Le guide du benchmarking
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Le guide du benchmarking
Jacques ALEXANDRE - Marc BAZINET Isabelle BONNEAU-BLAIRE - Guy CHADEBEC Claude CORNEC - Jean-Claude COUSIN Jean DURAND - Jacques GAUTRON - Bernard HAVRET Le guide du benchmarking Préface Alexandre Jardin © Éditions d’Organisation, 2003 ISBN : 2-7081-2922-8 Alliance des consultants industriels francophones - http://www.acifr.org Chapitre 4 Les différents types de benchmarking Question 2 Quels sont les différents types de benchmarking ? ✔ ❏ ✔ ❏ ❏ A : Interne – concurrentiel – générique B : Produit – processus – fonction C : Local – national – international 5P 2P Commentaires : Faire du benchmarking, consiste à rechercher les meilleures pratiques, quel que soit le lieu où elles sont exercées ; la dimension géographique n’est pas une caractéristique significative. Si le domaine d’activités investigué est le même que celui de son entreprise, il s’agit de benchmarking interne ou concurrentiel ; dans le cas contraire, il s’agit de benchmarking générique. Le terme « processus » étant synonyme de pratique, la réponse B est partiellement juste. Alliance des consultants industriels francophones - http://www.acifr.org Les différents types de benchmarking 37 DANS SES PREMIERS ÉCRITS, Robert C. Camp distinguait quatre types de benchmarking : ■ interne, ■ concurrentiel, ■ fonctionnel, ■ générique. Les deux derniers ont aujourd'hui tendance à n'en faire plus qu'un, sachant toutefois qu'on pourrait aussi par expérience accepter une autre segmentation que nous verrons en conclusion de cet exposé. Pour le premier type, aucun doute, il subsiste dans tous les cas de figures. Il est utilisé chaque fois qu'une entreprise peut identifier des processus équivalents sur plusieurs sites, régions, pays ou continents. Il leur est alors possible de comparer les pratiques en usage dans ces différents lieux d'activité sans aller voir ce qui se passe ailleurs. Cette solution présente des avantages et des limites. L'avantage est caractérisé par une plus grande facilité à comparer les résultats, puisqu'ils s'appliquent au même secteur, à lier les contacts et à réaliser les visites. L'adaptation est également facilitée, puisqu'elle porte sur le même métier. En revanche, ce type de benchmarking ne débouche en général pas sur des pratiques très innovantes, puisqu'elles se placent dans un contexte de culture d'entreprise avec une mission, des projets et des objectifs communs. De plus, très souvent, les mutations et promotions internes amènent les personnels à transporter leurs habitudes d'un lieu de travail à l'autre. C’est le cas par exemple d’entreprises comme Xerox, Texas Instruments, Schindler, France Télécom, EDF Centre de Production Nucléaire d’Électricité. Alliance des consultants industriels francophones - http://www.acifr.org © Éditions d’Organisation Le benchmarking interne 38 Le guide du benchmarking Le benchmarking concurrentiel Contrairement à ce que l’on pense généralement, ce type de benchmarking est très largement pratiqué dans certains secteurs de l'industrie. Il ne porte évidemment pas sur les processus les plus stratégiques en termes de place sur le marché. Mais il est très souvent utilisé pour tout ce qui touche à la productivité, aux coûts administratifs et aux relations avec les sous-traitants, qui sont souvent communs. L'avantage de choisir ce type de benchmarking réside dans la facilité de partir d'éléments de mesure finale facilement comparables, puisque sur le même secteur. De même que pour le benchmarking interne, l'adaptation est facilitée par la similitude de pratiques. Il est cependant assez difficile de pratiquer le vrai benchmarking concurrentiel, qui trouve toujours ses limites dans la confidentialité. Ce qu'on appelle parfois benchmarking concurrentiel n'en est pas vraiment si les concurrents n'opèrent pas sur la même zone d'achalandage, ou si pour un même secteur donné, ils ne s’adressent pas aux mêmes utilisateurs finals. © Éditions d’Organisation Exemples de vrai benchmarking concurrentiel : Toyota et BMW, Sun Microsystems avec Hewlett Packard et IBM. Exemples de faux benchmarking concurrentiel : RATP avec les autres transporteurs urbains des grandes métropoles, informatique de gestion avec informatique médicale. Le benchmarking fonctionnel Dans un même secteur, des entreprises, concurrentes ou non, comparent leurs processus de support (administration, gestion des ressources humaines, logistique, etc.) et adaptent les idées capables d'améliorer leur compétitivité. Alliance des consultants industriels francophones - http://www.acifr.org Les différents types de benchmarking 39 Les avantages sont du même ordre que ceux que l'on trouve en pratiquant le benchmarking interne : facilité de relation et de comparaison, adaptation relativement simple. Les limites sont celles du champ d'application, qui ne porte pas sur des processus stratégiques, et, du manque de caractère innovant du fait d'une culture liée au secteur de l'industrie. On trouve de nombreux exemples dans les domaines de la chimie/pharmacie, de l'énergie, de l'automobile, de l'informatique et des télécommunications. Le benchmarking générique Les exemples, nombreux dans ce type de benchmarking, démontrent une grande capacité d'ouverture vers l'extérieur des entreprises qui le pratiquent : Schneider Electrique, Xerox, Faurecia, Auchan, Embraer (Brésil et France), Crédit Lyonnais, Crédit du Nord, Renault, Bull, Siemens, Toshiba, etc. Il est intéressant de noter que la plupart des entreprises citées pratiquent aussi le benchmarking interne et dans leur secteur. Cela signifie très clairement que l'outil doit être considéré sous tous ses aspects, si l’on veut en tirer le meilleur bénéfice. Alliance des consultants industriels francophones - http://www.acifr.org © Éditions d’Organisation C'est sans aucun doute le type de benchmarking qui fait toute sa valeur à l'outil. C'est celui qui engage à comparer ses pratiques avec celles de l’organisation d'un secteur totalement différent. On peut ainsi trouver chez le partenaire des pratiques qui sont d'autant meilleures qu'elles sont la principale raison de sa performance. Les avantages sont multiples : partenariat sans contrainte de confidentialité, source d'idées innovantes, relations pérennes car basées sur un besoin réciproque et permanent d'informations. Les quelques difficultés qui subsistent sont liées à une plus grande difficulté à adapter des pratiques qui viennent d'un secteur différent. 40 Le guide du benchmarking © Éditions d’Organisation Il n'a sans doute pas échappé au lecteur que les frontières entre ces différents types de benchmarking ne sont pas évidentes, d'où l'idée aujourd'hui de ne plus considérer que trois types : ■ le benchmarking interne, qui permet parfois de «se faire la main » et de mettre facilement en pratique l'outil, avant d'aller chercher ailleurs les meilleures pratiques. ■ le benchmarking concurrentiel, entre des entreprises franchement concurrentes mais soucieuses d'améliorer leurs processus au bénéfice de leurs clients ou face à d'autres concurrents. ■ le benchmarking générique, qui permet d'aller chercher des pratiques qui seront d'autant meilleures qu'elles viendront de secteurs plus différents. Alliance des consultants industriels francophones - http://www.acifr.org Jacques ALEXANDRE - Marc BAZINET Isabelle BONNEAU-BLAIRE - Guy CHADEBEC Claude CORNEC - Jean-Claude COUSIN Jean DURAND - Jacques GAUTRON - Bernard HAVRET Le guide du benchmarking Préface Alexandre Jardin © Éditions d’Organisation, 2003 ISBN : 2-7081-2922-8 Alliance des consultants industriels francophones - http://www.acifr.org Chapitre 5 Mon entreprise est-elle prête ? Question 3 Quels sont les principales conditions à remplir avant d’envisager un benchmarking ? ✔ ❏ ❏ ✔ ❏ ✔ ❏ A : Avoir une équipe motivée et disposée à mettre 5 P en œuvre des pratiques nouvelles B : Obtenir le support de sa direction 2P C : Bien connaître les résultats de son entreprise D : Avoir évalué et mesuré les processus clés de 3 P son entreprise Commentaires : Il est, bien sûr, important de disposer d’une équipe motivée et disponible. Mais il est essentiel que l’entreprise soit prête à accepter les pratiques nouvelles. Nous recommandons de commencer par un processus dont le fonctionnement ne satisfait pas la direction. Il est en effet très important de « bien se connaître » avant de se comparer à plus performant que soi. On se contentera cependant d’évaluer les processus clés de son entreprise, pour éviter de s’engager dans une analyse exhaustive des processus, qui serait longue et peu efficace. C’est ainsi que nous aurons, quand cela est nécessaire, un support efficace de la direction. Alliance des consultants industriels francophones - http://www.acifr.org Mon entreprise est-elle prête ? 43 UNE ENTREPRISE PRÊTE est une entreprise qui possède une équipe motivée et acquise au changement. Cette condition est primordiale. En fin de ce chapitre, un tableau permet d’auto-évaluer le niveau de préparation de l’entreprise. Puis, pour tirer un bénéfice optimum de cette ressource, l’équipe doit travailler sur le bon sujet, dans la bonne direction, d’où la nécessité de faire un choix judicieux du domaine, objet du benchmarking. Ce choix factuel suppose une bonne connaissance de soi-même grâce à une évaluation et une mesure des processus indispensables au succès de l’entreprise. Les indicateurs Toute mesure est associée à un indicateur. Dans ce contexte, un indicateur est la mesure objective d’un paramètre qui fournit des informations sur un processus ou un produit, ou plus généralement, sur un critère associé à une performance, à un projet. En plus de toutes les qualités que doit posséder une bonne mesure pour être utile (exactitude, précision, sensibilité), un indicateur doit satisfaire plusieurs conditions : Toute action, tout résultat peut être mesuré. Les opportunités d’indicateurs sont donc nombreuses et tentantes chez les inconditionnels de l’indice. Or, il ne faut absolument pas tomber dans ce travers : chaque individu, chaque fonction, chaque organisme doit faire un choix sévère en fonction de son domaine de responsabilités. Être facile à obtenir Un indicateur doit « couler de source », ce qui signifie que, pour le calculer, aucune mesure inhabituelle, aucune action spécifique, aucune recherche laborieuse, aucun calcul fastidieux ne sont nécessaires. Si telle n’est pas la situation, Alliance des consultants industriels francophones - http://www.acifr.org © Éditions d’Organisation Être important pour l’organisme 44 Le guide du benchmarking alors, ne l’adoptez pas. Un indicateur facile à mettre en œuvre est toujours disponible au moment voulu. Être facile à comprendre Un indicateur doit d’abord parler à son propriétaire et le renseigner sur son degré de réussite ou sur les causes des résultats obtenus, qu’ils soient positifs ou négatifs. Un indicateur qui ne parle qu’à une seule personne est peu utile. L’outil de communication ne renseignera pas chaque acteur concerné ou l’équipe dans son ensemble. © Éditions d’Organisation Être honnête Un indicateur peut ne traduire qu’une partie de la vérité, prêter à confusion, être équivoque, induire des comportements contraires à une démarche de progrès, être manipulable. Tous ces défauts sont à éliminer, sans exception, pour que l’indicateur soit réellement un outil de progrès, et non pas un outil de propagande qui masquerait des dysfonctionnements ou des contre-performances. Le monde change, nos clients changent, nous changeons, nos performances évoluent. De ce fait, l’indicateur est temporel. L’utilisateur d’indicateurs a donc l’obligation d’exploiter des informations en temps réel tout en prenant en compte les informations d’un passé récent. La volonté de se projeter vers un futur plus performant implique au minimum la connaissance de l’état actuel des lieux. Les caractéristiques d’un bon indicateur ont été largement détaillées car cet outil est essentiel à la réussite d’une étude de benchmarking. Son utilisation intervient à plusieurs étapes de la méthodologie. Il va, d’abord, être le moyen de nous renseigner objectivement sur notre performance par rapport aux autres et ainsi nous permettre de choisir le domaine ou le processus à traiter en priorité. Alliance des consultants industriels francophones - http://www.acifr.org Mon entreprise est-elle prête ? 45 Ensuite, la connaissance d’indicateurs équivalents et de leur valeur dans d’autres parties de l’entreprise, chez un concurrent, dans notre secteur industriel ou dans un secteur totalement différent, va nous orienter dans la recherche de partenaires pouvant nous aider à progresser. Le choix du partenaire est fondamental car il doit nous éviter de gaspiller des ressources avec un organisme qui en fin d’exercice se révélera être moins performant que nous. Cet indicateur nous offrira la possibilité de nous projeter dans le futur en étant le support d’objectifs mesurables. Enfin, l’indicateur sera le juge de paix qui témoignera soit de notre réussite, soit de notre échec dans l’utilisation du benchmarking. Mais son utilité ne s’arrête pas là ; au rythme du temps écoulé, il nous renseignera sur la pérennité de notre performance et sur notre positionnement parmi les meilleurs. Les qualités complémentaires En plus des conditions que doit remplir un bon indicateur à usage interne, son utilisation externe suppose des qualités complémentaires. Si nous utilisons des indicateurs trop spécifiques à notre activité et à notre processus il nous sera très difficile de les partager avec un autre organisme. Dans cette situation, l’éventail de nos partenaires potentiels se réduit, limitant ainsi nos chances de découvrir des processus aux performances exceptionnelles. La non-confidentialité Lors de l’exercice de benchmarking, l’indicateur sera un outil d’échange et d’étalonnage réciproque. Cette utilisation suppose que nos mesures de performance des processus Alliance des consultants industriels francophones - http://www.acifr.org © Éditions d’Organisation L’universalité 46 Le guide du benchmarking soient communiquées au partenaire, et vice versa, sans altération, pour obtenir un dialogue utile. © Éditions d’Organisation La comparabilité Des mesures analysées ne renseignent pas toujours sur le positionnement des performances d’une entreprise par rapport à celles d’une autre. Dans le cas de mesures directes, ce manque de visibilité est systématique si les entreprises sont de taille très différentes ou ont des activités sans rapport. Pour juger à bon escient, il est nécessaire de recourir à des mesures relatives. Ainsi, le niveau de retour matériel clientèle en tant que tel n’est d’aucune utilité dans une comparaison, alors que ce niveau de retour exprimé en pourcentage du chiffre d’affaires peut nous guider dans le choix d’un partenaire. Toutes ces conditions étant remplies, il reste encore un piège à éviter sans exception, sous peine de perdre tous les gains très substantiels d’un benchmarking et de générer beaucoup de frustrations à l’intérieur de l’entreprise : ne pas mélanger les choux et les carottes !!! En effet, même nom ne signifie pas obligatoirement même contenu ! Un exemple : le coût de la non qualité. Cet indicateur inclut, ou n'inclut pas selon les organismes, les pertes de rendement et de productivité, les coûts associés aux retouches, les amortissements des équipements, la quantification financière des pertes de temps, les coûts des locaux, les conséquences sur la clientèle… Comment faire pour ne pas mélanger des choux et des carottes ? Avant de finaliser le choix du partenaire, il faut prendre connaissance de la définition et du mode de calcul des indicateurs inventoriés pour pouvoir tirer les enseignements de réelles différences de performances. L’indicateur est donc un outil indispensable à l’équipe motivée pour atteindre pleinement ses objectifs et pérenniser son niveau de motivation. Alliance des consultants industriels francophones - http://www.acifr.org Mon entreprise est-elle prête ? 47 Auto-évaluation : mon entreprise est-elle prête ? Nous proposons au lecteur le simple exercice suivant afin de mesurer si son entreprise est prête à entreprendre un benchmarking. Ainsi, en plaçant le chiffre 1 en face de chaque question et dans la colonne appropriée selon que son entreprise est : complètement, partiellement, très peu ou pas du tout prête, et ensuite en multipliant le total de chaque colonne par le coefficient de 6 à 0, il obtiendra un total pondéré par colonne. Le résultat de l’addition des totaux pondérés est le score permettant de positionner l’entreprise. 1 - Les processus sont documentés avec des mesures pour en comprendre la performance 2 - Les collaborateurs connaissent les processus relatifs à leur propre travail 3 - Les interactions directes avec le client, les retours d’informations ou les enquêtes client influent sur les décisions produits ou services 4 - Les dysfonctionnements sont résolus en équipe 5 - Les collaborateurs démontrent par des mots et des actes qu’ils ont compris la mission, la vision et les valeurs de l’entreprise Alliance des consultants industriels francophones - http://www.acifr.org Pas du tout © Éditions d’Organisation Complètement Partiellement Très peu 48 Le guide du benchmarking Pas du tout Complètement Partiellement Très peu 6 - La direction donne les ressources et supporte activement les projets d’amélioration de la qualité 7 - L’entreprise démontre par des mots et par des actes que l’amélioration continue fait partie de sa culture 8 - L’engagement au changement s’articule autour d’une planification stratégique de l’entreprise TOTAL DE LA COLONNE COEFFICIENT 6 TOTAL PONDERE SCORE GLOBAL 4 2 0 © Éditions d’Organisation Interprétation des scores – de 34 à 48 : votre entreprise est prête ; – de 18 à 32 : votre entreprise doit compléter sa préparation ; – de 0 à 16 : votre entreprise n’est pas prête. Alliance des consultants industriels francophones - http://www.acifr.org Jacques ALEXANDRE - Marc BAZINET Isabelle BONNEAU-BLAIRE - Guy CHADEBEC Claude CORNEC - Jean-Claude COUSIN Jean DURAND - Jacques GAUTRON - Bernard HAVRET Le guide du benchmarking Préface Alexandre Jardin © Éditions d’Organisation, 2003 ISBN : 2-7081-2922-8 Alliance des consultants industriels francophones - http://www.acifr.org Chapitre 6 Les pièges du benchmarking Question 4 Comment démarrer correctement un benchmarking ? ✔ ❏ ❏ ✔ ❏ ❏ A : Analyser son environnement concurrentiel 5P B : Visiter un maximum de concurrents C : Etudier ses partenaires potentiels, évaluer leurs 3 P pratiques et les comparer aux siennes D : Rechercher des bonnes pratiques hors de son secteur d’activité Commentaires : La parfaite connaissance de son environnement concurrentiel est un préalable essentiel à toute démarche de benchmarking. Ce que l’entreprise recherche, c’est d’être meilleure que ses concurrents. Une analyse concurrentielle permet d’identifier le ou les processus que l’entreprise doit améliorer en priorité. Il sera souvent utile de rechercher de bonnes pratiques auprès de partenaires d’autres secteurs d’activité. A noter que le benchmarking concurrentiel est parfois plus difficile à réaliser en Europe qu’aux États-Unis, pour des raisons culturelles. Alliance des consultants industriels francophones - http://www.acifr.org Les pièges du benchmarking 51 POUR BIEN DÉMARRER UN BENCHMARKING, il faut tout d’abord identifier des partenaires potentiels qui semblent mettre en œuvre des pratiques performantes dans le domaine à améliorer. Une bonne connaissance de son environnement concurrentiel, incluant les points faibles et les points forts des différents acteurs du métier, facilitera grandement cette première identification. Dès que des pratiques supposées bonnes auront été identifiées, il faudra s’assurer qu’elles conduisent effectivement à des résultats d’un bon niveau par rapport à la concurrence sur le domaine précis. Enfin, il faudra vérifier que le partenaire potentiel obtient bien des performances notablement supérieures aux siennes sur un périmètre réellement comparable. Les indicateurs doivent être bien choisis et bien définis pour refléter le niveau réel de performance. On s’assurera qu’il n’existe pas de contrainte extérieure interdisant l’application de ces bonnes pratiques à sa propre entreprise. Ceci peut paraître facile mais nécessite de la rigueur et le respect d’un certain nombre de règles simples. Toute interprétation hâtive risque de conduire à des déboires et à un échec. L’histoire qui est arrivée à la société ED illustre bien ce risque. ED est un équipementier qui fournit des planches de bord à différents constructeurs européens. La société a été très critiquée par le plus important de ses clients qui a constaté, à la suite d’une mission d’étude, que ses prix d’achat en Europe étaient sensiblement plus élevés que ceux pratiqués sur le marché aux USA. Le client de ED lui a demandé de faire rapidement des propositions pour atteindre les prix du marché américain. Alliance des consultants industriels francophones - http://www.acifr.org © Éditions d’Organisation Les déboires de ED © Éditions d’Organisation 52 Le guide du benchmarking Ceci étant un enjeu essentiel pour la pérennité de l’entreprise face à sa concurrence internationale, la décision a été prise de lancer immédiatement une analyse. Tout d’abord il a été vérifié, en faisant appel à un consultant, que l’écart de prix signalé entre les deux marchés était réel. Les services techniques de ED ont ensuite analysé plusieurs produits américains et constaté que ceux-ci étaient parfois sensiblement différents des produits européens, mais que les prix des pièces de base étaient analogues et que l’écart de coût n’était pas lié à ces différences. Cette piste a donc été abandonnée et ED a décidé de se concentrer sur son procédé d’assemblage des planches. Une planche de bord est un ensemble complexe constitué d’un grand nombre de composants de domaines très variés comme la plasturgie, le thermique, l’électronique, et l’instrumentation, qui sont assemblés et testés dans des usines situées à proximité des sites des constructeurs. Cette opération d’assemblage demande de 60 à 180 minutes selon les modèles et constitue, avec la logistique d’approvisionnement et de livraison, l’essentiel du savoir-faire de fabrication de ED. Compte tenu de la complexité du procédé, il semble devoir présenter des opportunités d’économies significatives. Le directeur général a décidé d’utiliser une démarche de benchmarking pour optimiser ce procédé. Des contacts ont été pris avec des concurrents américains qui ont accepté de participer à l’expérience et une équipe ED a été constituée avec essentiellement des responsables de la production. Cette équipe a visité cinq usines de concurrents aux USA. Elle a déposé rapidement ses conclusions : les équipementiers du métier utilisent différentes techniques de collecte des pièces (des convoyeurs aux chariots filoguidés) et d’assemblage (travail en ligne ou en lots) mais ces différences ne génèrent pas d’écart significatif de coût. En revanche, elle a mis en évidence ce qui lui semblait être le point clé des écarts : l’importance de la main-d’œuvre indirecte dans les usines européennes. Elle a constaté que le pourcentage de maind’œuvre indirecte était de 15 % dans les usines visitées alors qu’il varie de 25 à 30 % en Europe. Cet écart expliquerait à lui seul la différence de prix constatée entre les deux marchés. L’équipe a donc été chargée d’étudier les « bonnes pratiques » et de les mettre en œuvre. Les résultats se sont avérés décevants : l’application de quelques idées intéressantes n’a permis que des gains minimes. Alliance des consultants industriels francophones - http://www.acifr.org Les détracteurs de l’opération de benchmarking se sont empressés de conclure que cela était prévisible et qu’il fallait bien admettre un échec de la méthode ! Cependant le problème subsistait et la situation devenait critique pour ED d’autant plus que le client, informé de l’état d’avancement de l’étude, avait repris le thème à son compte et réclamait des économies sur ce poste. Un nouveau groupe de travail incluant des responsables des méthodes, du contrôle de gestion et des ressources humaines a donc été chargé de reprendre l’étude. Après une enquête approfondie et, en particulier un examen des définitions de postes, ce groupe est arrivé à la conclusion que la notion de main-d’œuvre indirecte n’existait pas aux USA, comme en Europe : les ratios indiqués par les concurrents concernaient en fait uniquement les managers et les white collars, le reste du personnel de structure étant assimilé à de la main-d’œuvre directe. En effectuant une analyse précise des tâches le groupe a pu déterminer que les opérations étaient analogues sur les deux continents. Le premier groupe de travail était donc arrivé à une conclusion erronée et n’avait pas travaillé sur la bonne piste ! A partir de ces éléments une étude très détaillée a été entreprise et a mis en évidence un grand nombre de paramètres qui, ajoutés les uns aux autres, expliquent les écarts : – les produits européens sont légèrement différents ; – il y a plus de variantes en Europe ; – les délais de livraison sont plus courts ; – les exigences de qualité d’aspect sont supérieures ; – la réactivité des fournisseurs est sensiblement différente ; – les lois sociales n’autorisent pas la même flexibilité au niveau du personnel. Une discussion engagée avec le client a permis de faire évoluer certains de ces paramètres et de résorber une partie de l’écart de prix. Pour le reste, le client a apprécié le professionnalisme de ED et admis que ses exigences, liées en partie à la spécificité du marché européen, étaient différentes. Il a également pris conscience des conditions d’environnement différentes sur les deux continents, en particulier au niveau des lois sociales, et validé les prix de ED1. 1. Les « mésaventures de ED » est le récit d’une situation réelle. Seuls le nom de la société et son domaine d’activité ont été modifiés. Alliance des consultants industriels francophones - http://www.acifr.org © Éditions d’Organisation Les pièges du benchmarking 53 54 Le guide du benchmarking © Éditions d’Organisation Le benchmarking concurrentiel lancé était très prometteur mais n’a pas fourni les résultats escomptés, compte tenu d’une analyse trop superficielle du premier groupe de travail (définitions de poste non pertinentes). Ce groupe a entraîné l’étude sur une fausse piste en se focalisant sur un paramètre non déterminant. De plus certaines des pratiques du concurrent n’ont pas pu être transposées du fait de conditions locales différentes. Cependant la démarche n'a pas été inutile puisqu’elle a permis de bien comprendre les mécanismes des écarts, de réaliser quelques économies et de restaurer la confiance du client. Alliance des consultants industriels francophones - http://www.acifr.org Jacques ALEXANDRE - Marc BAZINET Isabelle BONNEAU-BLAIRE - Guy CHADEBEC Claude CORNEC - Jean-Claude COUSIN Jean DURAND - Jacques GAUTRON - Bernard HAVRET Le guide du benchmarking Préface Alexandre Jardin © Éditions d’Organisation, 2003 ISBN : 2-7081-2922-8 Alliance des consultants industriels francophones - http://www.acifr.org Sommaire Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1 Les auteurs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3 Conseils au lecteur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7 Chapitre 1 – La découverte du benchmarking . . . . . . . . . . . 9 Chapitre 2 – Evaluez-vous en 14 questions et 14 réponses . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21 Chapitre 3 – Ce qu’est le benchmarking, ce qu’il n’est pas ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 29 Ce qu’est le benchmarking . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 31 Ce qu’il n’est pas . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 32 Chapitre 4 – Les différents types de benchmarking . . . . . 35 Le benchmarking interne . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 37 Le benchmarking concurrentiel . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 38 Le benchmarking fonctionnel . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 38 Le benchmarking générique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 39 Chapitre 5 – Mon entreprise est-elle prête ? . . . . . . . . . . . . 41 Les indicateurs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 43 Les qualités complémentaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 45 Auto-évaluation : mon entreprise est-elle prête ? . . . . . . . . . . 47 Alliance des consultants industriels francophones - http://www.acifr.org XII Le guide du benchmarking Chapitre 6 – Les pièges du benchmarking . . . . . . . . . . . . . . 49 Chapitre 7 – Un outil d’amélioration permanente . . . . . . . 55 Chapitre 8 – L’implication du management : clé du succès 61 Chapitre 9 – La mobilisation des acteurs essentiels . . . . . 65 Chapitre 10 – À la recherche de partenaires . . . . . . . . . . . 71 La recherche de partenaires : mode d’emploi . . . . . . . . . . . . . 73 Une expérience originale de benchmarking de groupe . . . . . 75 Chapitre 11 – Le benchmarking : un projet d’entreprise . . 81 Le déroulement du projet . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 83 Les enseignements . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 85 Chapitre 12 – Une mise en œuvre originale . . . . . . . . . . . . 87 La démarche . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 89 La méthode utilisée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 91 Chapitre 13 – Le déroulement d’un benchmarking . . . . . . 93 Politique, stratégie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 95 Moyens . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 95 Organisation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 96 Objectifs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 96 Processus fondamental . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 96 Mesurer pour mieux gérer . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 97 Apprendre en questionnant et en observant . . . . . . . . . . . . . 97 S’appuyer sur les meilleures pratiques pour fixer des objectifs ambitieux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 97 Communiquer pour motiver . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 98 Pérenniser et institutionnaliser . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 98 Alliance des consultants industriels francophones - http://www.acifr.org Sommaire XIII Chapitre 14 – Le temps, c’est de l’argent ! . . . . . . . . . . . . . 99 Chapitre 15 – La valeur ajoutée du benchmarking . . . . . 103 Chapitre 16 – Universalité du benchmarking . . . . . . . . . . 107 HMCE (Her Majesty Customs and Excise) . . . . . . . . . . . . . . . 109 Cuivrinox . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 111 Annexe 1 – L’expérience originale des « Joyeux Parangonneurs® » . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 113 L’origine du groupe « LES JOYEUX PARANGONNEURS® » . 115 Le parangonnage triangulaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 116 Parangonnage : intergénération et transmission des savoirs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 118 Exemples concernant la sécurité routière . . . . . . . . . . . . . . . 121 Annexe 2 – Code de déontologie pour la pratique du benchmarking . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 125 Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 127 Protocole benchmarking . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 131 Benchmarking avec la concurrence . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 132 Définition des sigles . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 135 Bibliographie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 137 Index . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 139 Alliance des consultants industriels francophones - http://www.acifr.org