par la loi de 2005, et ce quel que soit l’âge : il faut qu’il y ait des altérations de fonctions substantielles et durables pour qu’on soit dans ce champ et qu’on puisse accéder aux prestations qui lui sont rattachées. 30 Direction régionale de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale Agence régionale de santé L’évaluation de la dépendance à l’aide de la grille AGGIR Dr Yannick L’HERMITTE Conseil Général du Maine‐et‐Loire La grille AGGIR (pour « Autonomie gérontologique groupes iso‐ressources ») d’évaluation de la perte d’autonomie est probablement la plus connue aujourd'hui du public mais aussi des professionnels et des financeurs. Plate‐forme d’observation sociale PAYS DE LA LOIRE Handicap, perte d’autonomie 30 novembre er
1 décembre 2010 ‐ Nantes 31 La problématique d’origine était de savoir quelles étaient, dans le domaine de la perte d’autonomie, les informations minimales qui pourraient être partagées par les soignants, les pilotes et les financeurs. Nous retrouvons là des notions importantes, la mention d’informations « minimales » indiquant notamment que la grille n’a pas vocation à entrer dans le détail de la situation d’une personne. Le terme de « partage » est également essentiel, sachant que le pilote, le soignant et le financeur n’ont pas nécessairement beaucoup de points en commun dans leurs objectifs et dans leur réalité au quotidien. La dépendance La dépendance est définie au plan légal comme « l’état de la personne qui, en dehors des soins médicaux qu’elle est susceptible de recevoir, a besoin d’être aidée pour accomplir les actes essentiels de la vie ou requiert une surveillance régulière ». Là encore les termes sont importants. La dépendance s’inscrit bien en dehors du champ médical et les « soins » dont il sera question plus loin ont un caractère essentiellement domestique. La dépendance se différencie de la perte d’autonomie. Une personne peut parfaitement être dépendante physiquement et avoir besoin d’une tierce personne pour l’aider dans les actes essentiels de sa vie tout en conservant des fonctions cognitives lui permettant une autonomie dans ses choix de vie. La confusion entre dépendance et perte d’autonomie constitue la porte ouverte à l’infantilisation des personnes âgées. Nous retrouvons là le cas trop souvent rencontré d’une personne âgée qui, suite à une chute survenue chez elle, est placée d’office par sa famille en maison de retraite. Nous devons bien garder à l’esprit qu’une personne peut être autonome tout en étant dépendante. Par ailleurs, la grille AGGIR prend en compte non pas la possibilité ou non pour la personne de marcher mais celle de se déplacer par elle‐même, c’est‐à‐dire que le déplacement peut très bien s’opérer en fauteuil roulant mais sans l’aide d’une tierce personne. La grille AGGIR est donc basée sur l’observation des activités réellement effectuées seule par la personne âgée, quels que soient les moyens techniques utilisés. Les variables analysées Dix variables « discriminantes » (fortement représentatives de la dépendance) sont retenues : ‐ la cohérence (possibilité de communiquer de façon logique et sensée) ; ‐ l’orientation (pouvoir s’orienter dans le temps et dans l’espace) ; ‐ la toilette (assurer son hygiène corporelle) ; ‐ l’habillage ; ‐ l’alimentation ; ‐ l’élimination urinaire et fécale (assurer l’hygiène de ses éliminations sans nécessairement les contrôler physiologiquement) ; ‐ les transferts (passage de la position couchée à la position assise et la position debout) ; ‐ les déplacements à l’intérieur du domicile (le « mode d’emploi de la grille précise même que ce déplacement s’entend « jusqu’à la boîte aux lettres ») ; ‐ les déplacements à l’extérieur ; ‐ et enfin la capacité de la personne à alerter son entourage. Il est à noter que seules les dix premières de ces variables discriminantes sont prises en compte pour le calcul du GIR (Groupe iso‐ressources). S’y ajoutent sept variables dites « illustratives », à savoir la gestion (s’occuper de ses affaires et de son patrimoine), la capacité à faire soi‐
même la cuisine, à faire le ménage, à utiliser les transports, à s’occuper de ses achats, à suivre son traitement médical voire à mener des activités de temps libre. La grille d’analyse Toutes ces variables sont donc étudiées dans la grille. Pour cela chacune d’entre elles est codée selon trois niveaux : ‐ niveau A : la personne mène l’activité seule, spontanément, habituellement, totalement et correctement ; ‐ niveau B : l’activité est menée mais un seul des adverbes cités plus haut (habituellement, totalement, correctement etc…) ne peut pas être validé ; ‐ niveau C : l’activité n’est pas du tout exercée. Le décret du 21 août 2008 est venu redistribuer l’ordre dans lequel les variables sont étudiées en faisant en sorte de finir par la notion de cohérence, les réponses aux items précédents permettant notamment de mieux mesurer la cohérence en question. A titre d’exemple, pour la rubrique « toilette » le lavage et l’entretien du dos, des ongles et des dents ne sont pas regardés comme des éléments discriminants. Il faut savoir qu’à l’origine la grille AGGIR a été conçue pour les longs séjours gériatriques, d’où certaines de ces exclusions pour des zones corporelles qui ne sont, de toute façon, pratiquement jamais atteintes par ces personnes. D’une manière générale l’évaluation essaie de tenir compte des habitudes et du passé de la personne, sans imposer des normes de fréquence ou d’hygiène trop strictes. Comme indiqué tout à l’heure seule l’hygiène de l’élimination urinaire et fécale est observée. L’item « aller aux wc » fait quant à lui partie de la rubrique « déplacements », celui de « baisser son pantalon » figure dans la rubrique « habillage » et celui de « s’asseoir sur la cuvette » appartient à la rubrique « transferts ». L’alimentation et la cuisine, qui font respectivement partie des variables discriminantes et illustratives, ont évidemment été rapprochées dans l’ordre d’étude des items. La rubrique « cohérence » est, bien sûr, la plus difficile à remplir et fait toujours l’objet de nombreux débats. Elle pose notamment la question de l’interférence avec le diagnostic psychiatrique. Les groupes iso‐ressources Six GIR sont définis : Le GIR1 correspond aux personnes ayant perdu leur autonomie mentale, corporelle, motrice et sociale ; Le GIR2 regroupe deux grands types de situations : ‐ les personnes de type « déments perturbateurs », dont les fonctions mentales sont altérées mais qui ont conservé leurs fonctions locomotrices ; ‐ les « grabataires lucides », dont les fonctions mentales sont peu altérées mais qui sont confinées au lit ou au fauteuil. Ces deux sous‐groupes sont équivalents en termes de soins et de charge de travail pour le personnel soignant mais ils regroupent à l’évidence des populations totalement opposées. Ceci montre 32 Direction régionale de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale Agence régionale de santé Plate‐forme d’observation sociale PAYS DE LA LOIRE Handicap, perte d’autonomie 30 novembre er
1 décembre 2010 ‐ Nantes 33 notamment qu’il serait assez illusoire de vouloir bâtir un plan d’aide à partir des seuls GIR. Le GIR3 concerne les personnes ayant conservé leur autonomie mentale et partiellement leur autonomie locomotrice mais qui nécessitent plusieurs fois par jour des aides pour l’autonomie corporelle ; Le GIR4 a trait aux personnes qui n’assurent pas seules leurs transferts mais qui, une fois levées, peuvent se déplacer à l’intérieur. Elles se déplacent seules mais doivent être aidées pour les activités corporelles et les repas ; Le GIR5 renvoie aux personnes qui assurent seules leurs déplacements à l’intérieur du logement mais qui peuvent avoir besoin d’une aide ponctuelle pour la toilette, la préparation du repas ou le ménage ; Le GIR6 enfin s’attache aux personnes ayant conservé leur indépendance pour les actes discriminants mais qui peuvent toutefois faire l’objet d’une dépendance domestique et sociale. Une personne peut très bien être en GIR6 ou en GIR5 et ne pas pouvoir sortir de son domicile. Ce sont d’ailleurs ces personnes qui ont été atteintes en premier par la canicule de 2003. Utilisation pratique La grille AGGIR sert, en premier lieu, à déterminer l’éligibilité à l’Allocation personnalisée d’autonomie (APA). Quand la PSD a été créée en 1997, AGGIR a été retenue à l’échelle nationale comme outil officiel pour évaluer le niveau de dépendance. La grille existait déjà auparavant pour estimer, par exemple dans les centres de longs séjours, la charge des différentes unités. Le fait que AGGIR ait été officialisée lors de la mise en place de la PSD a notamment contribué à créer cette confusion entre éligibilité et évaluation qui perdure encore aujourd'hui. La seconde mission de la grille n’est pas la moindre puisqu’elle est utilisée pour l’évaluation de groupes d’individus, au travers de la notion de GIR moyen pondéré (GMP). Nous retrouvons là, du reste, la fonction initiale de la grille en tant qu’outil de mesure de charge dans les centres de long séjour. Le GMP d’un secteur ou d’une entité est calculé en accordant à chaque personne un certain nombre de points selon son GIR. Les GIR les plus élevés donnent évidemment un moins grand nombre de points puisque la personne est d’autant moins dépendante. L’addition de l’ensemble des points divisée par la capacité de l’établissement donne le GIR moyen pondéré. Depuis la réforme de la tarification, tous les établissements dont le GMP était supérieur à 300 sont devenus des EHPAD (établissement hébergeant des personnes âgées dépendantes). Cette classification dépasse même le seul secteur médicosocial car les normes sécuritaires « incendie » sont différentes entre un établissement accueillant des personnes non dépendantes (EHPA, GMP inférieur à 300) et un EHPAD. Le GMP sert aussi bien à calculer annuellement les tarifs dépendance dans les EHPAD que la dotation aux soins par l’assurance maladie pour les mêmes EHPAD (ceci avant Pathos) tout en permettant des comparaisons entre établissements. Les limites de la grille AGGIR L’outil ayant été conçu pour mobiliser la charge en soins dans un environnement stable de type USLD (unité de soins de longue durée), il met plutôt au premier plan les limitations d’activité en lien avec une déficience motrice sans prendre toujours bien en compte les déficiences psychiques. La hiérarchie entre les variables discriminantes et illustratives renvoie au second plan un certain nombre d’éléments pourtant extrêmement importants pour la vie à domicile (déplacements à l’extérieur par exemple). La transposition d’un indicateur conçu pour établir une moyenne dans une collectivité ne paraît pas toujours idéale pour décrire les situations individuelles à domicile La problématique du lien entre le groupe GIR et le plan d’aide se pose également, par exemple pour le GIR2 qui regroupe des populations aux caractéristiques diamétralement opposées. De la même façon le GIR4 a tendance à servir parfois de « fourre‐tout » alors que plus de la moitié des bénéficiaires de l’APA émargent dans ce GIR. Une étude a notamment montré que 49,3 % des personnes diagnostiquées démentes sont classées dans les GIR 4 à 6, mais cependant plus de la moitié de ces sujets présente une détérioration cognitive sévère selon le MMS, en particulier les sujets GIR 4. Ceci traduit un manque de sensibilité de la grille vis‐à‐vis de ce public. Force est de constater en outre que les items de la grille ne prennent pas en compte les éléments de la vie « instrumentale » que sont la capacité à faire ses courses, à téléphoner, à gérer son budget etc... dont l’évaluation pourrait permettre de dépister assez facilement les prémices de maladies d’Alzheimer ou autres. En conclusion la grille AGGIR est un outil de classification de la dépendance qui ne permet pas à lui seul une évaluation multidimensionnelle de la personne. En particulier, la notion de « fragilité » n’est malheureusement pas prise en compte pour le cas, par exemple, des personnes en GIR4 qui restent à domicile mais qui sont susceptibles de tomber très rapidement dans la dépendance en cas de chute. 34 Direction régionale de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale Agence régionale de santé PATHOS : outil médico‐économique d’évaluation de la charge en soins des structures accueillant des personnes âgées dépendantes Dr Monique BITOUN ARS Pays de la Loire Plate‐forme d’observation sociale PAYS DE LA LOIRE Handicap, perte d’autonomie 30 novembre er
1 décembre 2010 ‐ Nantes 35 Les deux outils Pathos et AGGIR ont la même histoire puisqu’ils ont été créés par les mêmes concepteurs dans les mêmes années et dans un but d’évaluation hospitalière des unités de soins de longue durée. Pour autant l’outil Pathos n’a pas été utilisé immédiatement après la réforme de la tarification des EHPAD pour le financement des établissements car il était le moins abouti des deux. Dans les premiers temps ‐ et faute de mieux ‐ c’est donc AGGIR qui a servi à calculer la dotation/soins des EHPAD. Une fois finalisé, l’outil Pathos sert désormais à calculer les besoins en soins médicaux et paramédicaux d’une population donnée. Il convient de préciser que Pathos n’a pas vocation à servir à l’évaluation d’une personne en particulier mais d’un groupe d’individus à l’échelle, par exemple, d’un service ou d’un secteur. Pathos outil de « coupe transversale » L’outil sert à établir une photographie d’un établissement ou d’un service, théoriquement sur une journée donnée. En pratique, Pathos requiert une procédure suffisamment lourde sur le plan médical pour qu'il ne soit pas possible de pratiquer cette évaluation en un seul jour. L’outil tient compte des soins « requis » et non des soins réellement effectués. La définition des états pathologiques A l’origine, les concepteurs de l’outil ont réuni des experts pour dénombrer le nombre de pathologies que pouvait rencontrer une personne âgée. Ces 49 états pathologiques recouvrent la quasi‐
totalité des situations rencontrées; la 50e, « autres pathologies » représentant seulement 1,5 % de l’ensemble. L’état pathologique peut être en soi très général (« syndromes abdominaux ») ou, au contraire, très précis (« escarres »). Les postes de consommation de ressources Huit postes de consommation de ressources sont définis : gériatre, psychiatre, infirmière‐kiné‐orthophoniste, psychologue, biologie, imagerie et médicament. Les profils de soins C’est dans la définition des douze profils de soins que Pathos prend vraiment tout son sens. Un « profil de soin » pourrait se définir comme « l’ambiance » nécessaire à la prise en charge d’une pathologie. Il caractérise à la fois le niveau, la quantité et le type de soins requis pour le traitement de chacune des pathologies. C’est ainsi qu’une insuffisance cardiaque ne nécessitant qu’un traitement par médicaments sera codée en S1, alors que la même pathologie, à un stade plus grave, sera codée en T2 (« équilibration, surveillance rapprochée »). Ce codage signifie des moyens humains et techniques très différents et ce, en fonction de l'état de la personne. Chaque état pathologique est caractérisé par un profil de soin et un seulement. C’est le couple état pathologique/profil de soin qui détermine « l’ordonnance idéale », à savoir la meilleure façon de mobiliser les huit postes de ressources cités plus haut. Sur les 600 combinaisons pathologie/profil de soin possibles, seuls 240 forment un couple plausible. Par exemple, la pathologie « insuffisance cardiaque » ne peut pas donner accès au profil de soin « psychiatrie ». Les 12 profils de soins déterminés sont les suivants : T1 ‐ pronostic vital en jeu au quotidien T2 ‐ équilibration; surveillance rapprochée P1 ‐ psychiatrie de crise ou à rechute P2 ‐ psychothérapie de soutien R1 ‐ rééducation intensive individuelle R2 ‐ rééducation de soutien ou allégée CH ‐ plaies, soins locaux complexes DG ‐ investigations pour établir un diagnostic M1 ‐ soins de fin de vie techniques lourds M2 ‐ fin de vie avec soins palliatifs S1 ‐ prévention surveillance médicaments S0 ‐ absence significative de soins Le S1 est le profil le plus souvent rencontré en EHPAD. Il correspond à un travail infirmier de prévention et de surveillance. Le S0 regroupe les situations avec antécédents (accident vasculaire cérébral ancien) ainsi que l’incontinence ou encore les états cancéreux n’incluant aucun soin. Tous ces éléments sont donc valorisés en temps, en actes et en euros. Les actes sont pondérés par poste, de telle sorte qu’un médecin venu pour ausculter le cœur et les poumons ne sera compté qu’une fois. Le total des points divisé par le nombre de personnes du service donne le Pathos pondéré moyen (PMP) qui constitue un indicateur global des besoins en soins d’une population donnée. 36 Direction régionale de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale Agence régionale de santé Les enquêtes HID et Handicap‐Santé Gérard BOUVIER INSEE Plate‐forme d’observation sociale PAYS DE LA LOIRE Handicap, perte d’autonomie 30 novembre er
1 décembre 2010 ‐ Nantes 37 L’enquête Handicap‐Santé fait suite à une enquête « Incapacité et dépendance » (HID) qui a eu lieu il y a une dizaine d’années de 1998 à 2001. Le projet Handicap Santé qui est en cours reprend des éléments de HID tout en apportant un certain nombre d’évolutions. Le pilotage en est assuré par le système statistique public à savoir l’Insee mais aussi les services statistiques ministériels, en l’occurrence la Drees pour le ministère de la santé. La conception s’appuie sur le travail d’organismes experts. Le financement est assuré principalement par le système statistique public avec le concours d’autres acteurs comme les caisses nationales, assurance maladie, assurance vieillesse, allocations familiales, l’Agefiph, l’InVS ou encore la CNSA. La FNMF est également financeur. Le projet des enquêtes Handicap Santé s’inscrit dans une série d’enquêtes consacrées à la santé depuis les années 60. Le besoin s’est fait sentir à partir des années 90 d’apporter une dimension plus sociale à l’examen des problématiques de handicap, d’où le premier projet HID qui a commencé à partir de 1995. Le projet Handicap Santé a démarré, de son côté, en 2005 pour une mise à disposition des données entre 2008 et 2011 et une exploitation de ces mêmes données qui vient d’être entamée. L’objectif central des projets, d’abord HID, maintenant HS, était de fournir des données de cadrage et ce pour l’ensemble de la population. Le constat était celui d’une multitude de sources de données qui répondaient le plus souvent à des objectifs distincts et qui supposaient par là même des méthodologies différentes. Il manquait donc un dénominateur commun à l’ensemble de ces informations. Le principe d’exhaustivité est l’une des originalités du projet puisque l’enquête a porté sur deux populations très différentes (à savoir d’un côté les ménages et de l’autre les institutions) avec à chaque fois des objectifs complémentaires. Les dispositifs associés ou adossés comprennent une enquête auprès des aidants (qui fera l’objet d’une présentation spécifique) ainsi que des post‐enquêtes. Des rapprochements ont également été opérés avec les informations de la Cnam sur les « consommations médicales ». Enfin, l’enquête intègre un suivi des décès, à savoir un recueil de l’état vital des personnes interrogées au moins une fois et au plus tard quinze ans après la fin du projet. Le projet Handicap‐Santé a pour vocation d’être pertinent et exhaustif. Il est ainsi apparu nécessaire d’enquêter en institutions et ce même si 99 % de la population vit en ménage. A contrario la difficulté pour l’enquête en logement ordinaire était que très peu de personnes se trouvaient concernées par le sujet de l’enquête, d’où le recours au filtre de l’enquête VQS (« Vie quotidienne et santé ») qui préparait l’enquête proprement dite en s’efforçant de se concentrer sur la population concernée. Pour la partie institutionnelle, la situation idéale pour la collecte des informations serait de se retrouver directement avec la personne ainsi qu’avec des « proxys » (personnes qui répondent en soutien voire en lieu et place du sujet, soit un proxy par « thème » : faisant partie de l’entourage familial, soignant, administratif). Cette situation est loin d’avoir été rencontrée dans la plupart des cas. Quelques difficultés ont été rencontrées s’agissant des personnes sous tutelle qui vivent en institutions, sachant que la collecte s’opérait dans un temps relativement court et qu’il n’était pas toujours possible d’obtenir l’aval du tuteur en temps et en heure. Les établissements psychiatriques ont également eu plus tendance que les autres à refuser l’accès aux enquêteurs sous couvert de protection de leurs pensionnaires. Ils ont aussi eu plus tendance à critiquer le contenu même du questionnaire et la pertinence de certaines questions. L’enquête a été perçue par les enquêteurs comme étant très chargée émotionnellement. Elle a représenté une charge non négligeable pour les institutions sollicitées. S’agissant de la partie « ménages » de l’enquête, toute la difficulté était de pouvoir s’appuyer sur suffisamment de personnes présentant une situation de handicap ou des problèmes de santé. Au total sur les 260 000 personnes qui ont été interrogées au travers du filtre VQS, 8 500 ont été identifiées comme se trouvant dans une situation sévère de handicap. L’interview était de « type CAPI », c’est‐
à‐dire que l’enquêteur se rendait chez les personnes avec un ordinateur portable où figurait le questionnaire et où il enregistrait les réponses. Les personnes en bonne santé étaient évidemment plus difficiles à convaincre de participer à l’enquête. Le filtre de l’enquête VQS n’a pas été totalement efficace. Il convient de souligner la bonne acceptation de l’enquête ainsi que le peu de réticences des personnes à répondre sur des questions pourtant très personnelles. Un certain nombre d’éléments de contexte expliquent les évolutions qui ont eu lieu entre l’enquête HID et le projet Handicap‐Santé. La loi du 11 février 2005 a notamment conduit à introduire dans le questionnaire beaucoup plus d’éléments sur la participation des personnes handicapées au marché du travail ou à la formation. Une autre contrainte assez forte a consisté à insérer le projet Handicap Santé au sein des contraintes européennes qui sont en train de se monter à titre volontaire et expérimental mais qui intègrent un mode opératoire qui imposera l’organisation d’une enquête tous les cinq ans avec une dominante centrée en alternance sur le handicap et sur la santé. La publication par l’OMS de la CIF a également eu un impact sur le questionnaire. Le questionnaire Le questionnaire se caractérise par toute une série d’interactions entre l’état de santé fonctionnel de la personne, les facteurs environnementaux et enfin la dimension propre à la limitation d’activité ou à la restriction de participation sociale. La partie concernant l’état de santé fonctionnel de la personne débute par quelques questions assez générales sur l’état de santé de la personne avant de lister une cinquantaine de maladies, essentiellement les plus courantes en France, en essayant de relever, le cas échéant, les circonstances d’apparition. D’autres questions portent sur l’état de santé bucco‐dentaire avant deux nouvelles listes de déficiences concernant les problèmes moteurs puis les problèmes psychologiques, sensoriels et de langages, là encore avec une exploration des circonstances. Le troisième module porte sur les limitations fonctionnelles, à savoir le 38 Direction régionale de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale Agence régionale de santé Plate‐forme d’observation sociale PAYS DE LA LOIRE Handicap, perte d’autonomie 30 novembre er
1 décembre 2010 ‐ Nantes 39 repérage des « difficultés à faire » au travers d’un certain nombre de questions très précises. Le second volet de l’enquête porte sur les restrictions d’activité et de participation sociale. L’acronyme anglais « ADL » correspond aux activités de la vie quotidienne (activities of daily living) et le « I » de « IADL » renvoie à la notion de « instrumental » ou « accessoire », c’est‐
à‐dire que les ADL s’attachent aux activités les plus vitales et basiques (manger, s’habiller etc...) quand les IADL ont trait à des activités un peu plus sophistiquées (faire les courses, répondre au téléphone etc...). L’enquête mesure l’intensité des restrictions et distingue les aides (humaines ou techniques) effectives de celles dont la personne aurait besoin. La participation sociale est surtout mesurée via un questionnement concernant la scolarité, l’accès à l’emploi et les revenus de la personne avant de passer à quelques questions relatives aux loisirs. Enfin, le volet sur l’environnement propose tout d’abord une liste des aides techniques en lien avec les déficiences déclarées pour voir si elles sont utilisées ou si des besoins ne sont pas satisfaits. Pour l’environnement familial, il s’agit de voir quels sont les contacts de la personne enquêtée avec sa famille ou des amis. C’est aussi à cet endroit de l’enquête qu’il est possible de repérer les aidants non professionnels. La partie complémentaire sur l’environnement intègre des questions concernant l’aménagement du logement et son accessibilité. En institutions, seuls les déplacements hors de l’établissement sont pris en compte. Enfin, le dernier item porte sur la discrimination ressentie en raison de l’état de santé ou de la situation de handicap. Les perspectives S’agissant des perspectives, il ressort qu’enquêter à un niveau régional serait d’un coût prohibitif, sachant que la précision d’un sondage dépend essentiellement du nombre de personnes interrogées et ce quasi indépendamment de la taille de la population toute entière. Or si le fait d’enquêter auprès de 20 000 personnes sur la France entière reste assez facile, interroger 20 000 personnes par département reviendrait, de fait, à sonder grosso modo 2 millions d’habitants. Six départements (Nord, Pas‐de‐Calais, Rhône, Hauts‐de‐Seine, Martinique et Guadeloupe) ont toutefois conduit des enquêtes auprès de 3 000 personnes, ce qui permet déjà d’obtenir des renseignements intéressants. Une autre méthode possible est celle dite des « petits domaines » mais elle est difficile à mettre en œuvre et coûteuse en moyens humains. Elle consiste à corriger l’information nationale en appliquant un « effet de structure » local en intégrant, par exemple, une caractéristique propre à une région donnée quand cette même caractéristique se trouve être déterminante pour telle ou telle pathologie. Une des difficultés est qu’il convient de mettre en œuvre un modèle différent pour chaque indicateur retenu. Pour autant l’enquête filtre a déjà permis d’obtenir un certain nombre d’informations locales assez intéressantes et qui peuvent contribuer à des débuts de modélisation.
La thématique des « aidants » dans les enquêtes Handicap‐Santé Sylvie EGHBAL ‐ TEHERANI DREES Les enquêtes Handicap‐Santé ont abordé la thématique de l’aide humaine dispensée en raison d’un problème de santé ou d’un handicap selon deux approches : ‐ le point de vue de la personne aidée (avec comme vecteur l’enquête Handicap‐Santé ménages (HSM)) ; ‐ le point de vue de l’aidant, lequel a fait l’objet d’une enquête spécifique « Aidants informels » (HSA) réalisée dans la continuité de HSM. L’aide humaine dans l’enquête Handicap‐
Santé ménages (HSM) Que l’aide soit le fait d’aidants professionnels ou de personnes de l’entourage, l’enquête permet d’éclairer les sujets suivants : qui sont les personnes qui expriment un besoin d’aide humaine, qui sont les personnes aidées, par qui sont‐elles aidées, quelle est la nature de l’aide reçue, sa fréquence et son volume, quels sont les liens entre la personne aidée et son (ou ses) aidant(s). Les questionnements sur l’aide humaine dans HSM sont de deux types. Tout d’abord, toute personne enquêtée dans HSM signalant des difficultés ou une impossibilité à réaliser une activité comme manger, se laver, sortir de son logement, etc. devait préciser si elle avait recours à l’aide d’un tiers, professionnel ou non, ou bien si le recours à un tiers aurait pu lui être utile. Par ailleurs, un module spécifique détaillait, pour chaque aidant professionnel ou informel intervenant régulièrement auprès de la personne pour des raisons de santé ou de handicap, la nature de l’aide apportée ainsi que ses principales caractéristiques. La personne aidée pouvait citer jusqu’à dix aidants informels et six aidants professionnels. La notion de « régularité » n’a volontairement pas été normée ; il appartenait à la personne aidée enquêtée de décider elle‐même si l’aide reçue était ou non régulière. Pour être pris en compte, le professionnel devait se déplacer au domicile de la personne aidée pour apporter une aide dans l’accomplissement de tâches de la vie quotidienne (l’acte médical stricto sensu était exclu afin de se concentrer sur la notion de compensation). S’agissant des aidants non professionnels, l’aide pouvait être dispensée pour réaliser des tâches quotidiennes (ménage, repas, toilette, etc…), mais également être des aides financières ou du soutien moral. Ces aidants non professionnels pouvaient vivre avec la personne aidée ou résider dans un autre logement. L’enquête a donc privilégié une approche large de l’aide apportée, tout en ménageant la possibilité d’étudier plus spécifiquement certains types d’aides en particulier. Quelques résultats de l’enquête HSM Il s’agit là de tous premiers résultats, sachant que des études sur la thématique de l’aide sont en cours à la Drees ainsi 40 Direction régionale de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale Agence régionale de santé Plate‐forme d’observation sociale PAYS DE LA LOIRE Handicap, perte d’autonomie 30 novembre er
1 décembre 2010 ‐ Nantes 41 que dans d’autres organismes comme la Cnav par exemple. D’autres résultats et d’autres analyses devraient donc être disponibles très prochainement. Plus de six millions de personnes âgées de 5 ans et plus vivant à domicile déclarent être régulièrement aidées en raison d’un handicap ou d’un problème de santé, 5,5 millions recevant l’aide d’un ou de plusieurs proches et 2,3 millions l’aide d’un ou plusieurs professionnels. Il apparaît que 63 % des personnes aidées le sont uniquement par leur entourage et 14 % uniquement par des professionnels, les 23 % restant cumulant les deux types d’aides. L’aide informelle revêt évidemment un caractère essentiellement familial, sachant que 92 % des personnes soutenues par leur entourage le sont par un membre de leur famille. L’analyse par tranche d’âge fait apparaître une proportion de personnes aidées nettement plus élevée à partir de 75 ans, que ce soit pour l’aide apportée par des proches ou par des professionnels. Au‐delà de 85 ans, plus de 50% des personnes aidées ont recours à une aide « mixte ». L’enquête « Aidants informels » (HSA) Les objectifs de cette enquête sont de connaître le nombre d’aidants non professionnels et leurs caractéristiques propres, de décrire les conditions et la qualité de vie de ces aidants, de caractériser la nature de l’aide apportée et d’en appréhender les répercussions sur leur vie professionnelle et familiale. Elle permet aussi d’aborder les représentations économiques que les aidants peuvent avoir de l’aide apportée. L’enquête Handicap‐Incapacités‐
Dépendance (HID) de 1998‐2001 s’était déjà intéressée à cette problématique mais en se limitant à l’aidant le plus proche. Ici tous les aidants de l’entourage cités dans le module spécifique de l’enquête HSM ont été interrogés dès lors que la personne aidée avait accepté de fournir leurs coordonnées. Le champ de l’enquête est donc celui des personnes aidant régulièrement quelqu’un de leur entourage âgé de plus de cinq ans et vivant en logement ordinaire, pour accomplir des tâches de la vie quotidienne ou en le soutenant financièrement ou moralement, l’aide étant apportée pour des raisons de santé ou de handicap. Il faut, en outre, que ces aidants aient 16 ans ou plus. Sur les 10 000 aidants informels cités dans HSM, 7 300 coordonnées ont été transmises et ont pu être exploitées et 4 900 personnes ont répondu in fine à l’enquête HSA. Les premiers résultats font état de l’existence de 8,3 millions d’aidants informels de 16 ans ou plus. Parmi eux, 4,3 millions aident au moins une personne de leur entourage âgée de 60 ans ou plus. Six aidants sur dix sont des femmes. Si les 55‐65 ans sont ‐ comme on pouvait le penser ‐ les plus nombreux, les aidants sont présents dans toutes les classes d’âge : ainsi par exemple, 32% des aidants ont entre 30 et 49 ans, 10% plus de 75 ans et 11% moins de 30 ans. Près de la moitié des aidants informels déclare occuper un emploi ou être apprenti ; un tiers sont retraités ou retirés des affaires. Parmi ceux qui n’occupent pas d’emploi et qui ne sont ni retraités, ni étudiants, 8 % déclarent ne pas ou ne plus travailler précisément pour aider un de leurs proches. L’enquête « Santé, Handicap et Travail », complémentaire à l’enquête Emploi 2007 Valérie ULRICH DARES (Ministère du Travail et de l’emploi) L’enquête « Santé, Handicap et Travail » élaborée par l’Insee avec le concours de la Dares s’appuie sur un modèle européen obligatoire. Ce dernier portait en 2007 sur la question des accidents du travail et de la santé au travail mais la France a décidé d’étendre ces questions aux problèmes de handicap et de santé de longue durée. Le module européen intégrait notamment onze variables obligatoires et qui conditionnent énormément la teneur du questionnaire. Il convient également de préciser qu’Eurostat n’impose pas là des « questions » mais des « variables », ce qui rend encore un peu plus difficiles les comparaisons entre pays. Les objectifs européens propres à cette enquête de 2007 étaient de mesurer la prévalence des accidents du travail et des maladies professionnelles ainsi que les risques sur le lieu de travail. En France, suite à une demande de la Dares, l’enquête a donc été étendue à la question de l’insertion des personnes handicapées sur le marché du travail. L’idée était notamment de compléter la vision apportée par les données administratives issues de la déclaration obligatoire d’emploi de travailleurs handicapés (DOETH). En effet, ces données ne portent que sur les établissements de plus de 20 salariés et fournissent donc une situation incomplète de la situation des personnes handicapées dans le monde du travail. Il s’agissait également d’évaluer les éventuels premiers effets de la loi de 2005 tout en établissant des comparaisons avec le module européen de 2002 qui portait cette fois‐ci sur le handicap. En termes de méthodologie, comme pour l’enquête Handicap et Santé/ménages les personnes ont été interrogées à leur domicile avec au maximum deux personnes de 15 ans et plus interrogées par ménage. Il convient de souligner que les personnes vivant dans des établissements étaient totalement écartées de l’enquête. Les enquêteurs ont essayé autant que possible d’interroger la personne elle‐même, la réponse par procuration ou par le biais d’un « proxy » n’étant autorisée que si la personne n’était pas apte à répondre seule. Environ 37 000 personnes ont été interrogées au travers de cette enquête, laquelle se décomposait en quatre thèmes : ‐ les problèmes de santé rencontrés aux cours des 12 derniers mois avec un ciblage sur le problème le plus grave ; ‐ les accidents et les arrêts de travail survenus au cours des 12 derniers mois ; ‐ les emplois particuliers et les démarches pour obtenir une reconnaissance du handicap ou de la maladie ; Il s’agit là de la partie la plus « franco‐
française », c’est‐à‐dire celle qui a été ajoutée au module européen. ‐ et enfin les risques sur le lieu de travail. Contrairement donc aux prescriptions de la CIF, l’enquête évoque les problèmes de santé avant d’en venir dans un second temps aux questions environnementales. Toute la différence entre les pays tient dans la façon de déterminer ce que pouvait être ce « problème le plus 42 Direction régionale de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale Agence régionale de santé Plate‐forme d’observation sociale PAYS DE LA LOIRE Handicap, perte d’autonomie 30 novembre er
1 décembre 2010 ‐ Nantes 43 grave ». En France le choix s’est porté sur une méthode où il était demandé dans un premier temps à la personne de lister l’ensemble de ses problèmes de santé avant de déterminer dans un second temps quel était celui qui lui paraissait le plus grave. D’autres pays ont adopté une méthode plus directe en demandant directement à la personne de définir quel est ce problème le plus grave. Ceci est notamment vrai pour les pays qui ont opté pour une enquête par téléphone. La liste française mentionnait notamment les problèmes de dos ou les difficultés liées au stress, autant de facteurs qui attiraient assez facilement les personnes vers une réponse positive. Du coup la France s’est révélée beaucoup plus « malade » que les autres pays, à tel point qu’Eurostat préfère publier les statistiques en moyenne « hors France » car l’écart apparaît trop grand pour être réellement significatif. Le questionnaire s’attache ensuite à demander si ce problème de santé le plus grave entraîne une gêne au travail pour ceux qui occupent un emploi ou entraîne une difficulté à trouver du travail pour ceux qui sont au chômage. Des questions portent également sur l’impact de ce problème sur les activités quotidiennes. La première enquête européenne de 2002 sur l’insertion professionnelle des personnes handicapées n’avait pas permis de comparaisons valables entre les pays. La définition de la notion de « personne présentant un problème de santé de longue durée ou un handicap » n’avait, en effet, pas la même traduction selon les pays, d’où des résultats très hétérogènes allant de 6 % de la population en Roumanie à 32 % en Finlande (25 % pour la France). Le problème est qu’à partir du moment où une personne avait déclaré ne pas être concernée par un problème de santé de longue durée ou un handicap, elle était ensuite écartée du questionnaire. Un autre module prévu pour 2011 portera à nouveau sur l’insertion professionnelle des personnes handicapées. La conception du questionnaire est, encore une fois, difficile, sachant en outre qu’Eurostat souhaiterait pouvoir s’appuyer cette fois‐
ci sur la CIF et faire totalement table rase de l’enquête de 2002. De son côté, la France n’est pas totalement mécontente de son module de 2002 et s’est attachée à ce que le questionnaire de 2007 reprenne des questions posées cinq ans auparavant afin d’établir des comparaisons. Elle souhaitait donc que le module de 2011 ne reparte pas totalement de zéro. La tendance des experts était de respecter autant que possible les prescriptions de la CIF en mettant en avant les restrictions de participation au marché du travail et en évitant absolument d’inscrire d’emblée le lien entre santé et accès à l’emploi. Pour autant les tests effectués dans un certain nombre de pays autour d’un questionnaire qui s’attellerait dans un premier temps aux seules limitations dans la quantité de travail ont donné de très mauvais résultats. Du coup le questionnaire a été revu et démarre à nouveau par les problèmes de santé. ECHANGES AVEC LES PARTICIPANTS Emmanuelle CAMBOIS ‐ Avez‐vous cherché à savoir ce qui a motivé une partie des aidants cités à ne pas répondre à l’enquête Aidants ? Peut‐être les aidants qui exercent par ailleurs un emploi ont‐ils un peu moins répondu que les autres ? Sylvie EGHBAL‐TEHERANI ‐ Le rôle de l’enquêteur était déjà primordial pour le bon cheminement depuis la personne aidée vers le contact avec l’aidant. Il apparaît également que le déficit porte surtout sur les aidants de rang 3 à 5 mais pas sur les aidants principaux. En d’autres termes, plus la relation était distendue, plus l’aidé était réticent à fournir les coordonnées de la personne aidante. Philippe PEPIN ‐ Une exploitation est‐elle prévue de l’enquête filtre préalable à l’enquête Handicap santé ? Gérard BOUVIER ‐ L’enquête filtre a fini par être considérée comme une enquête à part entière et non pas un simple outil statistique de filtrage. Le fichier est disponible et peut servir de base d’études. Une première synthèse de quatre pages a déjà été produite par l’Insee et l’Institut français de recherche sur le handicap (IFRH) a commencé à plancher sur la question. Les extensions départementales que j’ai mentionnées s’attachent, quant à elles, aux données de l’enquête/ménages mais pas à celles de l’enquête/filtre. Joël GUIST’HAU ‐ La thématique des aidants est effectivement extrêmement importante. A cet égard, l’enquête a‐t‐elle permis d’approcher l’impact des dispositifs d’aide aux aidants ? Qu’en est‐il également de l’articulation entre aidants informels et aidants professionnels ? Comment les premiers se projettent‐ils dans l’avenir vis‐à‐vis d’un éventuel recours à des aidants professionnels ? La mise en place d’un service professionnel d’aide conduit‐elle à une forme de désengagement de l’aidant informel ou bien intervient‐elle au contraire en soutien de son action ? Sylvie EGHBAL‐TEHERANI ‐ L’enquête ne comprenait pas de questionnement sur les dispositifs d’aide aux aidants. Une question cherchait à identifier si la personne était ou non bénéficiaire de l’APA mais il apparaît que le chiffre de bénéficiaires déclarés est bien inférieur à celui fourni par les sources administratives. Beaucoup de personnes ne sont pas en mesure de dire si elles sont bénéficiaires de l’APA, une des raisons tenant certainement dans le fait que de nombreux intervenants professionnels sont payés directement par les Conseils généraux. L’enquête ne comprenait pas non plus de questions sur l’articulation et l’éventuelle complémentarité entre aidants informels et aidants professionnels. Pascale ROUSSEL ‐ A partir de quel moment un cohabitant est‐il déclaré comme aidant naturel ? Est‐il tenu compte de la nature du lien ou de la nature des tâches effectuées ? Ces éléments jouent certainement un rôle dans la « sous déclaration » des aidants. Sylvie EGHBAL‐TEHERANI ‐ Toutes ces questions font partie des sujets d’études sur lesquels des progrès restent à effectuer. Le conjoint est, le plus souvent, déclaré comme aidant, avec cependant des disparités assez fortes selon que l’aidant est un homme ou une femme. 44 Direction régionale de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale Agence régionale de santé Mesurer l’autonomie des personnes vivant à domicile Yara MAKDESSI, Séverine DOS SANTOS DREES L’étude présentée fait partie des premiers travaux réalisés par la Drees à partir des enquêtes Handicap‐Santé. Elle s’intéresse aux adultes âgés de 20 ans et plus habitant en ménage ordinaire en France en 2008. Plate‐forme d’observation sociale PAYS DE LA LOIRE Handicap, perte d’autonomie 30 novembre er
1 décembre 2010 ‐ Nantes 45 Mesurer l’autonomie : le choix des données Pour mesurer l’autonomie des personnes, c’est une approche par les limitations fonctionnelles et les restrictions d’activités qui a été privilégiée. En effet, cela permet d’avoir une vision la plus globale possible de la situation d’autonomie de la personne, et de s’approcher du cadre général de la CIF. Les différentes questions portant sur les incapacités dressent un tableau assez précis de ce que la personne parvient à réaliser au quotidien, seule, avec ou sans difficultés, et avec ou sans aide. Elles renseignent relativement bien sur la participation sociale de la personne tout en intégrant des questions concernant les facilitateurs de son environnement immédiat. Enfin, les questions sont relativement bien détaillées et s’appuient sur un questionnement systématique qui tient une place centrale dans l’enquête. D’une part, les limitations fonctionnelles permettent de traduire la capacité (totale, partielle ou l’incapacité) à accomplir un certain nombre d’actes faisant appel à des fonctions physiques (motrices et sensorielles) ou cognitives. Les limitations motrices portent sur la motricité générale (marcher, se baisser/s’agenouiller, lever un bras…) et sur la motricité fine (se servir de ses doigts ou de ses mains pour manipuler des objets), les limitations sensorielles renseignent sur l’ouïe et la vue. Les limitations cognitives, quant à elles, renseignent sur l’orientation spatiale et temporelle, la concentration, les problèmes de comportement ou encore la résolution de problèmes de la vie quotidienne. D’autre part, les restrictions d’activités permettent d’évaluer le degré de difficulté à réaliser certaines activités de la vie quotidienne. On distingue sept activités essentielles de la vie quotidienne dites « ADL, Activities of daily living » (comme manger/boire, éliminer, se laver, s’habiller, se coucher, s’asseoir,…) et douze activités instrumentales dites « IADL, Instrumental activities of daily living » (comme préparer les repas, faire ses courses, se déplacer dans le logement, sortir du logement, utiliser les transports,…). Pour chaque activité, il est demandé si la personne est capable de la mener à bien seule. Si la réponse est négative, des questions complémentaires permettent d’évaluer le degré de difficulté et de préciser les aides disponibles et celles dont la personne aurait besoin. En confrontant l’ensemble des données relatives aux limitations fonctionnelles et aux restrictions d’activité, quatre degrés d’autonomie ont pu être identifiés : ‐ les personnes « autonomes » ; ‐ les personnes en situation d’autonomie modérée ; il s’agit de personnes pour lesquelles certaines capacités fonctionnelles ‐ notamment motrices ‐ commencent à présenter quelques altérations et qui connaissent également quelques restrictions dans les activités quotidiennes qualifiées d’instrumentales IADL ; ‐ les personnes fortement dépendantes, se caractérisent par plusieurs incapacités sur les activités IADL et souffrent de limitations physiques totales ; ‐ et enfin, les personnes très fortement dépendantes, pour qui l’ensemble des activités essentielles du quotidien (ADL) ne peuvent être réalisées de manière autonome. Commentaire des résultats obtenus : profils des personnes selon l’âge et le degré d’autonomie Les situations de handicap variant fortement avec l’âge, une première analyse a permis de distinguer quatre groupes : les 20‐39 ans, les 40‐59 ans, les 60‐79 ans et enfin les 80 ans et plus. C’est la proportion des personnes très fortement dépendantes qui détermine les seuils entre les groupes d’âge (graphique : répartition des degrés d’autonomie par âge). Les quatre degrés d’autonomie présentés plus haut se retrouvent pour les différentes tranches d’âge, excepté pour le groupe des 20‐39 ans qui ne comporte que deux profils : les autonomes et les très dépendants. Ces derniers sont bien sûr peu nombreux mais présentent des caractéristiques très spécifiques en termes de limitations fonctionnelles et de restrictions d’activités (graphique : Six profils de 20‐59 ans). ‐ Dans le groupe des 20‐39 ans, 99 % sont autonomes et 1% sont dépendants. Ces jeunes adultes en situation de dépendance se distinguent par une forte prépondérance des problèmes moteurs : 80 % présentent au moins une limitation physique absolue et la quasi‐totalité déclare une restriction totale d’activité IADL. Tous reçoivent une aide de l’entourage, mais 75 % la jugent insuffisante. Les hommes sont surreprésentés dans ce profil. ‐ Parmi les individus âgés de 40 à 59 ans, 93 % sont autonomes, 6 % en perte d’autonomie, 1 % sont fortement dépendants et très peu sont très fortement dépendants. Une des particularités de ce groupe tient à la proportion non négligeable de limitations cognitives. Ainsi ces dernières se distinguent parmi les personnes définies comme « autonomes » ; chez les personnes en perte d’autonomie, elles devancent les restrictions d’activité IADL ; et dans le profil des fortement dépendants la proportion de personnes souffrant de limitations cognitives est plus élevée que dans le groupe des très fortement dépendants. Les très fortement dépendants ont, quant à eux, un profil similaire à ceux observés chez les plus de 60 ans, mais si tous déclarent bénéficier d’une aide ils sont toutefois 70% à la juger insuffisante. Le groupe des personnes âgées de 60 ans ou plus rassemble divers profils (graphique : Huit profils des 60 ans et plus). ‐ Parmi les individus âgés de 60 à 79 ans, 83 % sont autonomes, 14 % en perte d’autonomie, 3 % sont fortement dépendants et moins d’1% très fortement dépendants. ‐ Chez les 80 ans ou plus, 59 % sont relativement autonomes, 27 % modérément autonomes, 11 % fortement dépendants et 3% très fortement dépendants. Les limitations physiques sont celles qui touchent en premier les individus puisque parmi le groupe des 60 à 79 ans, dès le profil 2 qui rassemble les situations d’autonomie modérée, 60 % des personnes déclarent une limitation physique absolue (incapacité totale). Les restrictions d’activité IADL qui résultent des limitations fonctionnelles (i.e. une personne ne pouvant porter une charge sera totalement limitée pour faire ses courses seule) touchent, dès le deuxième profil, 40 % des personnes de 60‐79 ans et plus de 75 % chez les 80 ans ou plus. 46 Direction régionale de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale Agence régionale de santé Les fortes restrictions dans les activités élémentaires et vitales du quotidien (ADL) marquent le profil des personnes fortement dépendantes et s’accentuent chez les personnes très fortement dépendantes. Elles altèrent principalement les capacités à se laver et à s’habiller. Chez les personnes très fortement dépendantes de 80 ans ou plus, tous les individus combinent une limitation physique, une restriction d’activité ADL et une restriction d’activité IADL. Plus des deux tiers de ce groupe sont confinés au lit et 80% souffrent d’une paralysie (totale ou partielle). Ils bénéficient tous de l’aide de leur entourage et 80% sont aidés par des professionnels. Plate‐forme d’observation sociale PAYS DE LA LOIRE Handicap, perte d’autonomie 30 novembre er
1 décembre 2010 ‐ Nantes 47 Croisement des résultats avec quelques indicateurs de dépendance Évaluer les niveaux d’autonomie des personnes vivant à leur domicile en s’appuyant sur les incapacités apporte quelques éléments nouveaux par rapport aux résultats des indicateurs classiques de dépendance. Quelques exemples sont ici repris. En croisant les différents profils décrits plus haut avec d’une part l’indicateur de mobilité de Colvez12 et d’autre part l’indicateur de Katz13, il ressort clairement que les résultats des indicateurs repèrent bien les personnes en situation de forte dépendance, mais demeurent peu pertinents pour décrire les autres degrés de dépendance, et les 12
L’indicateur Colvez calcule la dépendance (le besoin d’aide) en mesurant la perte de mobilité selon quatre groupes : les personnes confinées au lit ou en fauteuil, les personnes non confinées ayant besoin d’aide pour la toilette et l’habillage, les personnes ayant besoin d’aide pour sortir de leur domicile sans appartenir aux groupes précédemment cités et les autres personnes. 13
L’indicateur de Katz sert à évaluer la capacité qu’a une personne à réaliser seule six activités de la vie quotidienne correspondant toutes à des ADL. situations intermédiaires ou de perte d’autonomie (graphiques : Indicateur de Colvez selon les profils et Indicateur de Katz selon les profils). Le calcul de l’équivalent GIR selon la grille AGGIR appliqué à l’enquête Handicap‐
Santé auprès des ménages évalue la perte d’autonomie de la personne âgée de 60 ans ou plus en repérant ce qu’elle effectue ou non seule mais sans prendre en compte si elle dispose d’une aide. En croisant les groupes iso‐ressources (GIR) calculés et les huit profils décrits plus haut à partir des incapacités, le même constat peut être tiré : les GIR estimés décrivent principalement les situations de forte dépendance. Les limites et intérêts d’un calcul du GIR en population générale ont été questionnés et font l’objet d’un travail de réflexion en cours. Enfin, une question du mini‐module européen sur les limitations a été étudiée : elle recueille le nombre de « personnes limitées (modérément, fortement ou pas du tout) depuis au moins six mois, à cause d’un problème de santé, dans les activités que font les gens habituellement ». Parfois considérée comme une synthèse des limitations fonctionnelles et des restrictions d’activité, différentes études14 ont démontré le large champ que cette question recouvre et les divers profils de personnes concernées. Croisée avec les profils décrits plus haut pour les personnes âgées de 20 ans ou plus, on constate, sans surprise, que l’âge est une 14
Entre autres : Sur les données HID, I. Ville, JF. Ravaud et A. Letourmy, 2003, « Les désignations du handicap : des incapacités déclarées à la reconnaissance administrative », in. Revue française des affaires sociales, n°1‐2. Sur les données de l’enquête santé 2002‐2003, JL. Lanoë, Y. Makdessi, 2005, « L’état de santé en France en 2003 », Études et Résultats, DREES, n°436. des variables les plus liées : plus les personnes sont âgées, plus la proportion se déclarant limitée est importante. En revanche, si cette question est fortement liée aux déclarations de limitations fonctionnelles et de restrictions d’activités, la corrélation n’est pas absolue. En effet, alors que toutes les personnes repérées comme dépendantes déclarent être limitées, une part non négligeable, et croissante avec l’âge, de personnes se sentant limitées ne déclarent pas pour autant des limitations ou des restrictions fortes dans leurs activités (graphique : Indicateur européen selon les profils). La question synthétique européenne sur les limitations paraît davantage en liant avec les restrictions d’activité élémentaires (les IADL) et les limitations fonctionnelles cognitives et beaucoup moins avec les limitations fonctionnelles motrices et les restrictions d’activités essentielles (les ADL). Or, ce sont ces dernières qui caractérisent le plus les personnes très dépendantes comme il est montré plus haut. Pour des résultats plus détaillés sur les profils : Dos Santos S. et Makdessi Y., Une approche de l’autonomie chez les adultes et les personnes âgées. Premiers résultats de l’enquête Handicap‐Santé 2008. DREES. Études et résultats, n°718, 2010 (février). 48 Direction régionale de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale Agence régionale de santé Evolution de l’espérance de vie sans incapacité et déterminants sociaux du handicap Emmanuelle CAMBOIS INED Plate‐forme d’observation sociale PAYS DE LA LOIRE Handicap, perte d’autonomie 30 novembre er
1 décembre 2010 ‐ Nantes 49 L’émergence au fil du temps de générations de plus en plus âgées a conduit à mesurer les conséquences de l'allongement de l’espérance de vie sur l'état de santé de la population à des fins d’évaluation des besoins en matière de soins et d’aide. L'allongement de l'espérance de vie correspond à une survie plus importante de personnes plus fragiles et plus exposées aux maladies ainsi qu'à l’émergence de nouvelles maladies auparavant censurées par une mortalité forte ; la maladie d’Alzheimer ou la dégénérescence maculaire en étant des exemples frappants. Enfin, l’allongement de la durée de vie s’accompagne de l’apparition d’états de santé et de situations de plus en plus complexes avec des combinaisons de maladies et de troubles fonctionnels. Par conséquent, si la survie est indéniablement plus longue, l’important est de mesurer dans quel état de santé les personnes vivent. Comme le rappelait un rapport de l’OMS en 1984 : « Il ne suffit pas d’ajouter des années à la vie : il faut aussi ajouter de la vie aux années. » Partant de ces conclusions, un indicateur démographique « l’espérance de vie en santé » est venu compléter l’indicateur d’espérance de vie. Il permet de combiner les tables de la mortalité classiques avec des indicateurs de santé, pour chiffrer le nombre d’années qu’un individu pourra vivre en bonne ou en mauvaise santé. Il permet aussi de mettre en évidence les différences entre catégories de populations et, de suivre l'évolution de l'état de santé pour planifier les besoins futurs. Cadre conceptuel, indicateurs et espérances de vie en santé Au début des années 1990 la question du chiffrement des personnes dépendantes commençait à se poser. Une certaine confusion régnait quant à la manière de définir la dépendance et de repérer cette population et les estimations variaient considérablement selon la nature et les objectifs des études qui étaient mises en œuvre. Dans le modèle élaboré par Wood et repris par l'Organisation mondiale de la santé, la "classification internationale du handicap", le handicap est décrit comme un processus. En amont, la maladie, l’accident, la malformation ou le vieillissement biologique viennent impacter le fonctionnement des individus sous la forme de déficiences, qui peuvent elles‐mêmes induire des limitations fonctionnelles physiques, sensorielles ou mentales. Celles‐ci peuvent à leur tour donner lieu à des gênes dans les activités de la vie quotidienne, voire déboucher sur des situations de dépendance. Par exemple la dégénérescence maculaire (maladie) atteint le macula (déficience) provoquant des difficultés à voir les détails (limitations fonctionnelles visuelles) : cette atteinte conduit à des restrictions d'activité, telles que lire ou conduire, exposant au risque d’isolement ou de dépendre d’un tiers pour des activités quotidiennes. L’intérêt d’étudier ce phénomène dans son détail est que le processus de la maladie n’est pas inéluctable et peut être inversé. Si les atteintes fonctionnelles surviennent, il est également possible dans certains cas de prévenir ou de retarder les gênes dans les activités : les facteurs environnementaux et les ressources individuelles de la personne vont jouer à chacune des étapes permettant de compenser les limitations et de conserver son indépendance dans la réalisation des activités essentielles. La présente analyse se concentrera uniquement sur deux niveaux : celui des limitations fonctionnelles et celui des restrictions d’activités. Cette distinction est importante dans le sens où elle permet de différencier des situations dans lesquels les besoins sont différents. Les limitations fonctionnelles relèvent plutôt d’aides techniques, d’aménagement du domicile ou de l’environnement professionnel alors que les gênes dans les activités renvoient plutôt à des situations d’assistance, de prestations ou de pensions qui vont permettre à la personne d’assurer sa vie quotidienne. La situation en France : tendances évolutions et disparités En 2003, les troubles fonctionnels occupent à peu près un tiers de la vie après 65 ans. Le nombre d’années de vie passées avec des gênes dans les activités du quotidien reste heureusement assez limité. On dénombre près de 9 % des hommes et 12 % des femmes de plus de 65 ans ayant des difficultés dans les activités de soins personnels (ADL), reconnu comme une situation de handicap sévère. Si les femmes ont une espérance de vie plus longue, elles subissent également plus d’années de vie avec des troubles fonctionnels et des restrictions ADL. La survenue de gênes dans les activités domestiques dites « instrumentales » ou IADL (s’occuper des courses, préparer la cuisine etc…) vient beaucoup plus tôt dans la vie des femmes, certainement parce que ce sont encore très majoritairement elles qui ont la charge de ces activités quotidiennes. Entre 1980 à 2003 l'espérance de vie a augmenté en France : le nombre d'années vécues sans limitation fonctionnelles a eu tendance à stagner et celui des années vécues sans restrictions d'activité à augmenter... Les années de vie gagnées ont été des années de troubles fonctionnels mais sans situations lourdes. Les avancées médicales, sanitaires et sociales ont permis de gagner sur le front de la mortalité et de la santé : les troubles fonctionnels, sont assez présents mais n’ont pas induit plus de situations lourdes de dépendance. Les inégalités sociales sont cependant très fortes. Les populations ouvrières subissent ainsi une forme de « double peine » avec plus d’années d’incapacité dans une espérance de vie plus courte. A 35 ans, l’espérance de vie sans troubles fonctionnels est de dix années plus élevée chez les cadres que chez les ouvriers. De leur côté, les femmes ouvrières n’ont quasiment pas plus d'années d’espérance de vie sans troubles fonctionnels que leurs collègues masculins. Les inégalités sociales apparaissent bien avant l’âge de la retraite puisque même sur les 15 années à vivre entre 50 et 65 ans, les ouvriers n’ont plus que huit années sans troubles fonctionnels contre 12 ans pour les cadres. D’une manière générale, les professions manuelles sont fortement exposées aux limitations fonctionnelles et ceci vaut aussi bien pour les ouvriers que pour les agriculteurs, malgré une espérance de vie plus élevée pour ces derniers. 50 Direction régionale de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale Agence régionale de santé Plate‐forme d’observation sociale PAYS DE LA LOIRE Handicap, perte d’autonomie 30 novembre er
1 décembre 2010 ‐ Nantes 51 La situation internationale : estimations d’EVSI à travers le Monde Des études menées en Finlande, en France ou encore en Angleterre ont montré que les maladies chroniques déclarées avaient progressé depuis les années 60 jusqu’aux années 90. Cette augmentation est notamment due à une meilleure connaissance de ces maladies ainsi qu’à l’allongement général de la durée de vie avec ce type de maladies. Certains pays ont également mesuré une augmentation des limitations fonctionnelles, sensorielles et physiques. Là encore la survie de personnes plus fragiles intervient certainement comme un facteur d’explication. A contrario, les USA enregistrent une diminution du nombre d’années vécues avec des limitations fonctionnelles et ce même dans le domaine des troubles cognitifs. Plus récemment, aux Etats‐Unis et en Suède des études ont mis en évidence chez les quinquagénaires une augmentation des difficultés ou du besoin d’aide pour leurs activités du quotidien. L’hypothèse est qu’il s’agirait là d’une génération qui se trouve dans une situation plus difficile ECHANGES AVEC LES PARTICIPANTS qu’auparavant pour les activités du quotidien. Les femmes de cet âge ont notamment figuré parmi les premières à être plus massivement engagées sur le marché du travail tout en assurant le même travail domestique que leurs aînées, dont elles doivent, de surcroît, désormais s’occuper en fin de carrière. Les dernières estimations françaises s'inscrivent dans ce contexte. La nette augmentation de l'espérance de vie sans restrictions d'activité observée jusque dans le début des années 2000 apparaît plus nuancée depuis. Les tendances semblent différentes chez les hommes et les femmes. Notamment, ces dernières semblent plus gênées dans les activités domestiques qu'elles ne l'étaient auparavant. Par ailleurs, les tendances semblent différentes parmi les quinquagénaires et les plus de 65 ans, ces derniers se trouvant dans une dynamique plus positive. Ces chiffres sont évidemment à manier avec précaution et il faudra étudier la manière dont évoluent ces tendances dans les années à venir et travailler sur les déterminants. François Tuffreau ‐ Comment s’opèrent concrètement les comparaisons entre des pays qui n’ont pas nécessairement le même système de protection sociale ni la même définition du handicap ou de la déficience ? Emmanuelle CAMBOIS ‐ Les estimations diffèrent en effet selon le contexte de chaque pays et selon le mode de collecte de l'information. Dans nos études, nous bâtissons nos conclusions d'abord en classant les indicateurs de manière à comparer des dimensions de l'incapacité comparables (limitations fonctionnelles, restrictions de type ADL, de type IADL etc…). Ensuite, pour chacune des dimensions, nous comparons les tendances d'évolution dans les pays plutôt que les niveaux. En effet, les niveaux dépendent en partie de la formulation des questions qui influence la propension des individus à déclarer des limitations fonctionnelles ou des restrictions d'activités (nombre d'items utilisés, degrés de sévérités appréhendés…). En revanche, la manière dont évoluent ces indicateurs dépendra davantage des dynamiques socio‐sanitaires en jeu. Nous travaillons beaucoup sur les questionnaires en amont pour consolider les travaux de comparaisons : au niveau européen, la revue systématique des questionnaires de l'enquête SILC faite par Eurostat a permis de rectifier certaines formulations de questions sur les limitations d'activité pour améliorer la comparabilité des indicateurs. François Tuffreau ‐ La grille AGGIR ne mesure que les activités que la personne effectue concrètement mais ne s’attache pas à ce qu’elle serait capable de faire. Comment l’enquête HSM intègre‐t‐elle cette problématique ? Emmanuelle CAMBOIS ‐ La grille AGGIR est un outil d'évaluation de l'aide et des soins à fournir aux personnes. On cherche donc à évaluer leurs atteintes (physiques, mentales) et les activités essentielles qu'elles ne font pas et pour lesquelles il est indispensable de les aider. Dans HSM, on évalue la situation des personnes. Pour les limitations fonctionnelles, on demande aux personnes enquêtées d'évaluer leur état fonctionnel, ce qui n'est pas évident. Pour ce faire, on présente des "situations" connues qui mobilisent les différentes fonctions et leur permettre d'évaluer leurs éventuelles limitations (pour monter et descendre les escaliers, marcher sur une certaine distance, manipuler de petits objets, entendre ce qui se dit dans une conversation…) : les questions ici portent sur la "capacité à faire" (pouvez‐vous, sans difficulté…) car on ne tient pas à savoir vraiment si la personne exécute ou non ces activités mais plutôt à "calibrer" les limitations fonctionnelles au travers de ces " scénarios". Pour les restrictions d’activité en revanche, tout l’intérêt est précisément de savoir si la personne effectue ou non des activités indispensable à l'indépendance dans les soins personnels, dans sa vie au domicile. Evaluer ce que la personne est potentiellement capable de faire est une tâche difficile sachant que cela dépend de son état fonctionnel mais aussi de son environnement et des ressources qu'elle peut mobiliser. L'enquête HSM permet plutôt de décrire de manière très détaillée les difficultés, le besoin d'aide, les aides reçues, les obstacles, etc… La comparaison des situations donne des indications sur les facteurs qui accroissent le potentiel. 52 Direction régionale de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale Agence régionale de santé La compensation des incapacités : premières estimations des usages d’aides techniques, aménagements de logements et aides humaines d’après l’enquête Handicap‐Santé Pascale ROUSSEL Maison des Sciences Sociales du Handicap, EHESP15
Plate‐forme d’observation sociale PAYS DE LA LOIRE Handicap, perte d’autonomie 30 novembre er
1 décembre 2010 ‐ Nantes 53 du mode de questionnement adopté pour les aides techniques, humaines ou adaptations de logement utilisées ou souhaitées. L’objectif est de décrire la situation d’une personne, en fonction de l’existence ‐ ou non ‐ d’une aide, que celle‐ci provienne de son entourage, de prestations de solidarité nationale, d’aide sociale ou d’action mutualiste, ou encore d’adaptations au logement qu’elle aura elle‐même choisies. Les données présentées ici concernent les aides techniques, les aménagements du logement et les aides humaines ainsi que la combinaison de ces trois formes de réduction des situations de handicap. Si le questionnaire a clairement essayé de traiter la question de la compensation, l’ampleur de ce sujet, la variété des situations individuelles et la pluralité des autres thèmes à étudier dans l’enquête ont inévitablement restreint les La notion de compensation dans le possibilités de détail du recueil de questionnaire HSM l’information et entraîné des difficultés La notion de compensation elle‐même ne au moment de l’analyse des données. figure pas dans la CIF, laquelle dissocie L’information sur les aides techniques est l’individu d’un côté et l’environnement recueillie différemment selon la nature de l’autre (dont font partie, il est vrai, les des aides. Vingt‐neuf aides sont « produits et systèmes techniques » ou répertoriées sur une carte présentée à la l’entourage familial) et suggère personne enquêtée avec une d’examiner l’interaction entre ces deux interrogation en deux temps : « quelle domaines. La compensation est, en aide technique portez‐vous ou utilisez‐
revanche, plus directement présente vous ? » puis « pouvez‐vous me dire de dans le questionnaire HSM compte tenu quelles aides vous auriez besoin ? ». 15
L’auteur actuellement à l’Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique, relevait du Centre Technique National Il peut être utile de rappeler, en premier lieu, que l’enquête Handicap‐Santé a été conçue sur un modèle adossé à la Classification Internationale du Fonctionnement, du Handicap et de la Santé (CIF). L’enquête Handicap‐Santé en ménages ordinaires (HSM) a la particularité de concerner tous les âges et tous les « états de santé ». Certains thèmes étudiés dans le questionnaire comprennent des questions à caractère individuel, d’autres visent très clairement à décrire les facteurs environnementaux (aides techniques, environnement familial, aménagement du logement et accessibilité etc...), d’autres encore sont envisagés sous forme plus interactive et établissent le lien entre les caractéristiques personnelles, les obstacles ou soutiens de l’environnement et les restrictions de participation (scolarité, emploi, loisirs, revenus, etc…). d’Etudes et de Recherches sur les Handicaps et les Inadaptations, lors de la tenue de ce colloque.
Ensuite, l’interrogation porte successivement sur treize aides, avec pour chacune trois modalités de réponse (« oui », « non mais j’en aurais besoin » et « non, je n’en ai pas besoin »). Cette absence d’homogénéité dans les modes de questionnement ne permet pas une harmonisation complète des résultats et semble quelque peu problématique pour l’analyse des données. La carte des vingt‐neuf aides est extrêmement large, et donc disparate, puisqu’elle inclut aussi bien des prothèses « internes » telles que les prothèses de hanche que des produits emblématiques de l’aide technique comme les déambulateurs ou fauteuils roulants. Il en va de même pour les treize aides prises séparément, qui portent aussi bien sur des outils techniques très répandus comme les appareils auditifs ou les loupes que sur d’autres d’usage beaucoup plus rare telles les baguettes buccales. Les précisions apportées au moment du recueil des données au sujet de la téléalarme ont permis d’éviter la confusion avec les alarmes contre le vol qui avait gêné l’exploitation de cette variable dans l’enquête HID. Compte tenu de l’importance de cette aide technique, il s’agit d’une amélioration essentielle. Par ailleurs, douze aménagements de logements sont proposés dont sept sont relativement importants (élargissement de portes, regroupement de pièces, adaptation de cuisine ou de salle de bain, etc…), deux des aménagements plus « légers » (barres d’appui, dispositifs lumineux) et enfin trois des aménagements de type mobilier (lit adapté, siège, tables, etc...). L’information relative à l’aide humaine a été recueillie de façon assez détaillée et elle est dispersée dans six modules de la base de données car elle comporte à la fois une information détaillée sur les actes pour lesquels une aide est apportée, sur les caractéristiques professionnelles ou personnelles des aidants et sur la description de l’entourage des personnes aidées. Néanmoins, l’essentiel de l’information sur la contribution de l’entourage non professionnel, et ses répercussions sur son organisation et sa qualité de vie, se situe dans l’enquête complémentaire auprès des aidants (enquête HSA). Quelques résultats provisoires L’enquête HSM permettait de recueillir une pluralité de déficiences pour chaque personne. Quatre‐vingt‐cinq millions de déficiences ont été déclarées, par près de quarante millions de personnes, dont près de dix‐huit n’ont déclaré que des déficiences visuelles simples excluant la cécité, la malvoyance et toute autre déficience. L’aide technique utilisée par une bonne part de ces dix‐huit millions de personnes, la paire de lunettes ne figure, du reste, dans aucune des listes citées plus haut. De nombreuses autres déficiences répertoriées, telles les gênes articulaires, les troubles anxieux ou les troubles de l’humeur ne donnent pas nécessairement lieu à compensation. Le rapprochement direct entre la notion de déficience et celle de compensation n’est donc guère envisageable. Seul est possible, dans certains cas, un travail à partir des limitations fonctionnelles ‐ notions proches de celles de déficiences ‐ ou de quelques limitations d’activité pour lesquelles il n’est pas trop risqué d’inférer la déficience qui se situe en amont. Ainsi en est‐il, par exemple, des questions relatives à l’audition mais ce cas de figure n’est pas très fréquent et moins simple qu’il n’y paraît au premier abord. La variété des aides techniques est telle, dans l’enquête HSM, que nombre d’entre elles ne renvoient pas au sens commun. 54 Direction régionale de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale Agence régionale de santé Plate‐forme d’observation sociale PAYS DE LA LOIRE Handicap, perte d’autonomie 30 novembre er
1 décembre 2010 ‐ Nantes 55 C’est notamment le cas des aides à caractère très médical comme les pacemakers ou les prothèses de hanche alors que d’autres, comme les bas de compression, apparaissent à peine liées à une déficience. Les chiffres d’utilisateurs d’une aide technique que fournit l’enquête ne correspondent donc pas forcément à la notion habituellement recherchée. Ces chiffres sont globalement stables en comparaison de ceux de 1998, en particulier ceux liés aux traitements médicaux et aux soins. En revanche, le nombre d’utilisateurs de chacune des aides a fréquemment augmenté, laissant penser que la pluri‐
utilisation s’est répandue, hypothèse cohérente avec l’âge élevé de la majorité des utilisateurs. Les aides techniques les plus répandues concernent les cannes et béquilles (environ 1,9 million d’utilisateurs) ainsi que les appareils auditifs (environ un million). L’augmentation du nombre d’utilisateurs de fauteuils roulants (près de 400 000) et de déambulateurs (près de 200 000) semble intuitivement logique alors que la diminution très significative du nombre d’utilisateurs de protections absorbantes pour faire face à l’incontinence est plus étonnante. Enfin, l’usage des bas de compression est apparemment en pleine explosion. Ces résultats doivent être analysés plus finement, le mode de déclaration était, en 2008, très différent de celui utilisé en 1998. Les adaptations de logement ont été déclarées par plus de deux millions de personnes. Toutefois les résultats, parfois étonnants à première vue, mériteraient d’être étudiés de façon approfondie avant que l’on en tire des conclusions définitives sur la prise en compte croissante de l’environnement dans le logement individuel. Ainsi, parmi les travaux ou les aménagements les plus fréquemment cités figurent les regroupements de pièces. Or ceux‐ci peuvent tout autant signifier le fait que la personne ne vit plus dans les mêmes pièces que par le passé ou correspondre à des aménagements à seule vocation esthétique. Dans ces cas, la notion de compensation par adaptation du logement ne serait pas présente. Les aménagements de salles de bains et le remplacement de la baignoire par une douche peuvent, quant à eux, renvoyer soit à une problématique d’adaptation soit à une anticipation du vieillissement, soit à un changement culturel plus général dans les modes de vie ou bien encore avoir été réalisés pour un autre membre du ménage que la personne enquêtée. Là encore l’approfondissement du travail est nécessaire pour en tirer des conclusions. L’adaptation la plus largement répandue, et peut‐être la plus fréquemment liée à l’état fonctionnel de la personne (en tout cas pour les personnes vivant seules à leur domicile) est la pose de dispositifs de soutiens (barres d’appui, main courante etc.). En matière de recours à une aide humaine, nous constatons la primauté habituelle de l’aide de l’entourage sous une forme bénévole et, le plus souvent familiale mais le cumul d’une aide de l’entourage et d’une aide professionnelle est également fréquent. En effet parmi les 4,3 millions de personnes déclarant recourir à une aide humaine, plus de 2,3 déclarent recourir exclusivement à une aide de leur entourage, alors que plus d’1,1 million déclarent recourir simultanément à une aide de leur entourage et à une aide professionnelle. Près de 750 000 personnes qui ne déclarent aucune déficience indiquent dans le même temps recourir à une aide humaine. Ceci pose à nouveau la question de la déclaration de la déficience dans HSM ; le questionnaire ayant omis toutes les déficiences viscérales et celles liées à la fatigue ou la douleur, pourtant susceptibles d’expliquer nombre de ces usages. Un autre phénomène peut expliquer une partie de ces déclarations d’aide chez des personnes n’ayant déclaré aucune déficience ; celui de l’inattention de l’enquêté à la fin de la question qui stipulait que ne devaient être indiquées que les aides liées aux problèmes de « santé ou de handicap ». Si l’on retient l’ensemble des aides relevant des trois catégories évoquées plus haut, plus de neuf millions de personnes utilisent une forme de compensation ou une autre. Le recours à l’aide technique, forme de compensation la plus répandue, est aussi la forme de recours la plus souvent utilisée isolément ; les recours à l’aide humaine ou à l’aménagement du logement étant plus fréquemment combinés à une autre forme de compensation. Tous les types d’usage de compensation augmentent avec l’âge. L’association de déficiences motrices et déficiences multiples favorise évidemment une pluralité de recours. Enfin, le recours à l’aide humaine, professionnelle ou profane, est largement concentré sur les personnes ayant déclaré des restrictions d’activité, celles ayant déclaré des déficiences mais pas de restriction d’activité étant caractérisées par un bien moindre recours à l’aide humaine. Le lien entre ces restrictions d’activités et aides techniques est beaucoup moins évident soit que l’aide soit là à titre de sécurité (barres d’appuis par exemple) soit que la question ait été posée dans le questionnaire en incluant d’emblée la possibilité de l’usage de l’aide technique, faisant potentiellement disparaître la restriction d’activité (cas des appareils auditifs). Il ressort donc de ces premières exploitations de l’enquête HSM que nombre d’éléments sont encore à étudier, notamment : ‐ le fait que près de 780 000 utilisateurs qui indiquent recourir à une compensation ne déclarent, dans le même temps, aucune déficience. Il faudrait donc se pencher un peu plus avant sur ces profils spécifiques pour examiner si l’utilisateur est bien la personne enquêtée et quel usage en est fait ; cela pourrait fournir une indication sur la probabilité d’une déficience non enregistrée dans le questionnaire; ‐ s’il conviendrait, pour la prochaine enquête, d’élargir le champ des déficiences au‐delà de celles qui figuraient dans le questionnaire, afin de mieux comprendre l’usage des formes de compensation ; ‐ si toutes les limitations d’activités essentielles susceptibles d’expliquer l’usage des compensations figurent bien dans le questionnaire (même s’il faut simultanément tenir compte du fait que des compensations comme la téléalarme ne servent pas à proprement parler à pallier une limitation d’activité). Une autre question importante, trop souvent délaissée, celle des besoins ressentis non satisfaits, n’est pas parfaitement résolue dans le recueil de données réalisées par HSM. Sur les aides techniques notamment, certaines personnes déclarent simultanément utiliser une aide et en avoir besoin, sans que l’on sache si l’individu exprime par là même que son aide « répond » à un besoin aujourd'hui satisfait ou, au contraire, qu’il aurait besoin du renouvellement de cette aide, désormais usagée ou inadaptée à l’évolution de son état. Dans ce domaine, le questionnement de l’enquête HSM est malheureusement moins satisfaisant que 56 Direction régionale de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale Agence régionale de santé Plate‐forme d’observation sociale PAYS DE LA LOIRE Handicap, perte d’autonomie 30 novembre er
1 décembre 2010 ‐ Nantes celui de l’enquête précédente (HID) laquelle n’était pourtant pas totalement satisfaisante non plus. Enfin, le lien entre la limitation initiale d’activité et les effets de la compensation peut ne pas être direct, compte tenu de l’influence d’une pluralité d’autres facteurs tels que le parcours antérieur de la personne enquêtée. Ainsi, une personne peut avoir des difficultés d’accès à l’emploi quelles que soient les compensations proposées aujourd'hui, non pas en raison de l’inadéquation ou de l’inutilité de ces compensations, mais parce qu’elles parviennent à l’issue d’un parcours de vie pendant lequel la personne n’a pas été suffisamment soutenue, ce qui a limité ses compétences initiales ou sa motivation professionnelle. L’enquête nous apprend également que malgré le nombre élevé d’utilisateurs, la compensation peut encore progresser. Les données montrent, par exemple, que 75 % des personnes en fauteuil roulant ne sortent pas aussi souvent qu’elles le souhaiteraient ou ne sortent jamais de leur domicile. Les trois quarts d’entre elles se déclarent limitées dans leurs déplacements par l’un ou l’autre des éléments qui étaient cités dans l’enquête. Autre indicateur des progrès possibles : près de neuf personnes sur dix ayant déclaré au moins une limitation importante affirment ne pas connaître la COTOREP ou la MDPH. En conclusion, la recherche dispose avec HSM d’une enquête très riche mais celle‐
ci n’épuise pas pour autant le sujet des compensations. Certes, la perfection en ce domaine n’est pas envisageable car plus le questionnaire est exhaustif, plus le recueil est délicat notamment pour éviter la lassitude de l’enquêté ou les « effets de listes » qui amoindrissent la fiabilité des données. Il faut donc interrompre la quête d’information complémentaire lorsque le progrès obtenu sur une donnée s’opère au détriment de la qualité globale de l’ensemble des résultats. Néanmoins, cette rapide présentation n’a fait qu’effleurer les possibilités d’exploitations sur ce thème offertes par l’enquête et souligner l’intérêt de la poursuite des investigations sur la question des compensations, qui n’a été que trop rapidement étudiée jusqu’à présent. 57 ECHANGES AVEC LES PARTICIPANTS Emmanuelle CAMBOIS ‐ Certaines des aides techniques citées comme le lit médicalisé se distinguent de la simple « compensation » et apparaissent plutôt comme des éléments de maintien en vie. Les aides humaines devraient également être prises isolément pour se concentrer beaucoup plus sur les aides techniques puisque ce sont elles qui sont supposées faire en sorte que la personne n’ait pas à être limitée ou gênée dans sa vie au quotidien. Pascale ROUSSEL ‐ Une réflexion de fond serait effectivement nécessaire autour d’une meilleure répartition des aides techniques. Certaines des personnes aidées ne déclarent, du reste, ni limitations fonctionnelles, ni restrictions d’activité. Nous retrouvons également ici des aides techniques de sécurité comme la téléalarme. L’accès à l’emploi des personnes handicapées en 2007 Valérie ULRICH DARES Nous commencerons par délimiter la notion de handicap en examinant en particulier le lien entre handicap et travail avant d’aborder la question proprement dite de la situation des personnes handicapées sur le marché de l’emploi. La délimitation de la population handicapée L’approche du handicap dans les travaux statistiques a connu depuis les années 80 une profonde évolution. Jusqu’au début des années 2000 en effet, les travaux statistiques considéraient qu’il n’existait pas de réponse unique pour définir le nombre de personnes handicapées, d’où une multiplication des définitions et des angles d’approche pour couvrir une réalité perçue comme complexe. Nous retrouvons là les travaux de Pierre Mormiche autour de cette idée selon laquelle « le handicap se conjugue au pluriel » ainsi que l’invitation d’Alain Letourmy, Jean‐François Ravaud et Isabelle Ville d’aborder la question du handicap par différentes approches (approche par incapacités, approche par limitation dans le genre et la quantité d’activités, approche par le besoin d’aide humaine ou technique, approche par la reconnaissance administrative du handicap etc...). Désormais les travaux autour du handicap s’appuient avant tout sur la nomenclature de la CIF et s’attachent à définir le handicap ou la dépendance en tenant compte des limitations fonctionnelles, des restrictions dans certaines activités ainsi que des facteurs environnementaux. Le fait de s’intéresser à la situation des personnes handicapées sur le marché du travail conduit à s’intéresser dans un premier temps d’une façon assez évidente à une catégorie de population : celle des personnes qui bénéficient d’une reconnaissance administrative de leur handicap ouvrant droit à l’obligation d’emploi de travailleurs handicapés (OETH). Le problème est que la population correspondante est finalement assez restreinte à l’échelle des enquêtes produites puisqu’elle ne représente que 5 % des 15/64 ans dans l’enquête de 2007. Une autre approche peut s’opérer au travers de la notion de limitation dans la capacité de travail. Dans l’enquête de 2007, les questions sur les limitations avaient été adaptées dans leur formulation selon la situation de la personne. Au contraire dans le module de 2002 la question (« êtes‐vous limité dans la quantité de travail que vous pouvez faire ou que vous pourriez faire ? ») était la même indépendamment de la situation professionnelle de la personne (chômage, emploi, ou inactivité). De fait les personnes qui n’occupaient pas un emploi étaient obligées de se mettre mentalement en situation et devaient donc définir par elles‐mêmes si elles se sentaient capables ou non de travailler à temps complet ou autres. Du coup certaines de ces questions étaient totalement inadaptées, en particulier pour des personnes qui n’ont jamais travaillé. C’est donc la raison pour laquelle le choix a été fait dans l’enquête de 2007 d’adapter la question à la situation de la personne en termes d’emploi, ce qui n’a pas été non plus sans 58 Direction régionale de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale Agence régionale de santé Plate‐forme d’observation sociale PAYS DE LA LOIRE Handicap, perte d’autonomie 30 novembre er
1 décembre 2010 ‐ Nantes 59 poser un certain nombre de difficultés complémentaires d’analyse. En définitive, deux types de définitions ont été retenus : ‐ les personnes justifiant d’une reconnaissance du handicap ouvrant droit à l’OETH (soit 1,8 million de personnes en 2007) ; ‐ ces mêmes personnes avec en outre les personnes ayant un problème de santé de plus de six mois et éprouvant des difficultés importantes vis‐à‐vis du travail ou dans les activités quotidiennes ou leurs déplacements. Le total est, dès lors, de près de dix millions de personnes représentant 24 % de la population des 15‐64 ans. Ces deux définitions renvoient à deux visions du handicap. Les populations concernées ont évidemment de nombreux points communs mais présentent aussi des différences. Parmi les points communs, ces personnes sont en moyenne plus âgées que l’ensemble de la population des 15‐64 ans. Elles sont également moins diplômées, vivent moins souvent en couple et ont plus souvent un père ouvrier que l’ensemble des autres personnes de la catégorie des 15‐64 ans. Les hommes sont plus représentés dans la première catégorie. La raison en est que les accidents de travail et maladies professionnelles touchent davantage le milieu ouvrier qui est lui‐même plus masculin. Dans le même temps, les femmes, qui sont davantage représentées dans la deuxième définition du handicap, ont tendance à déclarer plus spontanément des problèmes de santé et des difficultés dans leur vie quotidienne. La situation des personnes handicapées sur le marché du travail Les difficultés concernent surtout les personnes ayant une reconnaissance administrative de leur handicap, c’est‐à‐
dire que leur situation sur le marché du travail est vraiment très différente de celle du reste de la population. Leur taux d’activité (personnes qui occupent ou qui recherchent un emploi) est ainsi de 44 % contre 71 % pour l’ensemble des 15‐
64 ans quand le taux d’emploi (personnes qui occupent effectivement un emploi) n’est que de 35 % contre 65 %. La tranche la plus jeune bénéficie d’un taux d’activité plus élevé que celui de l’ensemble de la population. Nous retrouvons ici des personnes qui ont un handicap administrativement reconnu dès l’enfance et qui se retrouvent plus vite sur le marché du travail faute d’entreprendre de longues études. Le taux de chômage des personnes avec une reconnaissance du handicap est plus de deux fois supérieur à celui de l’ensemble de la population en 2007 (19 % contre 8 %). Les chiffres sont beaucoup moins contrastés en prenant en compte la seconde définition du handicap. La raison en est certainement que les personnes ayant un problème de santé et qui travaillent vont plus spontanément dire qu’elles sont gênées ou limitées dans leur travail. A contrario, les personnes au chômage vont plutôt mentionner d’autres facteurs comme l’absence de qualification ou l’éloignement géographique des emplois. Les deux types de populations handicapées occupent des emplois sensiblement différents de ceux de l’ensemble de la population. Les personnes handicapées sont davantage représentées parmi les ouvriers et les employés. Elles travaillent beaucoup plus souvent à temps partiel. Le fait qu’elles bénéficient proportionnellement plus facilement d’un CDI s’explique sûrement par l’âge plus avancé de ces personnes par rapport à l’ensemble de la population. Parmi les personnes en emploi ayant une reconnaissance du handicap, 8 % évoluent dans des établissements et services d’aide par le travail, 1 % dans des entreprises adaptées ou des centres de distribution de travail à domicile et 93 % en emplois ordinaires (dont 4 % dans la fonction publique, et 87 % dans le secteur privé). Alors que les besoins exprimés sont particulièrement élevés, seulement une personne handicapée sur cinq travaillant en milieu ordinaire bénéficie d’un aménagement de son temps de travail ou d’un allègement de tâches. ECHANGES AVEC LES PARTICIPANTS François TUFFREAU ‐ Il convient de rappeler que depuis 1987 les entreprises privées de plus de 20 salariés ont pour obligation d’employer 6 % de travailleurs handicapés, faute de quoi elles doivent s’acquitter d’une taxe. Les entreprises ont la possibilité de s’acquitter de leur obligation en ayant recours à des entreprises d’aide par le travail par exemple. L’obligation d’emploi a été rendue effective beaucoup plus récemment dans le secteur public (loi de 2005). Ce mécanisme de cotisation a permis de collecter des fonds très importants qui sont ensuite redistribués pour l’aménagement des postes de travail ou pour des formations. La reconnaissance du travailleur handicapé revêt donc une très grande importance pour les entreprises. Toute la difficulté est de savoir à quel moment la déficience est considérée comme suffisamment grave ou gênante pour être constitutive d’un « handicap ». Il n’existe pas une catégorie bien définie de personnes handicapées : tout dépend de la façon dont le curseur est placé. La preuve en est d’ailleurs que selon la définition retenue dans la présentation qui vient d’avoir lieu, la part des personnes handicapées au sein de l’ensemble de la population en emploi passe de 5 % à 24 %. Emmanuelle CAMBOIS ‐ Il ne s’agit pas tant d’une question de « curseur » que de populations finalement très différentes. En croisant ces données avec d’autres facteurs, on s’apercevra par exemple que les femmes souffrent davantage de limitations fonctionnelles mais qu’à limitations fonctionnelles équivalentes, les hommes ont davantage de reconnaissance administrative. Nous retrouvons là la notion de rôle social, c’est‐à‐dire que là où un homme en âge d’activité est supposé travailler, de leur côté les femmes ne bénéficient pas de cette reconnaissance quasi automatique. En tous les cas, la population correspondant à la seconde définition regroupe certainement des personnes qui, du fait de leurs limitations, sont sorties prématurément du marché du travail sans chercher à obtenir la reconnaissance à laquelle elles auraient pu prétendre. François TUFFREAU ‐ Il est vrai que nous manquons en France d’études comparées de la situation des hommes et des femmes en termes de santé ou d’accès à l’emploi. Un des paradoxes est que les femmes déclarent plus de problèmes de santé mais ont dans le même temps une espérance de vie beaucoup plus longue, ce qui dénote peut‐être aussi une différence sur la perception même de la santé. 60 Direction régionale de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale Agence régionale de santé Approches de la dépendance des personnes âgées par départements Olivier LEON Insee, Pôle de service pour l’action régionale ‐ PSAR "emploi et population" L’outil qui va vous être présenté a pour vocation d’établir des projections concernant le nombre de personnes âgées dépendantes par départements. Je précise, en premier lieu, qu’il s’agit bien là de « projections » par le biais de simulations sur la base d’hypothèses actuelles mais en aucun cas de « prévisions » puisque les différents scénarios proposés ne sont pas affectés de probabilités de réalisation. Plate‐forme d’observation sociale PAYS DE LA LOIRE Handicap, perte d’autonomie 30 novembre er
1 décembre 2010 ‐ Nantes 61 Présentation de l’outil Après des projections portant sur les périodes 1999‐2015 et 2005‐2020, un nouvel outil 2007‐2030 est en cours de finalisation en coopération entre l’Insee et la Drees. Toutes ces études ont avant tout pour objectif de mesurer l’évolution potentielle de la dépendance dans les départements compte tenu du vieillissement de la population, des changements de mode de vie et du recul de l’âge d’entrée en dépendance. Cette mesure intervient évidemment indépendamment des changements qui peuvent avoir lieu sur le cadre législatif qui régit la prise en charge des personnes âgées. En d’autres termes, l’outil n’a pas pour vocation d’établir des projections sur le nombre à venir de bénéficiaires de l’APA, sachant que comme toute politique publique, cette dernière connaît des disparités locales dans les niveaux de prise en charge. L’objectif est également ici de simuler quels pourraient être les effets sur l’emploi (emploi en institutions mais aussi aide à domicile) de cette évolution de la dépendance. Enfin, il s’agit d’étudier la structure des ressources de l’ensemble des personnes âgées, qu’elles soient dépendantes ou non. Souvent, en effet, les départements ont une bonne vision des ressources des bénéficiaires de l’APA mais n’appréhendent pas bien la situation des générations encore peu dépendantes. Certains départements possèdent, en outre, des caractéristiques particulières qui les voient attirer une population de jeunes retraités relativement aisés (cas des régions littorales par exemple). Les méthodes de projection L’outil 2007‐2030 prévoit donc un module pour chacun de ces trois objectifs. Le module central est celui qui porte sur les projections départementales de personnes âgées dépendantes avec ici deux méthodes principales : ‐ la méthode dite de la « mortalité », qui part du principe qu’à âge égal le taux de dépendance des personnes est d’autant plus fort que le risque de décès est élevé. Dans ce modèle, la dépendance et a mortalité sont toutes les deux des effets d’une variable commune : l’état de santé des personnes. Dès lors la prévalence de la dépendance est corrélée à la mortalité locale telle qu’elle est mesurée dans les séries démographiques. Différents scénarios peuvent être établis depuis la simple reconduction des tendances observées jusqu’à des projections d’amélioration de l’espérance de vie selon des hypothèses basses ou hautes. Cette méthode de la mortalité traite les questions de dépendance de façon globale en regroupant aussi bien les personnes en institutions que celles en ménage. Elle permet de capter les disparités départementales d’espérance de vie mais elle ne permet pas de prendre en compte les écarts qui peuvent exister sur l’offre d’hébergement. ‐ d’où la deuxième méthode dite du « mode de vie », qui s’attache à intégrer les éléments constitutifs du mode de vie (en institution, au domicile seul ou au domicile à plusieurs). Il s’agit ici de constater les taux de dépendance tels qu’ils transparaissent au travers des enquêtes Handicap santé/ménages et institutions tout en intégrant les données de la Drees selon lesquelles l’âge d’entrée en dépendance recule chaque année. Ces deux méthodes peuvent parfaitement coïncider mais elles donnent aussi des résultats différents dans les départements qui présentent des spécificités en termes d’espérance de vie. Pour ces derniers, c’est plutôt la première méthode qui est la plus conseillée alors que pour les autres, la seconde méthode présentera l’avantage d’être plus précise sur la répartition domicile/institution. La méthode dite des « petits domaines » a été testée mais n’a pas donné de résultats probants. Le module emploi Ce module intègre des informations relatives à l’aide à la personne et s’attache à mesurer aussi bien l’emploi en institutions que l’emploi à domicile (qu’il s’agisse de soins ou d’aide à la personne). Les projections permettent alors de faire évoluer un certain nombre de paramètres en simulant, par exemple, l’impact en termes d’emploi de tant d’ouvertures de lits sur telle période avec en outre l’impact, par l’effet de « vases communicants » sur les emplois à domicile. Le module sur les ressources des retraités Ce modèle s’appuie sur des statistiques de disparités de revenus par départements selon les tranches d’âge ou selon les modes d’hébergement. Il permet notamment d’établir des comparaisons entre les ressources des personnes âgées en général et de celles qui bénéficient de l’APA. L’outil est donc en cours de finalisation et sera disponible fin mars 2011 dans les directions régionales de l’Insee. Il intégrera en particulier les nouvelles projections démographiques qui vont être diffusées au début du mois de mars 2011 mais également les taux de dépendance issus de l’enquête Handicap santé. ECHANGES AVEC LES PARTICIPANTS François BEAUCHAMPS ‐ Un département ne peut‐il pas présenter des spécificités aussi bien pour la première méthode que pour la seconde ? Le Maine‐et‐Loire, par exemple, fait partie des départements français avec la plus forte espérance de vie tout en présentant le plus fort taux d’équipement d’établissements pour personnes âgées en France. 62 Direction régionale de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale Agence régionale de santé Olivier LEON ‐ Dans ce cas je préconiserais plutôt d’utiliser dans un premier temps la première méthode avant de travailler plus spécifiquement avec la direction régionale de l’Insee à la mise en œuvre d’une méthode « hybride » intégrant cette seconde spécificité. L’outil est largement paramétrable. Emmanuelle CAMBOIS ‐ Ces paramétrages peuvent‐ils notamment intégrer des scénarios de diminution du risque de mortalité pour les personnes dépendantes comme le montrent certaines études américaines ? Olivier LEON ‐ Encore une fois, il est toujours possible de décliner l’outil localement et de retravailler les hypothèses de départ, en jouant par exemple sur les hypothèses de mortalité. Pour autant, ces hypothèses de mortalité ne sont prises qu’au niveau global, c’est‐à‐dire qu’elles ne sont pas déclinées selon les caractéristiques sociales ou de santé d’un type de population de tel ou tel département. Geneviève LEBOUTEUX ‐ Les données relatives à la mortalité incluent, du reste, les composantes sociales sans qu’il soit besoin de prévoir des paramétrages spécifiques. Emmanuelle CAMBOIS ‐ Il n’empêche que dans certains cas le lien entre mortalité et dépendance finira par être décorrelé. Pour les départements qui attirent notamment des personnes assez aisées une fois celles‐ci arrivées à la retraite, nous risquons d’assister à une survie plus longue de personnes dont il faudra prendre en charge la dépendance. Plate‐forme d’observation sociale PAYS DE LA LOIRE Handicap, perte d’autonomie 30 novembre er
1 décembre 2010 ‐ Nantes 63 Franck BIDET ‐ Les antennes régionales de l’Insee pourront‐elles également proposer des approches infra‐départementales ? Olivier LEON ‐ La réponse est oui s’agissant du module central et surtout de la méthode par la mortalité. Un tel niveau est, en revanche, inadapté pour les autres méthodes et les autres modules puisque nous ne disposons pas pour ces domaines d’un détail statistique au niveau infra‐départemental. Odile SOULAS ‐ Il faudrait prendre garde à ne pas trop parcelliser l’analyse, une approche en‐deçà de 50 000 habitants n’apparaissant pas très pertinente. Les possibilités de paramétrage de l’outil trouvent également assez rapidement leurs limites car avant de modifier tel ou tel critère, il faudrait déjà pouvoir évaluer quel est réellement l’effet de tel ou tel paramètre. Le traitement de ces outils de projection relève vraiment d’un travail d’expert. Olivier LEON ‐ Il est vrai que des arbitrages sont à prévoir entre d’un côté l’utilisation de la souplesse de l’outil et l’intégration de nouveaux paramètres et de l’autre la facilité ou la complexité d’utilisation dudit outil. Sophie RENARD ‐ Tous les outils statistiques qui nous ont été présentés aujourd'hui sont particulièrement intéressants mais pourriez‐vous nous expliquer plus précisément de quelle façon ils pourraient nous permettre de mieux appréhender les besoins du terrain, par exemple en termes de places d’accueil de jour par exemple ? François TUFFREAU ‐ Merci d’avoir soulevé cette question de l’évaluation des besoins qui est au cœur des travaux de la plate‐forme d’observation sociale. La création de cette instance répond au constat que les outils d’évaluation des besoins existants ne sont pas à la hauteur des attentes des décideurs. Les données statistiques existantes mettent en évidence par exemple l’absence de corrélation entre le taux de bénéficiaires de l’APA par département et la densité d’équipements pour personnes âgées dépendantes comme si ces deux indicateurs n’avaient aucun lien entre eux ? Olivier LEON ‐ L’outil que je vous ai présenté est avant tout un outil de dialogue entre les statisticiens et les décideurs de politiques publiques. Il n’a pas vocation à livrer une quelconque « vérité chiffrée » incontestable. Au contraire, il doit être adapté et modulé afin de simuler les effets induits par les politiques publiques locales qui pourraient être mises en œuvre. François BEAUCHAMPS ‐ La répartition des places nouvelles par l’Etat ou par l’ARS s’appuie encore sur des indicateurs et des outils extrêmement frustres et qui se bornent à essayer de corriger les inégalités d’offres d’équipement. Mais ARS et Conseils généraux doivent coordonner leur politique dans ce domaine : un Conseil général par exemple ne peut pas décider seul de créer des places d’EHPAD si la médicalisation ne suit pas derrière. François TUFFREAU ‐ On observe aussi que, dans certains départements à fort taux d’équipements pour personnes âgées, les taux d’APA sont inférieurs à la moyenne, comme si le recours à l’APA évoluait de manière inverse à la densité d’équipements. Emmanuelle CAMBOIS ‐ Tout cela n’est finalement pas si paradoxal. Une étude menée à l’échelle européenne a montré que l’espérance de vie sans dépendance progressait en même temps que le taux d’investissement en termes de soins pour les personnes âgées augmentait. Pascale ROUSSEL ‐ Il ne faut pas oublier non plus toute la dimension culturelle qui s’attache à la notion de besoin. Cette dimension vaut autant par l’histoire d’une région, ses modes de vie mais aussi par ses caractéristiques géographiques (temps de trajets etc...). Quels que soient les outils permettant d’améliorer la qualité de la description de la situation des personnes, il serait illusoire d’imaginer qu’ils permettront de se passer d’une part de l’expertise du terrain mais aussi d’une certaine dose d’intuition. La notion d’expérimentation est ici très importante, sachant que certains projets mettent parfois très longtemps avant de commencer à s’implanter et de porter leurs fruits. Il en va notamment des solutions d’hébergement temporaire ou de répit mises en œuvre pour les aidants informels, qui ne sont peut‐être pas utilisées pleinement aujourd'hui mais qui répondent à un besoin évident. Olivier LEON ‐ Les données issues de l’outil peuvent permettre aux pouvoirs publics d’anticiper un certain nombre d’éléments. Le Conseil général des Alpes‐Maritimes s’était ainsi tourné vers l’Insee dans le cadre d’un programme de construction de nouveaux établissements, à la suite de quoi nous avions pu montrer que la progression de la dépendance en institution resterait limitée dans le département (générations post baby‐
boom peu nombreuses, moindre attractivité du département chez les jeunes retraités etc.). Il s’agit bien là d’un exemple où l’analyse statistique permet de mesurer des inflexions parfois contre‐intuitives sur les années à venir et d’accompagner les politiques publiques en conséquence. Sylvie EGHBAL‐TEHERANI ‐ L’important dans un premier temps est que le demandeur (en l’occurrence le Conseil général) formule dès l’amont un certain nombre d’hypothèses sur lesquelles il souhaite pouvoir mesurer l’impact de telle ou telle politique. Les informations qui en découlent peuvent être alors débattues publiquement sur la base des projections qui sont établies. 64 Direction régionale de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale Agence régionale de santé PRINCIPAUX SIGLES Plate‐forme d’observation sociale PAYS DE LA LOIRE Handicap, perte d’autonomie 30 novembre er
1 décembre 2010 ‐ Nantes 65 AAH ACFP ACTP ADL AEEH AGGIR APA ARS ASPA AT CIDIH CIF CIM CPAM CNSA DARES DGAS DREES EHESP EHPAD FEPH GEVA GIR GMP HID HSM HSA IADL INED IP INSEE MDPH MP OETH PPC PPH INSERM OMS PSD URAPEI USLD Allocation adulte handicapé Allocation compensatrice pour frais professionnels Allocation compensatrice tierce personne Activities of daily living Allocation éducation enfant handicapé Autonomie gérontologique groupes iso‐ressources Allocation personnalisée d'autonomie Agence régionale de santé Allocation de solidarité aux personnes âgées Accident du travail Classification internationale des déficiences, incapacités, handicaps Classification internationale du fonctionnement, du handicap et de la santé Classification internationale des maladies Caisse primaire d'assurance maladie Caisse nationale de solidarité et d'autonomie Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques Direction générale de l'action sociale Direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques Ecole des hautes études en santé publique Etablissement d'hébergement de personnes âgées dépendantes Forum européen des personnes handicapées Guide d'évaluation des besoins de compensation des personnes handicapées Groupe iso‐ressources GIR moyen pondéré Enquête Handicap, incapacités, dépendance Enquête Handicap santé‐ménages Enquête Handicap santé‐aidants informels Instrumental activities of daily living Institut national d'études démographiques Incapacité permanente Institut national de la statistique et des études économiques Maison départementale des personnes handicapées Maladie professionnelle Obligation d'emploi de travailleurs handicapés Plan personnalisé de compensation Processus de production du handicap Institut national de la santé et la recherche médicale Organisation mondiale de la santé Prestation spécifique dépendance Union régionale des associations de parents d'enfants inadaptés Unité de soins de longue durée 66 PLATE‐FORME D'OBSERVATION SOCIALE des situations de handicap et de perte d'autonomie PAYS DE LA LOIRE „ Les besoins d’observation dans le domaine du place leur nouveau système d’information, sous la responsabilité des Conseils généraux et de la CNSA, deviennent des acteurs à part entière de l’observation locale. Enfin, le rapprochement entre les concepts de handicap et de dépendance s’impose aujourd'hui, aussi bien aux acteurs de l’observation qu'aux institutions qui mettent en œuvre les politiques dans ce domaine. Dans ce contexte, la Direction régionale de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale (DRJSCS) et l’Agence régionale de santé (ARS) ont souhaité amplifier la dynamique régionale et améliorer la synergie des acteurs concernés, en créant une plate‐forme régionale de coordination de l'observation sociale associant les Conseils généraux, le Creai, et l'Observatoire régional de la santé. La plate‐forme d'observation sociale des Pays de la Loire vise à développer l’utilisation des systèmes d'information dans la perspective d'une meilleure évaluation des besoins, à mutualiser les ressources en matière d’observation, et à améliorer le partage de l’information. La plate‐forme est un outil coopératif au service des institutions concernées, des professionnels et des usagers. Elle n'est ni un entrepôt de données, ni un observatoire, et n’a pas vocation à se substituer aux structures existantes. handicap et de la perte d'autonomie sont particulièrement importants, dans le contexte de vieillissement de la population, d’une meilleure prise en compte des besoins d’accompagnement des personnes en situation de handicap, et de l'élaboration des schémas gérontologiques et des schémas en faveur des personnes handicapées. Mais des changements importants se sont produits dans ce domaine depuis une dizaine d'années et la manière dont les situations de perte d'autonomie sont aujourd’hui perçues et évaluées, aux différents âges de la vie, a beaucoup évolué. Le système d’information qui permet d'en objectiver l'importance, les caractéristiques et l'évolution, s’est développé, comme en témoigne la publication, en 2010, du Guide de valorisation des données locales de la Caisse nationale de la solidarité et d'autonomie (CNSA). Le Conseil général de Loire‐Atlantique a piloté pendant plusieurs mois un groupe de travail au sein du Conseil national de l'information statistique (CNIS) sur les indicateurs sociaux départementaux, et en particulier ceux concernant les personnes âgées et/ou handicapées. Les Maisons départementales des personnes handicapées qui mettent progressivement en Trois séminaires ont été organisés en 2010‐2011 par la plate‐forme. „ La CNSA et le Conseil général de Loire‐Atlantique ont organisé conjointement une première réunion sur le système d'information partagé CNSA‐MDPH (SIPAPH), le 29 septembre 2010. „ Le deuxième séminaire (30 novembre‐1er décembre), dont les actes font l'objet du présent document, concernait les concepts en matière de handicap et de perte d'autonomie, les outils d'évaluation de ces situations, ainsi que les grandes enquêtes en population et leurs résultats. „ Un troisième séminaire (30 mars 2011) a été consacré à l'Observation locale des situations de handicap et de perte d'autonomie. Ce document a été réalisé et mis en page par l'Observatoire régional de la santé. Des exemplaires supplémentaires sont disponibles à l'ORS. OBSERVATOIRE REGIONAL DE LA SANTE Hôtel de la région ‐ 1, rue de la Loire ‐ 44966 NANTES CEDEX 9 02 51 86 05 60 ‐ [email protected]