Le courrier rapide s`est organisé Allô Taxi s`est

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Le courrier rapide s`est organisé Allô Taxi s`est
spécialguerre
Le courrier rapide s’est organisé
Bachir Khoury
algré le blocus, les compagnies de
courrier express n’ont pas arrêté leur
travail et ont continué de relier le
Liban au reste du monde. Les moyens de
transport ont certes changé ; faute de pouvoir
recourir à l’avion, les colis étaient acheminés
par voie terrestre jusqu’aux aéroports de
Damas ou d’Amman. Cette réorganisation du
protocole de transport s’est accompagnée
d’autres changements radicaux. L’assemblage
des colis se faisait dans la Békaa et le nord du
pays avant de prendre le chemin de la frontière avec la Syrie. De plus, LibanPost, par
exemple, a dû déplacer son siège central de
l’aéroport au centre-ville de Beyrouth, ce qui a
perturbé l’organisation du travail.
Ces adaptations se sont répercutées sur les
délais de livraison qui ont augmenté de 48 à 72
heures par rapport à la normale. Les compagnies ne desservaient plus le sud du pays ou la
banlieue sud de Beyrouth. Seuls les bureaux de
Saïda fournissaient un travail régulier.
Selon un responsable de la société DHL, le
processus de livraison a toutefois été compliqué par les changements d’adresse des
entreprises libanaises, quand celles-ci n’ont
M
pas purement et simplement mis la clé sous
la porte, sans prévenir.
En revanche, le service a été facilité par les
douanes libanaises, qui ont allégé les formalités aux frontières pour l’entrée des marchandises. Elles ont octroyé des délais pour
l’acquittement des droits de douane et atténué les restrictions sécuritaires entourant les
camionnettes transportant les colis…
Malgré tous leurs efforts pour continuer de
fonctionner, le chiffre d’affaires des sociétés a
diminué de 50 à 70 %. Selon le PDG de DHL,
John Chédid, « la baisse du volume des activités ne peut pas encore être précisément chiffrée. Mais ce qui est sûr, c’est que le volume
des ventes a diminué de plus de moitié ».
Couplée à l’augmentation de 100 à 150 %
des coûts de transports, la baisse d’activité
s’est répercutée sur les prix : 30 à 100 %
d’inflation, selon les compagnies. C
Allô Taxi s’est reconverti
dans l’organisation des fuites
Claude Ammoun
est triste de voir les voitures
d’Allô Taxi avec des valises sur le
toit ! » Joe Tabet, le directeur général de la compagnie, sait pourtant qu’il n’avait
pas le choix. Il lui a fallu s’adapter à la guerre
pour éviter l’effondrement total. Au lieu des touristes qu’elle s’apprêtait à servir, la société s’est
reconvertie dans l’organisation des fuites.
Cent des 140 voitures de son parc ont assuré des liaisons avec Damas ou Amman. Allô
Taxi a effectué 80 à 90 trajets par jour vers
ces destinations contre 20 à l’intérieur du
Liban. Les prix ont doublé pour les courses
internes et plus que quadruplé pour sortir du
pays, la demande provenant majoritairement
de candidats à l’émigration et d’étudiants
devant rejoindre leurs universités.
Outre l’insécurité, la flambée des prix a été
«C’
alimentée par la pénurie d’essence qui a obligé les chauffeurs à se rendre assez loin en
territoire syrien pour faire le plein, la population du nord du Liban ayant assailli les stations proches de la frontière.
Pour la compagnie appartenant au groupe
Kurban, cette activité était la seule échappatoire possible. Allô Taxi est en effet propriétaire d’une grande partie de ses véhicules.
Elle en avait acquis 30 nouveaux une semaine avant le début de la guerre et devait par
conséquent continuer de verser des traites.
Les chauffeurs ont accepté de braver le danger, car ils ont ainsi conservé leur travail. Ils
fonctionnent selon deux schémas. Les uns
louent les véhicules pour 400 dollars, les
frais de maintenance restant à la charge
d’Allô Taxi. D’autres bénéficient d’une option
24 Le Commerce du Levant - Septembre 2006
d’achat des véhicules sur cinq (au bout de
deux à trois ans d’ancienneté) et s’acquittent
de 165 dollars par semaine.
Même si elle a maintenu un certain roulement, Allô Taxi dit essuyer des pertes. Le
modèle de cette compagnie est tout autre
que lors de sa création en 1999 avec dix voitures. Des contrats avaient été signés avec
certains des plus grands hôtels de la ville :
Intercontinental, Méridien, Metropolitan,
Monroe… pour la saison. Sa compagnie
sœur Allô Bus avait investi un million de dollars dans un parc de véhicules destinés à
promener les touristes sur des circuits régionaux. Ils sont tous à l’arrêt.
Et même si le cessez-le-feu a été proclamé,
« nous allons vers une grande période de
statu quo », prévoit Joe Tabet. C

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