Matière noire

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Matière noire
SCIENCE & TECHNO
ACTUALITÉ
0123
Samedi 24 septembre 2011
3
Deux sorties d’Afrique pour «Homo sapiens»
L’analysedugénomed’unAborigèneaustraliencompliqueencorel’histoiredupeuplementdelaTerre
parlespremiershommesmodernes.Cesderniersauraientmigréendeuxphasesdistincteshorsdeleurberceauafricain
PALÉONTOLOGIE |
Stéphane Foucart
A
Des vagues successives d’immigration
ucune discipline n’aautant évolué, au cours des dix-huit derniers mois, que la génétique
des populations. Et ce n’est pas
fini.En témoignent le séquençageet surtoutl’analyse comparative de l’ADN d’un Aborigène australien,
publiés vendredi 23 septembre dans la revue
Science. En effet, ils ajoutent une nouvelle pièce
au puzzle génétique d’Homo sapiens. Et réécrivent, en la compliquant encore, l’histoire du
peuplement de la Terre par le genre humain.
« Jusqu’à présent, on était sur un modèle simple,
celui d’une sortie unique d’Afrique, il y a
40 000 à 70 000 ans, dit François-Xavier Ricaut,
chercheur (CNRS) au laboratoire d’anthropobiologie moléculaire et d’imagerie de synthèse, et
coauteur de ces travaux, coordonnés par Morten Rasmussen (université de Copenhague,
Danemark). On se rend maintenant compte que
ce n’était pas seulement simple, mais simpliste. »
En évaluant la « distance génétique » séparant l’Aborigène australien d’autres populations d’Asie et d’Europe, les auteurs concluent
que les populations natives de l’île-continent se
sont séparées des Européens et des Asiatiques
voilà 62 000 à 75 000 ans. Or, en évaluant le
même type d’écart entre Asiatiques et Européens, les auteurs concluent à une divergence
intervenue bien plus tard, il y a seulement
38 000 à 25 000 ans. L’humanité actuelle ne
dériverait donc pas d’une unique tribu d’hommes anatomiquement modernes sortis d’Afrique voilà 60 000 ans environ, mais de deux
groupes distincts sortis de leur berceau est-africain à plus de 30 000 ans de distance.
Les Aborigènes australiens seraient donc les
descendants des toutes premières populations
sapiens sorties d’Afrique, voici 70 000 ans. Tan-
30 000 à
15 000 ans
38 000 à
25 000 ans
75 000 à
62 000 ans
50 000 ans
sources: rasmussen et al.; science-aaas
dis que les Européens et les Asiatiques seraient
issusd’une vague migratoire plus tardive, initiée
il y a environ 35000 ans. Ces estimations correspondent parfaitement aux découvertes archéologiques effectuées en Australie – près du lac
Mungo –, où des fossiles d’Homo sapiens de plus
de 40 000 ans ont été découverts dans les
années 1970, ainsi que des outils de pierre plus
anciens, remontant à 50 000 ans au moins.
Brassages génétiques incessants
Deux vagues migratoires distinctes ? Deux
humanités distinctes ? L’histoire est, en réalité,
faite de brassages génétiques incessants. L’analyse des données ne suggère en effet aucune discontinuité : les humains issus des deux vagues
se sont rencontrés et se sont mêlés sur le continent asiatique. Schématiquement, les descendants de la première vague migratoire qui sont
restés en Asie ont ainsi vu arriver la deuxième
vague, et des flux de gènes se sont opérés entre
les deux populations. Ainsi, les hommes qui, il y
a 30 000 à 15 000 ans, traversent le détroit de
Béring pour se disperser en Amérique portent
en eux des gènes issus de la première et de la
seconde vague migratoire…
« Nous avons reconstruit l’histoire de ces
migrations à partir des comparaisons de données génétiques, mais aussi à partir de modèles
numériques simulant les déplacements et les
interactions des différentes populations, précise
François Balloux (Imperial College de Londres,
Royaume-Uni), coauteur de ces travaux. Un tel
travail aurait été inimaginable voici seulement
un ou deux ans. »
Quant aux hommes modernes, parvenus en
Australie dès 50 000 ans, ils se sont eux aussi
mêlés à d’autres populations après leur sortie
d’Afrique. Non à des hommes anatomiquement modernes, mais à d’autres humanités rencontrées en chemin et assez proches pour permettre une hybridation donnant une descendance fertile. Ainsi, dans le génome de l’Aborigène australien séquencé, les chercheurs ont
découvert des séquences génétiques héritées
de l’homme de Néandertal et de l’homme de
Denisova, deux espèces humaines archaïques
sorties d’Afrique bien longtemps avant les premières migrations d’Homo sapiens.
Le premier est bien connu, et a occupé le Proche-Orient et une grande part de l’Europe. Il a
contribué à hauteur de quelques pour cent aux
génomes des Européens et des Asiatiques
actuels, mais pas des actuels habitants d’Afrique subsaharienne. Le second n’a été découvert
qu’en 2010 : seule une phalange d’un unique
individu ayant été retrouvée dans une grotte de
l’Altaï, c’est l’analyse de son ADN qui a permis
de caractériser une nouvelle espèce du genre
Homo. L’homme de Denisova a pour sa part
contribué aux populations actuelles de Papouasie-Nouvelle-Guinée, mais aussi, selon des travaux publiés jeudi 22 septembre dans American
Journal of Human Genetics (AJHG), à 33 autres
populations d’Asie et d’Océanie…
Ces travaux, comme ceux publiés dans Science, sont encore limités par le faible nombre de
génomes complets. « Dans deux ou trois ans, on
pourra étudier ces questions avec le génome complet d’une cinquantaine d’individus par population, prévoit le généticien Lluis Quitana-Murci,
chercheur (CNRS) à l’Institut Pasteur. A coup sûr,
il faut s’attendre à de nouvelles surprises. » p
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Des neutrinos supraluminiques ?
David Larousserie
I
ls ont attendu six mois avant de révéler leur
secret à la communauté scientifique. Vendredi
23 septembre, Dario Autiero, chercheur au CNRS
et membre de la collaboration Opera, devait en effet
annoncer au Laboratoire européen pour la physique
des particules (CERN), en Suisse, qu’après moult
contrôles et calculs, lui et son équipe ont détecté des
particules filant plus vite que la lumière. L’écart relatif, bien que faible, est significatif, quelque 0,002 % de
plus. Un des piliers de la physique, le caractère indépassable de la vitesse de la lumière (près de
300000 km par seconde), serait donc ébranlé.
« Nous avons beaucoup hésité à communiquer,
mais nous ne pouvions pas accepter que la rumeur se
répande. Et nous devons stimuler d’autres groupes
pour qu’ils fassent eux-mêmes des tests et des contrôles », explique Stavros Katsanevas, directeur-adjoint
de l’In2p3, l’institut du CNRS chargé de la physique
des particules. Peu avant le séminaire du CERN, un
article a été rendu public avant sa publication.
« Après plusieurs mois d’études et de contrôles, nous
n’avons pas trouvé d’effets liés aux instruments pour
expliquer le résultat de cette mesure», complète Antonio Ereditato de l’université de Berne, porte-parole
d’Opera, dans un communiqué du CERN.
Matière noire fugace
Une équipe essentiellement allemande vient d’annoncer avoir détecté, dans
le laboratoire sous-terrain de Gran Sasso, en Italie, des indices de ce qui pourrait être une première si ses résultats
sont confirmés. Elle a observé le passage d’une matière fugace venue de l’espace, après laquelle tout le monde
court : la matière noire. Invisible, elle
compterait pour 80 % du total de la
matière de l’Univers et permettrait
d’expliquer pourquoi les étoiles, en
périphérie des galaxies, tournent plus
vite qu’elles ne le devraient. A peine
livrées en conférence, la semaine dernière à Munich, ces observations font
polémique. Ces dernières années, plusieurs annonces de ce type ont déjà été
réfutées. Réunissant la plupart des
équipes concurrentes, un détecteur
encore plus gros est en projet, pour augmenter les chances de capturer cette
matière furtive.
Il n’était pas prévu que cette expérience internationale ébranle les fondements de la physique actuelle. Elle a en effet pour but d’étudier les propriétés des
neutrinos, ces particules quasiment sans masse et
qui interagissent très peu avec la matière. Le Soleil
nous en envoie par milliards, mais ceux d’Opera
sont faits au CERN. Puis ils sont envoyés quelque
730 kilomètres plus loin en Italie au laboratoire souterrain du Gran Sasso. Inutile de percer un tunnel
pour cela car le voyage se fait à travers la Terre sans
problème. Mais, sur cette longue route, les neutrinos
changent de peau. Il en existe trois familles, au sein
desquelles les transformistes sont admis. Les secrets
de ce tour de magie permettent alors aux chercheurs
d’avoir directement accès à des propriétés fondamentales de la matière. Opera espère voir à peine dix
événements de ce type dans ses détecteurs.
Anomalie
En attendant, Dario Autiero a eu l’idée de vérifier le
temps de parcours de ces créatures. Et c’est là qu’il est
tombé sur cette anomalie. Il a mesuré la distance à
20centimètres près, puis le temps à quelque 10 nanosecondes près. Malgré la prise en compte de la dérive
des continents, du séisme de l’Aquila (qui a secoué le
laboratoire du Gran Sasso) ou le recours à des horloges atomiques, les neutrinos arrivent bel et bien plus
tôt que prévu! «Sur une expérience semblable, Minos,
des Américains avaient aussi détecté il y a quelques
années une déviation, mais pas aussi significative.
Dans le cas d’Opera, le hasard ne peut pas être à l’origine de l’écart de vitesse », précise Stavros Katsanevas.
Restent donc deux hypothèses : un biais dans la
mesure non pris en compte ou un nouveau phénomène physique. Dans le premier cas, l’annonce se
dégonflerait. Dans le second, ce serait au contraire
une explosion. Les théoriciens ont en effet quelques
idées pour dépasser la vitesse de la lumière. Cette
propriété découle en fait de la structure continue de
l’espace-temps et du postulat que partout les lois de
la physique sont identiques. Or rien ne dit que notre
espace-temps ne puisse être discontinu, fragmenté à
toutes petites échelles. Si tel est le cas, tout devient
possible ou presque : des particules peuvent dépasser la vitesse de la lumière.
« Bien entendu, il faut confirmer ou infirmer ce
résultat. Mais peut-être que cela peut ouvrir nos yeux.
Les chercheurs qui s’intéressent aux neutrinos et photons cosmiques peuvent aussi reprendre leurs calculs
et voir s’ils ne trouvent pas de tels écarts. De leur côté,
Minos et Opera ont déjà annoncé l’augmentation de
la précision de leurs mesures temporelles afin d’éclaircir la situation », explique Stavros Katsanevas. Les
neutrinos risquent donc de métamorphoser aussi la
face de la physique. p
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