Chapitre 1.3. : Modèle sédimentaire de la plaine alluviale de l`Aube.
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Chapitre 1.3. : Modèle sédimentaire de la plaine alluviale de l`Aube.
Chapitre 1.3. : Modèle sédimentaire de la plaine alluviale de l'Aube. Vanessa Teles et Ghislain de Marsily 1. Objectif L'objectif de ce travail est d'obtenir une image de la structure sédimentaire et de l'hétérogénéité de la plaine alluviale en reproduisant la mise en place des alluvions de l'Aube à l'échelle de plusieurs kilomètres carrés, depuis le dépôt des alluvions anciennes (Weichselien) jusqu'à l'actuel. 2. Présentation du site et des données disponibles 2.1. Zone prise en compte pour la modélisation On considère la vallée alluviale de l'Aube sur 4 km de large et 7 km de long, entre Granges sur Aube et Plancy l'Abbaye (figure 1.3.1). La vallée secondaire de la Superbe débouchant au nord du domaine n'est pas prise en compte. Le substratum crayeux n'est visible qu'au niveau de quelques buttes culminant à 100 m NGF dans la zone. Sous les alluvions récentes, la craie est à 70 m NGF en moyenne, soit à 5 m de profondeur. Les alluvions anciennes affleurent latéralement à des cotes de 83 m NGF formant les basses terrasses. Dans la plaine alluviale actuelle, les alluvions anciennes affleurent jusqu'à 80 m NGF constituant les montilles ou très basses terrasses. Figure 1.3.1. Site d'étude. 2.2. Reconstruction des différentes épisodes sédimentaires Sur cette zone, plusieurs données sont disponibles; d'une part, la thèse de Stéphane Gaillard (1999), d'autre part, les sondages effectués par Jean-François Pastre et Pierre Antoine (Rapport février 1999). Ces sondages permettent de déduire un scénario de formation de la plaine actuelle (voir paragraphe suivant). Ce scénario n'a pu être confronté aux données polliniques et aux datations 14C qui n'étaient pas disponibles au moment de la modélisation. Cependant, il prend en compte des informations issues de communications orales avec Pierre Antoine et Stéphane Gaillard. Le nom des différentes périodes correspondent donc à des éta[es de la simulation et non à des épisodes climatiques calibrés grâce à des datations. Analyse du remplissage alluvionnaire 33 La nappe graveleuse weichselienne mise en place dans un système de chenaux en tresse sous régime périglaciaire (Antoine et Pastre, 1999) est présente sous les alluvions récentes dans la vallée et sur les coteaux à une cote de 83 m NGF. La phase suivante, appelée Bölling dans le modèle, est sans doute une importante incision qui amène le fond des chenaux à une altitude moyenne de 71 m NGF. A la période suivante (Allerod), des sédiments fins argileux riches en matière organique se déposent au fond de ces chenaux, ils sont ensuite recouverts de sable calcaire ou de sable limoneux calcaire. Ces sables remplissent tous les chenaux de cette époque jusqu'à la cote 73 m NGF. L'ensemble de la plaine d'altitude inférieure à 73 m NGF est ensuite (Dryas Récent) recouvert d'un colmatage de limons argileux calcaires (LAC) compact de 1 m d'épaisseur. A partir de cette période, il semble que les flux se concentrent dans un chenal principal (Préboréal). On peut y admettre une tendance à l'incision puisque les limons argileux LAC sont recoupés. Le chenal de 100 m de large retrouvé par J.F. Pastre et P. Antoine est rempli de limons organiques lités puis des sables calcaires jusqu'à 73,5 m NGF. Les chenaux plus récents (Boréal) sont plus étroits 30 - 50 m de large et atteignent la cote de 71 m NGF. Leur remplissage est complexe. On y trouve notamment de la tourbe qui serait contemporaine d’un petit sol de plaine alluviale de 10 à 20 cm d'épaisseur composé de « limons argileux brun-grisâtre » (Atlantique). Ce petit sol est présent sur l'ensemble de la plaine alluviale hormis dans les chenaux. La plaine subit ensuite un colmatage généralisé. Les dépressions au niveau des anciens chenaux comblés sont scellées par des « limons argilo-calcaire hydromorphes » (Subboréal) qui constituent la base des « limons argileux brun-grisâtre » (Subatlantique), cette formation colmate l'ensemble de la plaine. Son sommet atteint 74,5 m NGF sous 50 cm de formations actuelles avec des traces de labours ou des remblais anthropiques. 3. Présentation de la modélisation La présentation plus complète du modèle est décrite dans Teles (1999). Ici, seuls les paramètres spécifiques à la modélisation de la plaine alluviale de l'Aube sont décrits. Le substratum du modèle (figure 1.3.2) correspond au substratum crayeux tel que observé dans la zone, il ne permet pas de limiter latéralement le domaine alluvionnaire. La craie, affleurant près de Boulages et de Granges sur Aube, est représentée par des buttes à 86 m. Sous les coteaux d'alluvions anciennes, on suppose la craie à une altitude de 81 m. On passe de la vallée aux coteaux par des plans dont l'horizontale suit la direction principale de la vallée. Sous la plaine alluviale actuelle, on suppose l'altitude du substratum à une altitude variant aléatoirement entre 69 et 71 m. Figure 1.3.2. Représentation tridimensionnelle: à gauche, du substratum crayeux par le modèle. À droite, le remplissage initial d'entités « graviers » en noir correspondant à la formation des alluvions anciennes. Le maillage carré utilisé est constitué de mailles d'une surface d'un quart d'hectare (50 m x 50 m). Les entités sédimentaires qui constituent le domaine alluvionnaire ont les mêmes dimensions horizontales. Leur épaisseur dépend de la lithologie de chaque entité. L'état initial du modèle correspond à un remplissage de graviers jusqu'à une altitude de 83 m. On considère une cote de référence de 83 m, fixe sur tout le domaine. Les entités « graviers », représentant les graviers calcaires, remplissent la vallée jusqu'à la cote de référence (figure 1.3.2). 34 PNRZH, projet 07, rapport final, novembre 2000 La modélisation du remplissage a été menée en prenant en compte successivement chaque époque, depuis la mise en place de la nappe alluviale graveleuse lors du Weischelien jusqu'à l'Actuel. La figure 1.3.3 montre différentes étapes de la reconstruction de la plaine alluviale de l'Aube par le modèle. Les graviers weischeliens en rouge sont incisés par un large système en tresse qui mène le fond des chenaux à une altitude de 71 m en moyenne (figure 1.3.3.A). La plaine est ensuite soumise à une phase d'aggradation avec des dépôts dans les chenaux préexistants et un large colmatage de la topographie par les limons argileux calcaires (LAC) (figure 1.3.3.B). La coupe 1.3.3.C montre l'incision de différents chenaux, l'un de 100 m de large rempli de limons et de sables (1), l'autre plus étroit (la coupe 2 en travers de ce chanal le fait paraître plus large) avec un remplissage plus complexe. Les étapes suivantes, dont le résultat est visible sur la coupe 1.3.3.D, montrent le colmatage de ces chenaux et de la plaine par des limons argileux qui élèvent la plaine à une altitude de 74,5 m . Ils correspondent aux alluvions présentes juste sous le niveau anthropisé de 50 cm qui n'a pas été modélisé. Afin d'obtenir une image plus conforme à la réalité, il faudrait ajouter sur l'ensemble de la plaine virtuelle une couche de 50 cm d'entités adaptées à la représentation de cette « terre végétale ». B A D C 2 1 Figure 1.3.3. Coupes du milieu virtuel simulé par le modèle à différentes périodes : A, à la fin de la grande incision du Bölling ; B, à la fin du Dryas Récent, après le colmatage de la plaine des limons argileux calcaires (LAC) en bleu, les chenaux remplis précédemment par du sable sont visibles en blanc ; C, à la fin du Boréal, chenal du Préboréal en 1 et du Boréal en 2 ; D, à la fin de la simulation, la plaine est colmatée par les limons argileux. 4. Conclusion Discussion Les simulations donnent des résultats cohérents avec les données de terrain disponibles tels que les sondages de J.F. Pastre et P. Antoine, réalisés dans le cadre de la présente étude. L'objectif de la modélisation est d'obtenir une image de l'hétérogénéité des alluvions. On observe que le modèle reproduit l'hétérogénéité des alluvions avec globalement un affinement des granulométries vers la surface et quelques barrières hydrauliques dues aux dépôts de tourbes et de limons dans les chenaux (figure 1.3.4). Le modèle fournit une image tridimensionnelle de ce milieu réputé difficile à reproduire. Cette image de l'hétérogénéité alluvionnaire constitue la base d'une future simulation des écoulements souterrains dans ce domaine. Analyse du remplissage alluvionnaire 35 La grande souplesse du modèle permet une grande liberté. Ainsi, la modélisation a été menée à partir d'un scénario mis au point avec la seule description des sondages et sans données de datation. Il peut, de ce fait, se révéler erroné quant aux successions des processus sédimentaires alors qu'il reproduit une image cohérente. Limons argileux Limons Tourb Cailloutis limoneux à Sables Graviers calcaires Subatlantique Subboréal SA Atlantique Nappe alluviale graveleuse Allerød LAC Préboréal Boréal Tourbe Figure 1.3.4. Coupe dans le milieu virtuel simulé correspondant aux sondages effectués dans la plaine de l'Aube. En haut, représentation des lithologies ; en bas, représentation des âges. 36 PNRZH, projet 07, rapport final, novembre 2000