Les Trompes de France à Karachi

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Les Trompes de France à Karachi
La Trompe dans le monde
Les Trompes de France à Karachi !
Après les « Chants de Garonne » en 2007 et le groupe de jazz « Caravan » l’an dernier, Monsieur Pierre Seillan,
Consul Général de France à Karachi, arrêtait cette année son choix sur la Trompe de chasse pour donner deux concerts au
Pakistan. Ces actions consistent à lever des fonds au bénéfice de « l’A.M.T.I. » Fondée en 1999 l’association, parrainée
par le consulat, a conduit la construction, le fonctionnement, aujourd’hui la maintenance et demain l’extension d’un
hôpital de soins palliatifs pour malades atteints du cancer. Les vingt cinq lits actuels ont vus passés depuis près de 6 000
patients et 5 000 souffrants ont bénéficié de consultations externes.
Après un contact fructueux début mars avec le webmestre du site des trompes du centre, de multiples échanges
d’Emails tous azimuts et près de huit mois plus tard, un groupe composé de Jérôme AMELOT, Pascal BOUCLET, JeanMichel DESHAYES, Jean-Paul JOUANNE, Denis LEGRAND, Grégory PICHARD, Benoist et Claude PIPON, Eric
RIBOT et Charles VELOT s’envolait le 20 octobre à destination de Karachi via Dubaï.
Jean-Paul orchestrait l’opération. Marie Lou NEYTON sollicitée pour l’imagerie de l’affiche, Benoist PIPON
pour l’organisation des programmes et commentaires, Claude PIPON pour la partie piano et la bonne volonté de tous ont
permis cette réalisation. Le 21 octobre, à 5H30 du matin, M. Pierre SEILLAN accueillait personnellement la petite troupe
à la descente de l’avion. L’accompagnement en formule V.I.P. par les services d’Air France facilita grandement le voyage
et la présence à l’aéroport de ce haut dignitaire, outre la mise en confiance immédiate, permis une entrée aisée au
Pakistan.
Une heure après l’atterrissage nous étions au pied des dix sept étages de l’AVARI TOWERS, l’un des quatre
hôtels de grand standing de la ville. Là, premier choc, automitrailleuse, militaires et miliciens en arme gardent les accès
de l'hôtel. Le premier passage obligé par le sas de sécurité précède l’accueil dans le somptueux hall de réception où
l’affiche de Marie-Lou est à l’honneur. Après attribution de nos chambres, installation et repos sensé réparer douze heures
de voyage dont neuf dans les airs, et quatre heures de décalage horaire.
Le déjeuner ainsi que les principaux repas, seront partagés avec notre hôte. Cette marque d’attention sera
énormément appréciée. Nous découvrons les spécialités locales, poulet, bœuf et poissons poêlés ou frits, légumes :
lentilles, riz, pommes de terre et tomates cuits ou crus ; au chapitre des boissons sont proposés eau en bouteilles,
décapsulées sous nos yeux, et jus de fruits. Parmi les mets nous trouvons aisément une nourriture acceptable.
L’après-midi de notre arrivée nous entamons une série de visites très intéressantes. Les tapis ont la primeur ; un
grossiste accepte d’ouvrir son magasin où notre guide, qui nous mettra rapidement à l’aise en nous appelant par nos
prénoms à charge de réciprocité, nous apprend à différencier les qualités de tapis et la variété des nouages en fonction des
utilisations et de l’origine des fabrications. Tapis de laine, tapis de soie, tapis de tribus sont présentés. Nos déplacements
sont assurés par 4X4 blindés et un mini car, sous l’escorte discrête de deux gardes du corps personnels de notre hôte. Une
fabrique de sacs et vêtements de cuir est notre seconde escale. Nous effectuons là nos premiers achats. Avant la tombée
de la nuit nous faisons un détour par le mausolée de Mohammed Ali Jinnah, fondateur du Pakistan par la partition de
l’Inde en 1947. Nous quittons nos chaussures pour accéder au sanctuaire, au centre de l’édifice un sarcophage de marbre
symbolise l’emplacement de la sépulture souterraine. Une grille en argent massif entoure l’endroit surplombé d’un lustre
de plus d’une tonne du même métal précieux et d’émeraudes. Une haute grille en inox éloigne le public.
Au dîner offert par le consulat au BBQ tonight : grillades, nous découvrons d’autres spécialités locales. Cette
première journée nous avons découvert l’extrême misère des mendiants à chaque carrefour, … la conduite particulière des
automobilistes, motocyclistes et autres conducteurs de cars et de camions décorés, attitude confirmée par l’inexistence du
permis de conduire, … appris que les permis de port d’arme et de chasser sont inconnus… constaté l’omniprésence de
policiers et de militaires et subit les passages obligés de nombreux sas de sécurité. Nous sommes avertis que le
Pakistanais parle peu. Le sourire étant reconnu comme signe de faiblesse, il ne laisse rien paraître de ses sentiments ; il est
également très fier de son égo. Les blancs sont ici systématiquement considérés comme Américains et les Pakistanais ne
les apprécient guère.
La journée du jeudi débute par notre rendez-vous quotidien dans le salon « Lif » de l’hôtel. Nous apprenons que
le niveau d’alerte a monté d’un cran suite à des attentats ou actions militaires dans le Nord du pays. Nos déplacements
seront donc encore plus sécurisés. Nous avons rendez-vous à la résidence consulaire pour la répétition souhaitée. Dès les
premières notes notre hôte est rassuré, il a compris que la trompe de France était bien représentée. Après le déjeuner en
compagnie de M. Wajihuddin (dit Waji) , responsable d’une importante tannerie, nous sommes conduits vers une zone
industrielle pour une visite de « Hafiz Tannery ».
Au cours du déplacement nous saisissons l’importance de la mégapole, considérée comme la 16e plus grande ville
du monde, dont le recensement, ignoré, de la population laisse place à des estimations proches de 20 millions d’habitants
appelés les « Karachiotes ». Le dixième de la population approximative du pays est concentré sur un vaste secteur de
quarante sept kilomètres en bordure de mer et plus de vingt en s’enfonçant dans les terres. Les égouts à ciel ouvert entre
les voies des grands boulevards, les nombreux dépôts d’ordures, les nuées de milans survolant la ville en quête de
nourriture et la couleur du ciel à l’horizon attestent de l’importance de la pollution émise. Nous découvrirons en fin de
journée l’état désastreux de cette partie de la mer d’Oman et de l’immense plage dont le sable, qui fut blanc naguère, est
aujourd’hui d’un gris très sombre. Nous allons de surprise en surprise, hormis l’omniprésence militaire, policière et
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milicienne qui nous interpela dès notre arrivée, nous remarquons l’état de délabrement de nombreux immeubles datant
seulement d’une cinquantaine d’années, sans porte ni fenêtre, totalement inhabités, aux toits parfois effondrés. Le terme
« entretien », totalement inconnu dans ce pays, explique cette choquante dégradation. Dans certains quartiers
commerçants des boutiques très illuminées occupent les rez de chaussée de ces bâtiments proches de l’état de ruine, le
premier étage et le sous-sol servent au stockage des marchandises. La pluie ne préoccupe pas l’habitant puisqu’il ne pleut
qu’à peu près que trois jours par an, au moment de la mousson.
Un tiers de la population karachiote travaille pour un salaire mensuel de base de l’ordre de 5 300 PKR - roupies
pakistanaises (43,00 €) Tous les moyens de subsistance sont nécessairement utilisés. Nous sommes informés qu’à
l’extérieur de la ville un homme blanc est une monnaie d’échange appréciée. Peu enclin à faire un tour à la campagne,
l’avertissement nous conforte dans nos intentions. La corruption est généralisée dans le pays où cohabitent tout à fait
normalement deux économies parallèles. La prostitution, plus ou moins discrète, est organisée par des policiers sous
payés ; l’alcoolisme, invisible, est combattu à renfort de communiqués réguliers. Dans ce contexte un important groupe
hôtelier international construit un complexe de 35 étages, c’est le signe d’un créneau porteur. Les « affaires » dans les
domaines du tissage, des peausseries, du travail du cuir, des tapis, des métaux et des pierres précieuses sont les seuls
attraits de ce pays à la main d’œuvre bon marché.
Après avoir emprunté l’axe menant à l’aéroport, qui reçoit un trafic dix fois supérieur à celui du périphérique
parisien, nous entrons dans l’usine dirigée par Waji, les lourdes portes sont ouvertes, aussitôt refermées derrière nous, les
fusils mitrailleurs forment une haie d’honneur déjà familière. Au pas de charge nous entamons le circuit des diverses
étapes du traitement de milliers de peaux. L’atmosphère lourde, l’ambiance sombre et les odeurs fortes à la limite
suffocantes contribuent à cette sensation d’inconfort ; sommes-nous au XXIème siècle ? La visite commentée est d’un
intérêt indéniable. D’énormes machines sont servies par des nuées d’ouvriers dont le nombre varie selon la période de
l’année entre 2 200 et 2 500 employés ; au total 7 000 personnes gravitent dans et autour de l’entreprise. Les peaux
traitées sont expédiées dans le monde entier.
Dans la seconde partie du périple : la fabrication de vêtements de cuir, le changement d’ambiance est radical.
Depuis la découpe jusqu’à la finition d’une qualité irréprochable, en passant par les batteries de machines à coudre et un
bref aperçu du bureau d’étude, tout est passé en revue. D’ici sortent vestes et blousons haut de gamme de la marque « Red
Skin » à un prix cinq fois inférieur à celui des boutiques du faubourg St Honoré.
A l’invitation du Consulat, nous dînons au BEACH LUXURY HOTEL. Le parc de ce palace accueillera nos deux
concerts, l’estrade est en cours de montage. Luxueux, le terme n’est pas usurpé pour définir l’endroit. Les palmiers et la
mer composent l’arrière plan, comme partout les milans rodent en quête de nourriture, nous faisant craindre tout ce qui
peut tomber du ciel, y compris les noix de coco.
Le vendredi est jour de congé, nous ne remarquons pas de grande différence avec les autres jours. Il est vrai que
nous sommes tenus à l’écart de la vie locale cependant Karachi est considérée comme une ville libérale. Nous sommes
surpris du peu de signes religieux ostentatoires, la gente féminine voilée est plutôt rare, par contre nous rencontrons
certaines femmes d’une beauté remarquable. Quel que soit le jour, les appels rituels à la prière laissent l’homme de la rue
totalement indifférent.
Ce matin, nous sommes attendus au SIND CLUB, fondé en 1871 par les colons britanniques dont les coutumes
sont toujours préservées. L’élite de la société pakistanaise se retrouve dans l’enceinte la plus huppée du pays. En tenue de
ville aménagée pour la circonstance par le gilet de vénerie et une cravate FITF nous donnons un mini concert pour un
aréopage prestigieux d’une soixantaine de membres. Musiques de chasse et fantaisies sont présentées, Pierre assure les
commentaires, nous en profitons pour effectuer les derniers réglages. Le public pakistanais réputé froid accueille avec
enthousiasme les sonneries jusqu’aux derniers accords. La visite du sacro-saint « bar du club » duquel, selon la règle très
« british », les femmes sont exclues, précède une invitation à déjeuner et la distribution de souvenirs.
Retour à l’hôtel pour un moment de détente, piscine, massages, sauna, jacuzzi ou sieste selon le goût et l’humeur
de chacun avant la préparation pour la première rencontre avec les « invités » du premier récital.
Tout est prêt au Beach Luxury, les tapis couvrent le sol et forment des allées conduisant à l’enceinte entourée de
bâches destinées à masquer aux regards indiscrets cet espace réservé. Une brève séance de réglages des projecteurs et
d’équilibrage du SON « piano-trompe » et, alors que les tenues ne sont pas enfilées, nous souffrons déjà de la chaleur.
Heureusement, nous sommes à l’entrée de l’hiver, la nuit est tombée, il ne fait « plus que » 20° dans une moiteur humide.
Pierre a fait réserver à notre intention un secteur détente-restauration, où nous découvrons un bar où sont
disponibles vins français et alcools ! Nous ne serons pas les seuls à accéder à l’endroit …
Devant une assistance de trois cent personnes le programme concocté par Benoist captive l’attention de tous. Une
des coupures d’électricité quotidiennes intervient au milieu de « l’Amazone » entraînant quasi simultanément l’arrêt du
SON faute de pouvoir lire les partitions. Un « Happy-birthday » attaqué puis repris par le groupe, ressaisit l’assistance qui
adhère aussitôt et applaudit chaleureusement. La lumière revenue le spectacle reprend son cours. Le public est conquis.
Quarante cinq minutes de musique abordant tous les styles et thèmes accessibles à la trompe entrecoupés de textes réduits
à seulement quatre interventions fut une prouesse. Nous convenons de demander à l’organisateur, dès la fin de la
prestation, de prévoir des coupures plus fréquentes pour le concert du lendemain. Nous sommes assaillis par les notables
souhaitant nous faire part de leur satisfaction, quelques français, canadiens voire alsaciens nous congratulent. La barrière
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linguistique limite hélas les échanges mais le cœur y est. Denis, le plus à l’aise sur ce chapitre fait fonction d’interprète.
Claude, Eric et Charles signalent être les premières victimes des sournoises attaques bactériennes aux origines multiples.
Nous rêvons d’une bonne douche en espérant que l’eau veuille bien parvenir jusqu'au robinet de la salle de bains.
L’eau là-bas n’est pas aussi courante que cela. A l’évocation du terme « courante », signe de dérèglement intestinal,
signalons que 80% de l’effectif en aura souffert au terme du voyage. Mais nous n’en sommes pas là, un autre concert nous
attend le jour suivant.
Samedi 24 octobre. Pierre et son entourage sont à notre disposition pour des visites personnalisées d’échoppes
spécialement ouvertes à notre intention. Tapis, bijoux ou repos réparateur pour les moins en forme, le choix est libre. Le
déjeuner permet de faire le point sur les dégâts « co(lon) latéraux », comme se plaît à dire Denis. L’après-midi est
consacré à la visite des souks, pashminas (écharpes) Shalwar Kamiz (sorte de pyjama, karakoulis (turban typique) et
cachemires abondent. Là nous constatons avec plaisir que le fait de signaler notre incompréhension de l’anglais et de
l’exclusivité du parler « French » illumine les yeux de nos interlocuteurs. Dans leur esprit nous quittons les origines
supposées U.S. pour devenir U.E. Cette situation n’exclut pas l’obligation de marchander ce que font, fort bien à notre
place, nos accompagnateurs.
Chemin faisant le ravage bactérien évolue… Le retour à l’Avari Towers est bienvenu. L’heure avançant, les
préparatifs pour le second concert sont lancés. Benoist réussit à masquer son angoisse de pouvoir tenir durant tout le
concert, Claude se rétablit après un traitement efficace.
De nouveau sur scène pour affiner les équilibres de volumes sonores « piano-trompe » nous comprenons dès
l’arrivée au Beach Luxury que ce soir l’ambiance sera différente. L’espace est garni de tables rondes pour un « dînerconcert » précédé d’un cocktail. L’auditoire sera composé des membres de la plus haute société civile pakistanaise et
diplomatique. Réussirons-nous à captiver l’attention de ce public des plus sélect ?
Une heure plus tard nous en serons convaincus, le même enthousiasme que la veille anime les personnalités
venues nous complimenter. Pierre Seillan a une nouvelle fois gagné le permanent défi qu’il s’impose. Son leitmotive :
Mettre en avant l’image de la France en créant de toutes pièces des événements exceptionnels dans une ville démunie et
délaissée du monde. Si tout n’est évidemment pas rose dans l’ex capitale du pays tout n’y est pas aussi noir que les
médias le laissent entendre. La démonstration est faite : l’incroyable est possible ; félicitations Monsieur Seillan ! Comme
le disait, admirative, l’ambassadrice de Suède dans un français irréprochable : « Pierre, que pourrons-nous proposer après
un tel spectacle ? »
Le montant des fonds collectés supérieur à 70 000 € permettra à « A.M.T.I. » d’agrandir sa structure. La soirée se
termine à la « Résidence » pour célébrer le succès autour d’une coupe de « Moët & Chandon » et quelques cigares pour
les amateurs. Vient l’heure de se quitter après un café accompagné d’un armagnac hors d’âge, le tout servi par notre
illustre ami le consul aux origines béarnaises.
Au programme du dimanche matin : repos ou liberté d’assister à la messe matinale célébrée dans la cathédrale St
Patrick. Pour faire venir des sonneurs en ces édifices dont ils sont familiers, rien de mieux que de les inviter à sonner.
Avec l’accord, enthousiaste de Monseigneur Evariste Pinto, archevêque de Karachi, la première messe de St Hubert de
l’histoire de cette belle cathédrale est sonnée. Instant inoubliable pour les paroissiens qui participent nombreux à tous les
offices, tout autant que pour les sonneurs appréciant les chants de la chorale dont le style mêle rythme negro-spiritual et
chant des églises évangélistes. La communauté catholique, tenue en marge de la société, nous fait part de son infinie
gratitude pour l’avoir un instant sorti de l’indifférence, pour ne pas dire de l’exclusion, sans oser évoquer l’insidieuse
persécution.
En début d’après-midi un passage au « Sunday market » nous offre l’occasion de dépenser les dernières roupies
inutilisables au-delà des frontières. Nous consacrons la fin du jour à refaire les valises. Un ennui mécanique sur l’avion
d’Emirates Airlines retardera le vol Karachi / Dubaï décalant de vingt heures notre départ.
L’heure du retour sonne le lundi 26 à 10 heures. L’accès à l’aéroport hyper sécurisé par de nombreuses chicanes
et batteries d’armes automatiques, sacs de sable et Cie, nous laisse à penser que nous sommes sans doute dans un pays en
guerre. Accompagné par Pierre Seillan, nous franchissons sans encombre toutes les barrières administratives et
douanières jusqu’au secteur international de l’aéroport de Karachi. Vient alors le moment de se quitter par l’échange de
chaleureuses poignées de mains. Nous garderons de ce séjour le souvenir, fait rarissime, d’avoir croisé sur notre route un
très Grand Monsieur.
L’épreuve la plus pénible restait à surmonter : douze heures de transit à l’aéroport de Dubaï. Tout cela sera vite
oublié, les bons moments furent si nombreux qu’ils submergeront les aléas d’une expédition insolite.
Reportage de notre envoyé spécial à Karachi.
Pour consulter les photos du séjour, voir les informations communiquées sur le site des trompes du centre.
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Message de Monsieur Pierre Seillan à insérer dans la revue de la FITF
Message de Monsieur Pierre Seillan, Consul Général de France à Karachi.
Une idée saugrenue germa un jour de mars dans le fond du consulat général de France à Karachi : inviter en 2009
pour l’opération annuelle de lever de fonds pour l’hospice patronné par le consulat des sonneurs de trompe de chasse. Estce lié au nom de l’instrument qui rappelle tant l’animal le plus connu du sous-continent, est-ce au retour d’une chasse
dans les grands domaines qui bordent l’Indus que l’idée naquit, ou est-ce simplement par désir d’apporter une émotion
nouvelle dans une ville si dépourvu de distraction de qualité ? A vous de choisir. Toujours est-il qu’après quelques
échanges très encourageants avec Jean-Paul Jouanne, le projet était lancé. (Pour la petite histoire nous avons échangé plus
de 100 courriers électroniques et quelques coups de téléphone.)
Entre temps la situation politique et économique du Pakistan évoluait, des opérations militaires de grande ampleur
se déroulaient dans la vallée de la Swat et, quelques jours avant l’arrivée des sonneurs, commençait l’opération sur le Sud
Waziristan. Autant dire que les sonneurs arrivaient au Pakistan, le 21 octobre, en fanfare. Imperturbables, ils avaient
bravé les annonces catastrophiques, la surenchère des médias, les conseils des parents et amis, avaient contracté de
nouvelles assurances et rendu visite à leurs notaires pour crânement faire honneur à leur engagement : sonner au pays des
taliban.
Après avoir du sonner dans l’avion à Dubaï pour obtenir l’ouverture des portes, même les émirs souffrent de
pannes de courant, les sonneurs arrivaient à Karachi le 21 octobre avant l’aube, trompe dans les étuis, cernes sous les
yeux mais sourire aux lèvres. Au programme, repos, tapis, cuirs et tour de ville. Plusieurs répétitions et quatre superbes
concerts plus tard, ils avaient encore du courage pour négocier la valise qui permettrait de ramener l’indispensable
souvenir à défaut d’avoir trouver le tapis volant convoité. Mais tout cela vous sera raconté ad nauseam par les participants
et je ne voudrais pas dénaturer les comptes-rendus de première impression beaucoup plus précieux qu’une chronique au
fil de l’eau d’un diplomate en poste.
A mon tour je vais vous faire partager quelques émotions qui ont marqué le séjour de cette troupe joyeuse.
Comment résister à une « Amazone » sonnée au milieu du jardin de la résidence, comment oublier l’envol des milans
dans la nuit chassés par les premiers sons des « Honneurs » le soir du premier concert ! Comment ne pourrais-je entendre
en entrant dans la cathédrale St Patrick de Karachi résonner à mes oreilles « Le clocher dans le soir » réverbéré par
chacune des pierres de cet édifice, et les chœurs basques après le concert du samedi autour de bouteilles de médecine
française ! Comment pourrais-je oublier les calembours et les blagues des uns et des autres, mais aussi les sourires un peu
crispés de ceux qui luttaient opiniâtrement contre les effets dévastateurs de bactéries pernicieuses.
Le seul dommage collatéral lié à votre passage fût hélas enregistré par ma cave, le reste ne fût que bonheur. En
espérant vous revoir bien vite, toutes mes amitiés.
Pierre