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© Les Dernières Nouvelles d'Alsace - 08/04/2007 - Droits de reproduction et de diffusion réservés
Culture et loisirs
Colmar / Vendredi saint aux Unterlinden
Les fortes « Paroles » du
quatuor Fratres
Un grand Quatuor du passé par un quatuor de grand avenir : intense moment
musical et spirituel, vendredi aux Unterlinden, avec le quatuor Fratres dans
Les sept dernières paroles du Christ en croix de Haydn.
A quelques jours d'intervalle, Colmar aura donc vécu deux interprétations
également exaltantes de ce chef d'oeuvre protéiforme : après sa version vocale,
proposée tout récemment au Théâtre Municipal par le quatuor Florestan et quatre
artistes des Choeurs de l'Opéra national du Rhin, c'est sa version pour quatuor à
cordes qui était à l'affiche du traditionnel concert du vendredi saint à la chapelle des
Unterlinden.
Pour la petite histoire, cette soirée confiée au quatuor Fratres marquait le 220e
anniversaire, jour pour jour, de la création de l'oeuvre. C'est en effet le vendredi
saint 6 avril 1787 que retentit pour la première fois, en l'église de Santa Cueva, cette
commande musicale d'un chanoine de Cadix : précédés d'une Introduzione
dramatique et concise, et débouchant sur un saisissant Terremoto (tremblement de
terre) final, ces sept Adagios devaient non seulement permettre de méditer les « sept
dernières paroles » de la Passion, mais aussi laisser à l'évêque, après lecture et
commentaire de chacune d'elles, le temps de quitter la chaire, puis d'y retourner
après s'être prosterné devant l'autel.
Des cordes passionnantes
Ecrite pour orchestre, l'oeuvre connut rapidement une déclinaison pour quatuor à
cordes, signée Haydn : celle-là même qui a retenti vendredi soir à la chapelle des
Unterlinden, sous les archets du quatuor genevois Fratres.
Diplômé du Conservatoire supérieur de musique de Genève, ce jeune quatuor a été
fondé en 2000 par les violonistes Timur Yakubov et Nicolas Penel, rejoints par la
suite par l'altiste Laurent Galliano et le violoncelliste Matthieu Rouquié. Conseillés
par des membres des Hagen, Ludwig, Bartok, Borodine, par Sigiswald et Bartold
Kuijken aussi, ils ont à leur actif des prestations fort remarquées à Bruges, Weimar
et Santander, laissant pressentir ce qu'a confirmé leur concert colmarien : à n'en
point douter, voilà un quatuor dont on reparlera dans les années à venir !
Car tout, dans leur interprétation, n'est que sobre élégance et constante musicalité :
sonorité prenante des cordes en boyau, phrasés constamment éloquents et expressifs,
accentuation toujours judicieuse, pertinente gestion des tempi et contrastes, et
capacité étonnante à varier à l'infini les climats, de l'inquiétude à l'apaisement et du
doute à la sérénité.
Ardeur et intériorité
« La merveille de la musique, c'est de n'être que mouvement », disait César
Geoffray. C'est bien ce qu'a ressenti, à Colmar, un public intensément recueilli tout
au long d'une lecture extraordinairement vivante, mouvante, colorée, sans le moindre
recours aux effets d'estrade, sans la moindre tentation d'une vaine virtuosité.
Familiers d'un univers haydnien qu'ils explorent assidûment, les Fratres en dosent
avec un art consommé chaque note, chaque phrase, chaque silence même : il en
résulte une interprétation à la fois plastique et dense, ardente et raisonnée,
passionnément suivie.
Rehaussé par les lectures brèves mais intenses du comédien strasbourgeois Jean
Lorrain, ce grand moment de musique à l'ombre du Retable s'est doublé, pour
beaucoup, d'un grand moment de spiritualité. Longuement applaudi, il n'a pas connu
de bis, à juste titre d'ailleurs : que peut-on décemment ajouter, lorsque tout est
accompli ?
Denis Lustenberger
Édition du Dim 8 avril 2007
Page imprimée depuis l'adresse:
http://www.dna.fr/local/culois/20070408_DNA008755.html
Le quatuor Fratres, familier de l'univers haydnien. (Photo DNA- Gil
Michel)
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