UNE RENCONTRE SANS TABOU
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UNE RENCONTRE SANS TABOU
R o u e n Martin Hirsch au Lycée Val de Seine de Grand Quevilly leur attente. Ce sont souvent ces personnes que les médias vont nous montrer, au moment des grands froids, dormant dans des cartons en ville ou dans des cabanes en lisière de forêt, et qui restent dehors, en refusant les places dans des foyers où ils seraient protégés. La plupart du temps, ce sont des personnes très seules et très « perdues ». Globules : penser qu’en 2009, il y ait encore des gens qui aient froid ou faim cela est sidérant. Cela nous choque… Marc Vigier : c’est inacceptable, je suis d’accord. Pourtant, la situation est plus complexe qu’elle n’y paraît. Il existe des gens qui ont des parcours d’errance et pour lesquels la situation financière n’est pas forcément le nœud du problème. On est en face de personnes qui ont de grandes carences affectives et des problématiques psychologiques plus ou moins importantes. Globules : quels sont les facteurs qui entraînent plus de précarité chez les jeunes ? Y a t-il des jeunes diplômés qui viennent demander de l’aide ? Comment peuvent-ils’en sortir ? Marc Vigier : il faut compter sur du long terme, et il y a des jeunes qui s’en sortent. Un diplôme reste tout de même un atout. Pour venir en aide à ces personnes et à ces jeunes il y a les associations mais aujourd’hui, la précarité touche beaucoup de monde parmi lesquels les associations comme la nôtre, dont les subventions ne suffisent pas à couvrir les dépenses. UNE RENCONTRE SANS TABOU Dans le cadre d’un travail d’atelier sur le thème de la pauvreté, une vingtaine d’élèves du Lycée Val de Seine de Grand Quevilly ont rencontré et interviewé Martin Hirsch (Haut Commissaire aux Solidarités Actives contre la pauvreté). Ce vendredi 30 janvier 2009, en présence d’un public nombreux, du Préfet de Région et du Recteur de l’Académie, sous l’œil des gardes du corps, ils ont tour à tour, animé, questionné et relancé le débat comme de véritables professionnels. Des questions directes et sans tabous : votre vision de la pauvreté a-t-elle évolué ? Les média ont-ils un rôle sur cette vision ? La différence entre une personne pauvre et une personne exclue ? Peut-on être dans un gouvernement de droite et faire une politique de gauche ? Autant de réponses pour expliquer que la pauvreté a de nombreux visages, qu’elle peut conduire à une exclusion totale de la part d’une majorité de la population, que le rôle des média n’est pas neutre et que pour Martin Hirsch, le Revenu de Solidarité Active, qui est actuellement expérimenté sur la commune de Louviers dans l’Eure, peut être une réponse, ou tout du moins, soulager le quotidien : « Je ne prétends pas résoudre le problème de la précarité avec le RSA mais faire que la situation soit moins pénible pour les gens. » Globules : que pressentez-vous de l’avenir ? Marc Vigier : fondamentalement, je suis optimiste. Mais je ne suis pas devin et je me pose des questions sur ma citoyenneté et sur ce qui est possible. Le réalisme m’incite à un certain pessimisme… La fraternité, l’entraide me paraissent aujourd’hui nécessaires et indispensables. Contact Propos recueillis par Raouf Benamar, Jimmy Blin, Marie Carnio, Wided Kakimi, Daniel Hadwiger, Vanina Esdras et Rebecca Vasseur – Article « Globules » émission « Y’a du Glob dans l’air sur HDR » à déguster le dernier mercredi du mois sur la radio HDR, 99.1 FM Le Carrefour des Solidarités, 49, rue des Augustins 76000 Rouen Tél : 02 35 89 52 44 L’atelier de Sciences-Politiques, ouvert aux élèves de 1ère et de terminales, est un atelier de travail animé par quatre enseignants (M. Bérenguer, M. Rigaud , Mme Panelet, M. Lafontaine) pour nous aider à préparer le concours d’entrée à l’Institut d’Etudes Politiques de Paris. On peut y débattre sur des sujets variés, donner son avis et développer une plus grande ouverture d’esprit. Le thème choisit pour cette année est la pauvreté. Dans un premier temps, on a discuté du thème et fait des recherches documentaires pour la définir : recherches de textes, d’images, de chiffres, etc. Peu à peu le thème de l’image de la pauvreté dans les média et dans les discours politiques s’est dégagé. On a rencontré des représentants d’associations et de municipalité pour nous éclairer : Damien Anne, un travailleur social qui travaille au Foyer de l’Abbé Bazire de l’Oeuvre Hospitalière de Nuit Mme Rousseau, directrice du SHMA, une association qui accueille des personnes Sans Domicile Fixe du quartier de la Croix de Pierre de Rouen Laurent Fussien, en charge de l’insertion à la Mairie de Malaunay Nos professeurs ont également contacté le cabinet de Martin Hirsch, Haut Commissaire aux Solidarités Actives contre la pauvreté, (et depuis peu Haut Commissaire à la Jeunesse) pour lui proposer une rencontre. Nous avons tous été agréablement surpris qu’il réponde positivement à notre demande. Pour mener cette interview, nous avons travaillé sur 4 thèmes : son parcours personnel et professionnel (les écoles où il a été formé, son engagement politique, son travail à EMMAÜS) / sa vision de la pauvreté / le Revenu de Solidarité Active (RSA) / ses projets futurs. Cette rencontre a été une vraie récompense à notre travail. Il s’est montré accessible et nous a aidé à être vraiment à l’aise. Plusieurs éléments nous ont surpris. Il n’appartient à aucun parti politique et à aucune religion, alors que venant d’EMMAÜS , nous aurions pu croire le contraire. Même s’il a un salaire élevé, il a demandé à ce qu’il soit baissé pour revenir à quelque chose de plus raisonnable. C’est une personne qui a un parcours original avec des expériences très différentes les unes des autres. Nous avons appris beaucoup sur le RSA : c’est un complément de revenu qui lui a été inspiré par son passage chez EMMAÜS. De manière générale, le travail en atelier nous a montré autre chose que les clichés habituels sur la pauvreté. Nous avons découvert une autre vision des SDF (Sans Domicile Fixe). On les voyait un peu comme des fantômes, on osait à peine les regarder et ce travail a changé notre façon de les voir… Les médias nous imposent des images de la pauvreté qui cherchent à émouvoir en nous parlant beaucoup d’eux pendant les périodes de grand froid et pas du tout pendant l’été, alors que c’est aussi une période très difficile pour eux. On a appris pourquoi certains ne veulent pas aller dans les foyers d’hébergement (la violence, les vols…), quelles peuvent être les causes de la précarité : les ruptures familiales, sociales… et l’importance du suivi pour reprendre goût à la vie. Ce que l’on retient de ce travail, c’est qu’il faut éviter les clichés, les préjugés et ne pas se fier aux apparences. C’est une succession de ruptures qui fait que l’on se retrouve vite sans rien, que cela peut nous arriver aussi et que ça va très vite. Il ne s’agit pas d’une question de niveau d’études ni d’intelligence. Cela n’a rien à voir. Du jour au lendemain, nous pouvons tous nous retrouver à la rue. Aline Beaufils, Amandine Rochon-Hurpy, Anaïs Demeulle, Anastasia, Chloé Guillouët, Cindy Varin, Elise, Ghislain Souday, Harmonie Gautier, Jessica Liron, Maxime & Maxime, Nawelle Bezzekhami, Rachid. Rachidie Ntona, Todjim, Yacin, élèves au Lycée Val de Seine de Grand Quevilly 9 9