Wattwiller-les

Transcription

Wattwiller-les
Wattwiller - Source de vies
3
Wattwiller-les-Bains
L
a réputation de Wattwiller est intimement liée
situé sur l’emplacement qu’occuperont les thermes
à ses eaux minérales, connues depuis des
au XVIIIe siècle. En 1522, le prince-abbé de Murbach,
siècles et certainement exploitées par les
Georges de Masevaux (1513-1542), cède les bains en
Romains, déjà amateurs de thermalisme. Un millé-
emphytéose « moyennant trois florins en argent » à la
naire après leur départ, on recense à Wattwiller un
commune de Wattwiller, qui les dirige pendant près
établissement de bains, ou « étuve », où les gens dis-
de deux siècles. La commune confie l’établissement
posent de baignoires en bois pour de nombreux soins
à un « baigneur » professionnel ou Bader. Il est pro-
d’hygiène. La Badstube, ou bain public, est située
bable qu’une des plus anciennes familles de
e
dans le haut du bourg. Au XIV siècle, l’établissement
Wattwiller, celle des Bader, tire son nom du métier
est cité dans deux titres de rente de l’abbaye de
exercé par l’un de ses ancêtres aux bains de la ville.
Lucelle, qui a de nombreuses possessions à
Dans la seconde moitié du XVIe siècle, ces bains
Wattwiller. En 1429, des écrits nous rapportent
donnent leur nom à l’un des quartiers de la ville,
l’existence d’un deuxième établissement de bains,
le Badviertel, ou quartier des bains, dénomination
relié à l’une des sources minérales et probablement
encore en usage pendant la Première Guerre
VUn intérieur d’étuve au XVe siècle d’après une gravure sur bois de 1514
76
mondiale. C’est à partir de la seconde moitié du
XVIe siècle que certains grands médecins commen-
TAXES ET RÈGLEMENTATIONS
DES BAINS DE WATTWILLER
cent à s’intéresser aux vertus curatives des eaux
minérales. Le premier est Georges Maler, dit Pictorius
(1500-1569), natif du pays de Bade et établi à
Ensisheim en 1540. Cet éminent médecin humaniste
publie un manuel à l’usage des curistes où l’on peut
lire : « Dans cette localité, il y a deux bains, l’un réservé
au prince, l’autre accessible au commun des mortels.
Les eaux de ces bains sont salutaires aux asthmatiques
qu’elles débarrassent des glaires, elles réchauffent les
estomacs et intestins refroidis, sèchent les humidités
des nerfs, dissipent la gale et ses croûtes et sont efficaces
contre les calculs rénaux. Ce sont de bons bains,
mais le vin qu’on y consomme gâche souvent les effets
bénéfiques de l’eau curative… »
Au XVIIe siècle, l’essor des bains de Soultzbach et de
Soultzmatt se fait au détriment de ceux de notre
village. En 1634, la maison des bains n’a pas résisté à
la « bataille de Wattwiller » et les comptes communaux de 1650 mentionnent que ses tuiles sont vendues aux enchères. En 1712, la commune n’ayant plus
les moyens de remettre l’établissement des bains en
état, le rétrocède au prince-abbé de Murbach qui le
rénove et l’agrandit. Les briques, la chaux et les tuiles
sont livrées par la tuilerie d’Uffholtz. En 1717, Jean
Rousseau et son épouse Anne Marie prennent à bail
l’établissement des bains. À la mort de ce dernier, sa
veuve prend la direction de l’établissement et c’est
pour elle que le règlement ci-contre est rédigé par
C. de Beroldingen, prince-abbé de Murbach.
La prévision des bains de seconde
main au profit des pauvres arrache
à l’auteur de « L’ancienne Alsace
à table » cette charmante boutade :
« Ah ! Mon Dieu, il a toujours été
incommode d’être pauvre, même
dans le bon temps, et sous la crosse du
prince-abbé de Murbach ».
En 1742, Jean Nussbaumer, chirurgien, alors bailleur de l’établissement des bains, laisse dans sa succession une description de la maison
Comment l’hôtesse des bains se doit conduire
envers les baigneurs et ce que chaque baigneur
doit payer suivant la manière
dont il entend être servi et traité.
• 1. Il doit être permis à tout un chacun qui veut visiter les
bains de Wattwiller, de manger et de loger où bon lui
semble.
• 2. Le prix d’une chambre et des bains sera par semaine
2 livres 10 sous ;
Ceux qui veulent faire leur cuisine eux-mêmes paieront,
pour le bois, par semaine 5 sous ;
Ceux qui se serviront de la vaisselle de l’hôtesse, paieront
chaque semaine 5 sous.
• 3. Il est ordonné que trois tables seront établies et
servies par l’hôtesse de bains.
À la première table, on servira, pour le dîner : 5 plats et un
demi pot de vin blanc ou rouge, selon le désir du consommateur ; pour le souper, 3 plats : un plat d’orge, un rôti,
un ragoût de veau ou de volaille.
Ceux qui mangent à cette table paieront 22 sous.
À la seconde table, l’hôtesse servira une bonne soupe, un
plat de bouilli et un plat de légumes.
Chaque personne recevra aussi un demi-pot de vin et
paiera par repas 13 sous 4 deniers.
À la troisième table, on servira une soupe, un légume avec
une tranche de viande et une chopine de vin. Le prix est
fixé à 8 sous.
Le vin vieux blanc de Guebwiller se débitera à 6 sous 8
deniers.
Le vin vieux rouge de Guebwiller 6 sous et 8 deniers.
Le vin nouveau de Guebwiller 4 sous 2 deniers.
Les baigneurs qui n’apporteront ni leurs lits,
ni leur linge, paieront, par semaine, y compris
le prix du blanchissage compté à un pfenning
pour chaque pièce 13 sous 4 deniers.
Les pauvres gens qui voudront profiter d’un
bain lorsque le baigneur en sera sorti donneront chaque fois 1 sous 4 deniers.
L’hôtesse des bains versera à chaque domestique ou servante, une chopine de vin par
repas.
Elle recevra pour la pension d’un domestique
13 sous 4 deniers.
Donné à Wattwiller, le 13 juin 1720, par ordre
de Son Altesse C. de Beroldingen.
des bains et de son mobilier : « … elle
Signé : Munsch, greffier
est composée d’un long bâtiment à
deux ailes et deux étages ornés de
V Rapport sur l’eau minérale
galeries, qui renferme les habitations
par le D r Frédéric Bacher,
médecin physicien de Thann
en 1741
77