Groom – Dossier pédagogique pour les 12

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Groom – Dossier pédagogique pour les 12
Groom – Dossier pédagogique pour les 12-­‐18 ans Groom, c’est quoi ?
Nouveau magazine dans le monde de la presse francophone, Groom est en réalité le cousin de
Spirou. Son but ? Décrypter l’actualité par la bande dessinée !
Deux fois par an, Groom se proposera de guider les petits et les grands enfants, de 8 à 88 ans,
à travers les méandres de l’actualité mondiale.
En kiosque dès le 7 janvier 2016, un an après les attentats de Charlie, le premier numéro de
Groom sera consacré à une rétrospective des événements qui ont marqué 2015. On y trouvera
ainsi des sujets graves ou sérieux tels que la crise ukrainienne, la COP 21, l’État islamique, les
attentats de Paris ou encore la crise des réfugiés. Mais aussi des faits culturels ou sportifs, tour
à tour étonnants, drôles ou touchants !
Groom en classe, quelle drôle d’idée !
Il y a un an, la liberté de la presse ayant été agressée, le Journal de Spirou réagissait en sortant
un hors série « Je suis Charlie », destiné à traiter, à chaud, des événements qui venaient de
survenir.
Si la dimension pédagogique n’avait alors pas été mise en exergue, nous nous sommes vite
rendus à l’évidence face au nombre de mails d’enseignants qui nous parvenaient : le hors série
avait facilité le dialogue en classe autour de ce sujet particulièrement délicat. Il avait permis
de briser le silence, mais également de faire réagir les enfants face à ce qu’ils voyaient et
entendaient autour d’eux. L’idée de créer un magazine d’actualité en bande dessinée a alors
germé. Et, avec Groom, nous avons relevé le défi de décrypter, à coups de crayons et de
stylets, ce qui survient dans le monde.
Car oui, Groom est un magazine qui aborde des sujets sérieux tout en demeurant moins
frontal que les médias traditionnels. Parce que les enfants et les adolescents risquent moins
d’être choqués par un dessin que par une photographie. Mais aussi parce qu’ils se sentiront
davantage concernés par un traitement de l’actualité qui, de prime abord, semble plus
accessible.
Groom n’a pas pour ambition d’apporter une vérité absolue, mais bien d’apporter des clés
pour comprendre l’actualité. Il désire enclencher une discussion essentielle, autant dans le
cadre familial que scolaire. Et c’est principalement pour cette raison qu’il mérite une place
dans votre classe !
Afin d’accompagner la lecture de Groom et son utilisation en classe, la rédac est heureuse de
vous offrir un dossier pédagogique centré sur le « dossier réfugiés » et écrit en collaboration
avec Marie-Christine Pollet, professeure de didactique à l’Université Libre de Bruxelles.
Bonne lecture et, surtout, bon travail !
1 1. Introduction
Pour ce dossier, nous avons choisi de nous centrer sur les thèmes des attentats et de la
migration, abondamment illustrés dans les pages de Groom.
Ils ont en effet marqué l’année 2015, non seulement par le caractère dramatique des
événements très concrets auxquels nous avons pu assister, mais aussi par le changement
profond qu’ils ont provoqué dans nos manières de concevoir le monde ou tout simplement de
vivre.
Le fond même de ces événements peut être très délicat à traiter en classe, et nous pensons
qu’il relève de la responsabilité de chaque enseignant de choisir d’en parler ou pas, de telle ou
telle manière, selon l’environnement scolaire dans lequel il se trouve et les élèves auxquels il
s’adresse.
C’est pourquoi, et bien entendu sans assimiler les événements dont il est question, nous
proposerons quant à nous de les aborder par le biais d’un phénomène qu’ils ont mis en
exergue : la peur. Qu’il s’agisse de ce que l’on peut appeler « la peur de l’autre » (qui resurgit
violemment à l’occasion des migrations) ou de la « terreur » provoquée par les attentats qui
nous ont frappés.
À partir de textes et documents de genres divers et de plusieurs époques (car la peur a traversé
les siècles), nous évoquerons :
-
la peur telle qu’elle s’exprime, par les mots qui la désignent et les objets sur lesquels
elle se focalise ;
-
la peur telle qu’elle est construite : « à chaud » par les médias qui rendent compte de
l’actualité, mais aussi beaucoup plus froidement, dans des intentions politiques ou
idéologiques par exemple ;
-
la peur telle qu’on l’analyse, car ce phénomène (a) fait l’objet de nombreux
commentaires, réflexions et recherches (notamment chez les philosophes, les
historiens, les sociologues, les psychologues et les spécialistes de la communication).
Les pistes didactiques qui suivent concernent des élèves entre 12 et 18 ans et proposent des
approches différentes en fonction de l’âge des étudiants. Elles nous semblent particulièrement
adéquates pour les cours de français, morale, sciences humaines, EPA, ou dans le cadre de
projets interdisciplinaires (impliquant notamment le cours d’histoire, la contextualisation
historique étant souvent nécessaire).
L’objectif n’est pas de fournir des cours ficelés et prêts à l’emploi, mais de proposer des idées
d’exploitation dans lesquelles les enseignants pourront puiser et qu’ils pourront adapter à leur
propre environnement, à leurs propres objectifs et à la construction de leurs propres séquences
pédagogiques.
Selon sa discipline, son public, le temps disponible, l’enseignant pourra soit puiser çà et là
l’une ou l’autre proposition, soit les articuler en parcours thématique.
2 2. Avant toute chose… : susciter une « réflexion définitoire »
Les mots « peur » et « terreur » recouvrent une multitude de réalités, de sentiments… et de
définitions possibles.
À la suite de quelques témoignages et/ou textes de presse (voir plus bas : « La peur telle
qu’elle s’exprime ») dans lesquels ces mots sont utilisés – voire surutilisés – pour, selon les
cas, exprimer un sentiment personnel, créer une connivence, frapper les esprits…, il peut être
intéressant, d’un point de vue méthodologique et langagier :
-
-
de demander aux élèves comment ils définiraient ces mots : c’est l’occasion de
montrer à quel point certains concepts, surtout ceux qui se réfèrent à des émotions,
sont extrêmement relatifs et par là même difficilement « définissables » au sens strict
du terme ;
d’opérer un retour réflexif sur quelques définitions de dictionnaires usuels (tels le
Robert et le Larousse), de dictionnaires plus élaborés (tel le Trésor de la Langue
française… disponible en ligne !), d’encyclopédies (et pourquoi pas Wikipedia), mais
aussi de sources plus anciennes (les entrées « peur », « terreur », « panique » dans
l’Encyclopédie de Diderot et d’Alembert sont consultables en ligne). L’objectif est ici
de montrer comment ces diverses définitions sont construites, explicitées,
exemplifiées… et d’insister ainsi sur la relativité de l’activité définitoire.
3. Plusieurs types de peurs et différentes manières de les aborder
La peur telle qu’elle s’exprime
1. La « peur de l’autre »
Nous proposons ici un parcours, mais chacune des étapes peut bien entendu être envisagée
seule.
Étape 1 :
Pour déclencher une réflexion et/ou une discussion à ce sujet, on peut partir d’articles de
presse qui relatent certains rejets face à l’accueil des migrants. Les pages 59 à 61, reprenant
les trois planches de « Terre fertile », sont tout à fait adéquates pour introduire ce sujet.
Après la lecture des trois planches en classe, le professeur peut demander à ses élèves de
réagir à chaud et relier l’histoire à des faits d’actualité dont ils ont connaissance. Pourquoi le
tyrannosaure interdit-il aux nouveaux dinosaures de s’installer ? De quoi a-t-il peur ?
Et, en Europe, pourquoi les habitants sont-ils effrayés par l’arrivée d’un grand nombre de
migrants ? Ces peurs sont-elles justifiées ou exagérées ? Suite au débat, la lecture des
planches « Voir la mer » des pages 62 à 64 ainsi que de l’interview de la page 65 pourront
prolonger la réflexion des élèves, les amenant à nuancer leurs réponses.
3 La question peut alors être davantage creusée par la lecture des articles suivants1 :
L’arrivée de migrants à Tournai : des emplois, oui, mais pour des Tournaisiens ?
http://www.nordeclair.be/1351551/article/2015-08-11/l-arrivee-de-migrants-a-tournai-desemplois-oui-mais-pour-des-tournaisiens
C’est vous qui le dites : refuser les migrants à Tournai, « c’est renier l’idéal socialiste »
http://www.lesoir.be/957308/article/actualite/belgique/2015-08-07/c-est-vous-qui-ditesrefuser-migrants-tournai-c-est-renier-l-ideal-socialiste
(commentaires et réactions de lecteurs)
Walcourt : réunion houleuse sur les réfugiés
http://www.lalibre.be/regions/namur/walcourt-reunion-houleuse-sur-les-refugies-video5630c17e35700fb930146328
Le badge, symbole sournois de la peur de l’autre
http://www.lesoir.be/1028163/article/debats/editos/2015-10-28/badge-symbole-sournois-peurl-autre
Face aux migrants, les Calaisiens entre rejet et soutien
http://tempsreel.nouvelobs.com/societe/20150811.OBS4028/avec-les-migrants-a-calais-lesanglais-ne-viennent-plus.html
L’objectif est ici d’identifier les raisons déclarées de la peur, les mots et expressions par
lesquels elle s’exprime, et, le cas échéant, de cerner l’argumentation mise en œuvre.
Étape 2 :
Dans le cadre du cours de français, on proposera ensuite des textes extraits d’œuvres
littéraires ou d’essais sur les thèmes de l’altérité, de l’identité, du contact/choc de cultures, du
multiculturalisme, du regard de l’autre/sur l’autre.
À titre d’exemple :
- Pour des élèves de 11 à 14 ans
Eldorado de Laurent Gaudé, Je t’enverrai des fleurs de Franck Andriat, Rue Josaphat de
Franck Andriat, Refuges d’Annelise Heurtier, Clandestins de Luc Baba, Ulysse from Bagdad
d’Éric-Emmanuel Schmitt, etc.
- Pour des élèves de 15 à 18 ans
1
Les articles proposés à travers ce dossier pédagogique sont donnés à titre indicatif. L’enseignant est évidemment libre de les utiliser ou non, de nombreuses autres sources étant disponibles sur le sujet. 4 Des Cannibales de Montaigne, Robinson Crusoë de Daniel Defoë, Le Misanthrope de
Molière, Micromégas de Voltaire, Lettres persanes de Montesquieu, Huis clos de Sartre, La
Controverse de Valladolid de Jean-Claude Carrière, Ce qu’il advint du sauvage blanc de
François Garde, Dans la mer il y a des crocodiles de Fabio Geda, Race et Histoire de Claude
Levi-Strauss, Identités meurtrières d’Amin Maalouf, La peur des barbares de Tzvetan
Todorov, etc.
NB : C’est peut-être l’occasion, pour le professeur de français, de faire figurer certains de ces
livres, notamment les essais, dans la fameuse « liste de lectures ».
Le nombre de documents dépendra évidemment des circonstances, mais l’idée est d’en varier
les genres et les époques.
En effet, l’objectif est ici de montrer d’une part l’historicité de la thématique, d’autre part les
manières de la traiter (l’exprimer, la mettre en scène, la mettre en perspective) selon les
genres (roman, théâtre, fable, essai...), les époques, les courants de pensée, les mouvements
littéraires et artistiques. Une contextualisation théorique à ces sujets sera d’ailleurs essentielle
à mener ou à vérifier.
Étape 3 :
Pour revenir à l’actualité, et pour amener à relativiser la « peur de l’autre » », on peut ensuite
proposer aux élèves des textes qui mettent en perspective la question de l’immigration, en
décrivent les motivations et les conditions dans lesquelles elle s’effectue, ou en rappellent
d’autres manifestations (plus anciennes, mieux connues, mieux acceptées…).
Dans un souci de compréhension et de mise en contexte, un retour préliminaire aux planches
des pages 59 à 64 s’impose. En effet, dans les deux histoires, la migration des protagonistes
est motivée par un événement, et ce à des époques bien différentes.
De nombreux témoignages sont disponibles en ligne : de « migrants » d’aujourd’hui, mais
aussi de personnes ayant vécu l’un ou l’autre exode, l’une ou l’autre fuite, en raison de
conflits ou de stigmatisations raciales :
Contribution « d’opinion » : Manuel Abramowicz, Les réfugiés ont aussi été belges !
http://www.lalibre.be/debats/opinions/les-refugies-ont-aussi-ete-belges55ef05733570b0f19e7da383
Article scientifique : Michaël Amara, « L’exode de 14. La fuite des populations civiles face
au tourbillon de l’invasion », Cahiers d’Histoire du Temps présent, n° 15, 2005.
http://www.cegesoma.be/docs/media/chtp_beg/chtp_15/chtp15_006_Amara.pdf
Texte de présentation d’un colloque : « Accueillir toute la misère du monde ». Les
migrations, des difficultés et des opportunités pour l’Europe. Visions d’historiens (UCL,
octobre 2015).
https://www.uclouvain.be/527762.html
5 2. La « peur », la « terreur »…
Les « événements » de novembre 2015, qu’il s’agisse des attentats de Paris ou du niveau
d’alerte maximale instauré à Bruxelles, ont créé une véritable psychose dans une très large
partie de la population. Le terrorisme a donc atteint son objectif puisque, par définition, il
s’agit de créer un climat d’insécurité, voire de panique, et de désorganiser la société.
Ici encore, nous proposerons un parcours, mais toujours avec la possibilité pour l’enseignant
d’en isoler l’une ou l’autre composante.
Étape 1 :
Pour amorcer la réflexion, et pour identifier quelques expressions et manifestations de la peur,
on se basera tout d’abord sur les planches « Terre fertile » des pages 59 à 61 ainsi que sur
les planches « Voir la mer » des pages 62 à 64. Dans les deux cas, les protagonistes sont
soumis à différentes formes de peurs. Quelles sont-elles ?
Pour poursuivre la réflexion, d’autres documents montrant la peur provoquée par les
événements ou, au contraire, la résistance que certains lui opposent peuvent être soumis aux
élèves.
Les attentats vus par mes élèves de Bobigny : peur, incompréhension et rires nerveux
http://leplus.nouvelobs.com/contribution/1450138-les-attentats-vus-par-mes-eleves-debobigny-peur-incomprehension-et-rires-nerveux.html
Après les attentats, rien à faire, j’ai peur
http://www.francetvinfo.fr/faits-divers/terrorisme/attaques-du-13-novembre-a-paris/apresles-attentats-rien-a-faire-j-ai-peur_1184769.html
Jusqu’à quand aurons-nous peur après les attentats du 13 novembre ?
http://www.huffingtonpost.fr/2015/11/21/peur-attentats-13-novembre_n_8601562.html
Après les attentats de Paris, les fans de rock ne veulent pas « céder à la peur »
http://www.lemonde.fr/attaques-a-paris/article/2015/11/14/apres-les-attentats-de-paris-lesfans-de-rock-ne-veulent-pas-ceder-a-la-peur_4810145_4809495.html
Voyage vers le « niveau 4 » avec les navetteurs du train Namur-Bruxelles
http://www.lalibre.be/actu/belgique/voyage-vers-le-niveau-4-avec-les-navetteurs-du-trainnamur-bruxelles-5654c5a93570ca6ff9276a56
Menaces terroristes : comment avez-vous vécu la semaine ?
http://www.lesoir.be/1054104/article/actualite/belgique/2015-11-26/menace-terroristecomment-avez-vous-vecu-semaine
6 Étape 2 :
Il s’agira ici tout d’abord de proposer un travail sur les mots et les expressions qui, dans le
langage courant – et aussi, pourquoi pas, familier –, peuvent désigner la peur dans l’une ou
l’autre de ses formes (par exemple : effroi, terreur, panique, angoisse, psychose, hébétude,
crainte, frousse, pétoche…).
La recherche et la comparaison de définitions (et des étymologies, le cas échéant) peuvent
accompagner une recherche d’occurrences de l’un ou l’autre terme dans tel ou tel contexte,
exemplifiant telle ou telle situation.
Un recueil de citations à propos de la peur peut encore faire l’objet d’un travail : oral, sous
forme de débat, ou écrit, sous forme de texte d’opinion ou argumentatif).
Pour la suite de cette étape, c’est un travail à plus long terme qui est évoqué ici, et destiné
particulièrement à des élèves du degré supérieur.
L’objectif sera de (faire) dresser, autant que possible, un « panorama de la peur » : les mots
pour la désigner, ses formes, ses manifestations, les différents angles (philosophique,
psychologique, historique…) sous lesquels on peut la décrire, l’analyser, l’exemplifier…
On proposera – en traduction française – le texte de Montaigne intitulé De la peur (Essais,
livre I, chapitre 17) qui, en dix points, décline des manifestations et des exemples de « peur » :
http://ddata.over-­‐blog.com/xxxyyy/1/20/77/12/word/Montaigne-­‐-­‐04-­‐-­‐Essais-­‐LI_ch_17_18_19-­‐
Philosopher-­‐apprendre-­‐mourir.doc. Pour ne pas en rester au 16e siècle, on proposera ensuite d’autres documents qui traitent de la
peur, à travers diverses manifestations et illustrations.
À titre d’exemple :
En quoi la peur conditionne-t-elle nos choix ?
http://www.accordphilo.com/article-en-quoi-la-peur-conditionne-t-elle-nos-choix111852426.html
La peur un moyen de faire obéir les hommes
http://www.liberation.fr/societe/2009/10/31/la-peur-un-moyen-de-faire-obeir-leshommes_591003
Dossier : la psychologie de la peur
http://www.podcastscience.fm/dossiers/2010/11/04/dossier-la-psychologie-de-la-peur/
Café philo : A-t-on raison d’avoir peur ?
http://cafes-philo.org/2011/05/theme-a-t-on-raison-davoir-peur/
7 Pour éviter d’imposer la lecture de Montaigne aux 11-14 ans, l’enseignant pourra proposer
des extraits de l’ouvrage de Franck Andriat : Rue Josaphat.
La peur telle qu’elle est construite
À la suite des attentats de janvier à Paris, mais aussi après les attentats de novembre et, en
Belgique, durant les quelques jours qu’a duré l’alerte de niveau 4, certains se sont insurgés
contre la manière dont la couverture médiatique « à chaud » a provoqué la panique, voire a
mis certaines personnes en danger.
À côté de cette question du traitement de l’information dans l’urgence, on sait aussi que
certains se sont emparés, à des fins politiques ou idéologiques, de l’émotion suscitée par les
événements pour construire – et profiter de – un climat tendu : peur de perdre son identité, sa
culture, ses valeurs, son travail, peur de se faire phagocyter, peur de se faire agresser, voler,
tuer…
Malgré leurs circonstances et intentions différentes, ces deux phénomènes méritent que l’on
fasse réfléchir les élèves aux manières dont la peur peut être construite.
Cette réflexion peut être amorcée par la lecture des planches « Terre fertile » des pages 59 à
61. En effet, le tyrannosaure joue sur le climat de peur et d’émotion des autres dinosaures
pour imposer ses idées et ainsi les rallier à sa cause.
« La fabrique de la peur » est, dans ce contexte, une thématique possible pour des travaux
de résumé et synthèse à faire réaliser par les élèves, individuellement ou en groupe, dont la
mise en commun permettra d’aboutir à une vision :
-
des enjeux, des conditions et des mécanismes du traitement médiatique de
l’information quasi en temps réel, et des effets que cela peut provoquer sur la
population ;
-
des enjeux et des mécanismes de construction de la peur par des hommes et femmes
politiques ou des idéologues.
Ce travail convient surtout à des élèves de la fin du secondaire et répond à l’exigence des
programmes concernant la capacité à synthétiser l’information dans un exposé cohérent, à
l’oral ou à l’écrit.
Dans le cadre de ce travail, l’enseignant fournira un dossier de documents qu’il aura lui-même
choisis pour leur pertinence, dont les élèves devront prendre connaissance, dans lesquels ils
devront sélectionner les informations utiles et dont ils devront rendre compte dans leur
synthèse. Ces documents seront de différents types :
-
8 articles de presse purement informatifs, relatant des faits concernant la thématique
dans l’un ou/et l’autre de ses deux aspects épinglés ici ;
articles de fond, « billets », textes d’opinion, articles de blogs, proposant une réflexion
sur ces phénomènes ;
-
articles scientifiques envisageant ces phénomènes dans une perspective sociologique,
psychologique, linguistique.
La peur telle qu’elle est analysée
La peur peut être considérée comme un phénomène, comme un concept, comme une émotion,
comme une construction, qu’elle soit psychique, historique, sociologique…
Elle peut donc être décrite et analysée scientifiquement dans divers champs de recherche
(psychologie, sociologie, anthropologie, histoire, science politique…)
Les discours sur la peur sont nombreux, et peuvent remonter à une époque lointaine (on a vu
plus haut que Montaigne y a consacré un chapitre de ses Essais).
Dans le cadre de la piste didactique évoquée ici, on ne tentera pas de faire – ou faire faire – un
point complet sur la question, mais d’amener les élèves à réaliser un travail de recherche :
-
relatif à un aspect particulier de la peur (le plus commode est que le thème précis soit
fourni par l’enseignant, mais l’élève peut le proposer de lui-même, à charge pour
l’enseignant d’en vérifier l’exploitabilité et de le valider) ;
-
amenant les élèves à trouver au moins trois articles et un ouvrage scientifiques
adéquats à sa thématique (notons qu’à la différence de l’exercice précédent, ce sont les
élèves qui cherchent des documents pertinents, mais cette bibliographie doit être
validée par l’enseignant) ;
-
amenant les élèves à rédiger, sur la base des sources trouvées, un exposé cohérent
correspondant à la thématique de départ (le sujet du travail). Cet exposé répondra aux
règles de la rédaction scientifique (notamment pour ce qui est de l’exploitation des
sources, de l’insertion de leurs contenus utiles dans l’exposé, de la notation des
références, etc.).
4. Pour conclure
On l’aura compris : le traitement de l’actualité est un travail au long cours. On pourrait donc
concevoir l’utilisation de Groom dans le cadre d’un projet interdisciplinaire, dans lequel les
professeurs de français, histoire, morale, sciences humaines pourraient articuler leurs apports
et leurs compétences quant à l’accompagnement des élèves, car – et on terminera sur ce point
– il est absolument nécessaire de prévoir un accompagnement régulier des élèves dans leur
approche de l’actualité et des médias. Si la volonté est bien entendu de rendre les élèves de
plus en plus autonomes, comme le recommandent les programmes, cela ne signifie pas pour
autant qu’il faille les lâcher dans la nature et, dans ce cas précisément, dans la « jungle des
discours ». Et c’est justement pour qu’ils ne se perdent pas que Groom sera toujours là.
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