la lettre de l`api - Association des Psychiatres de secteur Infanto

Transcription

la lettre de l`api - Association des Psychiatres de secteur Infanto
LA
LETTRE
DE
L API
Association des Psychiatres de secteur Infanto-juvénile
n° 18
Le mot de la présidente :
Ces derniers mois , la psychiatrie a tenu dans l actualité une place à laquelle elle est
peu habituée .
« Le drame de Pau » a , au delà de l émotion suscitée , donné l occasion de parler de
état du service de santé psychiatrique , et les propos les plus contradictoires ont été
tenus.
Mais il a aussi eu un effet accélérateur sur la présentation du Plan pour la Santé
Mentale , tout en lui donnant une acuité particulière et mobilisant les espoirs et /ou les
craintes des patients , leurs familles et les professionnels.
Ce plan présenté au conseil des ministres le 20 avril dernier est entré dans sa phase
de mise en uvre , et sur ce point j aurai l occasion de revenir prochainement.
Au début de l année 2005, les feux de l actualité ont été braqués sur les travaux de M.
Zilbovicius en imagerie cérébrale . Il s agit de travaux de recherches portant sur le
fonctionnement cérébral dans l autisme dont l intérêt a été souligné par Philippe
Douste Blazy au cours d une allocution publique , et repris par la presse .
Je peux sans crainte affirmer que nous sommes nombreux à souhaiter que l effort de
recherche dans le champ des neurosciences autant que dans les champs de la clinique
et l épidémiologie soit maintenu et même sérieusement renforcé.
Il va de soi que toute avancée significative des connaissances susceptibles d apporter
une amélioration à l état des patients doit connaître la plus large diffusion.
Il n en est pas forcément de même pour les étapes des travaux , aussi intéressantes
soient elles dont l issue sur des données utilisables n est pas assurée .
Pourtant, cette fois , nous pourrions ne pas regretter cette médiatisation précoce. C
est elle en effet qui a mobilisé un certain nombre de thérapeutes vers une réflexion des
plus fertiles.
est ainsi que nous publions dans ces pages deux textes que Madame G. HAAG nous
propose , ce qui nous invite à poursuivre dans ces colonnes , les débats grâce à vos
contributions.
Le premier exposé est celui d une psychanalyste dont les travaux nourrissent la
pensée et les projets thérapeutiques de nombreuses équipes soignantes qui ne
comptent pas , loin s en faut que des psychanalystes.
Le second est le fruit d une mise en commun des observations et expériences de
psychanalystes - psychothérapeutes oeuvrant dans le même champ et se sont
constitués en collectif.
Les difficultés que rencontrent les enfants autistes et psychotiques , leurs familles et
leurs soignants sont telles qu elles nous imposent de porter nos efforts vers une
meilleure compréhension sans nous laisser distraire par des querelles de chapelles .
Les Rencontres Annuelles qui se sont tenues en mars , sur le thème de l autisme et des
psychoses ont permis de constater que les pédopsychiatres avaient intégré dans leurs
réflexions nombres des données issues des champs des neurosciences, de
éducation, de la sociologie. Elles ont également mis en évidence le souci de travailler
en relation harmonieuse avec les familles.
Souhaitons que ce mouvement se poursuive parmi nous et s étende à tous les
partenaires concernés.
Troisième point de l actualité récente : la prescription des antidépresseurs chez les
enfants et adolescents. Une étude des publications récentes vous est proposée par
deux pharmaciennes des hôpitaux afin là encore de dépassionner le débat et de
soutenir des conduites réfléchies.
Une Lettre ultérieure reviendra sur ces Rencontres Annuelles , mais je saisis l occasion
de celle ci pour transmettre aux membres du Comité d Organisation les félicitations
dont de nombreux participants m ont faite la dépositaire .
A la fin du mois , les Journées Annuelles se tiennent à Lille. Venez nombreux , vous y
serez les bienvenus.
La Lettre de l API n°18 mai 2005
Dr Yvonne Coinçon
mai 2005
26, 27 et 28 Mai 2005
XXIèmes Journées de L A.P.I.
Association des Psychiatres de
secteur Infanto-juvénile
L’Enfant, le Pédopsychiatre et
leurs Institutions :
RESTER VIVANT
SOMMAIRE :
*Le mot de la présidente
p1
*Journées de Lille
p2
*Comment les Psychanalystes peuvent
aider les enfants avec autisme et leur
s
familles G Haag
p3
*Réflexions de psychothérapeutes de
formation psychanalytique s occupant
de sujets avec autisme après la publication des résultats d une expérience
sur les aires cérébrales concernées
par le traitement de la voix humaines..
chez cinq adultes avec autisme,
réflexions rassemblées par G Haag
p7
*Annonce journées SFPEADA
p12
*Utilisation des antidépresseurs chez
enfant et l adolescent et augmentation
du risque suicidaire ; données et
recommandations actuelles
p12
*L enfant, la parole et le soin, un
livre de Jean-Luc Graber
p15
*Festival Vidéo Psy de Lorquin
p15
*Bulletin d adhésion à l API
p16
1
XXI èmes Journées de L A.P.I. 26, 27 et 28 Mai 2OO5
Maison de l Education Permanente 1, place Georges Lyon LILLE
L’Enfant, le Pédopsychiatre et leurs Institutions :
RESTER VIVANT
Jeudi 26 mai
13h30 : Accueil
14h : Mots de bienvenue par Mme le Dr Yvonne Coinçon, pédopsychiatre, présidente de l A.P.I.
14h30 : Introductions des travaux. Pr. Pierre Delion, C.H.R.U. de Lille
15h : Entre « la patate chaude » et « au feu les pompiers », quelle place pour la fonction contenante des
institutions ? Régine Prat, psychologue, psychanalyste, Paris.
Discussion, animée par le Dr Michel Libert, pédopsychiatre, secteur Lille Nord
16h30 : Ateliers
18h : Fin des travaux
20h : Conférence :La Psychothérapie d enfants à la Tavidstok Clinic
Paul Barrows, psychanalyste, Londres
Vendredi 27 mai
8h30 : Accueil
9h : Les mouvements de vie ou de mort dans les institutions.
Dr Michel Botbol, médecin directeur de la Clinique de la Fondation de France, Sceaux
10h30 : Ateliers
12h : Repas en commun au restaurant la « Baignoire »
14h30 : Quelques réflexions sur les concepts autour de l institution. Pr. Pierre Delion, C.H.R.U. Lille.
15h30 : L A.P.I., une position institutionnelle ? Ou l institution A.P.I. qu en est-il ? Dr François Bridier,
pédopsychiatre,Bordeaux
17h30 : Fin des travaux
20h : Soirée-Repas, animé par Daniel Destombes, psychanalyste, conteur, au restaurant « le Meunier » rue du Tournai Lille
Samedi 28 mai
9h-12h : Assemblée générale de l A.P.I
Renseignements :Dr Claudine Desobry : [email protected]
ou Dr Marc Bétrémieux, CMP , 97 rue Salvatore Allende 62220 CARVIN Tél : 03 21 08 91 50
---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------A paraître dans « Médecine et Enfance »
Geneviève HAAG .
Psychiatre et psychanalyste (SPP)
COMMENT LES PSYCHANALYSTES PEUVENT AIDER LES ENFANTS AVEC AUTISME ET LEURS FAMILLES
Introduction- Psychanalyse et perspectives concernant l'autisme
L'urgence est de lutter contre le clivage qui
continue à sévir entre les points de vue cognitiviste,
génétique, et des neurosciences d'une part et les points
de vue psycho-dynamiques.
La psychanalyse s'intéresse à tous les aspects
du développement de la psyché et a réalisé beaucoup
d'approfondissements pratiques et théoriques en
abordant progressivement des psychopathologies de
plus en plus graves. Ses recherches se sont
entrecroisées avec d'autres domaines d'études
développementales, par exemple pour le champ qui
nous occupe,avec celles du Pr A. Bullinger sur les
sensorialités et les plateformes sensori-toniques et
tonico-émotionnelles [1] ou celles du Pr C. Trevarthen
|2] sur le dialogue émotionnel dans les échanges
sonores très précoces, ou encore celles de J. Nadel [3]
sur l'imitation. Nous avons également attaché une très
grande
importance
à
l'approfondissement
du
développement précoce par l'observation naturaliste du
nourrisson dans sa famille (méthode E. Bick [4]).
Notre souci, et celui des patients, est : comment
la psyché essaie de se construire malgré des
handicaps dont le substrat neurophysiologique est
patent et/ou dont les éléments génétiques de
prédisposition sont recherchés, comme dans la
schizophrénie, la psychose maniaco-dépressive et
La Lettre de l API
l'autisme. Mais les facteurs environnementaux, parmi
lesquels les facteurs relationnels sont très importants,
ont une influence de plus en plus reconnue sur
l'expression du génome (épigenèse) et influent aussi
sur le développement cérébral précoce.
En tout cas, c'est la possibilité d'une influence
environnementale qui nous donne l'espoir d'avoir un
certain impact tant sur le plan éducatif que
thérapeutique, et ceci le plus tôt possible.
Mais si les psychanalystes mettent davantage
l'accent sur le primum movens d'une dysrégulation
émotionnelle plurifactorielle, cela ne veut pas dire qu'ils
ne considèrent que les facteurs environnementaux.
La plupart sont aussi à l'affût des recherches
neurophysiologiques et biologiques qui viendraient
confirmer une prédisposition qu'ils ressentent souvent ;
le « traitement » des émotions est aussi dans le
cerveau. L'augmentation des hormones de stress mise
récemment en évidence par la recherche clinicobiologique de S.Tordjman [5] semble l'un des chaînons
importants à considérer. Quoi qu'il en soit, ces
dysrégulations entravent autant le développement de
toute la personnalité que les processus cognitifs ;
d'autres courants mettent plus l'accent sur l'hypothèse
de troubles cognitifs spécifiques : troubles des
réceptions sensorielles (M. Zilbovicius) [6], qui
pourraient rejoindre les travaux psychanalytiques sur le
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démantèlement de l'appareil de perception, défaut de
« théorie de l'esprit » (U. Fritz) [7], qui pourraient
rejoindre les travaux psychanalytiques de longue date
sur les identifications. Nous aurions tout intérêt à nous
coordonner pour avancer plutôt que de déclarer
chroniquement que «la» découverte scientifique du
moment confirmerait l'origine cérébrale ciblée de
l'autisme et battrait en brèche toute considération de
psychopathologie dynamique.
Or, les découvertes faites par les psychanalystes
qui ont longuement travaillé avec les enfants avec
autisme depuis maintenant plus de trente ans, sont
importantes
et
rejoignent
complètement
les
autobiographies de sujets avec autisme (T. Grandin, D.
Williams [8] ) ainsi que des repérages actuels de
chercheurs non-psychanalystes tels que ci-dessus
mentionnés.
1 - Les traitements psychanalytiques des
enfants et adolescents avec autisme
A) Aménagements techniques
La psychanalyse a été adaptée aux enfants à
travers la technique du jeu spontané [9],qui a des
rapports avec le rêve. Mais est-ce possible avec les
enfants avec autisme qui ne jouent pas? [10]. Nous
avons découvert qu'ils sont en fait capables de
répondre, à une attention ouverte à leurs difficultés, par
l'association libre, fondement de la technique
psychanalytique, en utilisant au départ, non pas les
jouets, qui doivent cependant être à disposition ainsi
que des livres d'images, mais leur corps propre, le
nôtre, les éléments architecturaux de la pièce et son
mobilier, à un niveau en effet très primitif de
symbolisation qu'ils nous ont aidés à préciser. Cela
suppose la formation des thérapeutes au décryptage du
langage corporel et spatial en exerçant l'observation
minutieuse de toute l'expression corporelle, tout en
recevant ce qui nous était parallèlement donné à
ressentir. Nous avons pu rejoindre les repères
développementaux de la même construction du moi
corporel dont les bébés, à partir au moins du 2e
trimestre de la 1ère année, semblent bien conscients.
Les travaux d'E. Bick [11], de F. Tustin [12] et de D.
Meltzer [13], avaient déjà grandement déchiffré ce
langage préverbal, déchiffrage que nous avons
poursuivi et qui n'est certes pas terminé. On est amené
à une permissivité relative du contact corporel, sans
toutefois le chercher ni le favoriser ; les élans affectifs,
lorsque l'enfant s'en défendra moins, iront vers les
parents. Nous utilisons en effet un concept du transfert
et du contre-transfert élargi à la reproduction, dans la
relation thérapeutique, des angoisses et des défenses
archaïques ainsi que des modalités identificatoires
primitives, que nous appelons adhésives depuis E. Bick
(1975) (collages corporels et agrippements sensoriels)
et projectives (tentatives de pénétration corporelle et
psychique dans l'autre), dans les versions normales et
pathologiques de ces identifications.
Le but est de communiquer au sujet souffrant
d'autisme le maximum de compréhension car celle-ci
fait partie des facteurs environnementaux qui facilitent
la construction de la contenance corporelle et
émotionnelle. La compréhension juste est la plus
efficace mais aussi la plus difficile puisque les repères
La Lettre de l API
développementaux sont perdus. C'est pourquoi nous
devons
nous
combiner
étroitement,
parents,
éducateurs, enseignants et psychanalystes, ceux-ci
devant communiquer les principales découvertes que
les patients les ont amenés à faire concernant leurs
vécus émotionnels et la construction de leur
personnalité.
Pour les cas à risque d'évolution autistique
dépistés très tôt, les consultations thérapeutiques
hebdomadaires ou bimensuelles parents-bébés doivent
être instaurées très tôt (G. Crespin [14] ) ; on peut aussi
utiliser avec efficacité l'observation thérapeutique à
domicile qui nécessite une formation particulière
(Houzel, [15]).
Un traitement individuel peut s'instaurer dès l'âge
de 2 ans 1/2 (Houzel, ibid. ; M.C.Laznik [16]) mais une
période de séances mère ou parents/enfant est souvent
nécessaire au départ. On peut aussi envisager des
traitements en tout petits groupes avec deux
thérapeutes (Urwand, Haag [17]). Le rythme
souhaitable des séances individuelles est de trois à
quatre séances hebdomadaires. Il est souvent très
difficile d'en installer plus de deux. Une seule risque
d'être bien peu efficace. Les groupes se font plus
souvent à raison d'une ou deux fois par semaine.
B) Les processus
1/ Révélations faites par les enfants avec
autisme eux-mêmes de leurs vécus corporels et
spatiaux angoissants, plus ou moins colmatés par les
stéréotypies et rituels, mais qui handicapent leurs
explorations spontanées.
Ces vécus sont des sensations de chute et de
liquéfaction, en rapport avec des effondrements
toniques le plus souvent insoupçonnables derrière des
enraidissements, des mouvements rythmiques ou des
agrippements sensoriels (lumière, son, vertige
labyrinthique), mais parfois « réalisés » de manière
brusque lors de séparation corporelle (fin de séance
dans le cadre thérapeutique), de changement
imprévisible, ou de débordement émotionnel : l'enfant
s'écroule alors comme un tas de chiffons. Ceux qui
parlent peuvent ajouter des évocations d'écoulement
et/ou d'engloutissement tourbillonnaire, tel l'enfant Paul
qui, après une longue séparation d'été, s'effondre ainsi
en fin de séance de retour et dit avec un filet de voix
tremblée, très angoissée « On va pas couler dans les
W.C... » Une fillette sans langage verbal, cherchant à
répondre au questionnement sur son enraidissement
corporel global quasi-permanent, verse de l'eau par
terre et désigne la flaque, tout en laissant tomber
comme une flaque, à côté, une peluche toute molle,
vidée de sa bourre. Pour ce qui est de la chute, les
enfants font de nombreuses mises en scène d'objets
qui tombent du bord des tables, des rebords
architecturaux, des sièges etc. Certains se perchent
eux-mêmes sur ces rebords architecturaux, comme des
alpinistes contre la paroi et nous communiquent ainsi la
peur qu'ils ne tombent.
Les enfants nous ont également indiqué la
nature de leurs peurs de la rencontre du regard qui
semblent avoir deux composantes, combinées ou non :
- peurs prédatrices (l' il-bec) démontrées souvent
avec des objets pointus dirigés vers nos yeux, ou
passant à côté en frôlant notre tête ; « racontées », à
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3
une étape plus évoluée, sur des images ou des
objets ou avec des marionnettes : grands becs
d'oiseaux
désignés
de
manière
insistante
parallèlement aux yeux d'autres animaux ; index
fondant comme un épervier sur les yeux d'un enfant
dans un livre d'images ;
- peur de tomber de l'autre côté des yeux ou de la
tête d'autrui, cela est mimé de diverses manières ;
nous comprenons que le défaut ou la faiblesse
d'introjection de la contenance corporo-psychique est
projeté sur la tête de l'autre, nous en reparlerons.
Nous observons, dans les cas les plus graves,
l'absence de perception du pourtour de la bouche,
ce que j'ai appelé «l'amputation du museau » c'est-àdire de la zone de contact dans le nourrissage, qui se
manifeste par des bouches flasques, coulantes, ou bien
sa perception est si fragile qu'il faut y entretenir des
excitations trop dures (objets durs, remplissages
excessifs). Lorsque les enfants retrouvent cette
sensation par des explorations intenses des objets, des
murs, avec la langue et les lèvres, ils réalisent des
jonctions main-bouche jusque là inexistantes. Les
fluctuations obligatoires dans cette trouvaille, ou
retrouvaille, provoquent des crises très angoissées de
« dépersonnalisation » où l’on peut voir l’enfant se
« rattraper la bouche » en hurlant
Nous observons également des négligences
d'un hémicorps que j'ai appelé « hémiplégie
autistique», ou bien le besoin de se coller latéralement
au corps de l'autre : le symptôme bien connu de
prendre le bras ou la main de l'autre pour obtenir ou
faire quelque chose appartient à cette problématique ;
la technique de « communication facilitée » en est une
application pratique, de découverte empirique.
On peut observer plus rarement une négligence
des
membres
inférieurs
réalisant
une
pseudoparaplégie et pouvant gravement retarder la
marche.
Tous ces symptômes se sont révélés, chemin
faisant, en lien avec la non-constitution, la perte, ou
la fragilité des bases de l'image du corps, les
« représentations du corps » dit A. Bullinger,
principalement le sentiment d'enveloppe c'est-à-dire
« être dans sa peau », avec son noyau interne autour
de l'axe langue/mamelon relayé par le pouce
autoérotique : défaut de constitution des grands axes,
vertical et horizontal, qui attachent, « membrent »
solidement le corps, ce que certains (D. Meltzer)
appellent le « squelette interne ».
Les enfants avec autisme qui progressent dans
la communication sont conscients du processus de
construction ou reconstruction de ces formations et
cherchent à nous l'expliquer, tout d'abord en langage
préverbal dans des séquences de comportement
répétitives et insistantes, qui se retrouvent d'un cas à
l'autre, et nous forcent à les décrypter.
2/ Reconstruction du moi corporel
Voici comment les enfants avec autisme, les uns
après les autres, résument le processus de formation
de cette contenance-peau, que nous appelons aussi
« enveloppe » : il faut combiner le tactile principalement celui du dos, qui est le premier contact
accepté ou recherché par les enfants (Soulayrol [18]) et
qui draine les échanges rythmiques dans le sonore et
La Lettre de l API
probablement les autres sensorialités de proximité avec l'intense pénétration du regard : cela fait une
enveloppe circulaire ou plutôt sphérique tout autour du
corps et tout d'abord de la tête [19]. Cela va de pair
avec un réinvestissement de la bouche et de la zone
péribuccale évoqué plus haut. Cette première sphère
englobe aussi la main. Nous reconnaissons là ce qui se
passe dans les premiers mois de la vie : soutien
dos/nuque, enveloppe sonore, intense
il à
il
pendant le nourrissage, surtout dans le deuxième
mois.
L'étape suivante est la consolidation des grands
axes du corps, qui sont souvent non constitués ou très
fragiles, donnant des enfants pantins ou plus souvent
des enfants très enraidis, tentant de « se tenir » sur leur
propre rigidité musculaire. Là aussi ce sont les
démonstrations insistantes des enfants qui ont forcé
notre compréhension : le côté dominant du corps est
fortement identifié au corps et aux fonctions de la mère
ou du personnage maternant réactualisé dans le
transfert sur le thérapeute, et la communication entre
bébé et mère se rejoue d'un côté à l'autre du corps
dans les jeux de mains en intégrant l'axe [20] [21].
Nous avons des démonstrations similaires pour
l'intégration des membres inférieurs, dont les principaux
signes sont répertoriés dans les articles sus-cités et
repris dans la grille de repérage des étapes évolutives
de l'autisme traité que nous avons établie avec des
collègues [22]. Cette grille met en parallèle cette
reconstruction avec le développement, spontané, des
explorations cognitives et celui du langage et de la
symbolisation.
Toutes les démonstrations des enfants,
notamment du côté des reprises développementales
[23] sont parfaitement congruentes avec ce que nous
donne la reprise de l'observation du développement
évoquée au début de ce texte. Elles s'entrecroisent
aussi très bien avec les apports des repérages
cognitivistes qui ont eu raison de souligner par exemple
l'absence de pointage proto-déclaratif que nous avions
également remarqué comme une caractéristique
importante, ainsi que l'absence d'attention conjointe.
Les enfants nous éclairent, par ce que j'appelle leurs
« narrations préverbales », sur certaines articulations
entre ces différents signes en les reliant à la fragilité de
la contenance et en les mettant dans la filière des
processus identificatoires que nous avons pu ainsi
mieux comprendre.
L'évolution, même favorable, n'est pas linéaire,
elle est émaillée de crises qu'il faut bien connaître. En
effet, dans les processus thérapeutiques, lorsque ce
que nous appelons le « dégel pulsionnel » survient, il
est souvent volcanique et donne lieu à de nouveaux
troubles du comportement comme les agressions
joyeuses du visage : griffures, tirage des cheveux, voire
morsures qui sont le témoignage d'un amour oral par
rapport auquel il faut faire ou reprendre ce que l'on fait
normalement dans le deuxième semestre de la vie :
faire respecter la limite de la peau, aider à transformer
en caresse, mais surtout théâtraliser la dévoration (jeu
de lion), ce qui est l'un des paliers importants
d'instauration du faire-semblant qui manque tellement
aux enfants avec autisme. Dans le même temps
peuvent se multiplier les crises de tantrum (selon le mot
n°18 mai 2005
4
de F. Tustin, crises émotionnelles dans le vocabulaire
cognitiviste), qu'il est très important de comprendre et
de gérer avec les parents et les autres intervenants.
Ces crises mêlant rage et angoisses corporelles,
surviennent dans la prise de contact avec la réalité et
ses frustrations là où auparavant l'enfant aurait colmaté
avec des stéréotypies. Elles sont très éprouvantes et
peuvent durer entre dix minutes et une heure. Mais,
parallèlement, la communication s'améliore.
Un autre type de crise, plus tardive, est le
surgissement d'états maniaques (plus ou moins grande
excitation souvent sexualisée), nécessitant la même
coopération étroite pour comprendre les angoisses
dépressives qui sont en arrière-plan avec surtout, pour
l'enfant, une auto-dévalorisation correspondant d'un
côté à une plus grande conscience de son état, de sa
différence, de son décalage développemental, des
bizarreries d'adaptation sociale dues à son plus ou
moins long retrait, mais aussi à la nuance mélancolique
de cette dépression qui comporte des éléments de
destructivité : c'est vraiment le rôle des psychanalystes
de travailler cela pour essayer de contenir le mieux
possible cette crise dans la relation thérapeutique.
Celte crise, si elle arrive au moment de la puberté, peut
se combiner à l'excitation pubertaire, ce qui ne peut
qu'amplifier le caractère d'excitation sexualisée. Le
recours à une aide médicamenteuse transitoire peut
être nécessaire, mais son ajustement est souvent
difficile à cause de réactions souvent paradoxales.
Le développement du langage est très variable,
souvent partiel [24]. La tonalité de la voix a du mal à se
mettre en place (voix haut perchées, monocordes). Il
faut dire que le rapport des autistes au sonore est très
particulier, avec probablement un trouble instauré dès
la vie prénatale. Il existe une hypersensibilité à certains
bruits (machine trépidante, perceuse, tondeuse...), mais
peut-être aussi au bruit de l'articulation consonantique
de la parole (le dur de la parole). On est donc obligé de
musicaliser beaucoup sa voix, certains enfants ne se
démutisent d'abord qu'en sons vocaliques ou en
chansons.
L'étude
neurophysiologique
récente,
répercutée dans les médias en annonçant que les
autistes sont « imperméables à la voix humaine », à
partir du constat de la non-activation chez 4 des 5
adultes avec autisme de l’aire spécifique de réception
de la voix, nous semble une conclusion très hâtive.
Certes les sujets avec autisme sont fréquemment en
état de non réceptivité de la parole ; cependant, nos
observations cliniques nous font présumer qu'il y a bien
une reconnaissance de la voix mais dont l'entrée serait
en quelque sorte filtrée par une triple exigence : une
suffisante douceur et musicalité, l'adéquation du
contenu à leurs préoccupations notamment de leurs
vécus corporels, et pour certains l'adresse, indirecte, du
commentaire émotionnel.
C/ Résultats
Nous sommes bien d'accord que la prise en
charge psychanalytique, si elle n'est pas combinée
étroitement avec les efforts éducatifs, le dialogue
fréquent avec les parents et le travail de soutien à
domicile, ne peut suffire, mais en échangeant nos
expériences entre psychothérapeutes de formation
psychanalytique, nous pouvons affirmer que nous
La Lettre de l API
avons aidé un certain nombre d'enfants avec autisme
de bon niveau intellectuel à évoluer avec beaucoup
moins de séquelles, notamment obsessionnelles avec
rigidité de la pensée telles qu'elles sont décrites dans la
littérature depuis Kanner, et aussi avec une meilleure
contention émotionnelle bien que cela reste le point
fragile ; mais les patients en sont alors conscients et
sont capables d'organiser les préventions nécessaires.
Il faut aussi savoir qu'il peut y avoir une aggravation
transitoire des symptômes anxieux ou obsessionnels
pendant l'adolescence car elle réébranle le moi
corporel .Nous avons aussi travaillé avec des enfants
déficitaires qui évoluent certes beaucoup plus
lentement mais qui nous « parlent » avec les mêmes
démonstrations
préverbales,
des
mêmes
représentations du développement du moi corporel et
de ses aventures, que les enfants de haut niveau au
début de leur traitement. Il faut cependant reconnaître
que certains enfants, même vus très tôt dès la première
année de la vie et traités assez intensément, évoluent
très peu sans que nous puissions, dans l'état actuel de
nos connaissances, comprendre toujours pourquoi. Ces
cas, malheureusement très éprouvants pour les
familles et pour les intervenants, mériteraient que l'on
resserre d'autant plus les liens interdisciplinaires.
Malheureusement la souffrance et le sentiment d'échec
poussent souvent aux clivages et certaines familles
rompent , nous accusent d'impuissance et s'engouffrent
dans le clivage actuellement en cours dans les milieux
scientifiques eux -mêmes.
II - Le soutien aux familles.
Il peut prendre des formes différentes :
- Les consultations familiales de départ, alternant
des entretiens avec les parents seuls, et les parents
avec l'enfant. Il s'agit tout d'abord de communiquer les
observations
mutuelles,
d'échanger
les
compréhensions intuitives des parents et les
compréhensions issues de notre expérience, de
reprendre les repères développementaux qui ont
plusieurs raisons d'être embrouillés, de laisser parler la
souffrance et les interrogations forcément angoissées
des parents qui nous demandent souvent des éléments
de pronostic qui sont très difficiles à donner lorsque
l'enfant est très jeune ! Parlera - t - il, ou elle ? Quand ?
Nous n'avons pas actuellement de critères fiables de
pronostic. Nous pouvons pécher par trop d'optimisme
ou de pessimisme. Le plus sage et le plus fécond, mais
aussi le plus difficile à maintenir, semble être de
proposer une étroite coopération pour suivre l'évolution
pas à pas en cherchant les meilleures prises en charge
pouvant favoriser le développement de l'enfant à l'étape
ou il est. Cela suppose, aussi bien de la part des
parents que de celle des professionnels, de pouvoir
tolérer l'incertitude et, tout en prenant les moments
nécessaires de recul pour l'évaluation des différentes
étapes, de se focaliser sur tout ce que nous pouvons
observer et comprendre de l'enfant qui va, comme nous
l'avons vu, dans les évolutions les plus favorables,
traverser des « crises » qui peuvent paraître souvent
une aggravation. La notation soigneuse des signes
positifs en contre-point des crises anxieuses ou de
nouveaux troubles du comportement peut seule
n°18 mai 2005
5
redonner espoir.
- Le soutien à domicile est un volet important de
la prise en charge. Bien avant l'installation des
SESSAD, plusieurs équipes ont proposé ce soutien ne
serait-ce qu'une ou deux fois par semaine pendant
environ une heure et demie afin de voir ensemble avec
les parents certains aspects du quotidien et chercher
comment essayer de renverser certains cercles vicieux
qui se créent obligatoirement autour des troubles
alimentaires et de sommeil, de l'absence de jeux
spontanés chez l'enfant, ce qui aboutit à supprimer
parfois l'espace de jeu au profit de sollicitations
seulement éducatives, souvent désajustés en raison de
la perte des repères développementaux évoquée plus
haut. Beaucoup de familles ont apprécié ce soutien du
« voir ensemble », et aussi de pouvoir communiquer et
partager les interrogations et anxiétés dans un rythme
moins espacé que celui des consultations. La visiteuse
à domicile pouvait aussi, lors de l'intégration scolaire,
faire le pont pour la mise en selle de l'enfant, et
l'accompagner dans des lieux de loisirs pour soutenir
les tentatives d'intégrations sociales. Les SESSAD
peuvent maintenant apporter le soutien d'interventions
plus fréquentes et variées. Ce travail demande une
grande délicatesse de la part des intervenants et un
grand respect du rôle des parents
- Les demandes ou propositions d'aide
psychothérapique individuelle ou groupale. Autour d'un
enfant autiste, il est difficile de « garder le moral »,
même si l'on n'a pas de tendances dépressives ou
anxieuses. Les couples peuvent être ébranlés. Certains
parents demandent ou acceptent une psychothérapie
personnelle, ou de couple, qui peut leur être proposée.
On peut aussi envisager, dans certains cas de plus
forte résonance des troubles de l'enfant dans le groupe
familial, des thérapies familiales analytiques qui servent
en même temps de soutien pour les frères et s urs,
qui sont également éprouvés ; elles sont réalisées
généralement à un rythme hebdomadaire ou bimensuel
avec deux thérapeutes ; les « associations libres »
circulent entre les parents, les activités ludiques (jeux,
dessins) des autres enfants, et les expressions en
langage corporel de l'enfant autiste parlant ou non
parlant, dont on peut ainsi mieux repérer le sens tous
ensemble ; celte thérapie peut être préalable, ou
parallèle, ou postérieure, à la thérapie individuelle de
l'enfant ; c'est le thème groupal qui se dégage qui est
retenu et interprété par les thérapeutes, ; il est fait des
« résonances » entre les angoisses archaïques de
l'enfant et celles que nous avons tous au fond de nous
même avec notre psychisme très complexifié et articulé
avec nos héritages transgénérationnels, pleins de
richesses mais aussi parfois de drames terribles qui
peuvent faire irruption dans le thème groupal et être
compris.
- Certaines équipes font aussi des groupes
d'expression pour la fratrie qui sont très appréciables.
Ces soutiens spécifiques offerts par les
psychanalystes ne sauraient remplacer le soutien et
l'aide concrète que peuvent trouver les parents dans
leurs Associations : partage des difficultés avec le
réconfort de la profonde empathie et sympathie que
peut éveiller la difficulté commune ; échanges
d'informations de toutes sortes, union pour cerner les
besoins et réclamer avec force les équipements
nécessaires pour le suivi des enfants, des adolescents
et des adultes. Mais il est tout à fait navrant que
certaines Associations se soient braquées dans un
clivage absolu entre les perspectives éducatives et les
perspectives thérapeutiques même s'il est vrai que
certaines fractions du monde psychanalytique, qui
garde ses divisions et ses conflits autant que d'autres
mondes scientifiques, aient pu prendre des positions, et
encore peut-être maintenant malheureusement, qui
peuvent culpabiliser en restant sur l'idée d'une
psychogenèse pure, ou en tout cas ne pas aider les
parents à se déculpabiliser car quel est le parent qui ne
se culpabilise pas si son enfant ne va pas bien ?
En tout cas, cessons d'assimiler les positions de
l'ensemble du courant psychanalytique actuel à celles
de B. Bettelheim il y a 50 ans, et affirmons que
plusieurs courants ont développé des recherches
cliniques qui peuvent parfaitement et le devraient
beaucoup plus que maintenant s'articuler avec les
neurosciences et des projets éducatifs car toutes les
propositions en cours (TEACH, PECS, etc..) vis-à-vis
desquelles certains crient maintenant prudence par
rapport à leurs aspects trop conditionnants et invitent à
considérer davantage la vie émotionnelle, contiennent
beaucoup de repérages intéressants, mais l'on est loin
de l'élaboration d'une psychopédagogie définitivement
au point comme le proclame chaque nouvelle méthode,
sans doute parce qu'on est loin de comprendre encore
assez bien les articulations multidimensionnelles de ce
grave trouble cognitivo-émotionnel. Les psychanalystes
peuvent, dans cette recherche également, apporter leur
«grain de vérité» disait F. Tustin pour l'articuler aux
autres.
Contact et copyright : G. Haag, 18 rue Emile Duclaux, 75015 Paris
RESUME
Les psychanalystes ont adapté la méthode de l'association libre en prenant en compte le langage corporel des
enfants avec autisme qui nous ont révélé la nature de leurs vécus crispés sur les stéréotypies. La principale panne
développementale , quelles qu'en soient les causes, semble la non-constitution ou l'effondrement des premières
constructions du moi corporel permettant à la fois d'être dans sa peau et de contenir les émotions. Le débordement
émotionnel à la réception de la voix, à la pénétration du regard semble couper, dissocier le développement des
réceptions sensorielles et de leur organisation perceptuelle permise par la fonction d'attention, et aussi gravement
entraver le développement cognitif. Ces observations et ces hypothèses s'entrecroisent et se discutent avec les
recherches cognitivistes, neurophysiologiques et génétiques.
La Lettre de l API
n°18 mai 2005
6
MOTS CLES
Autisme. Psychanalyse. Moi-corporel. Débordement émotionnel. Langage préverbal. Processus développemental
(reprise)
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Réflexions G.Haag imagerie cérébrale réception sonore, 20 01 05. Publié dans le numéro de mars 2005 de Carnet Psy
REFLEXIONS DE PSYCHOTHERAPEUTES DE FORMATION PSYCHANALYTIQUE S’OCCUPANT DE SUJETS
AVEC AUTISME APRES LA PUBLICATION DES RESULTATS D'UNE EXPERIENCE SUR LES AIRES
CEREBRALES CONCERNEES PAR LE TRAITEMENT DE LA VOIX HUMAINE CHEZ CINQ ADULTES AVEC
AUTISME, par Hélène Gervais, Monica Zilbovicius et coll., août 2004
Réflexions rassemblées par Geneviève Haag ¹
Cette expérience² porte sur cinq adultes avec
autisme ayant « développé les capacités de la parole »
et huit sujets normaux auxquels on fait entendre un
enregistrement alternant de la voix humaine et des sons
d'autres origines. L'activation des différentes aires de
tout le cortex du cerveau est enregistrée par IRM
fonctionnelle. Les sujets normaux ont une activation
La Lettre de l API
n°18 mai 2005
bilatérale du sillon temporal supérieur plus grande à
l'audition de la voix qu'à celle des sons non vocaux. L'un
des cinq sujets avec autisme a une activation unilatérale
droite de ce sillon. Un autre a une petite activation juste
en dehors de lui. Les trois autres n'ont pas d'activation
plus grande à l'audition de la voix. Après l'IRM, il a été
demandé à tous les sujets d'énumérer les sons
7
entendus : les sujets normaux indiquent que 51 % du
total des sons ont une origine vocale (la réponse exacte
étant 50), les sujets avec autisme n'en indiquent que
8,5%, c'est-à-dire que tout de même 17% des sons
d'origine vocale sont reconnus comme tels.
Le communiqué de l'INSERM (19/08/04)³ selon
lequel cette expérience «révèle une incapacité des
autistes à activer les aires cérébrales spécifiques de la
reconnaissance de la voix humaine » comporte ainsi une
généralisation à tous les sujets avec autisme de
l'expérience, ce qui, on vient de le lire, est inexact, et
même une généralisation « aux autistes » alors que ces
5 sujets ne constituent manifestement pas un échantillon
représentatif (leur âge moyen est 27 ans; ils utilisent la
parole). Un tel communiqué a induit de nombreuses
répercussions médiatiques à leur tour inexactes titrées
par exemple : « Autisme : la confusion des sons », « Le
cerveau des autistes hermétique à la voix », ou
causalistes de façon réductrice : « Une anomalie
cérébrale empêcherait les autistes d'identifier la voix
humaine». Faisons remarquer que si les sujets avec
autisme participant à l'expérience avaient développé la
parole, c'est qu'ils n'avaient sans doute pas été
constamment non réceptifs à la voix humaine.
Ne serait-il pas intéressant de faire parallèlement
le point sur l 'histoire du développement et l'état clinique
actuel de chacun de ces sujets ainsi que sur les résultats
de divers tests capables d'apprécier la gravité du
syndrome et plus particulièrement des troubles de la
communication ? C'est peut-être ce que ces chercheurs
en neurophysiologie ont déjà fait mais qu'il nous
intéresserait de savoir pour pouvoir mettre leurs résultats
en regard des nombreux matériaux que nous avons déjà
réunis dans nos recherches cliniques concernant les
relations, fluctuantes, des sujets avec autisme surtout
enfants et adolescents au sonore en général et à la voix
humaine en particulier.
Du côté des psychanalystes, nous avons à
communiquer davantage l'état actuel de nos constats,
hypothèses et interrogations issus des processus
thérapeutiques psychanalytiques, et des observations
préalables ou parallèles à ceux-ci que nous recueillons
de la part des parents, et des divers intervenants:
éducateurs,
orthophonistes,
psychomotriciens,
psychopédagogues, musicothérapeutes et enseignants
qui s'occupent conjointement des enfants. Nous
pensons de plus en plus important d'échanger entre les
cliniciens et les chercheurs en neurosciences et en
biologie pour un profit sans doute réciproque, cherchant
à réduire le clivage trop fréquent, à nos yeux
dommageable, entre le « tout cérébral » et le « tout
psychique », entre le « tout éducatif» et le « tout
thérapeutique ».
S'il existe encore de ces positions caricaturales
malheureusement aussi dans certaines équipes animées
par des psychanalystes, en tout cas ceux qui partagent
ces réflexions ont été formés et ont eux-mêmes perçu
dans leur expérience l'existence de prédispositions
(« quelque chose dans l'enfant », disait D. Meltzer dans
les années 70) sur lesquelles les généticiens et
neurophysiologistes sont en recherches que nous
suivons avec intérêt. Cependant les facteurs
environnementaux ont aussi leur importance et une
malléabilité certaine des sujets avec autisme nous
La Lettre de l API
n°18 mai 2005
permet, tant sur le plan éducatif que thérapeutique,
d'obtenir des évolutions vers le mieux dans la majorité
des cas. C'est sans doute aussi l'espoir des cognitivistes
en proposant des actions éducatives très précoces, mais
nous pensons que le seul abord éducatif ne peut sans
doute pas être aussi efficace qu'une approche
pluridisciplinaire, d'autant plus que la prédisposition
semble toucher tout un carrefour cognitivo-émotionnel et
par conséquent les bases du développement de toute la
personnalité.
I Les faits cliniques que nous constatons
habituellement :
1)Beaucoup d'enfants autistes par moments
semblent ne rien percevoir de la voix humaine, mais à
d'autres moments se bouchent les oreilles si l'on
commence à leur parler. Nous avons observé, et des
enfants nous ont aidés à le confirmer lors de leur
démutisation, qu'ils se bouchaient d'autant plus les
oreilles que la voix était plus forte et très articulée. C'est
pourquoi beaucoup de psychothérapeutes ont appris par
expérience qu'il leur faut musicaliser leur voix, voire
même
chanter
leurs
commentaires
et
leurs
interprétations
pour
qu'ils
soient
acceptés,
principalement au début des psychothérapies. Mais
certains enfants ayant avancé dans la perception d'un
langage porteur de significations peuvent aussi se
fermer auditivement devant les risques d'un
commentaire touchant particulièrement leurs émotions
maintenant différenciées, surtout de tristesse, mais aussi
de grand enthousiasme. Par contre dans des étapes
d'excitation maniaque survenant souvent au cours
même d'une évolution positive, le plus apaisant semble
être d'utiliser une voix grave, lente, la plus neutre
possible.
Chez les enfants non parlants, mais utilisant le
langage préverbal des gestes pour tenter de communiquer
leurs angoisses corporelles et spatiales, nous avons
souvent constaté qu'ils étaient très ouverts à écouter notre
reconnaissance et notre verbalisation de leurs
démonstrations, qu'ils répétaient avec insistance jusqu'à
ce que nous ayons clairement traduit en mots leur
«langage corporel ». Comment le comprendre ? Beaucoup
ont manifestement acquis une compréhension du langage
parlé, mais ne semblent écouter que si l'on rejoint leurs
préoccupations centrales, mais en évitant de parler trop
directement de leurs émotions car alors ils n'écoutent plus,
semblent sourds, peut-être comme nous nous rendons
sourds à une émission radio que nous avons laissée
ouverte mais qui ne nous intéresse plus et que nous nous
recentrons sur nos préoccupations et rêveries, ou bien
comme nous n'entendons plus quand nous sommes en
état de choc: que donnerait notre IRM fonctionnelle à ce
moment là ? Les enfants autistes, eux, dans de telles
circonstances, se récupèrent en se focalisant sur leurs
impressions sensorielles, en l'absence d'un monde interne
plus construit avec des représentations évoluées. On
constate aussi - et Donna Williams, souffrant d'autisme, en
parle clairement dans son autobiographie (1992) - qu'ils
écoutent si c'est autour d'eux que l'on parle d'eux, à cause
sans doute du risque toujours présent de débordement
émotionnel à la réception de certains contenus, mais aussi
au vertige de séparation impliqué par l'adresse directe ; ils
écoutent donc mieux les commentaires indirects que l'on
8
peut faire près d'eux les concernant, surtout si l'on veut
aborder le monde des sentiments plus différenciés et
subjectivés. D. Meltzer, psychanalyste anglais qui nous a
beaucoup enseigné (1975), nous conseillait de leur parler
et de parler d'eux comme si l'on se parlait à soi-même, ou
bien dans le «on» : «Je me demande si... », « On dirait
que... ».
Nous avons aussi pu constater qu'un nombre
important d'enfants en voie de démutisation commencent
par « chanter » ce qu'ils veulent nous communiquer, mais
en se servant seulement de la mélodie. Ce sont des
enfants qui ont été nourris, en famille ou dans des
institutions où l'on a beaucoup développé les moments
musicaux, de comptines, chansons mimées, et qui
semblent comprendre les mots contenus dans les
chansons et se servent de la mélodie de celles-ci comme«
lexique » en quelque sorte. A nous d'avoir entretenu notre
souvenir des chansons enfantines ! (Haag 1984,1996).
Il y aurait donc bien une reconnaissance de la voix
mais dont l'entrée serait en quelque sorte filtrée avec les
exigences d'une suffisante douceur et musicalité, de
l'adéquation du contenu à leurs préoccupations, et pour
certains que ce soit indirectement que les commentaires
de leur vie émotionnelle, de leurs capacités, réussites ou
échecs soient tentés.
2) Autre phénomène, resté longtemps énigmatique
pour nous : lorsque la communication a été améliorée et
notamment le contact du regard plus facile, les enfants se
passionnent pour les bruits de tuyaux et plus
particulièrement le gros borborygme de la fin de
l'écoulement des lavabos et baignoires, qui auparavant les
terrorisaient. Dans le même temps ils semblent plus
souvent réceptifs à nos commentaires et ils se mettent à
vocaliser beaucoup plus abondamment. Dans quelques
cas, nous avons enregistré la survenue d'hallucinations
d'un bruit fort lors du surgissement d'un inattendu dans le
déroulement d'une séance, sans qu'il y ait aucun support
perceptible de bruit.
II Nos hypothèses
Pour la première série de ces faits cliniques, nous
rejoignons
les
observations
de
beaucoup
sur
l'hypersensibilité des enfants avec autisme aux bruits de
machines, aux ambiances trop bruyantes pour laquelle, à
notre connaissance, nous n'avons pas encore trouvé
d'explication. Peut-on penser pour certains au moins à un
trouble cochléaire ? Mais nous faisons plutôt l'hypothèse
d'un trouble de l'afférentation en relation avec le retrait
émotionnel et le démantèlement des sensorialités cidessus évoqués, nous faisant nous diriger vers l'existence
de troubles de l'attention (Houzel, 2002) : des anomalies
de la fonction d'attention ont souvent été évoquées au
sujet des enfants avec autisme, mais, pour celle-ci de
même, est-ce la cause ou la conséquence de la
dysrégulation émotionnelle ? Dans certaines études
neurophysiologiques n'a-t-on pas trouvé des anomalies
des circuits frontaux-pariétaux (Zilbovicius, 2002) ? N.
Bodaert et M. Zilbovicius soulignent, dans le dossier de
presse « Autisme 2005-2006 », les connexions des aires
étudiées avec le système limbique tenu comme le cerveau
des émotions.
Nous pouvons aussi noter que, pour chaque
sensorialité, les enfants établissent ce que nous appelons
des «clivages», bien étudiés par F. Tustin (1981) : dans le
La Lettre de l API
n°18 mai 2005
sonore, le clivage entre dur et doux se manifeste entre les
sons des voyelles - la partie musicale de la voix -, et le
bruit des consonnes - rejetées du côté du « dur ». Mais
nous nous réinterrogeons, pourquoi une telle intolérance
aux bruits ? Nous avons été très intéressés par les
expériences mettant en évidence qu'à l'audition de sons
purs les sujets avec autisme activent la région temporale
postérieure du cerveau droit, le cerveau émotionnel, alors
que chez les sujets sans autisme cette audition est reçue
dans la région symétrique du cerveau gauche, celle du
langage chez un droitier (Zilbovicius, ibid.) qui intègre ainsi
à la fois la musicalité de la voix, le bruit de la parole
autrement dit l'articulation consonantique, et la signification
des mots..
A noter que nous enregistrons, au cours des
psychothérapies, les mêmes démonstrations pour l ' il à
il que pour la pénétration de la voix : pénétration, oui, à
condition qu 'elle soit suffisamment douce. Nous pouvons
penser que les sujets avec autisme traduisent ainsi leur
expérience de débordement émotionnel, à commencer par
leur choc à l'inattendu, comme une pénétration corporelle
violente faisant en quelque sorte « exploser » leur fragile
construction identitaire, tout d'abord celle du premier « moi
corporel », et aussi exploser momentanément certains
secteurs cognitifs acquis. Y aurait-il là aussi, pour la
reconnaissance des visages et le décryptage des émotions
sur le visage, le même phénomène de détournement dû au
débordement émotionnel de la pénétration du regard ? D.
Williams dit de cette rencontre qu'elle était engloutissante
et lui faisait perdre pendant quelque temps « des pans
entiers de significations » (ibid.) Dans notre expérience, les
relations entre le degré de tolérance à la pénétration des
bruits ou sons trop intenses et à celle du regard d'une part,
et d'autre part la construction de la première étape du moi
corporel (sentiment d'entourance, d'enveloppe avec son
corollaire de noyau d'attache interne, lequel est sans doute
à rapprocher du sentiment de cohérence interne dont le
défaut chez les sujets avec autisme est bien souligné dans
les travaux cognitivistes) sont étroites ; la pénétration du
regard, une fois dédramatisée, est démontrée être un
facteur important de la formation de l'enveloppe (Haag,
2000). Lorsque l'enfant a stabilisé ce sentiment
d'entourance, qu'il est « dans sa peau», la diminution ou
disparition des stéréotypies en étant l'un des principaux
résultats, l'intolérance aux bruits de machines variés
disparaît ou s'atténue considérablement.
Pour la deuxième série de faits, une hypothèse se
fait jour depuis une quinzaine d'années à partir de travaux
psychanalytiques sur la naissance d'une perception
existentielle très primitive dans le sonore prénatal (Maiello,
1991, 1998). Cette racine prénatale du problème du
sonore nous est apparue très importante. Les traitements
nous ont aidés à la cerner de la manière suivante qui nous
semble toujours en lien avec ce problème de dysrégulation
émotionnelle. Toujours en contrepoint avec les repérages
développementaux, il semble qu'une certaine naissance du
sentiment d'existence se produirait à partir du 4è mois de
la vie prénatale dans la perception différentielle entre les
rythmes réguliers des bruits du c ur et le surgissement de
l'aléatoire de la voix maternelle (Maiello, ibid). Les enfants
autistes nous ont montré qu'ils avaient établi une analogie
entre la voix humaine et les bruits des tuyaux, donc
probablement les borborygmes intestinaux, autre bruit
aléatoire perçu in utero. Il semblé que ces deux aléatoires
9
aient été rejetés en même temps (cf. troubles de l'écoute
de la voix décelés très tôt chez les bébés à risque
autistique). Lorsque, dans le processus thérapeutique, ils
reprennent confiance dans la communication après
atténuation de beaucoup de leurs peurs (angoisses
corporelles d'engloutissement, de chute, de liquéfaction)
grâce à la compréhension que nous leur en proposons et
que très souvent ils reçoivent, ils prennent un plaisir très
grand à l'audition des borborygmes des écoulements de
lavabos ; ils nous entraînent vers un moment de plaisir
partagé, en attention conjointe en quelque sorte, de ces
mêmes bruits, ou parfois d'autres jolies rythmicités
sonores, par exemple obtenues en faisant résonner des
gouttes d'eau sur un récipient renversé, et en même temps
ils reprennent plaisir aux échanges vocaux (Haag, 2005).
Comment le comprendre ? Est-ce que le «sameness»
(recherche d'immuabilité) de L. Kanner, en lien probable
avec la non-régulation émotionnelle faisant fuir justement
tout aléatoire, serait déjà à l'oeuvre ? Là où cette
perception, chez le f tus sans problème, installe au
contraire les racines prénatales de l'échange émotionnel
(de « type chant et danse » dit S. Langer citée par Meltzer,
1984), en même temps que des sursauts de perceptionconscience et par là-même d’un noyau très primitif
d’identité /altérité, ici se produirait un détournement de la
voix humaine bloquant l'un des deux principaux canaux
d'échanges émotionnels périnataux (Trevarthen, 1989),
ramenant ainsi à cette hypothèse de la fragilité au
débordement émotionnel dès la vie prénatale, et plus
particulièrement au débordement émotionnel à l'inattendu.
Du côté neurophysiologique et en liaison avec ces
réactions au changement, à l'inattendu, signalons la
communication de C. Barthélémy au récent congrès « Psy
et système nerveux central » (Cité des sciences, nov.
2004) : la réponse électrophysiologique appelée Mismatch
Negativity/négativité de discordance lors de la survenue,
rare et imprévue, d'une stimulation différente au sein d'une
séquence de stimulations auditives jusque là répétées de
façon régulière, se révèle chez l'enfant avec autisme très
différente, traduisant « le déclenchement très précoce par
la stimulation déviante d'une activation enregistrée au
niveau frontal gauche».
III Rassemblement de nos questions à l'adresse
des chercheurs en neurophysiologie.
Nous sommes naturellement bien assurés, quelle
que soit la disqualification courante dans les médias à
l'encontre des psychanalystes qui auraient ignoré le
cerveau, qu'aucune de nos opérations mentales, même les
plus complexes, n'existe sans le substrat d'un
fonctionnement neurophysiologique cérébral et un grand
nombre d'entre nous sont très attentifs aux recherches de
laboratoire en cours. Mais ne serait-il pas sage de ne pas
déclarer cause première de l'autisme la non activation
d'aires qui n'est peut-être que la conséquence d'autres
dysfonctionnements ? La question est bien posée à la fin
de l'article de M. Zilbovicius (2004), mais elle n'est pas
reprise dans le communiqué de l'INSERM ni dans les
diffusions médiatiques ; en effet, nous pouvons y lire: «
Une possible interprétation de ces résultats est que les
sujets autistiques pourraient être caractérisés par une
déviation attentionnelle vers des sons non vocaux, dans la
ligne des découvertes récentes sur la sensibilité accrue à
l'intensité sonore chez les sujets avec autisme ; de futures
La Lettre de l API
n°18 mai 2005
études devront investiguer si ce manque de
reconnaissance des stimuli vocaux cause, ou est une
conséquence, du pattern anormal d'activation corticale[..]
La ressemblance marquée des déficits de traitement de la
voix et de la reconnaissance des visages suggère un
mécanisme commun sous-tendant ce traitement anormal
de l'information sociale » (Gervais, Zilbovicius et coll.,
2004).
S'il en est bien ainsi, la question que nous
adresserions finalement aux chercheurs maniant l'IRM
fonctionnelle serait donc: dans quelle mesure les non
activations de ces aires, dont les fonctions spécifiques sont
de plus en plus répertoriées - mais relativement
modelables par l'expérience cf plus loin C. Vidal - ne sontelles pas des phénomènes transitoires et jusqu'à un
certain point réversibles qui pourraient être des réactions
en quelque sorte « protectrices » par rapport à ce danger
désorganisant du débordement émotionnel, ce qui serait
sans être à rapprocher de l'augmentation des hormones de
stress dans une étude menée par S. Tordjman et coll.
(1997), laquelle fut aidée cliniquement par l'élaboration
d'une « Grille de repérage clinique des étapes évolutives
de l'autisme infantile traité », dont, sur le terrain, des
praticiens ont à leur tour éprouvé l'utilité (Haag G. et coll.,
1995). Nous aborderions alors peut-être certains substrats
neuro-hormonaux, de ce que nous appelons « défenses
archaïques » en termes psychanalytiques, tel que le
« démantèlement » - entendre la dissociation - de l'appareil
perceptuel, qui fonctionne en général de façon
polysensorielle et consensuelle, en ses divers composants
sensoriels par relâchement de l'attention (Meltzer 1975), ce
qui permet de s'agripper à une lumière, à un son, à un
vertige labyrinthique etc. ; ce faisant, la perception des
corps et des choses dans leur globalité et leur individualité
formelle est annulée et par conséquent la perception de la
séparation des uns et des autres. On peut voir aussi des
clivages plus évolués :
sons purs/bruits
ou
émotions/représentations comme en témoigne D. Williams
quand elle parlait de combattre pour la séparation entre
son intelligence et ses émotions, clivage très connu des
psychanalystes
dans
d'autres
structures
psychopathologiques.
Ne serait-il pas intéressant, dans le projet annoncé
par M. Zilbovicius d'expériences semblables chez des
enfants, d'établir s'il y aurait corrélation entre l'activation ou
non de ces aires réceptrices de la voix et les progrès des
enfants autistes en communication ? Il serait important de
mentionner quels types de traitements leur ont été
proposés, car nous doutons que des programmes
purement rééducatifs entrepris dans la perspective d'aires
cérébrales à activer comme le conclut hâtivement le
communiqué de l'INSERM , puissent aboutir à d'aussi
bons effets que la conjonction d'abords éducatifs et
psychothérapiques travaillant parallèlement cette fragilité
émotionnelle
et
l'acquisition
progressive
des
représentations normales du moi corporel. C'est là notre
expérience pour un grand nombre de cas.
Mais nous concevons bien que ce retrait de la
réception de la voix, inhibant les frayages vers l'aire
concernée, s'il commence dès la vie pré et postnatale,
époque où le cerveau continue à se développer
intensément,
puisse
entraîner
un
véritable
appauvrissement de substance cérébrale, rendant
10
compte des résultats de l'IRM morphométrique publiés
par M. Zilbovicius en 2002 à savoir « une diminution
bilatérale de la substance grise localisée dans la région
temporale supérieure ».Dans quelle mesure des
suppléances sont-elles possibles dans les prises en
charge plus ou moins tardives ? Peut-on imaginer une
prévention par une action précoce y compris prénatale
en cas de circonstances stressantes patentes ou
dépressogènes tarissant cette modification universelle
de la voix maternelle ou paternelle qui sous-tend les
dialogues émotionnels périnataux, le «mothering »
traduit en français par « mamanais » (Trevarthen, 1981),
tarissement qui serait un facteur environnemental ne
pouvant qu'aggraver les facteurs de prédisposition
d'ordre génétique en cours de recherche? D'autres
questions surgiraient sans doute de rencontres entre
chercheurs cliniciens et expérimentateurs en imagerie et
biologie que, pour notre part, nous continuons à
souhaiter car elles ne pourraient qu'être favorables à ce
que les uns et les autres nous nous efforçons de faire
pour les sujets souffrant d'autisme et par conséquent
pour leurs familles. Ce devrait être facile à lire Catherine
Vidal, neurobiologiste, directrice de recherche à l'Institut
Pasteur : : « Nul ne conteste l'immense apport de
l'imagerie cérébrale, qui permet de voir le cerveau vivant
[..] au cours d'opérations mentales. Ces études ont aussi
montré l'importance de la variabilité individuelle dans le
fonctionnement du cerveau. Pour une fonction donnée,
des régions sont activées en commun, régions incluses
dans des réseaux qui diffèrent d'un individu à l'autre. La
formation de ces réseaux est largement dépendante de
l'expérience de chacun [..] Par exemple, la zone de
reconnaissance des visages n'a qu'une spécialisation
relative. Si l'on entraîne les sujets à distinguer des
oiseaux, des voitures, et même des objets abstraits, la
région déterminée pour reconnaître les visages s'active
tout autant ! [..] Difficile d'imaginer plus belle
démonstration des mécanismes de plasticité cérébrale
en fonction de l'expérience. [..] A l'évidence, la prudence
s'impose dans l'interprétation de l'imagerie cérébrale »
(Vidal, 2003). Là se placerait la discussion sur la relation
que l'on pourrait faire entre ce qui a été appelé déviation
attentionnelle dans cet article de Nature Neuroscience,
et la notion psychodynamique d'investissement ou non
investissement. Pour ce qui est des sujets avec autisme,
nous avons de toute façon à comprendre encore mieux,
les uns avec les autres, le déterminisme de cette sorte
de détournement des investissements humains
fondamentaux de la voix et du visage, mais dans le
respect, évidemment très souhaitable, des apports et
des réalisations thérapeutiques de chacun, que le
courant psychodynamique, pour sa part, cherche
constamment à améliorer.
1Je remercie Michel Haag pour sa relecture de ce texte et ses suggestions
2 Les deux pages de sa publication en anglais sont accessibles par l’obligeance de l’auteur à : « [email protected] »
3 Une page accessible par « [email protected] »
4 Souligné par nous car cela rejoindrait nos hypothèses ci-dessus énoncées.
5 « La mise en évidence de ces déficits perceptifs pourrait permettre l'élaboration de stratégies de rééducation visant à induire un traitement
spécifique des informations vocales et faciales, traitement qui semble ne pas s'être développé spontanément chez l'autiste ».
Contact et copyright : Dr G. Haag, 18, rue Emile Duclaux, 75015 Paris.
Se sont déjà associés à ces réflexions : Dr Heidy Allegaert, membre de l'ABOBEBE Bruxelles) ; Dr Pascale Ambroise, praticien
hospitalier, hôpital de jour La Colline 77 Meaux ; Dominique Amy, psychologue, psychanalyste (Collège de psychanalyse groupale et familiale, 92
Courbevoie; Prunelle Aziosmanoff, psychologue, psychothérapeute, Montrenil (93); Cléopâtre Athanassiou, psychanalyste (Société
Psychanalytique de Paris) Paris ; Sandrine Calmettes, psychiatre, psychanalyste (Association lacanienne internationale), chef du département de
psychiatrie infanto-juvénile de la Fondation Croix Saint-Simon (Paris); Laurence Carpentier, pédopsychiatre, psychothérapeute (Guidance infantile
Toulouse) ; Marie-France Castarède, Pr de psychopathologie à l'Université de Besançon, psychanalyste (SPP) ; Catherine Chollet, praticien
hospitalier (Toulouse) ; Alexandra Colinet, psychologue psychanalyste (SPF), Paris ; Nicole Cadaux-Marty, psychologue psychothérapeute
(AMPPEA), Toulouse; Annick Cukierman, psychiatre, psychanalyste (SPP), Charenton (92) ; Pierre Delion, psychiatre, psychanalyste, Pr de
pédopsychiatrie, CHU Lille ; Isabelle Delsol, pédopsychiatre (Guidance infantile Toulouse) ; Maurice Despinoy, psychiatre, psychothérapeute,
Marseille ; Bernard Dewitte, pédopsychiatre, psychanalyste, CAMSP, 59 Tourcoing ; Catherine Druon, psychanalyste (SPP) ; Hélène Dubinsky,
psychothérapeute. The Tavistock Clinic Teaching Staff (Londres) ; Louis Edy, pédopsychiatre,Paris; Dominique Fischesser, praticien hospitalier
(Intersecteur 7 Hauts-de-Seine); Jacques Fortineau, ex-Président de la Fédération française de psychiatrie, chef de service honoraire à l'hôpital
Esquirol (1er secteur infanto-juvénile de Paris), psychanalyste (SPP) ; James Gammill, M.D. (Cornell University, U.S.A.), psychanalyste d'adulte et
d'enfant (Société britannique de psychanalyse), formateur à la psychanalyse de l'adulte et de l'enfant en France, nombreuses activités
enseignantes en milieu universitaire et auprès d'équipes soignantes ; Bernard Golse, pédopsychiatre, psychanalyste, chef de service
pédopsychiatrique. Hôpital Necker-Enfants malades, Pr de psychiatrie de l'enfant et de l'adolescent à l'Université Descartes Paris V ; Catherine
Graindorge, Pr de psychiatrie de l'enfant et de l'adolescent à Paris XI, chef de service de la Fondation Vallée, Gentilly (94) ; Didier Houzel,
pédopsychiatre, psychanalyste, Pr de pédopsychiatrie (APF), CHU Caën ; Denise Huon, psychologue, psychanalyste (4e Groupe) ; Nicole
Jaucourt, psychothérapeute, Versailles ; Marie-Blanche Lacroix, pédopsychiatre, psychanalyste (SPP), Toulouse ; Dr Bianca Lechevalier,
psychanalyste (SPP), Caen ; Dr Florence Leclerc, psychanalyste (SPP), Paris; Béatrice Lehalle, pédopsychiatre, psychanalyste (SPP), Paris; Ann
Levy, psychologue, psychanalyste (SPP) ; Marie-Pierre Pougnet, psychologue, psychothérapeute, Vélizy (78) ; PierrettePoyet, psychanalyste,
Blois ; Régine Prat, psychologue-psychanalyste (SPP), 91 Bièvres ; Rémi Puyuelo, pédopsychiatre, psychanalyste (SPP), Toulouse ; Maria
Rhode, Pr à la Tavislock Clinic et à l'East London University, psychothérapeute ; Denys Ribas, pédopsychiatre, psychanalyste (SPP) Paris ;
Hélène Suarez-Labat, psychologue, Paris ; Serge Salabelle, psychiatre, hôpital de Meaux (77) ; Rosella Sandri, Dr en psychologie,
psychothérapeute (Bruxelles) ; Yaël Shavit, psychologue, psychanalyste (Paris) ; Jean-Michel Thurin, psychiatre, psychanalyste (Ecole de
psychosomatique), Paris ; Christine Touzé, pédopsychiatre, Paris ; Jacques Touzé, psychiatre psychanalyste, Paris ; Jacqueline Tricaud,
psychologue psychanalyste (SPP), Versailles; Simone Urwand, Dr en psychologie, psychothérapeute, Paris; Dr Anne-Marie Vaillant,
psychothérapeute, praticien hospitalier, intersecteur de Corrèze ; Dr Annette Watillon-Naveau, ex-Présidente de la Société belge de psychanalyse
et présidente de l'ABOBEBE (Bruxelles) ; Gianna Williams, The Tavistock Clinic Teaching Staff liste non close à laquelle on peut se joindre en
écrivant à G. Haag, 18, rue Emile Duclaux, 75015 Paris.
Certains des signataires ci-dessus et d'autres collègues se sont groupés en une Coordination internationale entre psychothérapeutes de
formation psychanalytique s'occupant du traitement des enfants avec autisme, qui a déjà tenu deux réunions à Paris. Pour s'y joindre, écrire soit à
D. Amy, 10, rue Carpeaux, 92400 Courbevoie, soit à G. Haag, adresse ci-dessus.
Références des publications citées :
Gervais H., Belin P., Boddaert N., Leboyer M., Coez A., Sfaello I., Barthelemy C, Brunelle F., Samson Y., Zilbovicius M. (août 2004) Abnormal
La Lettre de l API
n°18 mai 2005
11
cortical voice processing in autism. Nature Neuroscience, volume 7, number 8, July p. 801-802
Haag G. (1984), Réflexions sur certains aspects du langage d'enfants autistes en cours de démutisation, Neuropsychiatr. Enfance Adolesc ; 32
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Haag G. (1995), Tordjman S., Duprat A., Cukierman A., Druon C., Jardin F., Maufras du Chatellier A., Tricaud J., Urwand S. (1995 f), : Présentation
d'une grille de repérage clinique des étapes évolutives de l'autisme infantile traité. Psychiatrie de l'enfant, 38, 2., p. 495-527.
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Haag G. (2005), L'enfant autiste et l'objet sonore prénatal, à paraître dans Le Partage vocal originaire, M. F. Castarède éd.. Eres
Houzel D. (2002), L'aube de la vie psychique, Paris, E.S.F.
Maiello S. (1991), L'Oracolo, Un esplorazione alle radici della memoria auditiva, Analysis, Rivista Internazionale di psicoterapia clinica, Anno 2 N.3,
p. 245-268, trad. fr. L'objet sonore. L'origine prénatale de la mémoire auditive ; une hypothèse. Journal de la psychanalyse de l'Enfant, n° 20, p.4066
Maiello S. (1998), Trames sonores et rythmiques primordiales - Bulletin du Gerpen, vol. 39, p. 2-24- 38, avenue Ardoin, 94420, Le PIessis Trévise,
TéL/Fax : 01 45 94 16 30).
Meltzer D. (1975), Explorations in Autism, Roland Harris Trust, Clunie Press, trad. fr. G. et M. Haag et coll. Explorations dans le monde de
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Trevarthen C. (1989), Les relations entre autisme et le développement socioculturel normal : arguments en faveur d'un trouble primaire de la
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Zilbovicius M. (2002), L'imagerie cérébrale et l'autisme infantile. Document Fondation France Télécom, consultable sur
http://autisme.ocisi.net/front/travail.asp?id_contenir=145
Journées Nationales de la SFPEADA
10 et 11 juin 2005
"Quand l'enfant se développe autrement. Autismes - retards"
Faculté de Médecine de Tours
Aspects psychopathologiques des troubles envahissants du développement (Pascal Lenoir, Michel Basquin)
Handicap mental et société : soigner, éduquer, intégrer (Charles Aussilloux, Manuel Bouvard)
Aspects pédiatriques
Autisme, trouble du développement
Quels soins ? pour quels objectifs ? (Paul Bizouard, Alain Plantade, Sylvie Tordjman, Martine Barres, Jacques Hochmann)
autisme : de l exploration cérébrale à la recherche clinique et thérapeutique (Catherine Barthélémy, Claude Bursztejn)
Les réseaux de soins. Aspects transversaux (Gérard Schmit, Alain Lazartigues, Jacques Constant, Marie-Claude Courteix)
Recommandations pour la Pratique Clinique du diagnostic de l Autisme et des Troubles Envahissants du Développement
Les enfants qui se développent autrement : désordres de leur pensée et de leurs processus cognitifs
Parcours dans le temps Aspects longitudinaux (Philippe Mazet, Antoine Guedeney, Catherine Graindorge, Daniel Marcelli)
Renseignements : Jocelyne Yzon, tél : 02 47 47 60 94, fax : 02 47 47 82 92 [email protected] et [email protected]
Utilisation
des
antidépresseurs
chez
l’enfant
et
l’adolescent
et
augmentation
du
risque
suicidaire : Données et recommandations actuelles
Aurélie Grass, interne en pharmacie,
Isabelle de Beauchamp Pharmacien Centre Hospitalier - BP 100 38521 Saint-Egrève
Tel : 04 76 56 42 75 Fax : 04 76 56 45 89 e-mail : [email protected]
Le communiqué du 8.12.2004 de l’EMEA [1,3] (Agence Européenne du Médicament), au sujet de la paroxétine et des autres
Inhibiteurs Spécifiques de la Recapture de la Sérotonine (ISRS), fait le point sur les données déjà disponibles depuis le
22.04.2004, diffusées par l’intermédiaire de son comité scientifique (Committee for Medicinal Products for Human Use CHMP) :
Au cours d’essais cliniques des ISRS chez les enfants et adolescents :
Aucune mort par suicide n’a été rapportée,
Dans le traitement des épisodes dépressifs majeurs, tous les ISRS ont donné lieu à une augmentation des pensées
suicidaires et des tentatives de suicide ainsi que des troubles de l’humeur,
Dans la prise en charge des troubles anxieux, ces événements sont décrits aussi, mais de façon moins intense,
On ne peut exclure le risque de comportement suicidaire, d’auto et hétéro-agression chez les enfants et adolescents traités
par ISRS même si les données sont limitées,
Des différences entre ISRS apparaissent dans la base de données de recherche en médecine générale britannique, mais
n’ont pas été mises en évidence dans les essais cliniques randomisés.
Sur la base de ces données, l’EMEA rappelle que :
Les ISRS et IRSN (inhibiteurs de la recapture de la sérotonine et noradrénaline) ne sont pas autorisés en Union Européenne
pour le traitement de la dépression ou de l’anxiété chez les enfants et adolescents.
Si la décision devait être prise de traiter un jeune patient, celui-ci devra faire l’objet d’une surveillance attentive et plus
particulièrement en début de traitement, à la recherche d’apparition de conduite suicidaire, auto et hétéro-agressivité. Le traitement
ne doit pas être arrêté brutalement, mais progressivement sur quelques semaines voire mois, pour éviter l’apparition d’un
La Lettre de l API
n°18 mai 2005
12
syndrome de sevrage.
Aucun antidépresseur tricyclique n’a jamais été autorisé en Europe dans le traitement de la dépression chez l’enfant de moins
de 16 ans [4].
L’AFSSAPS (Agence Française de Sécurité Sanitaire des Produits de Santé) reprend le 10.12.2004 [5] ce communiqué de
l’EMEA :
Elle rappelle qu’en France le DEROXAT ® est contre-indiqué avant l’âge de 15 ans, quelle que soit son indication,[6]
Elle rappelle qu’en France l’EFFEXOR ® reste contre indiqué avant l’âge de 18 ans, quelle que soit son indication.[7]
Elle recommande que le traitement de première intention de la dépression de l’enfant et de l’adolescent soit la psychothérapie.
Si une chimiothérapie par antidépresseurs est envisagée, la surveillance attentive du patient est de règle.
[8-12] Etat des lieux, modification de la réglementation et conseil au patient (FDA) :
De tous les antidépresseurs, seule la fluoxétine a été approuvée par la Food and Drug Administration américaine dans le
traitement de la dépression en pédiatrie (03.11.2003). La FDA décide le 15.10.2004 d’ajouter une mention sur le risque suicidaire
aux notices, et d’ajouter une « boîte noire » sur les conditionnements des ISRS, pour avertir les professionnels de soins, insister
sur le besoin de surveillance étroite des patients, et décrire les risques encourus. Cette « boîte noire » est l’avertissement le plus
grave de la réglementation : la publicité remise par l’industrie pharmaceutique aux médecins n’est pas permise pour les produits
porteurs de cet avertissement.
L’agence a mis en ligne le 3.11.2004 une information destinée aux familles et patients traités par antidépresseurs : une méta
analyse reprenant le résultat de 24 études sur 4400 enfants et adolescents prenant un antidépresseur ou un placebo pendant 1 à
4 mois, a montré qu’aucun patient ne s’est suicidé, mais que 2% des patients sous placebo et 4% des patients sous
antidépresseur sont devenus suicidaires. Un patient commençant un antidépresseur devrait donc voir son médecin une fois par
semaine le premier mois, toutes les deux semaines le mois suivant, une fois par mois dès le troisième mois mais plus souvent en
cas de problème ou de question.
[13] Manque d’informations sur les essais cliniques et les données épidémiologiques à propos de l’usage d’ISRS
chez l’enfant et l’adolescent :
Les auteurs ne possèdent pas assez d’informations provenant d’essais cliniques ou de données épidémiologiques sur la
sécurité d’emploi des ISrS chez les enfants et adolescents. Cependant, une étude cas-témoins conduite dans trois pays n’est pas
en faveur de l’existence d’un lien entre ISRS et suicide. De ce fait, les IRSS ne doivent pas constituer le traitement de première
intention de la dépression modérée à peu sévère de l’enfance. Les interventions non pharmacologiques sont à préférer. Le rapport
bénéfice/risque de l’instauration d’un traitement par ISRS chez l’enfant et l’adolescent est à discuter avant la prescription, et il est
nécessaire d’en informer les parents et le patient. Des recherches complémentaires dans ce domaine sont urgentes et
indispensables.
[14] Analyse critique des publications de résultats d’essais cliniques d’ISRS dans la dépression majeure chez l’enfant
et l’adolescent :
Six publications d’essais cliniques randomisés contre placebo testant l’efficacité et la sécurité d’emploi des ISRS dans le
traitement de la dépression majeure des enfants et adolescents, obtenues sur Medline, ont été analysées. Deux études
revendiquaient des résultats significatifs sur les critères principaux mais ces résultats ont été contestés par des analyses
ultérieures. Aucune étude n’examine la sécurité d’emploi, notamment concernant les idées suicidaires et les tentatives de suicide,
et leur lien possible avec le traitement. Les auteurs dénoncent les biais importants des essais cliniques d’ISRS : collecte des effets
indésirables non standardisée, exclusion des sujets suicidaires à l’inclusion, pas de randomisation stratifiée sur l’âge, petits
échantillons, conflit d’intérêt des auteurs avec des firmes pharmaceutiques et biais de publication.
[15] Une comparaison de la littérature publiée et des données non publiées à propos des ISRS dans la dépression de
l’enfant :
Les auteurs comparent les données disponibles dans la littérature aux données non publiées au sujet de la sécurité d’emploi
des ISRS dans la dépression des enfants et adolescents. Dans le cas de la fluoxétine, les études publiées font état d’une balance
positive du rapport bénéfice/risques, ces données sont confirmées par les études non publiées. Concernant la paroxétine et la
sertraline, la littérature fait état d’un faible bénéfice ou de résultats équivoques. Le rapport bénéfice/risques devient défavorable au
produit selon les données non publiées. La non publication des données de certains essais cliniques peuvent ainsi amener à des
recommandations erronées.
[16] Le comité de sécurité du médicament anglais avertissait en juin 2004 que le risque de pensées et de comportement
suicidaires était entre 1,5 et 3,2 fois plus élevé chez les jeunes patients prenant de la paroxétine en comparaison avec le placebo.
La FDA rappelle quant à elle que les ISRS doivent être utilisés avec précautions quel que soit l’âge.
Le National Institute of Clinical Excellence publiera des recommandations pour le traitement de la dépression chez l’enfant en
2005 .
[17] L’intérêt du signalement par les patients et les proches des effets indésirables, l’exemple de la paroxétine.
La Medicines and Healthcare products Regulatory Agency britannique informe que les ISRS sont en grande partie inefficaces
dans la dépression sévère chez les enfants et adolescents, et peuvent causer des comportements suicidaires et des autoagressions.
Bien qu’il soit effectué en termes non scientifiques, le signalement des effets indésirables par les patients et leurs proches, et
notamment les effets indésirables sur le comportement, apportent des informations que le signalement des mêmes effets
indésirables par des professionnels de santé ne pourront jamais apporter. Ce fut le cas pour la description de syndrome de
sevrage et de tendance suicidaire, qui a été sous-estimée chez les patients sous paroxétine.
[18] Une critique des essais cliniques publiés :
La Lettre de l API
n°18 mai 2005
13
Dans certains essais cliniques d’ISRS versus placebo chez de jeunes patients, on constate l’existence d’un taux élevé de
réponse des patients sous placebo (40 à 60%). Les antidépresseurs chez l’enfant sont faiblement (voire non-) efficaces, si ce n’est
par un effet placebo.
La fluoxétine est le seul ISRS utilisable chez l’enfant, bien que les preuves de son efficacité soient faibles, dues aux nombreux
biais que comporte l’étude. Les laboratoires ont recours à de larges effectifs de patients dans leurs essais cliniques, dans le but de
détecter des effets très faibles de leurs molécules, qui n’ont aucune signification en clinique. Certains protocoles d’essais cliniques
ne comportent pas de check-list d’effets indésirables à relever. La non-publication de certains résultats d’essais cliniques, ainsi que
la publication sans analyse critique de la part des revues, vont à l’encontre de la pratique de l’evidence-based-medecine
(médecine factuelle).
Les médecins devraient être prévenus que les effets indésirables « psychiatriques » des ISRS prennent parfois le pas sur les
symptômes de la dépression. Les médecins courent le risque d’augmenter les doses d’ISRS au lieu de les diminuer, et d’ajouter
des traitements normothymiques, voire des neuroleptiques atypiques.
[4, 19-21] Agence de régulation des médicaments et produits de santé britannique (Medicines and Healthcare
Regulatory Agency MHRA) :
Bilan des indications actuelles des ISRS chez l’enfant et l’adolescent, de l’efficacité dans la dépression majeure, la sécurité
d’emploi et avis sur le rapport bénéfice / risque : seule la fluoxétine obtient un avis favorable au vu du rapport bénéfice / risques.
Elle ne possède toutefois pas d’indication dans la dépression en dessous de 18 ans.
Le but n’est pas de bannir ces traitements mais de s’assurer que les prescripteurs et les patients soient au courant des
risques et sachent comment les surveiller et y remédier. cf Tableau
[22] Pharmacocinétique de la fluvoxamine chez les enfants et les adolescents :
Les données pharmacocinétiques obtenues chez seize enfants et dix-huit adolescents souffrant de troubles obsessionnels
compulsifs montrent que les enfants, et plus spécialement les filles, ont un taux d’exposition supérieur à la fluvoxamine que les
adolescents, qui ont le même profil d’exposition que les adultes.
Chez
enfant
et
adolescent :
Indication
Efficacité dans
épisode
dépressif
majeur (essais
cliniques)
Sécurité
emploi
Rapport
bénéfice
risque : avis
de la MHRA
Fluoxétine
PROZAC
Sertraline
ZOLOFT
Citalopram
SEROPRAM
Aucune
TOC
Démontrée
Non
démontrée
Pas assez
démontrée
↑
EI
(dont
auto
agression,
pensées
suicidaires) par
rapport
au
placebo
↑
auto
agression
par
rapport au placebo
dans 1 essai sur 2
PAS d ↑ auto
agression et pensées
suicidaires par rapport
au placebo
↑
manie,
hypomanie par rapports
aux adultes
Favorable
Défavorable
Aucune
Défavorable
Escitalopram
SEROPLEX
Aucune
Aucune
donnée
Fluvoxamine
FLOXYFRAL
Paroxétine
DEROXAT
TOC
Venlafaxine
EFFEXOR
Aucune
Aucune
Aucune
donnée
Non
démontrée
Non
démontrée
Aucune
donnée des essais
cliniques
Aucune
donnée des essais
cliniques
↑ auto
agression
et
pensées
suicidaires par
rapport
au
placebo
↑
auto
agression
et
pensées
suicidaires par
rapport
au
placebo
Présumé
Défavorable
Impossible
statuer
Défavorable
Défavorable
de
Tableau I (d’après MHRA)
dimanche 12 décembre 2004, 19h16
Philippe Douste-Blazy opposé aux antidépresseurs pour les mineurs
PARIS (Associated Press) - Le ministre de la Santé Philippe Douste-Blazy a souhaité dimanche que la prescription des
antidépresseurs soit interdite aux moins de 18 ans, afin de lutter contre les suicides des adolescents.
Philippe Douste-Blazy a expliqué sur Europe-1 qu'il allait écrire en ce sens à l'AFSSAPS. "Je leur demanderai de voir s'il n'est
pas possible d'interdire la prescription d'antidépresseurs au-dessous de 18 ans", a-t-il expliqué.
"C'est absolument majeur de ne pas donner des antidépresseurs", a ajouté le ministre qui a précisé qu'il suivrait la décision de
l'AFSSAPS. Philippe Douste-Blazy, qui était interrogé sur la recommandation de l'Agence Européenne du Médicament de ne plus
prescrire ces médicaments aux mineurs, s'est montré inquiet à ce sujet, alors que "nous avons un des taux de suicide des
adolescents les plus élevés en Europe".
Le ministre a par ailleurs ajouté qu'il présenterait en mars ou "même avant" le "grand plan de santé mentale qu'il nous faut",
affirmant que le système de soins français était "en retard sur la psychiatrie, sur la santé mentale". Associated Press.
Références
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2. http://www.emea.eu.int/pdfs/human/referral/19294204en.pdf, consulté le 16.12.2004
3. http://www.emea.eu.int/pdfs/human/press/pr/1120604en.pdf, consulté le 16.12.2004
4. http://www.mhra.gov.uk/news/2004/SSRIfinal.pdf, consulté le 16.12.2004
5. http://agmed.sante.gouv.fr/htm/10/filcoprs/041204.htm, consulté le 15.12.2004
6. http://agmed.sante.gouv.fr/htm/10/filcoprs/030601.htm, consulté le 15.12.2004
7. http://agmed.sante.gouv.fr/htm/10/filcoprs/030902.htm, consulté le 15.12.2004
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La Lettre de l API
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Jean-Luc Graber
L’ enfant, la parole et le soin
La clinique mise à l'épreuve
Disparu en octobre 2000, Jean-Luc Graber laissait derrière lui un grand nombre de textes, écrits sur près de trente ans et
inspirés par son expérience clinique de pédopsychiatre et de psychanalyste. Le présent ouvrage regroupe dix-sept de ses
essais lesplus importants, dont plusieurs inédits, reflétant pour l'essentiel son travail de psychothérapeute et de consultant
auprès des enfants, mais aussi sa pratique de médecin-chef dédiée au service public, et concernant tout autant l'institution que
ses échanges féconds avec les autres champs du soin et de la prévention.
Fondé sur les lignes les plus originales de sa pensée, ce livre explore le vaste champ d'une clinique placée sous le double
signe de l'écoute et du discernement théorique.
Ce recueil, présenté comme un témoignage et un hommage, se veut aussi une invitation à poursuivre par la pratique les voies
ouvertes par Jean-Luc Graber dans l'engagement clinique et la rigueur de la réflexion. C'est dans cette perspective qu'on lira
les contributions originales de quelques-uns parmi ses proches qui aujourd'hui encore, dans le partage et le débat, prolongent
une uvre qui reste vivante.
Jean-Luc Graber (1942 - 2000) était chef de service en pédopsychiatrie à Lyon.
Avec les contributions de: André Beetschen, psychiatre, psychanalyste, Anne Bourquin-Chossegros, psychanalyste, André Carel,
psychiatre, psychanalyste, Bernard Chervet, psychiatre, psychanalyste, Jean Furtos, psychiatre, Françoise Molénat, psychiatre
Notice biographique par Catherine Graber
Ouvrage coordonné par Janine Chomier, Christine Gay, Monique Guiran- Verry, Frédéric Jarset Geneviève Ruet
avec le concours de René Kaës.
1 volume -16 x 24 - 256 pages Eres - 2004 - ISBN : 2-7492-0361-2 - 25 €
Table des matières
Avant-propos des coordinateurs
Notice biographique, Catherine Graber
L'effroi, la rencontre et le psychiatre, Jean Furtos
Au croisement des espaces transitionnels, Françoise
Molénat
1 - Parole, désir, interdit
Le symptôme comme parole avortée
Du bon et du mauvais usage du secret
L'enfant et la loi
Peurs et déplaisirs d'apprendre
L'intime, le privé et le public. Le secret, la discrétion et la
transparence. Essai de topique interpsychique, André
Carel
2 - Avatars du spéculaire
Autour de l'anamorphose
Réflexion sur le double et l'identité spéculaire
L'annonce du handicap, acte de nomination ?
La perversité en trompe-l' il (les aménagements
pervers familiaux et institutionnels au regard de
l'autisme)
Face à l'inquiétant, André Beetschen
3 - Les mots, le corps, la mort
Les mots en psychothérapie
L'enfant et l'écriture
La psychosomatique de l'enfant ou les balbutiements
du corps
Comment parler de la mort aux enfants et aux
adolescents ?
Ecrit sur le corps d'amour et de mort. Le hiéroglyphe de
l'enfance,
Anne Bourquin-Chossegros
4 - De l'écoute à l'initiative : accueillir l'enfant
psychotique
Note liminaire, Bernard Chervet
Expérience dite du « mi-temps thérapeutique »
Une alternative à l'hôpital de jour
Approches éducatives de l'enfant psychotique :
questionnement d'un psychiatre
Le soin séquentiel avec hébergement. Intérêt et
limites
Le travail de passage, Bernard Chervet
Le passage en question (entre prévention et soin)
Bibliographie.
Le Festival Vidéo Psy de Lorquin, se déroulera du 7 au 9 juin prochain dans son cadre habituel : le CHS de Lorquin
Comme chaque année, son ambition est d être le reflet, par l image de l actualité de la santé mentale et des faits de société qui s y rattachent
au travers d un double regard, celui des professionnels de l image, témoins du regard social et celui des professionnels de santé soucieux
de mettre en image, leurs pratiques, leurs expériences et leurs interrogations.
Ce panorama s élargira cette année à une nécessaire dimension transculturelle avec la collaboration de l Association Minkowska et de
Psychiatrie sans Frontière. Ces films venus d ailleurs, nous permettrons de mieux comprendre les différentes approches culturelles de la
souffrance psychique.
Notre champ professionnel traverse actuellement de graves difficultés amenant un questionnement identitaire. Que ce 29ème Festival nous
ouvre des perspectives plus sereines, que des témoignages enthousiastes nous permettent de relancer une dynamique ou la psychiatrie
retrouvera ses lettres de noblesse, s articulant comme il se doit sans conflit dans le champ de la santé mentale.
Pour tout renseignement, rendez-vous sur le site du festival : www.cnasm.prd.fr
La Lettre de l API
n°18 mai 2005
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API
Association des Psychiatres de secteur Infanto-juvénile
bulletin d adhésion à découper ou photocopier, à remplir en lettres d imprimerie, merci
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PH temps partiel
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Retraité
Cotisation 2005 : 40 Euros
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