Le dragon vietnamien se réveille
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Le dragon vietnamien se réveille
TOPIC Novembre 2007 Le dragon vietnamien se réveille Après un faux départ dans les années 1990, le Vietnam est aujourd’hui en effervescence. Des milliers de motos agglutinées dans des embouteillages, des tours et quartiers résidentiels de luxe en construction aux abords des grandes villes, des édifices en chantier jour et nuit etc. On a longtemps dit, avec un peu de commisération, que le Vietnam était un pays d’avenir. Et bien nous y sommes : le boom vietnamien est enfin effectif. Le pays avait connu dans les années 1990 un faux départ. L’ouverture enclenchée par la politique du « Doi Moi » (1986) avait très vite tourné court : raideur politique, bureaucratie rédhibitoire à l’encontre des entreprises étrangères, puis crise financière de 1997, crise sanitaire du SRAS de 2003… Depuis le tournant des années 2000, le Vietnam revient timidement mais sûrement sur le devant de la scène. A partir de 2005, tout semble s’accélérer : Hanoi accueille le Sommet de l’APEC (novembre 2006), le Congrès américain vote le statut d’« octroi des relations commerciales normales et permanentes » (PNTR) entre les Etats-Unis et le Vietnam, et le Vietnam rentre officiellement dans l’OMC le 11 janvier 2007. Son taux de Pendant ce temps, la croissance du PIB passe la barre des 8%, tout en croissance excède restant une économie modeste avec un PIB de 70 Md. USD en 2007. Mais ce les 8%... chiffre ne reflète qu’une partie des ressources réelles vietnamiennes : devraient y être rajoutés les énormes recettes de l’économie souterraine (30% du PIB) et les 5 Md. USD envoyés par les Viêt Kieu (Vietnamiens de la diaspora). Bref, il semblerait que le PIB par habitant de 700 USD soit largement sous-estimé dans certaines provinces. Dans les embouteillages d’Hanoï et d’Ho Chi Minh Ville, il est fréquent de croiser des BMW et autres voitures de luxe à 30 000 - 50 000 USD. A Ho Chi Minh Ville, les Gucci, Esprit et autres boutiques de luxe parsèment l’avenue Dong Khoi - Champs Elysées locaux-, … et les IDE vers et la plus célèbre marque, Louis Vuitton, a réalisé le jour de son ouverture ses meilleures ventes dans toute l’Asie ! le Vietnam ont doublé en l’espace de deux ans. Dans le secteur industriel, le Vietnam reste un pays d’outsourcing, Après avoir été boudé pendant près d’une décennie par les investisseurs étrangers, le Vietnam accueille un nombre croissant d’investissements directs étrangers (IDE) : 15 Md. USD fin 2007, soit le double d’il y a deux ans ! Et l’équivalent des flux d’IDE vers l’Inde … Les voisins asiatiques (Corée du Sud, Singapour, Taïwan, Japon) sont les premiers investisseurs et ciblent en priorité les secteurs de l’industrie manufacturée, de l’immobilier, de la construction ou encore du tourisme. Le Vietnam reste encore un pays d’outsourcing : on y importe les matières premières pour les transformer et les exporter. Célèbre pour ses exportations de vêtements et de chaussures, le Vietnam devient également une cible privilégiée pour l’électronique et les technologies de l’information. Le mais se tourne de plus en plus vers des productions à forte valeur ajoutée (électronique, technologies de l’information). groupe Intel a annoncé plus de 300 M. USD pour la construction d’une usine de microprocesseurs dans un parc technologique proche d’Ho Chi Minh Ville, qui devrait créer près de 4000 emplois et embaucher une douzaine de soustraitants, fournisseurs et organismes de recherche. L’entreprise japonaise Canon investit également au Vietnam, depuis 2002, et y possède actuellement, via sa filiale Canon Vietnam Co. Ltd, trois usines de production d’imprimantes Canon pour l’export. Le secteur immobilier a aussi connu un essor fulgurant ces dernières années, à la limite du raisonnable. Dans le centre ville d’Ho Chi Minh Ville, le prix du mètre carré est similaire et même supérieur à celui de certains arrondissements parisiens : près de 6 000 USD le mètre carré en 2004 ; 22 000 USD en 2007 ! Les complexes touristiques et hôtels de luxe poussent comme Cette ouverture est des champignons, pour accueillir une clientèle internationale mais aussi de plus en plus locale, surtout à l’occasion des fêtes du Têt (nouvel an lunaire). soutenue – et surveillée – par les Ce dynamisme est soutenu en partie par les plus hautes autorités autorités politiques qui affichent ouvertement leur volonté d’ouverture – mais toujours politiques sous haute surveillance. Les nombreuses réformes adoptées depuis le début vietnamiennes. des années 2000, suivies de l’entrée du Vietnam dans l’OMC, sont autant de signaux envoyés par les autorités politiques aux investisseurs et entreprises étrangères. Le Vietnam, avec tous ses atouts, apparaît comme un concurrent sérieux pour ses voisins asiatiques Les atouts du Vietnam sont nombreux : une main-d’œuvre bon marché (les coûts salariaux restent inférieurs à ceux de la Chine dans l’industrie manufacturée soit 1 USD par jour dans la banlieue d’Hanoï), une population jeune (70% de la population a moins de 35 ans) assoiffée de connaissances, un marché domestique dynamique, et une position géographique favorable… Le petit dragon vietnamien est en bonne voie pour concurrencer ses voisins asiatiques. Mais certains handicaps subsistent. Le manque criant d’infrastructures, accentué par l’urbanisation galopante, est pointé du doigt : routes, ports, ponts, réseaux électriques, unités de production d’énergie etc., tout manque. Alors que les besoins énergétiques pour le mois de décembre 2007 devraient être de 5,95 milliards de kW par jour, le pays ne peut procurer que 5,68 milliards de kW par jour - y comprit en comptabilisant l’électricité fournie par la Chine. Et les besoins en électricité augmentent chaque année de Mais des 15%... Les plans d’infrastructures pour les prochaines années sont très handicaps ambitieux : six projets d’autoroutes et de ponts, trois de voies ferrées, trois de subsistent : ports maritimes et quatre relatifs aux aéroports, le tout pour un montant de manque 72,8 Md. USD. L’argent fait défaut mais le Vietnam compte beaucoup sur d’infrastructures, l’Aide publique pour le développement (APD) des bailleurs de fonds lourdeur internationaux (Banque japonaise de coopération internationale, Banque administrative qui mondiale et Banque asiatique pour le développement). retardent certains projets. Les écueils administratifs persistent aussi, liés en partie à la structure pyramidale de l’administration vietnamienne et à l’interférence politique locale vivace, en particulier des « comités populaires ». Certains grands projets, notamment dans les secteurs considérés comme « réservés », attendent parfois trois à quatre ans avant d’obtenir une réponse de l’administration. Ce sont actuellement des milliards de dollars, accumulés au cours des dernières années par divers fonds d’investissement, qui restent bloqués en attendant les prises de décisions… Vietnam, pays à suivre. H.B. Les investissements directs étrangers (IDE) affluent de nouveau vers le Vietnam Flux d’IDE enregistrés en Md. USD 15 16 14 12 10,2 10 8 6,8 6 4 4,6 2,5 3,2 2,8 3,1 2001 2002 2003 2 0 2000 2004 2005 2006 2007 (est.) Source : Ministry of Planning and Investment Les 10 pays préférés par les investisseurs en 2007 18 13 15 13 16 15 10. Japon 9. Indonésie 8. Philippines 7. Europe 24 15 6. Malaisie 12 5. Singapour 18 16 4. Vietnam 24 42 25 24 27 3. Etats-Unis 2. Inde 37 45 1. Chine 64 0 10 20 Au cours des 12 derniers mois 30 40 50 60 69 % 70 80 Dans un à trois ans Source : Asia Business Council, Sondage 2007 25% des personnes interrogées ont investi au Vietnam dans les 12 derniers mois, tandis que 42% des personnes interrogées projettent d’y investir dans les trois prochaines années. IN MEMORIAM François-Xavier ORTOLI nous a quittés, avec jusqu’au bout sa vivacité intellectuelle passionnée et son sourire d’une profonde humanité. Il venait toujours au premier rang de nos séminaires, et y faisait ses commentaires pétris de sa grande expérience. Il était nourri d’Asie. Corse parmi les Corses, il avait passé son enfance au bord du lac Hoàn Kiêm de Hanoi, plein de l’animation vietnamienne, jusqu’à ce jour dramatique du 9 mars 1945 où les Japonais massacrèrent les Français. Du dernier carré de résistance du fort de Hanoi, il parvint à s’évader de nuit de l’encerclement et réussit à gagner le Yunnan, pour partir à la reconquête sous l’uniforme français. Cette Asie, cette période, l’ont marqué à jamais et nous en parlions longuement il y a encore trois semaines. Après cela, sa carrière française est bien connue, jusqu’aux plus hautes responsabilités au gouvernement de notre pays, ou à la tête de la Commission européenne. Dans ce monde de pouvoir, d’ego, d’âpreté financière et de faux semblants, il n’avait cédé à aucune tentation triviale. Il aurait pu être riche : il est resté d’une incroyable modestie. Il aurait pu se pousser du col : il est resté formidablement accessible, aimable, primesautier même dans les réunions convenues. Sa fréquentation intime de la poésie, son goût des idées le conduisaient à réenvisager le monde tous les jours avec bonheur et optimisme. Nous avons fait un bon bout de chemin ensemble dans les relations entre l’Europe et l’Asie, et surtout dans sa délicieuse amitié, profonde, humaine et simple. Est-ce le dernier des honnêtes hommes ? Paix à lui. Jacques Gravereau INFORMATION : HEC Eurasia Institute vient de publier sa nouvelle étude intitulée « Les entreprises chinoises à la conquête du monde ». Cette étude est le fruit d’une vaste enquête de terrain des Conseillers du Commerce Extérieur de la France, croisée avec l’expertise de l’Institut HEC Eurasia. Contact : [email protected] A NOTER SUR VOS AGENDAS : HEC Eurasia Institute organise le 25 janvier 2008 entre 09h00 et 18h00 son colloque annuel intitulé « L’Asie en 2008 », qui se tiendra au Press Club de France, 8 rue Jean Goujon, 75008. Pour toute information complémentaire : [email protected] ou www.hec.fr/eurasia