Article du journal Le Soleil

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Article du journal Le Soleil
Faites place aux retraités! | Gilbert Leduc | Société
2013-11-02 09:13
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Publié le 02 novembre 2013 à 05h00 | Mis à jour à 05h00
Faites place aux retraités!
Le groupe de panélistes qui ont participé jeudi au
Colloque sur la retraite au Québec organisé par le
Cercle finance du Québec. Derrière, de gauche à
droite : Yves-Thomas Dorval; Laurent Matte;
Florent Francoeur et Gilles Lévesque, animateur du
panel de l'après-midi. Assis, de gauche à droite :
Clément Roberge, président du Cercle finance du
Québec, Karine Roussy et le journaliste du Soleil à
la retraite Louis Tanguay.
Photo Daniel Dupont
Gilbert Leduc
Le Soleil
(Québec) Les préjugés à l'égard
des travailleurs âgés sont
tenaces. Jadis, le Québec s'était
mobilisé pour permettre aux
femmes d'accéder en grand
nombre au marché du travail. Le
défi est maintenant d'inciter les
employeurs à favoriser une
participation accrue des
travailleurs de 55 ans et plus à la
prospérité économique du
Québec.
«A-t-on demandé à Sean
Connery de ne plus tourner de
film après James Bond parce
qu'il était trop vieux? A-t-on
demandé à Hubert Reeves,
lorsqu'il a eu 60 ans, de cesser
d'écrire? Tout le monde n'est pas
une star comme Sean Connery
ou Hubert Reeves, mais les travailleurs âgés peuvent apporter une valeur ajoutée à une
entreprise. Ne leur demandez pas de rouler 40 heures par semaine à bride abattue.
Toutefois, ils peuvent aider l'entreprise pour laquelle ils ont évolué depuis souvent une
trentaine d'années à trouver des solutions et à faire des liens avec des situations
auxquelles ils ont dû faire face au long de leur carrière», expose le président de l'Ordre
des conseillers et conseillères d'orientation du Québec, Laurent Matte, qui participait,
jeudi, au Colloque sur la retraite au Québec organisé par le Cercle finance du Québec.
En compagnie de la directrice générale du Groupe Intégration Travail, Karine Roussy, du
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président du Conseil du patronat du Québec, Yves-Thomas Dorval et du pdg de l'Ordre
des conseillers en ressources humaines agréés, Florent Francoeur, M. Matte prenait part
à une table ronde portant sur les façons de favoriser le maintien en emploi des travailleurs
expérimentés.
Leur constat est implacable : le marché actuel du travail au Québec ne favorise pas le
prolongement de la carrière.
«Nous gérons nos entreprises comme si nous nagions dans les surplus de maind'oeuvre», constate Florent Francoeur. «Les conventions collectives n'ont pas été
négociées afin de favoriser le maintien en emploi d'un salarié approchant le moment de la
retraite qui voudrait travailler à temps partiel par exemple.»
«Il est plus intéressant de se retirer que de rester au travail», renchérit Yves-Thomas
Dorval. «Il n'y a aucun incitatif économique à rester sur le marché du travail.»
«Le fameux concept de Liberté 55 - qui prône que le bonheur, c'est la retraite! -, les
Québécois l'ont compris et l'ont appliqué plus vite que tout le monde. Les Québécois se
retirent en général deux années plus tôt que les Ontariens. Les employeurs l'ont compris
aussi. Ils pensent que leurs salariés ne veulent plus travailler dès qu'ils atteignent le cap
des 55 ans!» fait remarquer M. Francoeur qui s'explique mal que l'on montre la porte à
des travailleurs de 55 ans parce qu'ils sont trop vieux alors que comme Ronald Reagan,
«on peut devenir président des États-Unis à 72 ans»!
Comme les immigrants
Karine Roussy indique que les entreprises vont préférer laisser partir un vétéran et
recruter une verte recrue - plus jeune évidemment - que d'avoir à gérer un employé
d'expérience qui désire besogner deux ou trois jours par semaine.
«Il y a encore beaucoup de préjugés à l'endroit des travailleurs âgés. Leur santé tiendra-telle le coup? Est-ce que ça vaut la peine d'investir pour former quelqu'un qui partira au
bout d'un an ou deux? Pour certains employeurs, les préjugés à l'endroit des retraités qui
désirent retourner sur les rangs des travailleurs sont aussi ancrés que ceux à l'endroit des
personnes immigrantes», affirme Mme Roussy qui dirige un organisme qui accompagne
les chercheurs d'emploi, notamment les personnes retraitées, dans leur démarche
d'intégration sur le marché du travail. Des retraités âgés de 55 à 64 ans, des diplômés
universitaires pour la plupart, qui possèdent un bon fonds de pension.
«La moitié d'entre eux ont pris leur retraite par choix, l'autre moitié par obligation», relève
Mme Roussy en indiquant que les employeurs font en général comprendre, souvent pas
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de façon très subtile, à leurs vétérans qu'ils n'ont vraiment plus d'avantages financiers à
poursuivre leur carrière.
Pour le président du Conseil du patronat, «le besoin fait toujours loi» dans le monde des
affaires.
«Quand les employeurs vont finir par comprendre qu'il y a une valeur ajoutée à maintenir
en emploi dans leur organisation des personnes d'expérience, ils vont trouver des
solutions pour les garder», croit Yves-Thomas Dorval.
«Au Québec, nous avons connu un gros succès avec l'intégration des femmes sur le
marché du travail. Tout le monde s'était donné la main pour mettre en place des
conditions favorisant la prospérité du Québec. Et on l'a obtenu, ce vent de prospérité,
avec une participation accrue des femmes au marché du travail. Ce mouvement, il doit se
poursuivre en misant, cette fois, sur les travailleurs de 55 ans et plus et en leur permettant
de prolonger leur carrière.»
Pour Yves-Thomas Dorval et Florent Francoeur, le gouvernement a toutes les pièces du
casse-tête en main avec les rapports D'Amours (Comité d'experts sur l'avenir du système
de retraite québécois) et Demers (Commission nationale sur la participation au marché du
travail des travailleurs expérimentés de 55 ans et plus) pour passer à l'action. «Que l'on
cesse de nous dire que l'on réfléchit aux suites à donner à ces rapports. C'est le temps de
prendre son courage politique à deux mains et de mettre en place les recommandations
faites par les experts», s'impatiente le pdg de l'Ordre des conseillers en ressources
humaines agréés.
En terminant, Laurent Matte a eu cette réflexion.
«Un jour, quelqu'un demandait au dalaï-lama ce qui le surprend le plus dans l'humanité. Il
a répondu ce qui suit : "Les hommes qui perdent la santé pour gagner de l'argent et qui
après dépensent cet argent pour récupérer la santé. À penser trop anxieusement au futur,
ils en oublient le présent à tel point qu'ils finissent par ne vivre ni au présent ni au futur. Ils
vivent comme s'ils n'allaient jamais mourir et meurent comme s'ils n'avaient jamais
vécu."»
La vie active au travail ne
cesse de diminuer
Dans les années 70, un
Québécois passait 65 % de son
existence à gagner sa croûte. «Il
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commençait à travailler à 19 ans
et il accrochait son veston à 65
ans. Son espérance de vie se
situait alors à 72 ans», explique
Luc Godbout, chercheur principal
en finances publiques à la
Chaire en fiscalité et en finances publiques de l'Université de Sherbrooke.
Luc Godbout, chercheur principal en finances
publiques à la Chaire en fiscalité et en finances
publiques de l'Université de Sherbrooke.
Photo Daniel Dupont
«En 2009, il faisait ses premiers pas sur le marché du travail à 22 ans. Il prendra
éventuellement sa retraite à l'âge de 62 ans. Il vivra vraisemblablement jusqu'à l'âge de
82 ans. Il passera donc 50 % de sa vie active au travail», ajoute le spécialiste qui, jeudi, a
présenté un exposé sur l'évolution du marché du travail au Québec dans un contexte de
transition démographique à l'occasion du Colloque sur la retraite au Québec organisé par
le Cercle finance du Québec.
Et si l'on se téléporte en 2056 - alors que l'espérance de vie atteindra 86 ans chez les
hommes et 89 ans chez les femmes - le travailleur commencera vraisemblablement sa
carrière à l'âge de 22 ans. Et si, comme ses ancêtres, il décide de lever les feutres à l'âge
de 62 ans, sa vie active aura été encore plus courte.
Prolonger la durée de vie au boulot?
«Devra-t-on prolonger notre durée de vie au travail? Et si oui, de combien d'années?»
pose Luc Godbout, pour qui il existe une interrelation évidente entre la démographie, le
marché du travail et la croissance économique.
«Si nous ne pouvons pas compter sur le profil économique et que le taux d'emploi ne
s'améliore pas, il faudra donc, pour qu'il y ait de la croissance économique, que tout le
monde travaille plus d'heures et que chaque heure travaillée vaille plus», explique-t-il en
soulignant qu'entre 1971 et 2011, la gang des 15 à 64 ans avait augmenté de 1,6 million
de personnes au Québec alors qu'elle sera moins nombreuse de 200 000 individus d'ici à
2056 selon les prévisions. «À partir de 2029, il y a avoir plus de décès que de naissances.
Sans l'apport de l'immigration, la population du Québec se retrouvait alors en
décroissance.»
Dans les faits, l'augmentation de la population d'ici 2056 va se faire dans le groupe des 65
ans et plus.
Pour Luc Godbout, la transition démographique a déjà débuté au Québec et elle aura des
répercussions manifestes sur l'évolution du marché du travail.
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«Les taux d'emploi chez les 55 ans et plus sont déjà en hausses, mais si nous voulons
qu'ils continuent d'augmenter, il faudra adopter une politique de valorisation de l'emploi
chez les 55 ans et plus», insiste-t-il. «La participation accrue au marché du travail de ces
derniers aurait un effet non négligeable sur le nombre d'emplois, la croissance
économique et le niveau de vie des Québécois. Et n'oublions surtout pas l'apport potentiel
de l'immigration.»
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