L`agriculture solidaire dans les éco

Transcription

L`agriculture solidaire dans les éco
L’agriculture solidaire
dans les éco-systèmes
fragiles au Maroc
Chafik KRADI
INRA, Edition 2012
Division de l’information
et de la Communication
Tél : 05 37 77 98 06
Fax : 05 37 77 98 07
Dépôt légal : 2012 MO 0762
Réalisation : Nadacom Design/ Tél : 05 37 68 25 50
Imression: Imprimerie Bidaoui/ Tél : 05 37 70 32 41
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Préface
Au centre des enjeux et défis de développement durable de l’agriculture
solidaire, la recherche agronomique œuvre pour apporter des réponses
concrètes aux questionnements scientifiques et techniques des petits
agriculteurs, en harmonie avec la réalité de leurs systèmes de production
agricole. Ces derniers requièrent davantage d’informations et de connaissances
du milieu, aussi bien biophysique, qu’économique et sociologique, pour la
planification des actions de développement sur une base participative.
Ainsi, les recherches sur les systèmes de production agricole constituent, à
notre sens, un choix judicieux pour la programmation des activités de recherche
et de recherche-développement. En effet, les résultats des diagnostics réalisés
par des équipes de chercheurs multidisciplinaires adoptant une démarche
participative, itérative et systémique a un double objectif : (i) d’abord
pédagogique, permettant aux chercheurs de différents profils de travailler
en synergie et mettre en commun leurs connaissances et expériences au sein
du même groupe et (ii) ensuite scientifique et technique, car la gamme des
solutions formulées pour lever les contraintes et valoriser les potentialités est
identifiée autour d’un consensus négocié avec les agriculteurs et les acteurs
de développement, combinant l’intérêt technique, socio-économique et
écologique.
Il est très important que les recherches sur la dynamique des systèmes de
production agricole soient renforcées davantage pour mieux cerner la demande
et/ou les besoins des agriculteurs en conseils et en technologies et réussir par
conséquent la programmation de la recherche et recherche-développement
et, éventuellement, son réajustement pour être en parfaite harmonie avec
les Plans Agricoles Régionaux. Ce réajustement est également dicté par les
transformations sociales du milieu rural marocain, des marchés et surtout des
changements climatiques observés. Ayant prouvé son efficacité sur le terrain,
l’expérience de l’INRA dans ces domaines, riche et confirmée, pourrait être
d’une grande utilité pour accompagner les projets du Plan Maroc Vert.
La prospective sur l’agriculture de demain selon le processus de planification
par scénario de développement est une démarche permettant aux acteurs et
opérateurs de développement locaux et régionaux et aux décideurs de se
projeter sur le futur et d’agir par anticipation. Cette démarche requiert (i) plus
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les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Préface
d’effort et de créativité de la part du chercheur-développeur pour promouvoir
le développement participatif et le transfert ciblé de technologies et (ii)
l’exploitation maximale des nouvelles technologies de l’information, surtout
au niveau de la veille informationnelle, dans un contexte où l’agriculture
marocaine connaît des changements technico-socio-économiques profonds
couplés à l’émergence d’un nouveau style de gouvernance et pilotage des
projets agricoles.
Je tiens à féliciter Monsieur Chafik KRADI, Chef de la Division de l’Information
et de la Communication de l’INRA, d’avoir réservé une part de son temps
pour la rédaction de ce livre. C’est un message clair pour tous les chercheurs
qui, tout en consacrant une période de leur carrière professionnelle à
l’administration, continuent à garder un contact permanent avec la recherche
et la publication.
Prof. Mohamed BADRAOUI
Directeur de l’INRA Maroc
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les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Résumé
Résumé
Le dynamisme que connait, aujourd’hui, le monde rural et l’agriculture marocaine est
sans précédent en termes de stratégie agricole « Plan Maroc Vert », d’Initiative Nationale de
Développement Humain (INDH), de protection de l’environnement « Charte de l’environnement »,
de démocratisation de la vie publique « nouvelle constitution » et de la régionalisation avancée
renforçant la légitimité démocratique et le pouvoir des élus. Ce dynamisme constitue le mobile
de taille pour l’auteur d’écrire le présent livre. C’est une capitalisation des principaux résultats des
diagnostics réalisés par des équipes multidisciplinaires, multi-institutionnelles et multiculturelles sur les
systèmes de production dans les zones de montagnes, oasis, irrigué, parcours, arides et semi-arides
durant la période 1996 – 2005, et ce, en collaboration avec le Centre International de la Recherche
Agricole orientée vers le Développement (ICRA). Le développement durable des systèmes de
production agricole et ses implications sur la recherche - développement dans le cadre du Plan
Maroc Vert est le fil directeur retenu tout au long du document.
Focalisé sur la petite agriculture, le livre présente les principaux traits des systèmes de productions
en termes de potentialités (produits de terroirs, savoirs faire local et connaissances endogènes des
agriculteurs…) et de contraintes (dégradation des ressources naturelles, fragilité des systèmes de
cultures et d’élevage, sous valorisation des produits, difficultés de commercialisation…). Sur la base
des forces motrices identifiées, des scénarii de développement ont été formulés pour chaque
écosystème avec leurs impacts probables sur l’environnement socio-économique et écologique
ainsi que sur la recherche – développement.
Les recommandations formulées, outre le transfert de technologies, mettent l’accent sur le rôle
des nouvelles technologies de l’information et la maîtrise des connaissances sur les systèmes de
production en adoptant des méthodes et outils appropriés et aussi, sur l’utilité de la démarche
participative pour la maîtrise de la demande sociale et l’élaboration des programmes de
développement ciblé. Ce sont des préalables pour formuler et réussir les meilleures interventions
techniques, socio-économiques et écologiques au profit de la petite agriculture dans le cadre des
Plans Agricoles Régionaux.
Mots clefs : : Durabilité, Recherche, Recherche-Développement, Systèmes de Production Agricoles,
Petite Agriculture, Scénario de Développement, Information, Communication et Transfert
de Technologie.
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les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Résumé
Abstract
The dynamism nowadays characterizing the rural world and the Moroccan agriculture in
unprecedented in terms of agricultural strategy “Green Morocco Plan”, INDH, environment
protection “Environment Charter”, public life moralization “New constitution” and advanced
regionalization to strengthen democratic legitimacy and powers of the elected officials. It is this
dynamism that pushed the author to write his book which is a capitalization of the main results of the
diagnosis made by a multidisciplinary, multi-institutional and multi-cultural team on the production
systems in mountainous, oasis, irrigated, rangeland and arid and semi arid areas from 1996 to
2005 in collaboration with ICRA (The International Centre for development oriented Research
in Agricultural). Sustainable development of agricultural production systems has an impact on
research and development within the Green Morocco Plan, which is the main topic of this book.
Dealing mainly with the small agriculture, this book presents the main characteristics of the
production systems according to potentials (local products, local ability and knowledge…),
constraints (natural resources deterioration, fragile agricultural and animal breeding systems, lack
of products enhancement, market difficulties…). Based on the driving forces defined, various
development scenarios concerning every ecological system were proposed with the definition of
their eventual impacts on the socio-economic and ecological environments and on research and
development.
In addition to technology transfer, the recommendations are based on the role of information new
technologies and mastering of the knowledge regarding production systems through the adoption
of adequate tools. These things are preliminary to any better technological, socio-economic and
ecological intervention for the benefit of a solidary agriculture within the regional agricultural
plans.
Key words : Sustainable, research and development, agriculture production systems, solidary agriculture,
development scenarios, technology transfer.
Resumen
El dinamismo que sabe hoy, el mundo rural y la agricultura marroquí no tiene precedentes en
términos de estrategia agrícola «Plan Marruecos Verde», la Iniciativa Nacional para el Desarrollo
Humano (INDH), la protección del medio ambiente «Carta del medio ambiente, la democratización
de la vida pública « la nueva constitución» y la regionalización avanzada, el fortalecimiento de la
legitimidad democrática y la autoridad de los funcionarios electos.
Este dinamismo es el tamaño de móvil para el autor para escribir este libro. Se trata de una
capitalización de los principales resultados de los diagnósticos realizados por equipos multidisciplinarios
y multi-institucional y multi-cultural los sistemas de producción en las zonas de montañas, oasis, de
regadío, pastizales, zonas áridas y semiáridas durante en el período 1996 - 2005, y, en colaboración
con el Centro Internacional de Investigación Agrícola orientado al desarrollo (ICRA).
El desarrollo sostenible de los sistemas de producción agrícola y sus implicaciones para la
investigación - desarrollo en el Plan Marruecos Verde es el principio rector adoptado en todo el
documento.
Centrado en la pequeña agricultura, el libro presenta las principales características de los
sistemas de producción en términos de potencial (productos regionales y el conocimiento autóctono
de los agricultores...) y restricciones (degradación de los recursos naturales, la vulnerabilidad
de los sistemas agrícolas y bajo ganado en la promoción de los productos, las dificultades en la
comercialización...).
Sobre la base de las fuerzas impulsoras identificadas escenarios de desarrollo se han formulado
para cada ecosistema y sus posibles impactos socio-económicos y ecológicos, así como en la
investigación - desarrollo.
Las recomendaciones, además de la transferencia de tecnología, centrándose en el papel
de las nuevas tecnologías de información y dominio de los conocimientos sobre los sistemas de
producción mediante la adopción de métodos y herramientas adecuadas y también la utilidad
del enfoque participativo para el control de la demanda social y el desarrollo de programas de
desarrollo específicos. Estos son prerrequisitos para el éxito y aprovechar al máximo las intervenciones
técnicas, socio-económicos y beneficios ambientales de los pequeños agricultores a través de los
Planes Regionales de Agricultura.
Palabras clave : Sostenibilidad, Investigación, Investigación y Desarrollo, sistemas de producción
agrícola, la pequeña agricultura, desarrollo de escenarios, información y
comunicación, transferencia de tecnología.
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les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Remerciements
Remerciements
Mes sincères remerciements vont au Professeur Mohamed BADRAOUI,
Directeur de l’INRA, pour avoir accepté de préfacer ce livre ainsi que pour son
esprit d’encouragement des publications au sein de notre institution. Le nombre
d’ouvrages édités durant la période 2008 – 2011 en est la preuve.
Je tiens à présenter mes vifs et chaleureux remerciements et ma
reconnaissance aux ex Directeurs de l’INRA, Monsieur Abdelaziz ARIFI et
Professeur Hamid NARJISSE qui m’ont facilité la tâche et m’ont encouragé à
initier tout un programme de coopération avec l’ICRA et de le piloter durant la
période 1996-2005.
J’adresse ma gratitude et ma reconnaissance à Dr Jon DAANE, Directeur
de l’ICRA, et Dr Noureddine SELLAMNA, Coordonnateur du Programme ICRA
Francophone, qui n’ont épargné aucun effort pour promouvoir la coopération
avec l’INRA Maroc à travers deux principaux axes: i) le perfectionnement
d’une vingtaine de chercheurs dans le domaine de la recherche orientée
vers le développement et ii) la mobilisation des équipes, multidisciplinaires,
multi-institutionnelles et multiculturelles pour réaliser des diagnostics sur
les systèmes de productions agricoles au Maroc. Un grand merci pour cette
coopération très fructueuse qui a servi le domaine de la recherche-développement
au sein de l’INRA.
Mes remerciements vont par la même occasion aux lecteurs externes pour
leur disponibilité et leurs remarques pour l’amélioration du contenu de ce livre. Il
s’agit du Professeur Ahmed BAMOUH, Enseignant chercheur à l’IAV Hassan II qui a
procédé à la lecture et correction de ce document et a formulé des remarques
de fond et de formes ayant enrichies l’ouvrage.
Prof. Vincent DARNET, Enseignant dans un lycée à Paris a apporté son appui
pour la finalisation de cet ouvrage, qu’il trouve à travers ce mot l’expression de
mes sincères remerciements.
Les participants, nationaux et internationaux, membres des 11 équipes INRA –
ICRA ayant travaillé sur le terrain selon des termes de références minutieusement
préparés et en harmonie avec les objectifs de recherche de l’INRA, qu’ils trouvent
ici mes sincères reconnaissances et remerciements pour les efforts déployés
durant leurs séjours au Royaume du Maroc.
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Remerciements
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Que Dr Rachid DAHAN, Chef de la Division scientifique de l’INRA trouve ici
ma profonde gratitude d’avoir accepté de faire une lecture rigoureuse de ce
livre. Il a été un appui incontestable dans la réalisation de ce projet en termes de
revision de texte et de clarification des idées.
Monsieur Abdelouahed ALBALGHITI, Chef du Département de Recherche –
Développement de l’INRA qui a procédé à une lecture profonde de ce livre et
a formulé des remarques de formes et de fond très utiles pour l’amélioration de
son contenu, qu’il trouve içi mes sincères reconnaissances et remerciements.
Mes remerciements vont également à Dr Seddik SAIDI, Chef de Département
d’Amélioration des Plantes et de la Conservation des Ressources Génétiques /
INRA pour ses suggestions et les informations fournies sur le SIPAM.
Dr Driss Haddarbach, Chef de Service de l’Informatique / INRA m’a fait part
de ses remarques, qu’il trouve ici mes profonds remerciements.
Je remercie mon collègue et collaborateur Mr Reddad TIRAZI, Chef du Service
de la Communication, pour la lecture rigoureuse de ce livre et les corrections
faites.
Messieurs Abdelali MOUAAID et El Mostafa HADDASKAR, cadres de la DIC
trouvent ici mes sincères remerciements pour leur appui durant tout le processus
d’édition de ce livre.
Je dédie ce livre à ma grande famille représentée par l’ensemble du personnel
de l’INRA : chercheurs, gestionnaires, cadres administratifs, techniciens et tout le
personnel d’appui.
Mes dédicaces de cet ouvrage vont enfin à ma petite famille composée de
ma mère Mahjouba, ma femme Nora et mes deux fils Taha et Farouk.
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les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Abréviations
Abréviations
AKIS :
AMED :
AUEA :
BM :
CT :
CIV :
CDA :
CR :
CRPII :
CNEARC :
CGDA :
CRCO :
DH :
DPA :
ENA M :
ENFI Salé :
GIP :
FDA :
ICRA :
Analyse Knowledge Information System
Amélioration des Moyens d’Existence Durables
Association des Usagers d’Eau
Banque Mondiale
Centre de travaux
Centre Investissement Agricole
Centre de Développement Agricole
Commune Rurale
Centre de Ressources pour le Pilier II
Centre National des Etudes Agricoles des Régions Chaudes
Conseil Général de Développement Agricole
Conseil Régional de Concertation et d’Orientation de la Recherche
Direction des Ressources Humaines
Direction Provinciale d’Agriculture
Ecole Nationale d’Agriculture de Meknès
Ecole Nationale Forestière d’ingénieur de Salé
Groupement d’Intérêt Public
Fonds de Développement Agricole
Centre International de la Recherche Agricole Orienté vers
le Développement
ICARDA :
Centre International de la Recherche Agricole pour les Zones Arides
ISNAR :
International Center for national Agricultural research
IAV :
Institut Agronomique et Vétérinaire Hassan II
INRA :
Institut National de la Recherche Agronomique
INDH :
Initiative Nationale de Développement Humain
MAPM :
Ministère de l’Agriculture et de la Pêche Maritime
MARP :
Méthode Active de la Recherche Participative
MFV :
Mode de Faire Valoir
MOF :
Main d’Œuvre Familiale
MOS :
Main d’Œuvre Salariale
ONCA :
Office National du Conseil Agricole
ONG :
Organisation Non Gouvernementale
ONU :
Organisations des Nations Unies
ORMVAT/TF : Office de Mise en Valeur Agricole de Tafilalet
ORMVAG : Office de Mise en Valeur Agricole du Gharb
PMV :
Plan Maroc Vert
PAR :
Plan Agricole Régional
PRMT
Programme de Recherche Moyen Terme
PIB :
Produit Intérieur Brut
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Abréviations
PIBA :
PNUD :
PI :
PMVB :
RGPH :
RAD :
RD :
SNRA :
SAU :
SCIA :
SIPAM :
SPA :
SPO :
TIC :
UTA :
UNESCO :
UF :
UPF :
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les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Produit Intérieur Brut Agricole
Plan des Nations Unies pour le Développement
Périmètre Irrigué
Projet de Mise en Valeur en Bour
Recensement Général de la Population et de l’Habitat
Recherche Agricole Pour le Développement
Recherche et Développement
Système National de la Recherche Agronomique
Superficie Agricole Utile
Système de Connaissances et d’Information Agricole
Système Ingénieux du Patrimoine Mondial Agricole
Système de Production Agricole
Système de Production Oasiens
Technologie de l’Information et de la Communication
Unité Territoriale Agricole
Organisation des Nations Unies pour l’Education, la Culture et la
Science
Unité Fourragère
Unité de Production Familiale
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Liste des tableaux / Liste des figures
Liste des tableaux
Tableau 1.
Tableau 2 .
Tableau 3 .
Tableau 4 .
Tableau 5.
Tableau 6.
Tableau 7.
Tableau 8.
Tableau 9.
Tableau 10.
Tableau 11.
Tableau 12.
Tableau 13.
Tableau 14.
Tableau 15.
Tableau 16.
Tableau 17.
Tableau 18 .
Tableau 19 .
Tableau 20.
Tableau 21.
Modèles d’agrégation
Notion de diagnostic
Méthodologie d’analyse des produits de terroirs
Types de participation à l’élaboration des programmes R&D
Quelques stratégies globales des agriculteurs dans la palmeraie
d’Aoufouss
Perspectivesd’évolutiondesforcesmotricesetleurimpactsurlesSystèmes
de Production (SP).
données générales
Calendrier des activités liées à l’alimentation des troupeaux
Profil historique
Coût d’installation d’un projet de reconversion céréales en pommier pour
une exploitation d’une superficie de 3,5 hectares équipée en irrigation
localisée
Comparaison de produit d’un hectarede céréales reconverties en
pommier / prunier en DH
Comparaison des performances économiques entre deux types de
conduites du pommier conduit en système intensif et extensif
Comparaison des performances économiques entre deux types de
conduites du prunier conduit en système intensif et extensif
Appréciation de l’efficience des pratiques techniques sur le
pommier, le prunier et céréale
La matrice SWOP (atouts, potentialités contraintes et menaces)
Importance des activités agricoles dans le revenu de l’exploitation
agricole
Actions prioritaires d’appui aux femmes
Forces motrices et scénarii probables
Calendrier général des activités de la femme montagnarde.
Principales caractéristiques des CR étudieés
Axes du Plan Agricole de la Région des Rhamnas.
Liste des figures
Figure 1 :
Figure 2 :
Figure 3 :
Figure 4 :
Figure 5 :
Figure 6 :
Figure 7 :
Figure 8 :
Figure 9 :
Figure 10 :
Figure 11 :
Figure 12 :
Figure 13 :
Arbre de contraintes du système oasien
Système de production agricole traditionnel
Système de production agricole intermédiaire
Système de production agricole moderne
Diagramme de flux entre les systèmes de culture et d’élevage
Echanges et complémentarités entre les systèmes de production
oasiens et sylvo-pastoraux
Arbre de contraintes des zones de montagnes
Schéma de la stratégie des ruraux sans terre
chéma de stratégie des petites exploitations
Schéma de stratégie des moyennes exploitations
Schéma de stratégie des grandes exploitations
Arbres des contraintes Rhamnas
Arbres de contraintes des parcours
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les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Plan de l’ouvrage
Plan de l’ouvrage
Introduction : Contexte, problématique et méthodologie............................
➟ 14
Chapitre 1 : L’ agriculture solidaire dans les stratégies nationales de
développement
1. Les grands chantiers de développement concernant le monde
rural au Maroc.....................................................................................
1.1. Initiative Nationale pour le Développement Humain (INDH)...
1.2. Plan Maroc Vert : opportunité pour améliorer les conditions
de vie des ruraux pauvres............................................................
1.3. Charte de l’environnement et de développement durable...
1.4. Démocratisation de la vie publique et l’Etat de droit..................
1.5. Régionalisation avancée .............................................................
2. Le développement durable comme finalité de la recherche : Quel
apport dans ce contexte ?......................................................................
2.1. Finalité de la recherche.................................................................
2.2. Les approches et les outils............................................................
2.3. Intégration de l’approche participative dans le système de
recherche agricole........................................................................
Conclusion du chapitre I .......................................................................
➟ 19
➟ 19
➟ 21
➟ 28
➟ 29
➟ 31
➟ 32
➟ 32
➟ 34
➟ 42
➟ 45
Chapitre 2 : Le système oasien : un patrimoine national à préserver
1. Analyse du système oasien......................................................................
1.1. Les contraintes.................................................................................
1.2. Stratégies des agriculteurs : trois types se dégagent.................
2. Scénarii de développement des oasis...................................................
2.1. Pourquoi le choix de l’approche «scénario de développement» ?.
2.2. Identification des forces motrices.................................................
2.3. Formulation des scénarii de développement et leur impact...
3.Une nouvelle approche de développement des systèmes de production:
SIPAM.........................................................................................................
3.1. Définition..........................................................................................
3.2. Site pilote de SIPAM au Maroc Imilchil-Amellagou : Oasis froides...
Conclusion du chapitre II ......................................................................
12
➟ 48
➟ 52
➟ 55
➟ 63
➟ 64
➟ 65
➟ 67
➟ 73
➟ 73
➟ 73
➟ 79
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Plan de l’ouvrage
Chapitre 3 : Le système montagnard : Meilleure connaissance des
systèmes de production pour de meilleures interventions
techniques
1. Les grands traits des systèmes de production des zones....................
2. Grande diversité et spécificités des systèmes de production de zones
de montagne............................................................................................
2.1. Moyen Atlas « province de Béni Mellal ».....................................
2.2. Cas du Rif « Province de Chefchaouen »...................................
2.3. Cas du Rif occidental (province de Taounate).........................
2.4. Cas du Haut Atlas (Vallée Anougal et Imnitala).........................
2.5. La montagne : des potentialités sous exploitées..........................
Conclusion du chapitre III.......................................................................
➟ 83
➟ 85
➟ 85
➟ 137
➟ 145
➟ 149
➟ 152
➟ 158
Chapitre 4 : Zones arides et semi-arides
1. Cas de la plaine des Rhamnas................................................................
1.1. Caractéristiques des systèmes de production et problématique.
1.2. Plan d’action proposé à la lumière du diagnostic....................
2. Cas des parcours du Maroc occidental central..................................
2.1. Profil historique des systèmes de production pastoraux............
2.2. Etat actuel et recommandations..................................................
Conclusion du chapitre IV......................................................................
➟ 160
➟ 161
➟ 163
➟ 167
➟ 168
➟ 169
➟ 172
Chapitre 5 : Instruments et outils pour accompagner la dynamique des
systèmes de production
1. Les enjeux et défis de l’utilisation des TIC..............................................
2. Le renforcement des capacités des acteurs ......................................
3. Les défis majeurs pour la mise en œuvre du CRPII...............................
4. Les méthodes et les approches participatives : une obligation pour
maîtriser les perceptions des ruraux (femmes et hommes) et la
planification de la recherche - développement..................................
5. La veille technologique et informationnelle...........................................
6. Renforcement de la liaison Recherche –Conseil Agricole.................
Conclusion du chapitre V......................................................................
➟ 173
➟ 175
➟ 175
➟ 176
➟ 176
➟ 178
➟ 179
Conclusion générale........................................................................................... ➟ 180
Liste bibliographique.......................................................................................... ➟ 183
Glossaire.............................................................................................................. ➟ 185
13
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Introduction
Contexte, problématique
et méthodologie
Contexte et problématique
L’agriculture est un secteur vital pour l’économie marocaine. Il occupe près de
50% de la population active et 80% de l’emploi rural. La contribution du PIBA dans
le PIB durant la période 2004 – 2008 varie entre 13 et 15%. La Superficie Agricole
Utile s’étend sur environ 9 millions d’hectares et se situe à 86% en zone pluviale. Elle
concerne 1,5 millions d’exploitations agricoles1 dont :
❐ 4,1% de plus de 20 ha,
❐ 42,7% de 3 à 20 ha,
❐ 53,3% de moins de 3 ha.
Cette superficie est composée de :
❐ 67% de céréales,
❐ 6 à 8% des légumineuses alimentaires2
❐ 13% de jachère,
❐ 9% d’arboriculture fruitière,
❐ 2 à 5% d’autres cultures.
(CGDA, 2010).
L’essentiel de l’agriculture du pays est mené en zones aride et semi-aride
sous des conditions climatiques aléatoires. Les précipitations y sont globalement
insuffisantes mais surtout irrégulières dans le temps et dans l’espace. Globalement,
les montagnes, les zones arides et semi-arides et les oasis regroupent 80% de la
population agricole du Royaume. Elles correspondent à 65% de la superficie
agricole, 35% de la superficie irriguée et 70% du nombre des exploitations du pays
(CGDA, 2008).
1- Une exploitation agricole est une unité économique de production agricole soumise à une direction
unique et comprenant tous les animaux qui s’y trouvent et toute la terre utilisée, entièrement ou en partie,
pour la production agricole, indépendamment du titre de possession, du mode juridique ou de la taille.
archives de documents de la FAO, points trois: définitions et concepts.
2 - Z. Fatemi, Les légumineuses alimentaires au Maroc, n°148.
14
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Introduction:
Contexte, problématique et méthodologie
Les petites exploitations agricoles, particulièrement celles situées dans des
éco-systèmes fragiles - montagnes, oasis, parcours arides et semi-arides - sont
confrontées de plus en plus à des problèmes de pérennité de production. Ces
exploitations sont classées dans la catégorie dite « d’agriculture solidaire ». Elles
constituent le pilier II de la stratégie du département de l’agriculture 2008 – 2020:
le Plan Maroc Vert. Elles représentent plus d’un million d’exploitations et une
population rurale estimée à 9,7 millions d’habitants (Recensement général de
l’agriculture, 1996) réparties entre :
❐ Les plaines et plateaux du domaine semi-aride regroupant 520.000
exploitations et concentrent 3,7 millions d’habitants.
❐ Les montagnes regroupent 437.000 exploitations avec une population de
l’ordre de 5 millions de personnes.
❐ Les zones sahariennes, présahariennes et les oasis rassemblant 85.000
exploitations pour une population de 570.000 habitants.
Ces ensembles sont des zones à économie fragile. La conjonction de la
pauvreté, de la mondialisation et du changement climatique pourrait encore
aggraver leur situation, d’autant plus que la taille moyenne des exploitations est
en deçà de 3 ha dans 70% des cas (CGDA, 2008).
L’analyse des systèmes de production3 où vivent et travaillent des ménages
ruraux facilite la définition des priorités stratégiques de développement et
l’élaboration de programmes d’action ciblés pour l’amélioration des revenus
des agriculteurs à travers l’amélioration de la productivité de la main d’œuvre
disponible et le transfert de gammes de technologies intégrées permettant de
diversifier les moyens d’existence des petits agriculteurs et de renforcer la durabilité
du mode d’utilisation des ressources naturelles.
Le présent livre essaye de présenter une projection sur les systèmes de
production et la petite agriculture de demain en répondant à la question
centrale suivante : comment peut-on réaliser les objectifs de développement de
la petite agriculture en termes de recherche et de recherche développement,
de transfert de technologie tout en préservant les ressources naturelles [et les
savoirs faires traditionnels?]? Plus précisément, comment améliorer les moyens
d’existence des ruraux pauvres et non pauvres en recherchant des systèmes de
production agricole qui permettent de concilier le développement économique,
le progrès social et la protection de l’environnement.
3 - Un système de production est défini comme étant une combinaison des facteurs et moyens de
production disponibles, des choix techniques et agencement des activités au sein d’une exploitation
agricole pour atteindre les objectifs fixés par le chef de l’exploitation. Doc Systèmes de Production
Agricoles et pauvreté, FAO 2011
15
Introduction:
Contexte, problématique et méthodologie
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Focalisé sur la petite agriculture, le présent livre a aussi pour but de systématiser
les connaissances disponibles sur les formes des systèmes de production se
rapportant à la petite agriculture dans les agro-systèmes de montagne, oasis,
parcours, arides et semi-arides, en vue d’y apporter des éclaircissements sur les
diverses formes et trajectoires d’évolution. Ce livre est donc structuré en cinq
chapitres :
❐ Le premier chapitre traite de l’agriculture solidaire dans les stratégies
nationales de développement ;
❐ Le deuxième chapitre est consacré au système oasien et projections sur
le futur avec un aperçu sur une nouvelle approche de développement
(SIPAM) ;
❐ Le troisième chapitre se rapporte au système montagnard en se
focalisant sur les voies d’amélioration des connaissances sur les systèmes
de production pour réaliser de meilleures interventions techniques ;
❐ Le quatrième chapitre traite de la problématique des zone arides, semi
arides et pastorale ;
❐ Le dernier chapitre est réservé aux instruments et outils pour accompagner
la dynamique des systèmes de production agricole.
Méthodologie poursuivie pour la rédaction de ce livre
L’institut National de la Recherche Agronomique (INRA), chargé de la
production scientifique et technique pour le développement de l’agriculture
marocaine, a bénéficié de l’appui du Centre International de la Recherche
Agricole Orientée vers le Développement (ICRA) durant la période allant de 1993
à 2005 en matière de recherche et recherche-développement sur les systèmes
de production agricole. La collaboration a porté sur deux domaines :
(i) La formation des chercheurs en matière de concepts les aidant à maîtriser
la diversité et le fonctionnement des systèmes de production agricoles, à
comprendre les chaînes de l’innovation agricole et rurale, à travailler en groupe
et analyser les différentes perceptions des acteurs pour mieux définir les objectifs
et les programmes de recherche-développement.
(ii) La réalisation des études multidisciplinaires, multi-institutionnelles et
multiculturelles sur les systèmes de production agricole dans les zones de
montagne, oasis, parcours.
Pour appréhender les différentes facettes des systèmes de production agricole
dans ces écosystèmes (oasis, montagne, et parcours), une dizaine d’études ont
été réalisées par des équipes multidisciplinaires INRA-ICRA. Les aspects liés aux
savoirs locaux et à la communication des connaissances ont été toujours soulevés
comme axes prioritaires dans l’élaboration des programmes de recherche et de
recherche-développement.
16
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Introduction:
Contexte, problématique et méthodologie
Les écosystèmes étudiés sont dans leur quasi-totalité fragiles et vulnérables
face à tous les aléas écologiques et socio-économiques. En effet, l’écosystème
montagnard connait d’énormes problèmes d’érosion à cause de leur mise en
culture… L’écosystème oasien subit la loi de la nature « rareté des ressources
hydriques », la pression démographique, le sur- pompage, le Bayoud (Fusarium
oxysporum f. sp. Albedinis). L’écosystème agro-pastoral souffre du surpâturage
et donc la dégradation du couvert végétal. Les zones arides et semi-arides ont
connu des mutations socio-économiques et écologiques très profondes du fait
de leurs dépendances des aléas climatiques. Les techniques telles que le semis
direct et la conservation des eaux et des sols développées par la recherche ne
parviennent pas encore à s’imposer.
Aussi, ces travaux de recherche ont révélé l’existence d’agriculteurs ayant
peu de contacts avec la recherche et avec la vulgarisation. Ils sont donc peu
ou non influencés par les chercheurs, qui pourtant, pourraient trouver dans
leurs savoirs une source d’inspiration et de solution, notamment dans les zones
enclavées. Ces agriculteurs possèdent en effet leurs propres expériences vis-à-vis
de l’amélioration de leurs revenus et de la protection de l’environnement.
les recommantations ainsi, formulées par les chercheurs s’articulent
globalement sur les objectifs suivants :
i) La valorisation du savoir local à travers le processus de Recherche –
Développement mettant ensemble les innovateurs, les chercheurs et les
développeurs et la population locale;
ii) La promotion de l’innovation à travers des plateformes de démonstration
regroupant les acteurs et les opérateurs concernés ;
iii) Le développement participatif des technologies impliquant chercheurs/
agriculteurs et développeurs / vulgarisateurs.
Pour atteindre ces objectifs, il est primordial de procéder à l’élaboration d’une
synthèse des acquis de la recherche sur les systèmes de production agricole
intégrant les savoirs locaux et les activités réalisées dans ce domaine à l’échelon
du terroir ainsi qu’à l’identification et la description des différentes technologies
développées par les agriculteurs eux-mêmes. Celles-ci sont à même de résoudre
les problèmes environnementaux et d’améliorer les revenus des agriculteurs de
façon conséquente. L’analyse des différents modes traditionnels de mise en
valeur agricole développés par les agriculteurs dans différents agro-systèmes,
à travers des réseaux innovateurs selon des critères privilégiant le respect de
l’environnement et l’amélioration de la production et de la productivité des
activités agricoles, permet certainement cerner la question des savoirs locaux.
17
Introduction:
Contexte, problématique et méthodologie
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Afin de répondre à la question centrale posée auparavant « Comment réaliser
les objectifs de développement de la petite agriculture en termes de recherche,
de recherche développement et de transfert de technologie tout en préservant
les ressources naturelles? » la démarche suivante a été adoptée :
❐ Relecture des documents des travaux réalisés par les équipes
multidisciplinaires INRA et ICRA sur les systèmes de production durant
la période 1997 – 2005 (dans lesquelles je fus impliqué en qualité
d’évaluateur des équipes) et les placer par rapport au contexte actuel
de développement.
❐ Contact / Entretien avec des personnes ressources ayant travaillé dans
le domaine de la Recherche – Développement.
❐ Entretien semi-structuré avec des agriculteurs et professionnels
à l’occasion des missions sur le terrain (portes ouvertes, essais de
vérification, Salon International de l’Agriculture du Maroc…).
L’idée de rédiger ce livre vient d’une conviction profonde et personnelle
pour répondre au souci de ne pas perdre l’information, l’actualliser, la capitaliser
et la mettre à la disposition des gens des métiers agricoles et d’enrichir le débat
sur la problématique de la durabilité des systèmes de production agricole. Le
thème abordé dans ce livre se limite à la petite agriculture exclusivement.
L’approche de rédaction de ce livre combine analyse bibliographique, études
de cas et expériences personnelles. Le thème se limite à des cas étudiés dans
la montagne, les oasis et les parcours, arides et semi-arides. C’est une tentative
de confrontation des informations issues des diagnostics INRA – ICRA sur les
systèmes de production agricole au Maroc (1997 – 2005) avec les nouvelles
donnes du nouveau contexte marqué par le dynamisme que connait
aujourd’hui le secteur agricole marocain dans le cadre du Plan Maroc Vert.
Dans le chapitre qui suit, et avant de présenter les études de cas, il nous
semble important d’étaler sommairement, les grands chantiers politique,
socio-économique et environnemental en cours au Maroc ayant des rapports
directs avec la petite agriculture/agriculture solidaire et leurs implications sur la
recherche – développement et le transfert de technologies.
18
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Chapitre 1
L’agriculture solidaire dans
les stratégies nationales de
développement
Introduction
Le contexte actuel du Maroc, caractérisé par de nombreux chantiers lancés
durant les dernières années, est favorable au développement de la petite
agriculture et l’amélioration des conditions de vie des agriculteurs pauvres.
On cite entres autres : l’Initiative Nationale pour le Développement Humain, le
Plan Maroc Vert, la Charte de l’Environnement et de développement durable,
le Projet de la Régionalisation Avancée, le Processus de la Démocratisation et
l’Etat de Droit. La recherche agricole est interpellée à contribuer directement
ou indirectement aux objectifs de ces différentes stratégies de développement
économique, sociale et environnementale.
1. Les grands chantiers de développement rural au Maroc
1.1. Initiative Nationale pour le Développement Humain (INDH) : un atout pour
les populations démunies
L’initiative nationale pour le développement humain, (INDH), a donné depuis
son lancement en 2005 une nouvelle dynamique à la lutte contre les différentes
formes de pauvreté, d’exclusion sociale et d’enclavement, et entend répondre
aux premières nécessités des habitants des zones marginalisées urbaines
et rurales. L’INDH agit sur un large éventail de domaines, ses projets portent
notamment sur l’encouragement à la scolarisation, l’approvisionnement en
eau potable, la création de centres d’accueil pour handicapés ou encore le
financement de projets générateurs de revenus.
Dans son rapport, la Banque Mondiale (BM, 2006) note que le Maroc est
un pays surchargé des niveaux élevés de pauvreté, des inégalités des revenus
et des indicateurs faibles de développement humain et ce malgré les efforts
considérables menés dans le cadre de l’INDH durant les 6 dernières années.
Aujourd’hui, 15% de la population est considérée économiquement vulnérable,
dont les 2/3 situés en zone rurale (Nassif F, 2009).
19
L’agriculture solidaire dans les stratégies
nationales de développement
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
« …Nous avons, il y a quelques années, adopté une série de réformes
institutionnelles profondes, dans le but de consolider la démocratie de proximité,
participative. Ainsi, Nous avons lancé et mis en œuvre de grands plans et projets
de développement. De portée nationale, régionale ou locale, ces chantiers
placent le citoyen au cœur du processus de développement. Ils reposent sur
une politique contractuelle participative où les collectivités locales assurent un
rôle central.
C’est dans cet esprit que Nous avons lancé l’Initiative Nationale pour le
Développement Humain (INDH). Son objectif majeur est d’améliorer la situation
des catégories sociales et des zones périphériques de différentes communes
urbaines et rurales qui sont aux prises avec la pauvreté et la marginalisation… »
Encadré 1 : Extrait du Message de SM Le Roi Mohammed VI adressé à la
5ème édition des Journées panafricaines des collectivités et des gouvernements
locaux (17/12/09).
En adoptant une démarche participative de proximité impliquant les
différents acteurs et opérateurs locaux, l’INDH constitue une base solide et
un pilier clef de développement durable aussi bien rural, agricole, social,
économique, humain et environnemental. En fait, l’ensemble des programmes
d’actions relevant des différents départements ministériels constitue un seul
programme qui s’inter-complémente et qui requiert la synergie, la bonne
coordination et la circulation de l’information.
Le développement rural en général et de l’agriculture en particulier ont une
place de choix dans les programmes de l’INDH. Cette initiative concerne environ
5 millions de personnes dont 50% vivent en milieu rural dans des conditions
socio-économiquement difficiles. L’amélioration de leurs moyens d’existence
impose des interventions structurantes de développement.
 Contribution de la recherche agronomique :
La recherche agricole demeure un élément clef dans la mise en
œuvre des programmes d’action surtout ceux liés au développement
et la modernisation de l’agriculture et le développement des activités
génératrices de revenus pour les ruraux autour des technologies proposées
par la recherche. Beaucoup d’exemples illustrent la contribution de la
recherche agronomique (INRA), notamment aux programmes de l’INDH à
travers les technologies mises au point par les chercheurs en l’occurrence
dans le domaine de la transformation et la valorisation des produits de terroirs,
tels que la datte, le cactus, l’huile d’argan, et le fromage de chèvre. Des
unités de transformation appartenant aux coopératives féminines existent
aujourd’hui dans le Tafilalet, le Haouz, le Souss Massa, Guelmim – Assa Zag –
Smara et commencent à pénétrer le marché national générant des revenus
substantiels pour leurs adhérents.
20
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
L’agriculture solidaire dans les stratégies
nationales de développement
1.2. Plan Maroc Vert : opportunité pour améliorer les conditions de vie des
ruraux pauvres
L’agriculture nationale fait face à de nouveaux défis dont la mondialisation
et les changements climatiques et leurs effets sur les ressources naturelles
notamment la biodiversité, la rareté de l’eau, la dégradation des sols, la
pauvreté et la durabilité des systèmes de production. Les approches linéaires
de transfert de technologies qui sous-entendent une certaine suprématie de
l’ingénieur agronome / technicien par son expertise et ses connaissances sur
l’agriculteur sont en train de céder la place à de nouvelles méthodes basées
sur un partenariat entre les différents acteurs impliqués dans le développement
agricole à savoir le chercheur, l’agent de développement et l’agriculteur et ce
dans le cadre d’une compréhension commune des situations agricoles et des
stratégies et motivations réelles des uns et des autres pour un apprentissage
mutuel dans un esprit ouvert.
Dès lors, les paramètres socio-économiques, apanage du technicien, doivent
laisser la place à une nouvelle conception de la Recherche-Développement
où l’agriculteur, au centre de toutes les considérations, a son mot à dire et que
l’agronome / technicien, en tant que facilitateur, doit en tenir compte pour
comprendre la logique de l’agriculteur grâce à une grande qualité d’écoute et
d’analyse pour la validation commune des perceptions et des propositions.
L’histoire a montré que les projets de développement qui occultent l’intérêt
de la majorité des exploitants agricoles sont voués à l’échec. Par conséquent,
les projets de développement doivent créer les conditions à même de permettre
que la majorité des agriculteurs aient intérêt à adopter les systèmes de production
qui permettraient d’atteindre les objectifs des projets.
La nouvelle stratégie du département de l’agriculture, baptisée « Plan
Maroc Vert, PMV » interpelle toutes les composantes du système national
de la recherche et de la vulgarisation agricole: recherche, enseignement,
formation, développement à travailler ensemble (consortium) en synergie
pour accompagner la mise en œuvre de ce plan ambitieux. De même, la
redynamisation interprofessionnelle à travers le regroupement par l’incitation
facilitera le transfert de technologies. Cette nouvelle stratégie est déclinée en
Plans Agricoles Régionaux selon les deux piliers et un bloc de réformes du cadre
sectoriel. Elle considère l’Agriculture comme moteur de croissance économique
et sociale. Les deux piliers se présentent schématiquement comme suit :
21
L’agriculture solidaire dans les stratégies
nationales de développement
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Filières à haute valeur Ajoutée
Filières de la petite agriculture
Pilier 1: Développement
d’une
agriculture à haute productivité
et valeur ajoutée
en mobilisant
les investisseurs autour de projets
d’agrégation :
Pilier 2 : Accompagnement solidaire
de la petite agriculture par des
projets de reconversion vers les
filières les plus adaptées et les plus
attractives autour de l’agrégation
sociale au profit des agriculteurs
défavorisés :
- 400.000 exploitations ciblées
- 600 à 800
exploitants
ciblés
L’Impact attendu : Augmentation du PIB d’environ
70 àmilles
100 Md
DH et Réduction
110
à
150
Md
DH
d’investissement
de la pauvreté à la racine pour plus de 500.000
ménages
ruraux
(MAPM, 2008).
- 15 à
20 Md DH
d’investissement
- 700 à 900 projets
- 300 à 400
projetsplus
prévus
a. Plans Agricoles Régionaux : Une planification
donnant
de visibilité au
Encadré 2 : Plan Maroc Vert, ADA
niveau régional.
Encadré 3 : Plan Maroc Vert, ADA
La mise en œuvre du PMV a commencé à travers différentes actions qui ont
été déclinées en Plans Agricoles Régionaux (PAR) qui font l’objet de contratsprogrammes. L’objectif principal de ces PAR est de promouvoir le secteur
agricole dans chaque région à travers l’accroissement de la productivité et la
compétitivité des filières agricoles. Pour cela, le Département de l’Agriculture
se propose d’élaborer un modèle d’approche régionale basé sur les filières et
les bassins de production ; c’est à ce niveau que la recherche agronomique
est appelée à faire preuve de plus de créativité et d’innovations et apporter
son expertise en matière de : i) Valorisation des potentialités des terroirs
(foncier, ressources hydriques, socio-économique…) et réduction des effets
des contraintes du milieu physique, socio-économique, organisationnel et
commercial; ii) Optimisation de la mise en valeur agricole dans la région à
travers les programmes de recherche et de recherche-développement, à
l’horizon 2025, spécifiques à la petite agriculture, à chaque filière et à chaque
terroir.
1.2.1. L’agrégation : un mode d’organisation intéressant à institutionnaliser et
préservant les intérêts des petits agriculteurs et les spécificités locales.
L’agrégation vise le regroupement des acteurs et des opérateurs dans
l’agriculture autour de modèles innovants en les encourageant à adopter
des modes d’organisation rationnelle qui tiennent compte des exigences
dans l’ensemble des domaines de la chaîne de valeur (approvisionnement,
équipement, commercialisation, export). Une agrégation réussie doit permettre
de créer une valeur à même de maintenir équitablement les marges et revenus
des grands et petits agriculteurs4. L’agrégation est une contractualisation des
4 - KRADI C. et al, Le Plan Maroc Vert, une opportunité pour l’amélioration des performances de la
communication, et de l’intervention de la recherche et de la vulgarisation agricole au profit des petits
agriculteurs, FAO / Tunis, Novembre 2008
22
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
L’agriculture solidaire dans les stratégies
nationales de développement
relations entre les opérateurs professionnels concernés. Le schéma général retenu
par le « Plan Maroc Vert » est concrétisé par des contrats d’agrégation « Etat /
agrégateur » et « agrégateur / agrégés ». Les principes directeurs du choix de
l’agrégation sont :
❐ Participation à l’économie du
traditionnellement marginalisés ;
marché
des
petits
agrégés,
❐ Transfert de compétences et de technologies par une implication forte
de l’agrégateur ;
❐ Création de liens entre les petits exploitants et le marché des capitaux
par des partenariats ;
❐ Partage naturel des risques entre l’agrégateur et les agrégés rendu
possible par l’agrégation.
Les dimensions définissent les grands modèles d’agrégation (Tableau 1) sont
globalement: la vocation, le degré d’intervention dans la production et le mode
de gouvernance d’entreprise, communautariste ou corporatiste.
Tableau 1. Modèles d’agrégation.
Modèles
Définition
Exemples
Association des
agriculteurs
Regroupement d’agriculteurs
pour l’amélioration des pratiques
agricoles et/ ou la promotion des
filières, le développement de
débouchés
C’est un modèle de plus
en plus retenu par les
professionnels au niveau
des filières de production
stratégiques au Maroc
Coopérative classique
Mise en commun
d’activités (investissement,
approvisionnement en
intrants, support technique et
formation, développement de
débouchés,…)
Coopératives laitières
Contractualisation
commerciale (modèle
très répandu dans
l’agroalimentaire et la
distribution)
Contrats purement commerciaux
avec un acteur de référence
Société Agro-industrielle
« Aicha...»
Modèle de noyau
d’exploitations
Repose sur des contrats
commerciaux avec un acteur
de l’amont qui joue le rôle
de support et contrôle de la
production (fourniture d’intrants,
support technique, supervision)
Type de contrats passés
avec les producteurs
d’agrumes et de tomates
dans le « Souss »
Source : Comunication AKKA O. et KRADI C., atelier FAO, novembre 2008
23
L’agriculture solidaire dans les stratégies
nationales de développement
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Pour le cas spécifique des petits agriculteurs objet de ce livre, et partant
du fait qui’ils ne peuvent pas faire partie des soumissionnaires aux appels
d’offres d’acquisition de terre dans le cadre des projets d’investissement
lancés par le département de l’agriculture. Le Plan Maroc vert a introduit le
concept de l’agrégation, dans lequel le soumissionnaire s’engage à devenir un
agrégateur et prendre en charge les petits agriculteurs qui se trouvent dans son
environnement. A ce niveau, toute la question de relation entre l’agriculteur
agrégé et l’agrégateur est posée nécessitant une clarification et même une
institutionnalisation pour protéger les intérêts des uns et des autres et éviter par
là les craintes surtout des petits agriculteurs qui manifestent des craintes de voir
leurs efforts exploités par les autres. Un système de suivi-évaluation efficace de
tout le processus doit être mis en place avec la publication de ses résultats.
1.2.2. Réorganisation et réadaptation des structures d’interventions agricoles
au Plan Maroc Vert :
❐ Création de l’Agence de Développement Agricole (ADA) ayant pour
missions d’identifier et de cadrer les grands projets autour des modèles
d’agrégation en vue d’encourager les investissements. Elle aura aussi pour
tâche d’encadrer les opérations de reconversion et de diversification des
cultures. Sans oublier la veille qu’elle doit assurer pour l’ensemble de la
stratégie.
❐ Création de l’Office National de Sécurité Sanitaire des Aliments (ONSSA)
pour mettre fin à la multitude d’intervenants et d’assurer la sécurité
sanitaire des aliments et la protection du consommateur.
❐ Création de l’Agence Nationale de Développement des Zones Oasiennes
et de l’Arganier (ANDZOA) pour coordonner et mettre en cohérence toutes
les interventions agricoles et veiller à leurs exécution et suivi-évaluation.
❐ Réforme des Chambres d’Agriculture (CA) modifiant le découpage
régional et instituant une chambre par région, soit 16 au lieu de 37 et
réadaptation le statut en vigueur aux besoins du monde agricole. Il s’agit
enfin d’en améliorer l’intervention en les dotant de moyens humains et
financiers suffisants.
❐ Lancement des agropoles5 qui sont des plates formes et /ou pôles
de Recherche – Développement destinés à répondre aux besoins
des agro-industriels et des futurs investisseurs dans la valorisation et
la transformation des produits agricoles en leur proposant des outils,
5- Il s’agit de six pôles de l’agroalimentaire de Meknès, Berkane, Souss, Gharb, El Haouz et Tadla, dont la
construction est prévue d’ici à 2015 dans le cadre de la Charte nationale du décollage industriel et du
Plan Maroc vert. Ces pôles draineront des investissements importants permettant la création de postes
d’emplois et devraient permettre une valorisation de 50% des produits agricoles dans les zones concernées. MAPM, MAP février 2012.
24
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
L’agriculture solidaire dans les stratégies
nationales de développement
procédés, connaissances et encadrement pour optimiser la productivité
et la qualité. Le rôle de la recherche agronomique dans la conception,
l’encadrement et l’opérationnalisation des laboratoires de RD et qualité
par la mobilisation des chercheurs est primordial.
❐ Dans le cadre du Partenariat Public-Privé et afin de mettre en valeur les
terres agricoles appartenant à l’Etat. L’opération consiste en la location
des terres sous formes de petits, moyens et grands projets lancés dans le
cadre d’un appel d’offres ouvert à l’international. La participation était
très forte de la part des marocains et des étrangers. L’évaluation des
offres a été assurée par une équipe d’experts de différentes spécialités,
dont des chercheurs de l’INRA.
❐ Réforme du Système National de la Recherche – Formation –
Enseignement6 en vue d’augmenter son efficacité et efficience dans le
cadre de consortium en tant qu’instrument d’appui pour la réalisation
des objectifs du Plan Maroc Vert. Une des mesures préconisée est le
statut de chercheur lui assurant un cadre favorable motivant pour plus
d’épanouissement et de créativité.
❐ Refonte du Système de la Vulgarisation Agricole7 qui avait montré ses
limites, et ce pour assurer un conseil de proximité aux agriculteurs et
réussir le transfert de technologies selon les besoins de l’exploitant et
de son milieu et selon une intensification raisonnée respectueuse de
l’environnement dans le cade des PAR.
❐ Exonéré d’impôt jusqu’à 2013, des mesures seraient prises pour instaurer
un Régime de Fiscalité Agricole8, fondé sur les principes de justice
fiscale et de solidarité sociale, ainsi que sur la nécessaire préservation
de la compétitivité des activités agricoles. Ce nouveau régime devrait
être adapté au monde agricole et devrait prendre en considération la
précarité sociale des petits agriculteurs et refléter le devoir de solidarité
à leur égard, en continuant à subventionner les cultures traditionnelles
vivrières à faible rendement sans remettre en cause la compétitivité
de l’agriculture. La situation idéale serait que les recettes fiscales soient
réinjectées dans le secteur.
6- L’étude stratégique du système marocaine de recherche et d’enseignement supérieur agricoles (INRA,
IAV Hassan II, ENA Meknès et ENFI ) a pour objectif de s’assurer que la recherche et la formation agricoles
apportent un appuui optimal à la mise en œuvre du plan Maroc Vert.
7 - Il s’agit d’une réforme profonde du système actuel de vulgarisation agricole et des structures du ministère chargées de ces misssions, notamment les Centres de Travaux Agricoles, les Centres de Mise en
Valeur Agricole et les Centres de Développement Agricole
8- Les grands chantiers du MAMP, l’économiste du 4 septembre 2008.
25
L’agriculture solidaire dans les stratégies
nationales de développement
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
❐ L’appui aux agriculteurs à travers le Fond de Développement Agricole9
(FDA) pour faciliter la reconversion, l’intensification et la diversification des
cultures et la modernisation des exploitations dans le cadre de projets
d’agrégation.
❐ Mise en place du Centre de Ressources pour le Pilier II du Plan Maroc Vert.
C’est un Groupement d’Intérêt Public, basé à Ifrane, dédié exclusivement
à l’agriculture solidaire. Il consiste à fédérer les énergies des intervenants
de ce groupement dans le cadre du dispositif institutionnel mis en place
(consortium) selon des approches de développement territorial.
❐ Mise en place d’un nouveau mode de gouvernance et de gestion
de l’approvisionnement des agriculteurs en facteurs de production
(semences, engrais…) au temps opportun, avec une qualité assurée et
des prix abordables et préserver les intérêts des producteurs des effets de
la mondialisation.
On peut dire que le Maroc dispose aujourd’hui d’une vision claire et cohérente
de développement de l’agriculture, notamment la petite agriculture, ce qui
implique naturellement un nouveau mode de gouvernance des programmes de
développement focalisés sur des résultats concrets au profit des communautés
rurales. Le PMV est reconnu par des experts comme étant une stratégie volontariste
et ambitieuse marquant une certaine réhabilitation du secteur de l’agriculture
et la politique agricole dans les politiques publiques10 traduites concrètement
par les dotations budgétaires du MAPM mobilisées depuis 2008. Bien entendu, le
PMV qui est à ses débuts soulève un certain nombre d’inquiétudes liées : i) à la
pérennité des projets d’agrégation et contrats programmes lancés pour les deux
piliers ii) au devenir et finalité de la petite agriculture en termes de productivité
et compétitivité pour tirer profit du marché et améliorer ses moyens d’existence,
iii) aux ressources humaines du département de l’agriculture dont une grande
partie des ingénieurs et techniciens qui vont partir massivement en retraite à
partir de 2014, iv) à la disponibilité de la main d’œuvre qui commence à poser
de nombreux problèmes dans plusieurs régions agricoles du Maroc et v) au
système de suivi-évaluation de l’impact du PMV sur les communautés rurales.
En fait, l’enjeu est énorme. L’année 2012 s’annonce cruciale pour le
Département de l’Agriculture en termes de stratégie d’exécution du Plan
Maroc Vert pour qu’il prenne du rythme pour atteindre sa vitesse de croisière
tout en opérationnalisant et concrétisant sur le terrain toutes les conventions,
programmes d’investissement et engagements liants les investisseurs et les
9- Le nouveau système de subventions agricoles mis en place propose l’instauration de nouvelles aides
en conformité avec les engagements pris dans le cadre des contrats programmes signés entre l’Etat et
les interprofessions des principales filières de production, ainsi que le renforcement des aides allouées et
l’encouragement de l’agrégation. MAPM, FDA, Edition 2011 p.5
10 - Akesbi N., Le Plan Maroc Vert : une analyse critique, questions d’économie marocaine 2011
26
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
L’agriculture solidaire dans les stratégies
nationales de développement
agriculteurs à l’Etat. Ceci requiert des compétences et beaucoup d’abnégation
pour atteindre les objectifs fixés.
Lors du Salon International de l’Agriculture du Maroc 2011, dédié à l’agriculture
solidaire, le débat a été axé sur les modalités de mise en œuvre des programmes
d’action de la petite agriculture dite « Pilier II du Plan Maroc Vert ». Ce débat
coïncide avec les revendications de plus en plus pressantes pour une agriculture
marocaine équitable assurant aux petits agriculteurs des revenus en mesure de
leur garantir dignité et conditions de vie acceptables. Ceci suppose une forte
mobilisation des chercheurs, développeurs, vulgarisateurs, société civile et bien
entendu l’appui des décideurs politiques pour la mobilisation des fonds et des
investissements pour atteindre les objectifs d’améliorer les conditions de vie et
les moyens d’existence d’environ un million de petits exploitants. Les défis et les
enjeux sont énormes pour les faire sortir de la pauvreté et de l’exclusion sociale.
 Contribution de la recherche agronomique :
La recherche agronomique, depuis le lancement du PMV a mobilisé ses
chercheurs et tout son savoir pour son accompagnement et sa mise en œuvre.
Concrètement, les chercheurs ont contribué à l’identification et la formulation
des actions des Plans Agricoles Régionaux (PAR). Les besoins de ces PAR ont été
pris en compte dans le Programme de Recherche à Moyen Terme 2009 – 2012.
Elle a multiplié les efforts pour accompagner les différentes filières agricoles
à travers son offre en technologies mises au point par les chercheurs et pour
renforcer la politique agricole par des connaissances et outils d’aide à la prise
de décision.
Dans ce sens l’INRA est entrain de développer tout un programme de
travil en consortium11 autour de projets communs, tels que : les cartes de
fertilités des sols cultivés, l’arboriculture fruitière dans le cadre du programme
du Millenium Account (MCA), les actions de Recherche –Développement
communes en appui aux Contrats Programmes et la représentation au niveau
des Agropoles.
Tout en restant sur cette lancée, l'INRA a procédé à l'évaluation à
mi-parcours de son Programme de Recherche Moyen Terme 2009-2012 pour
son réajustement par rapport aux besoins des Plans Agricoles Régionaux12.
11 - Consortium regroupant INRA-IAV Hassan II-ENA Méknès et ENFI Salé : convention cadre signée le 23
avril 2009
12 - document de travail présenté au comité technique de l’INRA le 29 Septembre 2011
27
L’agriculture solidaire dans les stratégies
nationales de développement
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
1.3. Charte de l’environnement et du développement durable: préserver
l’avenir pour les futures générations
Les enjeux environnementaux sont devenus de plus en plus importants en raison
de la croissance démographique, de l’urbanisation, de l’amélioration du niveau
de vie et de l’essor économique marqué par de grands projets d’infrastructures,
impliquant ainsi une augmentation des besoins en énergie et en ressources
naturelles. La charte de l’environnement s’inscrit dans le cadre d’une logique
fédératrice, visant à cimenter les initiatives et les efforts entrepris jusqu’à présent
en matière d’environnement, pour en faire une action forte et concertée. Toutes
les forces vives du pays (individus, associations, entreprises publiques et privées,
élus, Etat) sont mobilisées pour concrétiser l’intégration de la protection de
l’environnement dans les évolutions en cours pour le développement humain
et la croissance économique. C’est un projet de société ayant pour principal
objectif :
❐ La Recherche équilibrée entre protection de l’environnement et
développement ;
❐ L’Adoption de bons principes de protection de l’environnement et de
développement ;
❐ L’Incitation au changement des mentalités en faveur d’attitudes
responsables à l’égard de l’environnement ;
❐ La Promotion de l’approche participative.
Ce chantier marquant le contexte actuel est relatif à la préservation des
ressources naturelles. Il s’agit de la charte de l’environnement lancée en 2009
qui donne une nouvelle dimension à la protection de l’environnement et la
réalisation des objectifs du millénaire pour le développement définis par l’ONU.
Pour le Maroc, cette charte a pour objectifs de: (i) créer une dynamique nouvelle
et réaffirmer que la préservation de l’environnement doit être une préoccupation
permanente de tous les citoyens dans le processus de développement durable
du Royaume ; (ii) rappeler les principes fondamentaux du développement
durable et de l’environnement ; (iii) définir en conséquence les responsabilités
individuelles et collectives de tous les marocains, afin qu’ils se mobilisent selon
leurs activités. La volonté affichée par les pouvoirs publics est que la Charte
nationale de l’environnement puisse jouer un rôle déterminant dans la mise en
place d’une approche stratégique globale comportant des recommandations
générales pour aboutir à des lois concrètes et des actions spécifiques en fonction
des secteurs d’activités et des spécificités régionales13.
13 - www.chartenvironnement.ma
28
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
L’agriculture solidaire dans les stratégies
nationales de développement
 Contribution de la recherche agronomique :
La recherche agronomique s’inscrit parfaitement dans cette logique
de développement durable de notre agriculture et des espaces ruraux.
La démarche adoptée combine le développement durable, le progrès
technologique pour améliorer la productivité et la préservation des ressources
naturelles, objectifs inscrits dans les Plans Agricoles Régionaux du Plan Maroc
Vert. L’agro-écologie constitue le principe directeur de l’intervention de la
recherche dans les domaines suivants :
❐ Evaluation de l’impact des changements climatiques sur les productions
agricoles et études des comportements des agriculteurs ;
❐ Renforcement des capacités des agriculteurs par un accompagnement
de transfert de technologies ayant trait aux techniques d’économie de
l’eau ;
❐ Renforcement de la capacité adaptative des populations rurales
vulnérables aux changements climatiques à travers l’identification et le
développement d’options techniques, institutionnelles et les politiques
appropriées ;
❐ Développement de systèmes opérationnels de prévision de la production
agricole à l’échelle nationale et élaboration d’un système d’avertissement
agricole ;
❐ Création des variétés de céréales avec les caractéristiques de tolérance
à la sécheresse et de résistance aux principales maladies et parasites ;
❐ Amélioration de la productivité et la durabilité des systèmes de culture
à travers l’application et l’adaptation des techniques de semis direct en
zones arides et semi arides principalement ;
❐ Développement de méthodes de lutte intégrées contre les maladies et
ravageurs;
❐ Développement du cactus par la création variétale, l’amélioration des
techniques culturales et la recherche de débouchés agro-industriels, en
vue de la lutte contre la désertification et la pauvreté ;
❐ Etude de l’impact des techniques de collecte des eaux pluviales sur la
production végétale, la couverture du sol et la biodiversité en zone aride
de l’Oriental.
1.4. Démocratisation de la vie publique et l’Etat de droit : garant pour
la réduction de la pauvreté et des disparités sociales
Le grand chantier en cours au Maroc sur la démocratisation de la vie publique
et la justice sociale vont permettre de créer un environnement favorable pour le
développement de la petite agriculture, communément appelée « agriculture
solidaire ».
Aujourd’hui, le Maroc renforce le processus de consolidation de l’Etat de
droit inspiré des réalités nationales. Le progrès démocratique entamé depuis des
années est en cours d’être couronné à travers les réformes constitutionnelles,
29
L’agriculture solidaire dans les stratégies
nationales de développement
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
juridiques et politiques contenues dans le discours de S.M. le Roi Mohamed VI
du 9 mars 2011 et qui sont de nature à répondre aux aspirations du peuple
marocain et de mettre le Maroc sur les rails d’une vraie démocratie spécifique
aux réalités marocaines.
Le débat amorcé aujourd’hui au Maroc est sans nul doute un acquis
important qui témoigne de la volonté politique d’aller de l’avant, seule
voie qui permettra un développement durable qui profitera à toutes les
catégories sociales marocaines et garantira la stabilité socio-économique et
politique dont jouit le Maroc. Bien entendu, la démocratie et la citoyenneté
impliquent aussi l’identification des obstacles à l’action réformatrice. La
démocratisation n’est pas seulement une question de liberté, mais aussi de
politique publique, de gestion des ressources et de leur répartition équitable
ainsi que de la bonne gouvernance. C’est aussi un préalable pour atténuer
la frustration des ruraux pauvres et apporter des réponses à leurs attentes
qui sont nombreuses notamment en matière de développement agricole
et rural.
Conscient que toutes les sociétés développées d’aujourd’hui sont des
sociétés du savoir, les décideurs au Maroc ont bien compris que la voie
de la recherche, de la science et de l’innovation est la seule voie pour
créer de la richesse. Le rapport du cinquantenaire de l’indépendance
du Royaume du Maroc « l’avenir se construit et le meilleur est possible »
a souligné que i) l’établissement d’une société de la connaissance et
d’une économie du savoir constitue aujourd’hui un impératif majeur dans
le cadre de la compétition internationale, de l’ouverture économique et
de la mondialisation des échanges et ii) une nation qui s’engage dans la
société du savoir ne peut se contenter de transfert de technologies. Elle
doit disposer d’instruments et de compétences propres de Recherche –
Développement14.
Le Maroc doit, en d’autres termes, privilégier l’option de développement
de la science et de la connaissance s’il veut être au niveau des aspirations
du peuple marocain dans un environnement où la question de la sécurité
alimentaire, l’atténuation des effets des changements climatiques, la création
des richesses et de l’emploi sont devenues des questions de souverainetés
du pays pour se protéger des effets négatifs de la globalisation.
La réponse logique à cette importante conclusion est que la recherche
scientifique et technique est aujourd’hui constitutionnalisée et reconnue à
plus d’un titre comme élément clef de développement économique et social
du pays. En effet, la nouvelle constitution validée par le peuple marocain lors
du référendum (1er juillet 2011) met en exergue le rôle des pouvoirs publics
14 - Rapport 50 ans de développement humain, perspectives 2025, RDH-synthèse, janvier 2006, p. 28
et 37
30
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
L’agriculture solidaire dans les stratégies
nationales de développement
dans l’encouragement et l’appui au développement de la science15. C’est
une expression et un message clair pour bâtir une société de savoir et des
technologies.
La nouvelle constitution est bel et bien le socle d’un pacte social basé
sur la solidarité et la citoyenneté comme mesure d’accompagnement à
travers la contribution de l’agriculture moderne à haute valeur ajoutée au
développement de la petite agriculture des zones pauvres, marginalisées et
enclavées selon des formules et des mécanismes concertés d’insertion et de
conversion des jeunes diplômés chômeurs en adéquation avec les besoins
de développement économique et social du pays en général et du monde
rural en particulier.
 Contribution de la recherche agronomique :
La recherche agronomique dans le cadre du Système National de
la Recherche Agricole (Consortium) est interpellée à promouvoir des
technologies susceptibles de créer plus d’opportunités d’emploi des
jeunes ruraux et urbains. L’INRA a ouvert un nouveau chantier avec les
Centres Régionaux d’Investissement (CRI) en offrant ses résultats et son
expertise, en l’occurrence dans le domaine de l’agro-alimentaire, en vue
de créer des petites et moyennes entreprises autour de ces technologies
et, par conséquent, réduire la tension sociale. Dans ce sens, l’INRA a mis en
place un espace de concertation avec ses partenaires régionaux appelé
Conseils Régionaux de Concertation et d’Orientation de la Recherche
(CRCO).
1.5. Régionalisation avancée : vers le renforcement du rôle et pouvoirs des
présidents des conseils régionaux et des élus
Le projet de régionalisation16 avancée, lancé en janvier 2010, par la
Commission Consultative de la Régionalisation (CCR), prévoit d’étendre les
pouvoirs des présidents des conseils régionaux. La régionalisation est définie
comme étant «le transfert des pouvoirs et des décisions de la centrale à la
région ». En effet, les présidents des conseils régionaux jouiront, désormais, de
leur pouvoir d’exécution des délibérations desdits conseils. Ils ne dépendront
plus des gouverneurs et des walis. Il leur sera attribué la gestion totale des
budgets des assemblées communales, pour le financement des projets. Elus
démocratiquement, les présidents des conseils seront responsables devant
leurs concitoyens et devant la loi.
15 - Constitution du Maroc 2011, Titre II :
- Article 26 : Les pouvoirs publics apportent, par des moyens appropriés, leur appui au développement de
la création culturelle et artistique, et de la recherche scientifique et technique…
- Article 33 : Il incombe aux pouvoirs publics de prendre toutes les mesures appropriées en vue : ….
Faciliter l’accès des jeunes à la culture, à la science, à la technologie, à l’art, au sport et aux loisirs, tout
en créant les conditions propices au plein déploiement de leur potentiel créatif et innovant dans tous ces
domaines.
16 - Source : htpp://www yabiladi.com/maroc-innovation projet régionalisation avancé.html
31
L’agriculture solidaire dans les stratégies
nationales de développement
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Les conseils régionaux superviseront toutes les structures administratives
territoriales. Les collectivités locales et les conseils préfectoraux et provinciaux
devront mettre en application les directives de leurs conseils respectifs. Ils
élaboreront leurs propres plans, programmes et projets de développement, en
cohérence avec la vision adoptée par le conseil régional et approuvée par
l’Etat.
Dans ce projet, la femme est au centre d’intérêt. En effet, il est question à
travers la régionalisation de renforcer la participation de la femme à la gestion
des affaires régionales. Et ce, à travers l’égalité entre hommes et femmes, de
manière à encourager l’accès de la femme aux postes de direction.
En fait, la régionalisation avancée a pour objectif majeur le « développement
intégré et durable sur les plans économique, social, culturel et environnemental ».
Elle prévoit la répartition du pays en 12 régions au lieu de 16 aujourd’hui. Les
principes directeurs de ce découpage ont traits aux spécificités et vocations
régionales, aux complémentarités et solidarités et à la proportionnalité et
l’équilibre entre les régions. La régionalisation est considérée par les experts
comme une solution cohérente et adéquate au développement économique
et social en harmonie avec les besoins et les aspirations des populations urbaines
et rurales de chaque région du Maroc.
 Contribution de la recherche agronomique :
La recherche agronomique a opté depuis bien longtemps pour la
régionalisation de la recherche et du renforcement de la recherche de
proximité décentralisée. Les Programmes de Recherches à Moyen Terme mis
en place sont basés sur les vocations régionales et sont pilotées par les Centres
Régionaux de la Recherche Agronomique. Ces derniers offrent un appui dans
la mise en œuvre des stratégies régionales de développement du monde rural
en général et l’agriculture en particulier.
2. Le développement durable comme finalité de la recherche
agronomique : Quel apport dans ce contexte ?
2.1. Finalité de la recherche
La recherche agronomique demeure un instrument clef pour
l’accompagnement d’une manière directe ou indirecte des chantiers structurants
présentés ci-dessus. En effet, les technologies mises au point par les chercheurs
ont pour principal objectif : (i) l’amélioration de la valeur ajoutée agricole au
niveau des différentes régions cibles et au niveau national par une augmentation
de la production et une réduction des coûts ; (ii) la promotion de la diversification
des systèmes de production pour la minimisation des risques compte tenu du
caractère aléatoire de l’agriculture dans les régions cibles ; (iii) la préservation
des potentialités productives des écosystèmes et des systèmes de production
agricole (iv) la contribution à la formation accompagnatrice de transfert de
technologie.
32
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
❐
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❐
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❐
L’agriculture solidaire dans les stratégies
nationales de développement
L’Institut national de la recherche agronomique (INRA) existe au Maroc depuis
bientôt un siècle. Il est chargé par la loi de :
Procéder aux recherches scientifiques, techniques et économiques ayant
pour objet le développement de l’agriculture et de l’élevage ;
Effectuer les études prospectives, en particulier celles qui portent sur le
milieu naturel ou qui ont trait à l’amélioration des productions végétales ou
animales ;
Entreprendre, soit de sa propre initiative, soit à la demande des particuliers,
des essais sur les cultures nouvelles et sur les cultures à améliorer ainsi que sur
la production animale et, d’une façon générale, de mener toutes les actions
expérimentales à caractère agricole ou celles qui concernent la mise au
point de procédés de transformation et utilisation des produits végétaux et
animaux ;
Assurer, dans le cadre de ses compétences, le contrôle des recherches,
études ou travaux effectués pour le compte des personnes publiques ;
Assurer la diffusion de la documentation relative tant à ses propres recherches,
études ou travaux effectués pour le compte des personnes publiques ;
Etudier et déterminer scientifiquement les modalités pratiques de l’application
des résultats de ses recherches et, dans ce cadre, de conseiller les organismes
de vulgarisation agricole et les agriculteurs ;
Commercialiser les résultats de ses recherches, études et travaux.
Source : Dahir de Création n° 81-204 du 3 Joumada II 1401 (8 avril 1981) portant promulgation
de la loi n° 40-80 portant création de l’INRA
Encadré 4 : Missions de l’INRA
En termes de planification de la Recherche – développement et compte
tenu des orientations de la politique de développement agricole, la demande
est appréhendée à travers les besoins des agriculteurs opérant dans les divers
systèmes de production selon une approche participative impliquant tous
les acteurs et opérateurs locaux et régionaux dans la programmation de la
recherche. Elle est conduite en plusieurs étapes successives et itératives, à travers
un diagnostic approfondi aboutissant à des projets de recherche par filière
de production à objectifs bien identifiés selon la méthode de Programmation
par Objectifs (PPO)17. Ces étapes concernent essentiellement : (i) la prise en
considération des objectifs de développement ; (ii) l’analyse des contraintes
entravant ce développement ; (iii) la réalisation du bilan des résultats pour
chacun des aspects étudiés ; (iv) la définition des objectifs de recherche;
(v) l’établissement des priorités et de la faisabilité; (vi) l’identification des projets
de recherche.
17 - Collion M-H et Kissi A., Guide d’élaboration de programmes et d’établissement de priorités, ISNAR –
octobre 1994
33
L’agriculture solidaire dans les stratégies
nationales de développement
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Une telle approche permet d’aboutir à des résultats répondant aux besoins
exprimés et les produits et les technologies élaborées par la recherche se
présentent comme gamme de solutions aux problèmes de développement
agricole.
A partir de 2003, une nouvelle approche de programmation18 a été adoptée
pour l élaboration des Programmes de Recherche Moyen Terme (PRMT). Elle est
basée sur la concertation au niveau national et régional. Ainsi des conférences
et des exposés ont été donnés en présence des décideurs et cadres du MAMP.
Aussi, des ateliers régionaux ont été organisés au niveau des zones d’actions des
10 Centres Régionaux de la Recherche Agronomique couvrant par là toute la
diversité agro-écologiques du pays. Ces ateliers se sont déroulés en présences
de tous les acteurs et opérateurs régionaux qui se sont prononcés sur les priorités
et la pertinence des opérations de recherche et recherche – développement
conduites dans leurs régions respectives.
2.2. Les approches et les outils : un préalable pour la compréhension du
fonctionnement des systèmes de production et le développement
participatif des technologies
2.2.1. Démarche Recherche – Développement (1990-2000)
C’est une démarche multidisciplinaire participative, itérative et intégrée
impliquant les agriculteurs concernés afin de maximiser les chances d’adoption
et de promotion des nouvelles obtentions de la recherche agronomique.
Cette approche s’articule autour de quatre phases interactives qui sont : le
diagnostic de la situation au niveau de l’exploitation agricole ; la vérification
des technologies en milieu réel ; la diffusion des résultats et le suivi-évaluation
des technologies, de leur l’impact et des réajustements opérés au cours de
cette démarche. Cette dernière est définie comme étant une expérimentation
en vraie grandeur, en concertation avec les agriculteurs, des améliorations
techniques, économiques et sociales de leurs systèmes de production et des
modalités d’exploitation de leur milieu (Jouve, 1993).
Pour la diffusion du progrès technologique, la recherche agronomique conduit
des essais chez les agriculteurs selon les spécificités des systèmes de production
et des agro-systèmes. Les résultats réussis sont repris par les structures de
vulgarisation et de conseil pour leur diffusion à grande échelle. Cette démarche,
quoique relativement coûteuse en temps, s’avère fructueuse puisqu’elle permet,
à terme, de faire connaître les technologies, les obtentions en particulier et leur
adoption par les producteurs. Les tests du marché sont pratiqués par l’INRA à
travers la vérification de ses nouvelles obtentions technologiques en milieu réel
et l’évaluation de leurs impacts auprès des utilisateurs.
18- Programmes de Recherche Moyen Terme. Document de travail présenté au Comité Technique de
l’INRA en novembre 2008. Division Scientifique / INR A Maroc.
34
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
L’agriculture solidaire dans les stratégies
nationales de développement
2.2.2. Démarche Recherche Agricole pour le Développement, RAD (2000 à 2011)
C’est une méthodologie basée sur la démarche : Recherche Orientée
vers le Développement (RAD). Elle est adaptée aux zones à faible potentiel
agricole. Elle intègre la recherche en équipe multi et interdisciplinaire et se base
sur des approches systémiques et participatives, conciliant entre les différents
objectifs de développement. Elle se veut une nouvelle démarche ciblant
les problèmes réels et permet l’analyse de toutes les contraintes techniques,
socio-économiques, écologiques et politiques. Elle permet également la
prioritisation des options de recherche – développement en fonction des critères
multiples de développement19.
Cette démarche est complétée par l’application simultanée de la méthode
formelle (enquête auprès des acteurs) et la méthode informelle inspirée de la
Méthode Active de Recherche Participative (MARP)20. Cette dernière constitue
incontestablement une rupture avec la recherche cloisonnée en permettant une
plus grande intégration des disciplines et de disposer des informations qualitatives
exploitées dans l’analyse. En fait, le développement participatif des technologies
au niveau local est un processus où les chercheurs en groupes multidisciplinaires,
les développeurs, les vulgarisateurs travaillent en étroite collaboration avec les
agriculteurs dans le cadre d’un programme de recherche–développement
au niveau d’un terroir donné, et ce, pour améliorer davantage la capacité
d’expérimentation et d’innovation des agriculteurs pour la mise au point des
technologies adaptées aux systèmes de production. Les principes de base de ce
processus sont : (i) l’analyse des connaissances endogènes et leur capitalisation
en vue de leur amélioration et leur diffusion à grande échelle via la démarche
de l’apprentissage par le savoir : « de l’agriculteur à l’agriculteur » ; (ii) L’écoute
d’autrui durant le processus : considérer autrui comme une richesse, car chacun
a sa logique interne ; (iii) l’expérimentation en milieu réel, c’est-à-dire dans les
conditions réelles de l’agriculteur de manière à ce que la solution proposée soit
adaptée aux contraintes identifiées et aux conditions réelles des agriculteurs.
Dans ce processus, la réussite du diagnostic participatif par des équipes
multidisciplinaires est conditionnée par la capacité des chercheurs et techniciens
d’être interactifs avec les agriculteurs et leur aptitude à comprendre les réalités
du milieu et leurs déclinaisons en programme de mise au point des innovations. Le
renforcement des liens avec les partenaires de développement, les associations
et organisations des producteurs non gouvernementales est une composante
vitale pour la promotion des résultats de recherche et un créneau porteur pour
la promotion du développement participatif au niveau local.
19 - Centre International de la Recherche Agricole orientée vers le développement, Agropolis Montpellier
20 - Bara GUEYE, Emergence et développement de la MARP au Sahel, acquis, contraintes et nouveaux
défis, janvier 1999
35
L’agriculture solidaire dans les stratégies
nationales de développement
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
2.2.3. Diagnostic des systèmes de production agricole/ analyse de
la demande
L’analyse de la demande est un élément clef de la réussite de la
programmation de la recherche-action / formation en termes de réalisation
et d’adhésion des agriculteurs. Le but recherché est d’économiser le temps
et l’énergie en ciblant le transfert de technologie et de réussir un impact
durable sur le développement. En fait, le diagnostic doit permettre de cerner
les potentialités, les contraintes et les problèmes majeurs qui menacent la
durabilité des écosystèmes notamment ceux liés à l’utilisation des ressources
naturelles et les contraintes socio-économiques et institutionnelles. Les résultats
des diagnostics doivent faciliter la formulation des scénarii de développement
possibles autour des forces motrices majeures supposées conditionner la
dynamique des systèmes de production. La synthèse des notions de diagnostics
pratiqués par les chercheurs/développeurs figure dans le tableau 2.
Tableau 2. Notion de diagnostic.
Vision des
contraintes et
solutions
Nature du diagnostic
Objectifs du diagnostic
Recherche classique /
technique
36
Identifier les facteurs
améliorant les rendements
des cultures
Recherche Système
Identifier les catégories
de clients, leurs
problèmes et les solutions
appropriées (Réduire
l’hétérogénéité entre les
agriculteurs pour mieux
cibler l’action)
Recherche participative
& recherche – action
Identifier les catégories
des partenaires, leurs
problèmes et une large
gamme de solutions
possibles (Réduire
l’hétérogénéité)
Durabilité / optimisation
Durabilité / optimisation
de l’intervention agricole
Purement technique,
centrée sur les plantes et les
animaux
Technique et socioéconomique et
environnemental
systémique, itérative
orientée vers le
développement
Compromis / consensus
négocié entre intérêt
technique et socioéconomique de divers
groupes d’acteurs
autour d’une action
ou programme
de Recherchedéveloppement
Similaires pour une large
gamme de zones et
exploitations agricoles
Similaires au sein des
catégories homogènes
des agriculteurs
identifiés
Variables pour les
différents partenaires,
zones, types
d’exploitations
Variables entre
catégories
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Solutions techniques
adaptées aux conditions
socio-économiques des
agriculteurs
La meilleure solution est
un compromis négocié
entre multiples groupes
d’intérêt
Paquet technologique
uniforme
Paquets technologiques
adaptés à chaque type
d’exploitation
Offrir une gamme
d’options et d’outils pour
faciliter la composition
et l’expérimentation de
paquets individualisés
par les agriculteurs
Standardisée et prêt-àporter
Fait à la mesure
Gamme d’options
Recherche en station fournit
la technologie finale sans
recherche adaptative
Recherche en station
fournit input pour
recherche adaptative
en exploitation
Recherche en station
fournit input pour faciliter
la recherche adaptative
par les agriculteurs
Perception
des solutions
Conviction que l’optimum
technique est la meilleure
solution
Type de
solution
Recommandations
Rôle de la recherche
Rôle du
chercheur
Rôle du
développeur /
vulgarisateur
Rôle des
agriculteurs
L’agriculture solidaire dans les stratégies
nationales de développement
Recherche adaptative
fournit technologie
appropriée spécifique
à chaque type
d’exploitation
Recherche dirigée par des
agronomes à
Gamme restreinte de profils
Recherche dirigée
par des équipes
multidisciplinaires
Recherche dirigée
par les agriculteurs
et des équipes
multidisciplinaires
Adoption des gammes
proposées par les
agriculteurs
Modèle linéaire de Transfert
de technologie
Transfert de technologie
avec feed-back à la
recherche adaptative
- Participe à la recherche
- Support de
connaissances
pour agriculteurs –
expérimentateurs
- Faciliter l’apprentissage
- Feed-back à la
recherche
Récepteurs, utilisateurs
« finaux »
Participent à
l’expérimentation en
exploitation, récepteurs,
utilisateurs « finaux »
Partenaires dans
l’expérimentation en
milieu réel et évaluateurs
Source : ICRA, adapté par KRADI
37
L’agriculture solidaire dans les stratégies
nationales de développement
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Le volet environnemental doit faire partie intégrante de l’ensemble des
programmes de recherche selon une approche participative. Il est appréhendé
notamment à travers les aspects liés : (i) à la gestion durable des ressources
naturelles, (ii) à la lutte contre les ravageurs et les maladies par la voie génétique,
(iii) au développement des méthodes de lutte biologique liées aux bonnes
pratiques et utilisation des bio-fongicides et des bio-insecticides contre les
maladies post-récolte, (iv) à la conservation de la biodiversité et (v) à la mise en
application de l’approche éco-santé.
Avec l’avènement de la mondialisation, la survie de la petite agriculture
vivrière est menacée. Les recherches sur les politiques agricoles et en sociologie
et économie rurales essayeront de concevoir des politiques permettant de
progresser dans le sens de la recherche de solutions optimales favorables à la
production, au développement et à la valorisation des produits de terroirs pour
assurer aux petits et moyens agriculteurs des niveaux de revenus suffisamment
incitatifs. Ces recherches sont déterminantes pour mesurer l’impact des
politiques et stratégies de développement et de l’innovation technologiques
et formuler les recommandations pour le réajustement des politiques agricoles
selon des objectifs clairs et chiffrés. Elles permettent de mettre en évidence
la pluriactivité des agriculteurs et le rôle joué par les femmes et les enfants
au niveau de l’ensemble exploitation / foyer, ainsi que l’analyse de la
multifonctionnalité de l’agriculture marocaine et ses implications en matière
de développement agricole et rural durable. A titre d’exemple, l’apport des
agroéconomistes et les sociologues dans les équipes multidisciplinaires est
déterminant pour l’indentification des produits de terroir en termes d’analyse
des facteurs environnementaux (relief, climat, accès à l’eau, biodiversité,
occupation des sols…), des facteurs socio- économiques et institutionnels
(pôles d’activité hors agricultures, densité et dynamisme démographique,
découpage administratif) et des facteurs de développement en général
illustrés par le tableau 3 suivant:
Tableau 3. Méthodologie d’analyse des produits de terroirs
Outil d’analyse du
produit de terroir
Description
Potentialité de l’activité
en termes de Chiffre
d’Affaires.
L’analyse des chiffres d’affaires de chaque activité par une « méthode
20/80 » (somme des activités représentant 80% du Chiffre d’Affaires total
de la région). C’est une analyse macro-socio-économique de la culture
au sein d’un territoire (dattes, huile d’olive, cactus...)
Importance de la
production de la
région par rapport à la
production nationale
Les activités qui présentent des ratios de production régionale
par rapport à la production nationale supérieurs à 80% sont
automatiquement sélectionnées. C’est une analyse macro-socioéconomique et culturelle de la culture (100% du Safran produit à
Taliouine, 100% de l’huile d’argan dans le Souss...)
Tendances des
marchés internationaux
Il permet de sélectionner des activités présentant des opportunités de
développement à l’export importantes et dont la demande mondiale
connaît de fortes croissances, telles que l’huile d’olive, l’huile essentielle
du cactus, la datte Majhoul….
Source : Agrotech Agadir, 2009
38
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
L’agriculture solidaire dans les stratégies
nationales de développement
2.2.4. Recherche – action
La recherche – action est une approche basée sur le renforcement des
capacités des agriculteurs en termes d’observation, d’analyse, d’identification
des contraintes majeures et d’adaptation, d’innovation en vue d’améliorer
la gestion et la productivité de leurs exploitations agricoles. Ceci se fait en
exploitant et valorisant les expériences et le savoir faire des agriculteurs (hommes
& femmes). Ces derniers analysent eux-mêmes leurs pratiques, jugent la gamme
de technologies proposées par la recherche, décèlent les insuffisances de
ces technologies et s’approprient les plus adaptées aux conditions de leurs
exploitations agricoles21. Dans ce processus, les équipes multidisciplinaires
(animateurs / facilitateurs) s’éloignent de l’approche linéaire du transfert de
technologies, mais assistent plutôt les agriculteurs à identifier eux-mêmes les
solutions appropriées et adaptées à chaque type d’exploitations agricoles. Bref,
amener les agriculteurs à prendre des décisions raisonnées au niveau technique,
économique et environnemental, aboutissant à une auto-gestion intégrée,
productive et durable de leurs exploitations.
Les objectifs de la recherche-action doivent être raisonnés par rapport aux
besoins réels et prioritaires des agriculteurs : groupes cibles22, par rapport aux
savoirs locaux et connaissances endogènes et par rapport aussi aux capacités
des ressources naturelles au niveau des Unités Territoriales Agricoles (UTA). Donc,
trois dimensions d’ordre agronomique, socio-économique et environnemental
sont désormais prises en compte dans le raisonnement des programmes de
formation et de recherche-action. Ce raisonnement a pour finalité l’amélioration
de l’efficience et l’efficacité des programmes et projets élaborés pour le transfert
de technologies.
Ainsi, au lieu de « simplement interroger » les agriculteurs et les agents de
développement sur leurs besoins et collecter leurs doléances, les chercheurs,
les développeurs et les vulgarisateurs doivent contribuer au changement des
mentalités en agissant sur la manière de percevoir les contraintes, la manière de
les analyser, de rechercher les voies de solution et surtout la manière de passer
à l’action. D’où le concept de recherche- action appliqué pour faire évoluer le
milieu social en valorisant l’expérience des agriculteurs et leur savoir faire autour
des filières locales retenues au niveau de l’UTA.
21- Toon D. & al, Curriculum d’apprentissage participatif et recherche – action, ADRAO, CTA, IFDC, 2004,
p. iv
22 - Il n’y a pas de méthode universelle pour identifier les différents groupes cibles. Une approche qui
semble fonctionner pour cibler des groupes consiste à procéder par étape, en cherchant
successivement les différences entre groupes d’agriculteurs, d’abord par rapport aux conditions
naturelles, puis selon les conditions socio-économiques et enfin selon les objectifs et priorités. Jurgen
Werner, développement participatif d’innovations agricoles, GTZ, 1996, p. 180.
39
L’agriculture solidaire dans les stratégies
nationales de développement
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
La prise en compte de la complexité des situations agricoles et rurales est
une condition nécessaire à la réussite de la recherche-action. Ainsi, les différents
acteurs doivent harmoniser leur vision sur une situation donnée et avoir la même
compréhension des contraintes et des opportunités pour préparer la phase de
l’action. Les liens étroits et durables entre la recherche, la profession, les structures
de formation, les agences de développement et les utilisateurs des technologies
sont la garantie de leur adoption et de leur impact grâce à des réseaux de
communication efficaces facilitant le partage de l’information. Les nouvelles
technologies de l’information doivent être intégrées dans le cadre de stratégies
de développement suffisamment souples pour tenir compte des conditions
économiques, environnementales, sociales, institutionnelles et politiques des
régions concernées.
Le programme de recherche – action, Transfert de Technologie et Formation /
Renforcement de capacités peut s’articuler sommairement sur les axes suivants:
❐ Valorisation des savoirs locaux et connaissances endogènes en terme de
pratiques culturales, de transformation et de valorisation des produits de
terroir, de gestion post-récolte, de gestion des ressources naturelles (eau,
sol, agro-biodiversité) ;
❐ Exploitation et capitalisation des acquis des interventions agricoles dans
le cadre de divers programmes et projets de développement ciblant les
petits agriculteurs « agriculture familiale ». car on ne commence jamais
de zéro : faire des fiches synthétiques des acquis relatifs à chaque projet
par zone, par thème et par type d’agriculture et en tirer les leçons qui
s’imposent et valoriser les «success stories » ;
❐ Mobilisation des associations, des coopératives et des ONGs. Leur
adhésion est une garantie de réussite pour les actions entreprises ;
❐ Identification des besoins des agriculteurs dans le cadre des Plans
Agricoles Régionaux « la demande réelle » selon une analyse systémique,
itérative, participative et intégrée. Ici, l’agriculteur est au centre des
considérations;
❐ Appui nécessaire aux agriculteurs et aux jeunes ruraux dans l’élaboration,
la formulation et la gestion des projets, la planification et la gestion du
temps et l’élaboration des bilans technico-économiques de la campagne
agricole / projet ;
❐ Réalisation des études agro-socio-économiques des petites exploitations
agricoles, sur leur dynamique et la formulation des scénarii de
développements à travers l’analyse des forces motrices majeures des
systèmes de production ;
❐ Elaboration des référentiels technico-économiques et mise en place
des programmes de recherche- développement, recherche – action et
développement des plans de formations en adéquation avec les besoins
des petits agriculteurs.
40
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
L’agriculture solidaire dans les stratégies
nationales de développement
2.2.5. Approche Farmers Fields School / Champs Ecoles Paysans (CEP)
L’approche Farmer Field School (FFS) est un processus d’apprentissage
participatif en groupe. Elle est basée sur les principes écologiques et les
techniques d’éducation non formelle. Elle a été utilisée par les chercheurs
de l’INRA en collaboration avec les acteurs du développement afin de
promouvoir au sein des agriculteurs la lutte intégrée contre les maladies et
ravageurs des céréales23 et des légumineuses alimentaires24 (IPM - Integrated
Pest Management). Cette approche a permis aux agriculteurs de pratiquer eux
mêmes des expérimentations en milieu réel sur les techniques IPM et apprécier
la différence entre leurs pratiques et celles proposées par les chercheurs.
L’approche est recommandée pour convaincre les agriculteurs autour
des résultats concrets ce qui facilite l’adoption des nouvelles techniques
respectueuses de l’environnement (utilisation restreinte, non abusive et efficace
des pesticides) et économiquement viables. Cette approche est considérée
dans la nouvelle stratégie du Conseil Agricole comme étant la solution pour
promouvoir le transfert des technologies et l’apprentissage participatif en milieu
réel.
2.2.6. Approche « Amélioration des Moyens d’Existence Durables, AMED »
Une approche qui s’articule autour des résultats de l’exploitant durant
une campagne agricole. L’approche prend en compte à la fois les moyens
en facteurs de production (semences, engrais, produits chimiques, main
d’œuvre occasionnelle…) et les moyens de production (terre, main d’œuvre
permanente…), ainsi que la vision, le comportement de l’exploitant à l’égard
de son exploitation et son environnement. Cette approche s’insère parfaitement
dans les objectifs de l’INDH. La Démarche AMED, récemment testée dans le
cadre de projet de recherche – développement INRA - ICARDA dans les zones
de montagnes du Haut Atlas (Province de Marrakech) a prouvé son éfficacité
pour la maîtrise de fonctionnement des systèmes de production dans les zones
difficiles et leur déclinaison en plans d’action.
2.2.7. Système des Connaissances d’Informations Agricoles (SCIA)
L’analyse du Système des Connaissances d’Informations Agricoles (SCIA)25
aide les chercheurs dans la compréhension des rôles des différents acteurs et
opérateurs locaux dans le développement rural et dans l’appréciation du niveau
de circulation de l’information entre eux et formuler des recommandations pour
optimiser le partage et l’utilisation de l’information.
23 - Haloui S. et al, Projet MGCP, IPM céréales et légumineuse , INRA – ICARDA, 2007.
24 - Bouhache M. / IAV Hassan II & Dahan R. / TCP – FAO Maroc, Gestion de l’Orobanche des Légumineuses Alimentaires au Maroc, 2000.
25 - Mettrick, Hal, Recherche agricole orientée vers le développement : le cours ICRA, Centre International pour la Recherche Agricole orientée vers le développement, Wageningen, 1994, 288 pages.
41
L’agriculture solidaire dans les stratégies
nationales de développement
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
2.3. Intégration de l’approche participative dans le système de recherche
agricole
2.3.1. Evaluation d’une expérience
Les travaux réalisés en 1995 dans la cadre du projet INRA-ISNAR designé
« renforcement des capacités de gestion des activités de recherche
composantes recherche-développement »26 ont montré l’ampleur des
difficultés rencontrées dans l’intégration de l’approche participative dans le
processus d’élaboration des programmes de recherche-développement. La
démarche du chercheur imprégnée de la rigueur scientifique se base souvent
sur des critères quantitatifs. C’est une question d’évolution de la conception
de développement de l’innovation et de l’image de marque du chercheur
en relation avec sa mission. Il existe plusieurs formes de participation des
agriculteurs à la confection et à la mise en œuvre des projets de recherche –
développement synthétisées dans le tableau 4.
Tableau 4. Types de participation à l’élaboration des programmes R&D
Type
Caractéristiques
Participation passive
Les agriculteurs participent aux rencontres mais sont juste informés
par les chercheurs. Leurs avis ne sont pas pris en compte.
Participation par la
fourniture d’information
Les agriculteurs sont enquêtés via des questionnaires. Les données
sont analysées et consignées dans des rapports sans restitution aux
agriculteurs.
Participation par
consultation
Les agriculteurs sont consultés pour avoir leurs opinions sur une
action donnée sans obligation de prise en compte.
Participation
fonctionnelle
Les agriculteurs participent à la prise de décisions. Ils sont consultés
pour l’exécution du programme arrêté.
Participation interactive
Les agriculteurs sont des partenaires. Ils participent à l’élaboration
des plans d’action et leur mise en œuvre.
Initiative locale
Les agriculteurs prennent des initiatives locales en termes
de développement et d’organisation et gestion de terroir
indépendamment des structures de l’Etat.
Source : les enquêtes participatives en débat, adapté KRADI
L’application de la démarche recherche - développement est tributaire
d’une connaissance suffisante des sciences sociales nécessaires aux activités
de diagnostic et d’évaluation participatifs. Le raisonnement appliqué par le
chercheur - développeur aux essais d’introduction de nouvelles technologies
(nouvelles variétés, formule d’engrais…) en milieu réel dans les conditions
de l’agriculteur est principalement un raisonnement purement agronomique
privilégiant le rendement. De plus, les aspects liés à l’agro-écologique,
26 - Henning B. & Kradi C., les enquêtes participatives en débat : ambition, pratiques et enjeux, Gret Karthala – ICRA, 2000
42
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
L’agriculture solidaire dans les stratégies
nationales de développement
c’est-à-dire l’effet de la technologie introduite sur l’environnement ainsi que la
dimension socio-économique en relation avec le coût de production, le revenu,
le marché… ne soient pas pris en compte.
La démarche recherche-développement était, en effet, interprétée tout
simplement comme un outil de transfert de technologies, c’est-à-dire un outil de
valorisation de technologies mises au point par les chercheurs. Dans ce modèle
linéaire et séquentiel de transfert de l’innovation technologique, l’apprentissage
mutuel et réciproque entre les agriculteurs et les chercheurs, l’interaction entre la
technologie proposée et les systèmes de production agricole et la confrontation
avec les besoins des agriculteurs ne sont pas suffisamment pris en compte dans
le processus de transfert de technologies. Les gestionnaires de la recherche
s’attendaient souvent à ce que la recherche-développement les aide à diffuser
les résultats de recherche et par conséquent améliorer l’impact de la recherche
sur le développement et l’image de marque de la recherche.
Entre la perception générale des chercheurs et les managers de la recherche
existait une contradiction apparente. Les managers pensent disposer d’un
grand nombre de technologies qui n’aboutissent pas chez les agriculteurs et
la difficulté sentie par le chercheur-développeur (SRD) à satisfaire la demande.
De plus, les activités de recherche et développement sont perçues comme des
activités inférieures à la « recherche proprement dite ». Les responsables de la
R&D insistent pour que leurs activités au sein de leur structure soient reconnues
comme activités de recherche et appui aux chercheurs (interface entre la
recherche et le Développement).
2.3.2. Prise en compte des savoirs locaux
La question de l’implication des agriculteurs aux travaux de recherche –
développement est posée, notamment en termes de la rationalité des pratiques
des agriculteurs et la complémentarité entre les savoirs locaux et les savoirs
et connaissances des chercheurs, surtout, que de nombreuses innovations
sont développées par les agriculteurs pour faire face à diverses contraintes
techniques, socio-économiques et environnementales. Cependant, ces résultats
ne sont pas connus et sont très peu pris en considération dans les programmes
de recherche, d’où la nécessité de : i) mettre en valeur les innovations des
agriculteurs, présentant des avantages économiques et écologiques pour
identifier des innovations qui améliorent les systèmes de production en place
tout en conservant les ressources naturelles disponibles, ii) renforcer la créativité
des agriculteurs et agricultrices, iii) conserver le savoir faire. Dans le contexte
actuel de la régionalisation de la recherche, le développement participatif
local est devenu l’une des principales préoccupations de la recherche
agronomique. Ce développement participatif est basé fondamentalement sur
des approches participatives, systémiques et intégrées (agriculteur-exploitation-environnement).
43
L’agriculture solidaire dans les stratégies
nationales de développement
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Elaborés sans concertation avec les populations et sans prise en compte
des modes traditionnels ancestraux de gestion et d’utilisation des ressources
naturelles disponibles, plusieurs projets de développement visant à augmenter les
productions et diminuer la pauvreté ont échoué. D’autant plus, que ces projets
n’essayent pas de profiter des connaissances locales, source sûre de réussite
pour la gestion des systèmes de production.
44
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
L’agriculture solidaire dans les stratégies
nationales de développement
Conclusion du chapitre I
Les systèmes de production au Maroc sont diversifiés et par conséquent
les modèles des agriculteurs sont pluriels. C’est une source de richesse de
notre agriculture qui n’est point une activité concentrée au niveau d’une
région pédoclimatique ou par des agriculteurs du même héritage culturel et
patrimonial. Les petites exploitations agricoles réparties sur tout le territoire
national offrent des produits agricoles diversifiés, une large gamme de
traditions liées aux savoirs faire locaux et aux connaissances endogènes, et des
externalités positives liées à la beauté des paysages.
La professionnalisation de la petite agriculture, c’est-à-dire passer d’une
logique de production vivrière à une logique d’investissement dans le cadre
de projet lié au marché, ne peut se faire sans le rapprochement du chercheur,
de l’enseignant-chercheur, du vulgarisateur – développeur et de l’agriculteur.
Ceci, doit se faire dans un cadre de dialogue et de synergie (éviter la perte
du temps et de l’énergie) grâce à l’établissement de liens étroits entre tous les
acteurs et opérateurs. Le consortium regroupant les institutions de Recherches
et d’Enseignement Agricole lancé en 2009 est une option judicieuse.
En fait, la préservation de l’identité régionale est fondamentalement liée aux
réalités locales, à la durabilité des systèmes de production et à la pérennisation
des produits de terroir à travers la valorisation du patrimoine agricole local. Dans
ce sens, les agriculteurs appuyés par les chercheurs sont invités à parler de leurs
pratiques, de leurs bilans en termes de productivité, de qualité de production
ainsi que de leurs soucis et attentes.
Cette démarche, doit-être accompagnée par une approche
socio-économique en vue d’aider les petits agriculteurs à tirer profit des
avantages de la mondialisation et se prémunir de ses effets pervers. Dans ce sens,
il est recommandé de mener des actions en amont et en aval du marché pour
maîtriser l’environnement agro-socio-économique de l’agriculture en termes
de maîtrise des prix et des circuits de commercialisation des produits agricoles.
Beaucoup de petits agriculteurs / éleveurs estiment que les intermédiaires
s’accaparent la plus value de leurs efforts. Certains producteurs /investisseurs,
en l’occurrence les petits et moyens agriculteurs s’estiment lésés en visitant
les grandes surfaces de commercialisation de leurs produits. Dans ce cadre,
l’organisation de la filière agricole est une condition sine qua non de partage
équitable des plus values générées par la vente des produits agricoles.
45
L’agriculture solidaire dans les stratégies
nationales de développement
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
La panoplie d’approches et d’outils présentées auparavant a été d’une
grande utilité pour la programmation des opérations de recherche et
recherche – développement. Grâce à la maîtrise de ces instruments par les
chercheurs, les choix de ces opérations ont été judicieux dans presque 90% des
cas. Il s’agit des recherches prioritaires émanant des diagnostics participatifs
des besoins des agriculteurs et de leurs demandes. Elles sont orientées vers le
développement des technologies, des connaissances et des outils d’aides à la
prise de décisions. Les études de cas (oasis, montagne, parcours) présentées
dans les chapitres suivants en sont une bonne illustration.
46
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Photos (INRA) 1 & 2 : Vues panoramiques des oasis marocaines.
47
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Chapitre 2
le système oasien : un patrimoine
riche à prèserver pour les
générations futures
Introduction
L’oasis est un espace de rareté renfermant un mode de vie ancestral
basé sur un mode de gestion traditionnel qui a prouvé son éfficacité au fil du
temps. Depuis des siècles, les populations oasiennes ont réussi à préserver cet
écosystème et ont fait preuve de créativité et d’endurance. Les Khettaras mis au
point ont donné lieu à un mode de gestion rationnel de l’eau et de son partage.
Aujourd’hui, l’oasis qui renferme d’énormes potentialités en termes de richesses
culturelle et d’agro-biodiversité (palmier dattier, safran, henné, D’man…) subit
l’influence dégradante des facteurs socio-économiques et écologiques. Pour
mieux cerner la problématique du système oasien dans sa globalité en vue
d’orienter les opérations de recherche – développement et par là apporter
des gammes de solutions appropriées, la recherche agronomique s’est attelée
à diagnostiquer les systèmes de production agricoles en vue d’identifier les
opérations de recherche et y apporter les solutions adéquates.
1. Analyse du système oasien
La région du Tafilalet / Province d’Errachidia est une région qui a une histoire
riche et glorieuse. Elle est située au Sud-Est du Maroc. C’est un ensemble d’oasis
dans les basses vallées des oueds Ziz et Gheris. Elle fait partie, depuis 1997, de la
région administrative Meknès-Tafilalet.
Le Tafilalet fut un centre commercial important pendant de nombreux siècles;
porte principale du Sahara, il a servi de lieu d’échange entre le Nord et l’extrême
Sud. C’est par cette région que s’effectuait le transit de l’or, des épices, du sel…
Le Tafilalet a joué dans l’histoire du pays un rôle de premier plan. L’ancienne
Sijilmassa vit naître en 1640 la dynastie alaouite. Le Roi, Mohammed VI, est le
descendant direct de Moulay Ali Charif, fondateur de la dynastie Alaouite.
Les systèmes de production dans la région du Tafilalet dépendent dans une
large mesure de l’état des ressources naturelles disponibles, de la morphologie de
l’exploitation, des activités agricoles et des modes de gestion de l’exploitation.
Ils s’articulent autour :
48
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
le système oasien
❐ des systèmes de culture qui sont une association de plusieurs cultures
(deux à trois étages) dont le palmier dattier constitue l’ossature. Ce
dernier favorise la pratique d’autres cultures en créant un microclimat
adéquat. La difficile maîtrise des techniques culturales et l’indisponibilité
des techniques adaptées à l’environnement oasien induisent une
diminution de la productivité des systèmes de production. Les exemples
sont nombreux, on peut citer: Rejets du palmier dattier non ou mal
enlevés induisant la perte de jeunes rejets, méthodes de luttes contre les
maladies (Bayoud essentiellement) non maîtrisée, densités de plantations
non respectées du palmier, de l’olivier entraîne un fort ombrage pour les
cultures basses qui s’étiolent, mode d’irrigation peu adéquat favorisant la
propagation des maladies, mode de récolte non approprié causant des
pertes et affectant la qualité des produits… couplée aux difficultés de
préserver certaines anciennes pratiques abandonnées (pollinisation du
palmier dattier, récolte et conservation des dattes…).
❐
le système d’élevage est essentiellement constitué d’ovins de race
D’man. Cette race locale présente une prolificité élevée et une bonne
aptitude d’adaptation aux conditions du milieu. Toutefois, ces atouts
ne sont pas bien exploités à cause d’une conduite inappropriée qui en
témoigne la reproduction non maîtrisée, l’alimentation non raisonnée
et les bâtiments d’élevage mal conçus. En plus, et dans la plupart des
cas, il n’y a pas de séparation entre les différentes catégories animales
dans les bergeries (jeunes, reproductrices et géniteurs). Ce manque de
contrôle dans la reproduction peut poser un problème de consanguinité
et par conséquent une baisse de la productivité des descendants et des
mises bas non planifiées en fonction des disponibilités fourragères. Les
principales caractéristiques de système d’élevage sont :
❍
la ration alimentaire du bétail est dominée par la luzerne qui
constitue la principale culture fourragère dans les oasis. Les autres
aliments sont composés par l’orge, les déchets de dattes, la paille
des céréales, la pulpe sèche de betterave. Il a été noté des périodes
de déficit alimentaire (décembre à février) qui auraient pour
principales causes les faibles productions agricoles et le manque
d’apports de compléments minéraux. Cette contrainte alimentaire
pourrait expliquer la taille réduite des troupeaux qui ne dépasse pas
7 têtes ovines / exploitation agricole ;
❍
les modalités de gestion des ressources naturelles au niveau des
différents systèmes de production contribueraient grandement à
la dégradation du milieu naturel. A titre indicatif, la surexploitation
de la nappe phréatique, le surpâturage semblent-être parmi les
principaux facteurs ;
49
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
le système oasien
❍
la valorisation des produits de terroirs et la commercialisation de la
production agricole ne permettent pas aux agriculteurs d’en tirer
profit.
Carte 1 : Sites étudiés dans le Tafilalet
Les études de diagnostics réalisées par les équipes multidisciplinaires dans la
région de Tafilalet (carte 1) ont été guidées par des hypothèses selon les termes
de références des études27 proposés par l’INRA et vérifiées par les chercheurs sur
le terrain. Ces hypothèses sont:
❐ l’amélioration durable de la production des systèmes de cultures est
déterminée par la préservation des ressources hydriques disponibles,
la valorisation des terres cultivables, la limitation de la dégradation des
palmeraies et le renforcement du niveau de technicité des agriculteurs.
❐ le développement des systèmes d’élevage adaptés à la région est
déterminé par l’amélioration des performances de la race ovine D’man,
la relance de l’élevage bovin laitier, la valorisation des autres races
ovines, le développement d’autres filières porteuses et la rationalisation de
l’exploitation des parcours ;
27- Kradi C., Les Termes de références des diagnostics ont été élaborés selon les objectifs de recherche
de l’INRA.
50
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
le système oasien
❐ l’amélioration de l’environnement socio-économique est déterminée par
la promotion de la commercialisation des produits végétaux et animaux
de terroir, les facilités d’approvisionnement des exploitations en matériels et
intrants et l’amélioration du niveau de vie des agriculteurs.
Dégradation
des ressources naturelles
Les principales contraintes et causes - effets ayant une grande influence sur
le fonctionnement des exploitations oasiennes28, sur la stratégie des agriculteurs
et sur les systèmes de production se présentent dans la figure 1.
Diminution du niveau
de la nappe phréatique
dans les oasis traditionels
Salinisation
des eaux et des sols
Extension du pompage
Gamme de culture pratiquée
en diminution
Erosion génétique
Régression
de la biodiversité
Coût des intrants
Baisse de la prtoductivité
des cultures et de l’élevage
Dégâts causés par des
maladies et ravageurs
Produits et sous produits
agricoles peu valorisés
Productivité et durabilité des systèmes
de production oasiennes traditionnelles menacées
Baisse des revenus des agriculteurs
Maladie du Bayoud
Difficulté du contôle
phytosanitaire et lutte
contre les ravageurs
Sécheresse/Changement
climatique
Disponibilité
de l’eau d’irrigatiion
Besoins des cultures
peu satisfaits
Densité élévée ou plantations
en augmentation
Trop d’ombre
Faible capitalisation
du rôle da la femme
Diticultés d’accés
aux marchés lointaines
Faible organisation
des agriculteurs
Présence
des intermédiaires
Perte relative de savoir
faire traditionnel
Exode reral
Figure 1 : Arbre de contraintes du système oasien.
28 - Andriamainty Fils J. M., R. Djaddou, S. Nait Merzoug et V. T. Nguyen : Analyse des systèmes de production oasiens et des stratégies des agriculteurs dans la province d’Errachidia au Maroc. Maroc 2002,
152 pages
51
le système oasien
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
1.1. Les contraintes
1.1.1. Baisse de la productivité des cultures et de l’élevage
Fragilité des systèmes de cultures
L’arbre de contraintes énumère les principales problématiques liées
aux structures agraires (morcellement, exigüité des exploitations), à la non
rationalisation et valorisation de l’eau, à la pression sur les ressources en eau
par le pompage en l’occurrence, aux difficultés d’entretien et de gestion des
Khettaras, à la Salinité des sols et de l’eau, à l’ensablement et la surexploitation
des ressources naturelles, à la maladie du Bayoud, (Fusarium oxysporum Sp
albedinis), qui a décimé la palmeraie et à la non maîtrise de certaines techniques
culturales appropriées.
Fragilité des systèmes d’élevage
Les grandes contraintes caractérisant les systèmes d’élevage sont,
i) la faible productivité de l’élevage laitier à cause de l’insuffisance des
superficies des cultures fourragères, essentielles pour l’alimentation des vaches
de races améliorées exigeantes en aliments et peu adaptées aux milieux fragiles
telle que l’oasis alors que la race locale « Tidili » est largement mieux adaptée
au milieu mais renvoyée au second rang ii) la non maîtrise des principes de
base d’alimentation du troupeau iii) la mauvaise conduite de la reproduction
du troupeau D’man donne lieu au phénomène de consanguinité ce qui se
répercute négativement sur la performance de la race ovine D’man à cause
de l’insuffisance d’alimentation en quantité et en qualité iv) la faible technicité
des éleveurs et aux conditions d’habitat et d’hygiène et, v) la dégradation des
parcours liée au phénomène de la sécheresse et à l’action du surpâturage.
Cette situation concerne également le bovin laitier et d’engraissement et le
caprin dont la productivité est loin des performances potentielles.
1.1.2. Régression de la biodiversité
Les oasis de Tafilalet constituent un fief de la biodiversité au Maroc. Elles sont
considérées par l’UNESCO comme Réserve de Biosphère de Sud Marocain.
Les principales cultures pratiquées sont le palmier dattier avec une diversité
extraordinaire, du nombre de variétés de blé, d’orge, du maïs, de luzerne, ainsi
qu’une large gamme d’espèces arboricoles (olivier, pommier, grenadier,…) et le
maraîchage (gombo...).
L’élevage ovin de la race D’man et caprin de la race Draâ sont dominants.
Malheureusement, cette agro-biodiversité est menacée par le manque d’intérêt
des agriculteurs pour les variétés de faible valeur commerciale du palmier dattier
combinée à l’attaque par la maladie du bayoud qui décime les meilleures
variétés de datte. Ce même constat est aussi valable pour certaines variétés
52
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
le système oasien
locales de cultures basses menacées de disparition surtout par leur non tolérance
à l’ombrage même si elles sont très productives (variétés locales d’orge à 6 rangs).
Le cas des agriculteurs d’Aoufous, vallée de Ziz, illustre leurs stratégies pour la
conservation de l’agro-biodiversité et leurs motivations et l’impact éventuel sur
les Systèmes de Production Agricole «SPA» (Tableau 5).
Tableau 5. Quelques stratégies globales des agriculteurs dans la palmeraie
d’Aoufouss
Stratégies des
agriculteurs
- Exploitation au
maximum de la
SAU
- Intensification des
cultures
- Assurer un revenu
moyen pour la
famille
- Aménagement
des planches
pour les cultures
des cuvettes pour
l’arboriculture
- Aménagement
des seguias
- Désherbage tardif
des céréales
Motivations
Retombées sur les SPA & l’agro-biodiversité
Positives
Négatives
- Nombre réduit
- Conservation
et petitesse des
in-situ
exploitations
agricoles
- Morcellement
- Forte pression
démographique
- Introduction de
nouvelles cultures
(maraîchage et le
henné)
- Grande
- Satisfaction des
Conscience sur
besoins des
l’importance
cultures
de l’eau : une
denrée sacrée
pour l’oasien
- Désintéressement des
jeunes : Emigration
- Besoins des
animaux
- Perte de 30% du
rendement final (selon
l’agronome)
- L’agriculteur s’intéresse
moins aux cultures à faible
valeur commerciale
- Réduction de la diversité
génétique (abandon
de certaines espèces et
variétés)
- Détérioration de la
biodiversité spécifique et
variétale
- Tendance vers culture
unique (monoculture)
- Exode de la main d’œuvre
spécialisée
Alimentation des
animaux
- Orientation vers
- Opportunité du
les espèces
marché
et variétés à
forte valeur
commerciale (Ex.
variété Mejhoul du
Palmier dattier)
- Cultures mieux
entretenues.
- Diversification des - Répartir les risques
activités agricoles - Insuffisance des
et extra - agricoles
revenus agricoles
- Subvenir aux
besoins de la
famille
- Amélioration des
revenus
- Epargne possible
- Orientation
- Manque de
- Sauvegarde
des ressources
ressources en eau
du patrimoine
disponibles vers les
génétique des
cultures vivrières
cultures vivrières
- Parcelles délaissées pour
cause d’héritiers nombreux
- Certaines cultures sont
délaissées à cause du
manque d’eau
- Dégradation de la
biodiversité spécifique et
variétale
Source : Etude INRA - ICRA, Errachidia, 2001, actualisée par KRADI
53
le système oasien
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
1.1.3. Vulnérabilité de l’environnement socio-économique : des retombées
négatives sur le producteur et le consommateur
La vulnérabilité de l’environnement socio-économique est liée à l’activité
agricole caractérisée par une difficulté de commercialisation des produits
agricoles, et une insuffisance de l’approvisionnement des exploitations
agricoles en matériels et intrants dues aux problèmes de financement. Plusieurs
contraintes entravent la commercialisation adéquate des produits agricoles
dont les principales sont : une forte intervention d’intermédiaires dans les
circuits de commercialisation ; une faiblesse des potentialités individuelles de
commercialisation des produits liée aux faibles quantités produites, et aussi au
manque d’informations sur les tendances du marché, une faible capacité du
marché local et l’éloignement des marchés potentiels pour l’écoulement des
productions de la région ; un fonctionnement dérisoire des coopératives de
commercialisation de certains produits agricoles caractérisé par la mauvaise
gestion, l’irrégularité d’intervention et du faible niveau de valorisation des
produits agricoles.
Dans ce contexte, le consommateur sera toujours la deuxième victime, qui
subit toutes les hausses sans bénéficier des baisses – exactement comme le
producteur qui subit les baisses sans bénéficier des hausses. D’où, la nécessité
d’organiser les agriculteurs, idée maîtresse du PMV « l’agrégation » pourvue
que les relations entre l’agrégateur et l’agrégé soient claires et que chacun
soit informé dès le départ de ses droits et de ses obligations. De même, les
consommateurs autour de leurs associations doivent être protégés des griffes
des intermédiaires.
1.1.4. Sous valorisation des produits de terroirs
La valorisation des produits de terroir est un des leviers importants pour le
développement des oasis en termes d’amélioration des revenus, de promotion
de l’écotourisme et surtout la promotion du rôle de la femme. Le vieillissement
des exploitants et de leurs femmes couplé au désintéressement des jeunes
vis-à-vis de l’agriculture menace les savoirs locaux qui conditionnent en grande
partie les modes traditionnels de valorisation hérités et développés depuis des
générations. D’où le rôle de la recherche-développement qui doit intégrer dans
ses programmes la valorisation des produits agricoles en liaison avec la savoir
faire des agriculteurs.
L’accompagnement des agriculteurs par le renforcement de leurs capacités
et par un appui accru aux associations locales par des actions telle que le
développement des infrastructures de conservation et de transformation, qu’est
un élément clef du Plan Maroc Vert pour une meilleure valorisation des produits
de terroirs au profit de la petite agriculture.
Face à cette situation, les agriculteurs ont développé au fil du temps des
stratégies pour atténuer les effets négatifs de l’environnement global de
l’exploitation agricole et du ménage qu’on présente dans la partie qui suit.
54
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
le système oasien
1.2. Stratégies des agriculteurs : trois types se dégagent
Pour cibler le conseil et/ou l’action de la recherche-développement, le
concept de typologie est essentiel pour cerner la diversité et les spécificités des
exploitations agricoles. On distingue, alors, trois grands types de Systèmes de
Production Agricole (SPA) : les systèmes de productions agricole traditionnelles,
intermédiaires et modernes. Les principaux critères de distinction entre ces types
sont au niveau des stratégies et objectifs de l’agriculteur, de la disponibilité des
moyens et facteurs de production et le niveau de l’épargne.
La stratégie du groupe SPA traditionnel (Figure 2), disposant de moyens limités
et dont la main d’œuvre est exclusivement familiale, est d’assurer la subsistance
du ménage (5 à 10 personnes) à travers la vente des dattes (80% des recettes).
Du coup, l’épargne est minime.
Subsistance
Stratégie
• Faible épargne
• Capacité d’investissement
très faible
Potentialités
Disponibilité d’eau, savoir faire, Disponibilité de main d’oeuvre familiale
Aliments
• Grande taille du ménage
(10 personnes)
• Moyens de production limités
Système de production végétale
• Palmier dattier
• Arbres fruitiers
• Cultures céréalières
• Cultures fourragères
• Cultures maraîchères
Marché
Système de ménage
Animaux
Faible main d’oeuvre
saisonnière, Intrants
Dattes
Marché
Intégration
Agriculture-Elevage
Fumier, Force animale
Système de production Animale
• Ovins
• Bovins
• Caprins
Fourrages, Sous produits
Contraintes
Micropropriété, Morcellement, Ombrage
élevé, maladies et ravageurs, Difficulté Accès
Crédit, Désintéressement des jeunes
Dynamique
Risque de dégradation du niveau de vie du
ménage, Exode rurale, Tendance monoculture
(Palmier dattier). Dégradation de
l’agro-biodiversité.
Figure 2 : Système de production agricole traditionnel
Quant au groupe SPA intermédiaire (Figure 3), son objectif est d’intégrer
le marché par la vente des produits agricoles (dattes, ovins…). Ce groupe
dispose généralement de motopompes leur permettant des irrigations
d’appoints.
55
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
le système oasien
Intégration dans le marché,
amélioration du niveau de vie
Stratégie
Marché
Système de ménage
• Grande taille du ménage
• Epargne et capacité
d’investissement moyenne.
• Moyens de production
relativement satisfaisants
Système de production végétale
• Palmier dattier
• Arbres fruitiers
• Cultures céréalières
• Cultures fourragères
• Cultures maraîchères
Intégration
Agriculture-Elevage
Fumier, Force animale
Aliments
Commerce
agricole
Animaux
Moyenne main d’oeuvre
saisonnière, Intrants
Dattes, légumes,
fruits, olives
Marché
Prestation
de service
Système de production Animale
• Ovins
• Bovins
• Caprins
Fourrages, Sous produits
Potentialités
Contraintes
Savoir faire, capacité de diversification,
volonté d’intégrer le marché.
Morcellement poussé, Ombrage élevé,
Bayoud, salinité, dépendance de main
d’oeuvre salariale, coût de production.
Dynamique
Risque de baisse du niveau de la nappe, et compétitivité économique pourrait affecter
l’agro-biodivesité et la durabilité de ces SPA. La
maîtrise de l’eau et le marché pourraient rendre
ces SPA plus viables et durables.
Figure 3 : Système de production agricole intermédiaire.
Le système de production agricole moderne (Figure 4), représente les
nouvelles exploitations installées en dehors des oasis, optant pour la culture
des variétés de haute valeur marchande (Majhoul, Boufeggous) ainsi que la
luzerne pour l’engraissement des bovins. Ce groupe a des contacts réguliers
avec le marché et est capable de faire de l’épargne. L'irrigation localisée est
développée dans ce système
Economie du marché avec
une relative spécialisation
Stratégie
• Epargne et capacité
d’investissement importante.
• Moyens de production
important
Système de production végétale
• Palmier dattier à haute
valeur commerciale
• Oliviers
• Cultures fourragères
Potentialités
Disponibilité d’eau, encadrement et technicité,
esprit d’entreprise, forte demande des dattes de
qualité.
Marché
Système de ménage
• Grande taille du ménage
Intégration
Agriculture-Elevage
Fumier, Force animale
Système de production Animale
• Ovins
• Bovins
Fourrages, Sous produits
Contraintes
Maladies et ravageurs, salinité, gamme de
choix variétale limitée, coût du pompage.
Dynamique
Risque de baisse du niveau de la nappe (sur-pompage) qui pourrait menacer la durabilité de ces
SPA. Ces SPA sont en faveur de la réduction de
la pression sur la palmeraie traditionnelle, la
désertification.
Figure 4 : Système de production agricole moderne
56
Aliments
Commerce
agricole
Animaux
Main d’oeuvre
saisonnière, Intrants
Dattes, olives
Marché
Prestation
de service
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
le système oasien
1.2.1. L’élevage : ossature des systèmes de production oasiens
L’élevage constitue une composante essentielle des systèmes de production
oasiens. On en distingue deux types :
❐ Le premier est le système d’élevage intensif où les trois espèces ovine,
caprine et bovine sont en stabulation permanente et « vivent avec la
famille ». La conduite, aussi bien alimentaire, sanitaire, que de reproduction
est précaire. Le résultat en est une faible productivité de viande (en
moyenne 37,5 kg de poids vif/unité/an) par rapport aux potentialités de
la race (haute prolificité : 250 à 300 %). En seconde position, viennent les
bovins de race principalement locale laitière à raison d’une vache par
exploitation en moyenne (ORMVA/TF, 2002).
❐ Le second est le système d’élevage extensif. Il est généralement
conduit en troupeaux mixtes (ovins et caprins) mobiles (nomades et
semi-nomades). Il est essentiellement basé sur la production pastorale
fortement tributaire d’un climat très aléatoire en dehors des oasis.
Il est bien évident que le nombre d’agneaux commercialisés par brebis reste
le facteur limitant de l’intensification de l’élevage ovin. La race D’man, originaire
des palmeraies du sud marocain, se distingue des autres races nationales par
sa prolificité et ses aptitudes de reproduction exceptionnelles. Cependant, les
performances réalisées chez les éleveurs oasiens restent encore en deçà des
résultats obtenus au niveau des stations de recherche (Domaine expérimental
d’Errachidia/ INRA) en raison de l'inadéquation des locaux d'élevage et de
la défaillance de la conduite alimentaire (insuffisance de l’alimentation en
quantité et qualité) et des conditions sanitaires et de reproduction. Ainsi, la
productivité du troupeau reste faible par comparaison aux niveaux potentiels,
ce qui se traduit par la faiblesse de l’offre de viande par rapport à une demande
en accroissement et souvent par une augmentation des prix de la viande.
Dans une étude sur la rentabilité de l’élevage D’man en station (Kerfal et al.,
non publié), les auteurs comparent les rentabilités en station et hors station. Les
résultats montrent que la rentabilité de l’élevage de la station expérimentale
INRA est nettement supérieure à celle des élevages pratiqués en milieu réel,
que ce soit au niveau des élevages organisés ou non organisés. Ainsi, les marges
brutes par tête (892 DH) ou par kg de poids vif (21 DH) réalisées à la station
dépassent de très loin celles des élevages organisés (54 DH/tête et 6 DH/kg
vif) et non organisés (21 DH/tête et 5 DH/kg vif). Il en est de même pour ce qui
est de la marge nette qui est de l’ordre de 282 DH/tête et 7 DH/kg vif à l’INRA
contre 38 DH/tête et 4 DH/kg vif puis 6 DH/tête et 1 DH/kg vif, respectivement
en élevage organisé et non organisé.
Cependant, on assiste à l’émergence d’une nouvelle catégorie d’éleveurs
qu’on peut qualifier de « pragmatiques » en raison des résultats techniques et
économiques très satisfaisants de leurs élevages : il s’agit d’éleveurs individuels
57
le système oasien
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
pratiquant l’élevage moderne de la race D’man ou d’éleveurs groupés
en coopératives de production et de commercialisation des ovins D’man,
spécimens initialement sélectionnés par l’INRA ou par les sélectionneurs pilotes
de la zone.
En fait, les éleveurs organisés dans le cadre de coopératives ou
d’associations améliorent leur performance technico-économiques malgré
que les charges de production soient relativement plus élevées que chez les
éleveurs non organisés. Par ailleurs, il paraît que des manques à gagner dans la
commercialisation des produits et l’acquisition des intrants sont enregistrés chez
les éleveurs non organisés.
Les systèmes de production en oasis se basent essentiellement sur l’association
culture/élevage qui se définit par des relations multiples et synergiques. Cette
stratégie permet aux agriculteurs de mieux gérer le risque et de diminuer l’effet
des aléas climatiques. Ils diversifient ainsi les sources de revenu, valorisent les
sous-produits des cultures et intensifient la production agricole en fertilisant les
sols par le fumier. Seulement, le développement de l’élevage se trouve limité
par l’insuffisance des disponibilités alimentaires. Les cultures fourragères sont
essentiellement représentées par la luzerne, généralement, localisée à proximité
des sources d’eau.
La course effrénée pour la satisfaction des besoins alimentaires des animaux
conduit à une exploitation abusive et irrationnelle des espaces avoisinant
les oasis, contribuant à leur dégradation et accentuent le phénomène de
désertification. Le surpâturage et le mode intensif de conduite des troupeaux
ont entraîné une dégradation accélerée du couvert végétal. De plus, l’effet
conjugué de la forte sécheresse et de l’érosion éolienne dégrade fortement le
couvert végétal. Les sols, ainsi dénudés, s’exposent à une évaporation annuelle
intense qui aggrave le problème de la salinité.
La crise des systèmes de production oasiens marquée par la persistance de
la sécheresse depuis plusieurs décennies, dues aux changements climatiques,
a donné naissance à une prise de conscience sur l’urgence de la protection
des ressources naturelles. En réponse aux modèles technicistes privilégiant le
rendement de la culture, des approches alternatives plus soucieuses de l’équité
socio-économique et la durabilité de la production se sont développées
telles que l’approche systémique où la recherche est dirigée par des équipes
multidisciplinaires avec proposition de gammes de solutions adaptées à
chaque type d’exploitation, dont l’agriculteur participe à l’expérimentation et
l’évaluation de la solution proposée.
L’élevage ovin constitue pour les agriculteurs une source de trésorerie
pour le financement de certaines opérations agricoles. Les agriculteurs, en
raison du manque d’alimentation, sont obligés de vendre leurs animaux aux
commerçants venant des principales agglomérations urbaines (Mèknes, Fès,
58
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
le système oasien
Marrakech...), pour pratiquer l’engraissement, puis de les revendre aux souks
d’Errachidia et de Rich à des prix élevés. D’une manière générale, au niveau
des oasis plus, l’alimentation est insuffisante, plus l’agriculteur a tendance à
réduire la taille de son troupeau. Ce dernier est alimenté à base de produits
de l’exploitation tels que les déchets de dattes, de la paille, de l’orge et de la
luzerne. L’excèdent de la luzerne est conservé en foin afin de faire face aux
périodes creuses (décembre – février). L’agriculteur a recours à l’achat des
aliments concentrés destinés surtout à l’engraissement des agneaux et veaux
vivant en cohabitation et stabulation en général.
Quant aux nomades, ils ont tendance à réduire de plus en plus la taille
de leur troupeau à cause des années de sécheresse et certains d’entre
eux pensent même à se sédentariser. En effet, l’alimentation du bétail est
assurée majoritairement par la production pastorale. Les Unités Fourragères
(UF) gratuites offertes par ces parcours n’étant désormais plus suffisantes, les
nomades procèdent, tant bien que mal, à la supplémentation de leurs animaux.
Elle est à base essentiellement de l’orge et des déchets de dattes. La paille est
distribuée comme aliment d’encombrement.
1.2.2. Interactions et complémentarités entre les systèmes oasiens et sylvopastoraux
Les complémentarités et interactions qui peuvent exister entre les systèmes de
production identifiés et étudiés, s’observent principalement à deux niveaux : l’un
à l’intérieur du système de production oasien et l’autre entre le système oasien et
le système extensif pastoral. Les systèmes de production oasiens se basent sur une
association agriculture/élevage très étroite, elle permet d’améliorer le revenu
de l’agriculteur et illustre d’une façon judicieuse la valorisation des ressources
disponibles.
L’élevage offre d’importantes quantités de fumier, utilisées pour la fertilisation
des terres agricoles, et par conséquent contribuent à l’amélioration des
rendements des différentes cultures. Ie fumier constitue également une source
de capital disponible au financement des différentes opérations nécessaires à
l’installation et à l’entretien des systèmes de cultures. Cette complémentarité est
bien illustrée par la figure 5 (INRA – ICRA, Errachidia 2003)29.
29 - Acherkouk M., M. Boughlala, S. Kaci, N. Omeiri, C. Onana et S. R. Rakotson : Systèmes de production
oasiens et sylvo-pastoraux : interactions, complémentarités et développement durable. Cas de bassin de
Ghéris. Maroc 2003, 137 page
59
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
le système oasien
Cultures
vivrières
Cultures
Fourragères
Fourrage
Résidus
Cultures
de rente
Fumier
Arboriculture
Palmier
Ovins
Bovins
Caprins
Asins équidés
Travail salarial
Flux monétaire
Système de culture
Système d’élevage
Figure 5 : Diagramme de flux entre les systèmes de culture et d’élevage
En fait, l’interaction entre le système oasien intensif et le système pastoral
extensif se traduit par des échanges de flux non négligeable. Le système
d’élevage extensif se caractérise par une mobilité continuelle sur de longues
distances qui se justifie par la recherche de l’herbe afin d’alimenter le bétail.
Il s’agit là, d’une transhumance saisonnière en été orientée essentiellement
vers les parcours de montagne. Seulement, avec la sécheresse, les nomades
ont limité leurs déplacements à quelques parcours se trouvant dans un état
dégradé à cause de leur utilisation intensive.
Les nomades ont développé un système d’information pour détecter
de bons espaces pastoraux. En effet, les oasis reçoivent généralement des
précipitations aléatoires et faibles ainsi que des crues mais très favorables à
la levée des graminées et à la repousse. La nouvelle végétation ainsi obtenue
est bien valorisée par les troupeaux. Pour découvrir ces espaces pastoraux,
les nomades multiplient des contacts pour se renseigner, en particulier le jour
du marché (souk). Ces derniers se rassemblent par la suite, collectent les
fonds et chargent un ou plusieurs membres de la communauté à effectuer
le déplacement pour l’identification et la sélection des espaces pastoraux
intéressants et les lieux de campements appelés « Mergued ». Une opération
qui permet de tisser des relations et de développer des affinités avec les
populations des localités choisies.
Se procurant les informations nécessaires des informateurs « éclaireurs », les
nomades louent les moyens de locomotion (des grands camions) lorsque la
distance à parcourir est grande pour le transport des troupeaux vers les aires
60
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
le système oasien
identifiées. En période de sécheresse, les parcours exploités par les nomades
leur sont parfois loués par les habitants sédentaires.
Face au déficit alimentaire engendré par la dégradation des ressources
pastorales, les nomades se trouvent obligés de supplémenter leur troupeau
durant toute l’année. Ils s’approvisionnent essentiellement en déchets de
dattes au niveau de l’oasis et parfois même en matière d’aliments grossiers
(luzerne et paille).
Les conditions de vie pénibles obligent les nomades à vendre leur force de
travail pendant les opérations agricoles de pointe dans les oasis (semis, travaux
du sol, entretien des plantations, récolte). Les nomades sont rémunérés soit en
espèce soit en nature (blé, orge, paille…) (Figure 6).
Les agriculteurs oasiens achètent des agneaux chez les nomades à bas
prix (300 à 400 Dh/tête), les engraissent durant un à deux mois, du fait qu’ils
disposent de possibilités d’alimentation, puis les revendent au moment opportun
à des prix variant entre 700 et 800 Dh/tête. L’intensité des complémentarités et
interactions entre les systèmes de production est fonction essentiellement de
la disponibilité de l’eau. Elle pourrait, de ce fait, s’affaiblir sous le poids de la
sécheresse (INRA-ICRA, Errachidia 2003)30.
Octobre à Février
Résidus de dattes
Orge et paille
Juillet à Décembre
Décembre - janvier
Huile d’olive
Nov.-Décembre
Cours de l’année
Mars-Avril
SYSTEMES DE PRODUCTION
OASIENS
Agneaux semi -finis
Travail salarial
Plantes médicinales
SYSTEMES DE PRODUCTION
SUR PARCOURS
Figure 6 : Echanges et complémentarités entre les systèmes de production
oasiens et sylvo-pastoraux
30 - Idem que 29
61
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
le système oasien
1.2.3. Rôle de la femme
Ces constats ont été confirmés à travers les entretiens effectués avec les
agriculteurs ainsi qu’avec les femmes qui estiment que la prise de décision ne
fait pas partie des prérogatives de la femme au sein de la famille. Les agriculteurs
développent même une perception de dévalorisation et de non reconnaissance
du travail de la femme31.
La femme rurale dans les oasis de Ziz est très active, en plus de sa
responsabilité de s’occuper de la famille (nettoyage de la maison, mouture
de blé, ramassage du bois, approvisionnement en eau, préparation du pain,
stockage et conservation des olives…). Elle est impliquée dans la quasi-totalité
des activités de l’exploitation. Au niveau de la province d’Errachidia, plus de
80% des femmes rurales participent aux travaux agricoles et 55% d’entres elles
sont âgées d’environ 40 ans. Le temps journalier des femmes est réparti entre le
travail domestique (50%); le travail aux champs(21%); le travail lié à l’élevage
(19%) et les activités artisanales (10%), (ORMVA/TF, 2002).
La conduite technique de l'élevage D'man est essentiellement assurée par
les femmes. Outre les lourdes tâches domestiques et agricoles (recherche de
bois de feu, l’eau potable, préparation des repas, éducation des enfants,
désherbage et moisson des céréales, etc.), les femmes oasiennes participent très
activement à l’activité élevage par le fauchage et le transport des fourrages, le
broyage des déchets de dattes, l’alimentation et l’abreuvement des animaux…
L'intervention de l’homme dans cette activité est limitée à l'acte commercial :
vente et achat d’animaux et d’aliments de bétail. En général, il n’y a pas de
répartition des tâches entre les différentes catégories d’âge. Ces travaux sont
exécutés par l’ensemble des femmes du ménage.
Au vu de la contribution significative de la femme à l’élevage ovin D’man,
son développement dépend fortement de l’amélioration du cadre de vie des
femmes oasiennes et de leur statut social. L’encadrement dans ce domaine doit
être bien planifié pour aboutir à une amélioration du savoir-faire féminin basé sur
le savoir traditionnel accumulé.
« …S’agissant de la famille et de la promotion de la condition de la femme,
j’en ai déjà énoncé la problématique fondamentale dès le lendemain de Mon
Accession à la Charge Suprême d’Amir Al Mouminine, en M’interrogeant dans le
discours du 20 Août 1999 : Comment espérer assurer progrès et prospérité à une
société alors que ses femmes , qui constituent la moitié, voient leurs droits bafoués
et pâtissent d’injustice, de violence et de marginalisation, au mépris du droit à la
dignité et à l’équité que leur confère notre sainte religion ».
Encadré 5: Extrait du Discours de S.M. Le Roi Mohamed VI du 10/10/2003
31 - Belarbi A., Bouayad A., M. Diaou, N. Kassis et M. Tidjani Maliki : Agrobiodiversité et durabilité des systèmes de production oasiens dans la palmeraie d’Aoufouss - Errachidia. Maroc 2004, 167 page
62
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
le système oasien
En dépit du rôle capital qu’elle assume tant à l’intérieur qu’à l’extérieur du
foyer, la femme semble être exclue du processus de prise de décision aussi bien
en matière de stratégie et de gestion de l’exploitation qu’au sein de la famille.
La fonction de chef d’exploitation revient exclusivement à l’homme. Il s’agit
généralement de l’époux ou du fils aîné. Le chef de ménage qui est dans la
plupart des cas chef d’exploitation exerce un contrôle total sur les ressources
économiques de l’exploitation et de la famille et en assure leur répartition entre
les différents membres dont il a la charge. La femme est parfois propriétaire
de ressources, à savoir la terre à travers l’héritage ou l’élevage, quand elle est
membre de coopérative, mais elle n’en assure ni la gestion ni le contrôle. Ses
ressources font partie des biens communs de la famille dont le chef de ménage
détient le pouvoir de contrôle et de décision.
vu le taux élevé de l’analphabétisme chez les femmes (95%), de l’insuffisance
des ressources financières et les difficultés d’accéder à l’information et à la
formation, la promotion de la femme et son intégration dans les programmes
de développement passe inévitablement par leur organisation en groupements
professionnels ou associations avec un encadrement qualifié en mesure de
rehausser leur niveau, renforcer leur capacité et leur permettre d’accéder aux
ressources et d’en disposer librement.
2. Scénarii de développement des oasis
L’analyse succincte des contraintes précédemment citées a permis
l’élaboration d’un plan d’action comprenant des axes de recherche et des
petits projets locaux pour valoriser le savoir local, promouvoir le développement
participatif et diversifier les sources de revenu. Pour ce qui est de l’utilisation de
l’eau d’irrigation, dont les besoins sont de plus en plus grands, la recherche
doit promouvoir le conseil agricole, principalement sur les nouvelles techniques
d’économie d’eau telles que, la détermination des besoins en eau des
différentes cultures et proposer des solutions pour atténuer le problème de la
salinité de l’eau et du sol.
Concernant la conduite des cultures, un accent particulier doit être accordé
aux doses et aux périodes de fertilisation des cultures, au choix variétal tout en
préservant la biodiversité locale et aux techniques de lutte contre les parasites
des plantes. Des ravageurs qui affectent la presque totalité de la production des
dattes commercialisables, qui combinés aux mauvaises conditions climatiques,
menacent de disparition le patrimoine génétique phoénicicole.
La régression des luzernières, attaquées par des ravageurs, risque de poser
des problèmes d’alimentation du cheptel, d’où l’utilité de poursuivre les
recherches pour mettre au point des méthodes de lutte efficaces. A ce titre, la
lutte intégrée contre la ravageurs et les maladies se justifie et à plus d’un titre.
63
le système oasien
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Quant à l’élevage, la préservation du patrimoine génétique de la race
D’man est une priorité pour limiter son érosion génétique. Des techniques de
conduite des troupeaux ovins en stabulation sont disponibles au niveau de
la Recherche mais nécessitent des programmes de vulgarisation adéquats.
Une étude qualitative et quantitative de la végétation naturelle ainsi que sa
cartographie sera un impératif préalable pour l’élaboration d’un schéma
d’aménagement et de réhabilitation des espaces pastoraux de la zone. De
même, des études de la dynamique des systèmes d’élevage sur parcours ansi
que la caractérisation et l’identification des populations des petits ruminants
sont vivement recommandées. L’écoulement des différents produits agricoles
nécessite une attention particulière pour assurer une commercialisation équitable
pour une meilleure valorisation des produits de terroirs et labellisation.
Partant des contraintes des systèmes de production liées étroitement à la
question centrale de recherche «quelle recherche - développement pour la
sauvegarde de la biodiversité et la durabilité des systèmes de production ?» et
de l’analyse du fonctionnement des systèmes de production, leurs dynamiques
ainsi que les stratégies des agriculteurs, l’approche de planification par scénarii
de développement constitue autant d’atouts et d’impératifs pour ce genre de
recherche.
2.1. Pourquoi le choix de l’approche « scénario de développement »?
La formulation des scénarii de développement par l’exploration des visions
futures est une approche qui est bien adaptée au contexte et à la problématique
des oasis32. La programmation par scénario est un processus qui permet aux
acteurs et opérateurs du développement de formuler une vision commune
de l’avenir et de décider, ensemble, des meilleurs moyens de la réaliser,
d’explorer ses implications et d’en planifier la réalisation. Cette méthode de
programmation a été utilisée avec les agriculteurs dans le périmètre irrigué du
Tadla. Elle consiste à examiner la vision du futur de l’irrigation par les agriculteurs
« future visioning». Elle est entièrement basée sur une connaissance intuitive et
sur des projections dans le futur. Le modèle produit est davantage de type
idéal/ normatif, sans tenir compte des tendances actuelles. Il représente les
changements de la situation actuelle telle que les agriculteurs les souhaitent
(N. Sellamna, 2003).
C’est une méthode participative qui implique tous les acteurs locaux et
prend en considération leur perception actuelle et les évolutions probables
de l’agriculture dans leurs régions. Dans ce processus, les chercheurs et les
développeurs apportent leur savoir et savoir-faire et doivent être à l’écoute
des agriculteurs. En fait, réaliser des projections est très difficile compte tenu
des changements des facteurs socio-économiques, environnementaux,
institutionnels, politiques et démographiques.
32 - Idem que 31
64
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
le système oasien
La formulation des scénarii de développement se fait en présence des
acteurs concernés (chercheurs, agents de développement, vulgarisateurs,
représentants des agriculteurs…). Les participants identifient les facteurs
influençant le fonctionnement et la durabilité des systèmes de production,
appelé « Forces Motrices ». L’analyse de ces forces motrices en relation avec
la dynamique des systèmes de production et leurs combinaisons permettent
d’élaborer des scénarii de développement et d’offrir des pistes de Recherche et
de Recherche-Développement. C’est un exercice durant lequel les agriculteurs
expriment leurs points de vue lors des ateliers de restitution des résultats de
diagnostic qui permet d’enrichir davantage la base de connaissance « principe
de la triangulation »33.
2.2. Identification des forces motrices
Sept forces motrices ont été identifiées et hiérarchisées en concertation
avec les agriculteurs selon leur importance. Il s’agit de l’eau, des maladies et
ravageurs, du marché, de l’intervention de l’Etat, du transfert de technologie,
de la terre (disponibilité, statut juridique, morcellement...) et de la gestion
participative des ressources naturelles. L’analyse de l’évolution des forces
motrices selon les deux situations (positive et négative) a permis d’évaluer
l’impact des forces motrices sur la durabilité des systèmes de production et,
par conséquent, formuler les scénarii de développement (Tableau 6).
Tableau 6. Perspectives d’évolution des forces motrices et leur impact sur les
Systèmes de Production Agricole (SPA).
Forces
motrices
Tendance
Principales maladies
et ravageurs (Bayoud,
Psylles, Cochenilles,
Pucerons...)
Eau
Positive
Négative
Positive
Négative
Arguments
Impact sur la durabilité
des Systèmes de Production (SPA)
• Précipitations et crues en • Réintroduction
des
variétés
augmentation
disparues,
bonne
conservation
• Lâchées régulières d’eau du
in situ et amélioration des rendements
barrage
des cultures et des revenus.
• Sécheresse : Baisse de la • Perte de la diversité génétique :
nappe phréatique
espèces et variétés
• Lâchées d’eau du barrage • Abandon de l’activité agricole
en diminution
et reconversion vers de nouvelles
activités : Exode rural en nette
augmentation
• Désertification et ensablement
• Encadrement efficace des • Développement des espèces et
agriculteurs
variétés, diversification des cultures
• Gamme
de
bouquets
technologiques disponibles
en matière de protection
raisonnée des cultures
• Coût de traitement élevé
• Espèces
et
variétés
sensibles
• Traitement collectif difficile
(menace de disparition)
par manque d’organisation • Rendements en diminution
des agriculteurs
• Délaissement des variétés à faible
• Indisponibilité de technologies
valeur commerciale
33 - La triangulation : multiplication des angles d’observations pour vérifier la pertinence de l’Information,
MARP Bara GUEYE, cours ICRA 1993
65
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
le système oasien
Positive
le Marché
Négative
Négative
Positive
• Agrégation des agriculteurs
• Organisation des filières de
production
• Soutien
de
la
petite
agriculture :
subventions,
encadrement
• Mise en place de normes de
qualité
• Désengagement de l’Etat
• Baisse des prix des produits
• Ouverture du marché sur
l’importation
•
Progrès technologique
•
•
•
Négative
•
•
Positive
Gestion participative des
ressources naturelles
•
•
•
•
•
•
Positive
Intervention de l’Etat
• Diminution des importations
• Forte demande pour les
produits locaux
• Concurrence des produits
importés
• Baisse des prix
•
•
•
Négative
•
•
•
•
•
•
Incitation à la production de qualité
Revenus des producteurs améliorés
Opportunités d’investissement
Abandon de certaines cultures,
réduction du spectre variétal et
dégradation de la biodiversité
Baisse de la demande pour les
produits locaux
Dégradation des revenus des
agriculteurs
Exode rural
Développement des produits de
terroirs
Conservation in situ des espèces en
voie de disparition
Revenus des agriculteurs améliorés
• Reconversion vers d’autres activités
extra-agricoles
• Baisse des revenus des agriculteurs
• Exode rural
• Délaissement de la palmeraie
• Tendance
des
systèmes
de
production traditionnels vers la
disparition
Résultats
de
recherches • Agro-biodiversité sauvegardée et
disponibles et ciblés
mieux valorisée
Système de transfert des • Productivité des cultures et de
technologies efficace
l’élevage améliorée et de qualité
Liaison recherche • Revenus des agriculteurs améliorés
Innovation- Conseil Agricole
opérationnelle
Valorisation du savoir faire
local
Processus de transfert de • Dégradation
de
la
diversité
technologies défaillant
génétique
Non prise en compte des • Baisse de la productivité des
savoirs locaux
cultures
• Baisse des revenus des agriculteurs
• Dégradation des systèmes de
production traditionnels
• Tendance vers l’agriculture de
cueillette c’est-à-dire l’agriculteur
attend la récolte sans aucun effort
Développement participatif • Autonomisation des ruraux et
des technologies
autogestion
des
ressources
Développement
naturelles
communautaire et promotion • Diminution des conflits sociaux
de l’initiative locale
• Amélioration des conditions de vie
Réhabilitation du droit
des ruraux
coutumier (Orf) et /
ou de l’organisation
communautaire
Manque de coopératives de • Epuisement
des
ressources
gestion des ressources
naturelles
Faible communication entre • Multiplication des conflits autour des
acteurs et opérateurs locaux
ressources
• Désertification et ensablement des
oasis
Source : INRA –ICRA, 2003 et 2004, actualisé par KRADI
66
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
le système oasien
2.3. Formulation des scénarii de développement et leurs impacts
La confrontation des forces motrices selon leurs évolutions a permis la
formulation de cinq scénarii de développement ci-dessous présentés. Les
implications probables de chaque scénario sur les systèmes de production et
l'agro-biodiversité ont été formulées et les besoins en recherche et en RechercheDéveloppement ont été identifiés.
2.3.1. Scénario I : Extension de la palmeraie (exploitation-entreprise) par des
techniques modernes (pompage et forage), réduction de l’aire de
culture et tendance vers la monoculture.
2.3.1.1. Impact sur la durabilité écologique
La survie des nouvelles exploitations modernes des oasis dépend de
l’évolution de la nappe phréatique. Cette dernière diminue de 1 à 2 mètres par
an suite aux pompages par forage. Un rabattement de 8 mètres a été enregistré
sur une période de 15 ans (1990-2004) a été signalé par certains agriculteurs34
d’où la menace qui pèse sur l’agro-biodiversité et la durabilité des systèmes de
production. L’urgence d’une gestion rationnelle de la nappe avec l’utilisation
des techniques d’économie d’eau s’impose.
2.3.1.2. Impact sur l’équité sociale
L’extension de la palmeraie nécessite des investissements importants, ce qui
profite aux agriculteurs disposant de plus de moyens avec des conséquences
qui pourront être négatives sur les petits agriculteurs installés dans la palmeraie
traditionnelle en raison du sur-pompage et des prix compétitifs. Cette option
pourrait être en revanche une opportunité pour la création de l’emploi pour les
oasiens chez qui le taux du chômage avoisine 17% (ORMVA/TF, 2003).
2.3.1.3. Impact sur la compétitivité économique
Dans ce type de scénario, les agriculteurs ont pour seul objectif la maîtrise du
marché, donc contraints à produire à des prix compétitifs tout en visant la qualité.
De plus, les nouvelles extensions des palmeraies sont focalisées sur la production
du Mejhoul « datte de très bonne qualité, très appréciée par le consommateur
national et international », ce qui peut avoir un impact positif sur l’oasis pourvue
qu’il y ait une réinjection des recettes issues des ventes pour le développement
local et non pas aller investir ailleurs.
2.3.1.4. Impact sur l’agro-biodiversité et durabilité des systèmes de production
L’extension de la palmeraie permettra de reconstituer le patrimoine
phoénicicole ainsi que la conservation d’un certain nombre d’espèces végétales
(luzerne, maraîchage ...) et animales (race ovine D’man). Elle va réduire la vitesse
de l’avancement du désert. Par contre, le sur- pompage peut affecter la nappe
phréatique et, par conséquent, toute l’activité agricole des oasis traditionnelles.
34 - Belarbi A., Bouayad A., M. Diaou, N. Kassis et M. Tidjani Maliki : Agrobiodiversité et durabilité des systèmes de production oasiens dans la palmeraie d’Aoufouss - Errachidia. Maroc 2004, 167 page
67
le système oasien
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
 Implications sur la recherche
L’eau est de plus en plus rare et les besoins des cultures doivent être satisfaits
pour la pérennisation de l’activité agricole. La question de l’utilisation efficace
et efficiente du mètre cube d’eau est une question urgente à laquelle il faut
apporter des solutions dans l’immédiat. Les pertes d’eau par irrigation gravitaire
au long des seguias dans le Tafilalet atteignent 47% environ selon une étude
du ministère de l’environnement et de l’aménagement du territoire35. Dans ce
sens, la préservation de l’agro-biodiversité et le développement durable des SP
interpellent la recherche à développer des technologies et des connaissances
sur :
• Les techniques et méthodes efficaces d’utilisation économique de l’eau
sur la parcelle ;
• La valorisation des eaux de crues ;
• Les besoins réels des cultures et des associations «palmier dattier - olivier»
et cultures sous jacentes (luzerne…) ;
• La promotion des approches de développement participatif pour
promouvoir l’autogestion communautaire de l’eau et faciliter le transfert
des aquis de recherce chez les agricullteurs.
2.3.2. Scénario II : Tendance vers le recours au pompage dans les oasis
traditionnelles pour faire face à la dégradation du niveau de vie des
ménages. Ce scénario concerne en grande partie les exploitants
recevant de l’argent des travailleurs marocains émigrés à l’étranger
et ceux du Maroc. L’investissement est axé sur le creusement des puits
et leurs équipements par une motopompe.
2.3.2.1. Impact sur la durabilité écologique
Pour cette catégorie d’exploitations qui ont accès à l’eau, leur durabilité
de production est tributaire d’une gestion raisonnée de l’eau de la nappe
et une maîtrise des itinéraires techniques économiquement rentables et
écologiquement viables et durables. La situation dans 10 à 15 ans peut devenir
similaire à celle décrite dans le «scénario 1».
2.3.2.2. Impact sur l’équité sociale
Si la disponibilité de l’eau dans la nappe est suffisante, les agriculteurs verront
leurs niveaux de vie amélioré puisque leur premier souci est de produire pour
satisfaire les besoins de leurs familles. De plus, ceux qui ont la capacité de
dégager des surplus de production, donc l’épargne, verront leur niveau de vie
nettement amélioré.
35- Etude du MATEE, 2003.
68
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
le système oasien
2.3.2.3. Impact sur la compétitivité économique
En raison du coût élevé du carburant nécessaire au pompage (crise
énergétique à l’échelon mondial) et son impact sur l’augmentation des coûts
de production. Les petits agriculteurs qui ne sont pas compétitifs sur le marché
à cause des faiblesses liées au mouvement coopératif et la non maîtrise des
circuits de commercialisation, entre autres, subiront les conséquences négatives
et verront leurs revenus en dégradation.
2.3.2.4. Impact sur l’agro-biodiversité et durabilité des systèmes de production
L’impact peut être mesuré selon la disponibilité de l’eau. Si les investissements
dans le pompage continuent avec la fréquence actuelle et s’il n’y a pas de
renouvellement de la nappe phréatique, l’irrigation sera compromise et
l’agro-biodiversité sera affectée.
 Implications sur la recherche
Comme pour les recommandations destinées à la recherche dans le
« scénario 1 », la recherche sur les techniques économes de l’eau est un axe
primordial pour la durabilité des Systèmes de Production oasiens.
2.3.3. Scénario III : Tendance vers l’agriculture de cueillette « l’agriculture
nous donne peu, mais nous, on lui donne rien, dit un groupe d’agriculteurs »
abandon des exploitations agricoles et exode rural massif. C’est un scénario
catastrophique, qui peut avoir lieu si la situation actuelle persiste. En effet,
la faible productivité des systèmes de production par manque d’eau, le
Bayoud et l’émigration vont conduire à l’affaiblissement du tissu social au sein
de l’oasis. Les agriculteurs se contentent des petites quantités de
production obtenues sans trop s’investir (récolte des dattes et des olives).
De plus, le manque d’entretien des ouvrages collectifs favorise
l’avancement du désert.
2.3.3.1. Impact sur la durabilité écologique
La dégradation du niveau de vie des ménages et la démotivation des
agriculteurs vont conduire durant les 15 à 20 prochaines années à une perte
accélérée de l’agro-biodiversité et par conséquent à l’affaiblissement des
systèmes de production agricole déjà fragiles.
2.3.3.2. Impact sur l’équité sociale
Les petits agriculteurs verront leur situation socio-économique en nette
régression. Ils vont recourir à l’exode rural vers les zones urbaines à la
recherche de travail en tant que main d’œuvre dans le secteur du bâtiment
essentiellement. La situation de la femme sera affectée, surtout si les débouchés
69
le système oasien
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
pour ses produits artisanaux sont réduits. De plus, l’âge moyen avancé (55 ans)36
des chefs des exploitations agricoles et l’émigration pousse à s’interroger sur le
transfert du savoir ancestral aux jeunes et la sauvegarde du savoir local. C’est ce
scénario qui est en train de se réaliser dans certaines oasis (les fils d’agriculteurs
sont incapables de polliniser les palmiers ou de faire les récoltes des dattes…).
2.3.3.3. Impact sur la compétitivité économique
Les exploitations agricoles dans ce type de scénario ne sont pas viables sur
le plan économique. Elles seront incapables de subvenir aux besoins de leurs
familles. Elles peuvent constituer une source de main d’œuvre pour les grandes
exploitations modernes.
2.3.3.4. Impact sur l’agro-biodiversité et durabilité des systèmes de production
Sans intervention urgente, les agriculteurs qui s’occupent de la
conservation in situ de la biodiversité locale (gombo, luzerne, dattier, …) se
désintéresseront de continuer à la pratiquer et ce, en absence de systèmes
d’encouragement et /ou de récompenses. D’où le risque probable de
perte du patrimoine génétique.
 Implications sur la recherche
La durabilité des systèmes de production est conditionnée par la
capacité des populations à arrêter l’érosion génétique. En ce qui concerne
la recherche, la sauvegarde de l’agro-biodiversité constitue un axe
d’extrême importance au même niveau que l’eau. La recherche peut
contribuer par :
❐ Des diagnostics de terrain pour caractériser et évaluer toute
l’agro-biodiversité (inventaire) ;
❐ La conservation dans des banques de gènes de l’INRA du germoplasme
local ;
❐ La promotion de la conservation in situ ;
❐ La réalisation des études socio-économiques pour explorer toutes les
pistes d’amélioration des conditions de vie des agriculteurs (nouveaux
créneaux, système de financement, plan technico-économique
des cultures, labellisation ....) et la promotion du commerce équitable,
l’écotourisme culturel, surtout que les oasis (UNESCO) constituent un
patrimoine de l’humanité;
❐ La promotion de l’appoche Système Ingénieux du Patrimoine Mondiale
Agricole (SIPAM), Cf. page 77 de ce livre.
36 - Document du Royaume du Maroc « Rapport National sur l’état des ressources génétiques animales»,
MADR – FAO, page 12 - 2005
70
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
le système oasien
2.3.4. Scénario IV : Dégradation des ressources pastorales, sédentarisation
des nomades aux alentours de la palmeraie, pression accrue sur les
ressources naturelles des oasis et conflits sociaux dans les Ksours.
2.3.4.1. Impact sur la durabilité écologique
Les zones pastorales n’arrivent plus à satisfaire les besoins des troupeaux en
alimentation. C’est la conséquence des conditions climatiques défavorables et
de la surexploitation des ressources pastorales, ce qui va accentuer la pression
sur les ressources naturelles et générer des conflits entre les oasiens et les éleveurs/
pasteurs.
2.3.4.2. Impact sur l’équité sociale
Les pasteurs rencontreront d’énormes problèmes d’intégration dans
l’agriculture oasienne, puisqu’ils ne possèdent pas de terrains et ne sont pas des
ayants droits à l’eau. Ils verront la situation socio-économique de leur famille
se dégrader de plus en plus et vont probablement essayer de diversifier leurs
activités (commerce, vente de la force de travail…) ou d’émigrer vers les villes
avoisinantes oú à l’étranger.
2.3.4.3. Impact sur la compétitivité économique
L’élevage extensif ou élevage de parcours ovin, caprin et camelin constitue
la principale source des revenus de beaucoup de pasteurs nomades. C’est
la catégorie la plus exposée aux problèmes de subsistance et de satisfaction
des besoins de leurs familles et de leurs troupeaux. La qualité des produits de
l’élevage et des autres produits végétaux sera affectée et les quantités produites
seront faibles. Du coup, les produits auront des difficultés à trouver des débouchés
rénumérateurs des efforts des agriculteurs.
 Implications sur la recherche
❐ Diagnostic des contraintes et des potentialités et formulation des schémas
d’aménagement à moyen et long terme selon les spécificités des sites ;
❐ Transfert des acquis des recherches se rapportant à la réhabilitation et
la gestion des ressources pastorales, à l’alimentation des animaux sans
affecter les ressources naturelles et aux outils et méthodes d’aides à la
prise de décisions ;
❐ Préservation et valorisation des races locales (ovine et caprine) ;
❐ Caractérisation, évaluation du patrimoine génétique et sa conservation in
situ et ex situ.
❐ Apport de nouvelles disciplines en sciences sociales (géographie rurale,
anthropologie…).
71
le système oasien
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
2.3.5. Scénario V : Tendance vers la pluriactivité et / ou reconversion vers des
activités du commerce et éco-tourisme. C’est un scénario qui semble être
trèsprobable. Les enquêtes et sur le terrain confirment la tendance
vers la diversification des sources de revenus, notamment vers les petites
activités génératrices de petits revenus.
2.3.5.1. Impact sur la durabilité écologique
Le risque de l’impact de ce scénario est négatif sur la durabilité des systèmes
de production, surtout si les agriculteurs ne continuent plus à entretenir leurs
cultures « cf. scénario 2 » et s’adonnent seulement au commerce. Par contre, si
l’éco-tourisme est développé, institutionnalisé et bien organisé, on peut assister
à une certaine amélioration des revenus des agriculteurs, qui seront intéressés
à mieux s’occuper de leurs oasis. Les produits de terroir labélisés, l’artisanat des
femmes et les traditions constituent de grands atouts.
2.3.5.2. Impact sur l’équité sociale
Le commerce organisé, la maîtrise du marché et le développement de
l’écotourisme peuvent profiter aux petits agriculteurs (hommes et femmes) des
zones oasiennes. Cependant, la réglementation de ces activités est obligatoire
pour éviter la main mise de la grande industrie du tourisme sur les oasis.
2.3.5.3. Impact sur la compétitivité économique
Les produits de terroir répondent parfaitement aux critères recherchés pour
la production biologique. Leur certification et labellisation constituent une option
pour la valorisation des produits de terroir et donc l’amélioration des revenus des
oasiens. Les prix seront certainement compétitifs et attractifs pour les touristes
nationaux et internationaux.
 Implications sur la recherche
Le commerce et l’éco-tourisme sont deux activités intimement liées à
l’artisanat, aux produits de terroir et à l’entretien du paysage. La recherche
peut contribuer positivement à ce scénario à travers les activités de recherche
et de recherche-développement suivantes :
❐ Diagnostic, caractérisation et évaluation des produits agricoles locaux
sur le double plan qualitatif et quantitatif pour lesquels les oasiens tireront
plus de profit comparativement à d’autres localités ;
❐ Identification des opportunités de labellisation des principaux produits :
datte, olive, pomme, lait, beurre, plantes médicinales et aromatiques…;
❐ Suivi de la qualité des produits en termes de tests sur les résidus / reste des
produits chimiques;
❐ Etude socio-économique des petites activités génératrices de revenus
pour hommes et femmes et proposition des pistes d’amélioration;
❐ Transfert de Technologie et Conseil Agricole.
72
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
le système oasien
3. Une nouvelle approche de développement des systèmes de
production : Initiative du Système Ingénieux du Patrimoine Agricole
Mondial (SIPAM) au Maroc
3.1. Définition
Les systèmes agricoles traditionnels ont été créés, façonnés et entretenus
par des générations d’agriculteurs et d’éleveurs, qui utilisent les diverses
ressources naturelles sur la base des pratiques de gestion adaptées aux
conditions locales. Ces pratiques ont conduit à l’émergence des systèmes
agro-écologiques adaptés aux milieux à écologie fragile. Ils sont souvent le
reflet riche en agrobiodiversité agricole, à l’intérieur et entre les espèces et au
niveau des écosystèmes et des paysages. Fondés sur les anciennes sociétés
agricoles, certains de ces systèmes sont liés à d’importants centres d’origine et
de diversité des plantes domestiquées et les espèces animales.
La conservation des systèmes agro-écologiques est d’une grande
importance et de valeur universelle. L’initiative de la FAO appelée: Systèmes
Ingénieux du Patrimoine Agricole Mondial fondée par Mr. Kauhfkan37
vise à habituer les communautés de petites exploitations agricoles familiales,
les peuples autochtones, les minorités et les groupes tribaux à entretenir et
améliorer leurs systèmes agricoles traditionnels par la conservation dynamique
de la biodiversité et des savoirs qui leur sont liés. Depuis le lancement de
cette initiative de partenariat mondial en 2002, un large éventail d’activités
de développement a été mis en œuvre dans plus de dix pays qui soutiennent
la conservation dynamique des SIPAM et le renforcement de leur rôle dans
la sécurité alimentaire, le revenu des foyers, la conservation et l’utilisation
durable de la biodiversité agricole et la biodiversité associé et des paysages,
ainsi que les connaissances traditionnelles et la diversité culturelle. Le SIPAM38
s’inscrit parfaitement dans les objectifs du pilier II du Plan Maroc Vert en termes
de préservation des ressources naturelles et de mobilisation de la communauté
internationale pour promouvoir les investissements dans l’agriculture
écologique.
3.2. Site pilote de SIPAM au Maroc Imilchil-Amellagou : Oasis froides
Avec le soutien financier du Fonds International du Développement Agricole
(FIDA), le système d’Imilchil Amellagou (provinces d’Errachidia et Midelt) a
été identifié comme un système extraordinaire pour sa biodiversité agricole et
37 - Mr Kauhfkan le fondateur de cette initiative dans le monde a largement contribué à sa diffusion
auprès du grand public à l’échelon mondial
38 - Le SIPAM a été reconnu par de nombreuses institutions et organisations, et les références spécifiques des gouvernements l’ont inscrit dans les documents officiels des Nations Unies, y compris la récente
COP10 de la CDB et d’autres déclarations de l’ONU. Le SIPAM est financé par le GEF, le gouvernement de
l’Allemagne (Ministère Fédéral de l’Alimentation, Agriculture et Protection des Consommateurs (BMELV),
le Fonds international de développement agricole (FIDA) et collabore avec d’autres agences des Nations Unies et d’autres institutions partenaires nationales et internationales. Grace à son patrimoine riche,
la FAO a proposé d’étendre le bénéfice de cette initiative au Maroc.
73
le système oasien
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
associée, ses traditions agricoles, artisanales et culturelles, ses paysages, son
patrimoine architectural et touristique pour faire de cette région un modèle de
développement durable et rationnel face aux aléas et aux hostilités diverses.
La démarche de SIPAM a été présentée aux acteurs et opérateurs locaux à
Imilchil39. C’était aussi une occasion de sensibiliser les institutions locales, pour une
forte adhésion à cette proposition, afin qu’elles se l’approprient et la mettent en
œuvre dans les meilleures conditions. Cette manifestation a permis de définir
d’une manière participative avec les populations locales, les actions concrètes
nécessaires en vue de préserver et accroître la valorisation des cinq axes des
SIPAM à savoir: agro biodiversité et diversité associée ; ressources en eau et en
terres ; savoirs et savoir faire traditionnels ; techniques alimentaires et artisanales
et activités génératrices de revenus pour les femmes rurales des 2 sites.
La FAO a confié à l’INRA le mandat de caractériser les spécificités de ce site,
en collaboration avec l’Office Régional de Mise en Valeur Agricole de Tafilalet
(ORMVATaf) et l’association ADRAR, en proposant :
❐ Des arguments pour un classement parmi les sites pilotes mondiaux de
l’initiative SIPAM ;
❐ Des mesures de conservation dynamique du système Imilchil- Amellagou
(actions économiques, culturelles, agricoles, institutionnelles…) ;
❐ La caractérisation d’autres systèmes remarquables au Maroc, en vue de la
constitution d’un inventaire national de systèmes ingénieux de patrimoine
agricole ;
❐ Un partenariat national et international de SIPAM.
Le site Imilchil-Amellagou est situé dans le Haut Atlas Oriental du Maroc à
une altitude plus de 2000 m. Grâce à une riche biodiversité, il est intégré dans
le Park National du Haut Atlas Oriental et fait partie de la zone A de la Réserve
de Biosphère des Oasis du Sud Marocain. Il comprend des oasis froides, des
vallées, des lacs de montagne, des parcours humides (Agdales) et du semidésertiques.
Un inventaire de la biodiversité agricole et la biodiversité associée a été
réalisé. Aussi, 53 espèces végétales sont cultivées à travers 105 variétés dont
80% sont locales, distribuées entre les céréales, les légumineuses alimentaires,
les espèces maraîchères, les arbres fruitiers, et les plantes aromatiques et
médicinales. Ces espèces constituent la base de l’alimentation des populations
locales. La biodiversité associée comprend des espèces endémiques : 135
espèces végétales (30%), 4 espèces de mammifères, 7 espèces d’amphibiens et
de reptiles et 4 espèces de poissons. Ces ressources sont confrontées à plusieurs
menaces d’ordre climatiques, démographiques et anthropologiques. Des
mesures visant la préservation et l’accroissent de la valeur de la biodiversité ont
été proposées. Elles visent l’accroissement de la production chez des agriculteurs
en intégrant davantage l’agriculture et l’élevage. Les cultures fourragères et les
39 - Saidi S. et al un atelier a été organisé à Imilchil, pour présenter aux partenaires locaux et nationaux
le SIPAM et faciliter l’adhésion des populations locales, janvier 2010.
74
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
le système oasien
sous produits des cultures contribuent à l’alimentation des animaux d’élevage.
Ce dernier fournit le fumier pour la fertilisation des champs.
Le système des oasis froides et Agdals d’Imilchil-Amellagou intègre les trois
composantes de l’espace à savoir : l’oasis, les parcours arides ouverts toute
l’année et parcours humides à ouverture contrôlée. La gestion de ce système
a été analysée à quatre niveaux d’intégration. Les agriculteurs procèdent à
l’usage des techniques comme la polyculture, l’assolement et les rotations des
cultures qui permet l’amélioration de la fertilité et la conservation des sols.
Au niveau de l’élevage, la pratique de la transhumance combinée à la
gestion des Agdals, telle qu’elle est pratiquée par les éleveurs dans cette région,
permet d’assurer les besoins du cheptel tout en maintenant ou régénérant
le couvert végétal. Celui-ci contribue à la conservation des sols. Le couvert
végétal maintient le sol et permet la filtration des eaux de pluie qui alimentent
la nappe et réduit l’érosion
L’usage de ces techniques simples et efficaces, et bien adaptées à
l’environnement sont à diffuser auprès des agriculteurs au niveau local, national
et international. Ces techniques soutiennent l’argumentation de la candidature
de ce site pour son inscription dans la liste des SIPAM de la FAO.
Les procédures de valorisation de la production locales ont été aussi
proposées. Certaines productions sont très typées et offrent des possibilités de
développement des produits du terroir. Des actions de soutien technique et de
renforcement des capacités des agriculteurs ont été proposées afin d’assurer
le niveau de production en quantité et en qualité.
Une étude ciblant l’inventaire des ressources hydriques40 et l’estimation des
potentialités disponibles dans la région a été réalisée. Cette étude a rapporté
que les potentialités en eau de surface sont importantes. L’apport moyen
annuel par sous unité de la zone étudiée varie de 50 à plus de 140 Mm3. Ce
qui offre des possibilités de pratique de l’agriculture grâce à une mobilisation
rationnelle et une gestion efficace de ces ressources.
Concernant les eaux souterraines, 80 sources et 11 khattaras ont été
recensées. Le volume total mobilisé par ces infrastructures estimé à plus de
45 Mm3 par an dont 15 % est mobilisée par les khattaras. A souligner ici, que la
majorité des eaux de sources ne sont pas exploitées. Ces conclusions montrent
que les projets de production agricole ne sont pas plafonnés par l’eau et qu’ils
ont un manque à gagner.
L’étude des sols41 a permis de faire le point sur l’état de dégradation de cette
ressource. Cette étude a rapporté que l’érosion et le risque élevé d’inondation
40 - Etude ORMAVTaf et FAO, citée par Saidi S., INRA, Composantes eau et sol, 2011
41 - Etude du MATEE 2003.
75
le système oasien
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
sont les traits marquants qui limitent et menacent la productivité agricole et
par la suite la stabilité et le développement des communautés rurales de ces
zones.
Des activités génératrices de revenus ont été appuyées, et se sont intéressées
essentiellement aux activités liées aux femmes. L’action relative à Tahandirte
(tapis en laine) a révélé l’attachement des femmes à ce produit qui fait partie
de leur identité. Elle a aussi mis l’accent sur la rupture qui est en train de se faire
entre les générations et le problème de la transmission du savoir.
L’étude des possibilités de tourisme42 de nature a été effectuée dans la
région dans le but de s’orienter dans l’avenir vers l’écotourisme. Il était question
de comparer le niveau actuel de cette activité avec les potentialités de la
région. L’analyse a révélé de grandes possibilités d’integrer l’écotourisme dans
le plan de développement durable de cette région. Des propositions ont été
faites avec la contribution des opérateurs locaux.
Des actions d’inventaires du patrimoine immatériel ont été réalisées. Un
référentiel des chants et des contes relatives aux savoir et savoir faire dans
le domaine de gestion des ressources naturelles, l’agriculture, l’élevage a été
réalisé également.
La Jmaâ en tant qu’institution active, qui intervient au niveau de tous les
secteurs de la vie (gardiennage des champs, gardiennage des parcours,
restauration des sols, gestion de l’eau, gestion des terres collectives…) peut
servir, non pas seulement de relais, mais de collaborateur de levier pour la mise
en œuvre des plans de conservation dynamiques de SIPAM.
Le douar reste l’échelle incontournable pour permettre une meilleure
gestion des ressources naturelles. Cependant, la non reconnaissance juridique
des communautés de base et de leur droit coutumier sur leur espace d’usage
est un obstacle au développement rural.
Des progrès importants de production agricole et de services
environnementaux sont possibles tant dans les oasis que dans l’espace agraire
hors SAU, lequel représente une part importante des ressources et des revenus
des exploitations. Ceci suppose des innovations de gouvernance, notamment
par la reconnaissance des usages socio-fonciers et la contractualisation,
avec les communautés de base (Jmaâ), et associations pastorales ou leurs
groupements, mais aussi par un aménagement adéquat, une agriculture
durable et des chartes de gestion des terroirs villageois, des périmètres irrigués
et des aires pastorales.
Ce type d’approches se construit dans une élaboration concertée de la
vision du développement possible à court terme. Il conduit à des synthèses sous
formes de chartes d’action à long terme, et à des projets individuels et collectifs
qui se déclinent à plusieurs échelles de territoires : exploitations, villages/douars,
vallées, aires pastorales communes, périmètres, communes rurales, petites
42 - Etude Association ADRAR – FAO, citée par Saidi., INRA, Composantes écotourisme, 2011
76
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
le système oasien
régions. L’échelle des « petites régions » et celle des « communautés de base »
constituent des niveaux d’action d’importance stratégique.
En s’inspirant, du modèle Site pilote dans le Haut Atlas Oriental :
Imilchil-Amellagou, inscrits oasis froide comme SIPAM43 en 2011. Les acteurs
et opérateurs locaux doivent œuvrer pour la promotion et la conservation
des savoirs faire locaux et connaissances endogène et des dynamiques
des systèmes ingénieux du patrimoine mondial dans tous les écosystèmes
vulnérables au Maroc. La recherche – développement peut jouer un rôle
important dans ce chantier selon des démarches participatives et systémiques
pour la caractérisation des Sites potentiels présentant l’identité patrimoniale
et culturelle.
Les critères ayant permis la distinction de ce site de zone de montagne
comme SIPAM, existent en grande partie dans les écosystèmes oasiens et
pastoraux, à savoir : i) la richesse de la biodiversité végétale et animale,
ii) les pratiques traditionnelles ancestrales de solidarité communautaire
développées par les ruraux dans la gestion de l’eau et des parcours (Agdals)
et des mouvements pastoraux des nomades, iii) la multifonctionnalité de
l’agriculture comme un mode de gestion des ressources naturelles et facteur de
dynamisation de l’aménagement du territoire et de développement durable,
iv) les rites culturels (contes, poésie, musique…) culinaires, l’architecture, le
tissage traditionnel local en laine adapté au milieu (Jellaba, Tahandirt…) et
v) le savoir faire des femmes dans les usages des plantes médicinales, le choix
des espèces pour le bois de feu selon des critères liés à la forme et taille de
la plante (le feuillage, la couleur de la fleur, la durée de combustion, l’odeur,
la difficulté de coupe ou à l’arrachage, à l’absence de fumée, à l’odeur
agréable…).
Parallèlement, les contraintes majeures présentent des similitudes entre ces
écosystèmes. A titre d’exemples on peut citer : le droit coutumier n’est plus
respecté au niveau des Agdals engendrant une sérieuse déstabilisation des
équilibres pastoraux par la dégradation de la biodiversité ; l’érosion des sols
engendrant l’arrachage des bergers des oueds; le désintéressement des jeunes
attirés de plus en plus par la vie moderne et les faibles revenus engendrés par
l’activité agricole ne permettant aux chefs de familles de subvenir à leurs
besoins.
La relation entre le droit coutumier (Orf) et la loi institutionnelle dite moderne
L’Orf est considéré par les populations des zones étudiées comme étant la
loi la plus adaptée pour une meilleure gestion de l’irrigation, de la forêt et des
43 - Promotion des systèmes de savoir et de culture, conservation dynamique des systèmes ingénieux
du patrimoine mondial (SIPAM) au Maroc, cas du site d’Imilchil-Amellagou / Maroc, document de la
FAO - 2011
77
le système oasien
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Agdals44. Il a été soulevé lors de l’atelier45 que les problèmes vécus aujourd’hui
par les populations sont liés directement au non respect de l’application de l’Orf
et souvent les textes sont inconnus par les populations surtout les femmes. Pour
palier à ces insuffisances, il a été proposé ce qui suit :
❐
❐
❐
❐
Réactiver et restaurer l’application de l’Orf par l’encadrement de l’Etat
avec un rôle proactif des autorités locales ;
Réécrire l’Orf, le documenter et le mettre à la disposition de la Jmaâ et
des associations pour le faire connaître davantage aux ayants droits ;
Appuyer la Jmaâ selon une approche participative pour respecter
l’Orf et consolider aussi l’autogestion des ressources naturelles et par là
consolider la démocratie locale;
Prendre en compte l’Orf dans la publication de nouveaux textes régissant
la gestion collective des ressources naturelles.
Attestation de reconnaissance par la FAO du site d’Imilchil-Amellagou
comme site Ìngénieux du Patrimoine Agricole Mondial (SIPAM)
44 - Difficulté d’application de l’Orf dans les Agdals à cause, l’augmentation de la taille des troupeaux.
Selon les textes écrits de l’Orf, le troupeau de petits ruminants d’un ayant droit ne doit pas dépasser 100
têtes, si non il lui est interdit d’accéder à l’Agdals.
45 - INRA – FAO, Oasis froides et Agdals d’Imilchil - Amellagou " Patrimoine Agricole Mondiale (SIPAM/
GIAHS) ". Groupe de travail autour de la thématique « Meilleur Synergie » entre le droit coutumier (Orf)
et la loi écrite (règlements, décrets) animé par Harzeni A. et rapporté par KRADI C., 20 octobre 2011,
Rabat – Maroc.
78
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
le système oasien
Conclusion du chapitre II
La réussite des programmes de recherche-développement accompagnant
les scénarii optimistes et évitant les scénarii négatifs décrits auparavant dépend
dans une large mesure d’un certain nombre de préalables dont : i) Une
politique claire pour la promotion du rôle de la femme et son intégration dans le
processus de développement rural ; ii) un repositionnement du rôle de la société
civile par rapport au rôle de l’Etat dans ces régions à potentiel sous exploité;
iii) une stratégie pour la diversification de l’économie locale (écotourisme,
transformation des produits de terroirs, sédentarisation des commerçants
ambulants à travers des microcrédits…). Ces préalables doivent constituer les
principes directeurs des Plans Agricoles Régionaux et des contrats programmes
des filières de production reliant l’Etat et la profession.
Concrètement, les résultats des diagnostics des systèmes de production sur
les oasis ont été exploités dans l’élaboration du programme de recherche et
recherche – développement à moyen terme 2005-2008 du Centre Régional de
la Recherche Agronomique d’Errachidia créé en 2005, et qui est, désormais, un
pôle d’excellence de recherche sur les systèmes oasiens.
Pour le cas spécifique de la filière phoénicicole et ses perspectives de
développement dans le cadre du Plan Maroc Vert, il y a lieu de souligner
le vaste programme lancé en automne 2009 par Sa Majesté Le Roi
Mohammed VI qui donne une nouvelle dynamique à l’économie agricole
oasienne. Ce programme vise la plantation d’environ 3 millions de plants de
palmier dattier à l’horizon 202046. Il concerne aussi bien la réhabilitation, la
reconstitution et la densification des palmeraies existantes que la création de
nouvelles plantations modernes au sein et à l’extérieur de la palmeraie quand
l’eau est disponible.
Pour accompagner ce vaste programme, la recherche agronomique,
forte de ses acquis de recherches sur le palmier dattier et le système oasien,
dispose aujourd’hui d’un inventaire de 453 cultivars47, dont 7 cultivars résistants
à la maladie du Bayoud, 16 étant productifs, de qualité et de haute valeur
commerciale, 2 palmiers mâles performants et résistants au bayoud produisant
du pollen de haute qualité. De plus, l’INRA dispose d’une collection de 5000
46 - Atlas du palmier dattier au Maroc, INRA Maroc 2011, page 20
47 - Idem 46
79
le système oasien
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
génotypes conservés in situ et ex situ au domaine expérimental de l’INRA à
Zagora ainsi que des laboratoires de multiplication in vitro des plants de palmier
dattier aux CRRA de Marrakech et d’Errachidia48.
Par ailleurs, pour atténuer les effets des changements climatiques et
contribuer à la préservation des ressources naturelles, la recherche agronomique
peut contribuer dans le suivi du phénomène de la désertification par l’utilisation
des outils climatologiques et de la géomatique à travers l’appréciation
spatiale et temporelle des changements, et mise en évidence d’indicateurs
de désertification et l’observation simultanée et répétitive des vastes étendues
pastorales avec prédiction de l’évolution des écosystèmes steppiques. Dans
ce sens, l’INRA dipose des résutats et des téchniques pour conservation de la
biodiversité végetales et animale.
L’idée de promotion du SIPAM est prometteuse. Seulement, la grande
question qui mérite une réponse est en relation avec l’impact des inscriptions
des écosystèmes dans des patrimoines mondiaux (zones de biosphère, SIPAM…)
sur les budgets des ménages, les conditions et les moyens d’existence des
communautés rurales vivant dans les écosystèmes vulnérables (oasis, montagnes,
parcours). En principe, une telle reconnaissance donne plus d’éligibilité et
priorité à l’échelon national et au niveau de la communauté internationale pour
plus d’investissement dans le développement durable ce qui pourrait avoir des
retombées positives sur les populations et sur leurs moyens d’existence.
La visite Royale dans la région d’Imilchil en 2009, est un signe fort et un
soutien pour le développement durable de ces zones vulnérables. La nouvelle
constitution reconnaît la culture Amazigh comme patrimoine à préserver
de l’identité marocaine. De façon générale, il est également proposé de
promouvoir d’autres systèmes ingénieux marocains, et d’étendre la démarche
actuelle à une procédure d’inventaire national à prendre en compte dans les
stratégies de développement agricole et rural futures.
48- Renforcement des infrastructures de l’INRA pour la production des souches pour une capacité de
60.0000 souches /an qui sont cédées aux laboratoires privés pour la production des vitroplants de palmier
dattier de qualité et au profil variétal requis destinés aux agriculteurs. Projet de développement de la
filière phoenicicole, INRA 2011.
80
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Photos (Kradi C.) 3 & 4 : Zones de montagne du Moyen Atlas central.
81
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Chapitre 3
Le système montagnard : Meilleure
connaissance des systèmes de
production pour de meilleures
interventions techniques
Introduction
Le Maroc compte une grande diversité de milieux écologiques parmi lesquels
figurent les chaînes de l’Anti, Moyen et Haut-Atlas au centre du pays et la
chaîne du Rif dans le Nord. Ces territoires sont pourvus de grandes potentialités,
mais insuffisamment valorisées jusqu’à nos jours. Parmi les atouts des régions
de montagnes et de leurs systèmes agraires, on peut noter des pratiques qui
requièrent le qualificatif de mode de production biologique. La viande de
caprins en particulier est d’une grande qualité liée aux propriétés intrinsèques du
produit local. Elle est très appréciée par les consommateurs et très recherchée
pour ses qualités diététiques et organoleptiques. La montagne est aussi un lieu
privilégié pour la culture des pommes de terre qui, originaires de régions de très
haute altitude dans les montagnes des Andes, s’adaptent facilement au climat
du Moyen Atlas. Certaines variétés de blé, comme ifern’mourgh, spécifiques des
régions de montagnes du Moyen Atlas « province de Beni Mellal », présentent
des qualités boulangères exceptionnelles ainsi que d’autres produits de terroir
de grande qualité (miel, champignon, myrtille…). Des exemples qui constituent
un créneau porteur pour les producteurs au vue de l’évolution de la demande
des consommateurs en produits dits biologiques de terroirs aussi bien au niveau
national qu’international.
Le développement des zones de montagnes s’est révélé en deçà des
aspirations des populations. Comparés aux buts envisagés dans les discours
politiques, les investissements réalisés dans les projets montagnards n’ont
abouti qu’à des succès très modestes. Ce constat s’explique, à notre sens, en
grande partie par la non compréhension des fonctionnements des systèmes de
production et du milieu et par conséquent des objectifs des agriculteurs de ces
zones.
La recherche sur les systèmes de production agricole en zone de montagnes
a été motivée par la demande urgente en connaissances, outils et
approches nécessaires à la mise en place d’un programme de recherche
82
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Le système montagnard
et recherche-développement spécifique aux zones de montagnes basé sur
les réalités de terrain et en conformité avec les besoins des Plans Agricoles
Régionaux.
1. Les grands traits des systèmes de production des zones de
montagne : contexte et problématique
Les grands traits des montagnes peuvent être résumés en la pression
démographique sur les ressources naturelles, l’érosion des sols et de
l’agro-biodiversité, la pauvreté, les faibles revenus des agriculteurs et la
faiblesse de l’infrastructure socio-économique de base couplée à l’isolement
et/ou enclavement. En contre partie, les montagnes renferment d’énormes
potentialités et atouts peu valorisés et dont les populations locales en profitent
très peu, telles que la beauté du paysage, la diversité biologique, culturelle et
cullinaire et tout un tas d’externalités positives produites par les communautés
rurales.
Dans ce contexte, le manque de moyens dont ont souffert l’agriculture
et l’élevage des régions de montagnes a servi dans certaine mesure à la
préservation du milieu de la dégradation (milieu vierge). En effet, les agriculteurs
et les éleveurs, dépourvus de moyens pour investir dans des techniques de
conduite nouvelles, ont développé des modes de conduite sans effets polluants
ou nocifs sur l’homme et sur la nature. Avec la prise de conscience actuelle
sur les problèmes que l’agriculture et l’élevage intensifs peuvent causer à
l’environnement et à la santé, tout doit tendre vers le développement de
l’agriculture dans les régions de l’Atlas et du Rif loin des constats d’échec
enregistrés dans d’autres zones. Par conséquent, il faut promouvoir des systèmes
agraires spécifiques à la montagne en vue d’un développement durable pour
ces zones.
D’autre part, les populations de ces régions, en majorité des agriculteurs
et des éleveurs, ont un grand rôle à tenir dans la gestion de leur milieu
naturel. Dans plusieurs pays d’Europe, dont la France, l’exode rural a eu pour
conséquence un abandon des milieux campagnards engendrant des effets
négatifs sur la gestion de l’environnement. On parle alors de «désertification»
des campagnes et un nouveau concept s’impose, celui du rôle de «gardiens
de la nature» qu’assuraient les agriculteurs quand ils entretenaient le milieu dans
lequel ils pratiquaient leur agriculture. L’exemple des incendies qui ravagent
chaque été de grandes étendues de forêts en raison de l’exode rural et de
l’existence de terrains non débroussaillés qui deviennent vulnérables au feu et
à sa propagation.
Les diagnostics49 réalisés en zone de montagnes de l’Atlas montrent une
tendance vers la dégradation de la forêt et des parcours, la faible productivité
49 - Etudes INRA – ICRA Province Beni Mellal, (1997), Province Ifrane (1998), Province Taounate (1999),
Province Chefchaouen (2005)
83
84
Pression sur la forêt source de bois
de chauffage, de pâturage et bois ménager
Erosion dûe aux crues
Surexploitation des parcours
collectifs (Agdal)
Déviation des cours d’eau
après plantation
Surcharge animale
Qualité fourragère des parcours
en dégradation
Faible productivité des cultures
Faible productivité des petits ruminants
Commercialisation et production
non maitrisée
Dominance des intermédiaires
Pouvoir de négociation faible
Coût de bois de chauffage élevé
(3000 DH/an/Famille)
Maitrise de techniques culturales
insuffisantes
Coût élevé des intrants
Grêle, chaleur, gelée fréquents
Période de soudure longue (hiver)
Coûts de l’alimentation
et soins sanitaires élevés
Absence des organisations
professionnelles
Faible valorisation
des produits de terroir
Enclavement (routes dégradées)
Dégradation
des ressources naturelles
Faible productivité
des activités agricole
Environnement
socio-économique
inadéquat
Le système montagnard
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
des activités agricoles et la non maîtrise de la commercialisation des produits
due à un environnement socio-économique inadéquat (Figure 7) en plus de la
faiblesse de l’appui et de l’encadrement des populations.
Système de production de zones de montagne en difficulté :
Besoins de famille difficilement satisfaits
Figure 7 : Arbre de contraintes des zones de montagnes.
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Le système montagnard
En fait, comprendre la logique de l’agriculteur montagnard, sa stratégie
et ses perceptions de la situation actuelle et future n’est pas facile. Cette
situation ne peut être comprise sans une analyse approfondie du contexte
social, économique, environnemental, culturel et politique des systèmes de
production. Avec l’avènement du concept de la Recherche Système50 au début
des années 90, on a commencé à se poser des questionnements sur la relation
entre le fonctionnement des systèmes de production agricole et la logique
de l’agriculteur. En d’autres termes, l’approche qui considère l’agriculteur
comme un simple utilisateur final des résultats de recherche produits dans les
domaines expérimentaux et les laboratoires commence à être abandonnée
et l’agriculteur est vu comme un partenaire du chercheur – développeur. Il est
expert des parcelles qu’il cultive et il est le seul qui peut apporter un jugement
sur sa façon de gérer ses parcelles.
La recherche agronomique a souligné durant les deux dernières décennies
les fondements logiques des systèmes de production agricole en termes de
productivité et relation avec la protection de l’environnement. On commence
aujourd’hui à comprendre de mieux en mieux les enjeux et défis de ces
écosystèmes traduit par le regain d’intérêt et la prise de conscience par les
pouvoirs publics à cet égard. Ceci requiert, une planification participative
au niveau local basée sur les résultats des diagnostics indiquant les directions
prometteuses à suivre pour l’élaboration des programmes de développement
avec échéancier, moyens à mettre en œuvre et un système de suivi
évaluation.
2. Grande diversité et spécificités des systèmes de production de
zones de montagne
2.1 Moyen Atlas (Province de Beni Mellal)
Dans une ère où le progrès scientifique et technologique permet d’améliorer
la productivité des cultures et de l’élevage et par conséquent améliorer
les marges bénéficiaires des agriculteurs. Il nous semble opportun, à travers
cette étude, de présenter l’état des systèmes de production agricoles et leurs
perspectives de développement dans les Communes Rurales d’Aghbala, de
Tizinisly et Boutferda / Cercle administratif d’El Ksiba / Province de Beni Mellal
(carte 2). C’est une contribution pour enrichir le débat sur la problématique de
développement durable de la petite agriculture dans des zones enclavées,
où les populations subissent la loi de la nature, et par là accompagner les
Plans Agricoles Régionaux de la région Tadla – Azilal. Ces communes rurales
50 - Recherche système ou recherche systémique intégre dans l’analyse et d’une manière participative toutes les composantes techniques, socio-économiques, environnementales et politiques qui interviennent dans le fonctionnement des systèmes de production agricole. Elle permet de mieux cerner le
fonctionnement de l’exploitation et la stratégie des agriculteurs en vue de cibler l’action et garantir sa
réussite.
85
Le système montagnard
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
connaissent aujourd’hui un développement de l’arboriculture fruitière (pommier,
prunier, cerisier) mais avec une production en quantité et qualité moindre dues
au non maîtrise des techniques culturales et son corollaire insuffisances de
l’encadrement des agriculteurs.
Carte 2: Sites étudiés dans la région de Beni Mellal
En définitive, la problématique de développement local en zone de
montagne est complexe puisqu’elle couple l’amélioration des conditions de vie
et les moyens d’existence des montagnards et la preservation des ressources
naturelles. Dans ce sens, Les hommes et les femmes constituent un patrimoine
socio - culturel à capitaliser et à valoriser pour la réussite des programmes de
Rechercher - Développement.
2.1.1. Aperçu sur la région
2.1.1.1. Données générales
La région concernée coiffe les 3 Communes Rurales d’Aghbala, Boutferda et
Tizinisly. Soit une population totale de l’ordre de 25906 habitants appartenant aux
deux tribus : Ait Abdi et Ait Hmama, dont 2611 agriculteurs pour une superficie
agricole utile de 20703 hectares représentant 10% de la superficie totale, dont la
forêt représente 60% (Tableau 7).
86
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Le système montagnard
Tableau 7. Données générales
CR
Aghbala
Population
11754
Nombre
Superficie
d’agriculteurs
totale
SAU
Bour
Irrigué
Forêt
Parcours
Inutile
1154
47274
9797
9121
676
24000 3486
164
Boutferda 5452
550
54857
4245
5747
498
40000 9886
730
Tizin isly
8700
907
37112
6741
5835
906
17400 11971
1000
Total
25906
2611
139243
20783 20703 2080
81400 25343
1894
Source : CT Aghbala, 2011
Concernant les structures agraires, on constate que 60% des exploitations ont
moins de 5 hectares dont 40% ont moins de 2 hectares avec plusieurs petites
parcelles. Le reste de la superficie est reparti entre 5 à 10 hectares représentant
30% environ et 10% pour les exploitations ayant 20 – 50 hectares (Monographie,
CT Aghbala 2011).
2.1.1.2. Milieu naturel
La zone d’étude est composée d’une série de vallées, de collines, de plateaux
et de montagnes. L’altitude varie entre 1100 et 2400 m. Les 3 pénéplaines de
Moulouya, d’Azaghrfal et d’Istrane sont mises en valeur par les propriétaires et
les nouveaux investisseurs.
a. Climat
La pluviométrie est caractérisée par une moyenne annuelle variant de 350 à
400 mm et peuvant atteindre 921 mm (1995), soit trois fois plus que la moyenne.
Cette forte variabilité affecte l’activité de l’agriculture en montagne. La neige
tombe pratiquement chaque année. Pour les agriculteurs, une année pluvieuse
sans neige est une mauvaise année. Les risques de gel sont très fréquents même
en mai, ce qui représente une contrainte majeure surtout pour les céréales. La
zone est souvent touchée par la grêle, véritable calamité pour les arboriculteurs
à cause des pertes qu’elle fait subir aux fruits de rosacées, pouvant aller jusqu’à
la perte totale de la production. On note des orages qui peuvent être souvent
très violents entrainant la destruction de canaux d’irrigation.
La superficie irriguée ne dépasse pas les 10% de la SAU totale. L’irrigation à
partir des sources d’eau représente 50%, suivi du pompage 30% et 20% à partir
des oueds (Monographie, CT Aghbala 2011). Les doses d’irrigation sont peu
connues par les agriculteurs, par manque de connaissance sur les besoins exacts
en eau des arbres. Actuellement l’eau est disponible à une profondeur variant
entre 20 et 50 m. Mais en cas d’année peu neigeuse et pluvieuse, l’eau se situe
à plus de 100 mètres de profondeur.
87
Le système montagnard
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
b. Sols
Sur les pentes et les collines qui constituent la majorité des terres, les sols dits
oumlil ou biyad (calcaires) sont dominants. Ils sont de couleur blanche. Au fur
et à mesure qu’on descend vers le bas des pentes et des collines, on trouve
des sols dits tirs de couleur brune à noire. Ils sont riche en humus et conviennent
à toutes les cultures : céréales, maïs, arboriculture, cultures fourragères et
maraîchage. Cependant, à proximité des bas fonds, on trouve quelques dépôts
de sols blancs calcaires qui sont apportés par l’eau de ruissellement provenant
des collines avoisinantes.
c. Végétation
Il existe deux types de forêts, celles accessibles aux populations et d’autres
interdites par les services des eaux et forêts. A l’intérieur de la forêt se trouvent
des parcelles Melk où les propriétaires pratiquent généralement la succession
céréales/jachère. Les principales espèces arborées sont le chêne vert (Quercus
ilex), le genévrier oxycèdre (Juniperus oxycedrus) et le genévrier rouge (Juniperus
phoenica). Selon les agriculteurs, de nouvelles espèces végétales ont été
amenées par les animaux en transhumance. Ils prétendent que la dégradation
de la forêt a débuté depuis les années 70. Elle est due au défrichement pour
acquérir de nouvelles terres cultivées, à l’effet des caprins et à l’augmentation
des besoins en bois de chauffe en hiver estimés à 3000dh/an/ménage.
Le contrôle est assuré par des gardes forestiers. Actuellement, des mesures
sévères sont instaurées pour protéger la forêt. Trois sites ont été même encerclés
depuis 1995. Ceci a créé un énorme conflit entre la population et les services
des eaux et forêts. La population proteste contre la délimitation de la forêt. Elle
réclame une nouvelle délimitation qui tient compte des parcelles cultivées des
agriculteurs à l’intérieur de la forêt.
Les parcours collectifs ou Agdals sont en nette diminution. Certains
agriculteurs, les plus grands d’entre eux, amènent leurs troupeaux vers la plaine
de Khénifra dans des champs loués à cet effet. Cette période de transhumance
dure généralement de décembre à avril. Les seuls parcours collectifs locaux
exploités par les populations sont les parcours forestiers. Ces parcours ne sont
pas gérés collectivement. Le nombre d’animaux et les périodes d’accès ne sont
pas réglementés. Ils sont, principalement, utilisés par les caprins. (Sous-Centre de
Développement Forestier d’Aghbala).
Les parcelles en jachère et les espaces de forêt servent de parcours pour les
troupeaux, la végétation rencontrée est assez diverse surtout au niveau de la
strate herbacée caractérisée par la présence de plusieurs espèces de chardons
et de plantes épineuses ainsi que de plantes aromatiques et médicinales
comme le thym et le romarin. Les Agdals sont répartis entre les machiakhas
(fractions) et sont collectivement exploités. La période de mise en défens des
Agdals est décidée par une commission composée de la commune rurale, de
88
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Le système montagnard
l’autorité locale et des représentants de chaque fraction bénéficiant de l’Agdal
en question. Les dates d’exploitation sont réparties comme suit :
❐ du 23 juin au 17 août : Chaque machiakhat pâture dans ses limites.
❐ du 17 août au 22 mars : Le pâturage est libre dans l’ensemble des Agdals.
❐ du 23 mars au 22 juin : Période de mise en défens.
Cette réglementation a été justifiée par le fait qu’au début, lorsque l’herbe est
abondante, tous les éleveurs, même les plus petits, peuvent profiter des ressources
disponibles.
d. Faune
D’après les informations des forestiers qui gèrent les droits de chasse, la faune est
constituée des lièvres, sangliers, lapins, perdreaux, pigeons biset, perdrix, renard,
tourterelles de bois, aigle de Bonellie, buse féroce, milan noir, faucon crécerelle
et faucon pélerin ainsi que d’autres animaux plus rares tels que : gazelle, chat
sauvage et loup sont recensés. Le service des Eaux et les Forêts considère que
c’est un patrimoine à préserver avec rigueur.
2.1.1.3. Organisation sociale et politique
L’organisation sociale se situe à trois niveaux. Le premier consiste en une
organisation sociale traditionnelle autour de la Jmaâ qui occupe une place
importante dans la vie des habitants. Le Fquih (Taleb) fait aussi partie de cette
organisation. Il gère la mosquée et est appuyé par un comité de quatre habitants
renouvelable chaque année et choisi par le douar ainsi que quelques familles
influentes à la tête des fractions.
L’1rizen Tkbilt, ce qui signifie « les hommes de la Jmaâ », constituent une
assemblée au niveau du Douar composée de cinq personnes. Ils sont choisis par
les habitants et s’occupent de régler des conflits et de discuter des problèmes
à l’intérieur du douar. Les hommes choisis sont des personnes responsables et
dignes de confiance, et normalement, les grandes familles de la fraction sont
représentées. Les conflits pour lesquels intervient l’Irizen Tkbilt sont généralement
des dégâts dans les champs de culture causés par les animaux, le non-respect
des tours d’eau et les querelles entre les enfants. Il existe une coopération entre
cette assemblée et les autorités locales (Mokadem et Cheikh) dans le cas de
conflits qui dépassent leurs prérogatives.
Le second niveau de l’organisation sociale est le Mokadem qui assure les
relations entre les habitants et l’administration. L’agrégateur peut devenir une
personne très influente du fait qu’il détient les moyens surtout financiers, c’est le
3ème niveau (cas de l’OCE, agrégateur de la filière pommier à Aghbala, tizinisly et
Naour).
2.1.1.4. Infrastructures et services
Vu les conditions climatiques, surtout en hiver oú la neige dure 2 à 3 mois les
écoliers et les instituteurs recontrent d’énormes difficultés d’accès à l’école; d’oú
le niveau des études bas
89
Le système montagnard
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
L’enclavement de la zone et les faibles moyens humains et matériels des
services d’encadrement font que les agriculteurs profitent peu des conseils
agricoles. Cependant, les principales innovations introduites au niveau de
la zone ont été initiées par le Centre des Travaux Agricoles (CT). Il s’agit par
exemples des rosacées, des variétés de blé tendre, opération labour, opération
engrais. Le CT demeure la seule structure ayant à sa charge l’encadrement des
CR Aghbala, Tizinisly et Boutfarda. La faiblesse des moyens, surtout humain, du
CT ne lui permet pas de faire un encadrement rapproché. Les agriculteurs le
visitent sur place quand ils sont confrontés à des problèmes techniques. Le ratio
d’encadrement est faible. Il est d’un technicien pour 2611 agriculteurs. Donc
on est loin du taux d’encadrement préconisé par les experts de la vulgarisation
agricole qui est de l’ordre d’un conseiller agricole pour 1350 agriculteurs51 à
l’horizon 2015. A souligner, qu’avec l’avénement du plan Maroc Vert et l’arrivée
d’un agrégateur en 2010 dans cette région a pu mobiliser trois techniciens pour
encadrer les agriculteurs agrégés dans le cadre de la filière «pommier».
Quant à l’accès aux soins vétérinaires, il s’avère difficile à cause de
l’éloignement des services vétérinaires qui organisent des campagnes de
vaccination dont l’impact reste limité à l’espèce bovine. Certains éleveurs
s’organisent pour faire appel régulièrement à des vétérinaires privés.
Le programme d’électrification est en cours, il a commencé en 1996. Les
habitations dispersées ne sont pas encore électrifiées à nos jours. Les frais de
raccordement au réseau électrique sont considérés comme non accessible
pour la majorité des ménages. L’électricité a apporté des changements dans
l’emploi du temps des femmes en leur permettant de continuer le tissage après
le coucher du soleil. En effet, avant l’électrification, le tissage pendant la nuit se
faisait à la lueur de la lampe à gaz dont l’usage est onéreux.
Concernant l’éducation des enfants, l’école commence à avoir une place
prépondérante dans l’esprit des parents. On constate qu’il y’a un gain d’intérêt
pour les familles d’envoyer leurs filles et garçons à l’école. L’infrastructure routière
pose d’énormes problèmes, les routes liant Elksiba – Aghbla- Khénifra – Imilchil sont
entièrement dégradées et posent d’énormes problèmes pour les déplacements
des populations.
En dehors des coopératives forestières (des madriers et charbonniers) qui font
vivre quelques familles des activités liées à l’industrie du bois, la vente des produits
forestiers est faite chaque année soit par adjudication soit par les enchères
publiques52. Deux centres artisanaux pour les femmes basés à Aghbala et Tizinisly
servent également comme garderies d’enfants.
Pour s’approvisionner en aliments et autres biens de consommation et pour les
visites médicales (seulement les ménages qui en ont les moyens), les habitants se
51 - Stratégie de la vulgarisation agricole, MAPM /DEFR, mars 2011.
52 - Lotffi L., CT Aghbala / DPA Beni Mellal 2011 (non publié)
90
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Le système montagnard
déplacent généralement à Aghbala. Les douars reçoivent la visite d’une infirmière
tous les trois mois pour assurer le suivi des programmes de contraception. De
temps en temps, une campagne pour la vaccination des enfants est effectuée
dans les douars. La maladie la plus fréquente est la typhoïde.
Les souks d’Aghbala, de Tizinisly et Boutferda sont très fréquentés pour la
vente des produits agricoles mais moins animés en hiver à cause des difficultés
d’accès dues à la neige. Pour les agriculteurs, les souks hebdomadaires, en plus
de leur rôle dans la vente et les achats, sont un lieu d’échange d’informations
sur: les prix, la production animale, les rendements des cultures, les nouvelles
variétés de rosacées, récupérer et rembourser les crédits contractés auprès du
crédit agricole ou les voisins, faire des transactions de vente et achats des terres
avec l’assistance du notaire « adoule » ou tout simplement pour rencontrer les
amis. Le téléphone mobile a contribué largement à un certain désenclavement
de la région. Il a facilité la communication entre les ruraux sur divers aspects
socio-économiques.
Les femmes fréquentent le souk régulièrement surtout pour vendre leurs
propres productions (produits d’artisanat, poulets, œufs, lapins). Les hommes
ne vendent jamais les produits préparés par les femmes. Généralement, le
revenu des activités des femmes est dépensé pour acheter leurs habits et ceux
de leurs enfants.
L’Agence Locale de Crédit Agricole du Maroc est située au village d’Aghbala.
Elle est la seule banque qui joue un rôle important dans le financement des
opérations agricoles. D’après, le directeur de l’agence, le nombre de femmes
ayant un compte bancaire est en nette augmentation. C’est un indicateur qui
montre que la femme s’implique de plus en plus dans la gestion des affaires
des exploitations agricoles. Aujourd’hui, il y a 1600 clients environ de l’Agence,
dont 700 ont des dettes inférieures à 50.000 dh. Pour soutenir et soulager ces
agriculteurs de leurs dettes, le MAPM / Crédit Agricole du Maroc dans le cadre
du Plan Maroc Vert, s’est engagé à les réduire à hauteur de 25% et échelonner
le reste53.
2.1.2. Les Systèmes de production agricole
Les activités de la région sont essentiellement orientées vers l’agriculture,
l’élevage et les services (transports des produits agricoles, petits commerces et
petites restauration…). L’arboriculture fruitière, le maraîchage et l’élevage bovin
(engraissement surtout) connaissent un certain développement. Le lait produit
trouve des difficultés à être écoulé du fait de l’enclavement et l’indisponibilité
de centre de collecte de lait. Comme toutes les zones de montagnes
marocaines, la région est caractérisée par la persistance de la pauvreté,
l’exclusion sociale, la faiblesse de l’infrastructure socio-économique aggravée
par la dégradation des ressources naturelles et son corollaire déforestation. On
53 - Crédit Agricole Aghbala 2011
91
Le système montagnard
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
note un retard remarquable traduisant
un sous-développement où tous les
indicateurs socio-économiques sont en
rouge. Le seul point fort qui demeure à
notre avis source d’espoir est la solidarité
familiale (un travaille pour trois à cinq
personnes et un tagine ou un plat de
couscous initialement prévus pour deux
est partagé par dix personnes).
Beaucoup d’espoir est aujourd’hui
placé par les populations de ces zones
de montagnes dans les actions concrètes
du Plan Maroc Vert. A titre d’exemples, les
stations anti-grêles pour la lutte contre la
grêle qui cause fréquemment d’énormes
dégâts sur les fruits et les frigos destinés
au stockage de la pomme lancés en
2010, dont les études d’installation et
de faisabilité technique en cours de
réalisation, ont été bien accueillies
par les populations. Le constat c’est
que la communauté rurale n’est pas
exigente, elle veut juste une certaine
reconnaissance de ses efforts dans la
préservation des zones de montagnes par
des actions leurs permettant d’améliorer
leurs conditions de vie.
Dans
ce
sens,
la
recherche
agronomique peut jouer un rôle important
dans la réalisation des objectifs du Plan
Maroc Vert. La récente reconnaissance
Photos (Kradi C.) 5, 6 et 7 : Cultures
d’Imilchil-Amellagou par la FAO comme
intercalaires dans les vergers de cerisier et
système
ingénieux
du
patrimoine
pommier (Luzerne, oignon, tomate)
mondiale agricole (SIPAM) est une
consécration extraordinaire des efforts de la recherche – développement qui
peut être généralisée à d’autres sites de montagne et qui doit évidemment avoir
un impact positif sur les ménages montagnards et leurs exploitations agricoles en
termes de retombées socio-économiques et écologiques.
2.1.2.1. Les Systèmes de culture
L’extension des vergers arboricoles « rosacées » a eu lieu surtout sur les terrains
favorables tels qu’Azarghfal relevant de la CR de Tizinisly. Deux conditions
favorables ont mené les agriculteurs à investir dans l’arboriculture : la bonne
92
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Le système montagnard
qualité des sols et la présence de l’eau. A cela s’ajoute le climat favorable au
développement des rosacées, avec un hiver froid et des températures comprises
entre -5°C à 35°C.
Cependant, l’arboriculture n’est pas l’unique culture de la région. Pour les
agriculteurs locaux. Elle est de loin le moyen principal de subsistance. Les céréales
occupent la plaine et les faibles pentes conduites en bour. Les légumineuses
(lentilles et pois chiches) sont cultivées sur de très faibles superficies. En irrigué, les
cultures maraîchères, dont la pomme de terre domine l’assolement. Les autres
cultures (carottes, tomates, haricots, navets...) sont de moindre importance et
sont destinées essentiellement à l’autoconsommation familiale. Le pommier et le
prunier sont les principales espèces destinées à la vente. Quoique l’arboriculture
exige d’importants investissements, elle génère des revenus élévés quand les
conditions climatiques sont favorables. Vu l’importance de l’élevage bovin
et l’introduction de races bovines améliorées, la luzerne prend de plus en
plus d’importance dans les terres irriguées. On rencontre également le maïs
fourrager, mais cette espèce est en diminution actuellement; elle est remplacée
progressivement par la pomme de terre car elle est plus rentable.
a. Les céréales
Les espèces cultivées sont par ordre d’importance : le blé dur, l’orge, le
blé tendre et l’avoine. Pour le blé dur, la variété locale ifer n’oumourgh est la
plus répandue dans la zone. Elle est suivie par la variété appelée localement
Toumlilt. La variété Ifer n’oumourgh est appréciée par les populations par la
bonne qualité de son pain, son bon rendement en paille, son cycle long adapté
aux conditions pédo-climatiques de la région (résistance au froid, au gel et
adaptation aux différents types de sols), et la facilité de sa moisson manuelle.
Elle est très demandée par le consommateur.
Pour l’orge et l’avoine, les agriculteurs utilisent exclusivement les variétés
locales. Le blé tendre n’est pas très utilisé dans la zone pour les raisons suivantes:
sensibilité au froid, au vent et à la grêle, difficulté de la moisson manuelle à
cause de sa taille courte et se conserve moins bien que le blé dur. La variété de
blé tendre Nesma est la plus cultivée suivie de la variété Merchouch, mais elles
ne sont pas adaptées aux conditions locales et aux besoins des agriculteurs
qui exigent des variétés à forte production de paille et de bonne qualité
boulangère.
Les céréales sont cultivées selon une rotation bisannuelle de culture/
jachère. La succession dominante est celle de l’orge/jachère - blé/jachère. Les
agriculteurs ont remarqué que les rendements sont meilleurs si l’on alterne le blé
et l’orge après l’année de jachère.
93
Le système montagnard
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
L’intégration cultures / élevage apparaît dans la conduite technique à
travers la succession céréale/jachère. Cette dernière a pour objectifs d’assurer
l’alimentation du troupeau en avril et juin et valoriser le sol par le fumier.
La préparation du sol a lieu de juin à septembre. Elle est généralement
mécanique, sauf sur les parcelles accidentées ou en pente où elle est effectuée
à l’araire. Faute de moyens, certains agriculteurs font le semis direct. Le travail
mécanique du sol est apprécié pour son coût moins élevé et sa rapidité. La
majorité des agriculteurs a recours à la location. Les tractoristes, en utilisant la
charrue à disque, refusent de travailler en courbes de niveaux pour des raisons
d’économie d’énergie, ce qui favorise l’érosion du sol par le ruissellement. Ce
travail est jugé inadapté aux conditions de ce milieu. En plus, le retournement
du sol avec la charrue à disque ramène le sol profond plus pauvre en surface.
L’intérêt du retournement pour la lutte contre les mauvaises herbes n’est pas
très important pour les agriculteurs du fait que ces dernières leur sont utiles pour
l’alimentation du troupeau.
La date de semis s’étale d’octobre à février. Elle dépend de la pluviométrie
et du gel. L’orge est semée en premier, suivie du blé dur et du blé tendre. Le
semis est manuel. La dose varie en fonction de l’espèce et du type de sol.
Elle varie entre 0,5 et 1,5 qx /ha. De faibles doses de semis sont généralement
utilisées pour réduire les risques de perte en mauvaise année. L’enfouissement
des semences se fait généralement à l’araire.
Les engrais sont faiblement utilisés dans la zone. Les engrais de fond utilisés
sont le 14-28-14 et le 33-15-33. L’amnonitrate (21%) et l’urée (46 %) sont utilisés en
couverture entre mars et avril. Les quantités d’engrais apportées ne dépassent
pas 1 ql/ha. Ceci est dû d’une part au coût des engrais, et d’autre part à la
stratégie anti-risques des agriculteurs pour réduire leurs charges en cas de
mauvaise année. Les parcelles d’avoine sont généralement fertilisées parce
qu’elles sont conduites en monoculture.Le fumier est utilisé par la majorité des
agriculteurs.
Le désherbage est généralement manuel et se déroule d’avril à mai. Selon
les agriculteurs, la plupart des adventices sont utiles pour l’alimentation des
animaux, même s’elles entraînent des réductions de rendement pouvant aller
jusqu’à 30%. Ce constat explique le non recours aux herbicides. Cependant,
la folle avoine est signalée comme étant un adventice redoutable. Quelques
rares agriculteurs traitent chimiquement contre les mauvaises herbes.
Les principaux ennemis des cultures sont les pucerons, les courtilières et
1’helminthosporiose. Cependant quelques agriculteurs utilisent des produits
chimiques pour lutter contre ces ravageurs et maladies. Le charançon
cause également des dégâts lors du stockage. Les malles en bois de cèdre
s’avèrent efficaces pour la conservation des céréales. Elles sont préférées à la
«matmoura», technique de conservation dans le sol, où les risques d’attaque
par les charançons sont plus grands. Toutefois, durant ces dernières années,
94
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Le système montagnard
le bois de cèdre est devenu de plus en plus rare et coûte plus cher. Quelques
rares agriculteurs traitent leurs semences contre le charbon. Cependant,
la méconnaissance des produits efficaces, la non maîtrise des techniques
d’utilisation et la qualité des produits vendus au souk par des commerçants
non spécialisés (problème de réglementation de la profession), font que les
traitements ne donnent pas de résultats satisfaisants.
La récolte est généralement mécanique, sauf sur les terrains en pente ou
accidentés. Elle coûte moins que la récolte manuelle (750 DH/ha). Cette
dernière est plus précoce (début juillet). La récolte mécanique se déroule
entre juillet et août. La récolte de l’orge est plus précoce que celle du blé. Pour
l’avoine, une partie est récoltée au mois de mai avant l’épiaison pour préparer
le foin. L’autre partie est récoltée à la maturité vers le mois de juillet. Le battage
est généralement mécanique. Il a l’avantage d’être plus rapide et pas très cher,
par contre sa paille est de qualité médiocre selon les dires des agriculteurs.
Les rendements obtenus sont très variables selon les conditions climatiques.
Les principales menaces sont la sécheresse de fin de cycle, le gel vers le mois
d’avril et mai et la grêle vers les mois de juin et juillet. Les rendements moyens
en bonne année sont de l’ordre de 10 qx pour le blé dur, 12 qx pour le blé
tendre, 10 qx pour l’orge (Monographie, CT Aghbala 2011). Les rendements
moyens obtenus en 2011 dans la zone de Moulouya ont atteints 25 qx/ha pour
le blé tendre et blé dur. Les productions du blé sont destinées essentiellement à
l’autoconsommation familiale, sauf en cas d’excès une partie est commercialisée
(3,5 Dh/kg les BD en 2011). L’orge est destinée surtout à l’alimentation des
animaux.
b. Les cultures maraîchères
Les cultures maraîchères ont été introduites par le CT vers 1960. La pomme
de terre constitue la principale culture maraîchère dans la zone. Les autres
cultures maraîchères sont utilisées à petite échelle pour répondre surtout aux
besoins des ménages. Les semences de pomme de terre proviennent du souk ;
il n’existe pas de variétés locales. La variété Spounta à tubercules blancs et
d’un très bon calibre est la plus dominante, mais se conserve mal. Le prix des
semences varie en fonction de leur qualité.
La préparation du sol se fait entre mars et avril à l’araire ou à la charrue à
disque. Le semis se fait par ligne, avec l’araire pendant le mois d’avril. La dose
est d’une tonne/ha. Les premières feuilles sortent à la mi-juin. L’épandage de
fumier a lieu juste avant la préparation du sol. Certains agriculteurs achètent
du fumier pour compléter la fertilisation de leurs parcelles. Comme il s’agit
de culture conduite en irrigué, l’apport de fumier n’entraîne aucun risque de
brûlure. L’engrais de couverture utilisé est l’urée 46%. L’apport d’engrais, le
désherbage, le buttage et le binage se font entre mi-juin et mi-juillet.
La pomme de terre est irriguée au mois de septembre pendant le semis, après
la levée, puis une fois tous les dix jours jusqu’à la récolte. Bien que des insectes
entraînent des dégâts sur la culture. Les agriculteurs recourent au traitement
95
Le système montagnard
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
contre les ravageurs. Le rendement moyen de la pomme de terre est de l’ordre
de 10 tonnes/ha et peut être amélioré. La zone se prête à la multiplication des
semences de la pomme de terre.
La recolte de la pomme de terre est destinée principalement à la vente qui
se fait soit sur place soit au souk pour ceux qui ont les moyens de transport. Les
agriculteurs jugent les prix de vente non rémunérateurs (environ 1,5 à 2 DH/kg).
Les autres espèces cultivées sont: oignons, tomates, carottes et cucurbitacées
et sont destinées à l’autoconsommation familiale.
c. L’arboriculture fruitière
La principale espèce arboricole cultivée dans la zone est le pommier, suivie
du prunier. Il existe également du cerisier et poirier. Les critères les plus appréciés
par les agriculteurs en arboriculture sont par ordre d’importance : le rendement,
la date d’entrée en production, la résistance au gel, à la grêle et aux maladies.
L’arboriculture s’est développée depuis une vingtaine d’années à Azarghfal.
Après un début hésitant, la zone connaît depuis quelques années une extension
rapide des vergers. Ce développement s’inscrit surtout sur le compte des
investisseurs étrangers à la zone. Ces investisseurs sont soit des villages et villes
avoisinantes, soit des grandes villes du Maroc (Rabat, Casablanca ...). Les
vergers exploités par les agriculteurs locaux se trouvent en grande majorité le
long des oueds. Ces vergers sont installés sur des terrains en bour achetés, qui
étaient destinés auparavant à la culture des céréales. Certains agriculteurs
locaux ont financé l’installation de leur verger par la vente d’une partie de leurs
terrains aux investisseurs marocains. L’extension rapide de l’arboriculture a été
accompagnée par une hausse importante des prix des terrains qui s’est encore
accélérée ces dernières années.
Pour l’intégralité du périmètre d’Azagharfal, on compte environ 64
exploitations qui pratiquent l’arboriculture sur des superficies variant de 0,25 à
36 ha. Parmi les 64 exploitations, 34 se trouvent le long des oueds, 8 se trouvent
le long des Seguia (venant de sources d’eau) et 22 utilisent uniquement l’eau
des puits. Ces dernières appartiennent pour la grande majorité aux investisseurs.
Localement, on considère toute exploitation avec une superficie supérieure ou
égale à 4 ha, plantée et irriguée comme une grande exploitation.
Le mode de conduite technique poursuivi par les agriculteurs permet de
distinguer entre les exploitations de type familial et celles de type intensif. Les
exploitations de ce dernier type recourent à la mécanisation et à l’utilisation
massive des intrants. L’arboriculture est conduite selon les normes techniques,
certains agriculteurs emploient des techniciens spécialisés. Alors que les
exploitations familiales recourent rarement à l’achat des intrants, faute de
moyens et aussi au manque de connaissances techniques.
Les agriculteurs préfèrent s’approvisionner en plants à Azrou (150 km
d’Aghbala), zone réputée par la qualité de ses produits. Il s’avère que les
porte-greffes utilisés s’adaptent bien à la région. Pendant la plantation, aucun
traitement chimique ou apport d’engrais n’est effectué. Les pieds greffés sont
96
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Le système montagnard
plantés entre janvier et mars, avec un apport de fumier et des irrigations durant
la période d’avril à octobre. Pendant cette période, les arbres sont traités
contre les pucerons, et ce traitement se répète chaque année. A partir de la
deuxième année, les arbres reçoivent un apport d’engrais et de fumier entre
janvier et février.
c1. Binage et Fertilisation du pommier
Les arbres sont fertilisés avec du fumier ou avec des engrais chimiques.
Beaucoup d’agriculteurs pratiquent l’apport de fumier et de l’engrais en
alternance. D’autres épandent l’engrais (azote) uniquement quand ils en ont les
moyens. Les doses ne sont pas maîtrisées, de plus, les analyses de sol ne sont pas
pratiquées. Le fumier est obtenu chez des éleveurs et coûte entre 800 à 1000 Dhs
par charge de camion (4 à 6 tonnes). Il est apporté au moment du binage utilisé
par la quasi-totalité des exploitations en janvier.
c2. Taille et Eclaircissage du pommier
Les techniques de taille sont mal maîtrisées par la plupart des agriculteurs.
Pour la majorité ils ne font qu’une seule taille, au lieu de deux préconisées par
les vulgarisateurs. Pour ceux qui ont les moyens, ils préfèrent recruter d’Azrou ou
de Mèknes des tailleurs spécialisés à 75 Dh à 100 Dh par jour contre 35 à 40 Dhs
par jour pour le tailleur local. La taille se pratique entre janvier et février, à partir
de la seconde année de plantation. L’éclaircissage n’est pratiqué que par les
grandes exploitations. Les petits exploitants ignorent l’intérêt de l’éclaircissage. Ils
déclarent se contenter de la chute naturelle. Dans ce domaine, comme dans les
autres, le contraste entre les exploitations familiales et les exploitations intensives
est frappant. La taille mal maîtrisée et l’absence de l’éclaircissage ont pour
conséquence une production largement inférieure au potentiel de production.
c3. La lutte phytosanitaire du pommier
Les principales maladies rencontrées sont causées par les pucerons verts et
cendrés, par des acariens et par certains lépidoptères. Les grands exploitants
traitent les arbres chaque année, tandis que les exploitations familiales ne
traitent que durant les premières années, avant que les arbres ne commencent
à produire avec des produits souvent moins chers et peu efficaces. Ceux qui
traitent ont un sérieux problème de déficit de connaissance technique.
Le feu bactérien est apparu dans la région en 2010. Cette maladie a créé une
panique dans le milieu des agriculteurs. Ces derniers soupçonnent des voisins
ayants introduits de l’apiculture en provenance des régions infestées en 2009.
L’intervention du CT d’Aghbala / Service de la Protection des plantes de la
DPA de Béni Mellal avec l’appui de l’Office National de la Sécurité et la santé
Alimentaire (ONSSA) a été bénéfique en termes de sensibilisation des producteurs
97
Le système montagnard
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
sur le danger de la maladie et les mesures et techniques préventives à prendre
en compte pour en faire face54.
c4. La récolte
A cause de la vente sur pied qui laisse la décision de la période de récolter au
vendeur, la récolte a souvent lieu très tard. Normalement, les fruits doivent être
récoltés en septembre, mais certains acheteurs récoltent en octobre voire même
début novembre. La récolte tardive épuise les réserves des arbres et provoque
une diminution de la production l’année suivante. Les ouvriers masculins qui
récoltent reçoivent environ 60 à 70 Dh par jour. Ils sont majoritaires, bien que les
femmes soient souvent préférées, car elles ne reçoivent que 60 dirhams par jour
tandis qu’elles entraînent moins de perte de production.
d. Les légumineuses alimentaires
Les légumineuses (lentilles et pois chiche) ont été introduites par le CT, mais
elles restent d’une utilisation très limitée à cause de leur forte exigence en main
d’œuvre et du besoin de la jachère pour l’alimentation des animaux. La fève est
absente car elle ne résiste pas au froid. La mécanisation des travaux, surtout pour
la préparation du sol, est relativement ancienne. La fertilisation et les traitements
phytosanitaires sont encore rarement pratiqués dans la région.
La lentille est semée d’octobre à février. La préparation du sol consiste en une
préparation superficielle à l’araire ou au pulvériseur dissymétrique léger. La lentille
est très sensible aux mauvaises herbes (Coquelicots). Le désherbage est manuel
et se fait entre février et avril. La fertilisation et les traitements phytosanitaires ne
sont pas appliqués. La récolte est manuelle et se déroule entre la mi-juillet - août.
Le ramassage se fait tôt le matin, immédiatement après la récolte pour éviter la
chute des graines. Quant au pois chiche, il est semé en avril. Les semences sont
achetées au souk. Le désherbage se fait manuellement en mai. Les rendements
sont généralement faibles pour ces deux espèces, 3 à 4 qx/ha en moyenne,
destinés principalement à l’autoconsommation.
e. Les cultures fourragères
La luzerne occupe la deuxième place après l’arboriculture. Etant donné que
toutes les exploitations familiales qui font de l’arboriculture combinent cette
activité avec l’élevage, elles cultivent la luzerne dans leurs terrains le long des
oueds. La luzerne, si ses besoins en fertilisants sont bien respectés, peut tenir
jusqu’à six années sur la même parcelle. La superficie totale de la luzerne irriguée
est de l’ordre de 205 hectares, dont 90% existe à Aghbala et Tizinisly. L’extension
de sa superficie est liée au développement de l’élevage bovin dans ces zones.
La luzerne est semée à deux moments différents, soit entre mai et juin, soit
entre septembre et octobre, et ce pour éviter le froid. La préparation du sol et
54- A cette occasion, une fiche technique élaborée par l’INRA en 2009 sur le feu bactérien a été diffusée
aux cadres, techniciens, associations locales et agriculteurs pour aider à mieux cerner la maladie.
98
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Le système montagnard
sa fertilisation se font de la même façon pour les deux dates de semis : labour à
l’araire et apport de fumier. L’irrigation commence trois jours après le semis, mais
elle ne reprend que quand la luzerne a bien germé. La première fauche se fait
entre juillet et août. Après chaque fauche, un apport de fumier et d’azote doit
être fait pour assurer sa pérennité (6 ans). Ensuite, on fauche chaque mois, la
dernière fois en novembre. L’année suivante, la première fauche s’effectue en
mars, et ensuite on fait une fauche par mois. Ainsi, les agriculteurs réalisent six
fauches par an. Pour la luzerne semée en automne, une seule fauche est faite
avant la fin de l’année, entre novembre et décembre. L’année suivante, cette
culture est pratiquée exactement comme pour la variété semée en mai, donc
avec une première fauche en mars et ensuite une fauche par mois. Quant aux
superficies de l’orge fourragère et de l’avoine, elles représentent respectivement
95 et 50 hectares pour les 3 CR (CT Aghbala, 2011).
2.1.2.2. Le système d’élevage
L’élevage extensif a toujours été l’activité principale dans cette zone, suivi de
la céréaliculture. La nature accidentée et la pierrosité, font que les terrains sont
surtout destinés au pâturage. Ainsi, la région dispose des parcours collectifs et
forestiers qui sont aujourd’hui en nette dégradation. Depuis quelques années,
les services des eaux et forêts ont instauré des mesures de mise en défens et de
contrôle dans le but de protéger la forêt. Il semble que la forêt est sérieusement
menacée par l’exploitation actuelle, aggravée par la sécheresse. Ceci a
énormément réduit les ressources fourragères pour les animaux.
Les Agdals, terres de pâturage collectif, dont les droits d’accès sont partagés
par les différentes fractions de la région, étaient la base du système d’élevage
extensif pratiqué par tous les éleveurs de la zone. Actuellement, la gestion des
ces terres est contestée, car une partie importante des ayants-droits (petits
éleveurs) ne sont plus capables d’en profiter. Ils réclament alors le partage
de ces terres. Ceci pourrait réduire encore plus les ressources fourragères
disponibles.
On rencontre actuellement une double situation du stress de l’écosystème
agro-forestier et du stress du système de production agricole, qui n’arrivent plus
à répondre aux besoins accrus de la population. L’effectif du cheptel, surtout
des caprins a fortement baissé pour ces raisons. Le système de production
basé sur l’élevage extensif commence à évoluer vers un système diversifié:
agro-sylvo-pastoral.
Pendant longtemps, des nomades provenant du Sahara au Sud, des
piedmonts et des plaines au Nord et des plateaux avoisinants, passaient dans
la zone. Ces mouvements ont provoqué des brassages de populations et de
races d’origines différentes d’ovins et de caprins, ce qui explique la large
gamme des populations adaptées à la région (Timahdit, D’man).
L’élevage est l’activité de base de la population de la région. Il y a seulement
deux générations que l’élevage constitue la seule source de revenus pour les
99
Le système montagnard
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
nomades. Toutefois, les éleveurs actuels ont hérité d’un grand savoir-faire dans
ce domaine.
Avec la sédentarisation et le recul progressif du nomadisme, les populations
se sont orientées vers l’agriculture principalement la céréaliculture en parallèle
avec l’élevage. Faute de ressources fourragères suffisantes, une partie de
la population pratique à nos jours la transhumance collective en hivers en
direction des plaines de Khenifra et Zaouit Chikh, où elle a recours à la location
pour des périodes allant de 2 à 3 mois (janvier – mars). Le prix de location varie
selon le nombre de têtes (ovin, caprin, bovin) et la superficie louée. Il se situe
entre 10.000,00 et 30.000,00 DH (partagés par les transhumants). Les charges
de location sont partagées par les éleveurs (4 à 5) et ce sont les femmes qui
s’occupent de l’entretien des animaux et de la préparation de la nourriture
pour la famille. Actuellement, toutes les terres sont partagées à l’exception de
la forêt qui est un domaine de l’Etat. L’usage de la forêt est permis à toutes les
fractions sauf pour les surfaces cultivées en forêt qui sont privées. L’élevage
bovin prend de l’ampleur surtout pour l’engraissement.
a. Les ovins
Ils sont les plus importants, tant du point de vue numérique qu’économique.
La principale population élevée est Timahdit qui a supplanté la race locale
«Tisghaline». Les critères de choix de cette population sont: sa bonne production
de laine et de lait, sa bonne adaptation au froid et une bonne faculté à se
nourrir.
Avant, ils avaient une population ovine locale Tisghaline. Mais, après une
campagne de sensibilisation menée par le CT afin d’augmenter la productivité
de leur élevage, il y a eu introduction de la race Timahdit qui est actuellement
la race la plus représentée dans la région. En effet, c’est une race bien adaptée
aux conditions locales et appréciée par les agriculteurs.
La majorité des éleveurs reconstituent leurs troupeaux par des populations
issues de leur propre élevage ou achetées sur le marché le plus proche. Certains
parmi eux achètent des brebis gestantes sur le marché de Khénifra. La majorité
des éleveurs choisissent leurs géniteurs parmi la race Timahdit. Cette dernière
est dominante car préférée.
b. Les caprins
Leur effectif est relativement réduit par rapport à celui des ovins. Les
troupeaux les plus importants sont localisés dans les exploitations limitrophes
de la forêt. Les races élevées sont constituées uniquement par des populations
locales comme les ovins et les caprins constituent une source de revenus très
importante dans la majorité des exploitations. En effet, ils sont vendus pour
subvenir aux besoins alimentaires de la famille et des animaux par l’achat de
céréales, mais également pour financer une partie de la campagne agricole
(la moisson principalement).
100
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Le système montagnard
Vu leur rusticité, leur résistance aux conditions difficiles et leur capacité de
déplacement et d’exploitation des essences forestières, cette espèce constitue
le pilier de l’élevage montagnard. Avec la dégradation des forêts, la forte
pression sur les parcours et le passage du sylvo-pastoral à l’agro-sylvo-pastoral
expliquent la tendance des éleveurs à substituer les caprins par les ovins.
c. Les bovins
Au cours des années 70, les bovins de races locales ont été conduits en
troupeaux collectifs. Un seul berger s’occupe de leur gardiennage presque de
la même façon que pour les troupeaux d’ovins. Actuellement, la diminution
des pâturages collectifs et la mise en défens des forêts et des parcelles
cultivées ont obligé les éleveurs à orienter le mode de conduite des ovins vers
la stabulation durant une grande partie de l’année. La stabulation a poussé
les agriculteurs à chercher une alimentation supplémentaire pour les périodes
de soudure, à savoir le recours aux cultures fourragères en irrigué : luzerne et
maïs, et en bour : folle avoine. La tendance vers la stabulation, la production
de plantes fourragères et l’introduction d’alimentation diversifiée ont orienté les
agriculteurs à diversifier leurs bovins en introduisant des races plus productives.
Avec la disparition des parcours collectifs, la conduite des bovins en troupeaux
n’est plus pratiquée. On distingue :
❐ Les bovins de race locale (Tabaldit) : c’est la race dominante. Sa production
laitière varie de 2 à 4 litres par jour. Le lait est destiné à l’autoconsommation,
tandis que le veau est vendu sur le marché d’Aghbala.
❐ Les bovins de race améliorée (Croisée): leur nombre est très limité. La
production laitière est de 10 litres par jour en deux traites quotidiennes. Le lait
est destiné essentiellement à la vente à 4 Dh/litre.
d. Conduite des animaux
Les troupeaux caprins et ovins sont menés sur les parcours à toutes les
époques où les conditions climatiques le permettent. Pendant l’hiver, les éleveurs
sont contraints de placer le troupeau en stabulation et de l’alimenter sur place.
Ils utilisent alors le foin récolté pendant les saisons chaudes sur les parcelles de
cultures de céréales et fourragères (luzerne). Ces réserves étant trop faibles, ils se
trouvent contraints d’acheter des compléments d’alimentation (pulpe sèche de
betterave, son de blé, orge) et d’aller en forêt récolter des branches de chêne
vert. Ce travail est généralement fait par les femmes, qui sont chargées de
l’alimentation des bovins et des équidés qui ne sont pas conduits sur les parcours
avec le troupeau, et de la volaille.
Un grand changement dans le fonctionnement des systèmes d’élevage est
l’abandon quasi total au niveau du douar de la pratique de la transhumance. Les
éleveurs disent qu’avec la taille actuelle de leurs troupeaux, les déplacements
en transhumance ne sont plus rentables. Une des charges de la transhumance
est celle du gardiennage du troupeau qui nécessite la présence permanente
d’un berger, donc un salaire en nature ou en espèce. A noter que la diminution
101
les éco-systèmes
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fragiles au Maroc
Le système montagnard
des forêts et parcours touche plus l’élevage des caprins que celui des ovins,
car les espèces forestières, chêne vert et genévrier, sont très appréciées par les
caprins.
d1. Alimentation
Le morcellement des terres a amené chaque agriculteur à faire pâturer
ses animaux dans sa jachère, son propre champ ou dans des champs loués.
La location d’un hectare de jachère coûte 200 DH environ. Le même prix est
appliqué également pour un hectare de chaumes. Pendant les périodes de
déficit de pâturages, les animaux sont conduits dans les plaines de Khenifra. Ils y
sont nourris moyennant le paiement d’une somme négociée entre le propriétaire
du champ et son utilisateur. Cette transhumance vers la plaine dure trois mois (de
février à avril). Les grands éleveurs constituent la majorité de ceux qui y vont. Les
petits éleveurs s’associent pour faire face au coût élevé de la transhumance.
Ce déplacement temporaire favorise le développement des herbes dans leurs
jachères.
En hiver (octobre à mars), les animaux reçoivent une ration constituée d’orge,
de paille de blé, de foin (luzerne, folle avoine ou de ray-grass) et de son de blé.
Les grands éleveurs ont recours, en plus de cette ration, à la pulpe sèche de
betterave et aux aliments concentrés. L’hiver constitue une période de soudure
très coûteuse pour l’alimentation des animaux. A titre d’exemple, il faut 15.500
DHS pour nourrir un troupeau composé de 20 brebis et de 10 chèvres. Les jeunes
ovins malnutris souffrent pendant cette période caractérisée par un taux de
mortalité élevé. Le Tableau 8 résume les périodes et activités liées à l’alimentation
des animaux.
Tableau 8. Calendrier des activités liées à l’alimentation des troupeaux
Période
Activités
Période de
soudure d’octobre
à mars
❐ Stabulation durant toute la période de soudure.
❐ Stabulation durant une partie de la période de soudure suivie d’un
pacage dans les parcelles privées et/ou louées et/ou dans les vergers
d’arboriculture fruitière.
❐ Stabulation pendant les périodes les plus difficiles d’hiver et utilisation
des parcours et forêts chaque fois que les conditions climatiques le
permettent.
Le printemps
d’avril à juin
❐ Pacage dans les jachères privées et/ou louées, dans les vergers
d’arboriculture fruitière avec une complémentation le soir pour les
animaux destinés pour l’engraissement.
L’été de juillet à
septembre
❐ Transhumance de la totalité du troupeau vers les parcours collectifs (les
Agdals) pour les grands et moyens éleveurs.
❐ Transhumance d’une partie du troupeau vers les parcours et pacage d’une
partie dans les jachères, dans les vergers d’arboriculture et sur les chaumes
après récolte. Ce mode de conduite est réalisé par un nombre très limité de
grands agriculteurs qui possèdent suffisamment de jachères et de vergers
d’arboriculture.
❐ Pacage dans les chaumes et les forêts avoisinantes au douar durant toute
la période de l’été pour la majorité des petits éleveurs.
Source : Enquête KRADI, 2011
102
les éco-systèmes
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fragiles au Maroc
Le système montagnard
d2. Gardiennage des animaux
Pour le gardiennage, deux cas de figures existent : i) les enfants qui ne
fréquentent pas l’école assurent le gardiennage des animaux de leurs parents
à partir de l’âge de sept ans. C’est le cas de la plupart des enfants qui habitent
loin de l’école et ii) le recours à un berger payé en espèces à raison de
600 DHS / mois pour les adultes et 400 DHS/ mois pour les jeunes. Cette différence
de salaire s’explique par la responsabilité plus élevée des adultes vis à vis de la
conduite des animaux.
C’est l’effectif des animaux qui détermine le nombre des gardiens. En effet,
pour un petit troupeau, un seul gardien suffit. Un gardien adulte peut avoir à sa
charge 200 ovins alors qu’un jeune gardera entre 20 et 30 ovins. Ce sont surtout
les grands éleveurs qui ont recours aux gardiens salariés, les petits éleveurs faisant
appel à la main d’œuvre familiale (femmes, enfants, hommes adultes).
Parmi les bovins, la population locale Tazougaght se distingue par sa capacité
de déplacement dans la montagne. Les autres populations, essentiellement la
race croisée Tafrkkacht, ne fréquentent que les parcours et les parcelles cultivées
facilement accessibles. Ici, le gardiennage des troupeaux est obligatoire dans la
zone à cause des déplacements lointains des animaux par rapport à l’exploitation
pour l’alimentation et l’abreuvement, et aussi à la mise en culture des terres.
Ce sont généralement les femmes qui s’occupent du gardiennage des bovins,
car elle ne demande que des déplacements courts. Cela leur permet de rentrer
à la maison pour s’occuper d’autres tâches. Celui des ovins et caprins incombe
aux hommes.
d3. Conduite de reproduction et sélection génétique
La sélection se fait sur la base du phénotype. L’achat de géniteurs se fait à
l’extérieur, notamment sur le marché de Khénifra. Les éleveurs qui ne possèdent
pas de géniteur mâle en empruntent avec à charge pour eux l’alimentation de
l’animal pendant tout son séjour. Ils gardent le géniteur le temps d’assurer la saillie
de leurs animaux. Cette coopération est fréquente pour les ovins. Par contre, au
niveau des bovins, l’entretien du géniteur de race améliorée est coûteux.
En conclusion, les éleveurs ont donc de véritables pratiques de sélection des
individus à l’intérieur des troupeaux, basée sur l’observation de l’héritabilité des
caractères phénotypiques importants pour l’élevage. Ce n’est que pour cette
raison qu’ils continuent à garder des individus, en majorité femelles.
d4. Les soins
En dehors des vaccinations menées par le service de santé animale, les
agriculteurs ont recours aux vétérinaires privés pour faire face aux divers problèmes
de santé de leurs animaux. Etant donné l’importance de l’élevage dans la zone
et la multitude des populations issues de différentes espèces, différents problèmes
103
Le système montagnard
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
sanitaires des animaux existent dans la région. Pour les ovins, caprins et bovins,
deux types de prophylaxie sont suivies par les agriculteurs:
❐ Une prophylaxie préventive, basée essentiellement sur l’utilisation des
vaccins dans le cadre de campagnes de vaccinations contre contre les
épédimies, organisée par le service de la santé animale (ONSSA).
❐ Une prophylaxie curative basée sur l’utilisation de produits médicaux suite
à des connaissances personnelles, professionnelles et/ou des services
vétérinaires publics et privés. L’utilisation de produits à base de plantes
médicinales pour lutter contre quelques maladies parasitaires existe
également.
2.1.2.3. Destination des productions agricoles
Les animaux élevés doivent répondre à deux objectifs de production : leur
viande doit être de bonne qualité la vache, la brebis ou la chèvre doivent
fournir un lait de bonne qualité pour permettre la survie des naissances dans
les conditions difficiles de l’élevage en hiver et leur engraissement rapide. La
production de base est donc la viande qui est vendue lors des souks et surtout
au mois de juin. Certains éleveurs s’efforcent de faire coïncider la période de
vente des ovins et caprins avec l’Aid Al Adha « fête de sacrifice » pendant
laquelle les prix par tête augmentent. La production de lait, quand elle excède
les besoins des chevreaux, agneaux et veaux, est utilisée pour la consommation
familiale, directe, transformée en beurre, en petit lait ou destinée au marché.
Les chevillards originaires du douar constituent une source d’informations
pour les éleveurs sur les cours du marché ovins - caprins. Et ce, grâce à leur
mobilité dans les différents souks de la région. Les recettes sont destinées au
recrutement de la main d’œuvre pour le labour et la moisson de céréales, ainsi
que l’alimentation des animaux pendant la période de soudure. Souvent, une
partie de l’argent est réinvestie dans le renouvèlement du troupeau.
En ce qui concerne la qualité de la laine, c’est la longueur des poils qui
compte pour la facilité du filage et pour la qualité du produit final. Elle est
vendue au prix de 20 à 25 DH pour une balle de 5 kg. Les peaux avec la tête
sont vendues en majorité à des commerçants qui approvisionnent les tanneurs
de Fès à un prix variant de 50 à 70 dhs l’unité.
2.1.2.4. Activités annexes
Le tissage est l’une activité principale qui permet aux femmes de diversifier
leurs sources de revenus. Pour les femmes appartenant à des familles pauvres,
cette activité est limitée faute de matière première. Parfois, les riches du village
leur donnent un peu de laine gratuitement après la toison (Zakat). Les femmes
tissent également des nattes en doum. Elles ramènent la matière première de
la forêt.
104
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Le système montagnard
En plus de la cherté et des difficultés d’approvisionnement en matière
première, les femmes rencontrent des problèmes pour écouler leur marchandise.
La seule possibilité est de la vendre à Imilchil pendant le festival des fiançailles.
Elles aimeraient diversifier leurs activités artisanales par l’introduction de la
broderie.
Des touristes viennent au niveau de la zone pour visiter certains sites touristiques
(anciens greniers du marabout Sidi Boubker, la forêt, ...). Cependant, le potentiel
touristique n’est pas bien exploité à cause de l’enclavement, le réseau routier
degradé et la manque d’encadrement.
En dépit de la description des sites, la problématique retenue est : Trois
Communes Rurales (CR) ont été étudiées : Aghbala, Tizinisly et Boutferda. Ces
CR relevant du Cercle d’El Ksiba, province de Beni Mellal, reflètent la diversité
écologique et agro-socio-économique, de cette région. Quoique ces CR
présentent des similitudes en termes géographiques, climatiques et culturelles,
elles ont des problématiques différentes, du coup, on a trois sites avec trois
problématiques :
❐ Aghbala : Comment améliorer les rendements des céréales tout en
tenant compte de l’intégration céréales/élevage?
❐ Boutferda : Comment assurer les besoins des animaux tout en
sauvegardant les ressources naturelles disponibles?
❐ Tizinisly : Quel avenir pour l’arboriculture dans la zone en relation avec
l’eau?
2.1.3. Diversité, dynamique et stratégies des agriculteurs
2.1.3.1. Intégration agriculture-élevage : une condition vitale pour la survie des
familles
Les systèmes de culture et d’élevage pratiqués exigent des quantités de
ressources très inégales selon les saisons. Les agriculteurs se heurtent aussi bien
à des périodes de pointes de travail, pour lesquelles la main d’œuvre et les
équipements disponibles sont très demandées, qu’à des périodes de moindre
activité durant lesquelles ces mêmes ressources peuvent être sous-utilisées. Le
recours à la main d’œuvre salariée saisonnière venue d’ailleurs, essentiellement
pendant les moissons manuelles, supposent que l’on soit capable non
seulement de les payer à la fin de chaque journée, mais aussi de les héberger
et de les nourrir. Les relations entre les différentes composantes et activités des
systèmes de production ont été appréciées lors d’un entretien avec un groupe
d’agricuteurs à partir de l’outil «calendrier des dépenses et des recettes». Il en
résulte :
❐ La vente d’animaux au printemps constitue une trésorerie de secours
utilisée aussi bien pour les différents besoins du ménage que pour
différentes dépenses sur l’exploitation, essentiellement celles relatives
105
Le système montagnard
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
à l’entretien du verger du pommier, à l’alimentation et à l’entretien du
bétail.
❐ L’écoulement d’une partie de la production de céréales en hiver est
utilisé comme trésorerie de secours (alimentation et besoins sociaux).
Quant à la vente du pommier et d’une partie de blé en été, les recettes
sont destinées au remboursement de la deuxième traite du crédit
agricole d’une part et à la reconstitution du stock d’alimentation pour
le bétail d’autre part. Une partie est réinvestie pour le renouvellement du
troupeau.
On note une forte intégration de la céréaliculture et de l’élevage. Celle-ci se
traduit par la valorisation des produits agricoles par les animaux qui s’explique
par :
❐ La pratique de la jachère une année sur deux en vue d’assurer une
partie de l’alimentation des animaux. Ces derniers procurent en retour
du fumier bénéfique pour les cultures. Le semis de variétés locales de
blé comme l’ifer n’oumourgh qui allie une bonne qualité boulangère
destinée à l’autoconsommation à une production de paille de qualité
destinée aux animaux. L’orge, quelle soit sous forme de grains ou de
paille, est réservée à la nourriture des animaux dans la majorité des
exploitations. Dans bien des cas, elle n’arrive pas à couvrir leurs besoins,
d’où le recours à des achats, principalement en hiver (période de
soudure la plus difficile à traverser).
❐ La présence d’avoine dans les champs des céréales est un choix de
l’agriculteur. Ce dernier la laisse pousser en vue de constituer des réserves
fourragères pour les animaux.
❐ L’introduction de la luzerne en irriguée en relation directe avec
l’introduction de l’élevage bovin.
Aussi, l’intégration des sous-systèmes de cultures et d’élevage se rapporte
à deux types de relations : le premier type est une relation directe, où des
sous-produits (paille, son de blé) et des produits (cultures fourragères, comme
la luzerne ou le maïs) servent comme base d’alimentation des animaux. L’autre
type de relation se trouve au niveau de la gestion de l’exploitation: le revenu de
l’élevage sert à financer les activités agricoles (moisson, entretien des vergers
du pommier...). En revanche, les recettes issues des cultures servent à financer
la conduite d’élevage (alimentation, soins sanitaires).
Certaines exploitations ont intégré l’arboriculture dans ce type de relations,
ce qui a entraîné des modifications dans le fonctionnement et dans la gestion
financière du système. En observant la provenance des fonds finançant les
différents frais engagés dans les différentes activités, il apparait clairement
que la céréaliculture, l’arboriculture et l’élevage sont étroitement liés. En effet,
le financement d’une dépense dans une activité est toujours fait à partir de
recettes effectuées avec une autre activité.
106
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Le système montagnard
Seule la céréaliculture ne fournit aucun revenu alors qu’elle occasionne
de grosses dépenses. Elle est maintenue à un niveau de frais de financement
dont l’objectif est l’autoconsommation (alimentation familiale et alimentation
du troupeau). C’est une question de culture et même de souveraineté pour
l’exploitant.
L’élevage joue le rôle de capital productif et facilement mobilisable qui
assure une disponibilité d’argent pour les frais d’alimentation du ménage et
pour les frais occasionnels et imprévisibles ainsi que pour le financement des
deux autres activités. Les flux sont fréquents puisqu’il peut y avoir vente de
bétail au mois de juin et réinvestissement dans l’élevage dès le mois de juillet.
Le capital d’élevage constitue une soupape de l’économie de l’exploitation.
Les revenus de l’arboriculture sont aléatoires à cause des dégâts occasionés
par la grêle. Quand les revenus sont satisfaisants, ils permettent un bénéfice qui
sera ou non réinvesti dans l’arboriculture ou dans une autre activité. S’ils sont
juste moyens, ils servent à financer l’alimentation du bétail en hiver. En fait,
le système de production fonctionne grâce aux flux monétaires entre les trois
composantes (céréales, élevage, arboriculture fruitière).
La stratégie des agriculteurs est basée sur l’utilisation rationnelle des dépenses
et des recettes de l’exploitation et le suivi des fluctuations des marchés. Elle leur
permet d’amener leurs produits sur le marché au moment opportun.
Par ailleurs, l’insuffisance de l’épargne traduit l’incapacité des agriculteurs
de retrouver une certaine stabilité. Beaucoup d’entre eux affirment que leurs
situations ne cessent de se dégrader. Pour eux la majorité des éleveurs, mêmes
ceux qui possèdent de grands troupeaux, sont menacés de retrouver la catégorie
des pauvres en cas de catastrophe naturelle (inondations, épidémie).
L’organisation sociale coutumière autour de la Jmaâ s’avère extrêmement
importante dans les domaines de l’utilisation et la gestion de la forêt et des
parcours collectifs. Du coup, le concept de l’autogestion participative des
ressources naturelles s’impose de lui-même en vue de :
❐ Maintenir la cohésion et la solidarité sociale des ruraux ;
❐ Promouvoir l’autonomisation des ruraux en prenant en main la
responsabilité de la durabilité des systèmes de production existants dans
le cadre de plans de développement au niveau du terroir ;
❐ Intervenir pour résoudre les problèmes alimentaires des animaux liés à la
période de soudure.
Dans l’optique d’une vision globale pour l’ensemble des trois sites (Aghbla,
Tizinisly, Boutferda), on note une forte intégration de la céréaliculture et de
l’élevage qui se traduit d’une part par la pratique de la jachère une année
sur deux, l’utilisation des chaumes, la fauche d’herbes en vue de constituer du
foin, l’utilisation de l’orge, du son de blé et de la paille pour subvenir aux besoins
107
Le système montagnard
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
alimentaires des animaux, et d’autre part par l’épandage du fumier produit par
les animaux pour fertiliser les champs.
Cette intégration explique des pratiques agricoles comme le désherbage
tardif observé au niveau des cultures de céréales. Les agriculteurs sont conscients
de la baisse des rendements consécutive à la persistance des mauvaises herbes
dans leurs champs. S’ils continuent à pérenniser cette conduite, c’est par souci
de nourrir leurs animaux. Cette préoccupation est rarement satisfaite.
L’alimentation des animaux en hiver est la plus grande contrainte des
agriculteurs dans tous les sites de la zone d’étude. En effet, la période de
soudure (hiver) qui s’étale sur 3 à 5 mois (chez la majorité des cas) coûte cher
en frais d’alimentation. Elle entraîne de nombreuses pertes par la mortalité des
animaux fragiles (jeunes, animaux faibles). Pour faire face à cette situation, les
petits agriculteurs ont recours à la vente de quelques ovins ou caprins pour
acheter des aliments du bétail.
Quant à la production des céréales, elle est destinée à l’autoconsommation
et les sous-produits (chaume, son...) ne suffisent pas à couvrir les besoins
alimentaires des hommes et des animaux. Le recours à l’achat est quasi
obligatoire pour la majorité des exploitations.
Dans les trois sites, le développement de l’arboriculture est lié à la
disponibilité en eau et aux fonds d’investissement. Si à Azagharfal (Tizinisly) ces
conditions sont réunies, ce n’est pas le cas à Aghbala et à Boutferda. Le dernier
site est cependant le plus confronté à ces problèmes. On note partout une
méconnaissance des techniques de taille, d’éclaircissage, d’irrigation et de
protection phytosanitaire au niveau des exploitations familiales. Les problèmes
de commercialisation (absence de moyens de conservation et de transport)
sont communs aux grandes exploitations et à celles familiales. L’argent procuré
par la vente des produits de l’arboriculture est souvent utilisé pour financer la
céréaliculture et / ou l’achat d’animaux.
Dans le domaine du maraîchage, la pomme de terre est la principale culture
dans les trois sites. Elle est destinée à l’autoconsommation et à la vente.
Au niveau des activités socio-économiques, on note la pratique de la
céréaliculture et de l’élevage en association avec les agriculteurs sans terre
dans l’ensemble des sites étudiés. Ce constat est également valable pour
l’utilisation de la main d’œuvre familiale (hommes et femmes) et la vente de
la force de travail. En dehors des activités agricoles, les femmes pratiquent le
petit élevage et l’artisanat. De même, pour l’élevage conduit en association,
qui après avoir dégagé les dépenses, les bénifices sont partagés en deux entre
le propriétaire et l’associé.
L’exploitation des ressources forestières pose des problèmes dans les trois
sites. L’acquisition de bois de chauffage se pose avec acuité principalement
en hiver. Boutferda est le site le plus dépendant de la forêt pour l’alimentation
des animaux. L’érosion des terres en pente est commune à tous les sites. Elle est
due au surpâturage et aux techniques de travail du sol.
108
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Le système montagnard
Les expériences cumulées au fil de l’histoire par les générations sont
imprégnées dans les comportements techniques et culturels des agriculteurs
d’aujourd’hui. Grâce aux investisseurs marocains venus des villes limitrophes
et des grandes villes telles que Casablanca et Rabat, le paysage a beaucoup
changé. On est passé d’une agriculture pluviale de subsistance à une
agriculture moderne basée sur l’arboriculture fruitière (pommier, prunier,
abricotier, cerisier) conduit sous système d’irrigation de goutte à goutte. On peut
dire que l’arrivée des investisseurs a permis de véhiculer le progrès scientifique
et technologique. De nouveaux concepts de gestion des exploitations et de
cultures sont également introduits : choix variétal, techniques d’intensification
raisonnée des cultures, économie de l’eau, gestion assistée par des techniciens,
fertigation.
2.1.3.2. Dynamique des systèmes de production agricoles
Les grands changements dans les systèmes de production agricoles dans
cette région de montagnes sont caractérisés par l’apparition de nouvelles
activités, l’introduction de nouvelles techniques culturales et technologies,
la diversification des activités agricoles et para-agricoles, l’intensification
des cultures. La transformation du système de production se résume alors
à l’élevage transhumant (avant le protectorat) et qui a été remplacé par la
suite par un système mixte agriculture vivrière/élevage qui s’est accompagné
d’une sédentarisation. Enfin, depuis une vingtaine d’années, de nouveaux
types de culture sont venus s’ajouter au système mixte. Il s’agit de la culture des
arbres fruitiers à vocation commerciale et le maraîchage. Le profil historique
(Tableau 9) ci-après illustre cette évolution :
Tableau 9. Profil historique
1931 : Unique activité agricole l’élevage transhumant et nomade.
1959 : La route menant à Aghbala a été goudronnée.
1960 : Les premières cultures pratiquées étaient le blé dur (l’lfr n’mourgh), l’orge
et le seigle.
1970 :
❐ Introduction par le CT de la race bovine améliorée « Tifarkachin » dans
une perspective de remplacer la race locale Tibldiyn.
❐ Première délimitation de l’espace forestier pour la mise en défens.
1977 : Installation du premier verger du pommier chez un agriculteur d’Aghbala.
1980 :
❐ Seigle progressivement remplacé par le blé tendre, qui a été introduit
par le CT dans le cadre de l’opération intensification des céréales.
❐ Introduction de la race ovine D’man qui est aujourd’hui très appréciée par
les éleveurs et qui s’est bien adaptée au climat froid des montagnes.
1986 : Une coopérative a été créée, mais a échoué à cause des défaillances
organisationnelles.
1995 :
❐ Introduction du système goutte à goutte pour pommier à Azagharfal sur 10 ha.
❐ Deuxième délimitation des forêts pour la mise en défens.
109
Le système montagnard
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
2000 :
❐ Extension des rosacées pour atteindre 781 ha en 2010 (pommier et
prunier surtout).
❐ Extension de l’irrigation par pompage 541 hectares en 2010 soit 30% de
la superficie totale irriguée.
❐ Introduction du noyer est relativement récente (environ 10 années). Elle
offre une meilleure qualité qui lui garantit un écoulement plus facile à
des prix plus élevés.
2010 : Agrégation de 104 petits producteurs du pommier sur une superficie de
160 ha.
2011 : Introduction de la tomate en technique de palissade et melon chez certains
agriculteurs comme cultures intercalaires.
Encadré 6 : Profil historique des SPA
Source : Enquête KRADI, 2010
On constate qu’au fil du temps, les territoires des zones de montagne étudiées
connaissent des transformations profondes dues au changement économique,
politique et social et aussi au progrès technologique. En effet, les productions
sont diversifiées, les investissements ont augmenté, les jeunes ruraux sont de
plus en plus conscients des enjeux que présentent la montagne pour l’avenir
du pays « château d’eau du Maroc », la société civile commence à s’organiser
pour devenir porte parole des populations et promouvoir la culture locale et
préserver les ressources naturelles.
Les systèmes de production se sont profondément modifiés au cours des dix
dernières années. Les changements se sont accentués depuis le lancement du
Plan Maroc Vert qui a apporté des nouveautés dans le système du financement
agricole, subvention et encouragement de l’investissement. On note de plus
en plus une certaine intégration au marché des exploitations agricoles, comme
l’atteste l’évolution du nombre des exploitations agricoles arboricoles (pommier
en l’occurrence) qui est en nette augmentation de 360 d’exploitations pour
une superficie productive de l’ordre de 370 ha en 1996 à 390 exploitations pour
une superficie du pommier d’environ 470 en 2011, soit une augmentation de
30% de la superficie. L’impact socio-économique de cette évolution est sans
nul doute positif, illustré par la quantité de pomme produite estimé à 4700
tonnes destinée en totalité au marché générant l’équivalent de 18 millions DH /
an55 et, un nombre de journées de travail estimés à 37.600 par an56. On peut
dire que les prémisses d’une spécialisation de la région en arboriculture fruitière
(pommier et prunier pour séchage) sont déjà amorcées.
Parallèlement à ces changements, on peut noter avec satisfaction
l’augmentation du nombre des associations qui se sont multipliées, d’une dizaine
55- Estimation sur la base d’une production annuelle moyenne de 10 tonnes / ha pour une superficie
de 470 hectares de pommier à 4 DH/Kg.
56 - Estimation sur la base de calcul d’un nombre moyen de journées de travail de 80 j/ha pour 470
ha de pommier irrigué en goutte à goutte (Taille= 7j ; confection cuvettes=10j ; épandage engrais= 3j ;
épandage fumier=7j ; binage= 3j ; traitement phytosanitaire= 20j ; récolte= 30j)
110
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Le système montagnard
au début des années 2000 à une vingtaine 2010, dont 10 associations féminines
regroupées autour des petites activités génératrices de petits revenus. Ces
associations ne jouent pas encore pleinement leurs rôles dans l’encadrement,
la sensibilisation, les prospections des projets de Recherche - Développement
et la négociation avec les institutions en tant qu’interlocuteurs des agriculteurs
pour l’élaboration et la mise en œuvre des programmes de développement au
niveau régional et local.
Globalement, on peut retenir 3 constats déterminants pour l’avenir de
l’agriculture de montagne. Il s’agit de :
❐ Tout d’abord, le manque de la main d’œuvre masculine entraine
une certaine valorisation croissante de la fonction « Kabbales » qui
sont des ouvriers permanents payés mensuellement. Non seulement
ils représentent une source de force de travail avec leurs familles
mais aussi détiennent la technicité et le savoir faire. Ces qualités leurs
donnent plus de légitimité et de pouvoir de négociation. Ils ont réussi
ces dernières années à augmenter le niveau de rémunération de 200
à 300 % pour atteindre le SMAG 2011 sans compter les avantages
en nature (pourcentage de production atteignant des fois 10% de
fruits). Cependant, la main d’œuvre féminine demeure plus ou moins
disponibles recrutée pour des travaux de récoltes des fruits.
❐ L’extension de l’irrigation par pompage des vergers de rosacées
révèlent un nouveau mode d’agriculture intensive orientée vers le
marché et la dimunition du sytème de transhumance au profit de la
sédentarisation ont permis une nouvelle organisation spatiale des
territoires et illustrent l’évolution que les zones de montagnes qui sont
aujourd’hui non seulement des territoires de production mais aussi
des territoires d’activités extra-agricoles liées essentiellement aux flux
financiers engendrés par l’émigration et les travaux dans le secteur du
commerce et du bâtiment.
❐ La structure des revenus des exploitations agricoles est dominée par les
recettes des activités extra-agricoles : 20 à 25 % (salaire des femmes de
ménage en ville, émigration, commerce…).
2.1.3.3. Les nouveaux investisseurs en zone de montagne : un bouleversement
des systèmes de production et des mentalités accéléré par le PMV.
Compte tenu de la dynamique des systèmes de production que connait la
région, il y a lieu de souligner les effets positifs de l’investissement sur l’économie
locale d’une part, et les bénéfices des externalités environnementales et sociales.
Bien entendu, il y a des risques liés aux aléas climatiques et aux fluctuations du
marché.
111
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Le système montagnard
a. Estimation du coût d’installation d’un hectare de pommier pour un
investisseur et impact économique
Pour appréhender le niveau d’investissement et son impact socio-économique
sur l’exploitation agricole et de son environnement, il a été jugé opportun de
donner une idée sur le coût de reconversion (Tableau 10) d’une culture vivrière à
faible rendement (blé et orge) à une culture à haute valeur ajoutée (pommier,
prunier, cerisier).
Tableau 10. Coût estimatif d’installation d’un projet de reconversion céréales
en pommier pour une exploitation d’une superficie de 3,5 hectares
en zone de montagne
Opération
Quantité
Coût unitaire en DH
Coût en DH
Investissement (1ère année)
Creusement de puits
Un puits
Forfait
60.000,00
Equipement de puits
Une motopompe
Forfait
70.000,00
Matériel d’irrigation
Canalisation,
tuyauterie…
Forfait
70.000,00
Plants certifiés
3000 plants
15,00
45.000,00
Aménagement de la
parcelle
(travaux du sol, traçage
…)
1 Technicien + Aide
technicien+ 2 journées x
5 ouvriers
Forfait
10.000,00
Main d’œuvre pour
creusement des trous
(50/60 cm)
3000 trous
3,5 dh/trou
10.500,00
Installation de Canaux
d’irrigation
1 techniciens + 30
journées x 10 ouvriers
Forfait
30.000,00
Plantations + Confection
des impluviums
7 journées x 12 ouvriers
70 DH
5.880,00
Fumier
10 tonnes
Forfait
2000,00
Ouvrier permanent
12 mois
1500,00
18.000,00
Divers (étude du projet
et frais de suivi de la
réalisation)
-
Forfait
50.000,00
Totale 1ère année
-
-
371.380,00
Frais de campagne 2ème année
Fumier
Engrais
Pesticides, Insecticides et
Fongicides
112
15 tonnes
3 quintaux d’azote
Trois traitements
900,00 DH /
300,00 DH
500,00 DH
2700,00
900,00
1.500,00
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Le système montagnard
Irrigation (Mai à Août
avec des irrigations
d’appoint)
6 mois (une irrigation tous
les 3 jours)
Forfait
Main d’œuvre :
- Epandage fumier
(novembre)
- Epandage engrais (mars)
- Taille des plants (marsavril)
- Traitement phytosanitaire
- Entretien des impluviums
2 journées x 10 ouvriers
2 journées x 10 ouvriers
1 ouvrier pour 3000
arbres
10 journées x 2 ouvriers
15 journées x 2 ouvriers
70
70
1,5 DH /arbre
3000
70
70
Divers (Entretien
motopompe et matériel
d’irrigation…)
Ouvrier permanent
Total 2
ème
année
-
12 mois
12.000,00
Forfait
x
1400,00
1400,00
4500,00
1400,00
1400.00
5.000,00
1500,00DH
18.000,00
50.200,00
Frais de campagne 3ème année
Total 3ème année = total
2ème année + 20%
+10.040,00DH /an
65.240,00
Frais de campagne 4ème année et au delà
Frais 4ème année à la 6ème
année : augmentation des
charges de campagne
agricole d’au moins de
30 % (besoins plantations
en augmentation avec
l’âge)
-
+18.072,00 / an
83.312,00
Source : Enquête KRADI, 2011
Il ressort de ce tableau, qu’en dehors des investissements de la première
année, les charges annuelles d’un hectare de pommier sont estimées à 23.803,00
DH à partir de la 5ème année avant l’entrée en production prévue à partir de la
6ème année. En fait, plus l’arbre grandit plus il devient exigeant en entretien et en
alimentation. A noter que les subventions accordées à l’irrigation localisée peut
atteindre 100% (FDA, MAPM 2011) dans le cadre du Plan Maroc Vert.
b. Impact économique de l’investissement : cas d’un hectare de pommier/
prunier
La reconversion en cultures rentables permet en plus de l’amélioration des
revenus des petits exploitants leur intégration dans le marché. Plus de 40 projets
de reconversion spécifique au Pilier II du Plan Maroc ont été lancés pour un
investissement avoisinant les 2 milliards de dirhams. La dynamique impulsée par
les inaugurations de S.M. Le Roi Mohammed VI en 2010 (projets d’installation
des unités frigorifiques est anti-grêles et désenclavement) permet de noter la
vision stratégique qui va au-delà d’un traitement social de la problématique
de la petite agriculture mais plutôt vers la mise à niveau socio-économique
des petites exploitations agricoles, et ce dans une perspective de devenir des
unités productives, économiquement viables et compétitives. Ci–après, on cite
le cas de reconversion des céréales en arboriculture fruitière dans la région
d’Azaghrafal/ CR Tizinisly (Tableau 11).
113
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Le système montagnard
Tableau 11. Comparaison de produit d’un hectarede céréales reconverties en
pommier / prunier en DH
Cultures
Rendeme nt
moyen (1)
Prix unitaire moyen Produit en Variation
en DH (2)
dh (1) x (2)
Avant
reconversion
BD
BT
Orge
10 qx /ha
12 qx/ha
10 qx/ha
300,00
250,00
250,00
3.000,00
3.000,00
2.500,00
Après
reconversion
Pommier
Prunier
10 t/ha
5 t/ha
6,50 DH
4,00 DH
65.000,00
22.000,00
Augmentation
de produit
en DH d’un
hectare de plus
de 20 et 7 fois
respectivement
pour le pommier
et le prunier
par rapport aux
céréales
Source : Enquête KRADI, 2011
b1 Les marges nettes du pommier et prunier selon les pratiques culturales
Les marges brutes pour le pommier et du prunier varient d’une exploitation
à une autre. Elles dépendent des itinéraires techniques pratiqués par les
agriculteurs qui sont liés aux disponibilités des moyens financiers. On distingue,
en conséquence, deux types d’exploitations, celles maîtrisant les itinéraires
techniques et donc plus performantes et celles ayant des difficultés de conduites
techniques et moins performantes. A ce niveau, le rôle de l’encadrement et le
transfert de technologies est primordial pour combler les écarts entre ces deux
types d’exploitations (Tableau 12).
Tableau 12. Comparaison des performances économiques entre deux types
de conduites du pommier conduit en système intensif et extensif
Cultures
Rendement
moyen en
tonnes/ha (1)
Prix moyen
en DH/kg sur
pied (2)
Recettes
en DH (1)
x(2) = (3)
Charges à
l’ha/an en
DH (4)
Marge nette
en DH/ha
(3-4)
Pommier
en intensif*
13
7,00
91.000,00
23.803,00
67.197,00
Pommier
en extensif
6
4,5
27.000,00
10.000,00
17.000,00
* Le potentiel de production à l’hectare est de 15 tonnes/ha.
Source : Enquête KRADI, 2011
Il ressort de ce tableau, une grande différence entre les deux systèmes
extensif et intensif. Ce qui explique l’importance de l’investissement raisonné
dans la conduite technique des cultures. Bien entendu, tout cela dépend des
moyens financiers et matériels disponibles au sein de l’exploitation agricole.
114
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Le système montagnard
Pour un hectare de prunier (variété destinée au séchage), les rendements
dépendent du niveau d’intensification de la culture. Les marges nettes moyennes
ainsi réalisées figurent dans le Tableau 13.
On note globalement que la tendance est vers l’intensification de la
production, surtout avec l’extension des nouvelles exploitations de rosacées et
l’arrivée des investisseurs. A souligner aussi, que le prix de vente du prodtuis
dépend en grande partie de la qualité du produit et de l’offre et de la
demande.
Tableau 13. Comparaison des performances économiques entre deux types
de conduites du prunier conduit en système intensif et extensif
Cultures
Rendement
moyen en
tonnes/ha
(1)
Prix moyen
en
DH/kg
sur pied (2)
Recettes en DH
(1)x(2) = (3)
Charges
à l’ha/an
en DH (4)
Marge nette
en
DH/ha
(3-4)
Prunier en
intensif*
7
6,5
45.500,00
12.000,00
33.500,00
Prunier en
extensif
4
3,5
14.000,00
5.000,00
9.000,00
* Le potentiel de production à l’hectare est de 8 tonnes/ha.
Source : Enquête KRADI, 2011
b2. L’efficience des pratiques culturales
L’efficience des pratiques culturales figurant dans le tableau 14 montre
davantage l’importance de l’adoption des paquets technologiques appropriés
par les agriculteurs sensibilisés sur l’utilité de l’investissement. Cet indice permet
de suivre et évaluer les efforts réalisés par les agriculteurs durant la campagne
agricole. Du point de vue économique, il montre l’aptitude de l’agriculteur à
répondre assez aisément à ses besoins et ceux de sa famille et dégager de
l’épargne éventuellement.
Tableau 14. Appréciation de l’efficience des pratiques techniques sur le
pommier, le prunier et céréale
Cultures
Charges/
Marge
Charges
Marge nette/
Charges/ha/
ha/
nette/ha/
de plus en ha/exploitation
exploitation exploitation
exploitation
DH/ha/ (1)
intensive en
intensive (1)
extensive
extensive
- (2)=(3)
DH (4)
(2)
en DH (5)
Marge
nette/ en
plus DH (4
-5)= (6)
Efficience
en DH (6) /
(3)
Pommier 23.800,00
10.000,00
13.800,00
67.197,00
17.000,00
50.197,00
4,00
Prunier
12.000,00
5.000,00
7.000,00
33.500,00
9.000,00
24.500,00
3,50
Blé*
1500,00
750,00
750,00
3500,00
2500,00
1000,00
1,00
*Le rendement moyen oscille entre 10 et 12 qx/ha
115
Le système montagnard
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Les calculs estimatifs montrent que le pommier et le prunier (pruneaux)
valorisent mieux l’investissement dans le train technique. Globalement, on
retient qu’un dirham investit permet de gagner 4 DH chez le pommier et
3,5 DH chez le prunier (on peut atteindre plus si les conditions du marché sont
favorables). Comparativement au blé qui ne valorise pas l’introduction des
techniques, son indice d’efficience est très faible puisqu’un Dirham investit
permet de gagner un Dirham, du coup l’effort fourni par l’agriculteur n’est pas
récompensé.
Par ailleurs, il faut signaler que la majorité des petits agriculteurs limite à
l’extrême les dépenses en produits phytosanitaires, en fertilisants et en main
d’œuvre. Ce comportement semble être lié à l’insécurité de la production
(orage, grêle, feu bactérien, russet ring...). Par contre, les exploitations de type
intensif mobilisent beaucoup plus de moyens de production en utilisant des
intrants, des installations d’irrigation et une main d’œuvre plus qualifiée.
c. Impact sur la main d’œuvre : vers la contractualisation
Dans 100% des nouvelles exploitations, à dominance rosacées, il y a un
ouvrier permanent résidant dans la ferme. La situation des ouvriers permanents,
souvent jeunes mariés avec des enfants, est presque identique sur le plan
activités et rémunération. Le salaire moyen oscille entre 1.300 et 1.500 DH par
mois avec un logement. Il n’y a pas de contrat écrit qui les lie aux propriétaires,
mais un contrat moral entre les deux parties basé sur la confiance qui se fait
généralement en présence de deux ou trois personnes du douar.
Une des principales caractéristiques des ouvriers de ces régions de
montagnes est leur sérieux dans le travail. D’où la confiance instaurée entre
le propriétaire et l’ouvrier permanent. Ce dernier est aussi un manager de
l’exploitation qui s’ocupe de l’identification des acheteurs, négocier avec eux
le prix et les modalités de ventes, compter le nombre de caisses…Bien entendu,
le téléphone mobile a facilité la tâche puisque toutes les transactions se font
en commun accord avec le propriétaire. A noter qu’ils ont une connaissance
satisfaisante des techniques culturales et prennent des initiatives : cultiver un
peu de maraîchage pour l’autoconsommation par exemple. Beaucoup d’entre
eux, exigent au moins une vache pour bénéficier de 50% des naissances après
déduction des charges. C’est une forme de rémunération de l’effort de la
femme qui a à sa charge l’élevage et apporte appui à son marie dans certains
travaux de ferme.
Les ouvriers permanents rencontrés se sentent satisfaits. Leurs motivations
semblent être liées aux comportements des propriétaires. Ces propriétaires
résidant en ville leur réservent des primes à la fin des récoltes en pourcentage
des bénéfices. D’autres motivations en nature, par exemple un agriculteur de
la région de Tizinisly, autorise l’ouvrier permanent à élever une vache qu’il a
acheté à partir des économies faites de son salaire. Cette vache vit avec le
même troupeau du propriétaire, profite des herbes spontanées de la ferme,
de la luzerne et des aliments concentrés et subit les mêmes soins vétérinaires…
116
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Le système montagnard
Sa femme s’occupe de la traite des vaches, de leur nourriture et des travaux
d’entretien de l’étable. Elle reçoit au minimum un litre et demi de lait par jour
en plus du beurre pour les besoins de sa famille.
On peut estimer les avantages que l’ouvrier perçoit en nature (nourriture de la
vache en gestation, le lait, les légumes) à environ 700 DH/mois. Objectivement, les
craintes du propriétaire sont énormes de voir l’ouvrier permanent démissionner.
C’est pour cela qu’il y a moins de pression et d’autorité exercée sur lui, et des
concessions sont faites en termes d’utilisation de certains produits de fermes
(lait, beurre, légumes…). Certains fermiers recrutent des techniciens spécialisés
en arboriculture pour s’occuper de la gestion des fermes. Ceci dit, pour plus de
visibilité et dans l’intérêt de la société rurale, les rapports entre le propriétaire
et l’ouvrier permanent soient lucides et conçus selon un contrat permettant à
l’ouvrier permanent de bénéficier de la sécurité sociale.
2.1.3.4. Agrégation des producteurs : est – elle la solution ?
Deux principes directeurs du PMV : l’investissement et l’agrégation. Ce
dernier concept est sans nul doute un bon concept si l’environnement
socio-économique, écologique, politique, environnemental et culturel s’y prête.
En fait, l’expérience d’agrégation57 récemment lancée dans les CR de Tizinisly
et Aghbala / Cercle Ksiba, quoiqu’elle soit à ses débuts, les agriculteurs agrégés
semblent être confiants et satisfaits des relations entretenues avec l’agrégateur.
Ils ont trouvé des réponses à leurs attentes et besoins en termes de dépenses liées
au financement de la campagne agricole (entretien des vergers). La réussite de
cette expérience peut offrir des perspectives intéressantes pour les producteurs
qui tirent très peu de bénéfice de leurs efforts puisque se sont les commerçants
et les intermédiaires qui en profitent réellement.
a. Contexte de l’agrégation
La quasi-totalité des exploitations pratiquent la vente sur pied des pommes.
Les prix par kilo varient entre 2 à 4 dirhams le kilo selon la qualité. Quoique les
agriculteurs soient très peu informés des cours du marché, ils sont conscients du
rôle néfaste des intermédiaires pour eux.
La vente sur pied a un avantage pour les exploitations familiales. Elle se fait
en deux parties : la première partie est versée au moment de la réservation de
la récolte sur pied au mois de juillet, elle correspond à 50% du prix estimé de
la récolte à venir. La seconde partie est payée après la récolte, ce qui signifie
qu’en cas de calamités, il n’y a pas de remboursement. La première recette
est souvent utilisée pour financer d’autres activités agricoles, la deuxième est
consacrée à l’achat de l’alimentation du bétail. Vu le manque permanent de
fonds, le préfinancement de la récolte est apprécié. Il existe cependant des
agriculteurs fortement endettés, qui se sont vus obligés de vendre leur récolte à
l’avance sur plusieurs années.
57 - PMV, Agrégation des producteurs du pommier à Tizinisly et Aghbala / Cercle Ksiba, 2011.
117
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Le système montagnard
Les possibilités de prendre en main la commercialisation des fruits par les
producteurs eux même ne sont pas disponibles en l’absence de moyens
financiers et matériels. Les agriculteurs n’ont pas de moyens de transport propres
et ont difficilement accès aux sacs d’emballage.
Quoique la zone recèle de potentialités intéressantes (température, sol,
disponibilité eau) pour la production de rosacées et d’autres produits de terroirs
offrant par là des opportunités pour les projets de l’agriculture solidaire « Pilier II »,
elle présente aussi des contraintes auxquelles il faudrait apporter des solutions et
qu’on présente dans la matrice «SWOT» (Tableau 15) ci-après :
Tableau 15. La matrice SWOP (atouts, potentialités contraintes et menaces)
Forces (S)
Faiblesses (W)
❐ Le milieu naturel est relativement favorable
puisque la région dispose d’une petite vallée
irrigable et fertile d’une part, et de la grande
plaine d’Azararghfal d’autre part où les sols
sont de bonne qualité agricole.
❐ Le développement de l’arboriculture
bénéficie de la disponibilité actuelle
de ressources en eau qui permet
l’aménagement de périmètres d’irrigation.
❐ Un patrimoine forestier important.
❐ Les parcours collectifs constituent une source
stratégique importante pour l’alimentation du
bétail et le bois de chauffe.
❐ Les conditions climatiques du printemps et de
l’été sont favorables à la diversification des
cultures et au développement des parcours.
❐ L’existence de populations locales d’ovin
(race Timahdit), caprins (Tabkhnt) et bovins
(Tajougaght), très adaptées aux conditions
du milieu.
❐ Le savoir local des agriculteurs,
essentiellement dans le domaine de
l’élevage, ainsi que la disponibilité de la main
d’œuvre locale libre en hiver sont des atouts
à valoriser.
❐ Une agriculture biologique à très faible niveau
d’utilisation d’intrants (engrais, produits
phytosanitaires ...).
❐ L’enclavement, les aléas climatiques
(l’abondance de la neige en hiver), les
inondations fréquentes, l’accès réduit à
la forêt, l’exploitation non rationnelle des
parcours collectifs « Agdals ».
❐ Difficultés de maîtrise, par les agriculteurs,
de la période de soudure qui s’étend
d’octobre à mars en vue d’entretenir
un troupeau en mesure de passer un
hivernage difficile et par conséquent
d’assurer une trésorerie régulière pour
subvenir aux besoins urgents des ménages.
❐ Défaillance de l’infrastructure socioéconomique (ressources humaines et
équipements des services de santé, route
et pistes dégradées…)
❐ Faible encadrement des agriculteurs
❐ Faible maîtrise des nouvelles techniques
de taille, de traitement contre les
nouvelles maladies et ravageurs (erreurs
de diagnostics et des erreurs d’emploi
des produits parce qu’ils manquent de
conseils).
❐ Difficultés dans la commercialisation de
la production (Difficultés de transport,
de conservation, qui contraignent le
producteur à vendre sa production sur
pied, ce qui limite beaucoup le bénéfice).
Opportunités (O)
Menaces (T)
❐ PMV : FDA
❐ Agrégation
❐ Marché demandeur de produits de terroirs de
qualité
❐ Prix rémunérateurs
❐ Ecotourisme
❐ Diversité agro-écologique et culturelle.
❐ Environnement socio-politique (Emergence
des ONG, Etat de droit...)
❐ Apparition de nouvelles maladies : le feu
bactérien et Rugosité annulaire (russet ring)
❐ Refus des agriculteurs de faire l’arrachage
en cas de fléau « feu bactérien par
exemple »
❐ La menace de la grêle sur l’arboriculture
❐ Dégradation de la forêt et des sols
❐ Indisponibilités et coût de la main d’œuvre
Source : Enquête KRADI, 2011
118
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Le système montagnard
b . agrégation des producteurs de pommier – OCE : points forts et faiblesses
Fiche de présentation
❐ Agrégateur : OCE
❐ Agrégés : 104
❐ Superficie : 160ha
❐ CR : Tizinisly, Aghbala, Naour
❐ Date de démarrage : 2011
❐ Superficie irrigué goutte à goutte : 75%
❐ Superficie irrigation gravitaire : 25%
❐ Engagements de l’agrégateur :
❍ Mobilisation de trois techniciens pour :
• La réalisation des analyses des sols et l’encadrement ;
• L’estimation des besoins en intrants des agriculteurs agrégés ;
• L’intermédiation entre l’agrégateur et les agrégés et interlocuteur du
Centre de Travaux Agricole;
• La préparation de la commande des intrants et acquisition (engrais et
produits phytosanitaires) d’une valeur avoisinant les 340.000,00DH ;
• La remise les intrants aux agriculteurs selon une décharge dûment
signée par l’agrégé et certifiée (1ère avance) ;
❍ Etablissement d’une assurance anti-grêle au profit des agriculteurs agrégés
d’une valeur de 160.000,00DH ;
❍ 2ème Avance sur la récolte de l’ordre de 0,50DH/kg de pomme au mois
de novembre 2011;
❍ Récolte, transport et stockage de la production des agriculteurs agrégés
(les frais facturés sont de l’ordre de 1,90 DH/kg de pomme);
❍ 3ème Avance sur la récolte de l’ordre d’un dirham le kilo de pomme au
mois de février 2012;
❍ Commercialisation des pommes par l’OCE selon les conditions du marché
(prix rémunérateurs) : déduction des avances et charges et paiement des
producteurs.
Encadré 7 : source enquête KRADI, 2011-2012
Les premières appréciations recueillies auprès du Directeur du CT d’Aghbla
en sa qualité de superviseur du projet d’agrégation, du directeur de l’Agence
Locale du Crédit du Maroc gérant les entrées et les sorties de l’argent et le
financement, du technicien /coordinateur représentant l’agrégateur et auprès
de certains agriculteurs « agrégés », sont positives. En effet, les agriculteurs ont
été soulagés du fardeau des frais de campagnes agricoles, tels que l’acquisition
des fertilisants, des produits phytosanitaires… en plus de l’encadrement des
agriculteurs assurés par trois techniciens mandatés par l’agrégateur. Ils souhaitent
à ce que les producteurs continuent à travailler dans le cadre de cette nouvelle
organisation professionnelle.
119
Le système montagnard
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Les avances reçues au titre de la production 2011 sont de l’ordre de 3,4dh/
kg de pomme (Encadré 7). A la date de 30 janvier 2012, le prix d’un kilogramme
de pomme varie entre 5 et 7 dirhams n’est pas rémunérateur. L’agrégateur
attend à ce que le prix avoisine les 12dh/kg pour vendre la production est
payé les producteurs après déduction des avances et autres charges. Or, les
agriculteurs agrégés sont impatients de recevoir leur argent. D’où, l’utilité de
sensibiliser les agriculteurs sur l’importance de stockage en vue d’une meilleure
commercialisation profitant des conditions du marché quand elles sont
favorables.
Les producteurs de la région relevant du Cercle d’Alksiba attendent avec
impatience l’nnstallation du système anti-grêle ainsi que la construction d’une
unité frigorifique pour le stockage des pommes.
On pense, que c’est un nouveau esprit introduit, qui peut avoir des effets
positifs sur la mentalité des agriculteurs, pourvus que l’agrégateur fasse preuve
de solidarité et continue positivement sur cette lancée, parce que l’échec de
ce projet d’agrégation aura des retombées psychologiques négatives sur toute
la communauté qui perdra confiance de ce qui vient de l’Etat. En d’autres
termes, il faut préserver cette image positive créée par le Plan Maroc Vert, qui
jusqu’aujourd’hui constitue un grand espoir pour les populations rurales.
c. Perspectives de développement des systèmes de production et avenir de
l’arboriculture fruitière
Les perspectives d’évolution deviennent une question fondamentale dès lors
que l’on choisit d’investir dans la culture de plantes pérennes, dont la production
et la rentabilité se raisonnent à partir de 10 ans comme c’est le cas pour un
verger d’arbres fruitiers (pommier, prunier, cerisier, poirier).
Les petits arboriculteurs « exploitations familiales » ne pratiquent pas de
traitements phytosanitaires contre les ravageurs et les maladies. Or, c’est
l’ensemble des arboriculteurs qui en subissent les effets car les vergers non traités
contaminent les vergers traités. Du coup, la productivité et la qualité des fruits
sont affectés négativement. D’où le rôle de l’encadrement et la vulgarisation
agricole qui ne sont pas bien implantés dans la région à cause de l’insuffisance
des ressources humaines (vulgarisateurs, techniciens…) au niveau du CT. Le Plan
Maroc Vert à travers la nouvelle stratégie de conseil agricole donne de l’espoir
pour rehausser le niveau des producteurs de cette région.
La commercialisation des produits agricoles est une problématique qui
préoccupe la majorité des agriculteurs. En effet, les commerçants qui servent
d’intermédiaires entre les producteurs et les consommateurs réalisent des
bénéfices importants sur le compte des producteurs. Les producteurs ne
connaissent souvent même pas le prix de vente des pommes au kilo sur le marché
et n’ont pas d’idée non plus sur leur évolution. Ils sont dépourvus d’information
concernant la valeur réelle de ce qu’ils produisent, et en conséquence, ils sont
120
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Le système montagnard
très dépendants des commerçants qui fixent les prix en maximisant leur propre
profit. Là aussi, le concept de l’agrégation introduit par le Plan Maroc Vert est
peut être la solution pour faire profiter les agriculteurs de leurs efforts, et par
conséquent, améliorer leurs revenus, pourvus que les relations entre agrégateurs
et agrégés soient basées sur la transparence et que chacun maîtrise ses droits
et ses obligations.
La gestion des ressources hydriques et la mobilisation de l’eau sont
déterminantes pour l’avenir de l’arboriculture fruitière dans cette région. Une
étude prospective du devenir des ressources en eau, surtout souterraine,
s’avérere nécessaire.
Comme dans tous les agro-systèmes fragiles, la recherche–développement
doit œuvrer à valoriser les produits de terroirs ayant des avantages comparatifs et
valoriser aussi le cadre et le mode de vie et l’ingéniosité des systèmes agricoles
locaux à travers l’écotourisme non destructif des ressources naturelles.
2.1.3.5. Stratégies des agriculteurs selon les types d’exploitations agricoles
Une exploitation agricole typique de la région est composée de plusieurs
couples et leurs enfants. Les hommes fournissent la quasi-totalité de la main
d’œuvre pour les travaux agricoles, certaines tâches sont confiées aux femmes
comme l’alimentation et l’entretien des animaux, la coupe de la luzerne, la
récolte des fruits des rosacées et le sarclage des jardins potagers autour de la
maison ainsi que l’élevage du poulet « Beldi » et lapin. A souligner que l’argent
issus des travaux extra-agricoles est essentiel pour le budget de la famille.
Le chef de l’exploitation diversifie ses activités pour minimiser les risques de
mauvaises récoltes. Il diversifie également les techniques selon la culture et les
milieux au sein de son exploitation (verger arboricole irrigué, parcelle Bour et
jardin potager) et cherche à valoriser les produits. En effet, l’agriculteur a des
priorités et des objectifs et essaie de les satisfaire en tirant profit des produits de
différents milieux cités auparavant.
Généralement, les produits vendus sur pieds sont les fruits du pommier,
prunier et poirier. Les récoltes de céréales ou maraîchage sont destinés à
l’autoconsommation familiale. Le tableau 16 donne une idée sur l’importance
des activités agricoles dans la formation du revenu d’une exploitation type, et
ce selon les conditions climatiques.
121
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Le système montagnard
Tableau 16. Importance des activités agricoles dans le revenu de l’exploitation
agricole
1er rang
2ème rang
Exploitation intensif
marchande
Pommier / prunier
Bovin engraissé
Exploitation extensif
familiale
Pommier
caprin
3ème rang
Activités annexes
Source : enquête KRADI, 2011
Globalement, on retient cinq catégories des exploitations existent dans la
région en rapport avec les ressources naturelles disponibles qui seront présentées
dans le point suivant.
a. Catégorie des ruraux sans terre
Ils sont assez nombreux. Ils ont leur part dans les Agdals, mais ils ne disposent
pas de troupeaux pour profiter du pâturage collectif. Ils recourent généralement
à l’élevage en association et au travail comme ouvriers occasionnels dans les
autres exploitations. Ils constituent environ 25 % de la population. Cette catégorie
a recours à l’agriculture et à l’élevage en association pour survivre. On note
deux formes d’association pour les cultures. Dans le premier cas, le propriétaire
ne fournit que la terre. Son associé finance toutes les opérations (du labour à
la récolte). Dans ce cas, le propriétaire a droit au tiers de la récolte, les deux
tiers revenant à son associé. Dans le deuxième cas, le propriétaire de la terre
fournit la terre et la moitié de la quantité de semences requise, tout le reste étant
fourni par son associé. Dans ce cas, il reçoit la moitié de la récolte. L’élevage
en association s’offre à l’agriculteur sans terre selon un contrat établi entre le
propriétaire des animaux et son associé : assurer la garde et l’entretien des
animaux. En échange, il a droit au quart des produits nés au cours de l’année où
il a pris en charge les animaux. En cas de non reproduction des animaux gardés,
l’agriculteur sans terre ne reçoit rien, ce qui démontre la précarité de ses sources
de revenus. Aussi vend-il souvent sa force de travail comme ouvrier agricole dès
que son calendrier le permet, car il arrive souvent qu’il ne puisse se libérer, surtout
s’il manque de main d’œuvre familiale importante (Figure 8).
122
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Le système montagnard
MOF
Disponible
Elevage ovin
et caprin
MFV
Indirect
Stratégie:
- Développement de l’élevage
caprin/ovin en association
- Céréales en association
Vente de force
de travail
Objectifs :
- Satisfaire les besoins de la famille
et un petit troupeau
Achat de quelques
têtes d’ovin et/ou caprin
en cas disponibilité
de moyens
Recours au crédit
auprès du propriétaire
Alimentation famille
Alimentation bétail
Remboursement
de la dette
1/3 ou 1/4 des récoltes et de l’elevage
Difficulté d'accès
à la scolarisation,
santé, logement
Epargne très faible
Souhaits :
• Achat de lopin de terre
• Construction d’habitation
Catégorie en situation
instable et vulnérable
Atouts :
• Savoir faire local
• Disponibilité
Figure 8 : Schéma de la stratégie des ruraux sans terre
La gestion en association concerne environ 1/3 des exploitations mixtes de
céréaliculture et d’élevage et environ la moitié des arboriculteurs. Les contrats
sont pour une année et le propriétaire fournit les semences et terres tandis que
le locataire en association est responsable du reste des activités. La récolte
est partagée en un tiers pour le propriétaire et deux tiers pour le locataire.
Auparavant, il existait une autre option où le propriétaire ne fournissait que les
terres et ne recevait qu’ un 1/4 de la production.
123
Le système montagnard
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
b. Catégorie des petits agriculteurs
Leurs stratégies sont destinées à satisfaire les ménages en premier lieu et
les animaux en second lieu. L’épargne, quand elle existe, est destinée à faire
face aux périodes de soudure où le poids des charges pèse lourd sur le budget
familial, d’autant plus que les revenus monétaires sont médiocres. Le recours
à l’endettement selon les modalités fixées par le régime de prêts de l’Agence
Locale du Crédit Agricole du Maroc est souvent la seule issue. Ce sont des
exploitations de type «familial» caractérisées par l’absence de fonds permettant
l’investissement, de petites superficies, une main d’œuvre familiale ou locale
ayant une certaine expérience endogène leurs permettant d’entretenir les
cultures et le petit élevage existant en se basant sur les produits de l’exploitation,
tels que le fumier et la paille (Figure 9).
Les agriculteurs de cette catégorie sont nombreux. La céréaliculture est
essentiellement destinée à l’auto-consommation familiale. L’élevage constitue
leur source principale de revenus. Ils possèdent des champs dispersés dont la
superficie totale est inférieure à 5 hectares. Ils possèdent souvent un troupeau
de petits ruminants (ovins ou caprins) excédant rarement 20 têtes. Ce troupeau
peut être augmenté en effectif par la pratique de l’élevage en association aux
conditions susmentionnées. Ils utilisent largement la main d’œuvre familiale. Leur
production céréalière satisfait rarement leurs besoins. C’est pour ce là qu’ils
vendent leurs animaux soit pour acheter le complément de nourriture pour la
consommation familiale, soit pour assurer la survie de leurs animaux en hiver, soit
pour financer une partie des opérations culturales (labour, moisson, ...). La vente
des animaux se fait donc pour satisfaire des besoins immédiats et ne peut donc
pas toujours attendre la période la plus propice à des prix rémunérateurs (fêtes
religieuses...). Les petits agriculteurs offrent également leur force de travail comme
ouvriers occasionnels en hiver. Leurs enfants et épouses travaillent également à
l’extérieur de l’exploitation.
124
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
MFV
Direct
dominant
SAU
Melk
MOF
Disponible
Elevage caprin
et ovin
Achat d’animeau
quand l’épargne
existe
Le système montagnard
Stratégie:
- Développement de l'élevage
- Introduction de cultures d'été :
sésame, haricot, fève, oignon...
- Développement de cultures vivrières
Activités annexes
(transport, petit
commerce, vente de
force de travail)
Objectifs :
- Satisfaire les besoins de la famille et vente du surplus
-Tendance vers la spécialisation en élevage
Production plus ou moins stabilisée
Alimentation famille
Financement
d'une partie
de la campagne
agricole
Alimentation bétail
Recettes de la vente des produits
Exploitations qui lutte
pour se maintenir dans
un environnement
socio-économique
inconfortable
Remboursement
de la dette
Difficulté d'accès
à la scolarisation,
santé, logement
Epargne faible et très limitée
Souhaits :
• Accès à l’eau par motopompe
• Agrandissement du troupeau
ovin + caprin
Recours au crédit
agricole et Intermédiaire
Risque :
• Exploitations exposées à l'éclatement
• Morcellement élevé à cause de
l’héritage
Figure 9 : Schéma de stratégie des petites exploitations
c . Catégorie des agriculteurs diversifiant les activités agricoles.
Ils pratiquent l’élevage, la céréaliculture, l’arboriculture et quelques cultures
maraîchères. Ces agriculteurs ont des revenus suffisants leur permettant l’emploi
de la main d’œuvre salariale disponible au niveau du douar. Ces agriculteurs
moyens ont des superficies variant entre 5 et 10 hectares. Ils ont recours à la
mécanisation par la location du matériel. Leur production céréalière est surtout
destinée à l’autoconsommation et couvre dans les bonnes années les besoins
du foyer. Ils font du maraîchage dont les produits sont autoconsommés et
vendus. Ils pratiquent à une faible échelle l’arboriculture familiale qui permet
de financer la céréaliculture. La taille du troupeau dépasse rarement 50 ovins
et/ou caprins.
La production du maraîchage est destinée à l’autoconsommation et ne fait
pas l’objet de dépenses ni d’investissements particuliers. Le coût d’opportunité
125
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Le système montagnard
élevé des terrains irrigables est dû au fait que ces terres-là peuvent être vendues
à des investisseurs pour l’arboriculture à des prix élevés ou être mises en valeur
par les agriculteurs eux-mêmes par l’installation d’un verger. Ainsi l’arboriculture
et le maraîchage sont en concurrence directe pour l’attribution des terres
irrigables, concurrence qui se solde à l’avantage de l’arboriculture (Figure 10).
MOF
à 90%
Achat des bovins
pour engraissement
Stratégie:
- Développement de l'élevage
ovin / caprin
- Développement de l’arboriculture
fruitière
Equipement de
l’exploitation
en matériel agricole
(matériel d’irrigation)
Objectifs :
- Satisfaire les besoins de la famille et de l’élevage
- Réaliser l’épargne pour l’entretien de l’exploitation en
priorité
Remboursement
de crédit
Autoconsommation
familiale
Recours au
crédit
Recettes de la vente des produits
Epargne moyen
Souhaits :
• Accès à l’eau par motopompe
• Elargissement du troupeau
caprin + ovin
• Augmentation de la superficie fourragère (Luzerne)
Investissement
Investissement
MFV
Direct
SAU
Melk
Exploitation en état
d’autosuffisance
Besoins de la
famille satisfaits
Risque :
• Rareté de l’alimentation animale
• Eclatement de la ferme suite
à l’héritage
Figure 10 : Schéma de stratégie des moyennes exploitations
Les exploitations de cette catégorie sont souvent émiettées à cause de
l’héritage. Certains agriculteurs recourent à la location de petites parcelles pour
cultiver du blé et faire un peu d’élevage de petits ruminants. Ils essayent de tirer
le maximum de ressources de leur force de travail et celle de leurs familles. Les
agriculteurs sont méfiants à l’égard du marché. Ils jugent qu’ils ne sont pas bien
soutenus pour faire face aux intermédiaires. Cette situation nécessite un travail
de grande haleine pour restaurer la confiance de ces petits producteurs qui ont
développé des mécanismes d’adaptation à l’environnement socio-économique
tout en minimisant les dépenses. Ils sont loins de l’intensification des cultures et
de l’élevage.
126
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Le système montagnard
d . Catégorie des grands agriculteurs focalisés sur l’arboriculture fruitière
Tout en intégrant l’élevage axé sur les bovins leur permettant de valoriser le
pacage dans les vergers de pommier. Ces exploitations dites «intensives» sont
caractérisées par des fonds d’investissement intéressants (aménagements pour
l’irrigation, utilisation d’une main d’œuvre qualifiée, utilisation des intrants...)
Contrairement aux exploitations de type familial, l’objectif prioritaire est le
passage vers les cultures à haute valeur ajoutée générant des bénifices
élevés.
Les grands agriculteurs qui disposent de superficies pouvant atteindre 50
hectares voire plus, forment une minorité d’exploitants. Ces agriculteurs font
appel à la mécanisation (tracteurs pour le labour, moissonneuses-batteuses...)
et à la main d’oeuvre salariée. Leur production céréalière couvre en général
les besoins de leur foyer. L’excédent est vendu sur le marché. Il n’est pas rare
que certains de ces agriculteurs vendent le reste de leurs céréales de l’année
précédente. Ils possèdent très souvent un troupeau qui peut compter jusqu’à
200 têtes d’ovins ou de caprins. Ces animaux sont gardés par des bergers
salariés ou remis à un associé. Les jeunes ovins (âgés de 6 à 8 mois) sont
engraissés et vendus à l’occasion de l’Aid Al Adha. Les grands agriculteurs
font également de l’arboriculture car ils ont les moyens d’investir dans ce
domaine. L’argent tiré de la vente du pommier et le prunier constitue une
trésorerie pour financer d’autres activités agricoles comme le maraîchage
et réaliser d’autres investissements (bâtiment, achat de terre...). Les produits
maraîchers (surtout la pomme de terre) sont destinés exclusivement à la
vente. Pour amortir leur matériel (tracteurs, moissonneuses-batteuses), les
grands agriculteurs le louent aux autres (prestataires de service). La main
d’ouvre familiale est très peu utilisée par cette catégorie d’exploitants
d’autant plus qu’ils ont les moyens de supporter la scolarisation de leurs enfants
(Figure 11).
127
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
MOS
à 100%
Agrandissement du
troupeau bovin de
race pure
Investissement
MFV
Direct
SAU
Melk
Stratégie:
- Développement de l'élevage bovin
pour l’engraissement
- Développement de l’arboriculture
fruitière (pommier, prunier, cerisier...)
- Diversification des cultures
(Maraichage, luzerne)
• Equipement de
l’exploitation
• Investissement
élargie en dehord de
l’exploitation
Objectifs :
- Développement des recettes et investissement
Production aisement stabilisée
Investissement
Le système montagnard
Forte integration dans le marché
Recettes de la vente des produits
de l’exploitation
Epargne forte
Souhaits :
• Augmentation de la superficie de
l’exploitation
• Modernisation de l’exploitation
agricole et introduction de nouvelles
technologies
Risque :
• Sur-exploitation de la nappe phréatique
Exploitation en état
d’accumulation du capital (plusieurs moto-pompes)
• Rareté de la main d’oeuvre qualifiée
Figure 11 : Schéma de stratégie des grandes exploitations.
L’arboriculture tout d’abord est l’activité dont la production et les revenus
sont les moins sûrs à cause, en particulier, de la grêle que s’elle survient au cours
de l’été, peut détruire une grande part de la production. Dans ce contexte, la
vente sur pied est une façon de diminuer le risque car la moitié du revenu est
reçue “cash” en juillet. Ces grands producteurs disposant de facteurs et moyens
de production suffisants optent pour une utilisation massive des ressources et
des intrants en vue d’une intensification éventuelle. Ces acteurs accèdent
facilement aux circuits d’approvisionnement en intrants, de distribution et de
commercialisation des produits et à l’eau par le pompage.
Ils peuvent programmer et exécuter sans entrave majeure toutes les
productions qu’ils souhaitent. L’handicap qu’ils pourraient avoir est l’indisponibilité
de la main d’œuvre salariée et les aléas du marché régis par l’offre et la
128
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Le système montagnard
demande. Le travail est assuré à 100% par la main d’œuvre salariée journalière
et permanente. Ces exploitations ont la possibilité d’investir en agriculture et en
ville dans l’habitat et aussi dans l’extension de la taille de l’exploitation.
Cette catégorie d’exploitation est en état d’accumulation du capital
par le retour des investissements consentis. La stratégie de ces exploitations
est orientée vers une meilleure intégration dans le marché en valorisant au
maximum les moyens et les facteurs de production. Les activités agricoles
concernent essentiellement des spéculations à haute valeur marchande, telles
que le pommier, prunier de séchage, cerisier. Ces exploitations disposent d’une
marge de progrès considérable pour opter pour des systèmes performants
respectueux de l’environnement, challenge du Plan Maroc Vert. Cette option
nécessite un accompagnement pour sensibiliser et convaincre cette catégorie
d’exploitants de l’importance du développement durable et se préparer aux
exigences de la mondialisation.
2.1.3.6. Rôles des femmes des zones de montagnes (Aghbla, Tizinisly et
Boutferda)
On note un manque accru d’appui aux femmes pour atténuer leurs
vulnérabilités socio-économique, institutionnelle et culturelle, pour rehausser leur
niveau et valoriser leurs efforts. Les programmes d’animation et de sensibilisation
des femmes aux diverses technologies agricoles et autres, susceptibles de
l’aider à s’acquitter convenablement de leurs tâches et en tirer profit, sont en
deçà des aspirations et des attentes des femmes. Le Plan Agricole Régional
doit impérativement les inclure pour en faire un élément capable de participer
activement au développement de la zone et, par conséquent, à l’amélioration
du revenu familial et aussi doter le CT de conseillères en animation féminine. Les
thèmes les plus souvent cités par les femmes figurent dans le tableau 17.
Tableau 17. Actions prioritaires d’appui aux femmes
❐ Planification familiale et maternité sans risques
❐ L’hygiène du milieu et la préservation de l’eau
❐ Nutrition et équilibre entre la population et les ressources naturelles
❐ Education et alphabétisation
❐ Conduite du poulet Beldi et lapin
❐ Conduite de l’élevage : hygiène de la traite et conservation du lait
❐ Conservation de denrées alimentaires
Source : Enquête KRADI, 2011
129
Le système montagnard
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
2.1.4. Perception de l’avenir de l’agriculture de montagnes par les différents
acteurs
Schématiquement, on peut distinguer trois catégories d’acteurs ayant un rôle
déterminant dans l’économie de montagnes de la région étudiée : les ouvriers
permanents, les nouveaux investisseurs et les agriculteurs propriétaires « les
autochtones ». On a tenté d’établir des trajectoires d’évolution des systèmes de
production agricoles en posant deux questions à ces catégories d’acteurs :
❐ Les jeunes sont-ils intéressés par l’agriculture, pour prendre la relève et
préserver le savoir local et connaissances endogènes ?
❐ Quelles voies d’évolution envisagées par chaque catégorie d’acteurs ?
2.1.4.1. Ouvriers permanents
Les ouvriers permanents existent chez toutes les nouvelles exploitations
aménagées par les investisseurs. Ils sont originaires de ces zones de montagne,
du coup ils détiennent souvent un savoir faire local riche en matière de conduite
technique et de gestion de l’exploitation agricole. Pour eux, le métayage est
en cours de disparition parce qu’il n’est pas rémunérateur. En effet, les rares
« Khamas » existants disparaîtront à long terme « 15 à 20 ans ». Sur la base de
ces déclarations, deux scénarii sont identifiés :
❐ Premier scenario : les ouvriers permanents à terme vont accéder à un
autre niveau social en achetant de la terre (petite parcelle) et pratiquer
l’élevage, ce qui va poser des problèmes d’indisponibilité de la main
d’œuvre. Les prémisses de la rareté de la main d’œuvre et de la cherté
commencent à apparaître aujourd’hui.
❐ Deuxième scénario : les ouvriers permanents qui n’arrivent pas à faire
de l’épargne, leurs familles (enfants surtout) ne sont plus intéressés par
le travail avec leurs parents parce qu’il n’est pas viable, et optent pour
l’émigration vers les villes.
La seule solution pour le propriétaire est d’augmenter les salaires de ces
ouvriers pour les motiver et les mettre dans des conditions de vie acceptables.
L’institutionnalisation du travail permanant est donc recommandée, c’est-à-dire
recrutement déclaré auprès de la délégation du travail et garantir par là la
sécurité sociale de l’exploitant.
2.1.4.2. Nouveaux Investisseurs
La majorité de ces investisseurs prévoient de s’installer dans leurs nouvelles
exploitations après la retraite (60 ans). Aujourd’hui, ces propriétaires sont
confrontés aux difficultés de trouver des ouvriers permanents chargés de la
gestion des affaires de l’exploitation agricole. Les scénarii ainsi formulés sont :
130
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Le système montagnard
❐ Premier scénario : vendre l’exploitation, mais le problème persistera
toujours du fait de la problématique de la rareté de la main d’œuvre.
❐ Deuxième scénario : s’installer définitivement sur l’exploitation et
s’occuper de la gestion. A travers ce scénario, on peut prévoir une
meilleure valorisation de l’agriculture de montagne si la technicité et
main d’œuvre sont disponibles.
2.1.4.3. Propriétaires originaires de la région et présents sur place
Cette catégorie joue un rôle important en tant que gardiens de la nature
parce qu’ils sont sur place. Deux scénarii sont envisageables selon les perceptions
d’un groupe d’agriculteurs :
❐ Scénario 1 : les agriculteurs rencontrent de plus en plus de difficultés à
satisfaire les besoins de la famille. Ils vendent leurs terres pour aller s’installer
en villes avoisinantes (Ksiba, Khénifra, Tadla ou Beni Mellal).
❐ Scénario 2 : avec l’appui du PMV combiné à des conditions climatiques
favorables, les productions vont être améliorées et les agriculteurs
resteront sur place. Dans ce cas, le savoir faire local sera préservé et le
paysage continue d’être entretenu.
2.1.5. Perspectives de développement des systèmes de production des zone
de montagnes et implication sur les décisions politiques.
2.1.5.1. Renforcement des rôles des instances locales (Jmaâ, ONG,
Associations) : vers l’autonomisation des ruraux montagnards
Pour suivre, évaluer et éventuellement contrôler la mise en œuvre des projets
et leurs comptabilités avec leurs besoins exprimés lors de la conception de ces
projets, surtout d’agrégation, destinés aux agriculteurs des zones de montagnes.
La plus value doit revenir aux agriculteurs et au développement participatif au
niveau local.
Ces instances doivent-être vues comme des organes représentant les
différentes catégories des agriculteurs et des différentes typologies et diversités
des exploitations agricoles. Elles doivent être aujourd’hui, plus que jamais, bien
outillées pour réaliser leurs missions. On sous entend ici l’utilisation des nouvelles
technologies de l’information. En tout cas, c’est l’avenir du monde rural qui est
mis en jeux, c’est-à-dire on doit œuvrer de manière à ce que l’écart entre niveau
de développement des zones de montagnes et zones riches (plaines) soit réduit
à 50% d’ici 10 ans et zéro d’ici 20 ans au maximum en termes d’infrastructures
de base (route, école, dispensaire...).
Voilà l’objectif qu’on se fixe, car il est impensable que ces agriculteurs
continuent depuis des siècles à entretenir ces zones des montagnes, château
d’eau du Maroc, sans pour autant bénéficier d’aucune contrepartie. Nous
131
Le système montagnard
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
sommes partisans de ceux qui réclament une certaine indemnisation des ces
pauvres agriculteurs pour le bienfait qu’ils apportent à la population marocaine
dans sa globalité. Il est inacceptable de continuer à ce que les zones des plaines
du Maroc tirent profit de l’eau des montagnes qui sous entendent les efforts
des montagnards dans la restauration des bassins versants par la plantation qui
permet de protéger les barrages contre l’envasement sans reconnaissance.
Un débat national doit-être ouvert pour le partage des bénéfices tirés par
les producteurs des zones des périmètres irrigués, arrosées par les sources de
montagnes (Oum Rabii, Oued l’Abid, Oued Sebou…) pour qu’au moins une
partie de la plus value soit réinjectée dans l’économie de montagne. C’est cela
la solidarité et la complémentarité entre les régions, dont la nouvelle politique
de régionalisation avancée est en cours d’être mise en place
En réalité l’organisation des agriculteurs, le renforcement du rôle de la
Jmaâ au sein du douar « comité des sages » rendra plus facile l’action du
gouvernement. Je veux dire ici qu’il ne faut pas fabriquer des associations
ou groupements mais laisser l’initiative aux agriculteurs selon leurs intérêts et
objectifs communs et leurs spontanéités. C’est le principe que les animateurs/
techniciens doivent appliquer pour réussir l’agrégation. En fait, les actions de
développement des zones de montagnes à mener dans le cadre du PMV,
en accord avec les habitants des régions concernées et selon le respect des
conditions de durabilité, comprennent des orientations et des recommandations
qui doivent impliquer tous les intervenants.
Les premières recommandations concernent le développement au niveau
local avec la programmation des projets de recherche-développement à
l’échelle de chaque douar. Le second type de recommandations concerne
directement la recherche agronomique autour d’un Programme National de
Recherche pour le Développement des zones de montagnes. Le troisième
niveau de recommandations concerne la Commune Rurale. Il s’agit des actions
qui ne sont pas du ressort du développement agricole.
2.1.5.2. Concilier le développement agricole et la gestion des ressources
naturelles : Les enjeux du développement durable
La description et l’analyse des systèmes de production doivent donc donner
les éléments de connaissance nécessaires pour comprendre le fonctionnement
des systèmes de production mais aussi pour définir les orientations à suivre dans
l’objectif de favoriser le développement agricole dans des conditions de respect
de l’environnement et de gestion rationnelle des ressources naturelles.
a. La conservation des sols
La conservation des sols est un point de relation directe entre les pratiques
au niveau des systèmes de production et ses répercussions au niveau de la
gestion des ressources naturelles. Les modes de conduite de la céréaliculture
132
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Le système montagnard
en particulier conditionnent l’état des sols cultivés. Cette situation est illustrée
par exemple à Almsid /Aghbala avec des problèmes d’érosion liés aux modes
de labour avec la charrue à disques selon des sillons parallèles à la pente. De
même, la dégradation de la forêt à Boutferda accentue le phénomène de
l’érosion des sols.
La recherche agronomique peut fournir aux différents utilisateurs une gamme
de solutions et les moyens de pratiquer une agriculture écologique productive
sans contribuer à l’érosion des sols ni à une perte de fertilité. Cela peut se faire
par exemple par la recherche de nouvelles séquences de travail avec des outils
plus adaptés et des espèces adaptées au milieu.
b. La gestion de l’eau
La gestion de l’eau affecte le développement de l’arboriculture fruitière et
au système d’irrigation. Elle est aussi liée à la dégradation de la forêt puisque
celle-ci, par perte du couvert végétal, favorise le ruissellement et donc la perte
d’eau qui ne va plus alimenter les nappes phréatiques mais favoriser l’érosion,
accentuer les problèmes d’inondations, et créer l’envasement des barrages
comme celui de Bin Ouidane qui reçoit les eaux du bassin versant d’oued
Labid.
Le rôle de la Recherche Agronomique dans ce domaine est donc
fondamental. Le centre d’aridoculture de Settat en particulier est appelé
diffuser les résultats de ses travaux sur l’irrigation d’appoint, les techniques de
valorisation des eaux de crues et des eaux de ruissellement. Le programme
de reconversion en irrigation localisée encouragé par le département de
l’agriculture dans le cadre du Plan Maroc Vert est une option judicieuse pour
éviter les pertes de l’eau. Bien entendu, l’utilisation de la nappe phréatique doit
être raisonnée en fonction de ses capacités selon des études hydraulogiques
fiables.
c. La gestion de la forêt
La conservation de la forêt est importante non seulement pour la conservation
de la biodiversité mais aussi pour la gestion de deux autres ressources, le
sol et l’eau. La dégradation de la forêt ou la déforestation totale ont pour
conséquence une mise à nu des sols. Ceux-ci, ayant perdu leur couvert végétal
protecteur, sont soumis aux effets directs des précipitations et du vent qui sont
des phénomènes érosifs d’autant plus forts que les pentes sont plus accentuées
en milieu montagnard.
La gestion de la forêt est le point le plus sensible de la situation des systèmes
de production en zone de montagnes. Dans l’objectif de concilier les intérêts des
populations et la conservation des ressources naturelles, il a été recommandé à
ce que les agriculteurs soient des gestionnaires de la forêt parce qu’ils sont bien
133
Le système montagnard
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
placés pour le faire, et ce pour plusieurs raisons. Tout d’abord et très logiquement,
parce qu’ils sont sur place. Ensuite, parce qu’ils ont la connaissance du milieu
et enfin, et c’est peut-être le plus important, parce qu’ils sont les utilisateurs
immédiats des produits de la forêt, les premiers impliqués dans sa gestion et
concernés par ses possibilités d’évolution. Actuellement, ils sont directement
touchés par sa dégradation et atteints par sa diminution puisqu’elle affecte
directement les potentialités de leur élevage qui est leur principale source de
revenus. La recherche peut aussi jouer un rôle à ce niveau en contribuant à
la diversification des systèmes fourragers afin de permettre aux éleveurs de
nourrir leurs troupeaux sans surexploiter les ressources forestières d’une façon qui
compromet leur pérennité.
Les caractéristiques de fragilité des écosystèmes montagnards à cause des
pentes qui exposent les sols à l’érosion, de la rigueur du climat (hiver long et froid,
violence des vents et des orages d’été), de l’enclavement dû aux difficultés de
déplacement dans un milieu au relief accidenté et où la neige empêche les
déplacements pendant les mois d’hiver, et enfin d’étroites relations entre état
des ressources naturelles et potentialités de l’agriculture et de l’élevage sont
communes à toutes les régions montagneuses. Les enjeux qui pèsent sur ces trois
ressources sont donc généralisables au niveau du Moyen et du Haut Atlas. Ils
représentent les problèmes généraux de gestion des ressources naturelles que
sont l’eau, les sols et la biodiversité représentée ici par l’écosystème forestier.
Comme pour les hommes, il y a un besoin urgent de cerner les responsabilités
et rôles des femmes par rapport aux hommes au sein des ménages et de la
communauté. La connaissance de l’utilisation de leurs emplois du temps facilite
la définition des programmes participatifs de renfoncement de capacités des
femmes et d’élaboration des petits projets structurants, faisables et respectueux
de l’environnement, générateurs de revenus avec un échéancier et des critères
d’évaluation des résultats.
2.1.5.3. Implications sur la recherche -développement : axes de
recherche- développement et transfert de technologies
envisageables
Il est bien évident que la problématique de développement durable des
zones de montagnes interpelle tous les acteurs et les opérateurs locaux avec
l’appui de la recherche agronomique et des structures de développement à
travailler ensemble en concertation et en synergie. Le Plan Maroc Vert offre
des opportunités dans ce sens, surtout avec le Centre de Ressources pour le
pillier II qui se veut un Groupement d’Intêret Publique (GIP) en appui à la petite
agriculture des zones vulnérables.
134
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Le système montagnard
a. Augmenter les ressources en eau en améliorant le système actuel :
L’eau étant la contrainte principale, constitue une préoccupation majeure
pour ceux qui s’intéressent au développement local. Il est urgent d’agir pour :
❐ Sensibiliser les agriculteurs à l’irrigation localisée (la subvention atteint
100%).
❐ Lancer des études de faisabilité pour une meilleure valorisation des eaux
de ruissellement à partir des ravins (bassins collinaires, amélioration des
dérivations des eaux de crues vers les zones irriguées…).
❐ Promouvoir l’approche participative dans le cadre des projets de
réhabilitation de l’espace montagnard, d’économie d’eau et la
conservation des sols et de la biodiversité.
❐ Renforcer les capacités des acteurs.
b. Améliorer les techniques de production du pommier
Le pommier est une culture qui a été introduite il y a un peu plus d’une
vingtaine d’années dans la vallée. Les superficies plantées sont de petites
espaces parce que les agriculteurs ne veulent pas réduire la production du blé,
du fourrage et du maraîchage (pomme de terre). De plus, pour eux, attendre
5 ans pour qu’un verger de pommier entre en production est beaucoup. Ils ont
des besoins urgents à satisfaire. Leur manque d’expérience entraîne souvent
une utilisation excessive ou inappropriée des intrants, par exemples :
❐ Lutte contre le feu bactérien, qui a attaqué la région en 2010, est
totalement méconnue par les agriculteurs. L’arrachage de l’arbre est
quasi- impossible pour l’agriculteur.
❐ Emploi des produits phytosanitaires, achetés au souk, au moment de la
floraison, ce qui a un impact négatif sur les abeilles et la pollinisation.
❐ Technique de taille du pommier n’est pas maîtrisée affectant la
fructification, la vigueur de l’arbre et la qualité du fruit.
Cependant, il y a des agriculteurs éveillés, dont les connaissances et le savoir
faire peuvent être exploités dans le cadre de réseau d’échange d’expériences
entre les producteurs de pomme au niveau régional. C’est le rôle de la
vulgarisation agricole. L’agrégateur peut également organiser des séances de
contacts pour échanger les expériences entre les producteurs.
c. Améliorer la fertilisation de la culture de pomme de terre
La pomme de terre a été introduite dans les années 1970, et elle s’est imposée
en tant que culture commerciale dans les années 1980. Après des débuts aux
résultats très encourageants (toutes les familles l’ont adoptée), on a noté une
baisse de rendement depuis une dizaine d’années. Cela est peut être à mettre
en relation avec les pratiques de fertilisation. En effet, la pomme de terre est
135
Le système montagnard
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
une plante exigeante en phosphore et en potasse. La présence de bore aussi
semble importante. Or, l’utilisation de la fumure animale seule pourrait entraîner
un déséquilibre entre les éléments minéraux présents dans le sol. C’est un axe de
recherche- développement qui mériterait d’être vérifié par des analyses de sol
et des essais de fertilisation.
Quant aux variétés de pomme de terre utilisées par les agriculteurs, elles
proviennent de périmètres irrigués du Tadla / Province de Beni Mellal. On
peut supposer que ces semences sont adaptées aux conditions de culture de
montagnes. Il serait sûrement intéressant de mettre en place un programme de
test de variétés adaptées aux zones de montagne.
d. Améliorer la fertilité des vaches
Les enquêtes ont montré que l’intérêt économique de l’élevage bovin résidait
davantage dans la vente du veau plutôt que le lait. Dans ces conditions, une
productivité faible (1 veau tous les 2 ans) est jugé peu rentable. On note certaines
difficultés liées à l’insuffisance des fourrages pour les vaches de race améliorée
exigeantes en alimentation, au prolongement de la traite du lait qui rend les
périodes de chaleurs peu visibles. Ceci nécessite d’urgence un appui technique
de proximité pour aider les femmes à améliorer les performances du bovin.
e. La production de miel
Les marocains sont de grands consommateurs de miel, et ils savent
reconnaître la finesse d’un miel de haute qualité. C’est un produit qui se vend
cher et certains sont prêts à faire des kilomètres pour en acheter. L’année 2010
a connu l’apparition du feu bactérien. Les agriculteurs soupçonnent les ruches
d’abeilles achetés de régions contaminées par cette maladie et introduites dans
la région. Un programme de recherche-développement en appui à l’apiculture
est recommandé.
f. L’artisanat comme activité génératrice de revenus
Le visiteur sur place sera impressionné par le sens esthétique des gens de la
région : mariages de couleurs inédits, façades peintes, décorations diverses sur
les murs intérieurs des maisons: décoration des maisons, confection de tapis de
tissus par les femmes. On sent, pourtant qu’il y a là un potentiel de créativité
important. Les femmes savent tisser mais elles ne le pratiquent pas beaucoup à
cause du manque du temps et de l’indisponibilité de la matière première (laine).
Encourager les activités des femmes dans le cadre de programme intégré
agriculture-écotourisme leur permettra d’assurer un minimum d’autonomie
financière.
136
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Le système montagnard
g. Développer des labels « montagne»
La pomme, la viande caprine, le blé dur Infnemourgh, la pomme de terre,
le miel… sont des produits de terroir de qualité. Les conditions de production
répondent aux normes de cultures biologiques et donc susceptibles d’être
labélisées Bio. De même, le petit élevage essentiellement de volailles (poulets,
dindons et canards) et de lapins est la principale activité des femmes. Il constitue
une source de revenus non négligeable. Le poulet beldi local peut-être un
créneau important à encourrager au profit des femmes dans cette région.
2.2. Cas du Rif « province de Chefchaouen »
La province de Chefchaouen fait partie de la région Tanger – Tétouan du
Maroc. Elle couvre une superficie de 435.000 hectares, soit 14,6% de la superficie
de la région. Le cheptel caprin est estimé à plus de 200.000 têtes. Cet effectif
a tendance à fluctuer à cause de l’action conjuguée de la diminution des
superficies de la forêt (monographie DPA Chefchaouen). Les superficies du
cannabis ont diminué de près de 60% (Ministère de l’Intérieur).
L’étude58 réalisée sur le caprin dans la région de Chefchaouen par une
équipe multidisciplinaire en 2005 (Carte 3) avait pour objectif d’explorer d’une
part, les pistes d’élaboration d’une stratégie concertée et participative pour
le développement de l’élevage caprin dans la province et d’établir des
mécanismes pour le renforcement de la collaboration, la concertation et la
synergie entre les différents acteurs au niveau régional, d’autre part pour élaborer
et réaliser ensemble des programmes de recherche pour le développement
répondant aux besoins de la population.
58 - Alami N. et al, Quelle stratégie de recherche –développement pour l’élevage caprin dans
la province de Chefchaouen – Maroc, Série n° 127 ICRA 2005.
137
Le système montagnard
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Carte 3 : Sites chefchaouen
Il est sans aucun doute clair que le développement de la filière caprine au
niveau de la province a toujours suscité l’intérêt aussi bien des administrations
techniques, représentées par les structures de développement, que les
instituts de recherche et d’enseignement et les ONG. Les interventions des
structures étatiques dans le développement de la filière caprine font partie des
missions assignées à ces structures (encadrement, vulgarisation, campagne
de vaccination...), du programme conjoncturel (exemple de la composante
de sauvegarde du cheptel, des programmes de lutte contre les effets de la
sécheresse), des programmes spécifiques de recherche et aussi des actions
dans le cadre de projets de développement rural. Les interventions des ONG
ont été dans leur globalité très localisées prenant la forme de projets intégrés,
généralement à l’échelle de quelques douars ou simplement entreprendre des
expériences pilotes visant uniquement une seule activité, et dont l’effet escompté
est de voir ces actions se reproduire à grande échelle dans l’espace.
D’une manière synthétique, toutes les interventions menées par les différents
acteurs en vue du développement de l’élevage caprin ont été dirigées vers
la production laitière en se limitant à un champ d’action couvrant la zone
péri - urbaine et des zones plus ou moins accessibles59.
59 - Idem que 58
138
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Le système montagnard
2.2.1. Principales contraintes
Les systèmes de production agricole autour du noyau dur « le caprin » se
heurtent à des difficultés liées à la production, à la rentabilité économique et
l’organisation professionnelle. Ceci se traduit par la baisse de la production de
l’élevage caprin dans la région de Chefchaouen. La Diminution progressive des
effectifs du caprin durant les dix dernières années (DPA Chefchaouen, 2005) est
due :
❐ à la diminution des superficies des parcours : Les nouvelles plantations
d’arbres fruitiers, conjuguées à l’action de défrichement des espaces
sylvo-pastoraux pour la mise en culture ont fortement contribué à la
diminution de la superficie des parcours. La forte pression démographique
que connaît la région, accentuée éventuellement par le retour à la
campagne, est un facteur expliquant cette situation ;
❐ à la diminution des quantités de fourrages fournies par les parcours :
Reboisements par des espèces non fourragères (le pin) ainsi que la mise
en défens des espaces pendant plusieurs années ;
❐ au manque de bergers : Certains éleveurs évoquent que le gardiennage
des troupeaux constitue un véritable problème, dû essentiellement
d’une part, à l’augmentation du taux de scolarisation des enfants, chose
positive à faire valoir en optant pour d’autres alternatives, et d’autre
part, du fait que cette activité est considérée comme dégradante et
peu rémunératrice ;
❐ à l’augmentation des besoins vitaux de la population poussent les
éleveurs à vendre une partie de leurs troupeaux pour réduire les charges
liées à leur alimentation : Le troupeau caprin joue un rôle important
dans l’alimentation de la trésorerie des ménages ruraux dont les besoins
deviennent de plus en plus croissants.
2.2.2. Formulation des scénarii de développement
Pour l’identification des axes stratégiques d’intervention à proposer en vue du
développement de l’élevage caprin au niveau de la province de Chefchaouen,
la méthode dite « Scénario de Développement » a été adoptée. Une démarche
structurée dont les principales étapes sont :
❐ Identification des principales forces motrices constituant les facteurs
externes sur lesquels les acteurs locaux n’ont ni contrôle, ni possibilité
d’action et qui influencent négativement ou positivement sur la résolution
de la problématique liée au caprin;
❐ Identification des différents scénarii, résultat de la combinaison des
évolutions les plus probables des forces motrices ;
❐ Formulation des recommandations.
139
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Le système montagnard
2.2.2.1. Identification et description des forces motrices
L’identification des forces motrices a été faite de manière participative
impliquant l’ensemble des acteurs concernés par la problématique. La
combinaison des évolutions les plus probables des forces motrices a permis
d’identifier quatre scénarii (Tableau 18).
Tableau 18. Forces motrices et scénarii probables
Forces
motrices
Cannabis
=
Marché
-
=
Appui de l’Etat & société civile
+
=
+
Scénario 1
Scénario 2
Scénario 3
Scénario 4
= : Situation inchangée
- : Baisse
+ : Augmentation/Amélioration
Source : Etude INRA – ICRA, Chefchaouen 2005
a. La production du cannabis
❐ Stabilisation : Difficulté de mettre en œuvre la stratégie du gouvernement
marocain pour lutter contre cette culture et la faible adoption par
les agriculteurs d’alternatives économiquement intéressantes, sont
deux facteurs influençant le maintien de la tendance actuelle en
termes d’importance de cette culture dans l’utilisation des ressources
disponibles (capital et travail). L’hypothèse du maintien de la situation
actuelle impacte sur l’environnement (défrichement, érosion…) avec le
même rythme et la même intensité. La mise en œuvre de cette stratégie
nécessite du temps et les premiers résultats positifs commencent à
apparaître avec les programmes de reconversion lancés dans le cadre
le du Plan Maroc Vert.
❐ Diminution : La minimisation de l’importance de cette culture dans
les exploitations agricoles de la province peut être favorisée par un
ensemble d’interventions : multiplication des efforts, amélioration des
conditions de vie de la population rurale de la province, adoption et
appropriation par les agriculteurs de nouvelles activités génératrices de
revenus, augmentation des investissements publics et privés, amélioration
des infrastructures de base, encouragement de projets économiques
créateurs d’emploi et enfin poursuite par les autorités locales des
mesures déjà entreprises afin de réduire les zones de culture.
140
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Le système montagnard
b. La situation du Marché
❐ Statu quo du marché : Le pouvoir d’absorption du marché local des
produis caprins pourrait se maintenir à son niveau habituel. Cette situation
résulterait d’une stagnation de la demande des marchés ruraux (souks),
destination principale des produits notamment la viande caprine, dont
la capacité d’absorption reste très limitée en l’absence d’une stratégie
pour élargir la commercialisation vers d’autres zones en dehors de la
province. Une situation qui risque de perdurer eu égard du maintien du
niveau actuel de la consommation des produits caprins insuffisamment
ancrés dans les habitudes alimentaires des ménages au niveau des
grandes agglomérations urbaines, et ce malgré son appréciation.
❐ Diminution : Le marché peut évoluer vers une augmentation du pouvoir
d’absorption des produis caprins. Ce cas de figure peut être favorisé
par une demande accrue, que ce soit au niveau local ou national, par
l’augmentation de la production et l’amélioration de la qualité.
c. L’appui de l’Etat et de la Société civile
❐ Invariable : C’est-à-dire persistance de la situation actuelle, les
interventions agricoles pour le développement du caprin seront
caractérisées par la divergence des objectifs et des approches des
différents acteurs.
❐ En augmentation: La promotion de l’élevage caprin dans la province
de Chefchaouen pourrait prendre une dimension plus importante et
constituer une composante principale des différents projets bénéficiant
d’une allocation spécifique et importante des ressources. Cet appui
pourrait être très efficace avec des actions coordonnées ayant trait
à l’amélioration de la productivité de l’élevage caprin et aussi à
l’organisation des groupes bénéficiaires.
2.2.2.2. Description des scénarii
a. Scénario I : Statu quo des systèmes de production, culture du cannabis,
option privilégiée des agriculteurs
Les forces motrices indiquent les tendances suivantes : persistance importante
de la culture du cannabis dans les exploitations agricoles, stagnation du
marché des produits caprins (niveau faible de la demande) et appui faible des
structures d’encadrement auxquelles le PMV essaye d’apporter des alternatives.
Les impacts probables sur l’élevage caprin sont caractérisés par la stabilisation
des effectifs caprins voire même une tendance à la diminution. La productivité
reste à un niveau faible à moyen. Les volumes de production stagneront voire
diminueront.
141
Le système montagnard
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Malgré le renforcement accru du processus de développement de l’élevage
caprin, les différentes interventions ne concerneront que les zones accessibles,
ne bénéficieront qu’à un nombre limité d’éleveurs. Les seules bénéficiaires
probables de cette situation sont les éleveurs producteurs de lait, avantagés
par la proximité de la zone urbaine. Ils continueront à accaparer l’essentiel des
actions mises en œuvre pour le développement de cet élevage.
Dans ce cas de figure, la filière caprine reste précaire et ne profitera guère de
l’amélioration de la rentabilité de l’élevage caprin situé dans les zones éloignées.
Les intermédiaires continueront à jouer le même rôle en désavantageant les
éleveurs à faible pouvoir de négociation.
Dans l’hypothèse du maintien du même système agricole dans lequel la
culture du cannabis occupe une place importante dans les systèmes de cultures,
il va sans dire que la dégradation de l’environnement (défrichement, érosion…)
va se poursuivre et au même rythme.
b. Scénario II : Reconversion des systèmes de production, réduction des
superficies du cannabis et appui de la société civile
Les tendances d’évolution des forces motrices projettent : la diminution
des superficies du cannabis, la stabilisation du marché et l’augmentation de
l’appui aux structures. De telles éventualités favoriseraient un regain d’intérêt
pour cette activité et contribueraient à la stabilisation voire même à une légère
augmentation des effectifs caprins et de leurs productions.
Ce scénario connaîtra une certaine dynamique de l’organisation des
éleveurs et une valorisation importante des produits caprins (viande et
fromage). Il va sans dire que la diminution de la part de la culture du cannabis
dans les assolements des exploitations aura des incidences favorables dans
le sens d’une réorientation vers le développement de cultures alternatives.
Les producteurs agricoles ou non agricoles ayant adopté les innovations en
matière de production profitent à bon escient de cette situation. Par ailleurs, le
recul de cette activité (cannabis) déclenche à terme un mouvement d’exode
rural vers les grandes villes riveraines à la recherche de meilleures opportunités
d’emploi.
c. Scénario III : Vers l’amélioration de la productivité des cultures et de
l’élevage et de leurs retombées positives.
Les forces motrices évoluent de la manière suivante : les superficies du cannabis
restent constantes, le marché évolue favorablement (les éleveurs tireront profit
des prix offerts) et l’appui en matière de recherche-développement augmente.
Compte tenu de la multiplication des efforts déployés par les structures pour
dynamiser l’essor de l’élevage caprin, conjuguée à une appréciation du
marché en termes de demande, davantage d’éleveurs installés dans des
zones plus ou moins accessibles bénéficieront des services d’encadrement et
d’appui des différents programmes de développement.
142
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Le système montagnard
Ceci favorise une stabilisation et probablement une légère augmentation
des effectifs de caprins, une amélioration nette de la productivité et par
conséquent une augmentation sensible de la production. L’organisation des
éleveurs est effective avec une tendance vers une plus grande valorisation des
produits caprins pour profiter des opportunités de commercialisation engendrées
par l’évolution favorable du marché. Quant à l’impact sur l’environnement,
du fait que la culture de cannabis continue à occuper une place importante
au niveau des exploitations, la dégradation se poursuit au moins au rythme
actuel.
d. Scénario IV : Vers une agriculture économiquement et écologiquement
saine et durable.
C’est le scénario le plus optimiste. Si toutes les actions prévues dans le cadre
des Plans Agricoles Régionaux du Plan Maroc Vert sont exécutées avec succès.
La superficie du cannabis diminuera, le marché évoluera favorablement et les
appuis visant le développement de l’activité augmenteront. Ce scénario peut
être considéré comme une évolution du scénario III avec le recul des superficies
du cannabis.
Les évolutions bénéfiques des trois forces motrices entraînent une légère
augmentation des effectifs du caprin et une amélioration nette de la productivité.
Les éleveurs seront plus organisés avec une orientation vers une valorisation de
plus en plus importante des produits caprins. Par rapport à cette situation, les
producteurs ayant adopté des innovations verront leur position se renforcer.
Dans l’hypothèse d’une diminution des superficies du cannabis, la dégradation
de l’environnement sera moins intense. Le secteur touristique (écotourisme) en
profitera amplement et entamera une phase dynamique de développement
local.
Ainsi, l’organisation de la commercialisation est un aspect capital dans
la mesure où elle permet de diminuer les coûts de transaction, d’éviter les
intermédiations qui amenuisent les marges bénéficiaires des éleveurs. On
parle alors d’un modèle d’agregation réussi.
2.2.3. Mesures pour accompagner les scénarii positifs et éviter les scenarii
négatifs
2.2.3.1. Transfert du progrès technique
La gamme de solutions proposées par la recherche agronomique (Offre
de l’INRA au PMV)60 se base sur un éventail d’options d’amélioration offertes
aux agriculteurs. La validité de ces options doit être vérifiée par l’agriculteur
lui-même dans les conditions spécifiques de son exploitation. On parle d’une
60 - Offre INRA en technologies pour accompagner le Plan Maroc Vert, INRA édition avril 2009.
143
Le système montagnard
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
approche holistique, c’est-à-dire que les nouvelles options d’amélioration,
introduites de manière intégrée, prennent en compte le système de production
dans son ensemble. Par exemple, une nouvelle pratique de prophylaxie peut
également nécessiter de nouvelles options d’hygiène, d’habitat et de conduite
d’animaux61.
2.2.3.2. Amélioration de l’efficacité de la Filière de la viande caprine
Il faut souligner que toute stratégie visant à promouvoir l’élevage caprin
extensif destiné à la production de viande, doit considérer à sa juste valeur
l’utilisation des ressources disponibles (capital et travail) par les éleveurs.
Cette activité fait partie de la stratégie des éleveurs dans un milieu hostile
et à risque élevé. De plus, le rôle dévolu à cette activité a un caractère
multifonctionnel.
En plus de leurs aptitudes d’adaptation et d’exploitation d’un milieu
fragile et complexe et des ressources forestières disponibles, les caprins
permettent d’assurer des liquidités assurant ainsi une trésorerie disponible
pour l’agriculteur - éleveur. La vente des caprins offre des possibilités
d’épargne pour réaliser des investissements tout en garantissant une
source de sécurité financière permettant une prise de risque sur d’autres
activités. Dans cette optique et dans un souci d’assurer l’efficacité et
l’efficience des interventions futures ou en cours. Les options potentielles
à privilégier dans une stratégie de développement de ce type d’élevage
doivent considérer certaines pistes d’amélioration ayant trait aux aspects
d’optimisation de la production, de l’organisation des éleveurs et de la
commercialisation. L’élevage extensif a des aptitudes réelles pour générer
des réponses favorables à des interventions ciblées dans le cadre de
programme d’intervention. De réelles marges de manœuvre pour améliorer
la productivité de ce type d’élevage : existence d’un substantiel rendement
d’échelle croissant.
Concrètement, toute action visant l’amélioration des paramètres
techniques de la productivité du caprin doit s’inscrire dans une démarche
de recherche-action permettant une large diffusion des techniques.
Une telle entreprise ne pourra se concrétiser efficacement qu’à travers
une réorientation des techniques de vulgarisation et des processus
conventionnels de transfert de technologie vers le renforcement d’une
approche d’apprentissage par l’action avec des groupes de femmes et
des jeunes appuyés par des conseillers agricoles qualifiés (T.Doefer, 2005).
2.2.3.3. Amélioration de l’efficacité des intervenants
Dans le but d’améliorer l’efficacité et l’efficience de toutes les interventions,
les différentes contributions des structures en matière d’appui au développement
61 - Alami N. et al, Quelle stratégie de recherche –développement pour l’élevage caprin dans
la province de Chefchaouen – Maroc, Série n° 127 ICRA 2005.
144
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Le système montagnard
de l’élevage caprin doivent s’insérer dans le cadre d’une stratégie d’intervention
commune, claire et ciblée. Cette stratégie doit passer inévitablement par
l’élaboration d’un plan stratégique global définissant les grandes lignes
d’intervention. Sa mise en œuvre nécessite le développement d’un partenariat
concerté au sein duquel toutes les parties prenantes s’engagent à réaliser
un plan opérationnel d’intervention en vue d’un développement durable de
l’élevage caprin dans la province de Chefchaouen. Le Plan Agricole Régional
doit intégrer impérativement ces aspects.
2.3. Cas du Rif occidental « Provine de Taounate »
La province de Taounate est située dans la partie septentrionale du Royaume,
au sein de la région économique Tanger - Tétouan - Al Hoceima. Elle s’étend sur
une superficie de 5.585 km2. La population totale de la province est de 628.840
habitants dont les ruraux sont au nombre de 576.566 habitants, soit 91,6% de
la population totale. Son habitat est dispersé à travers plus de 1600 douars.
Son économie est basée essentiellement sur l’agriculture et l’élevage, sources
principales d’emploi en faisant travailler 81,1% de la population active (RGPH,
1994).
Dans cette région, la problématique de développement se heurte au
problème de la culture du cannabis, dont 3000 hectares ont été rasés et un
vaste programme de plantations de 600.000 oliviers et caroubiers a été lancé62.
Les activités agricoles à elles seules ne peuvent pas assurer aux populations
rurales la satisfaction de leurs besoins qui s’assimilent de plus en plus à ceux
des populations urbaines. D’où la nécessité de diversifier les sources de revenus
dont le salariat et le petit commerce.
2.3.1. Stratégies des agriculteurs
L’étude réalisée par une équipe de chercheurs dans la province de Taounate63
(Carte 4) a montré que les pratiques des agriculteurs se caractérisent par
l’intégration «agriculture / élevage ». L’intégration entre les différents éléments
du système de production se traduit par l’utilisation des résidus des cultures
par les animaux qui fournissent à leur tour du fumier et sont utilisés dans les
opérations de labour, de battage, de transport, etc. L’examen du calendrier
fourrager et agricole permet de rendre compte de cette situation. Il explique
certaines décisions ou pratiques de l’agriculteur dans la conduite technique
des cultures64.
62 - Taounate : la lutte contre la culture du cannabis s’intensifie, l’économiste du 21 juin 2011
63 - Ahlonsou R. et al, l’olivier et les systèmes de production des zones de montagnes de Taounate. ICRA,
Série n° 82, Maroc - 1999.
64 - Idem que 63
145
Le système montagnard
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Carte 4 : Sites études province Taounate
Les superficies des légumineuses alimentaires sont en régression. Cultivées
en alternance avec les céréales, elles représentent 25 à 30% de la superficie de
l’exploitation agricole dans la province de Taounate65. La récolte de la fève est
utilisée pour l’alimentation humaine et pour l’engraissement des animaux. Celles
du pois chiche et de la lentille sont destinées à l’autoconsommation familiale.
Les excédents de récoltes de ces cultures sont vendus à l’état sec pour couvrir
certains besoins de la famille et alimenter la trésorerie de l’exploitation.
L’INRA dans le cadre de la Programmation par Objectif (PPO) a tiré les
sonnettes d’alarme sur ce secteur stratégique et important pour l’économie
rurale dans les systèmes de rotation de culture et l’alimentation des animaux. En
effet, les emblavements ont diminué de 0,75% par an et le rendement de 1,8%
alors qu’on assiste à une croissance démographique de 2,5% par an (Collion
et Kissi 1994). D’où la question posée aujourd’hui sur la stratégie à adopter
pour faire progresser la production des légumineuses alimentaire et améliorer
leur rentabilité. La réponse doit être apportée dans l’évaluation des premiers
résultats des Plans Agricoles Régionaux mis en œuvre.
65 - Kradi C. et al, systèmes de production des légumineuses alimentaires dans la région de Taounate,
INRA- GTZ, avril 1999, p. 33
146
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Le système montagnard
La jachère, bien que rare, est une pratique traditionnelle de gestion de la
fertilité des sols, qui permet aussi à certains agriculteurs d’alimenter leur bétail.
L’introduction de l’orge fourragère dans l’assolement témoigne du souci de
l’agriculteur d’assurer non seulement ses propres besoins de consommation, mais
aussi ceux de son troupeau. Les céréales fournissent l’essentiel de l’alimentation
des animaux grâce à l’utilisation des variétés de blé qui, en plus des grains,
produisent suffisamment de paille66.
En cas de surplus de production, une partie des revenus engendrés par
la vente des produits agricoles est destinée à l’achat d’animaux qui seront
engraissés et revendus à l’approche de la fête du sacrifice ou pour reconstituer
le troupeau. Le reste est destiné à la satisfaction des besoins du ménage ou au
financement des activités agricoles pour la campagne suivante.
Etant en zone de montagnes très accidentée, donc d’accès difficile, les
équidés jouent un rôle important dans les travaux culturaux, la transformation
des produits agricoles (maâsras), mais surtout dans le transport. En effet,
les équidés facilitent l’écoulement des produits agricoles vers les différents
souks hebdomadaires, ce qui explique la présence des mulets et des ânes
au niveau de la majorité des exploitations. En plus de la force de travail, les
animaux fournissent à l’agriculture du fumier. Dans les étables, les déjections
sont régulièrement ramassées pour la fertilisation des sols ou pour la production
d’énergie67. L’élevage sert pour certains agriculteurs de trésorerie sur pied, dans
laquelle ils prélèvent en cas de besoin pour financer les travaux culturaux ou
pour faire face aux dépenses du ménage.
Cependant, en dehors de cette complémentarité, on note une certaine
concurrence entre ces deux activités. En effet, les cultures fourragères
sont délaissées au profit des cultures céréalières pour garantir les besoins
d’autoconsommation familiale surtout chez les petits agriculteurs. Ainsi, les
animaux sont privés d’une source d’alimentation surtout avec l’amenuisement
des forêts et des parcours d’une année à l’autre dans la région. Le recours à la
main d’œuvre féminine lors des périodes de pointe pour les travaux agricoles
(moissons surtout) pousse les femmes de délaisser les animaux dont elles ont
la charge et/ou les confient aux jeunes enfants démunis pour faire face aux
problèmes qui peuvent survenir dans le troupeau (pertes, accidents…).
66 - Ahlonsou R. et al, l’olivier et les systèmes de production des zones de montagnes de Taounate. Série
n°82, Maroc - 1999
67 - Idem que 66
147
Le système montagnard
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
2.3.2. Diversités des revenus des agriculteurs
Les activités extra-agricoles se caractérisent par leur nature saisonnière
(travaux agricoles) voire inconstante (travaux de bâtiments). Lors d’un entretien
semi-structuré à El Ourtzagh avec un groupe de jeunes ruraux lettrés, ces
derniers ont émis le souhait de disposer d’une fiche technique sur la conduite du
cannabis. Pour ces jeunes, les systèmes de production basés sur la production
et la transformation des olives, des céréales, des légumineuses alimentaires
et de l’élevage ne permettent pas de subvenir aux besoins croissants des
ménages68.
Des efforts importants de lutte contre la mise en culture du cannabis ont
été lancés depuis les années 90 : ainsi, des campagnes de sensibilisation et
d’information des ruraux ont – été lancées pour empêcher de cultiver cette
culture à proximité des barrages, des étangs et des espaces forestiers en
raison des effets négatifs sur l’environnement. Selon les autorités locales, cette
campagne (2010-2011) a permis de venir à bout de superficies cultivées
en cannabis estimées à 4.000 hectares, situées dans 19 communes rurales
limitrophes de la région de Ketama et Chefchaouen. La région représente 20%
de la production totale de cannabis, soit 10.000 tonnes par an, pour 27.000
hectares environ. Cette activité implique quelques 136.000 personnes69.
2.3.3. Rôle de la femme : un atout pour une meilleure valorisation des produits
de terroirs
La valorisation des productions agricoles doit passer par l’organisation des
agriculteurs en groupements. L’agrégation autour de la filière oléicole préconisée
par le Plan Maroc Vert constitue une alternative et une solution. La femme requiert
un rôle primordial, et doit être impliquée dans le processus de développement
des filières (Tableau 19).
Tableau 19. Calendrier général des activités de la femme montagnarde.
Mois Jan. Fév. Mars Avril
Mai
Juin
Juil.
Août
Activités
Ebranchage
Bois de feu
Désherbage
Moisson
Elevage
Travaux
ménagers
68 - Kradi C. & Boujnah, Ourtzagh – Taounate (non publié) 1999.
69 - Mahjoub R., Taounate s’attaque à la culture de cannabis, 2005
148
Sept.
Oct.
Nov.
Déc.
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Le système montagnard
La femme travailleuse et porteuse de moyens d’existence continue à
souffrir de l’analphabétisme (Nassif F.). Dans le meilleur des cas, les plus
actives des femmes rurales sont considérées comme étant des aides
familiales. Selon le rapport du développement humain 2005, la catégorie
« aide familiale » s’applique à 85% des femmes rurales actives du pays,
(PNUD – Maroc 2006). Les constats sur le terrain en zone de montagnes,
d’oasis et des parcours (zones marginales) pour les femmes marocaines
sont caractérisés par l’analphabétisme et l’exclusion sociale.
Il faut promouvoir les associations féminines pour valoriser leurs efforts et tirer
profit des opportunités économiques offertes par les souks hebdomadaires.
Les femmes ayant un niveau de scolarité acceptable, c’est-à-dire, sachant
lire et écrire, contribuent à la constitution d’un environnement propice pour
la réussite de leurs enfants dans la vie scolaire et leur ouvrent le chemin de
la vie professionnelle. Le renforcement des capacités des femmes est une
question vitale pour le développement de la société marocaine dans son
ensemble.
2.3.4. Savoirs locaux
Les savoirs locaux agricoles se développent et se transmettent entre
agriculteurs à l’intérieur des douars de génération en génération. Cette
dynamique couvre plusieurs domaines de la production agricole, du stockage
et de la transformation agroalimentaire. A titre d’exemple, l’ancienne pratique
de la multiplication de l’olivier par le greffage sur l’oléastre, la traditionnelle
méthode de trituration des olives vertes en huile alouana70, la confection des
maâsras à l’aide de matériaux locaux, le stockage et la conservation des
produits agricoles, etc. Pour un développement durable des systèmes de
production, il serait bénéfique d’entreprendre des recherches pour évaluer
ces connaissances endogènes et le savoir-faire des agriculteurs afin de les
améliorer pour mieux les valoriser. Ceci suppose une bonne coopération entre
la recherche, la vulgarisation et les agriculteurs.
2.4. Cas du Haut Atlas (Vallées Anougal et Imintala)
La vallée Anougal /Province de Marrakech (Carte 5 ) se situe en Haut Atlas
à des altitudes allant de 800 à 2000 mètres. Le gradient d’altitude suppose
un gradient de température et de précipitation ayant une influence sur les
activités agricoles axées sur l’élevage ovin-caprin, le noyer, l’orge, le blé et
surtout la pomme de terre.
Quant à la vallée d’Imintala / Province de Marrakech , elle se situe à environ
1400 mètres d’altitude. La forêt est constituée du chêne vert, du pin de canaris,
70- Huile tritutée de noix d’olive chauffés .
149
Le système montagnard
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
du genévrier, de l’armoise et du thym. Les activités agricoles montrent une
forte intégration agriculture – élevage (ovin, caprin, céréales, maraîchage et
pommier).
Carte 5 : Sites étudiés dans le Haut Atlas, Province de Marrakech
Les disparités entre les familles sont analysées selon le concept de l’Unité de
Production Familiale (UPF). C’est l’ensemble des personnes qui consomment
et travaillent à partir des mêmes ressources et qui sont représentées par un
chef de famille. Une UPF peut regrouper plusieurs ménages de la même lignée
ayant droit à l’accès à l’eau. Les enquêtes réalisées ont révélé une grande
diversité des UPF, laquelle diversité peut être expliquée selon le niveau d’accès
à l’eau71.
L’accès à l’eau à partir de la source est réservé selon le droit coutumier aux
membres des lignages fondateurs du Douar. Donc, ces UPF ont la possibilité de
diversifier leurs activités agricoles. Les familles n’appartenant pas à ces lignages
ou nouvellement installées dans le Douar n’ont pas accès à l’eau mais ont la
possibilité d’acheter le droit d’usage de l’eau chez les ayant droits ne disposant
pas de terre. On rencontre aussi des UPF qui n’ont qu’une portion de droit
d’eau, situation résultant le plus souvent d’un morcellement des droits d’eau
par succession de l’héritage.
Il est à rappeler que les membres des lignages fondateurs ont la priorité
d’acheter l’eau. Cela leur permet d’accumuler plusieurs tours d’eau. Ces
UPF regroupent parfois plusieurs ménages qui se partagent les tours d’eau.
71 - Etude CNEARC – INRA – CT Amezmiz, Haut Atlas, 2000
150
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Le système montagnard
Par ailleurs, certaines personnes externes au village et possédant des moyens
financiers ont pu acquérir des droits d’eau sur la source en même temps qu’ils
achetaient des terres et parfois des oliviers.
2.4.1. Catégories des agriculteurs
Trois groupes d’agriculteurs ont été identifiés72 selon trois critères déterminants:
la superficie de l’exploitation, les activités agricoles et le revenu de l’exploitant.
Ils se présentent comme suit :
2.4.1.1. Groupe des pauvres
C’est le groupe ayant moins d’un hectare et sans accès aux ressources (eau,
financement…). Il est constitué par des ménages (ou «canoun» = un couple
avec enfants), dont le revenu est constitué des recettes de la vente du caprin
et le travail à l’extérieur de l’exploitation contribuant par leurs émoluments ou
pécules au budget de la famille. Ce groupe ne dispose pas d’autosuffisance
en céréales et en orge surtout, ne produit en moyenne que le 1/3 de ses besoins
et s’approvisionne au marché pour le reste. Il se situe en dessous du seuil de
pauvreté estimé à environ 20.940 DH/an pour un ménage moyen en milieu
rural de 6,4 membres, soit 3272 dh/personne/an (HCP, 2004). Le seuil de
pauvreté est une ligne évaluée en dirham marocain, en dessous de laquelle
l’individu est considéré pauvre, c’est-à-dire ne parvient pas à satisfaire ses
besoins fondamentaux73.
La situation de ce groupe est précaire. L’agricuteur essaye par tous les
moyens de diversifier ses activités rémunératrices non dépendantes des aléas
climatiques tel que le petit commerce. Le risque pour ce groupe est grand :
perte de ses moyens dérisoires de production (vente des terres) et exode rural.
2.4.1.2. Groupe des vulnérables
Ce groupe est relativement autosuffisant mais en situation fragile. Il dispose
de 1 à 2 hectares de terres avec accès à l’eau de source pour l’irrigation du
maraîchage, de la luzerne et de l’olivier destiné au marché. L’orge satisfait les
besoins alimentaires de la famille et du bétail constitué essentiellement d’une
à deux vaches et une vingtaine de têtes de caprins. Le seuil de pauvreté est
tout juste dépassé grâce aux revenus de l’émigration variant entre 25 et 30.000
DH/an. Du fait de la fragilité des systèmes de production, surtout en années
difficiles, et faute d’épargne, ce groupe d’agriculteurs peut basculer dans le
groupe des pauvres.
2.4.1.3. Groupe des familles pourvues en moyens
Les activités de ce groupe disposant de superficie allant de 2 à 4 hectares
sont focalisées sur l’élevage, constitué généralement de 3 à 5 vaches de
72 - Idem que 71
73 - Zarra Y., Pauvreté, approches et mesures : cas du Maroc, mai 2005, p. 11
151
Le système montagnard
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
races améliorées et environ 100 ovins/caprins, qui assure la plus grosse part
de ses revenus. Ce groupe a une bonne capacité à atténuer l’effet des aléas
climatiques par la diversification de ses activités. Il possède des maâsras et
fait de la trituration pour les tiers moyennant le paiement en huile au prorata
(quantité d’olive triturée). Les membres de ce groupe disposent de relations
avec le marché. Les échanges entre les agriculteurs se font par des travaux
d’entraide selon une organisation appelée « touiza » pour réaliser des travaux
en commun tels que le labour, et la moisson. Ce groupe a la possibilité
de faire de l’épargne et d’investir au sein de l’exploitation ou en dehors
de l’exploitation notamment dans le bâtiment.
Selon l’étude74 d’Imintala, une des principales source de revenus des
agriculteurs est la transformation des écorces de racine de noyer. Cependant,
cette activité qui pose d’énormes problèmes de la préservation du noyer
constitue une source de recettes pour le chef de l’exploitation. L’opération
consiste à retirer l’écorce de la racine et l’enrouler sur un petit morceau de
bois pour la revendre dans les souks avoisinants comme « produit cosmétique
traditionnel» appelé localement «souak», permettant aux femmes de blanchir
les dents et de colorer les gencives. Souvent, l’acheteur est un vendeur
ambulant ou l’épicier du Douar.
2.5. La montagne : des potentialités sous exploitées à bon escient
2.5.1. La multifonctionnalité de l’agriculture : un atout à exploiter pour
promouvoir le développement participatif local
L’étude réservée aux rôles de l’agriculture marocaine a généré des
informations extrêmement importantes sur les externalités positives des
communautés rurales dans les zones de montagnes75. Le cas de
la
contribution de l’agriculture à l’entretien et au façonnement du paysage
en zones de montagnes du Haut Atlas occidental montre que l’agriculture
produit de multiples externalités environnementales positives (plantation de
rosacées, aménagements hydro-agricoles, conservation in situ du patrimoine
génétique local…) dont les valeurs qui leur sont attribuées par les chercheurs
en agro-écologie et en économie rurale sont hautement significatives. D’où la
nécessité d’élaborer des politiques spécifiques permettant de les valoriser de
façon systématique et durable dans le cadre des projets de développement
en cours (INDH, PMV). C’est une occasion réelle pour accorder la place qu’il
faut aux rôles que jouent les montagnards et les oasiens dans la gestion de
l’eau, du sol et de l’agro-biodiversité.
La pression démographique n’est pas toujours un mobile de taille induisant
la dégradation des ressources naturelles. La présence humaine intense, bien
74 -Etude CNEARC – INRA – CT Amezmiz, Haut Atlas, 2000
75 - Moussaoui M. et al, Analyse socio-économique des rôles de l’agriculture et conséquences en matière
de politiques
152
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Le système montagnard
organisée et responsable est souvent le garant et le protecteur de la nature
par l’entretien du paysage. Avec la charte de l’environnement, la prise en
considération de la dimension systématique des activités agricoles et de
développement des filères agricoles nous laisse optimistes quant à l’avenir du
développement durable.
Ainsi, la redynamisation du mouvement associatif autour des savoirs locaux
et des modes traditionnels de gestion des terroirs est un préalable à la réussite
des projets de recherche-développement participatif visant l’amélioration
des revenus des ruraux et de leurs conditions de vie et, par conséquent, la
stabilité sociale. Dans ce sens, l’approche participative doit être vue comme
une alternative de mobilisation et de responsabilisation des ruraux autour de la
Jamaâ (comité des sages) dans la gestion des terroirs.
La question de la production des externalités bénéfiques pour le paysage
marocain et la protection des ressources naturelles (cas des agriculteurs
montagnards, oasiens et pastoraux) et celles ayant des effets négatifs sur
l’environnement et l’homme en termes d’intensification non raisonnée des
cultures, de pollution des eaux (cas des agriculteurs des plaines) est soulevée.
En effet, le débat doit permettre d’aboutir à des recommandations pratiques
pour encourager ceux qui jouent leur plein rôle « de protecteur de la nature »
dans des conditions difficiles.
2.5.2. L’agriculteur innovateur : une richesse pour le développement local et
le transfert du savoir faire
L’expérience vécue sur le terrain montre que les rapports entre l’agriculteur
et les acteurs de développement sont tâchés d’ambigüité traduisant dans la
majorité des cas des comportements antagonistes. Souvent, le dernier mot
revient aux Chercheur/Développeur/Vulgarisateur pensant qu’ils détiennent
toutes les solutions aux contraintes posées. Pourtant, l’agriculteur innovateur,
expert de son exploitation, cède au débat et se soumis aux idées des techniciens
en pensant tout simplement que ces représentants de l’Etat viennent avec
l’argent/ subventions…Malheureusement, ce style de relation persiste encore
à nos jours, et qui semblent être parmi les causes de l’échec de l’intervention
agricole.
Pour enrichir le débat, on pose les questions suivantes : comment faire
pour que l’approche participative, sans démagogie, soit institutionnalisée et
équilibrée dans les rapports de forces entre le technicien et l’agriculteur ?
L’agriculteur au centre des considérations et le technicien facilitateur : limites
et portés ? La reconnaissance de l’agriculteur expert comme instrument de
développement durable n’est-elle pas la piste à privilégier dans la conception
et la mise en œuvre des programmes de développement?
On ne pense pas que les objectifs fixés pour l’agriculture solidaire « pilier
II » dans le cadre du Plan Maroc Vert seraient atteints si on ne clarifie pas les
relations entre les différents acteurs (chercheurs, techniciens…) et l’agriculteur.
On n’a plus le temps aujourd’hui à perdre, car beaucoup de projets et de
153
Le système montagnard
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
programmes d’intervention ont échoué parce que tout simplement les projets
conçus ont été incompatibles culturellement et territorialement avec les
aspirations des agriculteurs.
En fait, les zones de montagnes ont été toujours marginalisées dans les
programmes de développement. Elles connaîssent aujourd’hu un regain
d’intérêt et une prise de conscience des décideurs politiques sur l’urgence de
protéger et développer les moyens d’existences des populations qui y vivent. Le
Plan Maroc Vert est dans ses débuts. Il a créé des attentes que ces populations
souhaitent voir se concrétiser.
Certes, pour aboutir à des résultats positifs, il faut absolument s’appuyer
sur l’homme, son savoir-faire et ses usages locaux pour la programmation des
actions de développement. La recherche-développement peut aider à mieux
comprendre les besoins de populations. C’est la motivation principale pour moi
qui m’a poussé à prendre le cas d’un montagnard (Moha) comme un cas
général pour justifier qu’on ne peut pas continuer à travailler sans prendre en
considération la richesse en ressources humaines.
2.5.2.1 Comment un simple agriculteur devient un véritable développeur /
conseiller agricole
a. Profil historique
Il s’agit d’un agriculteur/ chauffeur76, vivant dans l’un des villages perchés du
Moyen Atlas où il s’est forgé une riche expérience au fil du temps qu’il met au
profit des agriculteurs de la région. Ses armes sont : les mains, le cerveau et la
volonté. Il est recherché par tout preneur de terre pour mettre tout en ordre (les
plantes, l’irrigation, l’élevage, les puits…). C’est une personne hors du commun.
incarnant une extraordinaire expérience. En plus de ses capacités techniques,
ses qualités humaines et communicationnelles font de lui un homme au service
de la communauté locale. Cet homme, fils d’agriculteur et agriculteur lui-même,
je l’ai connu en 1997 à l’occasion d’un travail de recherche que j’avais initié
et réalisé avec une équipe multidisciplinaire et multi-institutionnelle INRA –
ICRA sur le thème « Quelles recherches pour le développement des zones de
montagnes au Maroc : cas de 3 Communes Rurales du Moyen Atlas» dans une
zone enclavée du Moyen Atlas Central / Aghbala – Tizinisly /Cercle Laksiba/
Province de Beni Mellal. Il était le chauffeur de l’équipe qui conduisait un
véhicule tout terrain, et je voyais comment il se débrouillait pour nous amener
aux sites de l’étude. Il est aujourd’hui en retraite mais contenu à travailler sur
le terrain. Grâce à lui, une centaine d’hectares ont été aménagés, plantés et
irrigués en goutte à goutte… Il a beaucoup appris des vulgarisateurs du Centre
de Travaux Agricoles dans lequel il exerçait comme chauffeur et a accumulé
une grande expérience.
76- Agent de support de Centre de Travaux Agricoles d’Aghbala (Moha A.). Il est aujoud’huit superviseur/gestionnaire/conseiller de plusieurs fermes modernes dans la région.
154
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Le système montagnard
Son cas m’a inspiré et m’a donné l’envie de rédiger cette partie en
reconnaissance à ce petit agriculteur simple qui devient au fil des années une
personne ressource en agriculture. C’est un cas à méditer et à prendre comme
symbole de la richesse que renferme les zones de montagnes en termes de
savoir-faire et connaissances endogènes, en expertise innée locale. A travers
ce personnage, je tente de montrer aux lecteurs que le capital humain,
indépendamment de la marginalisation et de l’exclusion sociale, constitue une
opportunité et un atout à préserver et à développer pour un développement
durable des systèmes de production montagnards.
Profil historique de Moha
Age : 60 ans
Niveau scolaire : CE 3
Fils d’agriculteur :
❐ Aide son père (BD, orge, pomme de terre, oignon : irrigation à partir de la
Source d’eau…).
❐ Travail saisonnier à Elksiba comme aide pépiniériste dans le traçage des
nouvelles plantations de rosacées
1979 : Recrutement aux Eaux et Forêts :
❐ Traçage des périmètres de boisement (genevrier, chêne vert) et caporal
d’équipes d’ouvriers de plantations forestières dans les sites suivants :
Boumia (75 has), Tizinsly (30 has) et Oued labid Warin (50 has) avec un taux
de réussite de 100%.
1983 à 1986 : Intégration du CT d’Aghbala / SC de Tizinily
❐ Tractoriste : prestation de service pour l’opération labour
❐ Participation à la lutte anti-acridienne en qualité de responsable du
pulvérisateur.
1996 : Participation à la mise en place de la première exploitation moderne
du pommier à Tizinisly
1998 – 2011 : Spécialisation dans l’installation de la goutte à goutte dans la
région et installation des verges de rosacées.
Encadré 8 : source enquête KRADI, 2011
b. L’Impact socio-économique et environnemental
On entend beaucoup parler d’un énorme manque d’infrastructures de
bases (routes, réseaux d’électricité, adduction d’eau potable…). Mais d’un
autre côté, le monde rural (particulièrement dans les zones fragiles et pauvres)
souffre d’une pénurie de professionnels et de travailleurs qualifiés et, a besoin
d’une main-d’œuvre qualifiée et compétente, capable de contribuer au
développement de l’économie de manière productive, d’où, l’urgence de
valoriser les compétences, les expériences et les savoirs locaux et d’investir
dans le capital humain.
155
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Le système montagnard
Photo (Kradi C.) 8 : Verger pommier et prunier à Tizinisly .
b1. Impact socio-économique
Le cas du personnage pré-cité est un cas intéressant. Il démontre à quel point,
le capital humain est source de la croissance économique au niveau local. En
participant à la reconversion des cultures annuelles (céréales) à l’arboriculture
fruitière dans une zone de montagnes où toutes les conditions sont favorables
pour les plantations, on contribue systématiquement à l’amélioration des revenus
des agriculteurs (cf. sous point b1, point 2.1.3.3, chap. 3). En examinant son
parcours en constate que durant 1996 - 2011 a contribué à la spécialisation de
sa région dans l’arboriculture fruitière dans les deux CR de Tizinisly et Aghbala.
Les efforts de Moha sont illustrés par l’encadré suivant:
❐ Sur 60 exploitations équipées en goutte à goutte, 10 ont été travaillées
par Moha, soit l’équivalent de 60 hectares sur 300 has dans la CR de
Tizinisly (20%).
❐ Sur 34 exploitations équipées en goutte à goutte, 11 ont été travaillées
par Moha, soit l’équivalent de 19 hectares sur 64 has dans la CR
d’Aghbala (30%).
Encadré 9 : Enquête KRADI, 2011
b2. Impact environnemental
Grâce à l’extension des plantations et aux installations des techniques
économes de l’eau (irrigation localisée), on produit des externalités positives
sans que l’acteur soit récompensée.
Parmi ces externalités, on peut citer la beauté du paysage qui profite aux
opérateurs touristiques par la valorisation de l’écotourisme, la réduction de
l’érosion des sols et leur impact sur l’environnement en général et les barrages
156
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Le système montagnard
en particulier. ces derniers irriguent les cultures à haute valeur ajoutée destinées
à l’exportation dans les plaines marocaines. L’économie de l’eau qui a des
répercussions sur la pérennité des eaux de surfaces et souterraines et le maintien
des populations sur place est un grand chantier lancé par le département de
l’Agriculture auquel de nombreux agriculteurs adhérent.
L’exemple de l’apiculteur qui profite de la proximité de l’arboriculteur,
obtenant un miel de bonne qualité qu’il commercialise à un meilleur prix.
L’arboriculteur ne reçoit pas de récompense pour le service indirect qu’il
a rendu à l’apiculteur. Il s’agit là d’une externalité positive. En contre partie,
l’arboriculteur profite de la pollinisation de ses arbres fruitiers sans rien payés.
L’externalité est positive dans les deux sens77.
77 - Capital humain – wikpédia, Célèbre exemple de James Meade, 1952
157
Le système montagnard
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Conclusion du chapitre III
Les recommandations ainsi proposées ont enrichi le débat sur la question
de développement durable des zones de montagnes, particulièrement en
ce qui concerne l’élaboration des opérations de recherche et de recherche
–développement dans le cadre de la programmation régionale de la
recherche.
Toutes les études réalisées sur les systèmes de production montagnards ont
tiré la sonnette d’alarme sur les externalités négatives (défrichement, pompage
excessif…) portant préjudices à la durabilité écologique et socio-économique
des zones étudiées. Ces informations sont nécessaires et très utiles à exploiter
pour la mise à niveau des zones pauvres enclavées dans le cadre des différents
programmes de développement projetés pour les prochaines années. Les
objectifs sont aujourd’hui clairs plus que jamais ; il n’y a pas de Maroc utile
et Maroc inutile. Chaque région, chaque localité et chaque terroir doit
bénéficier des efforts consentis par l’Etat et apporter sa contribution pour le
développement durable.
Le socle de l’activité économique pour les montagnards est l’agriculture et
ses liens avec la valorisation des produits de terroirs, l’entretien du paysage et
le développement de l’écotourisme. En fait, la reconnaissance de l’agriculture
solidaire « Pilier II » par le gouvernement marocain est une reconnaissance
du Maroc profond, de ses diversités, de ses difficultés, de ses atouts et de ses
potentialités. Les moyens mobilisés par l’Etat à cet effet témoignent de la volonté
politique d’aller de l’avant pour rehausser le niveau de vie des communautés
montagnardes et améliorer leurs moyens d’existence.
158
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Photos (CRRA Oujda) 9 et 10 : Parcours de l’oriental marocain.
159
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Chapitre 4
Zones arides et semi - arides
Introduction
La caractérisation des systèmes de production agricoles arides et semi-arides
a pour finalité la compréhension du fonctionnement et la dynamique de ces
écosystèmes vulnérables ayant des conséquences socio-économiques et
environnementales néfastes sur les agriculteurs et leurs environnements. Dans ce
qui suit, nous présentons les grands traits de ces écosystèmes, leurs évolutions et
les voies d’amélioration à travers des programmes de recherche-développement
identifiés sur la base des diagnostics participatifs.
I. Cas de la plaine des Rhamnas
Dans les zones semi-arides et arides à faible pluviométrie (200 mm/an) et dans
le but d’appuyer la région des Rhamnas à élaborer son Plan Agricole Régional
du Plan Maroc Vert, un diagnostic participatif a été réalisé sur les systèmes de
production dans les Communes Rurales (CR) Labrikyine & Tizmarine (Carte 6)
par une équipe multidisciplinaire78 de chercheurs. Ces CR sont caractérisées
par des systèmes de production basés sur les cultures vivrières couplés à la
pauvreté et aux conditions climatiques peu favorables font que les attentes
des populations sont énormes.
Le choix de ces deux CR est motivé par le fait qu’elles n’ont pas bénéficié, par
le passé, de programmes intégrés d’envergure en matière de développement
rural. Elles sont complémentaires en termes de vocation et potentiel agricole
(agro-pastoral, disponibilité de l’eau, potentiel de développement arboricole :
vigne, olivier, cactus), de l’existence d’un grand marché demandeur en fruits,
légumes, viande et lait (Marrakech notamment). Ces deux CR peuvent servir de
modèle et d’exemple de développement agricole et rural pour toute la région
des Rhamnas.
78 - BENLHABIB O., EL HIMDY B., A. MAHHOU A., ILHAM A., ALALI S., KARIB H./ IAV Hassan II et KRADI C. /
INRA, Document du projet novembre 2007
160
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Zones arides et semi - arides
Carte 6 : Sites étudiés dans la plaine des Rhamans
1.1. Caractéristiques des systèmes de production et problématique
La zone d’étude couvre une superficie totale de 33.545 ha. La SAU représente
une superficie de 21.245 ha, dont 585 ha irrigué (3%). Le statut dominant est le
Melk (80%). La superficie céréalière est dominée par l’orge (9.500 ha), soit 55%
avec un rendement sur 5 ans (2002-2007) oscillant entre 2 et 4,5 quintaux/ha.
Le maraîchage occupe une superficie de 292 ha conduit en irrigué. Quant à la
production animale, elle est dominée par l’élevage ovin (43.666 têtes), bovin
(3.210 têtes), caprin (18.000 têtes). L’élevage camelin a beaucoup régressé
dans la région et ne représente aujourd’hui qu’un effectif de 70 têtes ( CT
Benguerir, 2007).
La CR Labrikiyne est caractérisée par la dominance du sol de type R’mel
favorable à la vigne et à l’agro-pastoral. Elle est aussi caractérisée par la
dominance de l’olivier 600 ha (62% de la superficie arboricole). Alors que la
CR Tizmarine est caractérisée par la présence de l’Oued Bouchane au long
duquel est pratiqué le maraîchage irrigué.
En résumé, la région dispose de potentialités intéressantes qui se résument
en la présence de points d’eau, une vallée à grande potentialité en eau (cas
Tizmarine), en sol favorable au développement de la vigne et du maraîchage,
161
Zones arides et semi - arides
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
une zone agro-pastorale, berceau de la race Sardi, zone accessible au marché
et mécanisable (Tableau 20).
Tableau 20. Principales caractéristiques des Communes Rurales étudiées
Eau
❐ Pluviométrie moyenne annuelle 200 mm et moins de 100 mm pour
2006/2007 ;
❐ Plusieurs années successives de sécheresse : sur 20 ans, 14 années
sèches ;
❐ Rabattement de la nappe phréatique dû au pompage / sécheresse
(1m/ an).
Elevage
❐ Zone à vocation pastorale et berceau de la race Sardi;
❐ Appréciation de la race Sardi par les consommateurs ;
❐ Disponibilités fourragères limitées et des parcours dans la région ;
❐ Développement de l’Aviculture à grand rythme (dinde et pintade) ;
❐ Introduction de caprins : environ 18.000 têtes ;
❐ 12% de l’effectif bovin est de race améliorée ;
❐ 15 millions l/an de lait produit, dont 5 millions commercialisés.
Production
végétale
❐ Rendement moyen des céréales en bonne année avoisinant les 12qx/
ha ;
❐ Céréaliculture liée à l’élevage, à dominance orge ;
❐ 320 ha équipés par le système goutte-à-goutte destinés au
maraîchage ;
❐ Pratique de céréales dans les parcours.
Source : Diagnostic Rhamnas 2007
En revanche, la région est caractérisée par des contraintes d’ordre
technique, socio-économique et environnemental ayant des conséquences
négatives sur l’activité agricole et sur les revenus des agriculteurs (Figure 12). Il
s’agit d’une agriculture vivrière, très peu diversifiée et où l’agriculteur cherche
à minimiser les dépenses face aux risques liées à la disponibilité de l’eau. Du
coup, nous sommes en face d’une situation où l’agriculture ne peut pas à elle
seule atténuer l’effet de la pauvreté des exploitations très vulnérables aux aléas
climatiques et économiques.
162
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Zones arides et semi - arides
Revenu des agriculteurs insuffisant
et besoins des ménages non satisfaits
Faible productivité
des cultures (céréales)
Faible productivité
de l’élevage
Techniques de
productivité
inappropriées
Cout élevé
des intrants
Faible
encadrement
Dégradation
des ressources naturelles
Conduite du
troupau peu
maitrisée et
non optimisée
Parcours dégradé
Baisse de
la nappe
phréatique
Transfert de
technologie
défaillant
Surexploitation
Pompage
Valorisation technologique
et commerciale insuffisante
Faible
transformation et
conditionnement
des produits
locaux
Prédominance
intermédiaires
Faible
organisation
professionnelle
Figure 12 : Arbres des contraintes Rhamnas
Les chefs des exploitations agricoles trouvent d’énormes difficultés à
satisfaire leurs besoins et ceux de leurs familles et du bétail. Pour les chercheurs,
le renforcement des capacités des agriculteurs et leur encadrement et
accompagnement selon des programmes de recherche-développement
structurant pourront aider, dans un cadre bien organisé, à passer d’une agriculture
d’autosubsistance à une agriculture permettant des revenus convenables.
L’optimisation de la productivité est liée aux bonnes pratiques agricoles et aux
choix des décisions par les agriculteurs appuyées par l’encadrement téchnique
et support financier de l’Etat.
1.2. Plan d’action proposé à la lumière du diagnostic
A la lumière de l’analyse des contraintes (Figure 12), un plan d’action a
été élaboré et s’insère dans une vision globale de développement territorial
de la région des Rhamnas. La conception des actions du Plan Agricole
Régional s’articule autour des principes suivants : i) une démarche participative
procurant la synergie des actions et optimisant l’utilisation des moyens humain,
matériel et financier et responsabilisant la population ; ii) une approche par
filière permettant une harmonisation des interventions au niveau des différents
segments constituant la filière et aussi une garantie de la valorisation des
productions visées par le projet et, iii) une orientation des actions vers des
groupes cibles bien identifiés.
Etant donné la vocation de la région basée fondamentalement sur
l’élevage ovin, l’objectif principal visé par le Plan Agricole régional proposé est
163
Zones arides et semi - arides
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
d’améliorer les revenus des éleveurs de la région des Rhamnas, au niveau des
communes rurales Ouled Ameur Tizmarine et Labrikiyine, par l’augmentation
de la productivité de leurs élevages à travers des interventions au niveau
des conduites de leurs troupeaux ovins, ainsi que par la vulgarisation et le
développement de l’élevage ovin d’engraissement. Ce projet se justifie
par l’importance de l’élevage ovin dans ces deux communes rurales qui
compte environ 40.000 têtes conduites, pour la plupart du temps, selon des
modes traditionnels qui se répercutent négativement sur la rentabilité. En
outre, l’élevage d’engraissement, qui est une activité peu contraignante et
à valeur ajoutée importante, est d’autant plus justifiée que les disponibilités
fourragères des parcours dans la région sont limitées (le recours à l’utilisation
des aliments composés de commerce sera privilégié). Les communes rurales
d’Ouled Amer Tizmarine et Labrikiyine comptent respectivement 153 et 65
éleveurs - engraisseurs, avec des capacités d’engraissement des ateliers de
8.000 et 3.000 têtes. De plus, la commercialisation des produits est garantie par
la demande accrue liée, d’une part, à la proximité de la région des grands
centres urbains (Marrakech, Casablanca) et d’autre part, à l’appréciation par
les consommateurs de la race Sardi, dominante dans la région.
Quant à la production végétale, compte tenu des conditions climatiques
souvent difficiles, les activités sont centrées sur les cultures de l’orge, de
l’olivier et de la vigne. En cas de disponibilité de l’eau, le maraîchage est
pratiqué également. On note une forte intégration agriculture - élevage
dans les CR étudiées.
Concernant le développement de l’irrigation, les périmètres des petites et
moyennes hydrauliques existants au niveau des deux CR sont en majorité de
type traditionnel et couvrent des superficies très variables et de petites tailles.
Les techniques d’irrigation consistent en la mobilisation des eaux de puits par
de petits ouvrages simples et répartis au niveau des parcelles par des seguias
en terre. Du coup, les pertes d’eau sont importantes et pouvant dépasser 50%.
Deux catégories d’irrigation existent au niveau de ces CR : irrigation à partir de
la nappe et irrigation à partir de l’oued Bouchane.
Le travail associatif qui est à ses débuts connaît une certaine dynamique
au niveau de la région. Ce chantier mérite une attention particulière selon
une approche participative et une approche genre. Les actions définies
selon cette démarche seront suivies par l’établissement de partenariats, de
réunions d’approche méthodologique, puis seront organisées en ateliers de
communication, de formation, d’apprentissage, d’encadrement et de suivi
méthodologique.
Sur la base de ce diagnostic, un plan d’action (Tableau 21) avec un
échéancier a été proposé, validé avec les agents de développement, les CR,
les représentants des agriculteurs et les associations. Ce programme proposé
164
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Zones arides et semi - arides
a été pris en considération dans la finalisation du Plan Agricole Régional des
Rhamnas.
Tableau 21. Axes du Plan Agricole de la Région des Rhamnas.
Axe 1 : Diversification et valorisation de la production végétale pour l’amélioration des revenus
des agriculteurs à travers :
❐ Mobilisation des ressources en eau des barrages collinaires ;
❐ Equipements des points d’eau (puits) en motopompe ;
❐ Equipements en système goutte à goutte ;
❐ Introduction de cultures horticoles à plus haute valeur ajoutée ;
❐ Installation d’unités de trituration des olives ;
❐ Installation d’unité de transformation des figues de barbarie ;
❐ Organisation des agriculteurs en groupements (cas de la vigne): Agrégation;
❐ Encadrement et accompagnement des agriculteurs.
Axe 2 : Amélioration de la production ovine dans la région des Rhamnas
❐ Appui à la conduite des troupeaux ovins : reproduction, alimentation, hygiène,
prophylaxie et sélection des animaux;
❐ Vulgarisation des techniques de conduite en atelier d’engraissement « élevage hors
sol » à travers : la mise au point de formes d’alimentation sur la base des produits locaux
(cactus, orge…);
❐ Prophylaxie contre les principales maladies non concernées par les campagnes
prophylactiques menées par l’Etat (entérotoxémies, maladies parasitaires, fluorose).
Axe 3 : Développement durable de la petite et moyenne hydraulique
Première phase :
❐ Sensibilisation à l’amélioration de l’utilisation de l’eau et l’efficience de l’irrigation sur la
superficie de 585 hectares;
❐ Aménagement foncier par des opérations de nivelage, équipement en technique de
goutte à goutte et conservation des sols sur une superficie totale avoisinant les 20 ha au
sein des 2 Communes Rurales.
Deuxième phase :
❐ Construction de deux bassins d’accumulation des eaux superficielles (1 par CR) avec
des ouvrages légers de dérivations, et ce, à des fins d’irrigation de complément à très
petite échelle.
Axe 4 : Renforcement des capacités des associations locales et mise en place d’un programme
de recherche - développement participatif pour la préservation de l’agro-biodiversité
❐ Identification et caractérisation des associations locales existantes ;
❐ Suivi-évaluation du niveau d’implication des associations dans la réalisation des objectifs
du projet en l’occurrence ceux liés à la diffusion et l’appropriation des technologies par
les ruraux;
❐ Valorisation des ressources naturelles et du savoir-faire local de la région (Jujubier, figue
de barbarie, escargots…) à travers un festival des journées de promotion des produits de
terroirs et articles d’artisanat de la région ;
❐ Appui à l’enseignement préscolaire et à la réinsertion des jeunes en abandon de
scolarité des deux sexes ;
❐ Appui aux activités génératrices de revenus (poulets et/ou dinde beldi, cuniculture,
apiculture et transformation des produits locaux).
Source : Etude Rhamnas 2007
165
Zones arides et semi - arides
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Du fait de la vocation de la région orientée vers l’élevage ovin, il a été
recommandé d’engager un programme pour l’amélioration de la qualité de
fourrage à base de cactus, dont les résultats de recherche sont disponibles79.
Il s’agit :
❐ Des blocs alimentaires. L’incorporation de fruits de cactus varie de 20
à 50 %. Les autres ingrédients incorporés dans les blocs peuvent être
le tourteau de tournesol, le son de blé, la paille, l’urée, le complément
minéral et vitaminé.
❐ La technique d’ensilage qui est réalisé par fermentation du cactus haché
et mélangé à d’autres additifs (paille, foin de luzerne, mélasse, urée….).
Le cactus ainsi ensilé est équilibré en matières azotées, les épines sont
alors gonflées et par conséquent inoffensives.
❐ La production de farine de cactus qui peut être incorporée comme
ingrédient pour la fabrication d’aliments composés.
❐ Le hachage - séchage est la technique la plus élémentaire car elle ne
consiste qu’à l’enlèvement des épines puis le hachage des raquettes.
Leur séchage pendant quelques jours (2 à 3) permet alors la réduction de
leur teneur en eau et par conséquent l’amélioration de l’ingestion.
Selon les spécialistes, ces techniques peuvent faire du cactus une ressource
de base pour le développement d’une industrie de production des viandes
rouges.
Photo (CT Benguerir) 11 : Cactus des Rhamnas
Photo (CRRA Agadir) 12 : Arboretum Cactus
du Domaine Expérimental de Melk Zhar/
INRA Agadir
79 - Idem que 78
166
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Zones arides et semi - arides
A noter, que deux arboretums de cactus80, espèces du genre Opuntia, sont
installées dans les domaines expérimentaux de l’INRA. Le premier est composé
de 213 accessions d’origine marocaine et 42 variétés étrangères au Domaine
Expérimental Melk Zhar / Province d’Agadir. Le deuxième arborétum est
constitué de 186 accessions au Domaine Expérimental Foum El Oued / Province
de Laâyoune. Ces arboretums constituent un patrimoine important pour
l’amélioration et la conservation des ressources génétiques au Maroc en vue de
sélectionner les meilleurs écotypes et les mettre à la disposition des agriculteurs.
2. Cas des parcours du Maroc occidental central
Les parcours du Maroc Occidental Central occupent 1,3 millions
d’hectares répartis sur les régions de Khouribga, Settat, Kalaâ Sraghna,
Marrakech, Beni Mellal, Safi et Settat. L’effectif des petits ruminants est
estimé à environ 1 million de têtes, dont 90% ovins. Ils sont caractérisés par
de nombreuses contraintes liées à l’alimentation des animaux, au caractère
très aléatoire de la production végétale et à la dégradation des ressources
naturelles. Ces contraintes sont synthétisées dans la figure 13. Du fait de la
forte intégration élevage - cultures (céréales-fourrages surtout) dans ces
zones, les agriculteurs cherchent à répartir les risques entre les différentes
activités en donnant la priorité à l’élevage, ossature de l’économie des
exploitations agricoles.
Rentabilité des cultures et d’élevage en déclin
Rendement des cultures
(céréales et fourrages) médiocre
et en deçà du potentiel génétique
Alimentation des troupeaux
insuffisantes et disponibilité
fourragère en diminution
Pratiques culturales peu adaptées :
préparation des sols, techniques
de semis, conservation de l’eau
et du sol, fertilisation, techniques
de récoltes et techniques de stockage.
Superficies de parcours
en diminution
Dégradation des parcours
Encadrement et transfert
de technologie peu efficace
Extension des cultures
céréalières
Surcharge, surexploitation
Figure 13 : Arbres de contraintes des parcours.
80 - Boujghagh M., Atlas du cactus (opuntia spp.) de diffrérentes provenances marocaines, INRA 2011,
p. 26 - 27
167
Zones arides et semi - arides
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
2.1. Profil historique des systèmes de production pastoraux
Selon l’étude sur les parcours réalisée par une équipe ICRA-INRA81,
les changements socio-économiques, les évolutions édaphoclimatiques,
écologiques et les systèmes agraires se trouvent en transformation continue.
En effet, le recours à l’historique est un moyen qui permet non seulement de
comprendre les facteurs de changement dans un système donné mais aussi de
faire des projections sur l’avenir et les tendances sur l’évolution à court et à long
terme. C’est le cas du site d’Ouled Fares / El Brouj (Carte 7).
Carte 7 : Sites étudiés à Khouribga.
Les grandes phases de l’évolution des systèmes de productions au niveau
de ces sites sont caractérisées par :
❐ La période s’étalant entre les années 1920 et les années 1940 durant
laquelle les systèmes de production agricoles étaient à caractère pastoral
où dominait l’élevage, dit extensif. Ce dernier est basé sur l’exploitation
des pâturages naturels et la transhumance vers le sud (RhamanaSraghna) qui constituait à l’époque une stratégie à double fin : éviter
les conséquences de la fluorose et couvrir les besoins alimentaires des
animaux. En cette période, la mise en culture était limitée à quelques
fermes ;
81 - Anoun N. et al, Etude de l’état actuel des terres de parcours dans le Maroc occidental central : cas
des communes rurales d’Ouled Fares El Hall (El Brouj) et Ouled Fennane (Oued Zem), Série n° 58 - 1996
168
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Zones arides et semi - arides
❐ Entre les années 1950 et les années 1970, l’élevage extensif était encore
important. Le taux de transhumance se réduisait dès la décision du
partage et de la privatisation des terres collectives. A ce moment, la
céréaliculture a commencé à prendre de l’ampleur, mais elle est restée
limitée à des moyens traditionnels. L’attelage animal constituait la base
des travaux de labour et de la moisson ;
❐ Les années 1980-90 ont été marquées par les grands mouvements
d’émigration à l’étranger (Italie, Espagne…), ce qui a bouleversé le
système. A cause des investissements des émigrés dans la mécanisation
agricole qui a remplacé les pratiques traditionnelles et a permis une
extension à grande échelle de la céréaliculture au détriment des
meilleures zones pastorales. Cette période a connu une réduction
importante de la transhumance.
Le constat aujourd’hui est que l’évolution de la transhumance et la variation
des effectifs semblent être un phénomène qui peut avoir plusieurs explications:
les conditions climatiques, les épidémies, les ventes saisonnières, etc. La
réduction de la transhumance est probablement une conséquence directe de
la réduction des disponibilités fourragères fournies par les parcours naturels et le
recours croissant à la complémentation alimentaire. Les nouveaux découpages
administratifs ont joué également un rôle important dans la sédentarisation et
la limitation des déplacements des troupeaux et des populations. Ce qui fait
qu’actuellement, l’élevage est plutôt semi-intensif basé sur la complémentation
(orge, son, pulpe sèche de betterave et aliment composé) au moment
où la jachère et le parcours naturel ne peuvent plus couvrir les besoins des
troupeaux, surtout en année sèche qui est très fréquente dans une telle zone
bioclimatique82.
2.2. Etat actuel et recommandations
Autour de la problématique de la dégradation des parcours, le diagnostic
participatif réalisé par une équipe multidisciplinaire de chercheurs « INRA ICRA » dans deux Communes Rurales (CR) d’Ouled Fennane / et Ouled Fares a
permis d’analyser les comportements des éleveurs à l’égard des parcours. Les
résultats de ces travaux ont été exploités dans l’élaboration des Projets de Mise
en Valeur des Zones Bours (PMVB) lancés dans le cadre de la loi83 33/94.
Avec la promulgation de cette loi, on note un regain d’intérêt pour les zones
de parcours. C’est une approche basée sur le renforcement de la recherche
de proximité et l’implication des agriculteurs dans l’orientation des actions
de recherche-développement. Ces dernières passent inévitablement par
une meilleure maîtrise du fonctionnement et de la dynamique des différentes
82 - Etude ICRA – INRA, document de travail n° 58, 1996
83 - Stratégie de développement des zones Bours (pluviales), DAF – MADR, 1995
169
Zones arides et semi - arides
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
composantes des systèmes de production. La conjugaison de l’ensemble
des atouts (techniques et socio-économiques), pour lever les contraintes des
systèmes de production, dans un cadre intégré de développement, constitue
une option judicieuse.
Les données recueillies sur la conduite des cultures et de l’élevage, les
calendriers saisonniers des activités, les dépenses et recettes, les rendements
obtenus, les marges brutes ainsi que les données quantitatives liées à l’histoire
des systèmes de cultures, à l’exploitant, à sa famille, ses moyens et facteurs
de production et ses relations avec le marché, ont permis d’établir des
situations de références spécifiques aux systèmes de production (référentiels
technico-économiques) discutés avec les agriculteurs lors des ateliers de
restitution organisés dans les douars avec la Jmaâ. Une gamme de solutions
pour améliorer la productivité des cultures et de l’élevage sans pour autant
bouleverser les modes de gestion technique de l’agriculteur a été formulée.
Ces référentiels sont d’une utilité importante pour la conception et la mise en
œuvre des programmes de recherche-développement participatifs dans le
cadre de projets d’agrégation.
En fait, les chercheurs sont arrivés à la conclusion suivante : les superficies
des parcours des sites étudiés sont en diminution, à cause de l’extension de
la culture des céréales. Ils connaissent aussi une certaine dégradation à
cause de la surexploitation et des conditions climatiques défavorables84.
Selon cette étude, le bétail du site « Ouled Fares » est nourri essentiellement
par les produits et sous-produits de l’exploitation agricole car les parcours
collectifs sont situés sur des terres pauvres avec une végétation limitée.
On parle d’un système d’élevage ovin agro-pastoral où 70% des besoins
en énergies et 16% des protéines sont fournis par l’exploitation agricole.
Dans le deuxième site étudié « Ouled Fennane », le système est dit
agro-sylvo-pastotal. Les parcours forestiers y jouent un rôle important dans
l’alimentation des ovins, soit 60%. Le reste des besoins des animaux provient
des chaumes et de la jachère.
Dans ce contexte, les éleveurs adoptent des stratégies incluant la notion
du risque dans leur raisonnement. Ils orientent leurs systèmes de production
vers une meilleure combinaison et intégration des cultures pratiquées et
de l’élevage. Pour satisfaire les besoins de la famille, l’éleveur procède à
la valorisation des produits et sous produits végétaux par les animaux, une
orientation vitale pour la survie de la famille.
Pour améliorer les conditions de vie des éleveurs et préserver les
ressources pastorales, les chercheurs préconisent de centrer les activités
de recherche – développement sur deux aspects i) renforcement de la
84 - Idem que 83
170
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Zones arides et semi - arides
gestion communautaire pour responsabiliser les éleveurs / pasteurs selon une
approche d’autogestion participative et éviter les conflits, ii) amélioration
des parcours par la multiplication et l’installation d’espèces à Intérêt Pastoral.
La recherche agronomique à tarvers son Centre Régional de la Recherche
Agronomique (CRRA) d’Oujda, pôle d’excellence en recherche sur les systèmes
agro-sylvo-pastoraux et le CRRA d’Errachidia, dispose d’une expérience riche et
des résultats importants dans la lutte contre la dégradation des terres à mettre
à la disposition des utilisateurs de ces espaces85. Pour illustration, on peut citer
les exemples suivants :
❐ Diversification du matériel végétal à planter dans les parcours par les
espèces autochtones à intérêt pour les éleveurs (Stipa tenacissima L.,
Artemisia herba alba asso., Rosmarinus officinalis L., Ziziphus lotus Lam.,
Retama sp., Acacia raddiana svai., Atriplex halimus L. et Juniperus
phoenicea) ;
❐ Maîtrise des techniques de multiplication des espèces locales ;
❐ Création d’un arboretum à Errachidia pour étudier le comportement
des arbres et arbustes au contexte présaharien ;
❐ Méthodes d’installation et du comportement d’arbres et arbustes à
intérêt pastoral dans le contexte présaharien :
❍ Installation et suivi de comportement de deux arbres multi-usages
à intérêt pastoral dans le contexte présaharien par la méthode
du bloc en ciment (Argania spinosa et Ceratonia siliqua L.) ;
❍ Impact de l’hydrogel sur l’installation et le comportement de
deux espèces autochtones pastorales (Acacia raddiana svai. et
Rosmarinus officinallis L.) ;
❐ Installation et production fourragère de deux variétés de Cactus
(l’Atriplex nummularia L.) dans le contexte présaharien ;
❐ Utilisation des Eaux Salines d’Ain Atti pour la Lutte contre la
Désertification: La sélection des espèces tolérantes aux sels pour
valoriser les terres marginales et les eaux souterraines salines ainsi que
pour le développement et la conservation environnementale des zones
arides marocaines est l’une des approches adoptées pour contribuer à
la lutte contre la désertification. Plusieurs espèces végétales choisies sur
la base de leur tolérance aux sels et de leur importance économique et
écologique ont été testées en utilisant l’eau d’irrigation provenant de la
nappe artésienne salée de Aïn El Atti dont la teneur en sels est d’environ
10g/l.
85- Acquis et perspectives de recherche sur les parcours, rapports d’activités 2003 à 2010. CRRA Oujda.
171
Zones arides et semi - arides
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Conclusion du chapitre IV
Les zones arides et semi-arides et agro-sylvo-pastorales renferment des
potentialités importantes à valoriser selon une démarche participative et
durable. Malheureusement, ces écosystèmes se dégradent encore à cause
du surpâturage, la mise en cultures et le défrichement. De plus, les approches
d’intervention manquent encore de ciblage et de coordination harmonieuse des
actions. Du coup, l’impact des programmes de réhabilitation et d’amélioration
des parcours, cas de l’Oriental, sont en deçà des objectifs fixés86. En revanche,
malgré ces contraintes, l’éleveur continue à produire de la bonne viande
ovine et caprine et à la valoriser sous forme de produit local qui n’est pas
encore labélisé et commercialisé dans de bonne conditions profitables aux
agriculteurs/éleveurs.
La recherche agronomique dispose aujourd’hui d’outils et d’une expertise
importante à valoriser dans le cadre des Plans Agricoles Régionaux tels que
l’utilisation des techniques de télédétection spatiale et le Système d’Information
Géographique pour la mise en place d’une veille informationnelle du suivi de
l’évolution des parcours87 et la planifacation/programmation pastorale.
Il est bon de rappeler que la programmation en zone pastorale diffère de
celle dans d’autres projets agricoles. Elle nécessite une parfaite collaboration
et synergie entre le chercheur – le développeur- le conseiller agricole et le
pasteur. Ce dernier utilise un milieu complexe caractérisé par une certaine
variabilité climatique conditionnant la présence de la végétation dans l’espace
et dans le temps au cours de l’année mais aussi d’une année à l’autre. De
plus, les questions institutionnelles ont souvent le même poids que les questions
techniques et même plus dans certains cas.
Comme alternative à la problématique de l’alimentation des animaux,
le département de l’agriculture mise sur le développement des nouveaux
produits à base du cactus. C’est une culture incontournable pour les systèmes
de production dans les zones arides et semi-arides.
86 - Maâtougui et al, les pâturages steppiques de l’Oriental marocain, juin 201, page 4
87 - Laboratoire SIG du CRRA d’Oujda
172
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Chapitre 5
Instruments et outils pour accompagner
la dynamique des systèmes de
production agricole
Introduction
Ce chapitre est le fruit d’une réflexion afférente à la prise en compte d’un
certains nombre d’outils et d’instruments pour accompagner les différentes
interventions de recherche-développement actuelles et futures dans des
conditions propices en vue d’accompagner la dynamique des systèmes
de production agricole. L’accent est mis sur la communication et le conseil
agricole comme instruments de promotion des acquis de recherche dans
une ère où l’utilisation des technologies de l’information devient vitale, sur le
rôle que peuvent jouer les Groupements d’Intérêt Publics dans le nouvel élan
donné par le Plan Maroc Vert à l’agriculture marocaine, sur l’importance
d’adopter des démarches participatives pour l’élaboration et la mise en œuvre
des programmes d’actions dans le cadre d’une approche territoriale avec un
système d’évaluation performant en mesure de renseigner sur les réussites et les
échecs de telle ou telle action et d’en corriger les distorsions.
1. Les enjeux et défis de l’utilisation des TIC
L’introduction des Technologies de l’Information et de la Communication
(TIC) en milieu rural est une option essentielle. Cependant, elle se heurte aux
contraintes liées à la pauvreté, à l’enclavement, au manque d’infrastructures, à
l’analphabétisme. En fait, l’accès de tous les citoyens ruraux à l’information d’une
manière équitable est une condition nécessaire à la réussite des programmes
de recherche - développement. Exploiter les compétences disponibles (les
ingénieurs et techniciens ayant bénéficié de l’opération du départ volontaire), la
disponibilité et la volonté d’adopter les nouvelles technologies de l’information
par les jeunes ruraux lettrés (ouverture d’esprit) et l’émergence de nouveaux
investisseurs constituent le prolongement logique de l’approche « Farmer to
farmer». En fait, la dynamique que connait le monde rural et le secteur de
l’agriculture constitue une opportunité à saisir pour combler le retard au niveau
de la campagne marocaine en matière d’information et de communication
173
Instruments et outils pour accompagner
la dynamique des systèmes de production agricole
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
à travers l’utilisation des TIC pour le renforcement des programmes d’action
au profit des communautés locales. Pour ce faire, il est urgent de renforcer
davantage les programmes de lutte contre l’analphabétisme en milieu rural. La
recherche - développement est appelée à développer des logiciels adaptés
aux ruraux sans pour autant négliger les outils classiques utilisés par les structures
de recherche et de développement ayant prouvé leur efficacité dans les
interventions agricoles et les méthodes traditionnelles utilisées par les agriculteurs
pour communiquer entre eux. Dans ce sens, les souks hebdomadaires constituent
des lieux et moments forts durant lesquels les ruraux réalisent leurs transactions
et échangent des informations.
Dès lors, les TIC doivent être également perçues comme un moyen d’échanges
de l’information entre les structures de recherche et de développement
et perçus aussi comme un outil puissant de communication des résultats de
recherche sous forme de messages dont le contenu est clairement défini et
facilement assimilable par les ruraux. Bien entendu, le téléphone mobile a eu
un impact positif sur l’organisation de la communication en milieu rural, surtout
dans le domaine des prix des produits agricoles qui varient d’un souk à l’autre
et d’une région à l’autre. Dans ce sens, il est recommandé de :
❐ Développer des réseaux d’agriculteurs organisés et/ou agrégés dans
le cadre des projets d’agrégation et aussi des agriculteurs individuels
pilotes ayant les mêmes objectifs de développement. Autrement dit, des
projets se rapportant à la même filière mais répartis géographiquement
sur le terroir marocain. Ceci va sans doute renforcer l’échange de
l’information entre les agriculteurs sur leurs expériences respectives ;
❐ Développer en concertation avec les ruraux le contenu des logiciels
avec l’appui des structures de vulgarisation et de développement ;
❐ Mettre en place un système de suivi-évaluation de l’impact des TIC sur
les agriculteurs et leurs environnements socio-économiques, culturels et
écologiques ;
❐ Mettre en place un programme de renforcement de capacités dont
le contenu doit être élaboré en concertation avec les spécialistes en
la matière et les utilisateurs finaux des TIC. Les jeunes ruraux lettrés, les
jeunes émigrés, les jeunes investisseurs et les conseillers agricoles peuvent
être les fers de lances de l’introduction des TIC.
On doit disposer d’une stratégie de communication selon les thématiques à
traiter, des réseaux des agriculteurs agrégés et non / groupements / associations
pilotes. Il est donc impératif de trouver les meilleurs supports pour la diffusion de
l’information. Le but recherché est une communication pour le développement
durable en agissant sur le fond et sur la forme des messages. Sur le fond, les
messages élaborés doivent être appropriés, claires et intelligibles respectant
les critères de qualité, de crédibilité et d’adaptabilité à chaque situation et à
chaque groupe cible.
174
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Instruments et outils pour accompagner
la dynamique des systèmes de production agricole
Egalement, l’édition de supports techniques en Arabe, Amazigh, et Français
doit être de qualité pour faciliter l’accessibilité à l’information en adoptant des
formats et des types adaptés aux besoins des populations. D’où la nécessité
de renforcer le développement local par des personnes ressources telles que
les attachés de communication au niveau de chaque région à l’instar de
l’expérience de la recherche agronomique. Ces attachés de communication
jouent le rôle de courroie de transmission de l’information scientifique et
technique, de facilitateurs et d’animateurs.
Aujourd’hui, la société du savoir, de la connaissance, du progrès de
l’information est un pouvoir et une opportunité. La femme à côté de l’homme
doit être en mesure de lire un message technique, suivre le déroulement de
la scolarité des enfants, comprendre et suivre le contenu d’une ordonnance
médicale, etc.
2. Le renforcement des capacités des acteurs : une nécessité absolue
pour le maintien de la durabilité des systèmes
Pour améliorer les qualifications des différents intervenants dans les
domaines de la recherche- développement, la recherche-action, le transfert
de technologie et la formation des formateurs et des leaders des agriculteurs
du « pilier II », il y a lieu d’explorer les opportunités offertes par le Centre de
Ressources de Pillier II (CRPII) recemment créé88.
3. Les défis majeurs pour la mise en œuvre du CRPII
le Centre de Ressources de Pillier II de Plan Maroc Vert dédié à l’appui de
l’agriculture solidaire est devant un certain nombre de défis89, dont:
❐ la valorisation de la SAU et toutes les ressources végétales et pastorales de
l’espace agraire représentant l’essentiel des revenus des agriculteurs ;
❐ la valorisation des potentialités des terroirs à travers la diversification
des activités et l’accès au marché ;
❐ l’implication et la responsabilisation des acteurs et opérateurs locaux
dans le développement participatif
local et la préservation des
ressources naturelles;
❐ le suivi de comportements des agriculteurs face aux changements
climatiques
et
préconisation
des
solutions
et
mesures
d’accompagnement ;
❐ le développement d’une bonne coordination et synergie entres les
différents programmes et projets au niveau de terroir pour en tirer le
meilleur bénifice au profit des communautés rurales pauvres.
88 - Kradi C, Eléments de reflexion pour le développement du CRPII, INRA, Novembre 2011.
89- CRPII, Rapport intermédiaire, CGDA mars 2009
175
Instruments et outils pour accompagner
la dynamique des systèmes de production agricole
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
4. Les méthodes et les approches participatives : une obligation
pour maîtriser les perceptions des ruraux (femmes et hommes) et la
planification de la recherche - développement
Les méthodes de diagnostic rapides et participatives doivent être également
bien maitrisées parce qu’elles sont sources d’informations qualitatives et
quantitatives et d’inspiration pour les chercheurs. Etant donné qu’on s’intéresse
à des écosystèmes complexes et fragiles avec forte intégration « agriculture-élevage-ressources naturelles », la méthodologie envisagée doit combiner
impérativement les trois dimensions suivantes :
❐ Systémique : un ensemble d’éléments en interaction organisés et reliés
entre eux pour atteindre un objectif donné (Bourgeois A. 1983) ;
❐ Filière : une chaîne d’activités constituée d’anneaux allant de l’amont
à l’aval de l’exploitation agricole ;
❐ Aménagement de territoire : prise en compte des points forts et points
faibles dans la gestion et l’organisation du territoire national en vue de
la durabilité des systèmes de production.
En définitive, l’approche participative doit s’insérer dans une vision globale
de développement provoquant de l’auto-analyse et de l’autocritique
par les ruraux eux-mêmes de la situation d’agriculture au niveau local.
L’approche participative est également une approche qui doit faciliter la
définition des objectifs, des priorités et leur mise en œuvre. Bien entendu, le
chercheur-développeur à son mot à dire dans la formulation des décisions
finales. Le développement participatif au niveau local, doit-être considéré, dans
le cadre des Plans Agricoles Régionaux , comme un processus de renforcement
de l’autonomisation des ruraux , c’est-à-dire, plus de renforcement des pouvoirs
des ruraux en termes de gestion des terroirs et réalisation des objectifs de
développement durable.
5. La veille technologique et informationnelle
Mettre en place une démarche de veille technologique et informationnelle
afin de suivre les évolutions de l’environnement technique et technologique,
socio-économique et environnemental est très souhaitable. C’est un appui
extrêmement important à la recherche–développement en particulier et la
mise en œuvre du Plan Maroc Vert. Dans ce sens, des économies importantes
pourront être réalisées en adaptant les acquis d’autres pays et régions du monde
présentant des conditions similaires au Maroc, d’où les fonctions suivantes :
❐ Observer l’environnement (signaler les publications récentes dans un
domaine précis et les nouvelles manifestations) ;
❐ Détecter le plutôt possible les informations ;
176
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Instruments et outils pour accompagner
la dynamique des systèmes de production agricole
❐ Analyser et filtrer les informations qui risquent d’affecter la mise en œuvre
de diverses composantes de la stratégie de l’entreprise ;
❐ Assurer la diffusion sélective de l’information.
On doit être bien outillé en termes de veille technologique et informationnelle
pour bien servir la demande et disposer de bases de données actualisées sur les
besoins prioritaires spécifiques à chaque agro-système, aux types d’exploitations
agricoles. La veille technologique consiste à s’informer de façon systématique
sur les technologies les plus récentes ainsi que l’évolution de l’environnement
scientifique, technique, agro-industriel pouvant servir l’agriculture marocaine.
La cellule qui s’en occupe doit s’informer régulièrement sur les innovations
technologiques produites par la recherche nationale, régionale et internationale
et veiller à leur étude, adaptation et diffusion. Cette activité met en œuvre
des techniques d’acquisition, de stockage et d’analyse d’informations et leur
distribution automatique aux différents acteurs concernées de l’entreprise sous
forme de revue de presse ou communiqué de presse via les outils des nouvelles
technologies de l’information.
La veille technologique fait partie des activités préparant un transfert de
technologie en détectant le plus tôt possible l’information et l’analyser. Car,
être à l’écoute et suivre tout ce qui se passe au niveau de la conjoncture
agro-socio-économique et écologique nationale et internationale est une
option pour la mise à jour des connaissances dans le domaine de la recherche
- développement. Au niveau de l’INRA, on est au début, puisque la veille
informationnelle mise en place se limite aujourd’hui à l’information électronique
ayant trait à l’agriculture marocaine. Cette revue de la presse électronique
hebdomadaire est diffusée aux chercheurs et aux structures du MAPM par
Internet et intranet. On doit passer à une recherche plus pointue pour être
informé sur les innovations et les percées scientifiques dans le domaine de la
recherche - développement à l’échelon national (agriculteur innovateur) et
mondial. Ceci aidera sans nul doute les chercheurs-développeurs à tester les
gammes des solutions aux problèmes posés par les agriculteurs en milieu réel.
Il est temps donc de mettre en place une démarche de veille afin de suivre
les évolutions de l’environnement de l’agriculture par la création de dossier de
veille spécifique à chaque thème (blé dur, blé tendre, orge, viande caprine,
palmier dattier, olivier… et par l’observation de l’évolution de la science en
signalant les publications récentes ayant traits aux percées scientifiques et
techniques majeures réalisées (amélioration génétique, biotechnologie…).
A l’ère électronique, se suffire des moyens et méthodes traditionnels pour
repérer, récupérer et diffuser l’information n’est plus en mesure de satisfaire les
besoins en information surtout que les nouvelles technologies de l’information
et de la communication permettent d’offrir un meilleur service. En effet, elles
permettent de rendre l’information plus accessible et sa communication
177
Instruments et outils pour accompagner
la dynamique des systèmes de production agricole
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
plus aisée grâce à sa faculté d’abolir toutes les frontières géographiques et
les contraintes temporelles. Elles permettent aussi de réaliser des économies
importantes en dépenses (courrier traditionnel, téléphone, frais de production
de documents…) et en temps.
Enfin, impacter les résultats des programmes d’action selon des indicateurs
et critères d’évaluation permet une meilleure orientation et réajustement de
ces programmes.
6. Renforcement de la liaison Recherche –Conseil Agricole : Une voie
sûre et rapide pour répondre à la demande et besoins accrus des
agriculteurs
Il est important de noter que la maitrise du processus de transfert de
technologie et de connaissances aux utilisateurs des résultats de recherche
est un élément clef dans la chaine de développement de l’innovation. Ceci
requiert un système de Conseil – Agricole fluide et professionnel en mesure
d’accompagner les Plans Agricoles Régionaux en l’occurrence ceux se
rapportant à l’agriculture solidaire « Pilier II du Plan Maroc Vert » qui a besoin de
plus d’appui aujourd’hui plus que jamais.
Il est tout à fait raisonnable, à notre sens, d’orienter les programmes de conseil
agricole et transfert de technologies pour l’agriculture solidaire (petite agriculture
familiale) vers des actions conciliant le développement socio-économique et
la gestion des ressources naturelles. Il nous emble, que c’est la seule piste à
privilégier parce que bon nombre de ruraux, surtout en zones de montagne,
qui ont désespérément besoins d’infrastructures de bases (route, hôpital, école,
électricité, eau potable…) donnent des signes claires de dégout et d’aversion
à continuer à fournir des efforts pour la préservation et entretien du milieu qui
à leurs yeux n’apportent pas d’avantages individuelles et continuent à vivre
dans la pauvreté. D’où le rôle du conseiller agricole qui doit-être un catalyseur /
facilitateur dans le processus développement et bien outillé, en l’occurrence, en
méthodes de communication et également bien informer de l’environnement
socio-économique, technique et écologique des agriculteurs. Ces derniers
veulent un appui tangible des structures de développement au niveau régional
selon des programmes d’action ciblée avec un impact positif sur leurs familles et
leurs exploitations agricoles.
178
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Instruments et outils pour accompagner
la dynamique des systèmes de production agricole
Conclusion du chapitreV
La problématique de la communication est en grande partie expliquée par
les insuffisances décelées au niveau de la liaison Recherche et Transfert de
Technologie/Conseil Agricole et des mécanismes de Transfert de Technologie.
Cette carence explique la raison pour laquelle les résultats de recherche ne sont
pas suffisamment connus par le grand public en général et par les agriculteurs
en particulier. Les résultats parviennent difficilement aux producteurs.
L’expérience de l’INRA a montré que l’organisation et la gestion de
l’interface Recherche-Transfert de Technologies est le meilleur moyen de
renforcer la liaison avec les utilisateurs des résultats de recherche dans un
cadre global de communication combinant les techniques de communication
traditionnelles et les outils offerts par les nouvelles technologies de l’Information
et ce, pour toucher les différents groupes cibles (petits et grands agriculteurs,
agro-industriels, chercheurs, développeurs, vulgarisateurs, décideurs,...).
En fait les institutions de recherche et les agents de développement ont
pour défi de renforcer leurs capacités de communication afin de faciliter
l’interaction efficace et efficiente entre les chercheurs, les agents de Transfert
de Technologies/Conseillers Agricoles et les agriculteurs90.
Aujourd’hui, le contexte politique, institutionnel et socio-économique requiert
une vision claire en matière de Communication et Transfert de Technologies. Tout
l’espoir est basé sur les résultats de l’étude stratégique du système nationl de la
recherche et de la formation supérieure agricoles en termes d'organisation, de
gestion, et aussi sur l’institutionnalisation et la valorisation du métier du « Conseil
Agricole » dans le cadre du futur Office National du Conseil Agricole (ONCA).
Ce dernier devrait être doté de compétances qualifiées et convenebles pour
être en mesures de répondre à la demande des agriculteurs en conseil et en
technologie et aussi, répondre aux éxigences et objectifs du Plan Maroc Vert.
90 - Le programme scientifique du SIAM 2012 est articulé autour du thème : Recherche-InnovationConseil. Il a pour objectif d’apporter de nouveaux éclaircisesments liés à la mise en œuvre de la nouvelle
stratégie du Conseil Agricole avec l’appui de l’enseignement agricole, la recherche et la profession dans
le cadre du Plan Maroc Vert. MAPM/DEFR, Février 2012
179
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Conclusion générale
la recherche sur les systèmes de production agricole est un appui
incontournable au développement de la petite agriculture/ Agriculture solidaire
(Pilier II du Plan Maroc Vert).
Les débats sur le devenir de l’agriculture dans l’ère des changements
climatiques, de sécurité alimentaire, de droit à la nourriture en quantité et qualité
ne peuvent être fructueux qu’à travers la compréhension du fonctionnement
des systèmes de production agricole dans leurs environnements technique,
socio-économique et environnemental.
L’objectif du Plan Maroc Vert visant la professionnalisation de la petite
agriculture en transformant un million d’exploitation en petites unités de
production économiquement viables, orientée vers le marché, est un objectif
réalisable, pourvu qu’on œuvre pour préserver les spécificités des exploitations
agricoles et d’appuyer les pratiques locales et modes de gestion traditionnels/
ancestraux, qui constituent une richesse pour l’agriculture marocaine par
leurs diversités de production. Dans ce sens, le rapprochement du chercheur,
de l’enseignant-chercheur, du conseiller agricole - développeur et des
professionnels est déterminant pour aider les petits agriculteurs à améliorer leurs
conditions de vie en les accompagnant pour mieux valoriser leurs productions,
en tirer profit et se protéger des griffes de la globalisation. Ce rapprochement
doit donc se faire dans un cadre de concertation et de compréhension autour
des réalités des systèmes de production et de réalités locales.
La grande question qui demeure posée est comment opérationnaliser une
stratégie et comment la mettre en œuvre et la pérenniser. Car, on peut disposer
d’une bonne stratégie de développement telle que le Plan Maroc Vert, mais
sans approches et sans outils appropriés et surtout sans conviction et avec un
manque de citoyenneté et de solidarité des acteurs et des opérateurs locaux
et régionaux, les objectifs seront difficilement atteints.
La régionalisation est un chantier extrêmement décisif pour le
développement rural et agricole du Maroc. Elle est conçue de manière à ce
que chaque région profite de ses atouts et de ses potentialités avec un esprit
de solidarité et complémentarité entre les régions et de bonne gouvernance.
La reconnaissance de l’agriculture solidaire « Pilier II » par le gouvernement
marocain est une reconnaissance des aspirations des agriculteurs démunis et
de leurs efforts dans la production des produits de terroir et des externalités
180
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Conclusion générale
paysagères favorables à l’écotourisme. De plus, la deuxième phase de l’INDH
lancée par S.M. le Roi Mohamed VI à Oujda le 4 juin 2011 va également dans cet
esprit pour améliorer les revenus et les moyens d’existences des ménages ruraux.
Le rôle de la femme et son intégration dans le processus de développement est
une composante essentielle de ces stratégies.
La nouvelle constitution du Royaume du Maroc (1er juillet 2011) ouvre de
nouvelles perspectives pour un développement durable, équitable, profitant à
toutes les catégories des agriculteurs. La place de la recherche et la science
est pour la première fois constitutionnalisée. L’objectif est de mettre à niveau
le Maroc en termes de production de connaissance et technologies et offrir
un cadre approprié aux jeunes pour exprimer leurs génies par la créativité et
le savoir. C’est la seule option la plus sûre pour la création des richesses et par
conséquent de l'emploi.
La recherche agronomique dispose aujourd’hui d’outils et d’une expertise
dans les domaines de la Recherche - Développement et de la production des
technologies et connaissances à valoriser dans le cadre des Plans Agricoles
Régionaux / Plan Maroc Vert, de l’Initiative de Développement Humain et
tout autre chantier ayant trait au développement durable de l’agriculture
marocaine.
La question des changements climatiques est sérieusement posée et
menace la durabilité des systèmes de production agricoles. Les projections
climatiques, réalisées au Maroc, montrent que l’aridité va progressivement
augmenter à cause de la régression de la pluviométrie et l’augmentation de
la température à 3°C, et peut même atteindre 5°C dans les zones orientales
et montagneuses à l’horizon 208091. Dans ce sens, le savoir et le progrès
technologique demeurent la meilleure option pour atténuer ces effets sur la
petite agriculture déjà vulnérable.
le Maroc, à travers la recherche agronomique, dispose d’une gamme
de technologies efficaces qui méritent d’être améliorées et mieux valorisées
telles que : les nouvelles variétés du blé tendre permettant un gain en rendement
annuel d’un ½ ql/ha si l’agriculteur respecte l’itinéraire technique proposé92;
la productivité de l’eau estimée à 22kg/mm (soit une économie potentielle
d’eau de 2,27mm/an) pour les nouvelles variétés dans les zones à pluviométrie
défavorable93, la technique du semis direct, la récolte de l’eau, l’irrigation
d’appoint, les cartes de vocation agricoles et les systèmes d’alertes et de
prévision de récoltes.
91 - Balaghi R. et al, le progrès technologique : une option incontournable pour adapter l’agriculture
marocaine au changement climatique – document non publié ; 4 p.
92 - Jlibene M., 2009. options génétiques d’adaptation du blé tendre au changement climatique. Prix
Hassan II pour l’innovation et la recherche, édition 2009 ; 47p.
93 - Idem que 91.
181
Conclusion générale
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Au fait, nous sommes aujourd’hui devant une situation où les changements
climatiques n’épargnent aucune partie du globe terrestre. Les experts estiment
qu’il est temps de penser non seulement à la gestion de la rareté des intrants
« exemple de la pénurie d’eau en cas de sécheresse » mais aussi être capable
de gérer l’excès « cas de l’eau en bonne année climatique ». La recherche
scientifique peut aider par des outils, approches et technologies à rationnaliser
et optimiser l’utilisation des intrants en période de rareté et/ou excès et aussi
peut largement aider à produire plus sur des petites espaces d’une façon
durable.
Le renforcement de la recherche scientifique et technique est la clef de
réussite pour toute politique de développement et de création de richesses
à travers une économie agricole compétitive. L’avenir du Maroc est lié à
son positionnement sur les nouveaux créneaux porteurs de recherche et de
recherche - développement tels que : la biotechnologie et l’amélioration
génétique, l’environnement et le développement durable et la technologie
de l’information pour la diffusion des résultats de recherche...
Notons enfin que le thème abordé dans ce livre est très vaste et complexe.
Nous nous sommes persuadés qu’au fur et à mesure de sa lecture avec recul,
nous nous rendions compte qu’il y a encore des aspects à approfondir. C’est la
difficulté majeure rencontrée dans la rédaction de ce livre qui constitue à notre
sens une plate forme de discussion sur la problématique de développement
durable des systèmes de production agricole en particulier. Cet ouvrage peut
être enrichi au fil du temps par toutes les personnes intéressées par la recherche
sur les systèmes de production agricole et le partage de nouvelles voies en
faveur d’un développement social, économique et environnemental durable
et équitable des communautés rurales démunies.
182
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Liste bibliographique
Liste bibliographique
◆ Acherkouk M., M. Boughlala, S. Kaci, N. Omeiri, C. Onana et S. R. Rakotson :
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◆ Akesbi N., Le Plan Maroc Vert : une analyse critique, questions d’économie
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◆ Andriamainty Fils J. M., R. Djaddou, S. Nait Merzoug et V. T. Nguyen : Analyse
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◆ Balaghi R. et al, Le progrès technologique : une option incontournable
pour adapter l’agriculture marocaine au changement climatique –
document non publié ; 4 p.
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Liste bibliographique
les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
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◆ KRADI C et al, Le Plan Maroc Vert, une opportunité pour la recherche et
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◆ Kradi C., INRA Compte rendu de l’atelier sur le transfert de technologies
du 09 juin 2001, CRRA de Marrakech, 2001.
◆ Kradi C. INRA, Compte rendu de la table ronde sur la Recherche/
Développement et le transfert de technologies du 07 octobre 2004
◆ Kradi C. et al, Vision, communication et gestion de l’information, 2008
(non publié).
◆ KRADI C. et al, Systèmes de production des légumineuses alimentaires
dans la région de Taounate, INRA – GTZ, avril 1999.
◆ Moha Khettouch et al, Les groupements d’intérêt scientifique,
technologique et économique, INRA, 1993.
◆ Maâtougui A., et al, les Pâturages Steppiques de l’Oriental Marocain, juin
2011.
◆ Mettrick, Hal, Recherche agricole orientée vers le développement : le
cours ICRA, Centre International pour la Recherche Agricole orientée
vers le Développement, Wageningen, 1994, 288 pages.
◆ Rapport 50 ans de développement humain, perspectives 2025,
RDH-synthèse, janvier 2006, p. 28 et 37.
◆ Situation de l’agriculture marocaine n°, MAPM 2010.
◆ Stratégie nouvelle de vulgarisation agricole à l’horizon 2020, Exposé DEFR
/ MAPM Mars 2011.
◆ Toon Dofoer et al, Curriculum d’apprentissage participatif et
recherche-action (APRA), manuel de facilitateur, CTA, IFDC, IFDC, 2004.
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les éco-systèmes
L’agriculture solidaire dans
fragiles au Maroc
Glossaire
Glossaire
Agdal :
Alouana :
Bayoud:
Beldi :
Bour :
Canoun :
D’man :
Douar :
Jellaba :
Jmaâ :
Parcours collectifs en zones de montagnes
Huile d’olive verte trituré selon un processus traditionnel
Maladie du palmier dattier (Fusarium oxysporum sp. albedinis)
Produit local
Agriculture pluviale
un couple avec des enfants ( en référence à la cuisine)
Race locale ovine des oasis
Village
Burnous en laine
Comité des sages au sein du Douar constitué par un groupe
d’agriculteurs
Matmoura : Technique de conservation dans le sous sol à une profondeur de 1 à 3
mètres (Lieu de stockage)
Mergued : Lieu de campement des pasteurs nomades
Mejhoul :
Variété de Datte noble
Souak :
Produit cosmétique traditionnel à base d’écorce des racines
du noyer
Sardi :
Race ovine
Petit cours d’eau
Seguia :
Souk :
Marché
Touiza :
Forme de collaboration entre les agriculteurs du Douar pour la
réalisation de certaines activités agricoles (labour...)
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