Version imprimable - Museum van de Nationale Bank van België

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à des interprétations nationales. Il faut donc maintenant regarder du côté face de
nos pièces en euro pour apercevoir encore le roi des Belges.
S
loup e
a
l
s
ou
La patrie sur les
billets
Jolien Gijbels
Guide du musée
Juillet
Août
2015
Bibliographie
•Cubitt, G. Imagining Nations, Manchester, 1998.
•Heinonen, A. The First Euros : the Creation and Issue of the First Euro Banknotes and the Road to the
Europa Series, Porvoo, 2015.
•La monnaie et le portrait royal (1830-1991), catalogue d’exposition (Musée de la Banque nationale),
Bruxelles, 1991.
•Randaxhe, Y., Danneel, M. Nos billets ont ...149 ans, consulté le 2 juin 2015. (http ://www.
nbbmuseum.be).
•Rochet, B., Tixhon, A. La petite Belgique dans la Grande Guerre : une icône, des images, Namur, 2012.
•Sandrock, J. E. The Use of Bank Notes as an Instrument of Propaganda, consulté le 2 juin 2015
(http ://www.thecurrencycollector.com).
•Schwarzenbach, A. Portraits of the Nation : Stamps, Coins and Banknotes in Belgium and
Switzerland 1880-1945, Bern, 1999.
Musée temporaire
de la
Banque nationale de Belgique
H i s t o i r e s d ’a r g e n t
boulevard de Berlaimont 3 à 1000 Bruxelles.
Ouvert du lundi au vendredi de 9 h 00 à 17 h 00.
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Intéressé(e) par un suivi mensuel de notre rubrique
« Sous la loupe » ?
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www.nbbmuseum.be
Juillet - Août 2015
En 1869, presque vingt ans après la création de la Banque nationale, les premiers billets
de banque contenant de grandes images sortaient des presses. Compte-tenu de leur
familiarité avec la population et de l’élaboration précise effectuée par les dessinateurs,
les illustrations sont rapidement devenues une arme essentielle contre la falsification.
L’iconographie participait toutefois également à la création du sentiment patriotique. Les
allégories et représentations sur les billets de banque se référaient souvent aux ambitions
et aux succès de la Belgique en tant qu’Etat-nation. Dans ce « Sous la loupe », vous
apprendrez comment la Patrie a été représentée au cours de l’histoire sur les billets de
banque libellés en franc belge.
Grâce à leur accessibilité à un grand public, les billets de banque étaient de meilleurs
vecteurs d’une identité nationale que les œuvres d’art ou les statues. De plus, les idées
véhiculées par les illustrations pouvaient être comprises par tous, indépendamment de la
langue parlée. A la fin du XIXème siècle, les représentations du progrès étaient fort présentes
sur les billets. Le peintre Henri Hendrickx, qui a conçu huit billets pour la Banque nationale,
utilisa diverses allégories mettant en avant la richesse et la prospérité des différents
secteurs économiques belges. Sur le billet de 1000 francs datant de 1869, il représenta
la croissance économique du
commerce et de l’industrie.
Sur le recto, le dieu romain de
la mer Neptune et sa femme
Salacie représentent les fleuves
de l’Escaut et de la Meuse. Ils
tiennent ensemble un bateau
ailé, symbole de l’important
trafic fluvial sur ces routes
commerciales. Le verso du
billet met en scène un mineur,
reconnaissable à son casque,
sa pioche et son chariot rempli
Recto du billet de 1000 francs, type 1869
© Musée de la Banque nationale
de charbon ainsi qu’un ouvrier
métallurgiste entouré d’une masse, de tenailles, d’une équerre et d’une enclume. Les
deux travailleurs rayonnent de tranquillité, satisfaits du travail accompli.
Des thèmes patriotiques évidents, comme la révolution belge de 1830 ou l’expansion
coloniale, ne figuraient pas initialement sur les billets en franc. Selon des documents
conservés sur le programme iconographique des billets, il apparait que la construction
d’une identité nationale ne faisait pas partie des objectifs principaux. Avant la réalisation
des billets, il y avait généralement peu de discussion sur les illustrations et la plupart des
décisions étaient prises de manière pragmatique. Si les billets de banque ne servaient pas
d’instrument de propagande en Belgique, il n’en a pas toujours été ainsi dans les autres
pays. Par exemple, quand les bolchéviques prirent le pouvoir après la révolution russe
(1917), et qu’ils fondèrent l’Union soviétique, ils essayèrent d’ancrer et de propager leur
idéologie communiste à l’intérieur comme à l’extérieur de leurs frontières. Les billets de
banque de 1921 encourageaient les ouvriers à s’unir et à s’engager dans la lutte contre
les anti-communistes. Afin de rallier les gens à leur cause bien au-delà de leurs frontières,
ils traduisirent le texte présent sur leurs billets dans six langues étrangères importantes :
l’anglais, le français, l’italien, l’allemand, le chinois et l’arabe.
Cette propagande gouvernementale n’est
cependant rien en comparaison avec
l’utilisation des billets de banque par le
Troisième Reich lors de la Seconde Guerre
mondiale dans le camp de concentration de
Theresienstadt, au nord de Prague. Afin de
diminuer l’inquiétude internationale et de
maintenir l’illusion que les prisonniers juifs
Recto du billet de 100 couronnes du camp de Theresienstadt
© Musée de la Banque nationale
menaient une vie digne, ils créèrent une sorte
de « camp modèle » destiné à être montré à la presse et à la Croix-Rouge. Les cafés, écoles,
magasins et banques de ce camp faisaient partie d’une illusion d’optique à grande échelle
qui devait donner l’impression que les prisonniers juifs pouvaient y mener une vie normale.
Pour créer l’apparence d’activité
économique, ils fabriquèrent du
papier-monnaie. Sur le recto de ces
billets figurait le portrait de Moïse
avec les dix commandements. Un
texte portant sur les sanctions
auxquelles s’exposaient les faussaires
venait renforcer leur crédibilité. Dans
les faits, les prisonniers ne pouvaient
utiliser ces billets que pour payer
certaines taxes aux autorités
allemandes et non pas pour acheter Recto du billet de 100 francs de la série Nationale
© Musée de la Banque nationale
des biens.
Sous la loupe
En Belgique, le début du XXème siècle apporta de nouveaux thèmes patriotiques pour
les billets de banque. Durant la Première Guerre mondiale, grâce à la popularité du
« roi-chevalier » Albert Ier et de sa femme Elisabeth, la monarchie devint l’un des plus
importants symboles du patriotisme. Sur les billets de 20, 100 et 1 000 francs, imprimés
par la Banque nationale juste après le début de la guerre en 1914, figure pour la première
fois un portrait en médaillon de Léopold Ier. Durant l’occupation allemande, la Banque
nationale, qui avait perdu le droit d’émission au profit de la Société Générale, prépara la
série Nationale d’après-guerre à l’effigie du couple royal. Représentés en médaillon sur le
recto des billets, Albert Ier et Elisabeth y regardent cérémonieusement vers l’avant.
Malgré la crise économique
de l’entre-deux-guerres, les
représentations du progrès
du XIXème siècle ne disparurent pas totalement des
billets en franc. Par exemple,
la série Nationale fit appel à
des représentations iconographiques connues comme
l’allégorie de l’abondance ou
du billet de 500 francs de la série Dynastie
un mineur au repos sur fond Verso
© Musée de la Banque nationale
de cité industrielle et de cheminées fumantes. En outre, des billets de banque représentant le Congo apparurent
durant l’entre-deux-guerres, sur lesquels l’accent était mis sur le progrès économique de la colonie au profit de la mère-patrie. Sur le recto du billet de 500 francs
de la série Dynastie de 1945 figure un portrait de Léopold II, dont les ambitions
coloniales servirent de base au développement de la colonie congolaise. Anvers est
représentée au centre avec la cathédrale Notre-Dame et l’Escaut en arrière-plan.
C’est de cette manière que le dessinateur Jules Vanpaemel posa le lien avec les
ambitions d’outre-mer du roi. En effet, c’est depuis l’Escaut à Anvers que partaient
les bateaux pour leur voyage de plusieurs semaines vers Léopoldville. Sur le verso,
l’artiste choisit une scène exotique au bord du fleuve Congo. Avec les palmiers, les
cascades, la pirogue, le guérisseur, une femme et des enfants, ce paysage éveille
l’imagination.
L’introduction de l’euro marqua la fin des représentations de la Belgique sur les billets de banque. Ce sont aujourd’hui des portes, des fenêtres et des ponts qui ornent
les deux faces de nos billets en euro. Ceux-ci reprennent différents styles architecturaux européens et symbolisent l’ouverture et la coopération entre les dix-neuf
pays de l’eurozone. Bien que de nombreux pays aient eu par le passé une tradition
de représenter des personnalités d’importance nationale sur leurs billets, de telles
pratiques furent délaissées lors de l’élaboration de la première série de billets en
euro. La représentation de personnes aurait en effet vite mené à des discussions et
Juillet - Août 2015