Interview de Paul Eluard (Marianne PERRUCHE)
Transcription
Interview de Paul Eluard (Marianne PERRUCHE)
Journaliste : Bonjour Monsieur GRINDEL. Paul ELUARD : Bonjour Philippe. Si cela ne vous déranges pas, je préfèrerai que vous m’appeliez Paul ELUARD. Journaliste : Bien si c’est votre souhait. Paul ELUARD : Merci. Journaliste : Alors tout d’abord merci de nous accorder cette interview. Paul ELUARD : Mais il n’y a pas de quoi, cela me fait plaisir. Journaliste : Bon, nos lecteurs ne connaissent pas beaucoup alors pourriez-vous vous présenter ? vous Paul ELUARD : Bien sûr ! Je m’appelle Paul ELUARD de mon vrai nom Eugène GRINDEL mais je n’aime pas tellement que l’on m’appelle ainsi. Je suis né le 14 décembre 1895, en Seine- Saint-Denis, d’un père comptable et d’une mère coutrière qui étaient issus de la petite bourgeoisie. Journaliste : D’accord. Et qu’avez-vous fait comme études pendant votre jeunesse ? Paul ELUARD : Et bien mon cher ami, insinueriez-vous que je suis vieux ? Non je plaisante ! J’ai tout d’abord été à l’école de ma commune à Saint-Denis. Mais d’une santé fragile, j’ai dû à 16 ans, soit en 1911, interrompre mes études pour pouvoir faire un séjour dans un sanatorium en Suisse en 1913. Journaliste : Et si je ne me trompe, c’est à cette époque que vous avez rencontré votre première femme ? Paul ELUARD : Oui tout à fait. C’était une étudiante russe qui s’appelait Helena DIMITROVNIE DIAKONOVA, mais tout le monde la surnommait Gala. Je l’ai rencontré pendant mon séjour au sanatorium et je l’ai épousé quelques années plus tard, en 1917. Journaliste : Pendant la période de la guerre si je ne m’abuse ? Paul ELUARD : Oui. J’avais été, à l’époque, mobilisé comme infirmier puis je m’étais dévoué pour combattre sur le front et c’est à cause de toutes ses horreurs que j’ai vu, et parfois même vécu, à cette période de ma vie que je suis devenu aussi sensible. Journaliste : Oui je comprends. Cela ne devait pas être facile tous les jours. Et à la période de l’aprèsguerre, qu’êtes vous devenu ? Paul ELUARD : Et bien, j’ai fait la rencontre de Louis ARAGON, André BRETON, Philippe SOUPAULT et bien d’autres encore. Je suis aussi devenu un membre actif du groupe surréaliste et membre du mouvement Dada qui est un mouvement de dégoût contre la guerre. C’est aussi à cette époque que j’ai rencontré Max ERNEST, en 1921 il me semble. Il est vite devenu un grand ami à ma femme et moi et c’est avec lui qu’on eut lieu les premières écritures à quatre mains. Journaliste : Et bien, tellement de choses ! Avezvous d’autres choses à rajouter ? Paul ELUARD : Si j’ai eu quelques graves difficultés conjugales ainsi que familiales en 1924. J’ai donc décidé de partir en voyage seul pendant 7 mois. Il me mena en Océanie. Journaliste : Ah, je viens d’apprendre quelque chose ! Et qu’avez-vous fait après votre voyage ? Parce que vivre déconnecté du monde, en quelque sorte, cela a dû vous faire un choc de revenir après. Paul ELUARD : A mon retour, à la fin de l’année 1924, j’ai repris ma place dans le groupe surréaliste et j’ai aussi repris la direction de ma revue « Proverbe » que j’avais créé en 1920. Cette même année, j’ai adhéré au parti communiste. Mais c’est aussi à cette année que ma femme, Gala, m’a quitté pour Salvador Dali. Journaliste : Oh, je vois. Cela a dû être douloureux. Et comment avez-vous fait pour vivre sans votre femme ? Paul ELUARD : J’ai peu à peu abandonné l’écriture automatique et j’ai aussi été exclu du parti communiste en 1933 mais cela ne m’a pas empêché de continuer à militer dans des organisations de gauche ! J’ai ensuite rompu les liens forts que j’avais avec André BRETON à cause de nos désaccords grandissants qui étaient dû au Front Populaire et à la Guerre Civile espagnole. Je suis alors devenu résistant lors de la Seconde Guerre mondiale. Journaliste : Ah une sorte de dépression ! Paul ELUARD : Oui si on veut. Mais j’ai remonté la pente grâce à ma rencontre avec Maria BENZ, une artiste du music-hall, en 1930. Elle se faisait aussi appelée Nusch. Ce fut ma seconde épouse en 1934. Journaliste : Ce fut ? Mais qu’est-elle devenue ? Paul ELUARD : Et bien, elle est décédée lorsque j’étais en séjour en Suisse d’une hémorragie cérébrale le 28 novembre 1946. Ce fut ma plus grande perte ! Journaliste : Oh je suis désolé. Je ne savais pas. Paul ELUARD : Il n’y a pas de mal ! Mais ne vous inquiétez pas, maintenant je mène une vie tranquille avec ma troisième femme, Dominique, que j’ai épousé en 1951. Journaliste : Et bien, quelle aventure ! Je suis ravi d’avoir pu vous interroger sur votre vie ! Je vous remercie un fois de plus et je vous dis à une prochaine fois peut-être ! Paul ELUARD : Merci à vous de m’avoir invité ! J’ai été ravi de pouvoir répondre à vos questions ! A bientôt Philippe. Interview par Philippe PENA. Cher lecteurs, Nous sommes au regret de vous faire part du décès soudain de Paul ELUARD qui est décédé le 18 novembre 1952 d’une angine de poitrine. Nous avons tout de même tenu à publier cette interview pour lui rendre hommage. Nous avons tenu à inscrire un poème auquel il tenait puisqu’il parlait de sa deuxième femme, Nusch. « Vingt Huit Novembre Mil Neuf Cent QuaranteSix Nous ne vieillirons pas ensemble Voici le jour En trop : le temps déborde Mon amour si léger prend le poids d’un supplice. »