Qui sera le plus intelligent ? Le compteur ou le copropriétaire

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Qui sera le plus intelligent ? Le compteur ou le copropriétaire
ARC / DOSSIER DU MOIS D’OCTOBRE 2010 / WWW.UNARC.ASSO.FR
Qui sera le plus intelligent ?
Le compteur ou le copropriétaire ?
Un décret a récemment été signé par le Ministre de l’Écologie (31 août 2010) pour
organiser le comptage intelligent des consommations électriques en France. Il se
structure autour de quatre axes :
1. il rend obligatoire l’installation de compteurs communicants (ou intelligents) ;
2. il « prévoit » une expérimentation (celle des fameux compteurs Linky) ;
3. il fixe le financement de la mise en place des compteurs ;
4. il en fixe le calendrier.
L’ARC, association précurseur et défenseur convaincue du comptage en copropriété,
devrait se réjouir du développement de ces compteurs. Il nous semble
malheureusement :
1. que l’obligation d’installation de ces compteurs est trop précipitée ;
2. que le décret ne garantit pas un comptage intelligent ;
3. qu’il fait inéquitablement porter le coût du dispositif aux usagers.
Pourquoi une telle précipitation ?
L’enjeu financier est élevé : pour le remplacement des 35 millions
de compteurs français, avec un prix de compteur compris entre
120 et 240 €, cela fait un marché de 4 à 8 milliards d’euros.
Les gestionnaires de réseaux RTE et ErDF sont évidemment très
intéressés par sa mise en place. Soulignons par ailleurs qu’ErDF
est aussi le fabricant des compteurs Linky.
Ce sont aussi les fournisseurs d’électricité (EDF, Poweo,
DirectEnergie…), qui sont probablement très pressés de proposer
des services complémentaires à ces compteurs - il faut s’attendre
à des offres complexes et coûteuses à l’image des offres des
téléphones mobiles.
Enfin, des mastodontes comme Google, Siemens ou IBM
attendent avec impatience la naissance de ces futurs réseaux,
Dans la suite de cet article, nous allons :
1. faire un rappel sur l’utilité attendue du comptage intelligent ;
2. puis établir la liste des critiques que nous émettons concernant ce décret ;
3. et détailler au fur à mesure les positions que nous défendons.
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I. A quoi sert le comptage intelligent
Au fait, qu’est-ce qu’un compteur communicant ?
En deux mots, le compteur communicant transmet en continu des
informations de consommation (heures d’utilisation, matériel en
fonctionnement) au gestionnaire et au propriétaire du logement.
Les compteurs intelligents semblent présenter, a priori, de nombreux avantages :
Pour les usagers :
les avantages se ramènent essentiellement à celui-ci : la fin des factures sur
estimation, avec pour corollaire une facturation plus juste et la fin des abus
des fournisseurs (mais pour remédier à ce problème, il existe d’autres
solutions que les compteurs intelligents !) ;
l’autre avantage souvent mis en avant, est l’accès pour les usagers aux
informations précises concernant leurs consommations, avec, d’après les
défenseurs des compteurs, une baisse attendue des consommations ; mais
nous verrons que, d’une part, dans l’état actuel des choses, cet accès est, en
fait, impossible dans de trop nombreux cas, et que, d’autre part, l’impact sur
les consommations sera probablement très réduit (s’il est perceptible !).
Pour les gestionnaires de réseaux (RTE, ErDF) :
traitement à distance d‘opérations qui nécessitaient auparavant le
déplacement d’un technicien ;
diminution des pertes d’énergie au niveau du réseau (transport de
l’électricité) ;
identification de défaillances du réseau ;
mieux intégrer l’apport, quand il sera important, de sources d’énergie
délocalisées (énergies renouvelables) au réseau ;
en coupant brièvement les appareils dont on peut décaler le fonctionnement
dans le temps, il y aura diminution des pics de consommation ; d’où une
baisse du risque de coupure dans les régions concernées (comme la
Bretagne) et aussi réduction des coûts de production (pour les producteurs) ;
du fait de l’ensemble de ces raisons, diminution des coûts de gestion.
Conclusion
qui va le plus bénéficier de la mise en place de compteurs communicants ?
o fabricants de compteurs ;
o fournisseurs de services (IBM, Schneider…) ;
qui va le plus bénéficier de la mise en place d’un comptage intelligent ?
o fournisseurs
o gestionnaires
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II. Principales critiques
Les problèmes que pose la démarche « expérimentale »
La démarche permettant de déterminer s’il est intéressant de mettre en place les
compteurs est la suivante :
1. on définit les résultats que les compteurs communicants doivent atteindre ;
2. on expérimente des solutions que l’on suppose pouvoir répondre aux objectifs
fixés ;
3. on analyse les résultats de l’expérimentation.
Si cette analyse conclut qu’il n’est pas intéressant de mettre en place des compteurs
communicants, soit on fait une nouvelle expérimentation pour tester de nouvelles
solutions, soit on abandonne le projet.
Et si l’analyse conclut qu’il est pertinent de mettre en place ces compteurs, on les
installe.
La démarche inscrite dans le décret est bien différente :
1. on fait une unique expérimentation, dont on ne définit pas les objectifs, en
testant un seul modèle de compteurs, sur un délai très court ;
2. on définit les spécifications des compteurs seulement après-coup ;
3. on les installe partout, quels que soient les résultats de l’expérimentation,
même s’ils sont catastrophiques !
Un équilibre économique profondément injuste
L’installation de ces compteurs va être financée par le TURPE (Tarifs d’Utilisation
des Réseaux Publics d’Électricité), tarif facturé aux clients. Pourtant comme on l’a vu
précédemment, les bénéficiaires directs du comptage intelligent ne sont pas les
usagers. Y a-t-il besoin de pointer à quel point cela est injuste ?
Confidentialité et vie privée
Les informations transmises par les compteurs intelligents peuvent être très précises.
Comme le rappelle la Cnil « les informations de consommation d'énergie
transmises par les compteurs sont très détaillées et permettent de savoir
beaucoup de choses sur les occupants d'une habitation, comme leur horaire
de réveil, le moment où ils prennent une douche ou bien quand ils utilisent
certains appareils (four, bouilloire, toaster…) ». Par la magie d’un décret qui se
voulait discret, voilà comment des entreprises privées et des pouvoirs publics vont
rentrer chez vous, en permanence, dans votre propriété privée, du jour au
lendemain.
Ces informations peuvent être transmises au gestionnaire, au producteur et au
propriétaire du réseau (cf. décret). Nous risquons d’être abreuvés de publicité ciblée !
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On comprend qu’il est important d’instaurer des garde-fous très sévères à ce niveaulà.
35 millions de compteurs communicants pour un comptage « bête » ?
Pour obtenir un comptage efficace, c’est-à-dire un comptage qui aboutisse à une
baisse des consommations d’énergie, un bon compteur ne suffit pas : il faut en plus
que quelqu’un le suive, et un système efficace de gestion des données. Ce n’est pas
parce que le compteur « cause » que l’usage qui est fait des informations qu’il fournit
est intelligent : il ne suffit pas de communiquer pour être intelligent !
Le compteur communicant est un outil, certes nécessaire pour arriver au comptage
intelligent, mais ne suffisant pas à lui seul à garantir ce comptage intelligent, adapté
aux besoins des gestionnaires et des consommateurs. D’autres aspects sont à
prendre en compte (gestion informatique à grande échelle…)
Malheureusement, le décret définit uniquement une obligation limitée de moyens
(l’installation de compteurs communicants) et pas d’obligations de résultats (objectifs
à atteindre par le comptage intelligent) ; il réduit le comptage intelligent au compteur.
Pourquoi les fonctions que doivent remplir les compteurs et celles que doit remplir le
comptage ne sont-elles pas définies par le décret ?
Ces compteurs sont-ils légaux ?
Nous nous posons de nombreuses questions concernant la légalité du remplacement
des compteurs actuels par EDF par les compteurs LINKY :
1. Les compteurs actuels étant installés dans les parties communes des
immeubles, leurs remplacements ne devraient-ils pas être soumis à une
autorisation d'AG ?
2. Du coup, ne devrait-il pas y avoir obligation de mettre en concurrence les
compteurs LINKY ?
3. De même, chaque utilisateur en son temps a souscrit un contrat avec EDF
pour la fourniture et la pose d'un type de compteur et de sa tarification – la
pose du nouveau compteur, ses nouvelles conditions tarifaires, ne devraientelles pas faire l'objet d'un avenant et d'un accord entre l'utilisateur et EDF ?
4. Comme évoqué précédemment, les informations confidentielles et
personnelles que pourraient transmettre ces compteurs, leurs poses et
conditions d'utilisation ne sont-elles pas susceptibles d'une déclaration et
d'une autorisation de la CNIL ?
5. Ces compteurs dits communicants, mais qui manquent de fiabilité, ont-ils été
testés et étalonnés, par quel laboratoire ?
L’origine du décret
Les défenseurs des compteurs justifient parfois son passage en
force en faisant référence aux directives européennes ; mais
n’oublions pas que la mise en place de ces compteurs n’est pas
imposée par ces directives ; d’autre part, quand les directives
évoquent le comptage « intelligent
é-0.294363(a)-4.33117(n)-4.33117(t)-21.1646(e)-4.330’nté-4.33117(a)-4.33117()-282.331(ê)-4.33117(t)-21.33
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III. Conclusion provisoire
Pour éclaircir l’ensemble des points évoqués, l’ARC va donc prochainement
rencontrer la Commission de Régulation de l’Énergie (voir le courrier que nous avons
adressé à la CRE : LIEN Abus n°2374 ) et a également sollicité une rencontre avec
ErDF pour approfondir l’expérimentation actuellement en cours des compteurs
LINKY.
Pour parfaire votre information, prenez connaissance du Décret n° 2010-1022 du 31
août 2010 relatif aux dispositifs de comptage sur les réseaux publics d’électricité.
http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000022765140&fastPos=1&fastReq
Id=74364081&categorieLien=cid&oldAction=rechTexte
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