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Guide de visite
Gros caractères
Paul Cézanne (1839-1906), Baigneurs, 1899-1900, Paris, musée d’Orsay
Introduction
À partir de la seconde moitié du XIXème siècle, une esthétique nouvelle fait son apparition dans le domaine de l’art et vient
bouleverser les codes artistiques en vigueur. Certains artistes
abandonnent les représentations fidèles et/ou idéalisées
de la nature au profit d’une approche beaucoup plus intuitive,
et subjective : la sensation.
À travers cette démarche, ils veulent traduire en peinture
les multiples perceptions, à la fois physiques, émotionnelles
et sensorielles, que leur provoque la vue des paysages.
Paul Cézanne est le premier à parler du terme de « sensation » : « Peindre d’après nature, ce n’est pas copier l’objectif, c’est réaliser ses sensations. »
Cette exposition vise à montrer comment les artistes, de
Gustave Courbet à aujourd’hui, ont appréhendé la nature à travers le prisme de leurs sensations.
Gustave Courbet, Solitude, 1866, huile sur toile,
Musée Fabre, Montpellier Méditerranée Métropole
Salle 1
Matiérisme, magnétisme,
réalisme :
Courbet et l’épaisseur du monde
La peinture de paysage tient une place très importante dans l’œuvre de Gustave Courbet. L’artiste puise
une grande partie de son inspiration dans sa région natale, la
Franche-Comté. Souhaitant reproduire une vision juste de son
environnement, il pratique régulièrement la peinture en extérieur. Il rejette certaines règles académiques comme celle
du « beau idéal ».
Courbet retranscrit ses impressions physiques, émotionnelles mais aussi sensorielles à travers ses toiles. Pour cela, il a
recours à plusieurs procédés :
• Il réalise ses tableaux dans un cadrage très serré.
Le spectateur se sent comme aspiré, emprisonné.
• Il utilise son couteau à palette pour peindre.
Au départ utilisé pour mélanger les pigments, cet outil lui permet
d’appliquer la peinture par larges couches. L’artiste peut ainsi traduire l’épaisseur, la texture des éléments naturels : roches,
feuillages, écorces…
Ici, dans son œuvre « Solitude », Courbet nous livre ses
sensations : celles de pénétrer dans une nature mystérieuse,
intacte, pure. Les couches de peintures se superposent et sont
traitées au couteau à palette pour donner une impression d’aspérité à la roche. Il réalise un paysage où la lumière du ciel et
l’ombre de la végétation se côtoient et dialoguent.
Claude Monet, La Seine à Port-Villez, Vers 1890, Huile sur toile,
Paris, musée d’Orsay, legs du comte Isaac de Camondo, 1911
Salle 2
Le triomphe de l’impression
L’impressionnisme apparaît vers 1874 et tire son nom
du célèbre tableau de Monet « Impression, soleil levant ». Les
artistes impressionnistes sont sensibles à la lumière et aux
couleurs changeantes de la nature. L’instant est privilégié.
Chaque peintre utilise une technique personnelle :
• Cézanne fait ressortir les formes géométriques et
emploie la technique de l’empâtement.
• Pissarro pose sa peinture sous forme de virgules.
• Signac emploie la technique de la touche divisée : il
pose des petites touches de couleurs différentes pour
représenter les formes.
• Monet se concentre sur la lumière et ses variations. Il
travaille par séries : représenter le même motif à
différents moments.
Monet explore son environnement en profondeur au cours
de ses voyages, et dans sa propriété de Giverny. Monet ne se fie
qu’à sa perception de la nature : « Je n’ai que le mérite d’avoir
peint directement devant la nature, en cherchant à rendre mes
impressions ».
Admirez son tableau « La Seine à Port-Villez ».
Monet peint un paysage près de Giverny. Comme il a besoin
d’une connaissance profonde de la nature pour peindre, il dispose à Argenteuil d’un atelier-bateau, qui lui permet de capter
avec précision les reflets et les mouvements de la Seine.
Paul Sérusier, Pins et Peupliers, Huile sur toile, Collection Particulière, Londres
Pierre Bonnard, Le Cannet, 1930, Huile sur toile, Toulouse, Fondation Bemberg
Salle 2
L’ équivalent passionné
d’une sensation reçue :
Sérusier et Bonnard
au seuil du paysage intérieur
Un groupe de peintres se crée autour de Paul Sérusier,
les Nabis, signifiant « Prophètes » en hébreu. Sensibles aux
couleurs changeantes de la nature, les peintres nabis travaillent
à partir de leurs idées spirituelles et intellectuelles. Ils se
libèrent du réalisme et de l’impressionnisme, ne cherchent plus
à représenter la nature de manière fidèle, mais peignent les motifs tels qu’ils les voient, en suivant leurs sensations.
Par exemple, dans son tableau « Pins et peupliers », Sérusier accentue les contours des arbres avec de la peinture jaune
et ajoute des touches de couleurs plus claires dans le ciel.
Pierre Bonnard sera membre des Nabis, mais s’éloignera de ce mouvement vers 1900. Lors de ses nombreux séjours
sur la Côte d’Azur, il relève observations et sensations dans un
agenda, qu’il retranscrit ensuite en peinture.
L’historien de l’art Jean Clair définit la peinture de Bonnard
comme « une sensation de globalité visuelle ».
Bonnard s’installe au Cannet, dans le Sud de la France, en
1922. Il prend conscience de l’importance de la couleur et de
son pouvoir expressif : « Dans la lumière du Midi, tout s’éclaire
et la peinture est en pleine vibration». Ses tableaux sont inondés
de tons jaunes, orangés, dorés et les ombres et lumières sont
plus marquées, comme le montre son tableau « Le Cannet ».
Nicolas de Staël, Le Lavandou, 1952, Huile sur toile marouflée sur bois, Paris,
Centre Pompidou, musée national d’art moderne, centre de création industrielle,
Don de M. et Mme Jacques Dubourg, 1959
Salle 3
Nicolas de Staël
et le vertige des sens
Dès sa jeunesse, Nicolas de Staël réalise une série de
voyages au Maroc, en Italie, et en France notamment.
En 1951, marqué par la technique de la gravure et la
visite d’une exposition de mosaïques, N. de Staël va privilégier la verticalité des toiles et composer de larges damiers
de couleurs, rappelant le travail de la gravure.
Regardez « Le Lavandou ». En 1952, N. de Staël peint sur
le motif en Provence. Ses toiles transcrivent les forts contrastes
de lumière qu’il observe là-bas : « la lumière est tout simplement fulgurante ici » écrit-il. Il n’hésite pas à juxtaposer des
couleurs pures.
N. de Staël développe son propre style artistique, aux
frontières de la figuration, pour traduire sur la toile ses
« vibrations ».
À partir de 1953, N. de Staël s’isole et s’installe à Antibes. Douloureuse, la solitude est selon lui nécessaire au
dépassement de soi. Il travaille beaucoup, ses peintures
présentent un aspect plus fluide et la matière est allégée.
N. de Staël met fin à ses jours en 1955, laissant inachevée sa dernière œuvre, intitulée « Le Concert ».
Anna-Eva Bergman, N°2-1966 Finnmark Hiver, 1966,
Vinylique et feuille de métal sur toile, Antibes, Fondation Hartung-Bergman
Salle 4
« L’art d’abstraire »
d’Anna-Eva Bergman
Anna-Eva Bergman, artiste norvégienne et française, a
d’abord fait une carrière d’illustratrice. Elle qualifie sa peinture
de « non figurative » et préfère définir son travail comme un
« art d’abstraire » plutôt qu’un art abstrait.
Chaque peinture est construite à partir d’un long et complexe processus de fabrication, intégrant le nombre d’or,
la couleur des fonds qui accueillent les feuilles de métal (or,
argent, bronze…) mais aussi une palette restreinte de couleurs
travaillées en couches successives qui se juxtaposent ou se
superposent.
La valeur du nombre d’or est proche de 1,6180339887.
Ce nombre est présent dans quelques cas dans la nature
(l’ordre des écailles de pomme de pin ou de l’écorce d’ananas).
Il a été utilisé par de nombreux artistes, dans l’architecture (Le
Corbusier), la musique (Xenakis) ou la peinture (Dalí).
Admirez son tableau « N°2-1966 Finnmark Hiver ». Le
Finnmark se situe au nord de la Norvège. Là-bas, les montagnes côtoient les fjords, baignés d’une lumière singulière qui
fait la beauté de cette région.
Les feuilles d’or que Bergman dispose sur la toile matérialisent les reflets du soleil qui éclairent la mer. Mêlées aux
feuilles de métal, l’ensemble crée ainsi l’effet d’un mouvement
et contraste avec l’immobilité du ciel accentuée par l’aplat de
couleur noire. S’en dégage une certaine spiritualité mais aussi
une énergie vitale.
Hans Hartung, T1980-R37, 1980,
Acrylique sur toile, Antibes,
Fondation Hartung-Bergman
Hans Hartung, T1980-R38, 1980,
Acrylique sur toile, Antibes,
Fondation Hartung-Bergman
Hans Hartung, T1980-K1, 1980,
Acrylique sur toile, Antibes,
Fondation Hartung-Bergman
Hans Hartung, T1981-H24, 1981,
Acrylique sur toile, Antibes,
Fondation Hartung-Bergman
Salle 5
La nature pulvérisée
d’Hans Hartung
Marqué par Cézanne et l’expressionnisme, Hans Hartung
développe dans les années 1920 une peinture abstraite et
accorde une place très importante au ressenti corporel et émotionnel dans son travail.
Dans les années 1970, Hartung s’installe dans sa propriété d’Antibes, qu’il a bâtie avec sa femme Anna-Eva Bergman.
Il y conçoit un atelier lui permettant de produire des œuvres de
grandes dimensions. L’artiste fabrique lui-même différents
outils pour les expérimenter sur ses toiles.
Ses tableaux traduisent la dynamique de ses gestes
mais aussi son investissement physique lors de leur réalisation.
Hartung élabore des toiles fortes et expressives.
Les 4 œuvres présentées dans ce livret ne constituent pas
une série, mais elles ont la particularité d’être composées sur
des toiles de même format carré et de même fond.
Remarquez le contraste entre les fonds, élaborés avec un
pulvérisateur, aériens, légers, et la peinture noire, dense et violente. Ces grandes projections explosives sont obtenues à l’aide
de balais fabriqués avec des branches de genêts.
La production de Hartung a donc un lien profond avec
la nature. Cette dernière sert d’instrument pour transcrire la
sensation que l’artiste se fait du monde.
Giuseppe Penone, Indistinti confini, 2012,
Marbre blanc de Carrare et bronze, Collection particulière
Salle 5
Penone,
de l’arbre au marbre
Giuseppe Penone, éminent artiste contemporain,
appartient au mouvement Arte Povera qui défie la société de
consommation.
À travers cette revendication, il fait du végétal, et plus
particulièrement de la figure de l’arbre, l’élément dominant
de son œuvre. Il écrit ainsi en 1968 : « Je sens la respiration de
la forêt, j’entends la croissance lente et inexorable du bois… ».
Il cherche à exalter la nature en révélant ses mouvements, sa respiration et sa temporalité. Pour ce faire, il
utilise l’ensemble de ses sens ; mais c’est par le toucher que
l’artiste semble obtenir les plus fortes sensations.
Il utilise des matériaux traditionnels de la sculpture qu’il
étudie et expérimente. Il travaille avec des textures qui, selon
lui, imitent le mieux l’arbre et/ou la nature. Par exemple
le bronze, dont la couleur varie en extérieur selon le lieu et
le climat, prend des couleurs brunes ou vertes proches de la
végétation.
Ces remarquables sculptures d’arbres sont en marbre de
Carrare. Ce matériau, taillé avec précision, permet de reproduire les reliefs de l’écorce des arbres. De plus, le bronze, qui
recouvre les extrémités des branches coupées, restitue la
couleur du bois.
Crédits Photographiques :
Page 2, 6 ©RMN-Grand Palais (musée d’Orsay) / Hervé Lewandowski.
Page 4 © Musée Fabre de Montpellier Méditerranée Métropole - photographie Frédéric Jaulmes.
Page 8 © Photographie François Fernandez.
Page 8 © Fondation Bemberg © Adagp, Paris 2015.
Page 10 © imageArt, Claude Germain ©Adagp, Paris 2015.
Page 12, 14 ©Fondation Hartung-Bergman ©Adagp, Paris 2015.
Page 16 © Musée des Beaux-Arts de Grenoble / photo Jean-Luc Lacroix.
Merci de votre visite,
à bientôt au
Musée Courbet

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