Nous, princesse de Clèves / Régis Sauder. - Shellac, 2012

Transcription

Nous, princesse de Clèves / Régis Sauder. - Shellac, 2012
Nous, princesse de Clèves / Régis Sauder. - Shellac, 2012
Des élèves du lycée Diderot dans le quartier ZEP
de Marseille s’emparent de l’œuvre de Mme de La
Fayette pour parler d’eux. (Au 17ème siècle, histoire
de Mlle de Chartres qui épouse le Prince de Clèves
mais qui une fois mariée va tomber amoureuse du Duc
de Nemours). Bien que les deux actions se déroulent
avec 450 ans d’écart, les adolescents trouvent des
résonances avec ce qu’ils ressentent, leurs émois,
leurs choix et leurs renoncements, et le texte de Mme
de la Fayette prend une modernité surprenante. Le
documentaire alterne lectures d’extraits par les lycéens
et interviews d’élèves ou de parents, de façon très
respectueuse et naturelle. On sent qu’une relation de
confiance s’est construite entre les ados qui se livrent
devant la caméra et le réalisateur.
Un documentaire passionnant qui ébranle subtilement
quelques idées reçues…
AM
DVD
373
SAU
Le Singe de Hartlepool / Wilfrid Lupano. - Delcourt, 2012
Scénario de Wilfrid LUPANO, dessin de Jérémie MOREAU
Public conseillé : Adultes et adolescents
Le Capitaine Narraud est un grand nostalgique. Ancien négrier, il a ramené un
singe, nommé Nelson, des côtes d’Afrique. Sa reconversion dans la marine de
Napoléon, en pleine guerre avec l’Angleterre, l’amène au large de Hartlepool.
Haïssant tout ce qui se rapproche de loin ou de près de la perfide Albion, il n’hésite
pas à passer par-dessus bord un mousse coupable d’avoir été élevé par une nourrice
anglaise. Ce geste lui vaut la foudre du ciel, et précipite bateau et équipage dans
la tempête. Les seuls rescapés du naufrage sont le chimpanzé portant l’uniforme
tricolore et le mousse.
Dans ce petit village d’Angleterre, personne n’a jamais vu de français. L’idiotie
et la haine nationaliste aidant, les habitants décident qu’ils ont capturé un ennemi
français et sont bien décidés à le traîner en justice, pour le pendre haut et court...
KPM
BD
LUP
Wilfrid Lupano ("Alim le tanneur", "L’homme qui n’aimait pas les armes à feu",
"L’Assassin qu’elle mérite") s’est attaqué à une fameuse légende "historique"
anglaise qui a valu une réputation d’imbéciles heureux aux habitants de ce
village. En brodant sur cette anecdote historique, il nous livre un album jouissif
et décapant.
On se dit au départ que c’est gros, trop gros. Comment peut-on confondre un singe
et un homme ? Tout simplement en pensant que cet énergumène braillard dont la
langue semble si agressive à l’oreille ne peut être qu’un de ces "fils de chienne
engrossée par le diable déguisé en porc" que l’on trouve sur le sol français. Après
tout, dans ce trou perdu, personne n’a jamais vu un soldat de Napoléon.
Le récit dénonce, en vrac et sans hiérarchie, l’ignorance crasse, la haine, le
nationalisme exacerbé, l’obscurantisme le plus désolant ou encore l’effet de
masse qui transforme des individus en un groupe d’abrutis.
Graphiquement, le trait nerveux de Moreau sonne juste et traduit bien les
emportements incontrôlés de la populace, le tout sous un ciel gris délavé
typiquement anglais.
Assurément un titre qui marquera durablement tant la portée de son message reste
malheureusement universelle.
Le roi et l’oiseau / Paul Grimault et Jacques Prévert - Studio Canal, 1980
Au royaume de Takicardie, le "Roi Charles V et III font VIII et VIII
font XVI" règne sans partage et s’ennuie. Il ne trouve de loisirs que
dans quelques rares parties de chasse et des séances de peinture pour
le moins répétitives. Au fond, son seul divertissement est l’oiseau
qui conteste son pouvoir et dont les chants nocturnes provoquent
l’agacement des soldats. Les journées se répètent inexorablement
jusqu’au jour où une "charmante bergère et un petit ramoneur de
rien du tout" peints sur les murs du château prennent vie. Le jeune
couple veut s’échapper du royaume mais le Roi n’est pas de cet avis.
Il ordonne à son armée de les capturer. L’oiseau fort de sa liberté ailée
tente de les aider à trouver une issue. Dés lors s’engage une lutte entre
le Roi et l’Oiseau…
KPM
DVD
F
GRI
1941, l’Europe est sous le joug de l’Allemagne nazie. A cette époque
où toute velléité artistique est écrasée par l’ignoble oppresseur, deux
artistes se rencontrent dans un café parisien. Entre Paul Grimault
et Jacques Prévert le charme opère instantanément. Prévert qui
collabore déjà avec Carné, voit dans les dessins animés de Grimault
un nouveau canal d’expression pour sa poésie...
Ils signent un long métrage basé sur le conte d’Andersen "La Bergère
et le ramoneur". Lorsque Grimault et son ami poète se retrouvent pour
adapter le conte d’Andersen, ils s’éloignent de la trame originale et
orientent l’histoire vers une lutte entre un roi autoritaire et un oiseau
au cœur tendre. On retrouve bien le récit d’Andersen, mais il est
transformé pour bâtir une œuvre où violence et poésie s’affrontent
pendant près d’1h30.
Le petit ramoneur et la bergère sont bien mignons mais ils ne servent
que de prétexte au combat qui oppose le roi et l’oiseau ou plus
largement l’autorité à la liberté. De cet affrontement, les deux artistes
extirpent leur vision de la société et peignent un monde totalement
imaginaire qui, après réflexion, ressemble étrangement au nôtre.
"Le roi et l’oiseau" délivre un message pacifique simple mais qui
garde toute sa force et demeure à jamais sublime.
Le bureau des complots / Jérémy Mahot - Delcourt, 2012
Le bureau des complots est une agence secrète qui se place au-dessus de tous
les gouvernements. Son nom ne vous dit rien. Et pourtant, il sait tout de vous,
de quoi demain sera fait, et programme chaque événement. Le 11 septembre ?
Rien n’a été laissé au hasard. Henry, l’un des membres du bureau, vous plonge
au cœur du secret et dévoile le quotidien cynique de ces mystérieux hommes
de l’ombre…
KPM
BD
MAH
Vous vous êtes toujours demandés ce qu’il s’était réellement produit le 11
septembre 2001. Comment quatre avions ont pu être détournés et deux d’entre
eux finir dans les tours jumelles de Manhattan ? Et par-dessus tout, vous vous
demandez encore pourquoi le World Trade Center numéro 7 s’est écroulé ce
jour-là ? Ne cherchez plus. La réponse est là, dans le "Bureau des complots"
de Jérémy Mahot.
Les planches en niveaux de gris respectent religieusement une composition
invariable : 6 cases. Les personnages en forme de demi-gélules sont comme des
Monsieur Patate sur lesquels vient se greffer toute une gamme d’accessoires
qui sert à les différencier et à les reconnaître. Le tout est généré par ordinateur,
et, en feuilletant l’ouvrage, il est assez difficile de savoir à quoi s’attendre
exactement.
Sous leurs airs un peu rigides de gélules rigolotes, les personnages sont en
fait des agents secrets qui influent sur le monde pour protéger les intérêts de
quelques hommes de l’ombre bien mystérieux. Et le 11 septembre, c’étaient
eux ! En tout cas, c’est ce que Jérémy Mahot essaye de démontrer. Il profite de
l’occasion pour ressortir les théories du complot les plus populaires de 2001
afin de les mettre toutes en relation les unes avec les autres.
Le résultat est une histoire aussi abracadabrante qu’extraordinairement
absurde et drôle, qui en plus pourrait tout à fait avoir un fond de vérité.
Un terrible secret se cache dans la tour numéro 7 du World Trade Center et
c’est la pierre angulaire qui manquait pour enfin comprendre. Merci donc à
Jérémy Mahot pour cette grande révélation et ce grand moment de franche
rigolade. Pour le reste, il faudra attendre la levée du secret militaire dans
quelques siècles pour savoir.
Franche-Comté, Image et nature / Dominique Delfino. - Trois châteaux édition, 2008
J’ai choisi cet ouvrage de Dominique Delfino, d’abord
parce que c’est un photographe montbéliardais et qu’il
nous offre un voyage le long des chemins de la FrancheComté, avec un regard différent des habituels livres
régionaux.
C’est un livre avec des textes bilingues, agrémentés de
très belles photos de nature, paysages et faune sauvage
de chez nous.
Dominique Delfino en témoigne ainsi : "Arrêts sur image
pour des instants choisis dans la nature, au détour d’un
chemin et lors de très nombreuses observations, posté à
l’affût des journées entières.
Le rythme de la nature se déroule sous mes yeux et ces
images ne sont qu’une infime représentation des espèces
animales présentes en Franche-Comté, mais elles
contribuent à souligner la nécessité de préserver les
espaces naturels et prouvent l’intérêt et l’attachement que
je porte à cette région".
MG
770.92
DEL
FC
Le résultat est époustouflant, la vie sauvage s’affiche
comme rarement, et même si la météo est capricieuse, elle
nous offre des photos d’exception.
Les photos de Dominique Delfino se révèlent être de
merveilleux modèles de perfection et de qualité.
Seconde chance / Patrick Cauvin. - Plon, 2010
Jusqu’à présent, tout a roulé pour Zéphyrin. Le petit
appartement à Montmartre avec sa mère, les copains, le
lycée. Dans l’ensemble, la vie est belle et sans secousses.
Jusqu’à ce que "Supertanker", la prof d’art, organise une
visite au Louvre. Zéphyrin, que les primitifs italiens ne
passionnent guère, quitte le groupe, entre au hasard dans
une salle et, là, sa vie bascule.
Est-il possible qu’un garçon né en 1995 tombe en un
dixième de seconde raide amoureux d’une fille ayant vu
le jour au début du XVIIe siècle et dont le portrait se
trouve devant lui ? Et surtout, qu’est-ce qui explique cette
blessure soudaine, ce sang qui coule à son bras ? Aidé
par un flic perplexe et un vieux savant, va-t-il éclaircir
le mystère de la seconde chance ? Celle qui est donnée à
ceux qui se sont manqués dans une première vie.
MAGNIFIQUE
Comme tous les livres de CAUVIN, ce dernier est
également tout simplement magnifique. Une lecture
facile, un zeste d’humour, un soupçon de suspense, et une
idée digne de Guillaume MUSSO. Je l’ai lu en quelques
heures. A vous maintenant.
CB
Corpus
CAUV
S
In another contry / Hong Sang-soo. - Diaphana Films, 2013
Voici un film qui permettra au plus grand nombre de découvrir
le cinéma et l’univers du réalisateur sud-coréen Hong Sangsoo. Un cinéma intimiste, où les relations humaines, qu’elles
soient optimistes ou malades, ont la part belle.
Isabelle Huppert, qui nous surprend encore ici, sera en quelque
sorte notre témoin. Arrivant dans un pays qui n’est pas le sien,
elle devra communiquer avec les habitants ou les gens de
passage de cette petite ville balnéaire.
La petite troupe de comédiens de Hong Sang-soo se retrouve
ainsi embarquée dans plusieurs histoires, où ils joueront des
rôles légèrement différents selon les récits.
N’ayez surtout pas peur de cette petite variante scénaristique,
qui peut faire penser aux "Comédies et proverbes" ou "Conte
des quatre saisons" signés Eric Rohmer, ou même aux facéties
d’Alain Resnais.
Séduction, rendez-vous manqués, rencontres du hasard et autres
malentendus plus ou moins heureux, forment le cœur de ce film.
Et il y a un grand talent chez Hong Sang-soo, pour filmer des
discussions à priori banales, des instants où les personnages se
découvrent, ou encore la manière dont la convivialité s’installe
entre les personnes malgré la barrière de la langue. Sa mise
en scène est toujours discrète, presque élémentaire, mais
lumineuse.
TM
DVD
F
HON
Face à un cinéma d’auteur international souvent empesé par
la gravité et les sujets difficiles, "In another country" surprend
par sa spontanéité, sa fraîcheur et sa simplicité.
Vivement recommandé !
Boy / Taika Waititi. - ARTE Éditions, 2013
Dans les années 80, Boy, maori de 11 ans, vit
chez sa grand-mère avec son petit frère et une
ribambelle de cousins. Fan de Michael Jackson,
il voue surtout un culte à son père absent
depuis 7 ans, que le jeune garçon imagine en
héros (samouraï, rugbyman, superstar, roi de la
pop…). Un soir, le père (joué par Taika Waititi)
qui sort de prison, revient pour récupérer son
magot qu’il a enterré dans le jardin (mais
il ne sait plus où) et l’enfant ouvre les yeux,
découvrant un père totalement immature.
Film vif et inventif (des images animées
illustrant
l’imaginaire
de
l’enfance
s’intercalent à la fiction), Taika Waititi réussit
le pari d’aborder avec un humour décalé
des thèmes pas très drôles comme l’enfance
délaissée ou la pauvreté.
Version originale sous-titrée en français, ce
film intéressera les adultes et enfants de plus
de 10 ans.
AM
DVD
F
WAI
B
Les fausses innocences / Armel Job. - R. Laffont, 2005
Belgique, dans les années 60. Lorsque Mathilda
Stembert vient déclarer la mort accidentelle en
Allemagne de l’Est de son mari au maire du
village, Roger Müller sait qu’elle ment. La veille,
il a convaincu le Dr Stembert de ne pas quitter
sa femme pour rejoindre sa maitresse allemande.
Roger Müller, qui est un vieux garçon et qui
vit chez sa mère, aime Mathilda depuis son
adolescence. Doit-il exiger une enquête sur ce
décès improbable comme son devoir l’exige, ou
accepter les dires de la femme qu’il aime ?
Armel Job signe une intrigue délicieuse et
incisive, à la fin surprenante. Les chapitres
alternent le point de vue de Roger avec celui de
Mathilda, reconstituant une histoire équivoque
et déliant au fil des pages le vrai du faux. Le
lecteur découvre les secrets de famille liés au
passé des personnages, les petites mesquineries
des habitants mais croise aussi des protagonistes
de second rôle, dont l’entrée en scène chamboule
ses convictions.
Un polar plein de suspense, écrit de façon
subtile. Pour adultes et adolescents.
AM
Corpus
JOB
F
Berberian Sound Studio : BO du film de Peter Strickland / Broadcast. - Warp Records, 2012
La chanteuse Trish Keenan, du groupe anglais
Broadcast nous a quittés en janvier 2011.
On sait l’attention qu’elle portait à l’univers
des musiques de film, aux bruitages divers qui
ajoutaient une ambiance unique autour des popsongs du groupe.
Nous avons enfin pu découvrir la musique
composée pour le film "Berberian Sound Studio"
en début d’année 2013.
Une bande-son étrange, qui, à l’instar du film
puise son inspiration dans les années 60 /70 et
le film de genre, le giallo italien notamment (à
la frontière du cinéma policier, de l’horreur et de
l’érotisme)
TM
Une musique très soignée, évocatrice, faite
de nombreux morceaux dépassant rarement
une minute, qui installent très rapidement une
atmosphère aussi mystérieuse qu’envoûtante.
Nul besoin de connaître le film pour apprécier ce
disque qui ressemble à un voyage dans le temps,
illustré de la plus belle façon.
L’auditeur se voit ainsi ouvrir les portes d’un univers qui dépasse la musique de film,
et s’approche autant du collage sonore que de la "library music" (genre musical à part,
qui repose sur l’utilisation d’une bibliothèque de sons et bruits très variés, destinés aux
documentaires ou aux émissions radiophoniques)
N’hésitez pas à tenter cette expérience psychédélique, mélodique, surprenante…
CD
520.BER
Les chats persans / Bahman Ghobadi. - Pathé, 2009
À leur sortie de prison, Negar et Ashkan, deux jeunes de
Téhéran, décident de monter un groupe d’indie rock. Lassés
de ne pas pouvoir s’exprimer librement dans leur pays,
ils tentent de se procurer des faux papiers pour rejoindre
Londres. Ils font la rencontre de Nader, "manager" filou et
exubérant, qui les guide dans leurs démarches et écument
avec lui Téhéran à la rencontre d’autres musiciens, essayant
de les convaincre de quitter le pays avec eux et de monter
un grand concert clandestin pour financer leur fuite…
Un film humain et engagé comme on n’en voit plus
beaucoup. Ce film tourné sans autorisation et caméra à
l’épaule est un petit bijou. Il nous montre l’image d’une
jeunesse à la fois légère et croulant sous le poids d’un
régime archaïque. Touchant et accompagné par une
B.O fantastique, "Les Chats Persans" est une œuvre
merveilleuse ! Un vrai film coup de cœur, une perle !
MG
DVD
F
GHO
C
Il faut qu’on parle de Kevin / Lionel Shriver. - Belfond, 2006
Avec une effrayante lucidité, Lionel Shriver dresse le portrait inoubliable
d’une mère confrontée à la monstruosité de son fils. Un sujet d’une brûlante
actualité, doublé d’une vision au vitriol de l’american dream. Un roman
coup de poing, violent, complexe, qui s’attaque au dernier des tabous.
A la veille de ses seize ans, Kevin Khatchadourian a tué sept de ses
camarades de lycée, un employé de la cafétéria et un professeur.
Dans des lettres adressées au père dont elle est séparée, Eva, sa mère, retrace
l’itinéraire meurtrier de Kevin. Et s’interroge sur sa part de responsabilité…
Ce récit est inspiré de la tuerie de Columbine. C’est un roman percutant et
dérangeant, mais également fascinant : qu’est-ce qui pousse un garçon de
seize ans à abattre froidement neuf personnes dans son lycée ?
Ce monologue déchirant de la mère est parfois insoutenable, tellement
on partage son intimité et son questionnement face à l’horreur et
l’incompréhensible.
C’est un roman puissant, courageux, difficile, mais nécessaire.
Tout est minutieusement analysé, sans banalité et sans clichés. Le récit est
habilement mené, avec un crescendo et un suspense particulièrement bien
maîtrisé.
L’auteur ne développe aucune théorie, elle se contente de décrire, sans
expliquer, et nous invite à réfléchir.
Livre poignant du début à la fin, et dont on ne sort pas indemne…
Un coup de poing donc, davantage qu’un coup de cœur !
PE
Corpus
SHRI
I
Beauvoir in love / Irène Frain. - Michel Lafon, 2012
1947. Rencontre improbable. A Chicago, Simone de Beauvoir, icône de
l’Existentialisme et compagne de Jean-Paul Sartre, fait la connaissance de
Nelson Algren, l’écrivain des damnés de l’Amérique. Dès le premier échange,
c’est le choc. Dès le deuxième rendez-vous, la passion. "Nelson en oublia sa
part d’ombre. Et Simone le froid de l’âme où elle avait vécu jusque là."
Puis vinrent les tourments, l’emprise de Sartre, les pièges du succès pour l’un,
de la gloire pour l’autre, le désir vacillant sous le poids des contingences.
Mais ils auront beau se déchirer pour trouver le courage de rompre, jusqu’à la
mort ils se hanteront mutuellement.
S’appuyant sur leurs œuvres respectives, sur des archives souvent inédites,
des photos d’époque et des récits de témoins, Irène Frain raconte de façon
unique l’histoire d’amour impossible entre la figure de proue de la libération
des femmes et le mauvais garçon de la littérature américaine.
[…] Il a commandé de la vodka. Au bout de deux verres, elle n’a plus trop su
où elle était. Pas en Pologne, en tout cas, même si tout le monde dans le bar
parlait polonais. Ni même en Amérique. Si ou lui avait posé la question, elle
aurait dit : "Dans un petit quartier où je me sens bien, avec un chic type, tout
sauf un tordu."
A ce moment-là – est-ce qu’il a deviné ses pensées ? – il l’a regardée droit
dans les yeux.
PE
Corpus
FRAI
B
Ça ressemblait à une épreuve mais cela a été comme la veille au soir dans
le ghetto des migrants, elle n’a pas eu peur ; et tandis qu’elle soutenait son
regard, une autre phrase lui a traversé la tête : "Dans les yeux de cet homme,
je suis une femme. Depuis quand ça ne m’est pas arrivé ?" […]
Le bleu de la nuit / Joan Didion. - Grasset, 2013
"Sous certaines latitudes, pendant un certain laps de temps à l’approche et au
lendemain du solstice d’été, quelques semaines en tout, les crépuscules rallongent
et bleuissent […] Quand vient la saison des nuits bleues, on a l’impression que
les journées n’en finissent jamais. Et à mesure que la saison des nuits bleues se
rapproche de son terme (inexorable, inéluctable), on est saisi d’un frisson, d’une
appréhension physique, maladive, lorsqu’on s’en avise pour la première fois : la
lumière bleue s’en va, déjà les jours raccourcissent, l’été n’est plus là. J’ai écrit Le
bleu de la nuit parce qu’à l’époque où j’ai commencé à l’écrire, j’avais l’esprit de
plus en plus tourné vers la maladie, vers la fin des promesses, le déclin des jours,
l’inévitable assombrissement, l’agonie de la clarté."
Redécouverte en France de façon très récente, avec la publication de "l’Année
de la pensée magique", et de "l’Amérique", une série de chroniques miautobiographiques, mi-journalistiques, proposant un portrait des Etats-Unis
des années 60 à 90, d’immersions en célèbres faits divers, Joan Didion a déjà
une longue carrière aux Etats-Unis, en tant qu’écrivaine et journaliste. Dans cet
essai autobiographique, elle revient sur la mort de sa fille, mais sans l’aborder
frontalement, par le biais de réflexions sur sa propre vieillesse, sa fragilité,
l’évolution de son écriture de l’aisance de sa jeunesse à une manière plus difficile
d’écrire, un souci d’être directe et d’épurer son style.
EM
Corpus
DIDI
Elle porte également une réflexion sur le temps qui passe, sa manière de percevoir
ses années de jeunesse, par le biais d’images, d’anecdotes récurrentes : accessoires
de mode, scènes, personnages, faits divers connus de tous et qui prenaient tout
leur sens dans les années 60, oubliés de tous aujourd’hui, démodés. Un livre
sobre, avec un regard sans apitoiement ni concession, toujours vif d’intelligence,
sur le déclin de la vie.
Mal fringuée / Susie Morgenstern. - Actes Sud junior, 2013
Première en classe, dernière en mode ! La vie décalée d’une
adolescente se voyant habillée comme un sac - fringues bon marché,
soldes, vêtements usagés, reprisés, rafistolés.
Mal fringuée ? Mal dans sa peau ? Ou simplement révoltée contre les
conventions ?
Publié dans la collection "D’une seule voix", qui rassemble des textes
courts sur des thèmes percutants liés à l’adolescence, "Mal fringuée"
est une autobiographie au cours de laquelle Susie Morgenstern revient
avec beaucoup d’humour sur son rapport à la mode et aux vêtements
pendant l’adolescence. Fripes, promos, vêtements rapiécés composent
alors sa garde-robe, dictée par une mère soucieuse d’économiser le
moindre denier, à un point tel qu’elle serait capable de dire à sa fille de
s’habituer à porter deux chaussures gauches sous le simple prétexte
de soldes ! Un petit texte rythmé d’anecdotes drôles et excentriques.
EM
R
MOR
ADO
Les dimanches de Jean Dézert / Jean de la Ville de Mirmont. - La Table Ronde, 2013
Jean de La Ville de Mirmont est un ami d’enfance de François Mauriac, qui
signe la préface de l’ouvrage.
Né à Bordeaux en 1886, c’est un enfant de constitution fragile, souvent malade,
qui a failli perdre la vue. Il tente de se suicider en classe… en buvant de l’encre !
Réformé en 1906, il devient fonctionnaire au bureau de l’Assistance aux
vieillards. C’est à cette époque qu’il écrit "Les dimanches de Jean Dézert",
son unique roman. C’est l’histoire d’un rond-de-cuir employé au Ministère
de l’Encouragement au Bien. Il est patient, modeste, résigné et doué de peu
d’imagination. Il considère la vie "comme une salle d’attente pour voyageurs de
3ème classe". Sa philosophie se résume à cet adage de Confucius "Lorsqu’on ne
peut apporter à un mal aucun remède, il est inutile d’en chercher".
Le dimanche, c’est toute la vie de Jean Dézert. Il apprécie ce jour que si peu de
personnes comprennent et qu’il emploie à suivre les conseils des prospectus
qu’on lui a donnés dans la rue : prendre un bain chaud avec massage par des
aveugles, se faire couper les cheveux dans un "lavatory rationnel", déjeuner
dans un restaurant végétarien antialcoolique…
Un dimanche, il rencontre une jeune fille au Jardin des Plantes. Promesse de
bonheur ? Sûrement pas. Juste avant le mariage, la jeune fille remarque pour la
première fois "sa figure si longue" et c’est la fin de l’aventure.
Il ne lui reste plus qu’à préparer son suicide et "il choisit un dimanche afin de ne
pas manquer son bureau". Mais…
Roman fin de siècle, roman de la non vie, traversé par le sentiment confus d’un
monde nouveau qui s’annonce où "l’esprit scientifique gagne les masses de jour
en jour", où la poésie se meurt. Cette édition du roman est accompagnée de
poèmes et de nouvelles.
GB
Corpus
LAVI
D
A cause de sa myopie, Jean de La Ville de Mirmont est dispensé de service
militaire, mais pour échapper à la paperasse bureaucratique, il fera tout pour être
mobilisé. Il l’est en septembre 1914, et le 28 novembre un obus l’enterre vivant.
Music for Montserrat. - Eagles Vision, 1997
Music for Montserrat est un concert exceptionnel donné le 15 septembre 1997
au Royal Albert Hall de Londres afin de lever des fonds pour la reconstruction
de l’île caraïbe de Montserrat et plus particulièrement de la ville de Plymouth,
totalement ravagée par l’éruption de la Soufrière le 25 juin 1997. Il réunit lors
d’une soirée les plus grands musiciens de rock à l’instar de Phil Collins, Eric
Clapton, Mark Knopfler, Sting, Paul McCartney, Elton John, ainsi que le célèbre
percussionniste Ray Cooper ou encore Carl Perkins.
Ce concert caritatif a fait l’objet d’un DVD, sorti le 27 juin 2000, sur lequel
figurent notamment les plus célèbres chansons comme Your Song, Layla,
Brothers In Arms, Blue Suede Shoes, Yesterday, Hey Jude, Message In A Bottle...
• 1 cuillerée de Mark Knopfler (sans "Dire Straits" mais toujours en forme)
• 1 cuillérée de Sting (sans "Police" mais toujours fabuleux)
• 1 pincée de Phil Collins (une chanson et beaucoup de batterie)
• 1 une grosse cuillérée de Paul Mc Cartney
• 1 grosse cuillérée d’Elton John
• Quelques pincées d’autres personnes (dont le légendaire Carl Perkins)
Rajoutez des tonnes de bonne humeur et des titres très connus, ainsi qu’une
ambiance de "boeuf" entre copains...
Agitez le tout et servez chaud... Vous obtiendrez un plat délicat avec des vrais
morceaux d’anthologie à l’intérieur...
CLT
CD
2 KNO
Eric Clapton et Mark Knopfler en duo, c’est déjà extraordinaire, alors quand
on voit la suite de la liste : Phil Collins, Sting, Paul Mc Cartney, Elton John et
j’en passe c’est que du bonheur.
Le genre de concert qu’on n’est pas prêt d’oublier et auquel on aurait rêvé
d’assister pour pouvoir le raconter à ses enfants et petits enfants : "Un jour, sur
une même scène, certains des plus grands musiciens rock de la planète jouaient
ensemble pour la première et sans doute la dernière fois, et j’ai eu cette chance
extraordinaire de les voir et les entendre…"