la prise en charge des adolescents deficients visuels en ergotherapie

Transcription

la prise en charge des adolescents deficients visuels en ergotherapie
IFPEK
Institut de Formation en Ergothérapie de Rennes
LA PRISE EN CHARGE DES
ADOLESCENTS DEFICIENTS VISUELS EN
ERGOTHERAPIE
En vue de l’obtention du diplôme d’Etat d’Ergothérapeute
Barbara GABRIEL
Année 2009-2012
Selon le code de la propriété intellectuelle, toute reproduction intégrale ou partielle faite sans le
consentement de l'auteur est illégale.
IFPEK
Institut de Formation en Ergothérapie de Rennes
LA PRISE EN CHARGE DES
ADOLESCENTS DEFICIENTS VISUELS EN
ERGOTHERAPIE
Sous la direction d’Hélène Le Bris
En vue de l’obtention du diplôme d’Etat d’Ergothérapeute
Barbara GABRIEL
Année 2009-2012
Je tiens à remercier ma maître de mémoire Hélène Le Bris ainsi que tous les
professionnels qui ont pris le temps de s’entretenir avec moi. Merci à Alice Marty
pour ses précieux conseils, son dynamisme, sa façon passionnante et passionnée de
mener son travail. Merci à mon entourage pour leur patience à m’écouter ou me
relire.
« La cécité n’est pas un handicap, c’est sûrement une déficience mais
avant tout simplement une autre façon de voir les choses ». Gilbert
Siboun 1989
« Le handicap visuel complique, il ne détermine pas le devenir
adulte. » Pierre Griffon
Sommaire
INTRODUCTION ........................................................................................................................ 1
PREMIERE PARTIE : Apports théoriques ...................................................................................... 6
1
Définition de la déficience visuelle et de la cécité ................................................................... 6
1.1 Amblyopie ......................................................................................................................... 6
1.2 Cécité ................................................................................................................................. 6
2
Définition de l’adolescence ...................................................................................................... 7
2.1 Présentation de l’adolescent .............................................................................................. 7
2.2 Les conflits liés à l’adolescence ........................................................................................ 9
3
Particularité d’être adolescent et non voyant ......................................................................... 11
3.1 L’adolescent déficient visuel ou non voyant congénital .................................................. 11
3.1.1 Le blindisme ............................................................................................................. 11
3.1.2 Les ambivalences de l’adolescent porteur d’un handicap ........................................ 11
3.1.3 La surprotection........................................................................................................ 12
3.2 L’adolescent non voyant ou ayant une déficience visuelle acquise ................................. 13
3.2.1 L’allongement de la l’adolescence ........................................................................... 13
3.2.2 Le Deuil .................................................................................................................... 13
3.2.3 Le réajustement des acquis pour reprendre confiance en soi ................................... 15
3.3 L’approche de la sexualité chez un adolescent avec une déficience visuelle .................. 15
3.4 Indépendance ou Autonomie ? ........................................................................................ 16
4
L’ergothérapie......................................................................................................................... 17
4.1 Présentation de l’ergothérapie ......................................................................................... 17
4.2 L’ergothérapie dans le domaine de la déficience visuelle ............................................... 18
4.2.1 La REEDUCATION ................................................................................................. 18
4.2.2 La READAPTATION............................................................................................... 22
5
L’ergothérapeute et l’AVJiste ................................................................................................. 25
DEUXIEME PARTIE : Analyse et vérification des hypothèses .................................................... 26
1
Choix de la méthode ............................................................................................................... 26
1.1 Population interrogée ....................................................................................................... 26
1.2 Elaboration du questionnaire ........................................................................................... 28
1.3 Passation du questionnaire............................................................................................... 28
1.4 Les limites du questionnaire ............................................................................................ 29
1.5 Méthode pour l’analyse des données ............................................................................... 29
2
Résultat et analyse des données ............................................................................................. 29
2.1 Les modalités de la prise en charge des adolescents en ergothérapie .............................. 29
2.1.1 L’importance de la prise en charge en ergothérapie à l’adolescence ....................... 29
2.1.2 La forme des prises en charge : mise en situation dans l’environnement de
l’adolescent ou sous forme analytique en salle d’ergothérapie Pourquoi ? Comment ? ........ 33
2.2 Le travail interprofessionnel ............................................................................................ 34
2.2.1 La transposition des acquis au quotidien.................................................................. 34
2.2.2 L’ergothérapie s’inscrit dans un projet de collaboration interprofessionnel ............ 37
2.3 Le rôle de l’ergothérapeute et de l’AVJiste auprès des jeunes déficients visuels ............ 37
2.3.1 La différence entre un ergothérapeute et un AVJiste ............................................... 37
2.3.2 L’importance de cette spécialisation pour travailler auprès de déficients visuels .... 38
2.3.3 L’AVJ compatible avec d’autres professions qu’ergothérapeute ? ........................... 39
2.4 Les domaines d’action de l’ergothérapie ......................................................................... 41
2.4.1 Le domaine d’action principal de l’ergothérapeute : soins personnels, activité
sociale, autonomie scolaire .................................................................................................... 41
2.4.2 L’apport de l’ergothérapie auprès des personnes déficientes visuelles durant
l’adolescence ? ....................................................................................................................... 43
3
DISCUSSION ........................................................................................................................ 45
3.1 Synthèse de l’analyse....................................................................................................... 45
3.2 Perspectives d’action ....................................................................................................... 46
3.3 Limites ............................................................................................................................. 47
CONCLUSION .......................................................................................................................... 49
BIBLIOGRAPHIE ..................................................................................................................... 51
WEBOGRAPHIE ....................................................................................................................... 52
ANNEXES .....................................................................................................................................
INTRODUCTION
L’adolescence est une période de la vie où s’effectuent de nombreux remaniements autant
physique que psychique sur un individu. C’est à la fois une phase à la fois où l’adolescent
renonce à l’insouciance de l’enfance, et où il prend conscience, ainsi que son entourage, qu’il
devient une personne à part entière capable de penser et d’agir selon ses propres idées. Ces
changements s’illustrent notamment par le fait que le jeune devienne indépendant et poursuive
son chemin vers l’autonomie.
Dans le domaine du handicap, chaque jeune évolue différemment.
Un enfant aveugle de naissance ne perçoit pas le monde qui l’entoure comme un enfant voyant le
perçoit. Il compense son déficit sensoriel en développant les autres sens, mais dans un univers où
la vue est le sens le plus employé, l’adaptation est parfois difficile.
« Atwel1 parle de l’espace « egocentré » du toucher et « allocentré » de l’espace visuel. D’après
lui, « Ce qui saute aux yeux ne saute pas aux mains ». En effet, les expériences visuelles sont
inaccessibles aux personnes non voyantes : il leur est impossible de partager une « même vision
du monde ». Le contraire est aussi vrai : il n’est pas possible à un voyant de vivre et ressentir ce
que représente la cécité même avec des yeux bandés. »2
C’est pourquoi, quand un enfant devient adolescent avec une déficience visuelle, ses angoisses
sont d’autant plus importantes car il comprend qu’il devra d’autant plus s’adapter pour gagner
son indépendance. Les professionnels de santé médicaux, paramédicaux, et du social, sont là pour
l’aider et le guider dans le chemin vers l’autonomie. En effet il est important de
mener
l’adolescent dans son rôle d’acteur de sa propre vie entendu et reconnu des autres, épanoui dans
son environnement et capable, pour qu’il vive au mieux avec « la société qui y voit » en évitant
de se renfermer lui-même. Cette prise en charge passe, d’un point commun à tous les acteurs de
la prise en charge par l’écoute, le dialogue, la valorisation des performances, l’entretien de la
confiance en soi et aux autres ainsi que l’estime de soi. En fonction des capacités de chacun, il
sera important d’apporter de nouvelles motivations et ambitions dans différents champs :
personnel, relationnel, scolaire, professionnel, familial…
1
Atwel dans : RAYNARD Francis, (mai 2003), Un autre regard, La réadaptation des déficients visuels, édition Solal,
p.82
2 RAYNARD Francis, (mai 2003), Un autre regard, La réadaptation des déficients visuels, édition Solal, p.82
1
Ayant effectué un stage dans un centre accueillant des enfants, adolescents et adultes
déficients visuels, j’ai souhaité m’intéresser à ce public pour mon mémoire. En effet, ce centre
accueille notamment des adolescents et adultes en reconversion professionnelle ou scolaire suite
à la perte ou la diminution de la vue. J’ai découvert une prise en charge très spécifique à ce
handicap sensoriel en ergothérapie, peu abordée durant mes études. La finalité de l’ergothérapie
est la même dans ce domaine que dans un autre domaine de compétences de l’ergothérapie :
l’ergothérapeute par sa prise en charge va viser l’acquisition d’un maximum d’autonomie pour
les personnes déficientes visuelles. Ce qui est différent sont les moyens mis en œuvre pour y
parvenir. Il est primordial de laisser le temps nécessaire à la personne de faire par elle même.
Ceci est compliqué au début et surprenant même, car, même en connaissant les difficultés, il est
par exemple difficile de laisser une personne non voyante chercher un objet qui est devant nous et
que nous voyons bien alors que l’individu ne le trouve pas directement. Mais c’est en cherchant
plusieurs fois cet objet que la personne mettra en place des stratégies exploratoires au fur et à
mesure, et avancera dans son processus d’autonomisation. Ces prises en charge demandent donc
une grande patience de la part des thérapeutes qui doivent être pleinement conscients de leurs
objectifs et du bénéfice de la personne à réussir par elle-même.
Pendant ce stage, j’ai particulièrement suivie deux adolescentes non voyante congénitales.
Ces deux jeunes filles de 16 et 18ans étaient à des stades très différents sur le chemin vers
l’autonomie. L’une apprenait à s’habiller, l’autre, en formation professionnelle pour être hôtesse
d’accueil, travaillait le fait d’arriver à reconnaitre ses habits pour pouvoir accorder les couleurs.
Ces adolescentes n’appréhendaient pas leur avenir de la même façon. La première était très
protégée dans sa famille, elle ne se positionnait pas comme une adolescente mais plus comme
une enfant où l’avenir et la vie d’adulte lui paraissait lointain et incertain. La seconde était plus
consciente des responsabilités qu’on lui demandait d’acquérir.
Parallèlement, j’ai aussi suivi durant ce stage des adolescents malvoyants suite à une maladie
évolutive ou après une opération chirurgicale pour ôter des tumeurs cérébrales. Ces adolescents
avaient une déficience visuelle acquise de façon évolutive ou brusquement. Ils avaient donc des
repères différents de personnes malvoyants de naissance, et possédaient des repères visuels
contrairement aux deux adolescentes aveugles congénitales. Avec ces adolescents malvoyants,
nous travaillions sur l’activité cuisine et l’activité repas en séance individuelle. Ces prises en
charges étaient différentes les unes des autres car le but était de renforcer la complémentarité
entre les repères tactiles et les repères visuels possibles, pour pouvoir avoir une production de
2
l’activité adaptée et en toute sécurité. Or les adolescents n’avaient pas les mêmes acquis et les
mêmes capacités visuelles, il fallait donc veiller à adapter la prise en charge à ces critères.
Ces différentes prises en charge et les lectures que j’ai pu consulter m’ont amené différents
questionnement :
Comment ces adolescents peuvent-ils accéder à un niveau d’indépendance suffisant pour être
autonome ?
Qui peut les guider sur le chemin de l’autonomie et comment ?
L’ergothérapie est-elle une prise en charge déterminante à cette période pour que l’adolescent
puisse s’accomplir dans sa vie d’adulte ?
Comment l’ergothérapie peut accompagner un adolescent déficient visuel ou non voyant sur le
chemin de l’autonomie ?
Ces questionnements m'ont amenée à la problématique suivante :
En quoi la prise en charge en ergothérapie favoriserait l’accès à l’autonomie chez un
adolescent non voyant ou mal voyant ?
3
L’adolescence est une période importante de la vie où on construit sa propre personnalité à
travers l’acquisition d’autonomie. J’ai voulu me concentrer sur cette période de la vie où la
personne est donc en recherche maximale d’autonomie. Comme cité ci-dessus, l’objectif
principal du métier d’ergothérapeute est que toute personne puisse accéder à un maximum
d’autonomie possible. Le parallèle est donc intéressant entre d’un côté un public en recherche
d’autonomie de part leur âge, ayant besoin d’une aide de part leur handicap, et de l’autre, un
métier dont la finalité est l’acquisition d’autonomie et spécialisé dans le handicap.
De plus, j’ai pu côtoyer et prendre en charge ce public en stage.
Les jeunes vivent souvent en centre spécialisé pendant l’adolescence, où ils reçoivent les soins et
l’encadrement nécessaires à leur handicap. Les parents n’ont donc pas le même rôle que chez un
adolescent voyant pour les guider vers l’âge adulte, car cet accès nécessite pour l’adolescent
l’apprentissage de mise en place de moyens pour compenser ses déficits. Ces moyens ne sont pas
forcément connus des parents, ce sont donc les professionnels du centre où l’enfant réside qui
auront pour mission d’amener l’enfant vers une meilleure indépendance ou autonomie quand
c’est possible.
J’émets donc l’hypothèse que l’ergothérapeute, par son statut de professionnel, favorisera
l’acquisition de l’autonomie chez l’adolescent.
Le public des personnes déficientes visuelles est très vaste : il existe des personnes aveugles ou
malvoyantes. J’ai pensé qu’il serait intéressant de m’intéresser à ces deux types de handicap, car
la prise en charge en ergothérapie est très différente comme nous le verrons par la suite. Cette
prise en charge varie aussi beaucoup si la personne est déficiente visuelle de naissance ou si elle
l’est devenue. L’âge d’apparition de la déficience visuelle est aussi très important car il
déterminera les acquis de la personne en tant que « voyant ». La précocité de la prise en charge
joue un rôle important dans l’acquisition de capacités chez l’individu.
Le choix de traiter de plusieurs types de handicap visuel permettra de pouvoir comparer les prises
en charge en ergothérapie selon les catégories de déficiences visuelles lors du recueil des
données.
Ces différents points m’ont amené à émettre une hypothèse
La prise en charge en ergothérapie est nécessaire pour qu’un adolescent mal voyant ou non
voyant puisse accéder à un niveau d’autonomie suffisant.
4
Pour confirmer ou infirmer ces hypothèses, j’ai choisi de définir dans une première partie les
termes ainsi que les différents rôles de l’ergothérapeute auprès de ce public pour mieux
comprendre son rôle prépondérant dans le processus d’autonomisation.
Dans un second temps de l’étude, je développerai le recueil de données ainsi que l’analyse de ce
recueil de données.
Enfin, la mise en parallèle de cette analyse avec la première partie théorique me permettront de
réfléchir de nouveau à mon hypothèse de départ.
5
PREMIERE PARTIE : Apports théoriques
1 Définition de la déficience visuelle et de la cécité
Selon l’Organisation Mondiale de la Santé, la définition actuelle ne fait pas la différence entre
ceux qui ont une cécité totale (pas de perception lumineuse) et ceux qui ont une perception
lumineuse mais avec une vision inférieure à 1/20 du meilleur œil.
L’OMS situe à 1/20ème la frontière entre malvoyance et cécité, et définit 5 catégories de
déficiences visuelles :
1.1 Amblyopie

Catégorie I : La déficience visuelle moyenne
Acuité visuelle binoculaire corrigée inférieure à 3/10ème et supérieure à 1/10ème, avec un champ
visuel d’au moins 20°.

Catégorie II : La déficience visuelle sévère
Acuité visuelle binoculaire corrigée inférieure à 1/10ème et supérieure ou égale à 1/20ème, avec un
champ visuel compris entre 10° et 20°.
1.2 Cécité

Catégorie III : La déficience visuelle profonde / cécité.
Acuité visuelle binoculaire corrigée inférieure à 1/20ème et supérieure ou égale à 1/50ème, avec un
champ visuel compris entre 5° et 10°. Le comptage des doigts est possible à moins de trois mètres
ainsi que la taille des grands titres de journaux.

Catégorie IV : La cécité presque totale
Acuité visuelle binoculaire corrigée inférieure à 1/50ème, mais perception lumineuse préservée,
avec un champ visuel inférieur à 5°. Le sujet a des perceptions lumineuses, parfois des masses et
des volumes ou des formes

Catégorie V : La cécité absolue
Pas de perception lumineuse.
6
Les catégories de déficiences visuelles3
Acuité visuelle de loin avec la « correction portée »
Catégorie
Déficience visuelle légère
ou absente
0
Déficience visuelle
modérée
1
Déficience visuelle
sévère
2
Cécité
3
Cécité presque totale
4
Cécité totale
5
Inférieure à :
Egale ou supérieure à :
3/10 (0.3)
3/10 (0.3)
1/10 (0.1)
1/10 (0.1)
1/20 (0.05)
1/20 (0.05)
1/50 (0.02)
1/50 (0.02)
Perception lumineuse
Pas de perception lumineuse
2 Définition de l’adolescence
2.1 Présentation de l’adolescent
L’étymologie du terme adolescent est composé de la racine latine « adolescere » qui, au participe
présent s’écrit « adolescens » et signifie « en train de grandir », et au participe passé « adultus »
soit « qui a fini de grandir ».
L’adolescence commence avec l’apparition d’une puberté physiologiquement normale et
se termine lorsque l’identité et le comportement adultes sont acceptés. Cette période de
développement correspond approximativement à la période entre 10 et 19 ans selon
l’Organisation mondiale de la santé.
3
World Health Organization. Changements dans la définition de la cécité. [en ligne]. Disponible sur Internet :
http://www.who.int/blindness/Changements.pdf (Consulté le 12 novembre 2011).
7
Selon Gaonac’h et Golder, on peut diviser l’adolescence en plusieurs périodes significatives :4
TYPE DE
RAPPORT
EVÉNEMENT
AGE
TÂCHES
Adopter une identité
de genre
Rapports au corps
Puberté
de 10 à 14-15 ans
Construire une image
corporelle sexuée
S’engager
progressivement dans
l’intimité sexuelle
Rapports à autrui
Rapports à soi
4
Vie sociale
Identité
de 12 à 17-18 ans
de 13 à 19 ans
Se défaire des liens
de la dépendance
avec les parents
S’engager dans les
relations de
proximité avec les
pairs
Se situer et se
structurer à travers
des enjeux cruciaux:
-Les perspectives
professionnelles
-Les relations
interpersonnelles
-Le rapport à l’autre
sexe
-Les valeurs et
croyances
-Les projets de vie
AUDETAT M.- Cl, VOIROL C.. L’adolescent. 1997. [en ligne]. Disponible sur Internet :
http://psynergie.ch/Pedagogie-Culture-Societe/Eleve/AdolescentTexteBase.pdf (Consulté le 26 octobre 2011).
8
La période de l’adolescence est donc une période de transition où s’opèrent de nombreux
changements :

Morphologique : ensemble des changements anatomique aboutissant à la capacité de
reproduction ; ces transformations corporelles entrainent des transformations psychiques
qui permettent à l’adolescent de se construire son identité.

Physiologique : avec la croissance et l’apparition des caractères sexuels secondaires,

Intellectuel : L’adolescent sera capable de construire un raisonnement avec des
hypothèses abstraites, et a aussi de grandes capacités d’apprentissage.

Identitaire : L’individu doit se positionner en tant qu’adultes, et être capable de faire des
choix et de prendre des décisions

Au niveau de l’autonomie : capacité à gérer ses pensées et ses émotions, c’est
l’individuation, et la capacité à gérer ses relations, c’est l’appartenance.
2.2 Les conflits liés à l’adolescence
Les psychologues Charles Voirol et Marie-Claude Audétat5 mettent en avant les sources de
tension les plus fréquentes entre parent et adolescent.
Tout d’abord le choix professionnel. Souvent, il arrive que les parents prennent la décision finale
concernant l’orientation scolaire ou professionnelle. Si cette décision est conforme aux désirs de
l’enfant tout se passe pour le mieux. En revanche si les parents refusent le choix de l’enfant, les
relations deviennent difficiles.
L’amour est également un sujet délicat pour l’adolescent. Il est en train de découvrir l’intimité
avec un ou une partenaire et cette nouvelle relation appartient à son jardin secret. Il perçoit donc
les nombreux interrogatoires de ses parents comme embarrassants.
Les tensions au sein du couple parental ou le divorce des parents peuvent également être des
facteurs déstabilisants. L’adolescent perd ses repères et les parents trop impliqués dans leur
séparation, relâchent l’attention sur leurs enfants. Il n’existe donc plus de cadre auquel
l’adolescent puisse se référer pour savoir s’il adopte les bons comportements ou non.6
5
AUDETAT M.- Cl, VOIROL C.. L’adolescent. 1997. [en ligne]. Disponible sur Internet :
http://psynergie.ch/Pedagogie-Culture-Societe/Eleve/AdolescentTexteBase.pdf (Consulté le 26 octobre 2011).
6
AUDETAT M.- Cl, VOIROL C.. L’adolescent. 1997. [en ligne]. Disponible sur Internet :
http://psynergie.ch/Pedagogie-Culture-Societe/Eleve/AdolescentTexteBase.pdf (Consulté le 26 octobre 2011).
9
L’adolescent est en train de se construire en tant qu’adulte et l’autorité quelle qu’elle soit
représente est une atteinte à sa liberté. Les parents contrôlent les comportements, les
fréquentations et souvent l’orientation scolaire ou professionnelle comme vu auparavant.
L’école impose un programme et contraint à un travail régulier. Cette autorité est vécue comme
pesante et généralement sa nécessité n’est pas bien comprise par l’adolescent. Il s’essaye alors de
la contester de manière plus ou moins virulente. Cette tendance à dire «non » peut se manifester
par l’imitation de comportements qui sont, selon les normes sociales, « réservés » à l’adulte
(tabac, alcool, drogue,...), ou par la contre imitation du modèle attendu.
Pour marquer sa différence par rapport à ce monde adulte et autoritaire, l’adolescent éprouve le
besoin de vivre en « bande ». Il y trouve, l’amitié, la solidarité et la compréhension. Ces pairs
connaissent généralement les mêmes difficultés et ensemble ils tentent d’introduire de nouvelles
normes. L’appartenance au groupe repose ainsi sur par exemple:
des goûts en commun (musique, cinéma, jeux,...)…
une mode vestimentaire commune
des loisirs communs tels que le sport, les jeux vidéo...
des comportements d’opposition dans certains cas, la consommation d’alcool, de cigarettes, de
drogues...
L’adolescence est une période de renoncement de la stabilité de l’enfance où l’adolescent
veut prendre de la distance par rapport à son entourage pour construire son identité propre.
L’adolescent avec un handicap a beaucoup plus de difficultés à exprimer ses sentiments de rejet et
de révolte. Son manque de confiance en lui est souvent renforcé par une dépendance affective
excessive vis-à-vis de son entourage ainsi que par l’attitude de ce dernier. En effet, le jeune adulte
doit assumer de nouveaux rôles, faire un choix parmi toutes les possibilités qui s’offrent à lui et
acquérir les connaissances et les capacités pour assumer ces choix. L’accès aux rôles sociaux
marque l’entrée dans l’âge adulte, or l’accès à ces rôles est souvent très restreint pour les
personnes en situation de handicap.
10
3 Particularité d’être adolescent et non voyant
3.1 L’adolescent déficient visuel ou non voyant congénital
3.1.1 Le blindisme
Les jeunes déficients visuels peuvent parfois adoptés un comportement stéréotypé comme une
instabilité psychomotrice
désigné sous l’appellation de « blindisme ». On retrouve le plus
souvent des balancements du tronc, des rotations de tête, des mouvements de bras relevés à la
hauteur des épaules, des frottements de mains sur le visage…Ces comportements s’explique par
le fait qu’en l’absence de stimulation visuelle, l’enfant utilise ces moyens pour se retirer d’un
monde qu’il ne comprend pas et qui ne lui correspond pas. Ces stéréotypies augmentent avec les
émotions, et comme le jeune ne peut pas observer les autres pour se rendre compte que son
mouvement est inapproprié, il continue et répond à son besoin de mouvement pour mieux
ressentir son corps.7
3.1.2 Les ambivalences de l’adolescent porteur d’un handicap
L’adolescent construit son identité, sa personnalité et veut être un individu à part entière en
devenant indépendant et autonome par rapport à son entourage. C’est souvent un moment
conflictuel avec la famille avec le souhait de vouloir s’affirmer, et en même temps une peur d’être
abandonné.8
Cette période peut être vécue difficilement lorsqu’un adolescent est porteur d’un handicap
notamment lors d’une cécité. En effet, en plus des préoccupations d’un adolescent ordinaire, il y
a la difficulté de ne pas être comme les autres, ne pas savoir à qui s’identifier pour l’aider à
avancer et à mieux appréhender l’avenir. Cette ambivalence entre l’envie de se distinguer de
l’autre tout en ne voulant pas être perçu comme différent, peut entrainer des angoisses
importantes chez le jeune. Ces angoisses se traduisent souvent par une intense crise
d’adolescence accentuée par rapport à la normale. En effet, d’après Eric Zolla, il survient souvent
d’importantes tensions avec les parents qui ont une tendance à surprotéger leurs enfants.
7
LAURENT Michel. Retentissement de la déficience visuelle au niveau de la personne. Réadaptation. La
scolarisation des élèves déficients visuels en milieu ordinaire. Décembre 1998, n°455, pp12-13
8
ZOLLA Eric. Déficience visuelle et adolescence. Réadaptation cécité et malvoyance n°517, p.22
11
Le jeune veut, lors de l'adolescence, s’éloigner affectivement des ses parents pour acquérir une
identité nouvelle socialement reconnue auprès des personnes qui représentent ce qu'il souhaite
devenir (des jeunes de son âge ou des modèles plus âgés surinvestis). Cette situation est
ambivalente : le jeune cherche à se passer de ses parents sans en avoir encore les moyens. Il
quitte un équilibre socio-affectif stable pour un autre, jugé meilleur mais non encore acquis.
L'adolescent, par le jeu des identifications, défis, vérifications et mises en situation, va
s'approprier son handicap en essayant de définir les limites fonctionnelles que ce dernier lui
impose et, à l'intérieur de ces limites, les domaines de compétence sur lesquels il va s'appuyer
pour affirmer son identité.
Souvent, l’individu non voyant entre à un âge plus tardif dans cette période, et vit une
adolescence plus longue que celle d’un adolescent voyant. La prise de conscience des
transformations corporelles ainsi que les processus d’identification s'amorcent de manière lente et
progressive.
Selon Pierre Griffon, psychologue clinicien en Centre de Rééducation Fonctionnelle pour
personnes Aveugles ou Malvoyantes, « Il est courant, dans le travail clinique de psychologue, de
rencontrer un jeune adulte de 20 ans ou plus, en pleine maturité physique, présentant des
réactions affectives ou de prestance caractéristiques de l'adolescence. Si on peut objectiver une
immaturité affective, par rapport à la plus part des jeunes du même âge, cette dernière n'est en
rien pathologique. »9
3.1.3 La surprotection
Cette crise d'adolescence peut se trouver perturbée pour le jeune déficient visuel, par les
séquelles de surprotection établies au cours de l'enfance. En effet pour oser s'opposer aux
modèles proposés par les parents, il faut que le jeune soit certain que cela ne remettra pas en
cause l'amour que ses parents lui portent. La surprotection est définie comme une « manifestation
excessive d’amour parental et de protection ».10
La surprotection infantile marque l'inquiétude des parents à l'égard du devenir du jeune
malvoyant. Ce n'est que par la disparition progressive de la surprotection au cours de l'enfance
que l’enfant peut faire ses preuves, tester ses possibilités pour grandir. Si la surprotection s'est
9
GRIFFON Pierre. L’adolescent déficient visuel. Rétinites pigmentaires et Devenir Adulte. Communication à la
journée d'étude "Rétinite pigmentaire et autres atteintes dégénératives de la rétine" IRSA Bruxelles 1997 (extraits)
1997. [en ligne] Disponible sur Internet : http://pierre.griffon.pagesperso-orange.fr/AdoDV.pdf (Consulté le 15
novembre 2011)
10
REY-BOVE Josette, REY Alain. Le petit Robert. Edition Le Robert, juin 1996, p. 2182.
12
maintenue tardivement ou si elle demeure, l'adolescent aura sensiblement plus de mal à "se
lancer", à oser seul prendre le risque de devenir adulte.
A cette période de nombreuses questions émergent chez l’adolescent. En effet, l’enfant devenu
adolescent sent son corps changer, ce qui entraine des difficultés de prise de connaissance de son
propre corps et de l’image qu’il renvoie ; parallèlement, l’adolescent est aussi très préoccupé par
son avenir professionnel et sa future vie d’adulte. En effet, il est important pour chaque personne
de trouver sa place dans la société et d’être reconnue sur le plan social d’être « utile ». Ce concept
d’utilité sociale doit inciter la société à favoriser l’intégration des personnes handicapées dans la
communauté.11
3.2 L’adolescent non voyant ou ayant une déficience visuelle acquise
3.2.1 L’allongement de la l’adolescence
Le sujet qui devient malvoyant au cours de l'adolescence, va franchir cette étape
maturative de manière souvent plus lente que la moyenne des sujets du même âge. A la volonté
de grandir, d'affirmer l'identité nouvelle, se mêlent des comportements régressifs.
Le jeune adulte doit intégrer le développement pubertaire et la réduction de l'efficience visuelle,
soit assimiler deux évolutions contradictoires. Des mécanismes régressifs c'est-à-dire des retours
en arrière par rapport à l’évolution de l’enfant vers l’adolescent, peuvent être transitoirement
nécessaires pour aider le jeune à s'adapter à la perte d'une vision normale.
Si elles ne perdurent pas, ces régressions sont utiles. Elles confortent le jeune dans une position
plus sécurisante, l'aident à accomplir le deuil de sa vision normale et lui permettent d'aborder
dans de meilleures conditions les transformations profondes de l'adolescence. Un temps plus
importants est nécessaire à ces adolescents pour leur permettre une maturation fonctionnelle et
suffisante vers l'âge adulte.
3.2.2 Le Deuil
Pour un adolescent ayant une déficience acquise récente, à la problématique de la période
de l’adolescence se rajoute la problématique du travail de deuil des capacités visuelles
antérieures. Selon le docteur Hervé Mignot, « le deuil est défini en psychanalyse par la perte de
tout objet fortement investi, qu’il s’agisse d’une personne, d’une idée, d’une capacité
11
BELLINA Inès. La construction d’un projet professionnel d’un jeune déficient visuel. Réadaptation. Jeunes
aveugles ou malvoyants. Mars 1996, n°428, p.36
13
fonctionnelle. Le deuil est donc un cheminement psychologique que connaîtra tout individu
confronté à une perte. C’est avant tout un parcours émotionnel qui mobilise une grande partie de
l’énergie psychique du sujet et le rend indisponible pour toute autre chose. Plus difficile à
accomplir qu’un travail physique, il aboutit lorsque l’individu réapprend à vivre en l’absence de
l’objet. »12. Le deuil passe par différentes étapes pour que l’adolescent arrive à vivre avec son
handicap. Ces étapes sont plus ou moins longues, et ne sont pas toutes obligatoires. Leur sens
d’apparition n’est pas figé et peut varier selon les individus. De plus, des allers-retours entre ces
différentes phases est possible et peuvent durer plus ou moins longtemps selon les personnes.
-
Le choc : c’est un état de sidération où la personne est comme anesthésiée. Cet état
peut persister quelques jours durant lesquels la personne se déplacera comme stupéfaite, sans
bien comprendre ce qui se passe.
- Le déni : La personne ne parvient pas à y croire: « C’est un mauvais rêve, je vais
me réveiller». Elle peut durer plusieurs semaines et est souvent la source d’une grande anxiété
qui peut se manifester pas des difficultés à s’alimenter ou à dormir.
-
La colère : Pourquoi moi ? L’individu exprime sa colère contre les médecins,
contre les soignants, contre la terre entière…Le patient exprime un sentiment d’injustice, une
révolte projetée sur autrui. Cette colère s’atténue progressivement en l’exprimant maintes et
maintes fois.
-
La phase de marchandage : Progressivement, la personne intègre l’idée de la non
récupération de ses capacités antérieures et essaie de négocier par rapport à la douleur de cette
perte. L’individu veut retarder la réalité de sa situation, mais, malgré ses efforts, il est confronté à
la persistance de la perte de ses aptitudes.
-
La dépression : Cette étape peut être longue et répétitive. Elle se manifeste après la
confrontation de la perte physique avec la perte du projet de vie. L’individu va devoir se reconstruire
une image de soi qui va prendre en compte le changement physique
-
L’acceptation : La personne reconsidère ses valeurs en regard de la perte qu’elle a
subit, et redéfinit le sens qu’elle apporte à sa nouvelle vie.
12 MIGNOT Hervé. Le travail de deuil, un parcours intérieur difficile. Soins en gérontologie Deuils et obsèques,
n°35 p.23-24-25.
14
3.2.3 Le réajustement des acquis pour reprendre confiance en soi
Le handicap visuel accentue les difficultés et la perte de confiance quant au désir
d’autonomie et d’indépendance de l’adolescent vis-à-vis de ses parents, d’où parfois des réactions
de prise de risques et/ou de repli sur soi. La constitution de la personnalité de l’adolescent face
au regard des autres est souvent difficile et l’intégration sociale peut alors être délicate. Ces
difficultés sont encore aggravées si la déficience visuelle survient à l’adolescence car s’ajoute le
travail de deuil.
L'apparition d'une baisse visuelle au moment de l'adolescence ne remet pas en cause les capacités
acquises, mais elle pose le problème de leur utilisation. En effet, les acquis durant le vécu de
« voyant » seront utiles à l’adolescent mais devront souvent être adapté par des techniques
spécifiques à la déficience visuelle ou par des aides techniques pour pouvoir être utilisés de
manière efficace. Mais, ils bénéficient d’un acquis visuel et d’une vision de l’environnement
conforme a celle des voyants. De plus, leur mémoire kinesthésique (c'est-à-dire la mémoire de
leur corps en mouvement dans l’espace), plus importante que chez des aveugles congénitaux, leur
permettra avec une rééducation de retrouver des gestes adaptés au quotidien. L’apprentissage de
ces nouvelles techniques les aidera à reprendre confiance en eux et en leurs capacités, à agir sur
leur environnement au quotidien en induisant un nouveau projet de vie.
La rééducation aura donc deux axes majeurs : un rééquilibrage pluri sensoriel du recueil et
traitement des informations perçues, ainsi que la mise en place si besoin de moyens de
compensation adaptés au handicap (techniques ou aides techniques).13
3.3 L’approche de la sexualité chez un adolescent avec une déficience visuelle
Pierre Griffon nous renseigne sur le vécu de la sexualité des adolescents déficients visuels.
La sexualité peut être un sujet d’angoisse chez l’adolescent déficient visuel ou aveugle. En effet,
les modalités d'approche de l'autre, sujet d'amour, de désir, vont en fonction de la gravité de
l'atteinte visuelle, s'appuyer sur d'autres modalités sensorielles que la vue : l'ouïe et le toucher
principalement. Une grande importance peut être donnée à la voix, aux intonations, à la chaleur,
au rythme, au débit, aux hésitations, à la portée, la proximité, de celui ou de celle que l'on désire.
13
GRIFFON P., DUTIER N., PERROT F., GUILLAUME C., BURLOT C. La rééducation des personnes déficientes
visuelles Evolution des pratiques en ergothérapie. Journal d’ergothérapie. 1992, tome 14/2, p.51.
15
Cette importance donnée aux autres sens est parfois mal estimée par l'entourage voyant, qui est
principalement sensible à l'apparence.
Le toucher est à la fois un des supports de compensation de la vision déficiente le plus important
pour la personne déficiente visuelle ou aveugle, et celui pour lequel les connotations et tabous
sont les plus nombreux et anciens dans nos société occidentales. Toucher pour découvrir ne se fait
pas. Les explorations tactiles sont perçues comme l'expression de désir sexuel, comme une
manœuvre d'approche de l'être désiré. Or, pour nombre de jeunes déficients visuels, il n'y a pas
d'autre moyen pour compléter l'image imparfaitement vue de l'autre désiré, que d'utiliser
l'audition et le toucher. L'acte d'exploration tactile, communément perçu comme l'aboutissement
d'une approche amoureuse, peut fort bien n'en être pour le jeune déficient visuel que le tout
premier moment, celui de la première rencontre. La difficulté pour le jeune malvoyant est de
parvenir à comprendre et tenir compte de ce qui est socialement admis à l'égard du toucher, sans
pour autant perdre ou rejeter cette modalité sensorielle dans son approche de l'autre. Il doit donc
parvenir à s'adapter non seulement aux attentes de l'autre désiré mais aussi ce à qui est
socialement toléré. Il n’y a pas de professionnel spécifique qui peut répondre à ces questions.
Mais, chaque intervenant doit être à l’écoute des appréhensions des adolescents, pour le rassurer,
et l’orienter vers un psychologue quand les angoisses sont importantes.
Les professionnels de santé répondent au maximum aux besoins du jeune pour que celui-ci soit le
plus autonome possible. L’instructeur en locomotion lui enseignera de pouvoir se déplacer sans
danger, l’ergothérapeute qui peut avoir une formation AVJiste lui apprendra à organiser son
quotidien et mettre en place des techniques et des aides techniques pour compenser ses déficits. Il
pourra donc être suivi par un psychologue pour l’aider à surmonter ses angoisses, et autres
professionnels de santé ainsi que par des éducateurs spécialisés pour le quotidien.
3.4 Indépendance ou Autonomie ?
Souvent ces deux termes sont employés comme s’ils étaient des synonymes. Pourtant, ils
n’ont pas le même sens. Francine Ferland s’est appuyée sur les définitions du Petit Robert de
1996 pour caractériser le fait d’être indépendant comme « celui qui ne dépend ni d’une personne
ni d’une chose », et précise qu’être autonome correspond à « autogérer sa vie, déterminer
librement les règles de son action et s’opposer à l’hétéronomie qui caractérise l’individu qui
puise hors de sa volonté le principe de son action. L’autonomie peut donc être acquise tout en
16
ayant recours à une aide extérieure. Autrement dit, bien que personne ne puisse être totalement
indépendant, nous pouvons aspirer à une autonomie donnée, y compris l’enfant avec une
déficience. »14. D’après Francine Ferland, une personne peut être autonome si elle est capable
dans une situation où elle est dépendante vis-à-vis de quelque chose de demander une aide
extérieure pour accomplir une action. Par exemple, si une personne non voyante a besoin d’aide
pour traverser une route, si elle est capable de demander l’aide d’une tierce personne au moment
où elle veut traverser, elle est dépendante de cette tierce personne pour la traversée, mais
autonome dans sa démarche car elle aura su mettre en œuvre le moyen de compenser sa
dépendance. L’accompagnement d’un adolescent a pour but qu’il devienne indépendant au
maximum, mais aussi mettre en place des aides techniques et des méthodes de compensation dont
il sera dépendant mais qui lui permettront d’être autonome.
4 L’ergothérapie
4.1 Présentation de l’ergothérapie
L’ergothérapeute est un professionnel de santé qui intervient sur prescription médicale.
Son travail consiste à rééduquer et réadapter des personnes handicapées pour qu’elles soient le
plus autonome possible. Pour cela l’ergothérapeute exploitera au maximum les capacités
physiques et intellectuelles de ces personnes pour diminuer les troubles liés à la pathologie.
L’ergothérapie tient compte des besoins de la personne, ainsi que de ses habitudes de vie
(déplacement, communication, travail, loisirs…) dans son environnement.
Pour atteindre cet objectif principal qu’est l’acquisition d’autonomie, l’ergothérapeute va utiliser
l’activité comme outil thérapeutique. Il visera toujours à utiliser une activité significative pour la
personne, pour permettre une rééducation plus efficace avec une participation active du patient.
14
FERLAND Francine. Le Modèle Ludique, Le jeu, l’enfant avec déficience physique et l’ergothérapie. Edition Les
presses de l’université de Montréal, 1998. p.55.
17
4.2 L’ergothérapie dans le domaine de la déficience visuelle
D’après C. Chambert et J.P. Boissin : « La rééducation est fondée sur la conviction que la
personne aveugle peut retrouver une vie normale et la joie de vivre, non en s’appuyant sur la
pitié ou l’aide d’autrui, mais sur une pleine réalisation d’elle-même Il ne saurait être question de
minimiser l’importance du handicap que constitue la cécité. Mais il faut aider l’aveugle à
l’analyser objectivement et à l’accepter. Il importe aussi de lui permettre de le dominer, en
restaurant, autant qu’il est possible, les facultés perdues, par le développement des autres
moyens sensoriels de perception ou en palliant, dans toute la mesure du possible, par des
techniques appropriées, les facultés qui peuvent être restaurées. »15. Cette citation définit
clairement le rôle de chaque intervenant auprès de personnes déficientes visuelles. D’après cet
extrait, l’ergothérapeute est un acteur et un rééducateur important auprès de ce public. En effet, à
partir des capacités de la personne, il mettra en place des techniques compensatrices pour que
celle-ci puisse agir au maximum dans son environnement de manière autonome.
4.2.1 La REEDUCATION
4.2.1.1 Le toucher
4.2.1.1.1 Les différents façons de toucher
Le toucher est le sens principal qui va permettre à une personne déficiente visuelle de
compenser son handicap ; il permet de « toucher pour voir ». Il existe deux alternatives dans ce
mode de compensation :
-
Toucher c'est-à-dire prendre contact de manière directe, inconsciente et involontaire. Il
résulte de la stimulation des récepteurs de la sensibilité superficielle (thermique, algique et
mécanique).
-
Palper c’est reconnaître avec les mains au travers du canal tactile. Il s’agit d’un acte
conscient et volontaire. Il est la conséquence de stratégies organisées et d’un traitement
intellectuel de l’information recueillie.
15 CHAMBERT C., BOISSIN J.-P.. La rééducation des aveugles récents. La revue du praticien, n°32.
16 LIONNET A.-H., GUILLOTEAU N., TOURNIER Y.. Le toucher, un sens à développer. Ergothérapies. La main.
Septembre 2003, n°11.
18
La distinction entre ces deux notions est importante, mais nous parlerons plus généralement pour
la suite du sens toucher en englobant ces deux significations.16
L’apprentissage du toucher est primordial dès l’enfance et tout au long de la prise en charge
même chez l’adolescent. En effet, le toucher permet d’entrer en contact avec l’environnement, et
pouvoir l’identifier mais aussi d’explorer, de reconnaître, de reposer sa vision résiduelle, de
gagner du temps en combinant vision et toucher, d’apprendre le braille…
Le toucher est un sens complexe avec un champ perceptif réduit ; en effet, il nous renvoie une
information fragmentée d’un objet qui nécessite une reconstruction mentale en parallèle du
toucher. Le temps nécessaire pour trouver une information est donc plus important qu’avec la
vue, et demande une organisation gestuelle pour ne pas explorer plusieurs fois le même endroit.
L’image mentale obtenue peut être déformée ou partielle si la méthode d’exploration n’a pas été
efficace.
Le toucher fait appel à différentes capacités sensitives :
-
Sensibilité superficielle : sensibilité thermique, algique, des matières (hylognosie),
des reliefs…
- Sensibilité profonde : kinesthésie (conscience du mouvement d’un segment de
membre dans l’espace), stathestésie (conscience de la position du segment de membre dans
l’espace), baresthésie (sens des poids très utilisé dans les activités de la vie quotidienne cf. 4.2.4),
pallesthésie (sens des vibrations). La kinesthésie et la stathestésie ont un rôle important dans la
compensation chez les personnes déficientes visuelles. En effet, elles permettent malgré l’absence
de contrôle visuel de situer la position des différents segments corporels. Chez une personne
voyante, la kinesthésie et stathestésie sont intégrées dans les automatismes inconscients du fait de
la suprématie visuelle ; il se fie à sa mémoire visuelle et à sa vigilance.
Pour une personne déficiente visuelle et notamment pour une personne non voyante congénitale,
l’efficacité de comportements sensori-moteurs dépend de deux paramètres : d’une part, la
conscience et la possession d’une image corporelle claire : de bonnes connaissances
morphologique, physiologique et anatomique. Ces informations sont en lien direct avec la
direction des mouvements, leur amplitude, leur vitesse, l’effort musculaire requis et les
contraintes imposées par l’action. D’autre part, une capacité automatique à s’adapter avec
16
A.-H. LIONNET, N. GUILLOTEAU, Y. TOURNIER. Le toucher, un sens à développer. Ergothérapies. La main.
Septembre 2003, n°11.
19
précision à chaque situation d’un point de vue neuromoteur. Cet automatisme de la kinesthésie
permet de libérer l’esprit pour lui permettre de réaliser d’autres opérations.
4.2.1.1.2 L’apprentissage de la compensation par le toucher
L’apprentissage de la compensation par le toucher se fait aussi par le fait de développer
les aptitudes gestuelles de la personne déficiente visuelle :
- La préhension : préhension globale pour malaxer une pâte, ou faire un shampoing
dans sa fonctionnalité ; la préhension fine permettra de pouvoir faire des activités avec des gestes
fins (se maquiller par exemple)
- La coordination bimanuelle sera importante dans de nombreuses activités de la vie
quotidienne comme manger, s’habiller, se brosser les dents, se servir à boire…, mais aussi pour
une lecture fluide du braille
-
La dissociation des doigts et des mains et dissociation de main interne-main
externe pour pouvoir faire un numéro de téléphone, frapper sur un clavier…
-
La dextérité
- La coordination oculo-manuelle permettra d’être plus efficace lors de la réalisation
d’une action.
- La prono supination et rotation du poignet ouvrir un bocal, mélanger une crème…
- L’habileté pour permettre en premier lieu chez une personne non voyante de lire le
braille. En effet, le nombre de points et leur disposition sont déterminés grâce au toucher léger et
à la perception tactile. Les index interviennent en priorité mais les autres doigts servent
d’indicateurs, cherchent la ligne suivante, orientent le mouvement et explorent la feuille : c’est la
dissociation des doigts.
L’écriture à la Perkins nécessite force, dissociation des doigts et coordination des mains…
L’ergothérapeute joue donc un rôle important dans l’acquisition et le développement du toucher,
car s’il est amené à réadapter en aidant l’adolescent à trouver des compensations dans le domaine
des AVQ, c’est aussi un rééducateur qui cherche à ce que le patient acquiert de nouvelles
compétences. 17
17
A.-H. LIONNET, N. GUILLOTEAU, Y. TOURNIER. Le toucher, un sens à développer. Ergothérapies. La main.
Septembre 2003, n°11.
20
4.2.1.2 L’apprentissage de la compensation par les autres sens
Certaines personnes malvoyantes utilisent peu le toucher pour utiliser plus la vision: la
rééducation leur permettra de prendre conscience de leurs capacités tactiles pour qu’elles soient
employées de façon plus efficace. En effet, le restant visuel doit être utilisé dans les activités de
vie quotidienne sans que son emploi devienne préjudiciable aux autres afférences sensorielles car
renvoyant une image brouillée ou incomplète.
Les autres sens sont aussi importants et doivent être développé au maximum pour compenser la
perte ou la diminution de la vue :
L’ouïe est à développer pour analyser d’où vient le bruit et orienter la tête, diriger son geste,
reconnaître les sons du quotidien, savoir dans quelle pièce on se trouve…
L’odorat permet de reconnaître les produits qui nous entourent, par exemple pour la cuisine, ou
les produits ménagers.
Le goût pour connaître les différentes saveurs possibles d’un aliment.
4.2.1.3 La rééducation cognitive
La rééducation d’une personne déficiente visuelle comporte aussi un versant cognitif :
-
La représentation mentale pour pouvoir appréhender les objets, les symboles qui
nous entourent en les mettant en relation avec leur vocabulaire. En effet, une image mentale va se
construire à travers les différentes modalités sensorielles explorées dont la personne devra
assembler les informations pour aboutir une perception globale. Chez une personne qui a une
déficience visuelle acquise, la conservation des expériences vécues permet une construction plus
aisée d’une image mentale et une utilisation des acquis dans le quotidien.
-
La représentation spatiale correspond « à l’acquisition intellectuelle fondée sur le
vécu sensori-moteur qui permet de connaître et maîtriser les déterminants de l’espace et les
relations de son corps avec eux »18. Elle permet d’acquérir les notions spatiales (droite, gauche,
devant, derrière, dessus, dessous…) pour pouvoir s’orienter dans l’espace. Cet élément est
largement développé et travaillé avec l’instructeur en locomotion qui prend en charge la personne
déficiente visuelle pour lui apprendre à se déplacer en toute sécurité.
-
La méthode et l’organisation du geste pour apprendre à découvrir d’abord
globalement puis plus en détails, permettre la prise de repère d’une main et l’action avec l’autre.
18
RAYNARD Francis (mai 2003), Un autre regard, La réadaptation des déficients visuels, édition Solal, p. 72
21
-
L’organisation en générale est très importante pour une personne aveugle. En
effet, c’est la solution pour qu’elle puisse se retrouver, retrouver ses affaires : l’ergothérapeute est
là pour aider l’adolescent à apprendre à s’organiser pour que par exemple il puisse retrouver seul
ses habits dans l’armoire et donc les choisir seul; ceci marque une avancée sur le chemin vers
l’autonomie.
- La mémoire qui est nécessaire pour la reconstruction mentale d’un objet suite à sa
découverte tactile pour pouvoir s’en faire une représentation mentale. La mémoire gestuelle est
souvent sollicitée pour retrouver un objet posé quelques minutes avant.
- L’attention, la concentration pour ne pas oublier une étape, un détail qui
empêcherait de finir l’action.
4.2.2 La READAPTATION
4.2.2.1 L’aménagement du domicile19
L’ergothérapeute peut aussi guider l’entourage de la personne déficiente visuelle
notamment en donnant des conseils pour l’aménagement du domicile et des équipements
nécessaires.
Principes généraux :
 Favoriser les commandes électriques (volets, hi-fi...).
 Prévoir en priorité des détecteurs de lumière.
 La commande des éclairages est située à proximité de la porte. Les interrupteurs doivent
être contrasté, et munis d’un voyant lumineux pour être visible la nuit.
 Favoriser les contrastes pour les déficients visuels (entre murs et plinthes, tapis et sols,
nez de marche...).
 Favoriser les fenêtres et portes coulissantes, en évitant les fenêtres basculantes et oscillobattantes qui peuvent être dangereuses.
Plus précisément :
-
Cuisine :
 Faciliter les déplacements dans l’espace en favorisant l’accès aux rangements.
 Prévoir un vaste plan de travail aux couleurs contrastées par rapport aux ustensiles.
19
Ville d’Angers. Les principes d'adaptation d'un logement. [en ligne]. Disponible sur Internet :
http://www.angers.fr/vie-pratique/social-sante/les-personnes-en-situation-de-handicap/repertoire-desservices/logement/index.html (Consulté le 15 janvier 2012).
22
 Prévoir des mains courantes à certains endroits stratégiques.
 Préférer les plaques électriques ou à induction plutôt que le gaz qui peut être dangereux ;
la surface de chauffe est plus facilement repérable avec des plaques électriques.
 Placer sur tous les équipements (four, balance, micro-ondes...) des repères tactiles, ou
utiliser des appareils munis de synthèse vocale, des appareils avec des commandes
manuelles de grande taille (téléphone) et aux couleurs contrastées pour les malvoyants.
 Pour les malvoyants, prévoir une lumière suffisante pour éviter les zones d’ombre ;
l’halogène permet de régler l’intensité lumineuse selon les besoins.
-
Salle de bains :
 Eviter les revêtements de sol glissants.
 Eviter toute proximité entre eau et électricité.
 Equiper les appareils de braille ou d’une synthèse vocale (pèse personne, thermomètre de
bain...).
 Pour les personnes malvoyantes, prévoir un éclairage complémentaire permettant une
activité de proximité, tout en évitant les éclairages directs qui éblouissent ; il existe
également des miroirs grossissants.
-
Chambre :
 S’équiper d’un réveil vocal
4.2.2.2 L’aide au choix de matériels adaptés
L’ergothérapeute peut conseiller sur le matériel quotidien : montre parlante ou en braille
pour les non voyants, à caractères grossis pour les malvoyants, balance parlante, conseil de
l’acquisition d’un modèle de téléphone portable selon les capacités, mise en place de l’option
téléphone parlant et apprentissage du téléphone portable pour avoir accès à l’information comme
le plus grand nombre d’adolescent aujourd’hui.
Parallèlement, il peut aussi aider pour le choix d’outil scolaires adaptés : règle avec poignée,
accès à l’ordinateur (clavier contrasté ou avec caractères grossis, plage braille, système de lecture
d’écran avec synthétiseur vocal qui récupère l’information texte
transmise par le système
d’exploitation et la restitue vocalement à l’utilisateur au moyen des haut-parleurs ou d’écouteurs
connectés. Il peut à la fois prononcer vocalement à la fois le texte frappé au clavier et le contenu
de l’écran par caractère, par mot, par ligne, par phrase ou dans sa totalité…)
23
L’ergothérapeute est là pour informer les professionnels scolaires et les parents de l’évolution de
la prise en charge et des nouvelles acquisitions Il est également là pour écouter les difficultés
rencontrées par les parents et leur en expliquer la cause.
4.2.2.3 Dans les AVQ
L’ergothérapeute intervient plus précisément dans les Activités de Vie Quotidienne qui
comprennent la toilette, l’habillage et la prise de repas. Ces activités deviennent compliquées
quand il y a un handicap notamment une déficience visuelle, et l’ergothérapeute devra trouver
avec le patient des moyens de compenser cette déficience pour que celui-ci puisse automatiser
ces activités par des techniques spécifiques qu’il faudra adapter aux capacités de la personne.
En effet, une personne aveugle congénitale peut avoir des problèmes de représentation visuospatiale qui peuvent se traduire par exemple par des difficultés à orienter correctement un habit
pour l’enfiler. Dans ce cas, l’ergothérapeute devra trouver pour cette personne des repères qui
s’appuient sur ses compétences en occultant les repères spatiaux (haut, bas, droite, gauche,
milieu…). Exemple : pour enfiler une culotte, la patiente apprendra qu’il faut qu’elle trouve le
nœud central avec les deux pouces, et qu’elle suive le bord de la culotte entre le pouce et l’index
pour trouver les extrémités de chaque côté et pouvoir enfiler les jambes. Il aurait été plus aisé de
lui apprendre à avoir le nœud devant, les trous pour les jambes vers le bas et d’enfiler le
vêtement, mais lorsque ces repères de devant, derrière, haut, bas ne sont pas assimilés, il faut
trouver d’autres repères tactiles.
Pour le repas, la kinesthésie c'est-à-dire la conscience du mouvement d’un segment de membre
dans l’espace est essentielle. En effet, elle permet l’adaptation du geste exécuté au mouvement
désiré ; par exemple, la conscience de la position du membre supérieur permet un ajustement de
la trajectoire pour porter la fourchette à la bouche en un geste harmonieux. Le sens baresthésique
permet d’évaluer le poids des objets : ce sens est très utile pour évaluer la quantité des aliments
présents dans la fourchette, pour le remplissage d’un verre…
Parallèlement, la prise de repères au niveau de l’assiette pour arriver à ramasser, à rassembler, à
couper, mais aussi à se servir à boire, à tartiner…demande un apprentissage important et plus ou
moins long selon les capacités de la personne. Cet apprentissage commence dès l’enfance, et peut
se poursuivre même au moment de l’adolescence. Il débute par l’exploration tactile de chaque
objet mis en jeu dans le repas (couverts, verre, assiette…) pour que l’enfant intègre une
représentation mentale de ces objets. Le fait de manger avec des couverts est un toucher indirect,
un toucher instrumental. En effet, il n’y a pas de contact direct entre la main et son
24
environnement, mais le contact se fait par un objet médiateur. Or pour accéder à ce toucher, il est
important que la personne déficiente visuelle soit parfaitement à l’aise avec le toucher direct, le
fait de toucher directement la matière avec les doigts.
5 L’ergothérapeute et l’AVJiste
Le terme « AVJ » pour aide de vie journalière est spécifique à la déficience visuelle.
Son rôle est d’aider les personnes déficientes visuelles à développer les compétences pratiques
dans tous les actes de la vie quotidienne, en tenant compte de leurs besoins, leurs attentes et
désirs, et ainsi les aider à (re)trouver leur autonomie.
La formation d’AVJiste est une formation complémentaire, une spécialisation dans le domaine de
la déficience visuelle suite à un diplôme médico-social (ergothérapeute, infirmier,
psychomotricien, éducateur spécialisé…). Elle permet d’apprendre ou d’approfondir ses
connaissances sur tout ce qui concerne l’autonomie au quotidien des déficients visuels. Les
techniques et méthodes diverses sont vécues et testées en situation de mal voyance par les
étudiants en formation. Ceux-ci réalisent un stage et présentent un mémoire à la fin. Les AVJistes
sont spécifiquement formés à l’autonomie en déficience visuelle. 20
Aujourd’hui, deux formations d’AVJiste existent : une première nommée TACS (Technicien en
Accessibilité et en Compensation Sensorielle). Elle dure 24 semaines. C’est une formation
complète et polyvalente sur les trois spécialisations du domaine de la déficience visuelle : AVJ,
instructeur en locomotion et basse vision. Parallèlement, cette année va débuter une formation
rattachée à l’université Paris V avec un tronc commun à ces trois formations, puis une orientation
selon la spécialisation choisie.21
Les ergothérapeutes sont formés à l’autonomie concernant tous les types de handicaps. Ils se
perfectionnent et se spécialisent ensuite selon leur lieu d’exercice.
L’AVJ fait ainsi partie intégrante de l’ergothérapie : tout ergothérapeute peut être un AVJiste s’il
approfondit ses connaissances « de base » sur la déficience visuelle.
20
Association Nationale pour la Formation permanente du personnel Hospitalier (ANFH). Avéjiste. [en ligne].
Disponible sur Internet : http://www.anfh.fr/site/guide-desmetiers/fiche/metier/pdf/1176/Avejiste__Aide_a_l%27activite_de_Vie_Journaliere_ (Consulté le 04 février 2012)
21
Cf Voir entretien avec l’ergothérapeute AVJiste1 pour plus d’informations.
25
DEUXIEME PARTIE : Analyse et vérification des
hypothèses
1 Choix de la méthode
J’ai choisi de mener des entretiens plutôt que de faire une enquête à l’aide de questionnaires.
En effet, dans le domaine de la déficience visuelle, il n’y aurait pas eu assez d’ergothérapeute
pour obtenir un résultat significatif et exploitable, j’ai donc préféré travailler sur le qualitatif
plutôt que sur le quantitatif.
1.1 Population interrogée
J’ai interrogé cinq professionnels différents : deux ergothérapeutes AVJistes, une
ergothérapeute, un éducateur spécialisé et une AVJiste éducatrice spécialisé.
Durant mon stage auprès du public déficient visuel, j’ai remarqué le rôle prépondérant et
l’important travail interprofessionnel entre les ergothérapeutes et les éducateurs spécialisés
comme l’a confirmé ces entretiens. C’est pourquoi j’ai trouvé intéressant d’en interroger un pour
avoir son point de vue.
Ensuite, j’ai choisi de rencontrer deux ergothérapeutes AVJistes car la plupart des ergothérapeutes
travaillant dans ce domaine ont effectué la formation d’AVJ. Mais, j’ai souhaité cibler le travail et
le rôle d’un ergothérapeute non AVJiste au sein de ces structures pour déficients visuels. J’ai donc
interrogé une ergothérapeute qui ne travaillait qu’à mi-temps sur ce centre.
Enfin, j’ai aussi voulu rencontrer une AVJiste non ergothérapeute pour évaluer et rendre compte
des différences s’il y en entre son travail et celui d’une AVJiste ergothérapeute.
L’éducateur spécialisé travaille auprès de public déficient visuel depuis 2008. Il prend en
charge principalement des préadolescents entre 8 et 13 ans. Ces enfants sont répartis en deux
classes de 7 enfants dont les classes sont annexées au sein de l’école sur un service d’inclusion
26
scolaire collective. Ces classes sont intégrées dans une école ordinaire. Son rôle auprès de ce
public est principalement sur trois temps :
-
Temps d’internat : le lever
-
Le midi sur l’école, temps de CLAE et de repas
-
La soirée à l’internat
Pour les enfants scolarisés, l’éducateur spécialisé intervient vraiment dans l’autonomie de vie
journalière en partenariat avec d’autres professionnels car les enfants sont hébergés sur l’internat.
Il y a très peu de temps de jeu organisés avec les éducateurs spécialisés, seulement le mardi
matin.
L’ergothérapeute non AVJiste a travaillé un an et demi dans un Service d’Aide à
l’Acquisition de l’Autonomie et à l’Intégration Scolaire après l’obtention de son diplôme en
2006, et elle travaille depuis un an et demi à mi temps dans ce centre. Elle s’occupe
principalement de déficients auditifs, quelques déficients visuels avec troubles associés de moins
de 12 ans. Surtout des jeunes de 4- 5ans.
L’ergothérapeute AVJiste 1 exerce depuis 2004 auprès d’un public de déficients visuels.
Elle a obtenu son diplôme d’état d’ergothérapeute en 2002, et a suivi la formation d’AVJ en 2006.
Aujourd’hui, elle prend en charge une population de 6 à 59 ans, avec un public de 6 à 20 ans
principalement avec un handicap associé, et de 20 à 59 ans sans handicap associé important.
Ses prises en charge comprennent environ 90% de non voyant, 10% de malvoyant. Les enfants
sont surtout des non voyants congénitaux car, étant la seule ergothérapeute du centre, elle reçoit
en rééducation ceux qui ont le plus de mal à se gérer au quotidien.
Dans ses suivis, il y a 2/3 de déficients visuels congénitaux et 1/3 d’acquis.
L’ergothérapeute AVJiste 2 diplômé ergothérapeute depuis 1996 et formée AVJ depuis
2000, travaille avec un public déficient visuel depuis 1998. Elle travaille à mi-temps sur ce centre
pour déficients visuels où elle prend en charge essentiellement des jeunes de 7 à 18 ans avec
handicaps moteurs surtout ou cognitifs associés. Parallèlement, elle travaille à mi-temps dans un
centre spécialisé d’enseignement secondaire (CSES) où elle suit des adolescents de la 4 ème à la
2nde avec une déficience visuelle sans troubles associés.
L’AVJiste non ergothérapeute diplômée éducatrice spécialisée depuis 2002 a suivi la
spécialisation d’AVJ en 2006. Elle exerce depuis 2002 auprès de déficients visuels. Elle prend en
charge des enfants et adultes avec ou sans handicap associé. Ils peuvent être mal voyants ou non
27
voyants. Le trouble associé principal est une maladie mentale dont particulièrement les
psychoses.
Durant mon stage auprès des déficients visuels, j’ai pu constater que les éducateurs spécialisés
étaient des professionnels avec qui l’ergothérapeute collaborait régulièrement. Les entretiens ont
d’ailleurs mis en avant cette collaboration. (cf : se reporter au chapitre 7.2.1 relatif à la
transposition des acquis).
1.2 Elaboration du questionnaire
J’ai élaboré mon questionnaire en lien avec ma partie théorique. Celui-ci est constitué de
questions fermées pour mieux connaître les personnes interrogées, leurs expériences auprès de ce
public ainsi que précisément le public qu’elles prennent en charge. Le corps de mon entretien se
base sur des questions semi-directives. Ce mode de recueil a permis d’avoir des questions
relativement précises tout en gardant un espace à l’interlocuteur pour s’exprimer et donner son
avis.
J’ai réalisé quatre questionnaires/entretiens différents (un pour chaque profession), à partir d’un
guide d’entretien commun pour pouvoir entrecroiser les résultats.
1.3 Passation du questionnaire
Je suis allée sur les lieux de travail de ces différents professionnels. Je me suis ainsi
intéressée à deux structures : un Institut d’Education Sensorielle (IES) avec un Service d'Aide
aux Adultes Handicapés Visuels (Saahv) (ergothérapeute AVJiste 2, ergothérapeute non AVjiste,
éducateur spécialisé, AVjiste non ergothérapeute), et un Centre d'éducation spécialisée pour
déficients visuels (CESDV) (ergothérapeute AVJiste 1).
J'ai privilégié le fait de rencontrer des personnes de professions différentes car j’ai pensé qu’il
serait intéressant d’obtenir différents points de vue selon les professionnels travaillant en étroite
collaboration avec l’ergothérapeute.
J’ai pu faire mes entretiens dans des lieux calmes seul à seul avec le professionnel interrogé.
28
1.4 Les limites du questionnaire
Au moment de l’analyse des réponses obtenues, j’ai pu me rendre compte que certaines
réponses n’étaient pas assez précises. Une demande d’éclaircissement auprès des professionnels
aurait été bénéfique. J’ai aussi réajusté la première question après un premier entretien car j’ai vu
que cette question n’était pas comprise au sens que je voulais lui donner. J’ai développé ce point
à l’analyse de la question 1.
Pour les professionnels autres qu’ergothérapeute, je pense que je me suis trop centrée dans
les questionnaires sur le travail interprofessionnel avec l’ergothérapeute, et pas assez sur la façon
dont eux prennent en charge les adolescents. De plus j’aurai voulu rencontrer une ergothérapeute
ayant un temps de travail plus important auprès des déficients visuels et auprès d’adolescents
déficients visuels pour que ce soit vraiment significatif de l’exercice de l’ergothérapie auprès de
ce public.
1.5 Méthode pour l’analyse des données
Pour l’analyse de mes différents entretiens, j’ai choisi de reprendre question par question
pour mettre en avant les idées principales de chacune, et faire ensuite un résumé des réponses
apportées en entrecroisant et confrontant les différents points de vue.
2 Résultat et analyse des données
2.1 Les modalités de la prise en charge des adolescents en ergothérapie
2.1.1 L’importance de la prise en charge en ergothérapie à l’adolescence
Ce premier point a été abordé de deux façons. En effet, après mon premier entretien, j’ai
vu la nécessité de préciser qu’à travers cette question je voulais tenir compte de l’importance
d’une prise en charge précoce.
L’adolescence est-elle une période où la prise en charge en ergothérapie vous semble
indispensable ou très nécessaire ? Pourquoi ?
L’ergothérapeute AVJiste 1 répond que non car « à chaque étape il y a un travail d’autonomie
spécifique et indispensable, et si celui de l’enfance ou de la petite enfance n’est pas fait, on
29
arrive à l’adolescence et on n’aura pas les prés requis d’avant ». C’est pour cela que j’ai trouvé
utile de reformuler cette question en parlant d’un renforcement de la prise en charge en
ergothérapie pour être bien comprise.
L’ergothérapeute AVJiste 2, elle estime que c’est très nécessaire au vu du besoin important
d’autonomie qui émerge. « Avant ils sont plus petits donc ils subissent un peu plus, il n’y a pas
vraiment de demande de leur part, il faut qu’ils en fassent donc ils en font et après
à
l’adolescence ils peuvent être demandeurs de faire des choses au niveau cuisine, maquillage, et
une jeune que je suis qui veut notamment prouver à sa mère qu’elle est capable de faire de la
cuisine toute seule. Et après de part l’âge, il y a des choses que les enfants n’ont pas à gérer et
que eux doivent gérer ou commencer à apprendre à gérer comme par exemple l’argent de poche,
le budget, savoir gérer l’argent que tu as, un petit compte en banque et puis après comme on ne
les prend plus, il faut qu’on les amène aussi à savoir le faire. ».
Bien que la prise en charge doive être la plus précoce possible, l’adolescence est-elle une période
où la prise en charge en ergothérapie vous semble indispensable, serait-il nécessaire de la
renforcer à cette période?
AVJiste éducatrice
spécialisé
AVJiste
AVJiste
Ergothérapeute
ergothérapeute 1 ergothérapeute 2
Educateur
Spécialisé
Dépend de
Sans troubles
associés non
Au cas par cas
Il y a des
périodes où les
prises en charge
en rééducation
doivent être plus
ou moins
intenses
chaque enfant.
Selon elle, les
demandes
Selon le projet
de vie du jeune
concernent plus
l’Avjiste que
l’ergothérapie.
Les besoins
varient selon les
antécédents et
les capacités de
l’enfant.
30
D’après les réponses obtenues, un renforcement de la prise en charge en ergothérapie au moment
de l’adolescence n’est pas nécessaire pour tous les jeunes mais cela dépend de chacun.
En effet, l’AVJiste éducatrice spécialisé précise que s’il n’y a pas de troubles associés, ce n’est
pas forcément utile. L’AVJiste ergothérapeute 1, au contraire lorsqu’il lui est demandé si elle voit
plus d’adolescent avec troubles associés, elle répond que non, car ceux-ci ont une adolescence
particulière qui passe souvent inaperçue. Elle précise que « Toutes les préoccupations d’un
adolescent classique les atteignent moins ; ça va bien avec leur parents, avec leur copains, tout
est beau dans leur monde, après ce n’est pas le cas pour tous. ». Selon elle, même les
changements corporels et la sexualité n’apparaissent pas pour certains mais pose questions pour
d’autres.
En parallèle, cette AVJiste nous précise qu’une prise en charge soutenue en ergothérapie à
l’adolescence n’est pas utile pour tous. Pour elle, cela dépend d’abord du projet de vie du jeune,
et de sa façon de vivre son adolescence : « il se passe beaucoup de choses et certains sont plus ou
moins disponibles à un moment donné pour apprendre leur gestes d’autonomie et celui qui est
trop préoccupé par ses problèmes familiaux, sa problématique scolaire j’ai finalement qu’un tout
petit créneau cognitif chez eux parce qu’il y a plein de choses qui les perturbent autour et eux il
faut que je les vois plus souvent que d’autres parce qu’ils intègrent moins vite. »
D’après ces propos, si une personne vit son adolescence de manière harmonieuse, la prise en
charge en ergothérapie ne sera pas forcément renforcée à ce moment car il aura les capacités
d’être disponible pour de nouveaux apprentissages de manière efficace.
L’AVJiste ergothérapeute 2, elle, énonce la nécessité pour certains enfants pris en charge de faire
des breaks dans la prise en charge à des moments où c’est possible pour éviter une « saturation
de la prise en charge » de la part du jeune. En effet, selon elle, il est important durant les
premières années de « faire ce qu’il faut sur les premières années concernant l’habillage, les
techniques d’indépendance à table » avec une prise en charge précoce, pour ensuite pouvoir faire
un break dans la rééducation et après « revoir un peu plus tard pour refaire un point sur des
choses avec en perspective tout ce qui est départ, installation pour les études, ils vont plus
forcément être chez leur parents et vont devoir se débrouiller tout seul ». Suite à cette idée, une
question lui a été ajoutée pour permettre de mieux comprendre comment et pour qui
concrètement ce serait réalisable. Elle a donc précisé que ce break serait possible auprès de non
voyants ou malvoyants acquis qui maîtrisaient déjà les techniques dans les AVJ. Dans ces cas là,
31
ces techniques seront mises en place plus rapidement que chez un aveugle congénital, il suffira
selon elle de leur donner des repères suffisants et d’adapter leur technique selon leur compétence.
Pour les déficients visuels congénitaux, l’apprentissage des AVJ sera beaucoup plus long. Ce qui
est important, c’est qu’ils arrivent au résultat voulu, même s’ils adaptent les techniques apprises
avec ce qu’ils vivent au quotidien et qu’ils n’appliquent pas ces techniques à la lettre. C’est à ce
moment selon elle qu’un break est possible. Parfois, ce moyen de fonctionner peut permettre de
« faire tourner les prises en charge », de prendre en charge d’autres enfants aux besoins plus
urgent.
Elle précise qu’à l’adolescence, la prise en charge dépendra aussi de la déficience du jeune innée
ou acquise, de ses capacités en fonction de l’âge où la déficience est apparue en cas de déficience
acquise, et surtout où le jeune en est dans sa période de deuil, s’il sera prêt à accepter notre aide
et les propositions techniques et d’aides techniques compensatoires. Mais il est souvent plus
facile pour un jeune d’apprendre des techniques compensatoires ou d’accepter d’avoir des aides
techniques à son domicile que lui seul sait qu’il possède, plutôt que d’accepter de se déplacer
avec une canne par exemple qui peut être perçue comme plus stigmatisant.
Pour l’ergothérapeute, ce renforcement à l’adolescence n’est pas nécessaire pour tous mais cela
dépend de chaque enfant. Cette prise en charge à l’adolescence sera selon elle plus ou moins
importante selon la qualité de la prise en charge durant l’enfance. De plus, elle rajoute que « Les
besoins varient selon les antécédents et les capacités de l’enfant. Les demandes à l’adolescence
concernent plus l’Avjiste que l’ergothérapie. ».
Le point de vue de l’éducateur vient renforcer et confirmer les propos des autres professionnels.
Tout d’abord, il appuie l’importance d’une prise en charge précoce : « Ces choses là s’apprennent
le plus tôt possible sera le mieux, ça rentre plus facilement quand on est jeune j’ai l’impression ».
Ensuite, il précise que la prise en charge en ergothérapie est importante et peut être renforcée à
l’adolescence selon le projet du jeune ; il appuie le rôle de l’ergothérapeute sur un versant plus
réadaptatif avec comme exemple la mise en place de l’informatique en ergothérapie chez un
adolescent ou encore l’adaptation d’une assise pour la classe. Il formule ne pas trop savoir ce qui
est travaillé en ergothérapie précisément avec les jeunes si le lien n’est pas fait.
Les professionnels sont donc tous en accord pour répondre qu’une prise en charge en
ergothérapie à l’adolescence dépendra du projet de vie ainsi que des capacités et difficultés de
chaque enfant. Par contre, pour certains, cette prise en charge sera d’autant plus nécessaire quand
32
il y a un handicap associé à la cécité, alors que pour d’autres au contraire, le fait d’avoir un
handicap associé peut parfois les empêcher d’accéder à une adolescence normale où de nouveaux
besoins n’émergeraient pas et ne nécessiterait donc pas forcément d’ergothérapie.
2.1.2 La forme des prises en charge : mise en situation dans l’environnement de
l’adolescent ou sous forme analytique en salle d’ergothérapie Pourquoi ? Comment ?
En général les prises en charge se font une fois par semaine et durent trois quart d’heure
ou une heure. Les professionnels interrogés sur ce point précisent que c’est à cause d’un manque
de moyen que les prises en charge ne sont pas plus régulières.
AVJiste ergothérapeute 1
AVJiste ergothérapeute 2
Ergothérapeute
Les deux : prés requis
Travail analytique ; quelques
mises en situation en
ergothérapie
travaillés en analytique en
salle puis quand ils sont
Travail analytique de
manière ludique
acquis, travail dans
l’environnement du jeune
Ici les explications diffèrent. En effet, d’une part l’ergothérapeute non AVjiste travaille en salle
d’ergothérapie de manière ludique pour renforcer « la manipulation, la dextérité par le jeu. ». Et
d’autre part, les ergothérapeutes AVJistes, elles, ont une partie de leurs prises en charges qui se
déroulent sous forme de mises en situation, et une partie sous forme analytique.
En effet, l’ergothérapeute AVJiste 2 énonce qu’elle travaille surtout avec des adolescents ayant
un handicap moteur, donc sa rééducation n’est pas axée uniquement sur le problème visuel mais
aussi beaucoup sur la déficience motrice. Ses prises en charge se font de façon plus analytique
avec un « travail fonctionnel classique de rééducation » du handicap moteur auquel s’ajoute un
important travail de sensibilité pour l’exploration, de stratégies de recherches. En parallèle, elle
peut être amenée à faire des mises en situation cuisine en cuisine thérapeutique et non pas dans
l’environnement du jeune.
D’après elle, l’AVJiste éducatrice spécialisée est présente sur l’internat et s’occupe de la douche,
de l’utilisation des toilettes, de l’habillage/déshabillage. Mais ces deux professionnelles ne
33
travaillent pas avec le même public22, les prises en charge à l’internat sont donc moins
nombreuses pour les déficients visuels avec handicap moteur qui sont principalement pris en
charge par l’ergothérapeute AVJiste 2. Elle signale donc parfois à l’AVJiste éducatrice spécialisé
des jeunes que cette dernière voit en indépendance à l’internat et transmet les points difficiles à
travailler. Ces jeunes là ont donc moins de prises en charge de manière écologique et plus en salle
d’ergothérapie.
L’ergothérapeute AVJiste 1, elle trouve important de prendre en charge les personnes de manière
analytique puis de mettre en situation dans l’environnement de l’enfant : « les prés requis sont
travaillés en salle. Une fois qu’ils sont acquis, on apprend le geste en milieu protégé dans ma
salle, quand ça marche bien dans ma salle on monte sur les étages dans le lieu de vie et on fait en
sorte de l’inclure dans le quotidien et quand ça marche là je fais en sorte de l’inclure dans le
milieu familial soit en me déplaçant, soit avec des liens avec la famille par téléphone par mail
selon la relation que j’ai avec la famille. ». Dans ce centre, elle est la seule ergothérapeute. Elle
s’occupe donc contrairement à l’ergothérapeute AVJiste 2 de la mise en place du geste du début
de son apprentissage jusqu’à ce qu’il devienne fonctionnel dans la vie et dans l’environnement du
jeune.
2.2 Le travail interprofessionnel
2.2.1 La transposition des acquis au quotidien
Educateur spécialisé
Ergothérapeute
Ergothérapeute
AVJiste 1
Ergothérapeute
AVJiste 2
Avec les éducateurs
« Quand il y a des choses
Lien avec les
Avec les éducateurs
qui sont acquises avec des
professionnels qui
spécialisés
enfants, l’ergothérapeute
gravitent autour de
nous fait le relai. »
l’enfant
spécialisés quand
l’acquisition est
difficile, ou en
comptant sur le
jeune lui-même
quand ça marche
bien.
Ce sujet a permis de mettre en avant le lien et le travail interprofessionnel des ergothérapeutes
avec les éducateurs spécialisés. En effet, ils sont au quotidien avec les jeunes et ont un rôle
22
Voir début de la partie 2 avec présentation des personnes interrogées
34
prépondérant dans la mise en place des acquis et leur automatisation dans l’environnement de
l’adolescent. Ce point a en effet était relevé par tous les professionnels interrogés.
Tout d’abord l’éducateur spécialisé lui-même explique que l’ergothérapeute vient faire le relai
auprès d’eux quand le jeune a acquis un nouveau geste, pour que ceux-ci veillent à le mettre en
place de manière régulière dans l’environnement du jeune. Mais, selon lui, cette façon de
travailler serait « dans l’idéal », et en réalité le manque de temps empêche cette coordination
interprofessionnelle qui se fait de manière informelle et parfois peu efficace.
L’ergothérapeute non AVjiste fait le lien avec les professionnels qui interviennent dans la prise
en charge autant avec les éducateurs spécialisés qu’avec les psychomotriciens ou les AVjistes.
Comme on l’a vu dans la question précédente, cette ergothérapeute ne travaille que de manière
analytique avec les enfants et les éducateurs interviennent surtout dans l’environnement des
jeunes. Il est donc normal que le travail interprofessionnel soit moins développé entre ces deux
thérapeutes par rapport aux AVjistes qui elles, participent aussi à la vie quotidienne de
l’adolescent.
Pour illustrer ces propos, l’ergothérapeute AVjiste 1 explique son fonctionnement et l’implication
des éducateurs spécialisés : comme vu précédemment, elle travaille les prés requis d’une nouvelle
activité dans son bureau avec l’adolescent puis elle le prend en charge dans son environnement
pour mettre en place le geste de manière pratique avec les nouveaux repères. Quand cette partie
marche bien, elle fait le lien avec les éducateurs spécialisés pour qu’ils puissent continuer à
transposer ce geste au quotidien et lui faire remonter l’information si la personne a des difficultés.
Quand le geste est complètement acquis et automatisé au quotidien et qu’il n’y a plus du tout
besoin de suppléance ou même d’une simple surveillance pour réajuster, l’éducateur spécialisé le
transmet à l’ergothérapeute AVjiste 1 qui elle, peut faire le lien avec la famille. Elle trouve
important qu’il n’y ait plus d’apprentissages à faire à ce moment là, car selon elle « ce n’est pas
le rôle des parents ».
L’ergothérapeute
AVJiste
2,
elle
procède
différemment.
Tout
d’abord,
le
travail
interprofessionnel avec les éducateurs spécialisés n’est pas systématique : en effet, quand
l’apprentissage ne pose pas de difficultés particulières au jeune, c’est le jeune lui-même qui met
le geste en place dans son environnement, sans supervision particulière. Si au contraire, la
technique apprise est compliquée pour l’adolescent, là le lien est fait avec les éducateurs pour
l’aider à la mettre en place au quotidien. Or, elle prend en charge des enfants à partir de 7 ans, ce
qui peut paraître jeune pour arriver seul à transposer une activité au quotidien sans aide
35
extérieure. Elle a pu préciser qu’elle ne faisait pas d’autonomie avec cet enfant mais du travail
informatique car c’est plus important pour lui. On ne sait pas à partir de quel âge selon elle un
jeune est en capacité de transposer une technique apprise en rééducation au quotidien seul. En
effet, le risque est qu’il se retrouve en difficultés, et que les professionnels autour ne puissent pas
l’aider.
Cette ergothérapeute met en avant les difficultés que peuvent poser ce travail interprofessionnel :
en effet, les éducateurs spécialisés ne sont pas formés au handicap et à l’apprentissage des
techniques compensatoires à la déficience visuelle comme un AVjiste de surcroît ergothérapeute.
Il peut arriver que les jeunes se retrouvent en porte à faux avec un éducateur qui lui dit de faire
autrement que lui a appris le rééducateur en séance. Dans ce cas là, le jeune ne saura plus qui
écouter et quoi mettre en place, et le risque est qu’il se retrouve en échec face à l’activité et que
cette situation altère la relation thérapeutique et la confiance établie au préalable avec le
rééducateur et/ou avec l’éducateur spécialisé. Selon elle, le manque de coordination entre les
professionnels pourrait être à l’origine de ce dysfonctionnement.
A côté du travail interprofessionnel, elle énonce l’importance de la famille pour transposer une
technique apprise au quotidien. Mais, pour cette professionnelle, par manque de temps, le lien
avec la famille n’est pas systématique. Elle compte sur le jeune pour mettre en place lui-même la
technique apprise dans son environnement.
Parfois, la famille n’est pas consciente des capacités de l’adolescent surtout quand il y a une
dimension de surprotection de la part des parents. Le fait qu’un professionnel de santé montre
aux parents ce que leur enfant peut faire, et qu’il leur rappelle qu’il est important qu’il le fasse,
peut aider l’enfant à devenir plus autonome et peut aider les parents à laisser faire leur enfant et à
voir grandir l’enfant. De plus, cela permettra aussi d’expliquer pourquoi il est important de faire
le geste de telle façon pour l’enfant pour donner une crédibilité à l’enfant. Enfin, la famille pourra
aider le jeune s’il se retrouve en difficultés face à cette activité car elle saura comment réajuster
pour l’aider.
D’autres fois, c’est un manque de temps qui empêche le jeune de faire et que quelqu’un de son
entourage fasse à sa place. Dans ce cas, il est tout aussi important de réfléchir avec la famille et
avec l’adolescent à une organisation différente qui permettra au jeune de faire par lui-même. Si
l’enfant apprend le geste en rééducation, le met en place au centre et une fois rentré chez lui il ne
le fait plus, celui-ci risque d’être oublié rapidement. Ce lien avec la famille est donc primordial si
36
on veut que le geste soit automatiser et transposer. Comme le dit l’ergothérapeute AVJiste 2, « La
famille a un rôle clé dans l’accompagnement vers l’autonomie du jeune. ».
2.2.2 L’ergothérapie s’inscrit dans un projet de collaboration interprofessionnel
Nous avons vu précédemment l’importance du travail entre les ergothérapeutes et les éducateurs
spécialisés pour permettre une transposition des acquis au quotidien.
L’éducateur spécialisé rappelle bien que l’ergothérapeute avec l’équipe pluridisciplinaire permet
à l’adolescent d’accéder à l’autonomie. Comme il le dit, « il y a pleins de gamins qui arrivent à
un certain degré d’autonomie quand ils sont en prise en charge individuelle et qui quand après
ils se retrouvent au sein d’un collectif avec des éducateurs, ils perdent leurs moyens.
L’ergothérapeute aide l’adolescent à être autonome mais dans la mesure où c’est repris par un
travail pluridisciplinaire important, parce qu’il y a pleins de choses qui se passe dans des salles
où quand on est face à l’ergo c’est tellement plus facile d’accéder à un certain niveau
d’autonomie et puis après il s’agit de le mettre en pratique dans la vie quotidienne ça c’est
toujours un peu plus délicat ». L’ergothérapie s’inscrit vraiment dans un travail interprofessionnel
pour que son exercice ait une portée significative et fonctionnelle chez l’adolescent.
Mais les ergothérapeutes dont l’ergothérapeute AVJiste 2 travaillent aussi avec d’autres
professionnels notamment rééducateurs les kinés, beaucoup avec les orthoptistes, mais aussi avec
les enseignants pour le positionnement en classe ou l’accès à l’informatique.
2.3 Le rôle de l’ergothérapeute et de l’AVJiste auprès des jeunes déficients visuels
2.3.1 La différence entre un ergothérapeute et un AVJiste
Ergothérapeute
AVJiste
Ergothérapeute
Ergothérapeute
AVJiste 1
AVJiste 2
« l’ergothérapeute fera un
Ergothérapeute :
AVjiste n’est pas un Ergothérapeute :
travail plus analytique pour
apprentissage des
métier, c’est une
motricité fine,
la mise en place des prés
prés requis
spécialisation d’un
dextérité, sensibilité
requis, et l’AVJiste sera
nécessaire au geste.
diplôme de base
plus sur un travail
AVJiste :
AVJ : quotidien
37
concret. »
apprentissage du
geste
.
Globalement, les rôles de chacun sont bien distincts : on repère d’un côté l’ergothérapeute sans
formation d’AVJ qui a pour mission la mise en place des prés requis nécessaires au geste. Ceuxci concernent la motricité, la sensibilité, la dextérité… Quand ces prés requis sont acquis,
l’AVJiste peut prendre le relai pour travailler le geste qui correspond souvent à une association
des différents prés requis. Ce système est possible dans les structures où des ergothérapeutes et
des AVJistes travaillent. Mais, comme le fait remarquer l’ergothérapeute AVJiste 1, l’AVJ est
une spécialisation et non une profession. En effet, aujourd’hui, aucun diplôme d’AVJiste
n’existe. On ne peut donc pas parler d’ergothérapeute et d’AVJiste. Ce qui est important dans
cette question est de voir le rôle d’un ergothérapeute non AVJiste. En effet, son travail est
différent auprès de ce public, car il est surtout rééducatif. Le versant réadaptatif très spécifique
chez les déficients visuels est exclusivement mené par les professionnels ayant reçu la formation
d’AVJ. Je n’ai pas rencontré de centre avec que des ergothérapeutes non AVJiste. Leur rôle
diffère peut-être par rapport aux réponses obtenues, car il est possible qu’ils effectuent aussi la
réadaptation auprès des jeunes.
Mais l’ergothérapeute AVJiste 2 précise bien que ce travail interprofessionnel est un échange qui
se fait dans les deux sens : « si l’AVJiste non ergothérapeute voit si il y a un dysfonctionnement
de dissociation ou quelque chose comme ça pour faire les lacets par exemple, elle peut solliciter
pour qu’un bilan soit fait en ergo pour voir ce qui se passe et ce qu’on peut mettre en place
comme adaptations et comment elle elle peut adapter sa façon de faire avec ces difficultés là. »
2.3.2 L’importance de cette spécialisation pour travailler auprès de déficients visuels
Ergothérapeute
Ergothérapeute AVJiste 1
Ergothérapeute AVJiste 2
« pour le bien être des jeunes,
« Cette formation est très bien
« cette spécialisation est
c’est indispensable qu’ils
pour une personne qui débute
indispensable »
soient pris en charge par des
auprès des déficients visuels »
AVJistes »
38
Les trois ergothérapeutes interrogés recommandent cette spécialisation. L’ergothérapeute non
AVJiste parle de « nécessité si on travaille auprès d’un public déficient visuel ». En effet,
« l’AVJiste a une place d’autant plus importante car elle est très technique et très spécifique »
par rapport à un ergothérapeute. Selon elle c’est un plus si l’ergothérapeute est formée à l’AVJie.
L’ergothérapeute AVJiste 2 justifie l’importance de cette spécialisation par un manque de
formation à la déficience visuelle durant les trois années d’études d’ergothérapie. En tant
qu’ergothérapeute, on est performant sur la méthodologie de la prise en charge, faire des bilans,
établir des objectifs de traitement…Mais nous ne connaissons que très peu les troubles visuels, et
pas du tout les techniques de compensation spécifiques à chaque activité du quotidien. Ces
techniques paraissent simples et logiques, mais ce sont de véritables méthodes testées qui
marchent avec les déficients visuels (parfois, elles ont besoin d’être adaptées à certaines
personnes). Cette spécialisation formera sur la guidance d’une personne déficiente visuelle, les
aides techniques et adaptations du logement nécessaires, sur l’apprentissage du braille pour savoir
lire et faire des marquage en braille…Autant de choses qui ne sont pas traitées en ergothérapie.
Le troisième point de vue de l’ergothérapeute AVJiste 1 est différent des deux premiers : selon
elle, cette spécialisation permet de vraiment faciliter le travail d’un professionnel qui débute
auprès de ce public. Mais, il est possible avec de la recherche et de l’implication de trouver ces
techniques spécifiques par soi même. D’après son expérience, quand elle a effectué cette
formation, elle travaillait avec des déficients visuels depuis trois ans durant lesquelles elle s’était
renseignée et avait trouvée les différentes méthodes de compensation pour le quotidien ainsi que
les prés requis nécessaires. Quand elle a fait la formation, elle n’a pas découvert beaucoup
d’informations, mais cette spécialisation lui a permis de prendre contact et de rencontrer d’autres
AVJiste pour échanger sur leurs exercices.
2.3.3 L’AVJ compatible avec d’autres professions qu’ergothérapeute ?
AVJiste éducatrice
Ergothérapeute
Ergothérapeute
spécialisé
AVJiste 1
Ergothérapeute
AVJiste 2
Elle est spécifique à
Oui c’est compatible avec
Oui, mais l’AVJ
d’autres professions, mais
sera menée
c’est une formation à visée
différemment selon
plus ergothérapique
la profession de
l’ergothérapie quand
la problématique est
cognitive ou
motrice. Quand la
Oui aux éducateurs
spécialisés sans
problèmes
problématique est
39
base tout en ayant le
psychologique ou
même but.
sociale les
éducateurs sont plus
formés.
Dans ces réponses on constate ici que dans l’ensemble les professionnels s’accordent sur le fait
que cette spécialisation est adaptée aux ergothérapeutes ainsi qu’aux éducateurs spécialisés. Mais,
l’ergothérapeute répond que bien que cette formation ne soit pas restrictive à l’ergothérapie, c’est
quand même « un approfondissement de l’ergothérapie dans un domaine particulier ».
Les autres personnes interrogées ont une idée légèrement différente sur la question. Tout d’abord,
le point de vue de l’AVJiste éducatrice spécialisé. Selon elle, le « bagage de départ » des
différents professionnels fait qu’une même activité sera menée différemment par deux AVJistes
n’ayant pas la même profession. Elle dit avoir une vision plus éducative de l’AVJ alors qu’un
ergothérapeute AVJ aura une vision plus rééducative. Par exemple l’ergothérapeute sera plus
efficace pour l’analyse du geste, voir ce qui dysfonctionne alors que l’éducateur sera plus à même
pour accompagner les familles dans toutes activités plus éducatives. Ces deux points de vue
permettent une démarche différente pour arriver au même but, et constitue selon elle une
complémentarité quand il y a deux AVjistes dans une même équipe de profession différente.
Les deux ergothérapeutes AVJistes viennent confirmer cette opinion. L’ergothérapeute AVJiste 2
affirme cette complémentarité entre les AVJistes éducateurs et ergothérapeutes, bien que ces deux
professionnels aient une approche différente. En effet, l’ergothérapeute sera « plus carrée, plus
cartésienne avec tous les bilans qu’on fait et l’apprentissage qu’on a eu sur la façon de mener et
de mettre en place une prise en charge », alors que les éducateurs n’ont pas appris cette façon de
travailler à partir de bilans. Ils apprennent donc à partir de bilans pour faire une prise en charge
durant la formation d’AVJ et avec l’expérience.
Mais l’AVJiste 2 se questionne sur la pertinence des autres professions et les prés requis de ceuxci pour intégrer cette formation, bien qu’elle n’est jamais travaillé avec un AVJiste autre
qu’éducateur spécialisé. En effet, cette formation est ouverte à de nombreux professionnels
comme par exemple les assistantes sociales ou autres. Or, ont-ils les bases nécessaires pour
comprendre et mener correctement l’AVJ ? Je n’ai pas rencontré d’AVJ autres qu’ergothérapeute
ou éducateur pour y répondre. L’ergothérapeute AVJiste 1 confirme cette idée de la pertinence
que d’autres professionnels puissent faire la formation d’AVJiste.
40
2.4 Les domaines d’action de l’ergothérapie
2.4.1 Le domaine d’action principal de l’ergothérapeute : soins personnels, activité sociale,
autonomie scolaire
AVJiste
Educateur
éducateur
spécalisé
Ergothérapeute
spécialisé
Dans les activités
Dans le domaine
L’ergothérapeute
de vie
scolaire : le côté
s’occupe de
quotidienne
informatique
l’adaptation du
pures
spécialisé
matériel
Ergothérapeute
Ergothérapeute
AVJiste 1
AVJiste 2
Dans le domaine
de l’autonomie
personnelle
Plus au niveau de
l’autonomie
scolaire
Les différents professionnels interrogés n’ont pas le même point de vue quant au champ d’action
de l’ergothérapeute.
Cette divergence d’idées est aussi due au fait que certains professionnels ont séparé l’AVJiste de
l’ergothérapeute, alors que d’autres ont considéré le rôle de l’ergothérapeute spécialisé en AVJ.
Ainsi, pour l’ergothérapeute non AVJiste, le champ d’action principal correspond au travail
analytique pour la mise en place des prés requis utiles à l’AVJ comme vu précédemment. Selon
elle, les soins personnels concernent les AVJistes ainsi que l’autonomie sociale (utilisation du
téléphone par exemple). Mais, l’ergothérapeute peut aussi agir sur l’autonomie scolaire en
collaboration avec les professeurs et l’orthoptiste pour les malvoyants, pour la mise en place de
logiciels informatiques.
D’ailleurs ce rôle de l’ergothérapeute revient aussi pour l’AVJiste éducatrice spécialisé et
l’ergothérapeute AVJiste 2.
41
En effet, l’AVJiste éducatrice spécialisée énonce aussi le rôle de l’ergothérapeute pour
l’informatique spécialisée d’un point de vue scolaire. Selon elle, les activités sociales sont traitées
par les AVJistes (ainsi que les soins personnels), mais aussi les éducateurs spécialisés et les
professeurs spécialisés. L’ergothérapeute AVJiste 2 renforce ce point de vue en précisant que les
ergothérapeutes sont « formés sur tout ce qui est adaptations, matériels informatiques, logiciels
spécialisés. ». En effet, il arrive que certains services leurs demandes des bilans ergothérapiques
pour faire des préconisations pour des adolescents sans troubles associés. Pour ce qui est des
activités sociales comme les loisirs, ce sont les éducateurs qui s’en occupent, mais ils peuvent
solliciter les ergothérapeutes pour trouver un moyen d’adapter une activité selon les difficultés
d’un jeune. Pour le côté utilisation du téléphone portable, les ergothérapeutes peuvent être
amenés à le faire, mais en général ce sont les AVJistes qui sont sollicités pour ça.
D’un autre côté l’éducateur spécialisé et l’AVJiste 1 voit le travail de l’ergothérapeute centré
surtout autour des soins personnels (repas, hygiène, habillage, toilette, utilisation des WC).
L’éducateur spécialisé, lui parle aussi de « la sociabilité ». Ce terme est défini comme
« L’aptitude à vivre en société, les principes des relations entre personnes »23. L’éducateur
spécialisé précise qu’il entend l’apparence que l’adolescent renvoie de lui-même, selon son code
vestimentaire par exemple, mais aussi selon son niveau d’autonomie. Pour lui, l’apprentissage de
l’autonomie dans les soins personnels joue un rôle dans l’image sociale que le jeune donne aux
autres ; celle-ci peut être très stigmatisante si son niveau d’autonomie n’est pas en adéquation
avec son âge, et dans ce cas c’est que la rééducation n’aura pas bien été menée.
L’ergothérapeute AVJiste 1 confirme cette idée que ces trois domaines d’autonomie scolaire,
sociale et de soins personnels, sont intimement liés : si un adolescent est performant dans un
domaine et médiocre dans un autre, il ne pourra pas vivre un développement harmonieux et ces
difficultés risqueront d’être pointées du doigt par ses camarades.
Mais, selon elle l’ergothérapeute agit sur les soins personnels. En effet, dans ce centre,
l’autonomie scolaire est gérée par les professeurs qui s’occupent de l’adaptation informatique.
Etant la seule ergothérapeute du centre elle ne peut pas par manque de temps s’en occuper, et les
professeurs sont davantage spécialisés dans ce domaine. Elle intervient moins dans l’autonomie
sociale car c’est un domaine qui peut être abordé autant par les éducateurs ou autres
professionnels que par l’entourage. En revanche, l’autonomie personnelle est un sujet plus
difficile à traiter notamment pour l’entourage, et c’est selon elle le domaine où l’ergothérapeute a
23
REY-BOVE Josette ET REY Alain. Le petit Robert. Edition Le Robert, juin 1996, p.2100
42
son champ d’action principal, d’autant plus s’il s’agit d’un aveugle congénital. Bien sûr, le
travail interprofessionnel est primordial ainsi que la collaboration avec la famille pour arriver à
une autonomie globale satisfaisante.
2.4.2 L’apport de l’ergothérapie auprès des personnes déficientes visuelles durant
l’adolescence ?
Cette question reprend la question précédente, mais est plus ouverte pour permettre aux
professionnels de pouvoir amener de nouveaux éléments
Ergothérapeute
Ergothérapeute AVJiste 1
Ergothérapeute AVJiste 2
S’occuper des troubles
« faire que l’adolescent se
« cette approche individuelle
associés et mettre en place les
construit de manière uniforme
de la personne avec toutes les
prés requis à l’AVJ
c'est-à-dire que toutes les
notions qui sont applicables de
facettes qui font qu’une
déficiences-incapacités-
personnalité est équilibrée soit
situation de handicap avec
bien abordée »
prise en charge globale avec
l’environnement. Repérer les
troubles moteurs au niveau
motricité fine »
Selon l’AVJiste 2, c’est vraiment la démarche ergothérapique de mettre en place des objectifs à
partir de bilans établis qui apporte un plus à la prise en charge d’une personne déficiente visuelle.
Pour l’AVJiste 1 il est important d’arriver à unifier les capacités de l’enfant dans les différents
domaines, ne pas « faire un puzzle », en s’axant surtout sur l’autonomie des soins personnels qui
peut facilement être oubliée à l’adolescence au profit de la scolarité ou d’émergence de nouvelles
préoccupations de l’adolescent. En effet, comme elle le dit, « quand tu es ado, la première chose
que tu veux c’est être autonome ne plus dépendre des parents ».
43
44
3 DISCUSSION
3.1 Synthèse de l’analyse
L’analyse de ces entretiens a permis de mettre en avant l’importance du travail
interprofessionnel. L’action de l’ergothérapeute ne pourra être efficace si elle n’est pas reprise
d’une part par les autres professionnels intervenant dans la vie quotidienne du jeune et surtout les
éducateurs spécialisés, et d’autres part par l’entourage familial de l’adolescent.
De plus, l’ergothérapeute a sa place auprès de ce public surtout quand il y a des troubles associés
à la déficience visuelle, ou qu’il s’agit d’une déficience visuelle innée: pour une personne sans
troubles associés avec une déficience visuelle acquise, l’action d’un AVjiste qui ne sera pas
forcément ergothérapeute peut suffire.
Nous avons vu dans ces entretiens que le rôle principal de l’ergothérapeute sans spécialisation
AVJiste est surtout rééducatif avec la mise en place de prés requis utiles aux activités de vie
journalière. Or, les AVJistes eux-mêmes sont formés à ça, et ils pourraient tout aussi bien s’en
occuper, mais le travail est réparti de cette façon dans cette structure.
Mais il semble important que la prise en charge des déficients visuels innée et/ou avec troubles
associés (notamment troubles moteurs) soit effectuée par un ergothérapeute AVJiste à un moment
donné. En effet, la méthodologie de travail et les compétences d’un ergothérapeute en matière de
rééducation sont nécessaires et sont un plus par rapport aux compétences réadaptatives de
l’AVJiste.
La mise en parallèle de ma partie théorique avec l’analyse des données ne me permet donc pas de
confirmer ou d’infirmer mon hypothèse de départ qui était : La prise en charge en ergothérapie
est nécessaire pour qu’un adolescent mal voyant ou non voyant puisse accéder à un niveau
d’autonomie suffisant.
En effet, comme vu précédemment, un adolescent mal voyant ou non voyant peut dans certains
cas selon la présence de troubles associés ou non ainsi que selon la cause et la nature de sa
déficience visuelle, accéder à l’autonomie sans prise en charge en ergothérapie selon aussi son
vécu de ce handicap, son projet de vie…
45
3.2 Perspectives d’action
Premièrement, l’ergothérapeute est très peu formé à la prise en charge des personnes
déficientes visuelles. En effet, il s’agit d’un handicap très spécifique avec des techniques de
compensation ainsi que des aides techniques qui lui sont propres. Mais l’ergothérapeute est formé
à la démarche de prise en charge d’une personne handicapée. Or il y a parfois des troubles
associés à la déficience visuelle que l’ergothérapeute sera le plus à même de prendre en charge. Il
pourrait être plus intéressant que l’ergothérapeute ainsi que les éducateurs spécialisés soient
formés à la déficience visuelle durant leur cursus. En effet, d’après les entretiens, hormis ces
deux professions les autres professionnels qui peuvent accéder à la spécialisation d’AVJ, n’ont
pas toujours les compétences avec leur métier de base pour exercer l’AVJ de manière efficace.
Deuxièmement, la prise en charge rééducative et réadaptative est essentielle comme nous l’avons
vu auprès des adolescents déficients visuels. Mais, est-elle suffisante pour répondre à toutes leurs
attentes, leurs questions sur leur devenir d’adulte ? Des professionnels même formés à la
déficience visuelle peuvent-ils donner toutes les réponses, résoudre toutes les angoisses de ces
jeunes ?
Un adolescent voyant se construit aussi en regardant autour de lui des modèles avec une histoire
de vie plus ou moins proche de la sienne. C’est l’observation de ces pairs qui va permettre au
jeune de suivre la voie qu’il aura choisi.
Chez un adolescent avec un handicap, les personnes avec la même déficience sont souvent
beaucoup moins nombreuses dans l’entourage du jeune. Il est donc beaucoup plus difficile
d’appréhender l’avenir pour eux en l’absence de ces modèles. Pour un adolescent déficient visuel,
la difficulté supplémentaire est que, privé de la vue, il ne pourra pas observer ses pairs pour
mieux prévoir son futur. Ce manque de modèle peut augmenter les angoisses de ces jeunes. Le
fait de rencontrer des personnes avec les mêmes difficultés au quotidien, et avec une expérience
de vie plus importante, pourrait permettre de répondre à certaines de leurs attentes et besoins. En
effet, les rééducateurs ou l’entourage familial ne sont pas toujours à même de comprendre ces
besoins là.
Il existe en France le concept de pairémulation. Ceci est défini par le Groupement Français
Personnes Handicapées comme « la transmission de l’expérience dont sont chargées les
personnes qui ont appris à répondre à leurs besoins en matière d’accompagnement et
46
d’adaptations personnalisés pour vivre selon leurs choix. Afin que ceux qui en ont le besoin
puissent mieux identifier et utiliser plus efficacement les ressources alternatives qui sont
nécessaires à leur autonomie, cette transmission vise à renforcer les capacités des personnes en
perte d’autonomie en renforçant leur conscience sur leurs possibilités, leurs droits et leurs
devoirs, et en les encourageant à influencer leur environnement physique et social pour leur
meilleure participation dans leur famille et dans la société. »24
En clair, un pairémulateur est là pour aider une personne ayant les mêmes difficultés que lui à
surmonter ses doutes et à prendre conscience de ses possibilités et de ses capacités.
Je pense qu’une rencontre avec des pairémulateurs pourrait être bénéfique chez des adolescents
déficients visuels en parallèle de la rééducation/réadaptation. Elle pourrait permettre au jeune de
mieux comprendre certains aspects de leur rééducation, mais aussi d’aborder l’avenir plus
sereinement.
Aujourd’hui, ce concept est surtout appliqué auprès des blessés médullaires, mais je pense qu’il
peut être intéressant de l’étendre à d’autres handicaps. Une formation pour les pairémulateurs va
être mise en place, afin que la pairémulation se fasse de manière plus formelle.
3.3 Limites
Pour réaliser les entretiens, j’ai voulu m’intéresser à différentes professions qui
collaboraient le plus avec les ergothérapeutes auprès de ce public. Il aurait été intéressant de
rencontrer plus d’ergothérapeutes, et surtout des ergothérapeutes non AVjistes qui travaillent à
temps plein auprès des déficients visuels. Cela aurait pu amener d’autres pistes de travail de
l’ergothérapie dans ce domaine.
Ensuite, mon analyse aurait pu être davantage étayée si je m’étais entretenue avec des
professionnels de plus de structures. En effet, je pense que la réponse à certaines questions
montrent un fonctionnement institutionnel et si les personnes interrogées avaient travaillé dans
plusieurs structures, les réponses auraient peut être étaient différentes. Par exemple, la question
sur le rôle de l’ergothérapeute dans les soins personnels, l’autonomie sociale ou l’autonomie
scolaire est spécifique de chaque structure, de la répartition du travail entre les différents
professionnels.
24
Groupement Français des Personnes Handicapées (GFPH). La Pairémulation [en ligne]. Disponible sur Internet :
http://www.kappacite.fr/ressources_documentaires/presentation_pairemulation.pdf (Consulté le 07 avril 2012)
47
Durant mon stage auprès des personnes déficientes visuelles, j’ai rencontré des personnes mal
voyantes et non voyantes de façon innée ou acquise. Toutes ces situations m’ont posé question, et
je n’ai pas voulu choisir un type de déficience à traiter mais j’ai préféré tout aborder. Si j’avais
ciblé un public précis, j’aurais pu orienter mes recherches de manière plus détaillée.
48
CONCLUSION
Le stage que j’ai effectué auprès des personnes déficientes visuelles m’a permis de mieux
appréhender la complexité de leurs difficultés au quotidien, ainsi que de la prise en charge
spécifique. Depuis ce stage que j’ai réalisé en deuxième année, j’ai décidé d’axer mon mémoire
sur la déficience visuelle. L’adolescence était un sujet qui me captivait aussi et j’ai trouvé
intéressant de le traiter en parallèle du métier d’ergothérapeute, car on retrouve un but commun :
la recherche d’autonomie.
Avec ce travail d’initiation à la recherche, j’ai pu m’informer avec de nombreuses lectures
sur le sujet pour compléter les informations acquises durant le stage et les trois années de
formation. En parallèle, les entretiens m’ont permis de rencontrer divers professionnels sur le
terrain et de pouvoir échanger et débattre sur les différents points de vue. Ce mémoire m’a donc
aidé à me positionner en tant que future professionnelle. En effet, il m’a permis de prendre
conscience de l’importance de travailler en équipe, car seul on ne peut pas mener un travail
efficace. J’ai aussi pu mieux cibler d’une part le rôle de l’ergothérapeute, les différences avec ou
sans la formation AVJie, et d’autre part le rôle d’un AVJiste non ergothérapeute et sa façon de
travailler qui peut être complémentaire de celle d’un ergothérapeute. De plus, la prise en charge
en ergothérapie ne semble pas indispensable au vu des résultats obtenus dans ce travail de
recherche, pour tous les adolescents déficients visuels. Ceci est donc un paramètre qui viendrait
infirmer ma problématique. Mais, dans certains cas, cette prise en charge s’avère essentielle ; en
conséquence, après avoir effectué ce travail de recherche, mon questionnement de départ reste
entier, ce mémoire ayant permis d’amener des éléments de réponse.
Le handicap visuel est encore aujourd’hui très peu connu et demande une prise en charge
spécifiques avec des professionnels formés à cette déficience. L’ergothérapie a toute sa place
pour prendre en charge ce handicap, mais actuellement il y a un réel manque de formation sur ce
handicap. En effet, seul deux jours sur les trois ans sont accès sur ce handicap, avec une
alternance de mise en situation sous bandeau et de cours théoriques. Aujourd’hui je pense qu’une
spécialisation AVJie est très fortement nécessaire pour avoir toutes les clés en
main pour agir de manière efficace. Mais, cette formation est accessible à de nombreux
49
professionnels plus ou moins formés sur le handicap. Mes entretiens ont mis en avant la place
légitime de l’ergothérapeute et de l’éducateur spécialisé, mais remettent en cause l’apport
d’autres professions dans l’AVjie. A partir de ces données, on peut penser qu’il serait intéressant
d’inclure cette formation dans le programme de formation de ces deux professions pour que
l’AVjie ne soit effectuée que par ces deux types de professionnels.
A la période de l’adolescence, de nouvelles demandes, questions, angoisses émergent. Ces
questionnement sont d’autant plus nombreux quand il y a un handicap qui se surajoute ou déjà
présent. Les professionnels formés vont tout mettre en œuvre pour répondre au maximum à ces
demandes et aider le jeune dans son parcours de vie. Mais, l’expérience personnelle de vie peutelle être remplacée par des années d’études ? Un professionnel est-il plus à même de comprendre
les difficultés d’un adolescent déficient visuel qu’un adulte ayant le même handicap ? Je pense
qu’à cette période, il pourrait être intéressant de mettre en place des actions de pairémulation
pour aider des jeunes déficient visuel à mieux comprendre leur handicap, prendre conscience de
leurs capacités et de l’avenir possible qui s’offre à eux pour mieux vivre ces difficultés.
Aujourd’hui, de nombreux points doivent être améliorés pour favoriser l’inclusion des
personnes déficientes visuelles dans notre société. La loi du 11février 2005 pour l'égalité des
droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, est un pas en
avant vers cette intégration. Mais, cela suffira-t-il à permettre aux personnes déficientes visuelles
d’acquérir une place d’acteur au sein de notre société ? Ce concept d’utilité sociale ne serait-il
pas vecteur d’angoisses auprès des adolescents déficients visuels qui peuvent rencontrer des
difficultés à trouver le chemin vers une autonomie suffisante pour s’assumer ?
Autant de questionnement auxquels les professionnels qui prennent en charge des adolescents
déficients visuels doivent tenir compte pour avoir une vision de l’adolescent comme d’une
personne à part entière avec ses doutes, ses questions, ses besoins et ses envies.
50
BIBLIOGRAPHIE
Ouvrages
BERVEILLER Antoinette. Comment vivre avec un aveugle de la naissance au 4ème âge. Edition
Josette Lyon
FERLAND Francine. Le Modèle Ludique, Le jeu, l’enfant avec déficience physique et
l’ergothérapie. Edition Les presses de l’université de Montréal, 1998. p.55.
RAYNARD Francis. Un autre regard, La réadaptation des déficients visuels. Edition Solal
REY-BOVE Josette ET REY Alain. Le petit Robert. Edition Le Robert, juin 1996, pp 2182 ;2100;
Articles
BELLINA Inès. La construction d’un projet professionnel d’un jeune déficient visuel.
Réadaptation. Jeunes aveugles ou malvoyants. Mars 1996, n°428, p.36
CHAMBERT C., BOISSIN J.-P.. La rééducation des aveugles récents. La revue du praticien,
n°32.
GRIFFON P., DUTIER N., PERROT F., GUILLAUME C., BURLOT C. La rééducation des
personnes déficientes visuelles Evolution des pratiques en ergothérapie. Journal d’ergothérapie.
1992, tome 14/2, p.51.
LAURENT Michel. Retentissement de la déficience visuelle au niveau de la personne.
Réadaptation. La scolarisation des élèves déficients visuels en milieu ordinaire. Décembre 1998,
n°455, pp12-13
LIONNET A.-H., GUILLOTEAU N., TOURNIER Y.. Le toucher, un sens à développer.
Ergothérapies. La main. Septembre 2003, n°11.
51
MIGNOT Hervé. Le travail de deuil, un parcours intérieur difficile. Soins en gérontologie Deuils
et obsèques, n°35 p.23-24-25.
ZOLLA Eric. Déficience visuelle et adolescence. Réadaptation cécité et malvoyance n°517,
p.22
WEBOGRAPHIE
Association Nationale pour la Formation permanente du personnel Hospitalier (ANFH). Avéjiste.
[en ligne]. Disponible sur Internet : http://www.anfh.fr/site/guide-desmetiers/fiche/metier/pdf/1176/Avejiste__Aide_a_l%27activite_de_Vie_Journaliere_ (Consulté le
04 février 2012)
Association socialiste de la personne handicapée (ASPH). Le handicap ou la maladie génère-t-il
la dépression ? 15 septembre 2008. [en ligne]. Disponible sur Internet :
http://www.asph.be/NR/rdonlyres/865575BD-C128-4DC7-A19BA903A5817E5C/0/ASPH200818LADEPRESSIONETLEHANDICAP.pdf travail de deuil p.3
(Consulté le 24 janvier 2012)
Association Valentin Haüy. La technologie au service des aveugles et des malvoyants. 01 février
2011. [en ligne].Disponible sut Internet : http://www.certam-avh.com/content/acc%C3%A8s-despersonnes-ayant-une-d%C3%A9ficience-visuelle-%C3%A0-l%E2%80%99outil-informatique
(Consulté le 26 janvier 2012)
AUDETAT M.- Cl, VOIROL C.. L’adolescent. 1997. [en ligne]. Disponible sur Internet :
http://psynergie.ch/Pedagogie-Culture-Societe/Eleve/AdolescentTexteBase.pdf (Consulté le 26
octobre 2011).
Blindlife la vie des aveugles. Impacts psychologiques sur l'adolescent déficient visuel.
04.05.2012. [en ligne]. Disponible sur Internet :
http://www.blindlife.ch/index.php?option=content&task=view&id=84&Itemid=150 (Consulté le
10 octobre 2011).
52
GRIFFON Pierre. L’adolescent déficient visuel. 1997. [en ligne] Disponible sur Internet :
http://pierre.griffon.pagesperso-orange.fr/AdoDV.pdf (Consulté le 15 novembre 2011)
Groupement Français des Personnes Handicapées (GFPH). La Pairémulation. [en ligne].
Disponible sur Internet :
http://www.kappacite.fr/ressources_documentaires/presentation_pairemulation.pdf (Consulté le
07 avril 2012)
HAELEWYCK Marie-Claire, DEPREZ Monique, BARA Mélanie. C’est la vie de qui après
tout ? Validation du niveau de satisfaction d’un outil visant le développement de
l’autodétermination chez les adolescents présentant un handicap. Mai 2003. [en ligne].
Disponible sur Internet : http://www.rfdi.org/files/HAELEWYCK_v14.PDF (Consulté le 05
novembre 2011)
SAAAIS 74. La déficience visuelle. [en ligne]. Disponible sur Internet : http://ash.edres74.acgrenoble.fr/IMG/doc_101208_topos_sensi_enseignant.doc (Consulté le 12 novembre 2011).
Ville d’Angers. Les principes d'adaptation d'un logement. [en ligne]. Disponible sur Internet :
http://www.angers.fr/vie-pratique/social-sante/les-personnes-en-situation-de-handicap/repertoiredes-services/logement/index.html (Consulté le 15 janvier 2012).
World Health Organization. Changements dans la définition de la cécité. [en ligne]. Disponible
sur Internet : http://www.who.int/blindness/Changements.pdf (Consulté le 12 novembre 2011).
53
ANNEXES
ANNEXE 1 : Guide d’entretien
ANNEXE 2 : Entretien Educateur Spécialisé
ANNEXE 3 : Entretien AVJiste éducatrice spécialisée
ANNEXE 4 : Entretien Ergothérapeute
ANNEXE 5 : Entretien Ergothérapeute AVJiste 1
ANNEXE 6 : Entretien Ergothérapeute AVJiste 2
ANNEXE 1
Guide D’entretien
Age :
Année d’obtention du DE ergo :
Année d’obtention du DE AVJiste :
Nombres d’années d’exercices auprès de personnes DV :
Parcours antérieur :
Population prise en charge :
1) L’adolescence est-elle une période où la prise en charge en ergothérapie vous semble
indispensable ? Pourquoi ? Même si il faut que la PEC soit précoce, pensez vous qu’il
est judicieux de la renforcer au moment de l’adolescence ?
2) Les prises en charge en ergothérapie sont-elles quotidiennes? Tous les jours, plusieurs
fois par semaine ? Combien de temps durent-elles?
3) Elles se présentent sous forme de mise en situation dans l’environnement de
l’adolescent ou plutôt sous forme analytique en salle d’ergothérapie?
4) Comment les acquis sont-ils transposés dans la vie du jeune ?
5) Rôle de l’AVJiste : Cette profession apporte-t-elle beaucoup de connaissances
supplémentaires par rapport à la formation d’ergothérapeute classique ?
6) Pensez-vous que cette spécialisation soit adaptée à des professionnels qui ne sont pas
ergothérapeutes ?
7) Dans quel domaine l’ergothérapie aide-t-elle le plus le jeune selon vous (soins
personnels, activités sociales, autonomie scolaire…) ?
8) Selon vous, quel est l’apport de l’ergothérapie auprès des personnes déficientes
visuelles durant l’adolescence ?
ANNEXE 2
Educateur spécialisé
Age : 29 ans
Profession : éducateur spécialisé
Année d’obtention du diplôme : 2007
Depuis quand travaillez-vous ici ? octobre 2008
1) Depuis quand travaillez-vous auprès de public déficients visuels ?
Auprès de quels âges intervenez-vous ?
Mais ce n’est pas des adolescents ça va jusqu’à 13 ans. 8-13 ans ce sont des préadolescents
Je travaille avec des préadolescents 8-13 ans déficients visuels : deux classes de 7 enfants
scolarisés au sein d’une école ordinaire. Ces deux classes sont annexées au sein de l’école sur un
service d’inclusion scolaire collective, classes intégrées dans l’école.
Quel est votre rôle auprès de ce public ?
On travaille sur trois principaux temps en tant qu’éducateur :
- Temps d’internat : le lever
- Le midi sur l’école, temps de CLAE et de repas
- La soirée à l’internat
Le mercredi après midi avec l’éducateur est en partenariat avec la psychomotricienne et on
travaille pendant la première semaine des vacances lors des journées pluridisciplinaires où la
prise en charge est particulièrement éducative.
Comme les enfants sont scolarisés, l’éducateur spécialisé intervient vraiment dans l’autonomie de
vie journalière en partenariat avec nos collègues puisqu’on est d’internat. Il y a très peu de temps
de jeu organisés avec les éducateurs spécialisés, que le mardi matin.
2) Travaillez-vous en collaboration avec les ergothérapeutes au quotidien ? Pourquoi ?
Comment, sous quelle forme ?
On travaille en collaboration avec des ergothérapeutes, bien que là y a très peu d’ergothérapie,
que l’AVJiste ergothérapeute qui prend en charge 3-4 enfants, mais on travaille avec tous les
rééducateurs : psychomotriciens, AVJiste où je pense qu’il y a quand même pas mal de parallèle
avec le boulot d’ergothérapeute, en tout cas ergothérapeute et AVJiste travaillent vraiment
ensemble ici.
3) Travaillez-vous de la même façon avec un AVjiste ergothérapeute et un AVJiste non
ergothérapeute ?
Non
Sous quelle forme travaillez-vous avec les ergothérapeutes ?
Dans l’idéal, dans la théorie car dans la pratique ça se passe pas du tout comme ça parce qu’on a
vraiment très très peu de temps en commun et tout les échanges d’informations se font dans les
couloirs.
Dans l’idéal, quand elles ont travaillé quelque chose en ergothérapie, ça se fait beaucoup autour
du repas, quand y a eu des choses qui sont acquises avec des enfants, l’ergothérapeute nous fait le
relais ; elle dit voilà donc on en est là avec cet enfant on a travaillé je ne sais pas la fourchette, le
couteau, la découpe, là on en est là c’est quelque chose que maintenant on peut reprendre nous
dans le quotidien de l’enfant puisque ça vient d’être acquis.
D’accord donc c’est vraiment pour transposer les acquis ?
Oui exactement
4) Selon vous, la prise en charge en ergothérapie (non AVJiste) est-elle indispensable chez
un déficient visuel adolescent ?
Ça dépend du projet de chaque gamins ; indispensable je ne sais pas parce que y a pleins de
prises en charge, voilà, l’AVJiste va travailler beaucoup de choses travaillé avec l’ergothérapeute,
nous on a la tête dans le guidon au quotidien avec l’enfant mais je ne saurais pas te dire qu’est ce
que va travailler l’ergothérapeute et l’AVJiste par exemple.
Par exemple, quand l’ergothérapeute va travailler un truc à l’ordinateur plus relatif à la dactylo,
mais je ne saurais pas te dire ce qu’elle travaille parce que l’ergothérapeute d’ici est à mi-temps
du coup on ne se croise jamais ; je sais qu’elle va faire des améliorations sur la tenue en classe
par exemple en modifiant un petit peu les chaises ou la table pour que la tenue de l’élève soit
mieux en classe mais je peux pas dire exactement ce qui a été changé si on se fait pas le relai vu
que nous on est pas en classe
5) Cette prise en charge est-elle d’autant plus importante à l’adolescence qu’à une autre
période de la vie ?
Ces choses là s’apprennent le plus tôt possible sera le mieux, ça rentre plus facilement quand on
est jeune j’ai l’impression
a) D’après ce que vous me dites, pensez-vous que la prise en charge doit être la plus
précoce possible en ergothérapie ?
Il me semble, après tout dépend de ce qui est travaillé en ergothérapie
b) Est-ce qu’accentuer une prise en charge à l’adolescence pourrait être pertinent en
ergothérapie ?
Si par exemple c’est un projet d’un gamin qui a certaines habiletés devant un ordinateur et que
voilà, peut être que dans son projet d’orientation ce sera bien d’augmenter l’ergothérapie dans ce
cadre là de l’informatique, je sais pas exactement ce que vous travaillez en ergothérapie autour de
l’informatique mais je sais que ça se fait.
6) Dans quel domaine l’ergothérapie aide-t-elle le plus le jeune selon vous (soins
personnels, activités sociales, autonomie scolaire…) ?
Je n’ai pas la prétention de le savoir. Moi je pense que c’est dans les activités de vie quotidienne
pures : autour de l’hygiène, du moment du repas et après peut être tout ce qui concerne
l’apparence dans la sociabilité un peu, faire en sorte que quelqu’un qui a travaillé je ne sais pas
les chaussures alors ça c’est l’AVJiste mais je sais que les déficients visuels quand tu commences
à avoir des scratches à 18ans, c’est grave y a un boulot qui a pas été fait ce sont des trucs qui sont
très très stigmatisant pour quelqu’un qui voit moins bien voire pas du tout. C’est ce domaine là de
l’apparence en tout cas de l’image sociale que tu dégages.
L’autonomie sociale est un domaine qui touche tellement de choses. Pour répondre à ta question,
je pense que c’est quand même tout ce qui est vie quotidienne le repas, l’hygiène si je dois dire
qu’il y a un truc plus important que les autres.
7) Selon vous, quel est l’apport de l’ergothérapie auprès des personnes déficientes visuelles
durant l’adolescence ?
Je l’ai dit à la question précédente, l’apport le plus important est dans les activités de vie
quotidienne.
8) Selon vous, l’ergothérapeute aide-t-il l’adolescent à s’accomplir en tant qu’adultes en
devenant plus autonome au quotidien? Pourquoi ? Comment ?
Oui bien sûr l’ergothérapeute et l’équipe pluridisciplinaire en général. Moi je suis quelqu’un qui
défendra ça tout le temps c'est-à-dire que ce n’est pas parce qu’on travaille je ne sais pas les
lacets, n’importe quoi sur une séance d’ergothérapie dans une salle dans un lieu clos et que ce
n’est pas repris derrière avec une équipe entière pour que ça ait du sens dans une vie ; il y a la
séance purement d’ergothérapie et après il y a la pratique au quotidien. Il y a pleins de gamins qui
arrivent à un certain degré d’autonomie quand ils sont en prise en charge individuelle et qui
quand après ils se retrouvent au sein d’un collectif avec des éducateurs, ils perdent leurs moyens.
L’ergothérapeute aide l’adolescent à être autonome mais dans la mesure où c’est repris par un
travail pluridisciplinaire important, parce qu’il y a pleins de choses qui se passe comme ça dans
des salles où voilà quand on est face à l’ergo c’est tellement plus facile d’accéder à un certain
niveau d’autonomie et puis après il s’agit de le mettre en pratique dans la vie quotidienne ça c’est
toujours un peu plus délicat
C’est là qu’interviennent les éducateurs spécialisés
Educateurs spécialisés et ceux qui partagent la vie quotidienne des gamins. Je pense que notre
travail, celui des psychomotriciens doit être relayé partout pour que tout ça ait du sens.
Je regrette un peu ça qu’on n’ait pas le temps que les emplois du temps de chacun soit tellement
morcelés qu’on n’a pas le temps de reprendre tout ça et moi je ne suis pas fichu de te dire ce
qu’ils font en ergothérapie les gamins que je suis au quotidien, c’est quand même dommage.
Mais le travail, le rapport qu’on a avec les autres rééducateurs c’est pareil : avec les instructeurs
en locomotion par exemple, les gamins vont bosser un parcours de l’institution à l’école à la
canne blanche ou à la précanne mais après ils sont censés venir dire bon voilà c’est bon
maintenant il peut le faire tout seul et après on reprend le travail avec les gamins ; c’est ce qu’on
essaie de faire dans l’idéal, mais on a du mal à vraiment le reprendre par manque de temps et
donc de coordination.
Pour conclure, c’est plus quand on vous délègue l’information pour que vous la transposiez dans
le quotidien que vous êtes au courant de ce qui se passe chez les autres professionnels ?
OUI tout à fait.
ANNEXE 3
Entretien AVJiste
Age : 35ans
Profession de base et année d’obtention du diplôme : éducateur spécialisé depuis 2002
Année d’obtention du DE AVJiste : 2006
Nombres d’années auprès de personnes DV : depuis 2002
Parcours antérieur : travaille auprès d’enfants et d’adultes
Population prise en charge : Enfants, adultes avec ou sans handicap associés ; déficients visuels et
non voyants. Les troubles associés sont principalement des maladies mentales, tout ce qui va être
psychose. Les autres handicaps associés dont les troubles moteurs sont pris en charge par
l’ergothérapeute AVJiste.
1) Travaillez-vous en collaboration avec des ergothérapeutes ? De quelle manière
travaillez-vous ensemble? Travaillez-vous ensemble souvent ?
Il y a peu de collaboration, principalement le temps du repas qu’on fait en commun avec
l’ergothérapeute AVJiste. La collaboration se fait sinon de manière informelle quand on a des
questions l’une envers l’autre, des situations dont on a besoin de discuter.
2) Travaillez-vous plus fréquemment avec une ergo AVjiste ou un ergothérapeute ?
Travaillez-vous différemment avec ces deux ergothérapeutes ?
Dans les faits avec l’ergothérapeute AVJiste.
Certainement je ne travaille pas de la même façon avec ces deux ergothérapeutes. Je ne travaille
pas ou très peu avec l’ergothérapeute, on partage le même bureau et on discute parfois des
gamins qu’on a en commun, après on n’a pas de prise en charge commune.
Si je travaille avec les deux quand on a des enfants en commun je les sollicite l’une ou l’autre sur
des choses où je vais être un peu en difficultés où je me pose des questions où je me rends
compte que là vraiment c’est pas de mon domaine, je les interpelle souvent que ce soit l’une ou
l’autre.
- Des choses plus du domaine du matériel, de la réadaptation par exemple ?
Oui du matériel, même de la manière de m’y prendre avec un enfant, je pense notamment à un
enfant qu’on a en commun où je lui apprends à mettre ses chaussures et à utiliser le scratch et je
me rends compte qu’en fait le scratch il faut tout décomposer ; moi je le fait sur son groupe quand
il s’habille se déshabille et elle elle le voit en séance d’ergothérapie, je l’ai sollicité là-dessus je
lui ai dit voilà moi je travaille le scratch et j’ai un peu de mal et donc elle le reprend à son niveau
et moi je le travaille en situation donc c’est complémentaire.
3) Comment voyez-vous le travail de l’ergothérapeute auprès de jeunes DV ? Comment vous
répartissez vous le travail auprès de cette population entre les ergothérapeutes et les
AVJistes? L’ergothérapeute m’a dit qu’elle ne faisait pas les activités de vie quotidienne
donc d’après vous qu’est ce qu’elles font, quel est leur travail auprès de cette
population ?
C’est justement le travail que je ne sais pas faire ça va être toute la décomposition avant tout le
travail analytique du geste que ça moi je sais pas comment le décomposer, ça va être vraiment
moi ce que j’en vois ce que j’en comprends ça va être tout les pré requis avant de savoir après
réellement faire le geste.
4) Selon vous, quel est l’apport de l’ergothérapie auprès des personnes déficientes visuelles
durant l’adolescence ? la prise en charge en ergothérapie est-elle indispensable chez un
déficient visuel adolescent ? Je me suis appuyée sur l’adolescence car c’est une période
où on est d’autant plus en recherche d’autonomie, et notre travail d’ergothérapeute c’est
aussi l’accès à l’autonomie qui est le point clé de notre travail. J’ai trouvé que c’était
intéressant de mettre les deux parallèles donc la période de l’adolescence avec notre
travail. Je parle donc dans cet entretien de jeunes déficients visuels sans troubles
associés.
Je dirais que non s’il n’y a pas de troubles associés, car la prise en charge AVJiste peut suffire.
-
Est-ce qu’au niveau du matériel l’AVJiste suffit pour l’adaptation par exemple du
matériel informatique ?
Disons qu’ici ce qui est spécifique c’est que le matériel informatique est géré par des professeurs
d’informatique. Moi non je ne suis absolument pas compétente pour le matériel spécialisé parce
que je n’ai pas été formée pour et que je n’y connais rien. Mais pour le cout, ici, ce n’est pas
l’ergothérapeute qui a ce relai là mais c’est un prof d’informatique spécialisé.
-
Cette prise en charge est-elle d’autant plus importante à l’adolescence qu’à une autre
période de la vie ?
Sans troubles associés non, je dirai que non.
5) Dans quel domaine l’ergothérapie aide-t-elle le plus le jeune selon vous (soins
personnels, activités sociales, autonomie scolaire…) ?
Moi de mon point de vue comme je ne suis pas compétente dans le domaine scolaire je dirai plus
dans ce domaine scolaire.
- Qu’est ce que l’ergothérapeute apporte au niveau de l’autonomie scolaire ?
Chez un jeune sans troubles associés, tout le côté informatique spécialisé.
- Au niveau des activités sociales adaptations des loisirs… ça concerne plus les
AVJistes, les éducateurs spécialisés, qui s’occupent plus de tous ça ?
Les AVJistes, et éducateurs aussi, la professeur de braille également. En plus moi c’est quelque
chose qui m’intéresse énormément l’adaptation de jeu donc c’est vrai que j’aime bien m’y
pencher dessus, chercher des solutions. Mais ça fait parti des missions de l’AVJiste aussi.
6) Selon vous, l’ergothérapeute aide-t-il l’adolescent à s’accomplir en tant qu’adultes en
devenant plus autonome au quotidien ou est ce que c’est surtout le rôle de l’AVJiste? Estce que l’ergothérapeute a une place Pourquoi ? Comment ?
S’il le prend en charge oui, si c’est dans une démarche de rééducation avec un jeune qu’il a oui,
mais après un jeune qui n’a pas de besoin spécifique, je ne vois pas plus la place d’un
ergothérapeute que d’un AVJiste. C’est clair ou pas ?
- Non pas trop car tous les jeunes que vous avez sont tous suivis par des AVJistes ou
pas ?
Là notamment je pense à deux jeunes que j’ai des adolescentes notamment qui ont fait que de
l’AVJ qui n’ont jamais eu d’ergothérapie, je ne vois pas ce que l’ergothérapie leur apporterai en
plus.
- Et quand l’ergothérapeute intervient, aide-t-il l’adolescent à s’accomplir en tant
qu’adultes en devenant plus autonome au quotidien ?
Bien sûr complètement, mais la prise en charge n’est pas forcément nécessaire.
7) Ça m’intéressait d’autant plus de vous rencontrer pour votre formation d’AVJ avec une
profession qui n’est pas ergothérapeute.
Pensez-vous que la formation d’AVJiste soit complémentaire de la formation
d’ergothérapeute ? Pourquoi ?
Alors oui, sachant que forcément on ne fera pas l’AVJ de la même façon. On n’a pas du tout les
mêmes prés requis, on part avec nos bagages de départ. Moi j’ai une vision éducative de l’AVJ et
l’ergothérapeute AVJiste a une vision ergothérapique. Sur une même activité on ne va pas du tout
l’aborder de la même façon. On va vers le même but, on a le même résultat voulu mais la
démarche sera complètement différente. Donc nous sommes complémentaires dans une même
équipe. Et justement là où une AVjiste qui a une formation d’ergothérapie va être efficace sur tout
ce qui est l’analyse du geste, le pourquoi ça fonctionne pas donc elle va pouvoir travailler ça, moi
je ne peux pas le faire. Après tout ce qui va être accompagnement dans les familles, un côté où on
va mettre un sens plus éducatif à une activité, je serai plus à même de l’apporter, mais c’est sur
que c’est complémentaire.
ANNEXE 4
Ergothérapeute
Année d’obtention du DE : 2006
Age : 29 ans
Nombre d’années auprès d’un public DV : 1 an et demi après l’obtention du DE à temps plein
dans un S3AIS, bientôt un an et demi dans ce centre à mi temps.
Parcours antérieur : SESSAD déficients moteurs
Type de population pris en charge : déficients auditifs, quelques déficients visuels avec troubles
associés de moins de 12 ans. Surtout des jeunes de 4- 5ans.
1) Bien que la prise en charge doive être la plus précoce possible, l’adolescence est-elle une
période où la prise en charge en ergothérapie vous semble indispensable, serait-il
nécessaire de la renforcer à cette période? Pourquoi ?
Si la prise en charge est correcte dès la petite enfance, dépend de chaque enfant, pas de manière
générique, dépend de chacun.
Les demandes à l’adolescence concernent plus l’Avjiste que l’ergothérapie. Les besoins varient
selon les antécédents et les capacités de l’enfant.
2) Les prises en charge en ergothérapie sont-elles quotidiennes? Tous les jours, plusieurs
fois par semaine ? Combien de temps durent-elles?
D’un point de vue pratique, une fois par semaine à cause d’un manque de personnel ; les prises en
charge durent trois quart d’heure.
3) Elles se présentent sous forme de mise en situation dans l’environnement de l’adolescent
ou plutôt sous forme analytique en salle d’ergothérapie?
Cela dépend des besoins de l’enfant, c’est rarement de l’analytique pur mais on va travailler de
manière ludique pour travailler la manipulation, ma dextérité par le jeu.
4) Comment les acquis sont-ils transposés dans la vie du jeune ?
Au fur et à mesure en transpose les acquis d’un jeu à l’autre et en lien avec les autres
professionnels : AVJiste, éducateur, psychomotriciens et tous ceux qui gravitent autour de
l’enfant.
5) Qu’est ce qui différencie votre travail d’un ergo AVJiste ?
L’ergothérapeute fait un travail plus global, approche ergothérapique différente : une
ergothérapeute AVJiste a une vision des activités ainsi qu’une expérience différente qu’une non
AVJiste, ce qui lui permet de mettre en place des activités plus précises plus adaptées au jeune et
à sa vie quotidienne.
- Travaillez-vous en collaboration avec eux ? comment ?
Je travaille beaucoup avec les AVJiste. On évite les séances de groupes, mais par manque de
temps et de moyens cela permet de pouvoir faire plusieurs séances par enfant parfois.
On travaille en collaboration par transmissions, par mails, échanges informels. Les relations
interprofessionnelles permettent de mettre en place des choses avec une continuité d’une séance à
l’autre et d’un professionnel à l’autre.
6) Pensez-vous que la profession d’AVJiste soit adaptée à des professionnels qui ne sont pas
ergothérapeutes ?
Oui c’est compatible avec d’autres professions même si je ne saurais pas dire lesquelles. Cette
formation a une visée plus ergothérapiques car c’est un approfondissement/une spécialisation de
l’ergothérapie dans un domaine particulier, mais ce n’est pas restrictif à la profession
d’ergothérapeute, d’autres professionnels peuvent faire cette formation.
7) Dans quel domaine l’ergothérapie aide-t-elle le plus le jeune selon vous (soins
personnels, activités sociales, autonomie scolaire…) ?
Pour les soins personnels, c’est le domaine de l’AVJiste.
L’ergothérapeute s’occupe un peu de l’autonomie scolaire, mais surtout de la mise en place des
prés requis avant l’apprentissage des AVJ : les manipulations, les découvertes sensorielles… Si y
a un ergothérapeute et un AVJiste, l’ergothérapeute fera un travail plus analytique pour la mise
en place des prés requis, et l’AVJiste sera plus sur un travail concret.
L’ergothérapeute s’occupe aussi de l’adaptation du matériel : mise en place des logiciels
informatique en collaboration avec l’orthoptiste, le professeur de braille en fonction des besoins
de chaque enfant.
- Au niveau des activités sociales, par exemple adapter un téléphone portable pour
obtenir une puce spéciale auprès de orange par exemple est ce que c’est l’ergo qui
s’en occupe ?
Ça va être plus l’AVJiste qui va s’en occuper, en fait ça dépend des besoins de l’enfant. Si
l’enfant est suivi en AVJ c’est l’AVJiste qui va s’en occuper entre autre mais ça peut être aussi le
travail de l’ergo s’il n’est plus suivi en AVJ.
8) Est-ce que c’est difficile pour vous de vous situer dans l’équipe AVJiste-ergothérapeute
en tant qu’ergothérapeute ?
Non car il y a une communication importante, la répartition du travail marche bien comme ça.
- Le fait de ne pas travailler sur les soins personnels en ergothérapie est ce que tu
trouves ça normal car c’est quand même une partie importante de notre métier ?
L’AVJiste est une formation spécifique à cette population donc pour le bien être des jeunes, c’est
indispensable qu’ils soient pris en charge par des AVJistes. Cette formation est une nécessité si on
travaille auprès d’un public déficient visuel.
L’ergothérapeute a sa place, mais l’AVJiste a une place d’autant plus importante car elle est très
technique et très spécifique. C’est un plus si l’ergothérapeute est formée à l’AVJie.
9) Selon vous, quel est l’apport de l’ergothérapie auprès des personnes déficientes visuelles
durant l’adolescence ?
En tant qu’ergothérapeute, on s’occupe surtout des troubles associés car l’autonomie c’est plus
les AVJistes. En ergothérapie on met en place les pré requis à l’AVJ : les manipulations, la
dextérité, les découvertes sensorielles…
ANNEXE 5
Ergothérapeute AVJiste 1 :
Age : 32 ans
Année d’obtention du DE ergo : 2002
Année d’obtention du DE AVJiste : 2006
Nombres d’années auprès de personnes déficiente visuelle : depuis 2004
Parcours antérieur : Remplacement en fonctionnel, rééducation personnes âgées et adultes
fonctionnels
Population prise en charge : de 6 à 59 ans ; 6 à 20 avec handicap associé ; DE 18 à 59 ans sans
handicap associé trop important
90% de non voyant, 10% de malvoyant ; chez les enfants, surtout des non voyants congénitaux
car je suis la seule ergo donc j’ai les cas les plus lourd ceux qui ont le plus de mal à se gérer au
quotidien.
2/3 de congénitaux et 1/3 d’acquis.
1) L’adolescence est-elle une période où la prise en charge en ergothérapie vous semble
indispensable ? Pourquoi ?
Non parce qu’à chaque étape il y a un travail d’autonomie spécifique et indispensable, et si celui
de l’enfance ou de la petite enfance n’est pas fait, on arrive à l’adolescence et on n’aura pas les
prés requis d’avant
- Même si il faut que la PEC soit précoce, pensez vous qu’il est judicieux de la renforcer au
moment de l’adolescence
Pas de manière catégorique pour tout le monde mais plus au cas par cas. Pour certains oui, pour
d’autres pas forcément. Par rapport au projet de vie des enfants et à comment ils vivent leur
adolescence, à l’adolescence il se passe beaucoup de choses et certains sont plus ou moins
disponibles à un moment donné pour apprendre leur gestes d’autonomie et celui qui est trop
préoccupé par ses problèmes familiaux, sa problématique scolaire j’ai finalement qu’un tout
créneau cognitif chez eux parce qu’il y a pleins de choses qui les perturbent autour et eux il faut
que je les vois plus souvent que d’autres parce qu’ils intègrent moins vite.
- Est-ce que ce sont les adolescents avec handicap associé que tu dois voir plus souvent à
cette période ?
Non, car l’adolescence du handicap associé est très particulière, elle passe inaperçue. Toutes les
préoccupations d’un adolescent classique les atteignent moins ; ça va bien avec leur parents, avec
leur copains, tout est beau dans leur monde, après ce n’est pas le cas pour tous.
- Mais comment vivent-ils les changements corporels ?
Ça dépend mais pour certains, ces changements corporels comme la sexualité n’apparait pas pour
eux alors que si parfois cette sexualité pose questions à d’autres ; ça dépend des jeunes.
2) Les prises en charge en ergothérapie sont-elles quotidiennes? Tous les jours, plusieurs
fois par semaine ? Combien de temps durent-elles?
Prise en charge hebdomadaire par manque de temps, bihebdomadaire si j’appuis fortement
ma demande. Elles durent une heure.
3) Elles se présentent sous forme de mise en situation dans l’environnement de l’adolescent
ou plutôt sous forme analytique en salle d’ergothérapie?
Si c’était écologique ce serait à la maison et il y a beaucoup d’interne chez nous, donc c’est
écologique dans leur milieu d’internat. Je m’attache beaucoup à faire les deux : les prés requis
sont travaillés en salle. Une fois que qu’ils sont acquis, on apprend le geste en milieu protégé
dans ma salle, quand ça marche bien dans ma salle on monte sur les étages dans le lieu de vie et
on fait en sorte de l’inclure dans le quotidien et quand ça marche là je fais en sorte de l’inclure
dans le milieu familial donc soit en me déplaçant, soit avec des liens avec la famille par téléphone
par mail selon la relation que j’ai avec la famille. Un jeune qui habite à Marseille ça c’est fait par
téléphone e la mère se déplaçait parfois pour voir elle comment ça se passait mais aller sur le lieu
de vie c’était compliqué.
- Comment les acquis sont-ils transposés dans la vie du jeune ? Comme tu m’as dis tu les
travailles en salle ensuite tu les transposes dans le milieu de vie et après tu vois avec la
famille mais est ce que tu travailles avec d’autres professionnels pour les transposer ?
Avec les éducateurs par la force des choses. D’abord dans la salle puis dans les étages puis avec
la famille c’est en le séquençant énormément ; pour certains jeunes, s’il n’y a pas besoin du
milieu protégé de mon bureau, on peut attaquer directement à l’étape 2 directement dans les
étages. Avec un handicap associé souvent il faut démarrer dans mon bureau au calme où ce
séquençage est important. Dans mon bureau il va y avoir vraiment le travail analytique travail
dissociation des doigts, la force… et le côté AVJ va pouvoir se faire directement dans la chambre
pour certains jeunes.
Une fois que s’est acquis dans mon bureau on passe dans les chambres, je regarde que ça marche
dans la chambre avec les nouveaux repères, une fois que ça marche dans la chambre avec les
nouveaux repères je fais le lien avec les éduc pour que ce soit repris au quotidien dans la semaine.
Une fois que ça marche au quotidien avec les éduc et le jeune et que les éduc n’ont pas besoin
d’être derrière et qu’ils nous disent que ça marche bien et qu’ils n’a plus besoin d’aide, là je fais
le lien avec la famille pour qu’il n’y ait pas d’apprentissage qui se fasse à la maison parce que ce
n’est pas le rôle des parents.
4) Rôle de l’AVJiste : Cette formation apporte-t-elle beaucoup de connaissances
supplémentaires par rapport à la formation d’ergothérapeute classique ?
AVjiste n’est pas un métier, c’est une spécialisation d’un diplôme de base. Cette formation est
très bien pour une personne qui débute auprès des déficients visuels car tu ne patauges pas. Moi
je l’ai fait au bout de 3 ou 4ans où je travaillais déjà auprès des DV. Si tu es un peu impliqué dans
ton boulot tu cherches et les techniques tu les trouves. Je m’étais renseignée sur les techniques
pour manger, pour plier son linge, c’est quoi les prés requis donc la formation ne m’a pas apprise
grand-chose mais la formation m’a ouvert les portes du monde des AVJistes et maintenant je peux
échanger avec eux sur des points et ça c’est génial. Après je pense avoir un parcours particulier
parce que je m’étais déjà beaucoup renseignée et mon approche était parfois plus pertinente que
certains prof où quand un éduc spé vient nous parler de préhensions ce n’est pas toujours ça. J’ai
même assuré des cours dans l’année où je me faisais former. Cette formation oui quand on
démarre parce que j’ai passé des heures à comprendre pour quoi ça ne marchait pas, les prés
requis nécessaires… Par rapport à d’autres je n’ai pas découvert les choses de la même manière.
Les cours sont adaptés pour tous types de professions, j’ai même rencontré une personne en
formation qui avait un DEUG d’histoire médiévale.
- Pensez-vous que cette spécialisation soit adaptée à des professionnels qui ne sont pas
ergothérapeutes ?
Elle est spécifique quand la problématique est cognitive ou motrice. Quand la problématique est
psychologique ou sociale, l’ergo n’est pas le mieux placé et à ce moment là c’est bien que les
éducs qui sont sur le groupe soient formés à ça. Après clairement un psychomot je n’en ai pas
côtoyé mais je n’arrive pas à projeter l’intérêt. La formation d’AVJ te donne les compétences
pour accompagner une personne déficiente visuelles dans son autonomie. On ne parle pas de
handicap autre que le handicap visuel. Après il faut réfléchir pourquoi cette personne a du mal à
acquérir son autonomie. Clairement moi demain je perds la vue je vais avoir besoin d’un coup de
main mais ce ne sera pas le même coup de main qu’un jeune avec handicap associé. En fonction
des difficultés il y aura des professionnels qui seront indiqués et c’est vraiment les raisons de la
non autonomie du jeune qui doit orienter vers un professionnel ou un autre.
5) Dans quel domaine l’ergothérapie aide-t-elle le plus le jeune selon vous (soins
personnels, activités sociales, autonomie scolaire : loisirs, téléphone portable…) ?
Autonomie scolaire je ne le pratique pas donc je ne peux pas dire
L’adolescence c’est la construction de la personnalité et ça passe par tous ça. Tu peux pas avoir
un apprentissage par pic : être super fort en téléphone portable et te faire laver par ta mère parce
que socialement tu n’es pas bien avec les autres donc à l’école tu ne peux pas être bien sur les
acquisitions scolaires. De la même manière si tu es nickel sur toi et que dès qu’on te met un
ordinateur ou un téléphone dans les mains à 14 ans tu ne sais pas appuyer sur une touche ou
répondre au téléphone ben tu n’auras pas de copain et ça mettra à mal toute ta personnalité qui se
construit.
- Même si ces trois domaines sont imbriqués, dans quels domaines on intervient le plus
dans notre profession d’ergothérapeute ?
Alors l’autonomie personnelle pour un aveugle congénital c’est indispensable que ça passe par un
ergo à un moment donné.
L’autonomie sociale peut être moins parce que c’est plus facile pour monsieur tout le monde
explique l’utilisation du téléphone portable que de parler pipi et toilettes.
L’autonomie personnelle c’est le truc à ne pas rater. Les parents ils disent ils gazent à l’école donc
tant pis je l’aide encore à se laver mais je lui ai appris à téléphoner on joue bien avec le
téléphone.
Les autres sujets sont plus faciles à aborder par monsieur tout le monde ou par d’autres
professionnels moins aguerries dans le domaine
- Autonomie scolaire, adaptations à l’ordinateur ?
Il y a des profs et ici les adaptations à l’ordi ce sont les profs qui les font parce que le travail est
réparti comme ça. A l’institut la profession est mal servie je suis peu reconnue et c’est une
volonté institutionnel de n’embaucher qu’un ergo et de former des profs plutôt que d’embaucher
des ergos pour la réadaptation.
Normalement dans l’AVJ il y a les prés requis, les techniques et l’adaptation donc normalement
les prés requis devraient être traitées par l’AVJiste bien que ce soit très mal traité dans la
formation.
Le travail interprofessionnel est primordial tout seul on fait que dalle.
6) Selon vous, quel est l’apport de l’ergothérapie auprès des personnes déficientes visuelles
durant l’adolescence ?
Venir apporter une petite pierre à l’édifice qui fera que le gamin l’adolescent se construit de
manière uniforme c'est-à-dire que toutes les facettes qui font qu’une personnalité est équilibrée
soit bien abordée dans cette phase : qu’il y ait la scolarité, l’accès à l’autonomie, à la vie sociale,
qu’il y est tout qu’on ne fasse pas un puzzle et de ne surtout pas rater l’aspect autonomie qui
facilement à l’adolescence peut passer à l’as parce qu’il y a la scolarité, il y a des problèmes avec
la famille, il y a pleins de choses qui peuvent passer devant la petite autonomie. Quand tu es ado
la première chose que tu veux c’est être autonome ne plus dépendre des parents et pour un DV,
pour les handicaper il y a tellement d’autre questions qui se posent que ça peut facilement passer
à l’as.
Quelques précisions sur la formation d’AVJiste…
La formation AVjiste a commencé à Toulouse. Deux éducatrices spécialisées se sont rendu
compte du besoin de travailler des techniques autour de la DV et monte la formation d’AVJ. Des
éduc et des ergos viennent principalement se former puis les AVJistes ont demandé à la FISAF
(Fédération nationale pour l'Insertion des personnes Sourdes et des personnes Aveugles en
France) de reprendre la formation. Pour avoir plus d’argent, la FISAF accepte de plus en plus de
monde de différents horizons ; pas de sélection au départ, personne n’a jamais été refusé et pas de
sélection à la fin : tout le monde valide la formation bien qu’il y ait un mémoire à faire et des
contenus de cours qui changeant régulièrement. Pour avoir un statut de DUFA (Diplôme
Universitaire de Formation pour Adultes d’AVJ) ils se sont mis avec la fac de sociaux où il devait
y avoir un certains nombre d’heure de sociaux donc sur une semaine il y avait à peu près la
moitié d’heure de sociaux avec un anthropologue, un prof de sociaux qui n’avait à mon sens pas
de lien avec la formation et la moitié d’heure des vrais cours d’AVJ. C’était dans toutes les
critiques cette fac de sociaux. J’ai été engagé pour donner quelques cours d’AVJ, et j’ai vu qu’il y
avait un manque de qualité, de reconnaissance des professeurs d’AVJ par rapport aux professeurs
de fac de sociaux et on voulait plus de temps pour ces formateurs AVJ. On a contacté la FISAF et
on leur a dit qu’on ne pouvait plus cautionner et de former des gens on est mal à l’aise de faire
parti de cette formation qui ne veut pas se perfectionner pour faire un enseignement de bonne
qualité. On n’a pas eu de réponses. L’année d’après la formation s’est fait sur un gros centre pour
DV où les professionnels du centre ont été obligé d’intervenir dans la formation. Ce système n’a
duré qu’un an. Chaque spécialisation basse vision AVJ et instructeur en locomotion ont leur
association différente de leur organisme de formation. Ces trois associations ont voulu mettre en
place un tronc commun et après des modules AVJ, basse vision ou instructeur en locomotion. La
FISAF a suivi l’idée mais il n’y avait plus de communication entre l’association des AVJistes et
la FISAF. Beaucoup de réunions ont eu lieu pour créer le contenu des cours, pour le tronc
commun et le contenu AVJ et tout le monde a participé à ça, la FISAF était en retrait mais était là.
La FISAF est un organisme privé et par cette organisation on peut penser qu’il perdait leur fric si
c’était pris en charge par un autre organisme de formation. Un jour en septembre la FISAF
proposé une formation complète sur la DV avec le contenu de ce qui avait été travaillé par tout le
monde. On n’a pas revu la FISAF au groupe de travail mais on n’avait pas signé de charte de
confidentialité et on a fait des courriers pour déplorer que la FISAF se soit octroyé le travail
commun. Depuis, ils proposent une formation polyvalente avec AVJ, BV, loco donc c’est
intéressant pour un chef d’établissement. Cette formation s’appelle TACS (technicien en
accessibilité et en compensation sensorielle). L’association AVJADV (Association des
rééducateurs pour l’Autonomie dans la Vie Journalière des personnes Déficientes Visuelles) est
allez voir la FAF (Fédération des Aveugles de France) qui s’occupe de la formation des
instructeurs en locomotion. Aujourd’hui il existe cette seule formation FAF spécialisée AVJ. Le
tronc commun existe, il va démarrer cette année avec la fac de médecine Paris V et après chacun
s’aiguille dans son domaine donc ça y est ça démarre et j’interviens dans cette formation.
ANNEXE 6
Ergothérapeute / AVJiste 2:
Age : 38 ans
Année d’obtention du DE ergo : 1996
Année d’obtention du DE AVJiste : 2000
Nombres d’années auprès de personnes DV : depuis 1998
Parcours antérieur :
- Foyer de vie pour adultes handicap moteur lourd évolutif
- Long séjour
- Adolescent déficient moteur/visuel, IMC
Population prise en charge : Travaille à mi-temps sur centre pour déficients visuels : prend en
charge les déficients visuels avec handicaps moteurs ou cognitifs associés de 7 à 18 ans.
A mi-temps dans un centre spécialisé d’enseignement secondaire (CSES) pour adolescents de la
4ème à la 2nde prend en charge des déficients visuels sans troubles associés.
1) L’adolescence est-elle une période où la prise en charge en ergothérapie vous semble
indispensable ou très nécessaire ? Pourquoi ?
Très nécessaire car il y a pleins de demandes qui émergent, un besoin en autonomie qui émerge.
Avant ils sont plus petits donc ils subissent un peu plus, il n’y a pas vraiment de demande de leur
part, il faut qu’ils en fassent donc ils en font et après à l’adolescence ils peuvent être demandeurs
de faire des choses au niveau cuisine, maquillage, et une jeune que je suis qui veut notamment
prouver à sa mère qu’elle est capable de faire de la cuisine toute seule. Et après de part l’âge, il y
a des choses que les enfants n’ont pas à gérer et que eux doivent gérer ou commencer à apprendre
à gérer comme par exemple l’argent de poche, le budget, savoir gérer l’argent que tu as, un petit
compte en banque et puis après comme on ne les prend plus, il faut qu’on les amène aussi à
savoir le faire.
-
Même si il faut que la PEC soit précoce, pensez vous qu’il est judicieux de la
renforcer au moment de l’adolescence ?
La prise en charge précoce ça c’est évident mais peut être qu’il y a des moments où faut savoir
faire des breaks dans la prise en charge et savoir reprendre à certaines périodes de leur
développement, et l’adolescence c’est une période importante. Il faut faire ce qu’il faut sur les
premières années concernant l’habillage, les techniques d’indépendance à table, et après revoir un
peu plus tard pour refaire un point sur des choses avec en perspective tout ce qui est départ,
installation pour les études, ils vont plus forcément être chez leur parents et vont devoir se
débrouiller tout seul donc c’est vrai que l’adolescence c’est une période clé pour ça.
Je prends en charge un jeune aveugle acquis sur le CSES très brillant sur son parcours scolaire
avec nombre de difficultés rencontrées par lui et par sa famille concernant l’apprentissage au
quotidien des déplacements et tout ce qui est compensation du handicap qui a été complètement
mis de côté. Moi je le voyais en AVJ, on faisait de l’AVJ, mais il intégrait pas du tout les choses
qu’on faisait et ne les transposait pas du tout au quotidien. Il a eu son bac, il est parti en école
d’ingénieur et ça n’a pas marchait parce qu’il n’était pas suffisamment indépendant pour gérer
tout les à côtés du scolaire, et ça n’a pas marchait à cause de ça. On n’arrêtait pas de lui dire que
s’il n’était pas capable de gérer, de faire ces choses là tout seul, même si au niveau scolaire ça
marche bien, ça ne va pas aller, ses copains vont pas l’aider et malheureusement on a eu la preuve
que ça ne peut pas marcher sans autonomie. Ce qui est compliqué c’est qu’à l’adolescence en
fonction de ce qui peut être acquis ou congénital, les acquis en fonction de l’âge où c’est apparu,
ça dépend où ils en sont dans leur période de deuil, l’acceptation, ce que nous on peut leur
proposer comme technique. En AVJ, ça va parce que c’est sur du quotidien, ce n’est pas de
choses que les autres vont voir à l’extérieur, mais on suit une élève là ça fait 6 ans qu’elle a une
déficience visuelle et la canne ce n’est pas possible elle n’arrive pas à surpasser l’utilisation de la
canne. La canne c’est marqueur de quelque chose ; marcher au bras de quelqu’un ça va mais
utiliser la canne ça peut être perçu comme stigmatisant. Après au quotidien on leur apprend des
techniques de compensation, mais il n’y a pas forcément besoin de matériel en fait, ou si il y a du
matériel ce sont des aides techniques qui sont chez eux qui restent dans le cadre privé et le regard
des autres n’intervient pas.
-
Vous me parliez de faire un break mais est ce que concrètement c’est réalisable parce
que l’habillage, le repas c’est long à mettre en place
C’est important pour éviter une saturation de la prise en charge. Ça dépend vraiment de la
population : avec des congénitaux ça va être long à mettre en place. Avec des jeunes qui
maîtrisaient déjà ces techniques là avant, ça ne prendra pas beaucoup de temps parce que les
gestes ils les ont déjà donc nous on va leur donner des repères suffisants pour qu’ils puissent les
refaire, peut être des techniques un peu différente pour que ce soit plus facile mais ça prendra
beaucoup moins de temps. Après sur un aveugle congénital ce sera très long ou disons que ça
peut être très long. Après il y a des moments où quand ils ont fait leur mix entre les techniques
qu’on leurs a apporté et ce que eux ils vivent dans le quotidien, du moment que le résultat est là,
peut être que faire un break et dire bon ben là visiblement tu n’as plus besoin de moi pour le
moment on s’arrête un peu et quand tu auras de nouveaux besoins qui émergent tu reviens, on fait
le point et on travaille là-dessus. On le fait au CSES, après on le fat parfois par défaut parce
qu’on n’a pas assez de temps de prise en charge et donc c’est un moyen de faire tourner les prises
en charge. Les enfants aussi sont à saturation, quand ils font la rééducation depuis qu’ils sont
gamins, arrivés ado, ils en ont marre donc leur proposer des arrêts ça peut être intéressant aussi.
2) Les prises en charge en ergothérapie sont-elles quotidiennes? Tous les jours, plusieurs
fois par semaine ? Combien de temps durent-elles?
Une fois par semaine, séance de trois quart d’heure.
3) Elles se présentent sous forme de mise en situation dans l’environnement de l’adolescent
ou plutôt sous forme analytique en salle d’ergothérapie?
Ici c’est particulier parce que je prends en charge avec handicap moteur associé, donc je travaille
sur le handicap moteur. Donc forcément le visuel est là et je le prends en compte, mais en trois
quart d’heure ici je travaille vraiment sur les troubles moteurs. Après ma double casquette me
permet de prendre en charge du visuel et du moteur et me permet de travailler tous ce qui est
quotidien en enrichissant ce travail là avec tout ce que j’ai appris de l’AVJ. C’est tout ce qui est
travail fonctionnel classique de rééducation avec du handicap moteur, en ajoutant à ça beaucoup
de travail sur la sensibilité au niveau exploration, travail sur des stratégies des recherches…, et
après des mises en situation cuisine. Je ne suis pas sur l’internat donc je ne fais pas tout ce qui est
toilette…. Comme on travaille bien avec l’autre AVJiste (éducatrice spécialisé), sur les jeunes
qu’elle suit elle peut aller sur l’internat donc je lui dis pour tel jeune est ce que tu peux regarder si
ça va ou pas et du coup elle me dit si il y a des choses un peu compliqué je les reprends après.
Les toilettes, la douche …, c’est elle qui le travaille avec le jeune.
4) Comment les acquis sont-ils transposés dans la vie du jeune ?
A travers l’AVJiste pour les gestes du quotidien et à travers les éducateurs ce n’est pas forcément
toujours le cas parce que nous on travaille avec eux en séance, mais les éducateurs ne sont pas
forcément toujours formés non plus par rapport au spécificité du handicap et aux techniques à
mettre en place. Les jeunes peuvent se retrouver en porte à faux en des éducateurs qui leur disent
de ne pas faire comme ça et nous les rééducateurs qui leur disent au contraire de faire comme ça.
Quelque fois on manque de coordination entre les professionnels pour dire avec un tel on travaille
là-dessus et c’est comme ça qu’il faut faire c’est comme ça qu’il sait faire c’est comme ça qu’il
faut le laisser faire.
-
Donc est-ce que vous allez voir les autres professionnels (éducateurs spécialisés)
pour leur dire on a fait ça il y arrive bien comme ça donc il faudrait le travailler au
quotidien.
Quand ça pose problèmes parfois avec certains cas quand ça devient compliqué on le fait, mais
sur ceux avec lesquels il n’y a pas vraiment de difficultés on compte plus sur les jeunes qui euxmêmes vont mettre e place tous seul que sur les éducateurs. Ce serait intéressant aussi de montrer
aux familles comment le jeune sait faire les choses et qu’il sait les faire surtout parce que j’ai une
maman qui est venue c’était la première fois qu’on se rencontrait, et on parlait du quotidien de
l’enfant avec handicap visuel et moteur et je lui ai montré quelques techniques qu’il savait faire
mais qu’il n’appliquait pas à la maison par manque de temps c’est vrai que ça lui demande des
efforts donc du coup c’est plus facile que ce soit les parents qui fassent donc tous les deux on a
montré à la maman ce qu’il était censé savoir faire qu’il avait un peu oublié en ne pratiquant pas
et la maman a vu et a su reprendre à la maison après avec lui en lui disant mais non c’est pas
comme ça.
La famille a un rôle clé dans l’accompagnement vers l’autonomie du jeune. Après on n’a pas
assez de relations concrètes avec les familles pour leur dire pour les repas par exemple c’est plus
facile si on fait comme ça et comme ça, mais on n’a pas de temps pour ça ; c’est avec le jeune
qu’on travaille donc du coup on n’a pas de temps.
-
Vous travaillez avec des jeunes à partir de 7 ans donc s’il n’y a pas de troubles
associés ils ont les capacités cognitives pour intégrer ce que vous leur apprenez
Moi le plus petit que j’ai, je travaille pas dut tout sur le quotidien avec lui, non pas qu’il n’y ai
pas de besoin, mais il y a des besoins plus importants et il ce débrouille pas mal au quotidien. Je
travaille l’informatique voir quelles adaptations il lui fallait sur l’ordinateur mais ça fait parti du
quotidien aussi car au niveau scolaire c’est son quotidien à lui. C’est la grande différence entre
l’ergo et l’AVJiste. Ici, l’AVJiste ne fait pas du tout d’adaptation informatique, donc tout ce qui
est équipements informatiques, logiciels adaptés c’est l’ergo qui s’en occupe.
-
Justement l’ergothérapeute non AVJiste me disait que c’était vous qui faisiez souvent
tout ce qui est matériels adapté dont l’informatique quand vous preniez les enfants en
AVJ. Que s’il n’y avait pas de prise en charge AVJiste, là c’est l’ergo qui s’en
occupait.
On ne fait pas du tout d’adaptation informatique en AVJ. Tout ce qui est matériel adapté c’est les
AVjistes après en fonction de qui les prend. Si un enfant que je prends a besoin d’adaptation c’est
moi qui le fais sous ma casquette d’ergo.
5) Rôle de l’AVJiste : Cette formation apporte-t-elle beaucoup de connaissances
supplémentaires par rapport à la formation d’ergothérapeute classique ? Cette
spécialisation est –elle complètement nécessaire pour la prise en charge des déficients
visuels ?
J’ai appris des techniques en AVJ que j’utilise pour les troubles moteurs et ça marche très bien.
Oui cette spécialisation est indispensable car en tant qu’ego on est très formés sur les prises en
charge individuelle, mettre en place des objectifs, faire des bilans on sait faire. Après tout ce qui
est information ophtalmo en ergo tout ce qui est en relation avec ça c’est indispensable et tout le
domaine pratique sur tout l’apprentissage du domaine de compensation du handicap. Chaque
activité du quotidien, on peut appliquer quasiment une technique de compensation particulière et
on ne le voit pas du tout en ergo. Ces techniques paraissent logiques et tu les mets en place
ensuite parce que au fur et à mesure du temps que tu travailles tu verras que c’est plus facile de
faire comme ça que comme ça. Sauf que l’AVJ c’est des méthodes testées et prouvées et ça
marche bien, c’est applicable à beaucoup, après pour certains il faut adapter. Il y a des bases
carrés on apprend comment aborder une personne déficiente visuelle, comment lui proposer des
adaptations du logement, tout ce qui est aides techniques, marquage ; on sait lire en braille, on
sait faire des marquages en braille, et tout ça on ne l’apprend pas en ergo.
6) Pensez-vous que cette profession soit adaptée à des professionnels qui ne sont pas
ergothérapeutes ?
Oui aux éducateurs sans problèmes. Les ergos ont une population qui est déjà en prise en charge
directe avec les personnes concernées, en prise en charge d’un côté ou rééducatif ou éducatif. Je
sais que c’est une formation avant qui était réservée ergo et éducateurs. Depuis quelques années,
ils ont ouvert à d’autres professions par exemple assistante sociale ou autres. Je ne remets pas en
cause du tout leur compétences, mais je pense qu’en tant qu’éduc ou ergos on est déjà formé à
quelque chose, les assisatnte sociale n’ont pas les mêmes bases.
-
Avez-vous déjà travaillé avec des AVJistes autres qu’ergo ou éduc spé ?
-
Vous sentez vous complémentaire entre une AVJiste ergo sur un versant rééducatif et
une AVJiste éduc spé sur un versant plus éducatif?
Non
Oui car on n’a pas la même façon de travailler, de voir les choses. Moi ça reste plus sur les gestes
et l’apprentissage des gestes, et elle c’est plus global je ne sais pas comment l’expliquer. Moi je
me situe en tant qu’ergo formée sur le quotidien avec les troubles moteurs, et ma casquette d’AVJ
me permet d’adapter mon travail d’ergo aux troubles visuels. C’est ce qui a été compliqué de
comprendre pour les autres professionnels : qui je prends, pourquoi je les prends et qu’est ce que
fait l’ergo par rapport à l’AVjiste. Ils ne comprenaient pas qu’en ergo on travaille sur le quotidien
avec le moteur, ça fait parti de notre boulot, ils avaient du mal à dissocier ergo/AVJIste ça a été
super compliqué et je ne suis pas sur que ce soit clair pour tout le monde.
-
J’ai aussi eu du mal à voir la différence c’est pour ça que je suis allée voir
l’ergothérapeute non AVJiste qui m’a expliqué que de son point de vue, les AVjistes
s’occupaient des soins personnels et l’ergo s’occupait de mettre en place les prés
requis au niveau sensoriel, sensibilité nécessaires à ces AVJ. Les ergos font donc plus
un travail analytique qui était transposé ensuite dans les AVJ.
Oui et de a même façon, pour un enfant si l’AVJiste non ergothérapeute voit si il y a un
dysfonctionnement de dissociation ou quelque chose comme ça pour faire les lacets par exemple,
elle va nous solliciter pour qu’un bilan soit fait en ergo pour voir ce qui se passe et ce qu’on peut
mettre en place comme adaptations et comment elle elle peut adapter sa façon de faire avec ces
difficultés là. Donc c’est vraiment des échanges dans les deux sens entre ergo et AVjiste.
Pour bien faire la différence, là où j’ai fait mon stage d’AVJ durant ma formation, l’AVjiste
s’occupait de tout ce qui est quotidien toilette, habillage, argent, repas… et les ergos elles avaient
une salle où elles faisaient tous ce qui était activités manuelles vannerie… pour travailler la
dissociation notamment et il y avait tout un côté travail de sensibilité car c’était surtout des acquis
sans handicap associé qui allaient là bas, pour développer le sens tactile compensatoire. La
différence entre es deux professions était vraiment claire et limpide, chacun avait son rôle AVJ
quotidien et ergo motricité fine, dextérité, sensibilité.
7) Dans quel domaine l’ergothérapie aide-t-elle le plus le jeune selon vous (soins
personnels, activités sociales, autonomie scolaire…) ?
Soins personnels :AVJiste
Plus au niveau de l’autonomie scolaire car nous sommes formées sur tout ce qui est adaptations,
matériels informatiques, logiciels spécialisés. Là sur le SESSAD c’est arrivé quelque fois qu’on
nous demande un bilan ergo pour préconisation de logiciel informatique sur des jeunes sans
forcément de troubles associés. Ici c’est plutôt autonomie scolaire, après dans certains centres les
AVJistes veulent pas être cantonnés au niveau du quotidien, sortir un peu de ce côté-là soins
personnels et ils prennent en charge tout ce qui est scolaire utilisation des outils informatiques
tout ça.
Au niveau de l’autonomie dans les activités sociales tout ce qui est loisirs…qui s’en
occupe le plus ?
Ce sont les éducateurs. Après on peut être sollicité sur une activité particulière que voudrait faire
le jeune et savoir si c’est possible ou pas ou sur l’adaptation technique de jeux.
-
Et pour l’adaptation du téléphone portable pour avoir une puce pour téléphone
parlant par exemple ?
Ça dépend de qui les suit : si c’est l’AVJiste c’est elle qui s’en occupe, sinon ça peut être l’ergo.
Après les professionnels autour solliciteront plus l’AVJiste spontanément, car ils savent que nous
sommes spécialisés dans la déficience visuelle.
-
8) Selon vous, quel est l’apport de l’ergothérapie auprès des personnes déficientes visuelles
durant l’adolescence ?
Le rôle de l’ergo c’est cette approche individuelle de la personne avec toutes les notions qui sont
applicables de déficiences-incapacités-situation de handicap avec prise en charge globale avec
l’environnement, c’est un plus que nous apporte notre profession de base. On est plus à l’affût
des troubles moteurs au niveau motricité fine ou autre que quelqu’un qui ne le repérerait pas
forcément et qu’on pourrait un peu creuser. Après sur des visuels purs, on ne travaille pas de la
même façon avec l’AVJiste non ergothérapeute, mais il n’y en pas une qui travaille mieux que
l’autre. On ne peut pas dire que l’ergo AVJiste travaille mieux que l’éduc AVjiste mais on
travaille différemment, on n’a pas la même approche. Nous on a une approche plus carrée, plus
cartésienne avec tous les bilans qu’on fait et l’apprentissage qu’on a eu sur la façon de mener et
de mettre en place une prise en charge, les éducateurs n’ont pas ce côté bilan, ils le font pas, ce
n’est pas leur manière de travailler ils ont des prises en charges plus globales. Après l’AVJiste
éduc spé utilise un bilan très carré et validé. On se sert beaucoup de bilans en AVJ, même s’ils
sont plus informels, mais qu’en on est éduc ils ont pas du tout ce qui est bilan car ce n’est pas
dans leur grille de compétences.
La mise en place des objectifs à partir des bilans est spécifique à notre profession ; après avec le
temps ça s’égalise, les éduc AVjiste acquièrent cette démarche aussi. En effet, dans la formation
AVJ, on apprend aussi à faire des bilans et à en tirer des objectifs mais nous on arrive déjà avec
ça.
- Vous travaillez beaucoup avec les éduc ici l’AVJiste avec qui d’autres ?
Les kinés, beaucoup avec les orthoptistes, avec les enseignants pour le positionnement en classe
ou l’accès à l’informatique mais de manière ponctuelle.
Pour moi en tant qu’ergo sortant de l’école, on n’est pas du tout formé à la prise en charge des
déficients visuels, on peut travailler sur ce qui est sensoriel, sensitif mais c’est tout. C’est pas
parce qu’on va faire deux jours où on voit quelques aides techniques qu’on est formé à ce public.
Quand on fait la formation d’AVJiste on se rend compte qu’on est pas du tout formé à tout ça.
Les aides techniques visuelles, le braille on peut pas l’inventer, faut l’apprendre. Pendant la
formation AVJ on est beaucoup sous bandeau pour comprendre les difficultés, et on apprend aussi
la passation de consignes. Ici ils font des journées sensibilisation pour le personnel avec AVJ,
repas bandeau, locomotion et un peu d’orthoptie. Dans le CSES où je travaille ils ne le font pas,
et du coup parfois les éducateurs en arrivent à dire des absurdités où c’est limite de la
maltraitance parfois, donc il n’y a que en ce mettant en situation qu’on se rend compte des
difficultés.
Résumé
L’adolescence est une période où le jeune est en recherche accrue d’autonomie. Il voit
son corps changer et devenir adulte et commence à vouloir exister par lui-même en accédant
à une certaine indépendance pour ensuite devenir autonome. Cette période est d’autant plus
compliquée chez un adolescent porteur d’un handicap. En effet, aux questions classiques
d’un jeune se rajoutent celles du devenir de cet adolescent handicapé dans une société qui,
malgré ses efforts, peine à intégrer les personnes en situation de handicap. Une personne avec
un handicap visuel devra d’autant plus s’adapter pour être autonome dans un monde où tout
semble être fait pour les voyants. L’ergothérapeute qui mettra tout en œuvre pour que la
personne en situation de handicap accède à un maximum d’autonomie, semble être le
professionnel qui peut aider et mener l’adolescent dans sa quête d’autonomie.
Il m’a paru intéressant de mettre en relation l’ergothérapeute et l’adolescent déficient visuel
autour d’un même but : parvenir à être autonome au quotidien.
Mais, d’autres professionnels spécialisés dans la déficience visuelle interviennent auprès de
ce public. Sachant que nous sommes très peu formés à ce handicap, la prise en charge en
ergothérapie est-elle importante chez un adolescent déficient visuel ? Dans quelle mesure ?
Dans ce mémoire, nous réfléchirons à ces questionnements ainsi qu’à bien d’autres.
Mots-clés :
Adolescence-Déficience visuelle-Ergothérapie-Autonomie-Travail interprofessionnel-AVJiste