dossier de presse exposition Pierre Huyghe

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dossier de presse exposition Pierre Huyghe
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Pierre Huyghe
Celebration Park
2 - 26 février 2006 : Prologue
10 mars – 14 mai 2006 : Exposition
Après le Prologue, Pierre Huyghe présente ici l’Exposition, « Celebration Park », avec
plusieurs grands projets récents: « Gates », une chorégraphie de portes ainsi que les
deux films « This is not a time for dreaming » et « A Journey that wasn’t », montré pour
la première fois en Europe.
Forme d’anticipation d’un parc que l’artiste envisage de construire, selon la référence
privilégiée qu’est l’Exposition universelle, « Celebration Park » échappe aux codes
museaux d’exposition définis par l’unité de contenu, de lieu et de temps. Il est significatif
pour l’artiste que ce projet se déroule aujourd’hui dans ce Musée construit lors de
l’exposition internationale de 1937.
« Gates », 2006, les portes gigantesques qui, durant le Prologue, délimitaient les
espaces - l’entrée du parc - en s’entrouvrant légèrement, s’animent désormais, pilotées
par un programme. Délivrées du seuil et flottant dans l’espace, elles tournoient dans un
mouvement lent et continu qui engendre tout à la fois une perte de repères et
l’expérience d’un sol mouvant : ni début, ni fin, ni intérieur, ni extérieur.
« Gates » invitent à un autre regard sur l’architecture à travers le film « This is not a time
for dreaming », 2004. Conçu autour d’un spectacle musical de marionnettes, ce film
traite de la commande passée à l’artiste par le Carpenter Center for the Visual Arts à
Harvard, construit en 1965 par Le Corbusier. Pierre Huyghe met en scène deux
situations parallèles : l’architecte au moment de la conception du bâtiment et lui-même
face à la réalisation du projet.
Inventant un ailleurs possible, le film « A Journey that wasn’t », 2006, résulte d’une
double expérience : en février 2005, Pierre Huyghe se rend en Antarctique en voilier,
selon le postulat d’une île inconnue, née de la fonte de la banquise, et d’une rumeur
voulant qu’une créature unique l’habiterait. Ce voyage d’exploration auquel plusieurs
artistes ont participé, dans une zone non-cartographiée, a donné lieu à un spectacle
musical à New York, sur la patinoire Wollman Ice Rink de Central Park : « Double
Negative ». Un orchestre symphonique y joue une partition originale, transcrivant la
topographie de l’île. Le film projeté ici plonge le visiteur dans une incertitude temporelle
et spatiale.
La plaque « L’île de l’Oisiveté », 2006, renvoie à l’île qui désormais figure sur les cartes
de l’Antarctique.
Visible à travers une ouverture dévoilant un lieu inaccessible, « Terra Incognita / Isla
Ociosidad », 2006, est née de l’association de l’artiste avec l’agence R&Sie(n),
architectes. Cette structure reprend le principe d’émergence de l’île, en évoquant son
relief : elle se déploie par l’extension en trois dimensions de la surface plane du sol de la
salle, en équilibre instable.
Aux abords de l’île, « One », 2006, animatronique présent dans le film, incarne la rumeur
de l’animal chimérique, à l’origine de l’expédition.
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Ponctuant le parcours, comme un préalable, les « Disclaimers », 2006, enseignes
urbaines en néon, énoncent leurs dénis.
Comme dans le Prologue on retrouve dans « l’aquarium » 1000 exemplaires d’un
agenda, empilés tels des lingots d’or. Evoquant les principes de l’Association des Temps
Libérés*, chaque ouvrage à la fois condense et étire la durée de « Celebration Park » en
mois, jours, heures, minutes et secondes, et rend sensible les temporalités subjectives
de chacun.
La série « One Year Celebration », 2003-2006, s’infiltre dans l’espace. A la demande de
Pierre Huyghe, des artistes, des architectes, des musiciens, des chorégraphes… ont
imaginé la célébration de jours non-fériés, par la réalisation d’un calendrier sous forme
de posters, proposant ainsi par le biais d’une exposition collective, un autre agencement
du temps et des rituels inédits.
Pierre Huyghe est engagé dans un processus expérimental cherchant à s’affranchir des
modalités temporelles et spatiales convenues de l’exposition pour les réinventer.
*Association créée par Pierre Huyghe lors de l’exposition Moral maze en 1995. Elle réunit tous les artistes de
l’exposition : Angela Bulloch, Maurizio Cattelan, Liam Gillick, Carsten Höller, Dominique Gonzalez-Foerster, Douglas
Gordon, Jorge Pardo, Philippe Parreno, Rirkrit Tiravanija et Xavier Veilhan.
Le dépliage numérique « Terra Incognita / Isla Ociosidad » est un projet de R&Sie(n), architectes
Remerciements : Théâtre du Châtelet ; Dena Foundation, Paris ; Galerie Marian Goodman, Paris, New York
Commissariat
Directeur du Musée: Suzanne Pagé
Commissaires : Laurence Bossé, Julia Garimorth et Hans Ulrich Obrist
Exposition organisée par le Musée d'Art moderne de la Ville de Paris/ARC
en association avec la Tate Modern, Londres
L’exposition de Pierre Huyghe sera présentée à la Tate Modern, Londres
du 5 juillet au 17 septembre 2006
Presse : Héloïse Le Carvennec
tél : 01 53 67 40 50
[email protected]
& Nathalie Desvaux
Des visuels de l’exposition sont disponibles par e-mail (300 dpi, format jpeg)
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4
Extraits du catalogue de Celebration Park
Préface de Suzanne Pagé et Vicente Todolí
Inviter Pierre Huyghe, à la fois au musée d’Art moderne pour sa réouverture puis à la Tate Modern, c’est
inviter l’un des artistes les plus inventifs de sa génération, déjà amplement reconnu comme tel à Paris
(cf. l’exposition de l’ARC en 1998 avec Dominique Gonzalez Foerster et Philippe Parreno) et à
l’étranger.
C’est aussi inviter, avec lui, l’Inconnu et l’Aventurier qu’en artiste véritable il s’efforce d’être pour luimême d’abord. Exceptionnellement lucide et cultivé, doté d’une maîtrise formidable des techniques les
plus contemporaines associée à un impressionnant éventail de multiples savoirs, Pierre Huyghe se met
en péril pour toujours se surprendre, et surprendre en lui, défricheur taraudé, la piste encore ignorée et
la passe entre les pôles de toutes les glaciations physiques et mentales. A l’horizon, triomphant de tout,
un formidable potentiel poétique.
A la jonction de l’art et du réel, son œuvre se contraint à une évolution permanente tel est aussi, ici,
Celebration Park comme préfiguration de ce qui devrait devenir un parc. La manifestation à Paris
s’inscrit dans la durée selon une double scansion. Dans un premier temps, le Prologue se présente
comme une « Ouverture » : un ballet de portes rythme l’espace ponctué d’assertions en néons telles un
autoportrait en creux, suite de dénis débouchant sur la figure de l’artiste lui-même. Ce parcours se clôt
en effet sur la figure de l’artiste dévoilé sous les traits d’une marionnette. Se révèle alors, dans toute sa
complexité, le jeu de l’artiste se jouant lui-même de sa condition.
Le Prologue se poursuit par une Exposition proprement dite installée dans le dispositif initial où se
déploie un ensemble d’oeuvres : néons, Disclaimers, One Year Celebration , films (A Journey that
wasn’t, This is not a time for dreaming…) pavillon-prototype du futur parc, statements…
Le processus ainsi engagé trouvera un nouveau développement, avec un tempo réinventé, lors d’une
troisième étape à la Tate Modern. À l’occasion de sa première exposition personnelle à Londres, Pierre
Huyghe interroge la nature de l’art et de l’exposition même, saisissant ici une opportunité venant à point
nommé, six ans après l’inauguration de la Tate Modern, de réimaginer la fonction de ce type d’institution
et de ses activités. Fasciné par les dynamiques du temps et de l’espace, il dissèque leur fonctionnement
relativement à la notion d’« exposition temporaire » et en appelle pour ce faire au visiteur comme agent
actif du temps et de l’espace sur la scène de l’exposition. Avec Celebration Park présenté à la Tate
Modern, la reconfiguration de l’espace d’exposition à laquelle il se livre surprendra plus d’un visiteur :
outre qu’elle soulève de passionnantes questions touchant à l’expérience même de la visite d’une
exposition, elle se développe en diverses strates de perception, à la fois sensuelles et visuelles, tout en
incitant à la réflexion.
5
Ses installations et ses vidéos puisent dans une vaste gamme de références culturelles qui couvre
notamment les champs de l’opéra, du théâtre de marionnettes, de l’architecture, de la danse, du design,
du cinéma, voire des cérémonies communautaires. Critiques subtiles de l’ordre établi, ses œuvres
mettent tout autant en évidence les dispositifs de contrôle autoritaires que les occasions offertes à la
subversion et à l’évasion. Cette exposition ambitieuse aborde nombre de thèmes contemporains – des
relations nature-culture à la propriété intellectuelle, en passant par la culture populaire et commerciale,
les rapport entre le travail et les loisirs dans notre compréhension du temps personnel, ou la place des
arts graphiques au sein d’une hiérarchie culturelle.
Nous tenons à adresser nos remerciements très amicaux à Pierre Huyghe pour son engagement sans
réserve dans ce projet. Nous remercions aussi Jay Chung et Q Takeki Maeda d’avoir, sur l’invitation de
Pierre Huyghe, participé au « Prologue » ainsi qu’à Francois Roche pour la création du pavillon qui
accueillera le film A Journey that wasn’t.
Nous sommes gré aux prêteurs, Thomas W. Lentz du Harvard University Art Museum et Marian
Goodman, pour leur généreuse collaboration, ainsi qu’à tous ceux qui, à titres divers, ont permis la
réalisation de ce projet ; parmi eux mentionnons Alexandra Cohen et Renaud Sabari de la société AIA
Productions et les assistantes de l’artiste, Sophie Dufour et Mahaut Vittu de Kerraoul.
Notre gratitude s’adresse également à la galerie Marian Goodman et ses collaboratrices, Rose Lord à
New York et Agnès Fierobe à Paris.
Notre reconnaissance particulière va enfin à Daniel Birnbaum, Dominique Gonzalez–Foerster et
Dorothea von Hantelmann pour leur contribution précieuse au catalogue, et aux graphistes M/M pour leur
complicité déterminante.
Cette manifestation offre l’heureuse occasion d’une collaboration fructueuse entre deux institutions avec
Laurence Bossé, Julia Garimorth et Hans-Ulrich Obrist à Paris, Emma Dexter et Vincent Honoré à
Londres.
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Introduction
Laurence Bossé, Emma Dexter, Julia Garimorth, Vincent Honoré et Hans
Ulrich Obrist
« Le divers est source de toute énergie », Victor Segalen
1
L’œuvre de Pierre Huyghe condense dans l’espace limité de l’exposition des systèmes complexes de
correspondances, des codes et des images qui forment un monde dans le monde. Parmi les modèles qui
semblent le mieux lui convenir aujourd’hui s’affirment ceux du parc et de l’exposition universelle, telle
qu’elle était conçue à ses origines comme une reconstitution du monde artistique, scientifique, industriel
et commercial, une sorte d’île qui ne demandait qu’à grandir.
Le modèle du parc, que Pierre Huyghe a choisi pour son exposition à Paris et à Londres, engage nombre
d’associations historiques quant aux cadres sociaux de présentation : des premiers jardins botaniques
aux jardins du XVIIIe siècle, jusqu’aux parcs d’attraction ou aux ères de jeux contemporains.
Version acclimatée, élaborée et protégée de la nature, le jardin et le parc sous-entendent la notion de
clôture.
Pour la première exposition universelle qui s’est tenue à Londres en 1851 dans Hyde Park, avait été
construite une gigantesque serre de verre et d’acier, le Crystal Palace. Non seulement l’architecture du
bâtiment tendait à effacer les frontières extérieur/intérieur, mais l’exposition elle-même réunissait pêlemêle des éléments de la nature, des œuvres d’art et des inventions techniques.
A Paris, par la suite, plusieurs expositions similaires, parfois plus ambitieuses, ont été organisées
jusqu’à la fin du XIXe siècle. Ce n’est donc pas une coïncidence si Celebration Park de Pierre Huyghe se
déroule au Musée d’art moderne dans le site même du Palais de Tokyo, construit lors de « l’exposition
internationale des arts et techniques appliqués à la vie moderne » en 1937. 2
Pierre Huyghe propose ici une plate-forme temporelle et conceptuelle qui lui permet de jouer de la
fluidité et d’échapper aux codes muséaux d’exposition. Il présente un projet en trois actes
intrinsèquement liés et, pourtant, indépendants : un Prologue suivi d’une exposition à Paris, elle-même
suivie d’une exposition à Londres — projet en trois temps et deux lieux. Ces actes se déroulent selon
une durée et une intensité spécifiques, chacun avec ses propres « règles » et son propre « format ».
Celebration Park débute au Musée d’art moderne de la Ville de Paris avec un Prologue. Conçu comme
un avertissement, il dévoile pendant trois semaines une partie essentielle du dispositif, à savoir les
structures, les rythmes, le ton de l’ensemble. Ce sont les « règles du jeu » de l’exposition proprement
dite. Une sculpture faite de livres à la couverture dorée — 1000 exemplaires d’un agenda, non linéaire,
tel des lingots d’or — évoque les principes de l’Association des Temps Libérés 3 , l’étirement de la durée
de l’exposition en mois, jours, minutes et secondes. Cet agenda rend sensible les temporalités
subjectives de chacun.
Franchissant des portes mobiles, le visiteur est invité à suivre un chemin scandé par une succession
d’assertions « juridiques » lumineuses, enseignes urbaines en néon, comme autant de dénis liés aux
droits d’auteur ; ainsi « Je ne possède pas le musée d’art moderne, ni l’étoile noire ». Libéré du
copyright, l’auteur s’autorise le libre usage d’un contenu, développant les notions de reprise, de
déplacement et d’extension des récits. Le parcours se clôt par un portrait de l’artiste, en marionnette, qui
évoque sa relation avec le lieu qui l’accueille.
7
Dès le Prologue sont explorées plusieurs zones contiguës : rapports sociaux, rapports au temps,
propriétés intellectuelles, réutilisation d’éléments existants, le réel et sa représentation, son extension
temporelle et spatiale, etc. Les expositions de Paris et de Londres intensifient le processus en intégrant
des œuvres nouvelles ou en complétant le dispositif existant : One Year Celebration, posters créés en
collaboration avec les étudiants de l’Ecole Werkplaats Typografie
4
, films — This is not a time for
dreaming et A Journey that wasn’t, projeté dans un pavillon conçu avec l’architecte François Roche —, «
animatronic », système de portes auparavant presque immobiles qui semblent danser dans l’espace…
Un récent article 5 compare Pierre Huyghe et plusieurs autres artistes, ayant créé des œuvres dans des
régions du monde soidisant reculées, avec certains artistes du Post-Minimalisme et du Land Art des
années 60 et 70 tels que Robert Smithson ou Walter de Maria. On peut évoquer un autre précédant
historique, plus distant mais tout aussi valide : Dada. Ainsi en est-il des débats sur l’œuvre d’art : les
processus de travail collégiaux, parfois même familiaux avec d’autres artistes, designers, architectes et
compositeurs ; la publication de manifestes et de posters ; la création d’associations ; l’invention d’alter
ego féminins (Anna Sanders, par exemple, personnage fictionnel, magazine puis société de production
créée avec l’artiste Philippe Parreno), ainsi que la ré-interprétation ludique de formes artistiques
délibérément anachroniques comme l’opéra de marionnettes ou le ballet anthropomorphique des
portes, sont autant d’éléments partagés par Pierre Huyghe et ce modèle plus ancien de résistance au
capital et à la sensibilité bourgeoise. La figure de l’auteur multiple privilégiée de Dada continue d’être
une stratégie efficace pour les artistes qui souhaitent préserver une position critique.
Développant l’exposition dans le temps en plusieurs étapes, susceptibles d’évolutions inattendues, et
privilégiant la collaboration avec d’autres artistes, Pierre Huyghe bouleverse tout à la fois la notion
d’œuvre et celle d’exposition. Il poursuit là le travail amorcé aussi par toute une génération d’artistes
conceptuels des années 60 et 70 sur l’essence, la limite et l’appréhension de l’œuvre d’art, ses
frontières (que l’on songe, par exemple, à Daniel Buren et à ce qu’il appelait des « limites critiques
» 6 ), sa présentation et son expérience par le visiteur. Cependant, tout en partageant des bases
structurelles communes, Pierre Huyghe refuse la dématérialisation de l’œuvre. En agrégeant d’autres
œuvres à la sienne, il crée de nouvelles extensions, de nouvelles conditions d’expérience de l’art, et
produit un travail de reconstruction de l’œuvre et de son espace de présentation, tout autant qu’une
expérience esthétique inscrite dans ses rapports sensitifs et visuels avec le visiteur.
L’exposition à Londres se définit comme une entité propre, avec des œuvres déjà exposées à Paris et
des créations offrant un rapport nouveau et singulier à l’espace et à l’institution. Les trois actes
partagent en effet les mêmes motifs, se fondent sur les mêmes concepts et puisent dans des référents
communs. Ils forment un ensemble : Celebration Park.
Comme à Paris, Pierre Huyghe débute son exposition à la Tate Modern par un déni : « I do not own Tate
Modern nor the Death Star » (Je ne possède ni la Tate Modern, ni l’Etoile Noire). L’œuvre, qui existe
dans une zone fluctuante entre art et enseigne, fait référence aux relations et aux négociations qui ont
lieu dans toute institution dès lors qu’un artiste y expose. Elle rappelle au spectateur que l’exposition
est,
par
nature,
temporaire,
et,
si
l’énoncé
peut
sembler
absurde,
il
souligne
la
question
d’autorité/propriété au cœur de l’institution muséale. Le copyright ou le droit d’auteur est une question
récurrente chez Pierre Huyghe, abordée dans plusieurs œuvres, dont Blanche Neige Lucie. Le droit
d’auteur permet de définir et d’attribuer l’œuvre d’art et sa paternité. Pierre Huyghe y répond avec des
œuvres et des interventions qui proposent aux individus — contre la pesante mainmise des entreprises
et des gouvernements — de défier les limites et le contrôle induits par le droit d’auteur. L’analyse de
8
Pierre Huyghe renvoie au spectre de la globalisation, désireux de breveter jusqu’aux moindres
conditions de vie elles-mêmes.
D’autres dénis en néon participent à la problématisation du lien de l’artiste à la propriété intellectuelle.
Pierre Huyghe, en invitant d’autres artistes pour concevoir de nouvelles fêtes pour les jours libres de
toute célébration ou à baptiser les nouvelles îles inconnues, apparues du fait de la fonte des glaces,
déconstruit la mécanique du contrôle — d’ordinaire peu perceptible — des gouvernements et des
entreprises. Son œuvre suggère peut-être qu’un mode de pensée conceptuel dans le champ esthétique a
son équivalent dans la notion de propriété intellectuelle énoncée par les entreprises. A l’ère de
l’information, la dématérialisation n’est plus seulement un concept-clé de l’art du XXe siècle, elle est
aussi le point de non-retour des avancées technologiques du siècle.
Enfin, Celebration Park présente les interactions de deux cultures distinctes mais associées : celles de
la France et des Etats-Unis. Le concept de temps libérés se fonde sur une lecture des loisirs ou du
temps libre soumise ou dépendante de la notion de temps de travail. Ce temps libéré du travail, du loisir,
est un temps étranger à tout contrôle et à toute durée définie. Il semble irréconciliable avec l’éthique
protestante du travail, à la base de « l’American dream ». « Le temps n’est que le temps
nécessaire au capital pour rendre un bénéfice à l’issue d’un travail » écrit Gilles Deleuze à propos de
Robinson Crusoé 7 , le « débutant » inventé par Daniel Defoe.
Les liens entre ces deux traditions et systèmes de pensée sont explorés dans la vidéo This is not a time
for dreaming, dans laquelle Pierre Huyghe met en scène les relations tendues entre l’architecte
moderniste Le Corbusier et l’administration de l’Université d’Harvard qui lui avait passé commande d’un
nouveau bâtiment. Dans Streamside Day, Pierre Huyghe sape « l’American dream » de manière plus
lyrique, en introduisant un moment de réflexion, voire de rêverie, chez les habitants d’un lotissement
nouvellement construit, pour lequel il a orchestré une fête, et a ainsi préparé le terrain pour une histoire
commune, un bien-être, la création d’un groupe, en maintenant l’espoir que la joie et la poésie pouvaient
être insufflées tous les jours dans le plus monotone des cadres.
Celebration Park énonce un modèle réinventé d’existence sociale fondée sur la liberté et le jeu, dans
lequel les réalités crues de l’histoire et du pouvoir politique sont mises à l’épreuve de la fête et du rituel,
de l’invitation et de la participation. Pierre Huyghe propose au visiteur, à travers les modèles du
parc ou de l’exposition universelle une ré-interprétation de l’exposition en tant qu’espace fluide et
mouvant. Il s’agit d’aborder un exotisme nouveau. Non plus un exotisme dans un sens tropical ou
géographique, mais temporel et quotidien, un « espace à quatre dimensions » pour en « arriver très vite
à définir, à poser la sensation d’exotisme : […] qui n’est que le pouvoir de concevoir l’autre. » 8
1. Victor Segalen, Essai sur l’exotisme : une esthétique du divers. Paris : Librairie générale française, 1999.
2. Si différentes structures restent présentes dans nos esprits, elles ont aussi fasciné les artistes et les architectes
contemporains : le pavillon IBM de l’Exposition universelle de New York, 1964, le projet de Saarinen, architecte finlandais et
les mythiques machines du futur de Charles et Ray Eames, la machine d’information d’Osaka en 1970, le laboratoire géant de
Kenzo Tange, Arata Isozaki…
3. L’Association des Temps Libérés fondée en 1995 avec Philippe Parreno, Dominique Gonzalez-Foerster, Liam Gillick, Jorge
Pardo, Maurizio Cattelan, Rirkrit Tiravanija, et Carsten Höller. «Un projet dont l’ambition était, tout comme pour Annlee ou obile
TV, de donner une structure sociale à une réunion d’individus, à un moment donné, et en quelque sorte d’étirer le temps de ce
moment donné, chose qu’interdisent les formats qui prévalent habituellement, tout particulièrement celui de l’exposition».
Temporary School, en collaboration avec Dominique Gonzalez-Foerster et Philippe Parreno.
4. Située à Arnheim, Pays-Bas.
5. Artforum, été 2005, Inside Out: Art’s New Territory.
6. Daniel Buren, Limites Critiques, galerie Yvon Lambert, déc. 1970- jan. 71.
7. Gilles Deleuze, L’île déserte et autres textes. (Textes et entretiens 1953-1974), Editions de Minuit, Paris, 2002.
8. Segalen, op.cit.
9
Dorothea von Hantelmann
Célébrer, un déplacement de la critique
(…)
Cet intérêt pour les multiples interactions entre expérience et représentation pourrait expliquer
pourquoi Huyghe introduit la topographie du parc comme modèle de l’exposition. Et ce, dans la mesure
où le parc (en particulier, son avatar moderne, le parc d’attractions) illustre de manière presque
paradigmatique l’idée d’un territoire hétérogène qui oscille entre représentation et expérience, entre la
création de fictions et la possibilité qu’elles offrent de produire, dans les faits, l’humeur ou l’état d’esprit
qu’elles représentent, en d’autres termes, de « faire » ce qu’elles « disent ».
(…)
Dans Celebration Park, le parc est plus qu’un symbole ou qu’une représentation ; il devient le sujet de
l’exposition tout autant que le modèle dont elle procède. Le parc est à la fois représenté et matérialisé
comme format de l’expérience. L’exposition (en tant que) Celebration Park met en lumière son propre
potentiel performatif et transformateur. C’est-à-dire qu’elle mêle une topographie, une attitude et une
conception de l’art, pour former quelque chose qui pourrait finir par constituer ce que nous avons appelé
plus haut la construction d’un « nouveau fondement ». Ce nouveau fondement se trouvait préfiguré, dans
une certaine mesure, dans l’exposition présentée à Bregenz par Huyghe, L’Expédition scintillante. A
Musical, qui donnait à voir un scénario quasiment allégorique de la quête de l’inconnu, d’un nouveau
territoire, tout en cherchant à évoquer, dans le même temps, une expérience correspondant aux
représentations de cette quête. L’exposition était conçue comme une sorte de paysage qui se déroulait
dans le temps et qui, en s’appuyant sur des motifs et des représentations apparentés, a aussi déplacée
l’expérience de l’exposition. Si l’exposition de Bregenz représentait et évoquait l’idée de l’expédition
comme quête de nouveaux fondements, on pourrait voir Celebration Park comme une tentative d’établir
de tels fondements. Si L’Expédition Scintillante. A Musical invitait, voire obligeait, les visiteurs à
s’impliquer, à adopter une certaine humeur, un certain état d’esprit partagé, dans Celebration Park, du
seul fait du titre, cette implication ne se contente plus seulement d’avoir lieu, mais devient aussi le sujet
de l’exposition. En produisant des fictions et des représentations qui participent en même temps à la
production d’une réalité déplacée, Celebration Park pourrait constituer une sorte de scénario
expérimental. Rapprochant les niveaux du « dire » et du « faire », ce scénario consisterait à mêler les
modes de la représentation et de l’expérience, de la réflexion et de la participation, de la distance et de
l’implication. Parallèlement à l’invitation qu’il fait à différentes personnes de créer de nouvelles
célébrations, Huyghe lui-même tente d’inventer de nouvelles coutumes ou célébrations à l’intérieur du
rituel social du musée. Finalement, comme le démontre Streamside Day Follies, les célébrations
continuent à susciter des rituels et des coutumes qui conduisent au déplacement des horizons de
l’expérience et des horizons d’attente habituels. Etre entraîné dans une célébration, c’est se trouver pris
dans un événement que l’on ne contrôle pas. Il est clair que, dans tout événement festif, les participants
sont pris dans un jeu qui va au-delà de leurs choix, de leurs activités et de leurs intentions en tant que
sujets. C’est dans cette perspective que Huyghe, à travers Celebration Park, travaille finalement à une
re-négociation du contrat social selon les termes auquel l’art et le public s’accordent. Qui pourrait bien
vouloir, après tout, « objecter » une humeur festive ? Elle est simplement là et on la partage. De ce point
de vue là, « je ne possède pas » est une façon de proposer au musée de devenir ce qu’il est : un lieu où
célébrer le spectacle de la société.
10
Daniel Birnbaum
L’à-venir
Alors qu’ils atteignent le cercle polaire antarctique, le relevé cartographique des glaces de mer
par le radiomètre AMSR-E indique qu’ils ne peuvent pas aller plus loin. Cet étrange voyage dans la
blancheur était aussi un voyage dans le temps. El Diario del Fin del Mundo : A Journey That Wasn’t,
récit de voyage détaillé et étrangement poétique, signé non d’un individu mais de l’Association des
Temps Libérés, et présenté comme « un jeu temporel », se clôt sur deux déclarations faisant clairement
apparaître que cette expédition dans l’Antarctique, lancée par Pierre Huyghe, était en réalité une
excursion dans l’avenir : « En 2041, le traité qui protège ce continent va être révisé. Ceci était un
voyage dans la préhistoire d’une civilisation antarctique qui reste à venir. »1
(…)
Le trait le plus caractéristique de l’œuvre de Huyghe, c’est l’amalgame déconcertant qu’elle opère
entre différents niveaux de réalité. Les ruptures dont il est ici question ne concernent pas seulement
différents fuseaux horaires, mais aussi des ontologies radicalement distinctes. La triple projection vidéo
L’ellipse (1998), qui prend comme point de départ une coupe dans le film de Wim Wenders L’ami
américain, franchit la limite qui sépare la fiction de la non-fiction. Dans une scène du film de Wenders, le
personnage principal, Jonathan Zimmermann (joué par Bruno Ganz) est au téléphone dans un
appartement parisien. Et voilà que, sans transition, on le voit qui apprend une terrible nouvelle dans un
autre appartement, de l’autre côté de la Seine. Comment est-il passé d’un endroit à l’autre ? On accepte
le mystère qui entoure de tels déplacements à l’écran ; c’est comme ça quand on raconte une histoire.
(…)
J’ai distingué ailleurs deux catégories d’artistes : ceux qui voient dans l’utilisation de procédés
obsolètes une méthode pour contrer la force réductrice de l’industrie de la culture et ceux qui voient
dans ce détour par des moyens de communications du passé une approche trop résolument nostalgique
et préfèrent miser sur « l’à-venir » plutôt que sur des visions futuristes appartenant déjà au passé, en
d’autres termes, peut-être, sur l’anticipation plutôt que sur des formes de mémoire complexes.
Imaginons un instant de nouvelles formes d’affirmation de l’espace technologique en lieu et place de
l’aspiration familière à l’évasion vers une sphère située en-dehors de la technologie au détour d’espoirs
obsolètes en un avenir qui n’est jamais arrivé. A quelles formes de subjectivation pourrait donner lieu la
promotion du futur et la quête d’une « faible force messianique» (Benjamin) non dans des formes de
technologie désormais privées de leur fonction, mais dans des formes émergentes, c’est-à-dire dans des
instruments qui n’ont pas encore trouvé leur interprétation et leurs applications définitives ? Il n’y a
aucun doute, à mes yeux, sur la catégorie à laquelle appartient Pierre Huyghe. Embarqué sur un bateau
équipé d’un système de navigation numérique privé de sa mémoire, il avance vers un dédale d’avenirs,
proche peut-être du labyrinthe décrit par Borges dans une nouvelle où il est question d’un architecte et
philosophe chinois, Ts’ui Pen, qui ne croit pas à un temps uniforme, absolu : « Il croyait à des séries
infinies de temps, à un réseau croissant et vertigineux de temps divergents, convergents et parallèles.
Cette trame de temps qui s’approchent, bifurquent, se coupent ou s’ignorent pendant des siècles,
embrasse toutes les possibilités. Nous n’existons pas dans la majorité de ces temps ; dans quelques-uns
vous existez et moi pas ; dans d’autres, moi, et pas vous ; dans d’autres, tous les deux. » 2
1
« El Diario del fin del Mundo », Artforum, summer 2005, p. 301.
Jorge Luis Borges, « Le jardin aux sentiers qui bifurquent », Fictions, trad. P. Verdevoye et Ibarra (Paris :
Gallimard, 1957) 129 .
2
11
Hans Ulrich Obrist
Entretien avec Pierre Huyghe
HUO Produire dans le présent, c’est ce que tu as fait, par exemple, avec Mobil TV.
PH C’est un outil de diffusion et un plateau qui ont été mis à disposition dans un lieu d’exposition qui est
devenu, entre temps, le lieu de préproduction d’une autre. Les formats télévisuels qui sont
habituellement assez rigides, agencés d’une certaine façon deviennent poreux. Une information peut
devenir une publicité, etc. Le « format exposition » interfère avec le « format télévision », qui interfère à
son tour avec le « format livre ». C’est une exposition de durée qui peut être rejouée.
HUO Et comment ce projet Mobil TV contamine-t-il les autres ?
PH On pourrait en trouver l’écho dans One Year Celebration, qui consiste à proposer une célébration
pour les jours non encore célébrés ; les non-anniversaires comme disait Lewis Caroll. Robert Filliou en
avait proposé un, c’était le 1.000.010ème anniversaire de l’art. On pourrait voir cela comme une « carte
d’aménagement du territoire temporel ».
Inversement, on devrait préserver certains jours de toute célébration, de la même manière que l’on
protège des forêts ou des langues, les introduire au patrimoine immatériel dont s’occupe l’UNESCO, pas
tellement pour son coté musée-patrimoine, mais plutôt pour la survivance de la réalité même, comme le
disait Pasolini à propos des murs de Sanaa au Yémen.
Les célébrations définissent un entendement commun, or, par essence, il ne peut être que re-négocié.
C’est un peu ce que j’avais fait avec Streamside Day où une fiction produisait une réalité, puisqu’il
s’agissait d’inventer une coutume, une fête pour un nouveau village. Ce rituel était basé sur la situation
de cette nouvelle communauté et devenait une célébration. C’était une expérience basée sur une fiction
et qui contenait son potentiel de répétition.
(…)
PH Voilà, l’exposition s’ouvre sur un avertissement qui énonce les règles du jeu. C’est une « exposition
d’expositions », This is not a time for dreaming est une exposition sous la forme d’un opéra de
marionnettes et A Journey that wasn’t sous la forme d’un double spectacle, etc...
HUO Une exposition en cache une autre en somme ! Quand tu parles de A Journey that wasn’t, tu
évoques une île des possibilités.
Comment en es-tu arrivé à cette thématique du voyage, de la mise en scène de l’expédition ?
PH L’expédition est un format d’exposition intéressant. Le projet A Journey that wasn’t commence avec
l’Association des Temps Libérés et Extended Holidays qui était déjà un voyage et avec Mobil TV et
Annlee comme projet polyphonique autour d’un même signe. Mais A Journey that wasn’t commence
autour d’une rumeur qui se prolonge par une aventure en Antarctique... et puis surtout il réalise
l’Expédition Scintillante qui en était le scénario.
12
HUO C’est d’ailleurs là que l’exposition de l’ARC et de la Tate Modern a commencé…
PH Oui, on a commencé à travailler à partir du moment où je suis parti ! A Journey that wasn’t est un
déplacement vers un ailleurs qui est hypothétique où se trouve une chose unique et singulière. Tout
commence avec la rumeur d’une île et d’une créature qui l’habite, c’était une hypothèse — on ne fait rien
d’autres qu’inventer des fictions et on se donne les moyens réels de vérifier leurs existences — alors j’ai
loué l’ancien bateau de Jean-Louis Etienne, l’Antarctica, et on est parti à l’aventure. Par chance on a
trouvé l’île, on a traduit sa topographie en son, puis de façon poétique on a émis ce « ici et maintenant »
en attendant la créature. Ant Farm avait un projet tout aussi étrange avec leur ambassade des dauphins.
La forme de l’île a servi de base pour écrire la partition de l’orchestre symphonique qui a été joué sur la
patinoire de Central Park. Du coup la durée du spectacle est égale au temps nécessaire pour écouter
l’île.
HUO Et les deux projets ont fusionné ?
PH Il ne s’agit que d’un seul projet. Aucun moment ne représente l’autre. Je voulais faire éprouver une
situation « venu d’ailleurs » sans passer par sa représentation, c’est une équivalence qu’il fallait trouver.
Ce qui s’est joué à Central Park est équivalent à ce qui s’est produit en Antarctique, chacune des
expériences est présente dans l’autre, en arrière plan. On ne peut pas « amener » ou « ramener »
comme le pensait Victor Segalen, c’est une forme de colonialisme.
HUO Loin du modèle actuel de « consommation de la différence », Segalen traite du choc de la
différence et de l’idée de la singularité.
PH Oui, exactement, dans son essai sur l’exotisme, il propose une esthétique de la diversité. L’altérité
est absolue, elle est « le un », irrémédiablement sauvage, c’est le monolithe noir de 2001, l’odyssée de
l’espace. Le projet A Journey that wasn’t, c’est l’histoire du déplacement vers une idée singulière et de
sa mise en lumière. C’est l’histoire dramatique et impossible de la représentation et de l’exposition.
13
Extraits de l’agenda
« I do not own the modern times »
Frederic Tuten
Auto-portrait avec icebergs
A Pierre et Francesca
Ils parlaient la langue des jeunes mouettes et des phoques imberbes, la langue de la glace
inféconde éclatant sous le soleil de l’Arctique. Mais je les comprenais, moi qui avais parlé ces langues il
y avait fort longtemps, à l’époque où je dérivais, seul, sur des glaces flottantes, sous des cieux gelés. Ils
ne me virent pas entrer dans l’appartement, tant ces deux-là étaient absorbés, penchés sur des plans et
des cartes, à la recherche de routes maritimes vers des îles inconnues disparaissant sous les clameurs
d’oiseaux.
(…)
« Je suis impressionné, dis-je, par la pureté et les qualités philosophiques de votre équipage,
même s’il n’y a pas un seul marin parmi eux.
- Mais ils sont tous en quête de quelque chose, dit-il, ils croient aux fantômes des mots », ajoutat-il, son bonnet de vigie tout scintillant d’étoiles, que la fumée de sa cigarette cernait de petits nuages
comme on en voit en hiver.
« En d’autres termes, leur recherche porte sur les rumeurs et les causes perdues, si toutefois on
voulait formuler les choses en ces termes, dit-elle, enroulant une gigantesque écharpe rouge autour de
son cou.
(…)
Elle me prit une main, puis l’autre, et me considéra quelques instants.
« Il va vous falloir des gants, dit-elle. Nous avons retenu cela avant tout : des gants chauds sont
indispensables pour un périple de cette nature. »
(…)
« Vous voyez », dit-il, sur un ton particulièrement affectueux, en jouant de son harpon miniature
comme d’une baguette magique pour désigner le rougeoiement glacé qui s’offrait à la vue derrière la
fenêtre, « comment les choses se passent avec nous désormais, comment l’oxymore peut servir à opérer
une scission de la dialectique, comment, au bout du compte, le désir l’emporte sur toutes les
inquiétudes, les vôtres et les nôtres. »
Il n’y avait rien à répondre à cela, plus d’hésitation à avoir. En un éclair, j’avais regagné mon
appartement et attrapé mon chat, qui me suivit sans se poser, ni me poser, la moindre question et qui
parut réjoui par ce départ imminent. Même mes vieux livres paraissaient heureux de me voir partir et de
rester, avec les plantes, à mûrir seuls quelque temps. Curieux comme on ne manque à personne quand
on est courageux.
Une seconde plus tard, nous étions en bas, devant l’entrée, où le couple attendait avec tout son
attirail ; et brusquement, un skiff argenté apparut, qui nous conduisit doucement jusqu’au bateau.
(…)
« Alors, dit-il, en sortant sa vieille montre de gousset, on y va ?
- Oui, dit-elle, en se tournant vers moi, voguons.
- Levez l’ancre », fis-je, sans plus penser à rien d’autre qu’au voyage qui nous attendait.
(…)
14
Emilie Renard
Temps Libérés Unlimited
(…)
Le départ est fixé ici :
« Association des Temps Libérés. Objet : pour le développement des temps improductifs, pour une
réflexion sur les temps libres, et l’élaboration d’une société sans travail. Pour faire connaître ses idées,
l’association organisera différentes réunions publiques, conférences, parutions, fêtes. » Déclaration
parue au Journal Officiel du 5 juillet 1995.
Avec cette annonce ouvertement optimiste de « libérer les temps », le pluriel ici est important, la
déclaration affirme textuellement une opposition aux temps occupés et à une société exclusivement
régulée par le rythme binaire du travail et de son envers, le loisir. Mais l’énoncé est précisément tourné
dans une logique positive. L’A.T.L. propose une alternative à toute conception linéaire, productiviste et
capitaliste du temps, en évitant la posture d’une critique frontale et nihiliste. Pour cela, elle agit à
l’intérieur de formats établis. Elle explore des modes de représentation producteurs de fictions
dominantes pour en utiliser les mécanismes et y tester des méthodes de bifurcations.
Le musée est un des versants architecturaux de cette occupation des temps libres. Il est l’incarnation
monumentale d’une organisation verticale du temps. Un monolithe historique abritant des œuvres qui se
sont déjà pliées à ses conditions spécifiques de monstration. Ici, ni le musée ni son moment privilégié
qu’est l’exposition ne sont cités au nombre des manifestations de l’A.T.L. Ils sont en effet soigneusement
évités et désignés en creux comme des lieux différés de l’expérience réelle, des abris pour les temps
conventionnellement libres mais non libérés.
L’association est créée par Pierre Huyghe lors de l’exposition Moral Maze en 1995. Elle réunit tous les
artistes de l’exposition : Angela Bulloch, Maurizio Cattelan, Liam Gillick, Carsten Höller, Dominique
Gonzalez-Foerster, Douglas Gordon, Jorge Prado, Philippe Parreno, Rirkrit Tiravanija et Xavier Veilhan.
Enregistrer l’Association des Temps Libérés au Journal Officiel revient à énoncer un statement depuis
une instance juridique extérieure à l’art. Une association est une organisation collective directement
performative parce qu’elle donne à un programme commun une réalité sociale. Ce statement est donc à
la fois un jugement sur une situation sociale, un programme artistique et une structure collective.
Dans sa forme originale, un article au Journal Officiel, l’A.T.L. prend manifestement l’aspect d’une œuvre
conceptuelle, s’énonçant comme une règle pour l’action. Mais cette règle, fondamentalement ouverte,
énoncée en 1995 et sans cesse reformulée depuis, prévoit des écarts possibles à son application au
hasard des situations.
(…)
15
Pierre Huyghe
Né en 1962 à Paris
Expositions personnelles (sélection)
2006
2005
2004
2003
2002
2001
2000
1999
1998
1997
1996
1995
This is not a time for dreaming, Marian Goodman Gallery, New York
A Journey That Wasn’t, Wollman Ice Rink, Central Park, New York, Public Art Fund
Moderna Museet, Stockholm
Streamside Day, Irish Museum of Modern Art, Dublin
This is not a time for dreaming, Carpenter Center, Harvard University, Cambridge
Streamside Day, Galerie Marian Goodman, Paris
In the Belly of Anarchitect (avec Rirkrit Tiravanija et Pamela M.Lee), Portikus, Francfort
Castello di Rivoli Museo d’Arte Contemporanea, Turin *
One Million + Kingdoms, Modern Art Museum of Fort Worth, Texas
Streamside Day Celebration, Fishkill, New York ; Streamside Day Follies, DiaCenter for
the Arts, New York
The Third Memory, University of Virginia Art Museum, Charlottesville
Hugo Boss Prize 2002 Exhibition, Solomon R. Guggenheim Museum, New York
A Smile Without a Cat (avec Philippe Parreno), Miami
L’Expédition scintillante, A Musical, Kunsthaus, Bregenz
Le Château de Turing, Pavillon Français, 49 ème Biennale de Venise *
Interludes, Stedelijk Van Abbe Museum, Eindhoven
Even More Real Than You, Marian Goodman Gallery, New York
Tramway (avec Philippe Parreno), Glasgow
Musée d’art contemporain, Montréal
Kunstverein (avec Dominique Gonzalez-Foerster et Philippe Parreno), Hambourg
Galerie Shipper & Krome, Berlin
The Third Memory, Musée national d’art moderne, Centre Pompidou, Paris *
No Ghost just a Shell, Two Minutes Out of Time, Galerie Marian Goodman, Paris
Museum of Contemporary Art, Chicago
The Third Memory, Renaissance Society, Chicago
Kunsthalle, Zurich
Museu de arte Contemporanea de Serralves, Porto *
Some Negotiations, Kunstverein, Munich
Museum of Art, Santa Monica
L’Ellipse, Index, The Swedish Contemporary Art Foundation, Stockholm
Le procès du temps libre, Wiener Secession, Vienne
Motion Study, a choreography, Institute of Visual Arts, Milwaukee
Kunstmuseum, Aarhus
Musée d’Art Moderne de la Ville de Paris/ARC (avec Dominique Gonzalez-Foerster et
Philippe Parreno) *
Story Tellers, Le Consortium, Dijon
Extended Holidays, FRAC Centre, Collège Marcel Duchamp, Châteauroux
Dubbing, Galerie Roger Pailhas, Paris
Daily, Forde, L’Usine, Genève
Casting, Galleria Fac-Simile, Milan
L’usage de l’interprète, FRAC Languedoc Roussillon, Montpellier
Expositions collectives (sélection)
2006
2005
2004
Whitney Biennial, Whitney Museum of American Art, New York
8 ème Biennale d’art contemporain de Lyon *
Ecstasy - In and About Altered States, LA MOCA, Los Angeles
De lo Real y lo Ficticio. Arte Contemporaneo de Francia, Museo de Arte Moderno de
Mexico
Les Visiteurs, Château de Tarascon
CUT/Film as Found Object, organized by the Milwaukee Art Museum, and the Museum of
Contemporary Art (MOCA), North Miami
Fast Forward. Avance rapido, Media Art de la Colección Goetz, Madrid
Utopia Station, Porto Alegre
A la une, Website Magasin, Centre National d’Art Contemporain, Grenoble
Faces in the Crowd, White Chapel Art Gallery, Londres ; exposition itinérante : Castello di
Rivoli, Museo d’art Contemporanea, Turin
D’un pas … L’autre…, Jinan (Province du Shandong), République Populaire de Chine
Sons et Lumières, Centre Pompidou, Paris
16
2003
2002
2001
2000
1999
The Gwangju Biennale 2004 : A Grain of Dust, A Drop of Water, Gwangju *
Phonorama, ZKM, Karlsruhe
Utopia Station, Haus der Kunst, Munich
Art Experience, International Workshops in Contemporary Visuals Arts & Music, Domus
Academy, Venise
EA C (Expat-Art Centre), Musée d’art contemporain, Lyon ; exposition itinérante : ICA,
Londres ; Muzeum Sztuki, Lodz ; CAC, Vilnius ; Kunstihoone, Tallinn ; Bizart, Shanghai
Image Stream, Wexner Center for the Arts, Columbus
Fast Forward: Media Art from the Goetz Collection, ZKM Center for Art and Media,
Karlsruhe
Video, NRW Forum Kultur und Wirtschaft, Düsseldorf
Point of View: A Contemporary Anthology of the Moving Image, New Museum of
Contemporary Art, New York
Reflecting the Mirror, Marian Goodman Gallery, New York
7 ème Biennale d’art contemporain de Lyon *
Reprocessing Information, San Francisco Museum of Modern Art
Utopia Station, Biennale de Venise *
25e International Biennial of Graphic Arts, International Centre of Graphic Arts, Ljubljana
Lisboa Photo 2003, Lisbonne
Passages féminins et grondements du monde, Institut Franco-Japonais, Tokyo
Sodium Dreams, Center for Curatorial Studies Museum, Bard College, Annandale-onHudson, New York
Over WIJ/About WE, Van Abbemuseum, Eindhoven
Argos Festival, Bruxelles
Documenta 11, Kassel
Shoot the Singer, Music on Video, Institute of Contemporary Art, University of
Pennsylvania, Philadelphie
Les Enfants du Paradis, Galerie Yvon Lambert, Paris
Moving Pictures, Solomon R. Guggenheim Museum, New York ; exposition itinérante :
Guggenheim Museum, Bilbao
Exchange & Transform, Kunstverein, Munich
French Collection, MAMCO, Genève
Sans commune mesure, Musée d’art moderne, Lille Métropole, Villeneuve d’Ascq
Bazile, Buren, Huyghe, Galerie Roger Pailhas, Marseille
No Ghost just a Shell, Kunsthalle, Zurich ; exposition itinérante : Institute of Visual
Culture, University of Cambridge ; Miami Basel ; MoMA, San Francisco ; Van Abbe
Museum, Eindhoven *
Loud and clear, Baltic, Newcastle
Conversation—the Van Abbe Museum, Academy of Fine Arts, Athènes
Presentness is grace, Arnolfini, Bristol
In many ways the exhibition already happened, ICA, Londres (avec Parreno, M/M, Roche)
The Gift : Generous Offerings, Palazzo delle Papesse, Sienne
Forms follow fiction, Castello di Rivoli, Turin
Animations, P.S.1, New York
Arrêt sur Image, Kunstwerke, Berlin
International Istanbul Biennial *
Yokohama 2001: International Triennial of Contemporary Art *
Ikon Gallery, Birmingham
Dévoler, Institut d’art contemporain, Villeurbanne
Double Life, Generali Foundation, Vienne
Vivement 2002 !, MAMCO, Genève
Exploding Cinema Cinéma without walls, Museum Boijmans Van Beuningen, Rotterdam
San Francisco Art Institute (avec Philippe Parreno)
Vicinato 2, Galerie Neugerriemschneider, Berlin
Voilà, le monde dans la tête, Musée d’art moderne de la Ville de Paris/ARC *
Let’s Entertain, Walker Art Center, Minneapolis * ; exposition itinérante : Au-delà du
spectacle, Centre Pompidou, Musée national d’art moderne, Paris ; Kunstmuseum,
Wolfsburg
Le jeu des 7 familles, MAMCO, Genève
As it is, Ikon Gallery, Birmingham
Dial 33 then 1, Kiasma, Museum of Contemporary Art, Helsinki
Waitting M Jell by, Konstgard, Halmstad
Carnegie International, The Carnegie Museum of Art, Pittsburgh *
Close Ups, Contemporary Art Center, Copenhague
Moving Images, Galerie für Zeitgenössische Kunst, Leipzig *
Hitchcock. Art, Cinema and Suspense, Museum of Modern Art Oxford ; exposition
itinérante : Museum of Contemporary Art, Sydney (1999/2000) ; Art Gallery of Hamilton
17
1998
1997
1996
1995
1994
(2000) ; Kunsthallen Brandts Klaedefabrik, Odense (2000) ; Tokyo Opera City Art Gallery
(2001) ; Hiroshima City Museum of Contemporary Art (2001) ; Centre Cultural de la
Fundacio “La Caixa” de Lleida (2001) ; Provinciaal Centrum voor Beeldende Kunsten –
Begijnhof, Hasselt (2001/2002)
Soggettività e narrazione, Castello di Rivoli, Turin
D’apertutto, 48e Biennale de Venise *
Remakes, Le Parvis/Centre d’art contemporain, Tarbes
So Far Away, So Close, Encore Bruxelles, Bruxelles *
Liverpool Billboard Project, Biennale de Liverpool
Cinéma, Cinéma, Contemporary Art and the Cinematic Experience, Stedelijk Van Abbe
Museum, Eindhoven *
Premises, Guggenheim Museum Soho, New York *
Trades Routes, 11ème Biennale de Sydney *
Côté Sud… entschuldigung, Le Nouveau Musée/Institut d’Art Contemporain, Villeurbanne ;
exposition itinérante: La Ferme du Buisson, Noisiel *
Breaking ground, Marian Goodman Gallery, New York
Wrapped, Vestsjaellands Kunstmuseum, Soro *
Le Donné, le Fictif, Centre National de la Photographie, Paris
Manifesta 2, European Biennial of Contemporary Art, Luxembourg *
La Terre est ronde, Nouvelle Narration, Musée de Rochechouart
Voices, Witte de With, Center for contemporary art, Rotterdam * ; exposition itinérante :
Fondation Miro, Barcelone; Le Fresnoy/Studio National des Arts Contemporains, Tourcoing
When World Collide, Center of Contemporary Art, Glasgow
Narrative Urge, Kunstmuseum, Uppsalla
Musiques en Scène, Musée d’art contemporain, Lyon
Fast Forward, Kunstverein, Hambourg
Vertical Times, Barbara Gladstone Gallery, New York
Zonen der Ver-Störung-Zones of Disturbance, Steirischerherbst’97, Marienninstitut, Graz
At One Remove, The Henry Moore Institute, Leeds *
Africus, 2éme Biennale de Johannesburg *
MUUTen, Museum of photography, Helsinki
The Sound of Art, Sound Gallery, Copenhague
Reviews, Galerie Roger Pailhas, Marseille
X-Squared, Wiener Secession, Vienne *
Identités, Le Nouveau Musée/Institut d’Art Contemporain, Villeurbanne
Europarte, Fondazione Bevilacqua la Masa, 47ème Biennale de Venise *
Moment Ginza, Le Magasin/Centre National d’Art Contemporain, Grenoble * ; exposition
itinérante: Färgfabriken, Stockholm (1997/1998)
One Minute Scenario, Printemps de Cahors *
Coïncidences, Fondation Cartier pour l’art contemporain, Paris *
Court Circuit, Le Nouveau Musée/Institut d’Art Contemporain, Villeurbanne
Images, objets, scènes, Le Magasin, Centre National d’Art Contemporain, Grenoble ;
exposition itinérante : Contemporary Art Center of Vilnius ; Estonian Museum of Art Soolaladu & Tallina Kunstihoone, Tallin
10 années d’activités, Galerie Roger Pailhas, Marseille
Found Footage, Galerie Klemens Gasser & Tanja Grunert, Cologne
Evening, Stichting De Appel, Amsterdam
Joint Ventures, Stephano Basilico Fine Arts, New York
Perfect, Galerie Jan Mot & Van Ben Boogaard, Bruxelles
L’effet cinéma, Musée du Luxembourg, Paris
City Space1996-Scuptures and Installations for Copenhagen, European Cultural Capital,
Copenhague *
Entre Deux, Galerie Jan Mot & Van Ben Boogaard, Bruxelles
Trafic, CAPC/Musée d’art contemporain, Bordeaux *
Installation, Cinéma, Vidéo, Electronique, 3ème Biennale d’Art Contemporain, Lyon *
Rewind, City Racing, Londres
Stoppage, Centre de Création Contemporaine, Tours
Moral Maze, Le Consortium, Dijon
Aperto, Le Nouveau Musée/Institut d’Art Contemporain, Villeurbanne
Shift, Stichting De Appel, Amsterdam *
Cosmos, Le Magasin/Centre National d’Art Contemporain, Grenoble *
Figures, Le Parvis/Centre d’art contemporain, Tarbes
Surface de réparations 2, FRAC Bourgogne, Dijon *
Économies, Galerie Roger Pailhas, Marseille *
Trumpf, Kunstverein, Hambourg
* Catalogue
18
Visuels disponibles pour la presse
Pierre Huyghe
Celebration Park
Pierre Huyghe, A Journey That Wasn't, 2005.
Super 16mm film et HD video transféré en HD video, couleur, son, TK min.
Courtesy : Marian Goodman Gallery, New York/ Paris
Photo: Pierre Huyghe.
Pierre Huyghe, A Journey That Wasn't, 2005.
Super 16mm film et HD video transféré en HD video, couleur, son, TK min. Partie filmée à Central
Park : Public Art Fund.
Courtesy: Marian Goodman Gallery, New York/Paris
Photo: Pierre Huyghe.
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Pierre Huyghe This is not a time for dreaming, 2004
Spectacle de marionnettes et film super 16 mm, transféré sur Béta Digital. 24 minutes, couleur, son.
Crédit photo: Michael Vahrenwald
Courtesy Marian Goodman Gallery, New York/Paris
20
- Publications -
Agenda – livre d’artiste
« I do not own modern times »
Textes de Daniel Birnbaum, Frederic Tuten et Emilie Renard
© M/M (Paris). éd. Paris musées. Parution début février 2006. 576p., prix : 150
ISBN 2-87900-955-3
.
Catalogue
Celebration Park
Préface de Suzanne Pagé et Vicente Todolí ; Textes de Daniel Birnbaum, Laurence Bossé, Julia
Garimorth, Dominique Gonzalez - Foerster, Dorothea von Hantelmann et Hans-Ulrich Obrist.
Interview de Pierre Huyghe par Hans-Ulrich Obrist. © M/M (Paris). éd. Paris musées. Parution
début mars 2006. 144 p., 96 images, prix : 29 . ISBN I2-87900-965-0
Dépliant
Textes de Anne Dressen, Véronique Follet, Julia Garimorth, Héloïse Le Carvennec
Publié à l’occasion du Prologue. © M/M (Paris) éd. Paris musées. 2
- Informations pratiques Transports
Métro : Alma-Marceau ou Iéna
RER : Pont de l’Alma (ligne C)
Bus : 32 - 42 - 63 - 72 - 80 - 92
Horaires d’ouverture
Mardi au dimanche de 10h à 18h
Mercredi de 10h à 22h
Fermeture le lundi
L'exposition est accessible aux personnes handicapées moteur et à mobilité réduite.
Tarifs
Plein Tarif : 4,50
Tarif réduit : 3
Tarif jeune : 2,20
Accès gratuit pour les moins de 13 ans
Accès libre aux collections permanentes
Musée d’Art moderne de la Ville de Paris / ARC
11, avenue du Président Wilson 75116 Paris - Tél : 01 53 67 40 00
www.mam.paris.fr
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