« Les vacances de M. Hulot » de J. Tati, 1953

Transcription

« Les vacances de M. Hulot » de J. Tati, 1953
« Les vacances de M. Hulot » de J. Tati, 1953
A. Analyse selon 4 critères
• le langage s'avère vain
Extrait 1 : 01:15
son
image
Brouhaha et incompréhension
•
•
Brouhaha de la foule dont n'émerge
aucun mot
Voix du contrôleur totalement
déshumanisée par le haut-parleur ; elle
en devient nasillarde et inaudible
•
•
Un quai de gare en proie à l'énervement
qui préside aux départs en vacances
Un haut-parleur diffuse des informations.
Une meute de vacanciers chargés de
valises essaie de suivre les instructions
mais, à chaque fois, se retrouve sur le
mauvais quai et rate les trains jusqu'à ce
qu'une heureuse coïncidence se produise
enfin.
Extrait 2 : 00:24
son
image
Incompréhension
•
Mot non articulé
•
•
Mot articulé
•
M. Hulot ne parvient pas à répondre
quand le réceptionniste lui demande son
nom
M. Hulot y parvient que le réceptionniste
lui enlève la pipe de la bouche
Extraits 3, 4 et 5
son
image
Langues étrangères (matériau musical / incommunicabilité)
•
•
•
Allemand 00:08
Anglais 00 :31
Italien 00:27
•
•
•
Le commandant en retraite
La vieille dame anglaise
Un monsieur
Extrait 6 00:19
son
image
Conversations entremêlées
•
Les voix se chevauchent
•
Conversations des convives dans la salle
de restaurant
Élisa Lepage, CPD arts visuels 22, École et cinéma, la bande son, 2013-14
1
•
Extrait 7 00:24
son
image
Inanité de la conversation
•
Voix d'une femme qui s'extasie à trois
reprises
•
Les Promeneurs sont sur les rochers. La
femme s'extasie devant les coquillages.
Elle les passe à son mari qui les rejette
au fur et à mesure
La verbalisation chez Tati est inopérante. Tati ne redoutent pas que ses personnages parlent, il craint que le rire ne dépende de la
signification du dialogue. Il fait surtout parler, et de manière volubile, ceux qui ne vont rien dire : le jeune intellectuel, la femme qui
commente la vue sur la plage, le commandant en retraite, un ministre
• le rythme de la journée
Extraits 1, 2 et 3 : la cloche
son
image
l'heure des repas
•
•
Cloche 1 00:33
Cloche 2 00:10
•
•
•
Cloche 3 00:09
•
Le restaurateur sonne la cloche
Le commandant quitte ses compagnons
de plage au bruit de la cloche
Un groupe de joueurs de tennis est à la
recherche d'une balle de tennis dans les
fourrés
Extraits 4 et 5 : la porte du restaurant
son
image
l'heure des repas
•
Porte 1 ; bruitage 00:50
•
•
Porte 2 ; bruitage 00:50
•
Jeu de portes qui s'ouvrent et qui se
ferment. Gag du chapeau que le garçon
de restaurant, qui imite Hulot, va
accrocher par mégarde à la canne d'un
vacancier
Le patron découpe les tranches du rôti en
fonction du tour de taille des convives.
Gag de la porte
La répétition, est un procédé très utilisée par les maîtres du burlesque
Extraits 6 et 7 : thème musical
son
image
thème qui balise les journées de vacances comme le flux et le reflux de la mer
Thème musical 1 01:40
• Trame sonore : des cris d'enfants
• Le thème commence
• Les bruits de l'extérieur s'intensifient
Bruits de vague
•
•
•
Martine ouvre les rideaux. C'est le matin
Elle met un disque
Elle ouvre la fenêtre et regarde le
spectacle de la plage
Élisa Lepage, CPD arts visuels 22, École et cinéma, la bande son, 2013-14
2
Bruit de cloche, conversations, appel...
•
Le thème s'arrête : accord au vibraphone
(mi 6ème)
•
Thème musical 2 02:21
• On entend le discours du ministre à la
radio sur la guerre
•
Le thème commence avec le discours en
fond sonore
•
•
•
•
•
•
Intensité plus grande. On n'entend plus le
discours du ministre
Le thème s'arrête : accord au vibraphone
(mi 6ème)
•
On se rapproche de certains personnages
présents sur la plage
Un garnement, à l'aide de sa loupe, est en
train de brûler le ventre d 'un estivant
Les estivants sont réunis dans le salon.
Martine, habillée en Colombine, entre
dans l'hôtel et cherche M. Hulot. Ne le
trouant pas, elle s'apprête à repartir.
Elle ouvre la porte.
Tout de suite elle comprend que M.
Hulot est là. Il est habillé en pirate.
Les deux héros s'installent dans le salon ;
certains de leurs gestes sont produits
exactement sur le même tempo que celui
donné par le thème.
M. Hulot invite Martine à danser.
A un certain moment, ils s'approchent de
l'électrophone et M. Hulot monte le son
Le promeneur aperçoit, de l'extérieur, le
couple dansé. Il fait nuit. C'est la fin de
la journée
Le thème semble parfois connu des personnages. Il est même sifflé par un jeune garçon qui passe en vélo. La jeune fille blonde
l'écoute régulièrement sur son tourne-disque, établissant ainsi une étrange complicité avec monsieur Hulot. Pourtant, elle est écrite en
mode mineure et l'accumulation des mésaventures et des maladresses de monsieur Hulot finit par laisser filtrer une certaine tristesse,
à l'image de la solitude du personnage principal, au moment de son départ
• une opposition frontale
Extraits 1, 2 et 3
son
image
formes musicales qui contribuent à installer le cadre d'une bourgeoisie conformiste et désuète
•
Air d'opéra 00:22
•
•
La Marseillaise 00:21
•
•
Musique classique 00:23
•
Mélodie anglaise surannée au moment
où Hulot arrive à l'hôtel
Fin des programmes à la radio ; tout le
monde va se coucher
La musique est écoutée par un vieux
monsieur
Extrait 4
son
image
musique véhiculée par le héros
Le jazz : 00:54
• Silence relatif
• Musique très forte ; voix
•
•
Dans le salon de l'hôtel, tout est calme
Le calme est soudain interrompu par un
Élisa Lepage, CPD arts visuels 22, École et cinéma, la bande son, 2013-14
3
•
La musique est coupée
•
orchestre de jazz tonitruant. On vient à
découvrir le coupable : c'est Hulot qui
écoute un disque en toute sérénité
Le commandant en retraite, du bout de sa
canne, coupe l'électricité
Communauté qui s'insurge quand elle est brutalement confrontée au jazz, synonyme de liberté et de vitalité
• une ambiance sonore
Extrait
son
image
Champ de bataille ou scène de guerre ? 01:05
•
Bruits d'explosions, de sifflements
•
Hulot, par inadvertance, met le feu aux
poudres d'un système pyrotechnique,
déclenchant ainsi un superbe feu
d'artifice. Il s'agite dans tous les sens
pour éteindre : en vain...
La bulle que constitue cette micro société en vacances est traversée par des préoccupations d'ordre politique, qui renvoient au
contexte historique notamment marqué par les guerres de Corée et d'Indochine
On s'aperçoit que, plutôt qu'un quatorze juillet festif, les déflagrations, les explosions, les sifflements évoquent une attaque armée. En
1939, dans « La règle du jeu » Jean Renoir avait déjà joué cette carte sonore pour la séquence de la chasse : la bande-son en était
clairement guerrière.
Le monde chez Tati fait une place à l'existence du mal. Il est évoqué dans la bande-son sous forme de guerres et de discours. « Si
Hulot n'est pas un personnage mièvre, c'est parce que, sur un contrepoint qui joue l'horreur en arrière-plan sonore, le héros comique a
l'audace d'être gentil. »
Carole Desbarats dans le cahier de notes
Il place sur un pied d'égalité le son et l'image. Il s'empare du son comme d'un matériau plastique au
même titre que la lumière. Le son n'est à aucun moment un simple accompagnement synchrone de
l'image. Chaque son est signifiant et résulte d'un travail minutieux sur sa nature, sa texture, son
timbre créant un univers originale et décalé.
Les montages s'étalent sur plus de 20 ans, soit trois versions remontées par son réalisateur. Au début
des années 60 où il épure les gags, élimine de nombreux dialogues. Il offre au film un rythme plus
doux. Il réorchestre la musique d'Alain Romans et refait entièrement le mixage sonore. En 1978,
Tati n'a pas cherché à modifier le mixage.
Jacques Tati emploi la pots-synchronisation : technique permettant de réenregistrer en studio les
dialogues et les bruits. Cela lui permet d'opérer toutes sortes d'opérations, de manipulations sur le
son. Il peut ainsi l'isoler, l'amplifier, le brouiller ou à contrario l'étouffer, jusqu'à le supprimer
totalement.
« Le génie de Tati est de révéler la non-coïncidence entre la bande-son et l'image qui est constitutive
du cinéma parlant de manière comique ».
Michel Chion
Élisa Lepage, CPD arts visuels 22, École et cinéma, la bande son, 2013-14
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