Japon - Exorciser ses peurs \(nucléaire\)
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Japon - Exorciser ses peurs \(nucléaire\)
Le Japon: Utiliser l’art pour exorciser sa peur du nucléaire Liste des cinq œuvres • • • • • Pluie noire (un extrait à choisir) Gen d’Hiroshima Summertime blues Rêves : « Le mont Fuji en rouge » Naruto Chacune de ces œuvres peut être choisie comme œuvre principale. Elles sont présentées par ordre chronologique. Pluie noire Extrait 1: Moi aussi, cela m’intriguait de voir les traverses des rails brûler ou fumer par places à mesure que nous avancions, ainsi que des poteaux électriques qui fumaient par le milieu ou le bout. L’ennemi avait sûrement lancé une bombe incendiaire. Pour vérifier cette hypothèse, je me suis mis à piétiner une traverse qui brûlait pour l’éteindre, et tâcher, à plat ventre, de la sentir, puisqu’on disait que les bombes incendiaires répandaient une puanteur bizarre : mais cela sentait seulement le bois brûlé. Tout était incompréhensible. En me relevant, j’ai aperçu un énorme cumulus qui ressemblait, pour la texture, à celui qui s’était formé lors du grand tremblement de terre e Tôkyô et sa région en 1923, dont j’avais vu des photos. Mais celui-là s’élevait bien plus haut dans le ciel, sur une jambe énorme, se déployant horizontalement à son faîte et grandissant à vu d’œil comme un champignon en train de s’épanouir. « Regarde, petit, le nuage ! » L’enfant, levant la tête vers le ciel, avait la bouche bée. Le nuage, qui semblait immobile, ne l’était point. Il élargissait sa tête branlante, tantôt à l’est, tantôt à l’ouest. Et chaque fois qu’il s’agrandissait, une part quelconque de son gros corps de champignon jetait un éclair et changeait de couleur, devenant rouge, violette, azur, verte. Et il grossissait toujours, bouillonnant sans trêve de l’intérieur vers l’extérieur. Sa jambe, colonne, liasse de voiles, gonflait aussi de plus en plus. Il semblait vouloir fondre sur la ville de Hiroshima. Je me sentais réduire. J’étais comme pétrifié. […] J’ai fixé le ciel attentivement : non, on n’y voyait pas de nuage de pluie, rien qu’une compacité granuleuse. Une trombe ? En tout cas, une chose bizarre que je n’avais jamais vue. Qu’allions-nous devenir si elle s’abattait sur nous avec ses grains ? La peur me glaçait. Et le monstre grandissait toujours d’instant en instant, vers le sud-est. Mes jambes, certes, étaient paralysées. […] Le nuage en forme de champignon ressemblait plutôt à une méduse, tout en paraissant avoir plus d’énergie animale, faisant trembler sa jambe, changer de couleur sa tête de méduse tour à tour rouge, violette, indigo, verte, et s’élargissant toujours vers le sud-est. Telle une eau bouillonnante, il continuait de surgir de l’intérieur de son sein, fougueux, forcené, comme pour fondre sur nous. « Est-ce que ce n’est pas un messager venu des Enfers ? Mais qui, dans cet univers, a donc le droit de faire surgir un monstre aussi inouï ? Est-ce que je m’en sortirai ? Et les miens ? Est-ce pour les sauver que je marche maintenant vers la maison ? Ou bien est-ce qu’en fin de compte je suis le seul à m’enfuir ? » Je titubais, je ne pouvais plus marcher. Je n’arrêtais pas de trembler. Extrait 2 : À l’est de la gare se trouvait le temple de Yokogawa : mais du sanctuaire intérieur, il ne restait debout que des colonnes. Quant au pavillon extérieur, il avait complètement disparu, ne laissant qu’une place rase. Sur le chemin qui longe le parvis, il y avait des gens, tous couverts d’une espèce de cendre ou de poussière et qui tous, sans exception, saignaient : de la tête, de la face, des mains, et ceux qui étaient nus, de la poitrine, du dos, des cuisses, de partout. Il y avait une femme dont la joue pendait comme un sac, et qui marchait les bras en avant, comme un fantôme. Un homme, aussi nu que lorsqu’on plonge dans la piscine d’un bain public, marchait en se baissant comiquement. Une femme en chemise courait, exténuée, en poussant des gémissements. Une autre, un bébé dans les bras, criait « De l’eau ! », et entre deux cris continuait d’essuyer les yeux de l’enfant, où était entassé quelque chose comme de la cendre. Un homme criant à tue-tête, des femmes, des enfants courant en hurlant de douleur, un homme assis au bord du chemin et agitant follement ses bras levés vers le ciel, une femme au seuil de la vieillesse priant avec ardeur, les mains jointes, auprès d’un tas de tuiles, un homme à moitié nu trottant et se heurtant à elle, et qui filait en jurant « L’idiote, la folle », un homme qui flânait, un autre en pantalon blanc qui rampait en sanglotant ha ha et avançait très lentement, voilà ce que j’ai vu en faisant cent vingt mètre à peine sur la route nationale qui va de la gare de Yokogawa au parc de Mitaki. Elle était aussi grouillante de monde que la place d’une gare aux heures d’affluence. J’ai suivi la foule. Alors, au milieu des cris de toute sorte, il y a eu une perçante qui m’a appelé « Monsieur Shizuma ! Monsieur Shizuma ! -— Ohé ! où êtes-vous ? ohé ! où êtes-vous ? » et en criant, je tâchais d’écarter les gens pour m’approcher du côté d’où venait la voix, quand quelqu’un m’a saisi le bras par-derrière et m’a embrassé en disant : « Monsieur Shizuma, je suis contente de vous trouver ! » : Mme Takahashi, la patronne des ateliers de peignage. Je ne sais par quel chemin elle était arrivée là. Elle m’a étreint de ses deux bras et s’est mise à trembler. Pour échapper à la cohue, je l’ai conduite par la main entre des ruines du bord de la route. Elle était pâle et tremblait encore visiblement. « Monsieur Shizuma, qu’est-ce que c’est que ce branle-bas ? — Nous avons été bombardés. — Où ? — Je ne sais pas. Mais en tout cas nous avons été bombardés. — Vous avez reçu un coup à la figure, n’est-ce pas ? Vous avez une plaie d’où la peau est partie, et d’une couleur changée. Ça doit vous faire mal. Ça a l’air de faire mal. » J’ai passé les mains sur mes joues et senti quelque chose de visqueux à la main gauche. J’ai regardé mes paumes : la gauche avait sur toute sa surface quelque chose comme des ficelles de papier violettes. J’ai repassé la main sur la joue et ça a encore collé sur la paume. Je ne me rappelais pas m’être cogné à la figure, et ne pouvais m’expliquer la chose. J’ai cru que c’était de la cendre ou de la poussière que j’avais enlevée comme de la crasse. J’allais repasser la main sur la joue quand Mme Takahashi m’a retenu le poignet : « Non, ne passez pas la main sur la plaie. N’y touchez pas avant qu’on y mette du médicament. Si vous y touchez, vous pouvez vous infecter. » • Titre de l’œuvre: Kuroi ame « Pluie noire » • Auteur: IBUSE Masuji (1898 – 1993) • Date de création: 1966 • Domaine: Arts du langage Ce roman, prépublié sous forme de feuilleton dans un magazine, se base sur des documents historiques pour romancer l’histoire de Yasuko, que l’oncle et la tante qui en ont la garde n’arrivent pas à marier car elle a été exposée à la « pluie noire », nom donné aux retombées radioactives de la bombe d’Hiroshima. Le roman se compose d’alternance entre différents journaux intimes pour relater les évènements tragiques survenus en août 1945. Gen d’Hiroshima • Titre de l’œuvre: Hadashi no Gen « Gen le va-nu-pieds » • Auteur: NAKAZAWA Keiji (1939 – 2012) • Date de création: 1973 – 1985 (édition Shûeisha) (seinen, drame) • Domaine: Arts du visuel Ce manga retrace le parcours de la famille Nakaoka à Hiroshima, du printemps 1945 au printemps 1953 en se centrant sur le bombardement atomique du 6 août 1945. L'histoire est basée sur la propre expérience de l'auteur, survivant du bombardement où il perdit son père, sa sœur et son frère cadet. Summertime blues • Titre de l’œuvre: Summertime Blues « Le blues de l’été » • Auteur: IMAWANO Kiyoshiro (1951 – 2009) • Auteur/Compositeur original: Eddie COCHRAN Jerry CAPEHART • Interprète: RC Succession (1968 – 1990) • Date de création: 1988, album « Covers » (Toshiba EMI) • Domaine: Arts du son L’album « Covers » devait sortir le jour de l’anniversaire de la bombe d’Hiroshima mais contenait des chansons dénonçant l’implantation de centrales nucléaires, ce qui a déplut à la maison d’édition. Le lobby de l’énergie nucléaire parviendra à faire stopper la diffusion de la chanson. Rêves: « Le Mont Fuji en rouge » • Titre de l’œuvre: Yume « Rêves » • Auteur: KUROSAWA Akira (1910 – 1998) • Interprètes: TERAO Akira: « moi » IGAWA Hisashi: l’ingénieur • Date de création: 1990 (drame) • Domaine: Arts du visuel Le réalisateur, âgé de 80 ans à l’époque, nous livre un film composé de 8 courts-métrages représentant chacun un de ses « rêves ». Il aborde dans chacun une thématique qui lui est chère. Dans celui-ci, il nous livre ses angoisses sur la pollution et sur les dangers du nucléaire. Naruto Jiraya : Nagato : Jiraya : Nagato : Jiraya : Nagato : Jiraya : Nagato : Jiraya : Nagato : Jiraya : Nagato : Jiraya : 1 Et on peut savoir ce que tu te proposes de faire ? Mettre un terme à ces guerres absurdes qui déchirent le monde. N’est-ce pas l’œuvre d’un dieu ? Alors, pourquoi rassembler les bijûs1 ? De toute façon, vous allez mourir. Je peux bien vous révéler mon véritable but. Grâce aux pouvoirs des démons, je vais mettre au point une technique dévastatrice capable de rayer un pays de la carte instantanément. Une arme à la puissance inégalable, en somme. Et c’est comme ça que tu te proposes de mettre un terme aux conflits ? en les généralisant, partout ? Les pays sont toujours en train de guerroyer… Quel moyen plus expéditif utiliser pour les arrêter, maître Jiraya ? C’est ce que je te demande, justement ! Réponds à ma question ! Il suffit de doter toutes les parties de l’arme ultime. Elles cèderont immanquablement à la tentation de l’employer. Je ne te suis pas ! Si des centaines de millions de personnes viennent à disparaître… ce qui restera d’humanité vivra dans la terreur. Les peuples, les nations… le monde connaîtra la souffrance !! Alors, c’est cette souffrance qui deviendra force de dissuasion et qui ramènera la paix. Le monde est encore dans une phase relativement stable, au début de son évolution. Mais les souffrances le feront progresser à grands pas. Comme moi jadis. Pour que le monde évolue, pense et marche… il faut qu’un dieu le guide. Car il est encore si jeune. Et tu songes à lui infliger des souffrances infinies pour son bien ?! C’est donc ça, ton but ? Exactement. Je suis un dieu pacificateur. Au moins, tu as développé ton sens de l’humour. Bijûs ou démons à queues : ensemble de 9 démons ayant respectivement 1, 2, 3, …, 9 queues, possédant une puissance phénoménale et enfermés chacun dans le corps d’un hôte ou réceptacle. • Titre de l’œuvre: Naruto « Naruto » • Auteur: KISHIMOTO Masashi (1974 – ) • Date de création: depuis 1999 (éditions Shûeisha) (shônen de type nekkutsu) • Domaine: Arts du langage L’histoire se déroule dans un monde fictif de ninja. Jiraya, le maître du personnage principal, combat son ennemi Pain, un de ses anciens disciples. Au cours du combat, une pause se fait et Jiraya interroge Pain sur ses motivations et ses intentions.