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G A Lfranco-ontarienne
ERIE
VINGT PEINTRES
P R É FA C E
Avec ce livre, le Centre franco-ontarien de ressources
pédagogiques (CFORP) révèle un secret bien gardé jusqu'ici: la palette variée
des peintres de l'Ontario français et le talent de ces travailleurs solitaires voire
isolés, souvent méconnus dans leur propre milieu.
En 1979, le CFORP entreprit de réaliser une première anthologie de textes
littéraires franco-ontariens. Au cours de la recherche menée aux quatre coins
de l'Ontario, il se révéla que la communauté franco-ontarienne fourmillait
non seulement de poètes, de chansonniers, de dramaturges, de conteurs et de
romanciers, mais d'artistes plasticiens originaux. Afin de partager avec les
élèves franco-ontariens, premiers destinataires du répertoire, tous les fruits de
la cueillette, il fut décidé de mettre à contribution de nombreux peintres pour
illustrer la couverture des quatre volumes de l'ouvrage ou figurer parmi les
textes.
Depuis quinze ans, la peinture ontaroise a pris sa place dans la création
artistique franco-ontarienne. Pour leur part, les peintres ontarois se sont affirmés en Ontario de même qu'à l'extérieur de la Province : dans les galeries d'art,
les expositions collectives et itinérantes, les associations artistiques, dont le
Bureau du regroupement des artistes visuels de l'Ontario (BRAVO), les colloques, les publications, les médias d'information (radios, télévisions, films,
vidéos, journaux, réseaux électroniques), les musées ou les collections privées.
L'initiative présente du CFORP, circonscrite à une vingtaine de peintres,
démontre le dynamisme de la peinture chez les artistes ontarois, en dépit
de la critique artistique contemporaine qui a tendance à bouder ce moyen
d'expression. Dans les milieux spécialisés de l'art actuel, il y en a qui s'entendent
pour déclasser la peinture: certains croient l'œuvre picturale statique et dépassée
dans notre monde en perpétuel mouvement; d'autres vont même jusqu'à
condamner à mort ce mode de représentation symbolique à l'ère de la communication électronique. Ironie du sort, la peinture refait surface d'une manière
étonnante.
Le 18 décembre 1994, un groupe d'archéologues et de spéléologues ont
découvert dans une grotte de l'Ardèche au sud de la France, précisément dans
la Commune de Vallon-Pont-d'Arc, au lieudit Combe d'Arc, des peintures
rupestres âgées de plus de 30 000 ans. Ces vieux chefs-d'œuvre de l'humanité
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G A L E R I E franco-ontarienne
sont éblouissants de modernité avec leurs lignes épurées, leurs couleurs
fraîchement conservées, leurs formes animales bondissantes. La peinture
demeure l'art primordial par excellence.
Réceptacles silencieux de la pensée, de l'émotion et du travail humains
que les artistes y ont déposés dans un geste d'effervescence, ces images
peintes, premières créations de l'humanité, franchissent le temps et l'espace,
sans la barrière des langues et des cultures. Imprégnées d'énergie, d'âme,
d'intelligence et de cœur, elles revivifient l'imagination, assurent la permanence de la sensibilité et de l'esprit humains, témoignent de la solidarité
humaine dans l'aspiration à l'immortalité.
Quant tout a disparu, quand tout s'est tu, reste la peinture. Fragile comme
le matin. Puissante comme le silence. Émouvante comme la prière. Il y a une
part de sacré dans ce métier contemplatif, tourné vers la vie intérieure.
Les peintres ontarois marchent sur les traces de ces premiers artistes du
monde. En parcourant les pages qui suivent, on constate qu'ils partagent la
même vision et la même passion : exprimer, célébrer, transmettre la vie et
l'émotion à travers des traits, des formes et des couleurs. Ils font œuvre
authentiquement humaine. Sachons gré au CFORP, à Jeanne Doucet, initiatrice
du projet, et à Anne Lengellé, auteure de l'ouvrage, de nous le rappeler.
Yolande Grisé
Directrice
CENTRE
DE RECHERCHE
EN CIVILISATION CANADIENNE - FRANÇAISE
UNIVERSITÉ D'OTTAWA
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ADRIEN ASSELIN
Depuis toujours, j'ai pour la nature une passion sans
limites. Elle m'inspire, me communique son énergie et excite ma créativité.
Dès l'enfance, j'ai entretenu avec elle une complicité qui a agi sur mon
affectivité. Pour moi, les murmures d'un ruisseau ou la douceur d'un vallon ne
m'émeuvent pas parce qu'on m'a dit que c'était beau. Je vis depuis toujours en
symbiose avec la nature. Mes sens captent ses battements, ses sursauts, ses
grondements, ses couleurs et ses parfums; ils les amplifient et forment le
matériau à même lequel je puise pour faire de chacune de mes œuvres un
hymne à sa gloire.
Le destin de l'humanité m'intéresse, mais c'est en réagissant au sort qu'elle
inflige à son univers que je l'observe, l'analyse, la juge. Un grand nombre
de mes tableaux témoignent de ces agressions insensées dont notre Terre est
la victime. D'autres, au contraire, témoignent de sa générosité tantôt apaisante,
tantôt exubérante, mais toujours vivifiante.
Mon amour pour la nature m'a poussé à faire le tour de la planète pour
découvrir des mondes et des sociétés authentiques qui vivent en harmonie
avec cette nature dont ils sont bien conscients de faire partie. J'ai séjourné
dans de nombreux pays, entre autres en Amazonie, en Côte-d'Ivoire, au pays
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G A L E R I E franco-ontarienne
des Inuits, et je rêve d'aller au Tibet. Chacun de ces voyages m'a inspiré des
tableaux que je me plais à ranger dans la catégorie de mes œuvres «tangibles»
parce que je les ai faites quasiment à mon corps défendant. C'est comme si la
nature s'était servie de moi pour s'étaler elle-même sur la toile dans toute sa
vérité. La facture de ces tableaux diffère de celle de mes tableaux «intangibles»
qui sont le produit de mon activité humaine. Œuvres d'imagination, œuvres
poétiques, œuvres spirituelles, elles sont accrochées hors du temps et de
l'espace, elles sont libres, elles existent en apesanteur. C'est le subconscient
qui les a créées.
Ce qui caractérise l'artiste en général, c'est sa grande sensibilité. Elle lui
permet de se laisser envahir par l'inspiration. La sensibilité est un don, et les
artistes qui l'exploitent expriment ce qu'ils perçoivent, avec des mots – ce sont
les poètes – ou avec des couleurs – ce sont les peintres. Quant à moi, je
m'efforce de le faire sans compromis. Pour moi, peindre est un acte gratuit.
Je ne crains pas d'être jugé ou de n'être pas compris. Je ne triche pas; je libère
tout ce qui m'anime sans exercer de censure. Je me fais totalement confiance.
Je restitue, sous des formes originales et dans un langage nouveau, mes émotions
qui s'enracinent dans la nature. J'ai une préoccupation esthétique, celle d'être
la conscience de mon époque dans mes œuvres comme dans ma vie quotidienne.
Mon comportement créatif aboutit à des œuvres qui ne reproduisent pas
servilement les formes de la nature. La grande majorité de mes toiles sont non
figuratives bien que certaines d'entre elles acceptent quelques éléments figuratifs. Lorsque je peins, je m'efforce de recréer, dans des formes nouvelles et
personnelles, l'essence de la nature.
Chacune de mes toiles a son histoire. Comme j'en suis l'auteur unique,
elles ont toutes entre elles une parenté. Voici, en résumé, leur schéma narratif
commun. De mes voyages et de mes incursions dans la nature, je ramène des
images chargées d'une forte émotivité dont je m'imprègne et qui déclenche
chez moi une énergie farouche. Lorsqu'il ne m'est plus possible de la contenir,
je me livre à la toile. Mon studio devient une arène et l'acte de peindre, un
corps à corps rapide qui s'achève avec le coup de pinceau final. Il m'arrive de
peindre au milieu de la nuit. Peindre est pour moi un exorcisme. Si je peins la
forêt amazonienne qui flambe, j'éclate comme ses troncs incandescents. Si je
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ADRIEN ASSELIN
peins un monde sous-marin, je suis les poissons et les algues qui ondulent
dans une mer liquide et sourde. Lorsque le combat est terminé, je recule pour
regarder mes émotions campées sur la toile. Je les lis et les relis comme un
écrivain revoit son texte. Ensuite, je m'assure que les règles sont respectées et
je polis, au besoin, certains détails sans rien sacrifier au style.
L'acrylique est mon médium préféré. Elle sèche vite et me permet d'exécuter mes tableaux d'un seul coup. L'acrylique tolère très bien mes rages. Il
m'arrive d'en empoigner un tube et d'en appliquer la couleur directement sur
ma toile. Ainsi, je me sens plus près de la matière et de mes émotions, car il
n'y a pas d'intermédiaire qui me sépare du canevas. Dans mes compositions,
je joue avec un maximum d'éléments que j'exploite pour créer des contrastes
très marqués; contrastes entre les couleurs, entre l'opacité et la transparence,
entre la ligne nerveuse et la ligne fluide, entre le sombre et le lumineux, entre
le noir et la couleur. Ce registre étendu de procédés me permet de créer mes
œuvres «tangibles» et «intangibles» selon qu'elles traduisent des émotions
brutes ou des émotions passées au crible de la réflexion, de l'imagination ou
du subconscient. Mes œuvres «tangibles» sont dramatiques alors que mes
œuvres «intangibles» sont lyriques.
Je suis peintre avant tout et même si je travaille surtout à l'acrylique, il
m'arrive de choisir d'autres techniques. J'ai réalisé récemment un polyptyque
à l'aquarelle qui représente un monde sous-marin calme, coloré et transparent.
Je fais aussi volontiers de la gravure, de la sculpture et de la céramique. Le
choix du médium exige avant tout connaissance et sensibilité. L'essentiel, pour
l'artiste, c'est de perpétuer le geste créateur en fusionnant l'inspiration et la
représentation matérielle de l'œuvre.
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Naissance de Vénus, p. 50.
G A L E R I E franco-ontarienne
BIBLIOGRAPHIE CHOISIE
GAUDET, Éliane, «Des toiles où saigne à flots l'outrage à la nature», Liaison, no 54,
novembre 1989, p. 8-9.
Émission A comme Artiste – Adrien Asselin, TFO, vidéo VHS, 1988.
NOTES BIOGRAPHIQUES
PRIX
Adrien Asselin est né à Saint-Gervais dans
Adrien Asselin a reçu le premier prix de
le comté de Bellechasse (Québec) en 1939.
l'exposition Reflets d'amitié (1995) organi-
Il vit en Ontario depuis la première moitié
sée pour célébrer cinquante ans d'amitié entre
des années 60. Il habite à Hawkesbury où
les Pays-Bas et le Canada. Cette exposition
il enseigne les arts visuels dans une école
a eu lieu à l'occasion du Festival des tulipes
secondaire.
d'Ottawa. Le tableau primé d'Adrien Asselin
a été remis à la princesse Béatrix des Pays-
F O R M AT I O N A R T I S T I Q U E
Bas.
Adrien Asselin a fait une maîtrise en arts
visuels à l'Université de New York où il
EXPOSITIONS
a étudié la gravure sous la direction de
Adrien Asselin expose depuis 1975. Il a
Krisna Reddy, en 1982-1983. Il poursuit en
déjà participé à plus de 25 expositions
ce moment ses études à la même université
collectives, en Ontario principalement, mais
en vue de l'obtention d'un doctorat en arts
aussi à Montréal et en Italie. Il a, à son actif,
visuels. En 1974, il a participé à une série de
une vingtaine d'expositions individuelles en
séminaires sur les arts visuels à Cap-d'Ail
Ontario, à New York et à Montréal.
sur la Côte d'Azur en France. Il a fait des
études au Mexique, en Espagne et en Italie.
Il a travaillé en gravure à l'atelier de
W. Hayter, à Paris, en 1983.
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ADRIEN ASSELIN
Naissance de Vénus, 1994
acrylique sur toile
243 cm x 183 cm
50
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veuillez consulter le site web du
Centre franco-ontarien de ressources pédagogiques
http://www.cforp.on.ca

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