LIVRE BLANC 1998 - SFCM | Société Française de la Chirurgie de
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LIVRE BLANC 1998 - SFCM | Société Française de la Chirurgie de
LIVRE BLANC 1998 Sous l'égide de la Société Française de Chirurgie de la Main Editorial Chère lectrice, cher lecteur, Vous aurez nécessairement recours au moins une fois dans votre longue vie à un chirurgien de la main car vous appartiendrez à cette cohorte des 1400000 blessés dénombrés annuellement en France. Au moment où se transforme le système de santé nous sollicitons quelques instants l' attention de ses acteurs afin qu'ils saisissent l'importance de structurer les unités de chirurgie de la main et de valider un travail considérable qui a été entrepris avec sérieux depuis plusieurs décennies par les chirurgiens de la main et les différents organismes associatifs qui les fédèrent. À l'occasion du 33e congrès de la Société Française de Chirurgie de la Main, j'ai demandé au Docteur Guy Raimbeau, qui a créé et qui dirige le centre de la Main d'Angers, d'effectuer avec ses collègues l'état des lieux de cette pratique chirurgicale. Le bilan de ce travail est éloquent et ne pourra laisser indifférent aucun des acteurs en charge de l'organisation du système de santé. Ils ne manqueront pas d'être interpellés sur l'impossibilité d'obtenir une photographie exacte de l'activité de chirurgie de la main en France malgré l'interrogation de 14 instituts ou organismes officiels. Ils seront surpris d'apprendre qu'une intervention secondaire, conséquence d'une chirurgie primaire trop tardive ou réalisée par un chirurgien non spécialisé ou ne disposant pas d'un plateau technique adapté, générera un surcoût de 100000 francs. Cette étude montre que le chirurgien de la main a dû entreprendre une formation longue et complexe puisqu'elle implique à la fois la maîtrise de l'orthopédie et traumatologie, de la chirurgie plastique et des techniques de microchirurgie vasculo-nerveuse. Cette chirurgie ne nécessite pas d'investissements lourds sur le plan matériel mais elle est consommatrice de temps opératoire et postopératoire et est indissociable d'une parfaite collaboration avec les médecins rééducateurs, kinésithérapeutes, ergothérapeutes et appareilleurs. Enfin, c'est une chirurgie qui est parfaitement adaptée à la pratique ambulatoire grâce aux progrès des techniques d'anesthésie locorégionale. 1 L'enquête prouve que les patients bien informés sur la spécificité de la chirurgie de la main se dirigent massivement vers les équipes les mieux structurées, qu'elles exercent en secteur libéral ou public. À l'initiative de quelques chirurgiens de la main, il a été créé, voici plus de 20 ans, une Fédération des Services d'Urgence de la Main qui est devenue ensuite européenne (FESUM). Cette structure associative a démontré son efficacité en termes socio-économiques. Pour toutes ces raisons, il n'est plus possible de continuer à pénaliser, au nom des quotas, les unités de chirurgie de la main qui exercent dans le secteur libéral alors qu'en acceptant de traiter les urgences elles effectuent un véritable service public. L'Académie Nationale de Médecine, en octobre 1994, avait émis le vœux que: " ... les services d'urgence de la main remplissant les conditions de fonctionnement définies par la Commission nationale de restructuration des urgences soient réparties sur l'ensemble du territoire et soient habilitées comme Service d'accueil des urgences Spécialisées (SAUS) ". Cette notion s'est affirmée depuis sous le sigle POSU (Pôle spécialisé d'accueil et de traitement des Urgences). Nous souhaitons que l'organisation de cette activité chirurgicale s'effectue dans la plus grande concertation avec les pouvoirs publics. Les enjeux socio-économiques sont importants car réparer un blessé de la main dans les meilleures conditions, c'est le plus souvent lui assurer une reprise de travail à son poste initial. Une mutilation définitive est souvent le début de l'exclusion du monde du travail. Nous vous remercions de l'accueil que vous voudrez bien réserver à ce " livre blanc" en souhaitant qu'il soit l'occasion de créer une véritable dynamique pour intégrer, enfin, la chirurgie de la main dans notre système de santé. Professeur M. MERLE Président de la Société Française de Chirurgie de la Main 2 Introduction G. RAIMBEAU Centre de La Main, Angers Quel est l'état des lieux ? Quel avenir pour les unités de chirurgie de la main en France ? C'est à ces questions que nous avons essayé de répondre, lors du 33e congrès de la Société Française de Chirurgie de la Main, à Paris en décembre 1997. Le rôle primordial de la main est de traduire et d'exécuter des données cérébrales, mais la main subit de nombreuses agressions dont la gravité et le pronostic ne peuvent être appréciés que par un spécialiste. Pour la main, attachée à une consonance relationnelle, artistique, créatrice, tout comme le cœur ou le cerveau, le grand public réclame des soins de haut niveau et s'enquiert des règles de l'art. Parler d'Unités de chirurgie de la main, c'est déjà admettre la réalité d'une certaine notion de mesure des soins ou la connaissance d'une sorte de "granulométrie" d'évaluation des coûts de santé concernant une partie du corps. Comment peut-on connaître la réalité de cette chirurgie et quelle perspective peut-on proposer ? La France, pays dirigé depuis plusieurs siècles par une Administration centralisatrice, n'est pas en mesure, à ce jour, de connaître le contenu de ce groupe de dépenses de santé; pourtant, les activités de santé sont conduites sous la tutelle de l'État avec les organismes de financement - les producteurs de soins - les usagers de ces soins. Ces trois types d'acteurs interfèrent dans un choix de protection sociale caractérisée par une couverture financière quasi universelle collective qui respecte la liberté de choix des malades et la liberté de prescription des médecins, mais ce choix n'est pas associé à une vraie gestion d'entreprise puisqu'on ne recherche pas systématiquement la production au meilleur coût, ni à soigner plus avec la même enveloppe financière. Le mode de rémunération des acteurs est différent en fonction de l'appartenance au secteur public ou privé; par contre, le consommateur accède librement à ces deux secteurs. Le paysage sanitaire administratif de la France comprend 22 régions avec une direction d'Agence Régionale d'Hospitalisation (ARH), 16 Caisses Régionales d'Assurance Maladie (CRAM) où se coordonnent la politique et les actions des trois régimes d'assurance maladie ainsi que le suivi de la prévention; il existe 129 Caisses Primaires d'Assurance Maladie (CPAM) et plusieurs centaines de centres de traitement de remboursement (mutualistes ou corporatistes). Le Schéma Régional d'Organisation Sanitaire (SROS) sera modifié par celui dit "de la 2e génération" fin 1998 et, progressivement, le plan Juppé des ordonnances du 24 avril 1996 mettra en place de nouvelles règles d'exercice et de planification sanitaire avec, en particulier, l'accréditation et les contrats d ' objectif, et ce dès avril 2001. Les décrets du 30 mai 1997 sur les urgences vont modifier les modalités d'accueil et de traitement des blessés. Ces textes vont améliorer la prise en charge des urgences vitales, car ils leur sont adaptés; par contre, pour les urgences fonctionnelles et en particulier celles des 3 blessés de la main, la réglementation va aggraver l'encombrement des sites d'accueil et, par là, créer des difficultés sur le terrain pour les acteurs de soins et les consommateurs. Voici dressé le décor avec lequel nous allons bâtir notre enquête. Vous lirez la complexité de la collecte des chiffres; il est évident que notre système de santé devra, pour survivre, clarifier la teneur de ce qui est fait et mieux gérer. Pour garder le professionnalisme des acteurs de santé et contenter les usagers de soins, il faudra "tracer les soins", et s'appuyer sur d es données objectives et exhaustives, afin d'harmoniser le coût de la demande et celui des résultats; l'étude épidémiologique synthétique de la traumatologie de la main pourrait être un modèle unitaire de la problématique de santé publique. Je remercie tous ceux qui nous ont aidés à réaliser ce travail, à savoir les fonctionnaires responsables interrogés et les différents collègues qui ont pris le temps de m'aider. Ce travail est une prise de conscience et un signal d'alarme à l'adresse de l'État et des différents acteurs. 4 Comment approcher les chiffres ? Beaucoup de portes dans le labyrinthe administratif G. RAIMBEAU Centre de La Main, Angers Compte tenu de l'importance de l'Administration française, on pouvait imaginer obtenir rapidement la réponse à nos interrogations: combien de blessés de la main, combien de chirurgiens ? Quels coûts: globaux et analytiques? Quelle est la répartition analytique entre la part des indemnités et celle des frais thérapeutiques ? L'Institut National de la Statistique et des Études Economiques (INSEE) nous apprend que, en 1995, la France compte 58 millions d'habitants dont 20 % de plus de 60 ans (perspective de 25% en 2020), 25,6 millions d'actifs et 86,4 % de ces actifs sont des salariés (Tableau 1) [13]. En face de ces millions de consommateurs de soins potentiels, quels sont les acteurs de soins concernés par la traumatologie de la main ? On recense 186 282 médecins actifs (source: Conseil national de l'ordre des médecins de juin 1996), dont le groupe des 7109 chirurgiens, dont les 3/4 peuvent être confrontés à un acte de chirurgie de la main et, en particulier, les 1 629 chirurgiens orthopédistes. La France compte probablement 200 hyperspécialistes, leur recensement restant très difficile dans la mesure où les 219 membres de la Société Française de Chirurgie de la Main ne sont pas tous chirurgiens exclusifs de la main, et que bon nombre de chirurgiens opérant des mains n'en sont pas membres. On rapprochera l'existence de 1 583 établissements de santé ayant des secteurs opératoires. Nous avons interrogé 14 organismes, structures ou pôles de référence, pour la plupart financés par des fonds publics, sans avoir la possibilité d'obtenir un recueil exhaustif des traumatisés de la main et des statistiques homogènes (Tableau 2). Des trois caisses nationales d'assurance maladie (Tableau 3), seules deux connaissent la population des accidentés du travail et leur coût, puisque la caisse des non-salariés ne possède pas ce type de statistiques. Des enquêtes ciblées, comme celle sur les accidents de la vie courante de la Caisse Nationale d'Assurance Maladie des Travailleurs Salariés (CNAMTS), apportent un éclairage par sondage d'une frange de la population. L'enchevêtrement des services et la hiérarchie rendent difficile l'obtention de réponses à des questions précises, lorsque l'étude n'est pas à l'ordre du jour des plans de travail ou des travaux de recherche épidémiologique. Finalement, nous avons obtenu par le ministère de la Santé ou par des organismes en dépendant: - les données du PMSI 1995. Elles sont limitées car ce système manque d'exUaustivité (et par ailleurs, il ne touchait à l'époque que le secteur public d'hospitalisation). La CIM 9 est insuffisante ainsi que le catalogue des actes médicaux qui est actuellement en cours d'actualisation; 5 - les Statistiques d'Activité des Établissements (SAE); - l'exploitation d'enquêtes, comme celle sur les accidents domestiques (European Home and Leisure Accident Surveillance System; EHLASS), celle des secteurs opératoires en 1992. Les caisses nationales des salariés et des agricoles ont fourni un recueil exhaustif des accidents du travail [5, 8, 9]. Deux enquêtes de la CNAMTS ont également été étudiées: celle de l'activité KC 1992 [7] et celle des accidents de la vie courante 1987-1994 [6]. Dans l'enquête KC de la CNAM en 1992, portant sur 26 684 actes réalisés en activité libérale pendant 15 jours en octobre 1992, on relève que 71 % des 2606 dossiers de traumatologie sont en relation avec une intervention ou une immobilisation sur la main ou le poignet, le membre inférieur ne représentant que 19% et le reste du membre supérieur 10°/o (Figure 1). Dans cette même enquête, en ne prenant que les 5 150 actes d'orthopédie-traumatologie, plus de la moitié de ces actes sont en relation avec un geste sur la main ou le poignet (53 %). Le membre inférieur regroupe 35% des actes et le reste du membre supérieur 8 % (Figure 2). L'estimation des accidents de la vie courante est de 5 100 000 personnes blessées en 1990, pour un coût de plus de 12 milliards de francs. Trois fois sur cinq, il s'agit d'un accident domestique et la main représente la partie du corps le plus souvent touchée, avant le crâne et la cheville, avec plus de 18,2% du nombre total d'accidentés [4-6]. Cette enquête fort intéressante et détaillée méconnaît les lésions anatomiques. En exploitant les sources PMSI 1995, sur un total de 7766050 séjours, on obtient en traumatologie à partir de 685 136 Résumés Standardisés Anonymisés (RSA), une répartition de 35 % pour le membre supérieur, 36% pour le membre inférieur et 29% pour crâne-thoraxabdomen (Figure 3). En allant plus loin, on s'aperçoit que les séjours pour des traumatismes portant sur la main et le poignet représentent 59 % des séjours liés à la traumatologie du membre supérieur. Lorsqu'on isole l'entité main-poignet, 38 % des séjours sont en relation avec des plaies (Figure 4). Ce fort pourcentage montre le potentiel d'encombrement des services d'accueil et d'urgences par ces plaies; de plus, ne sont comptabilisés que les actes ayant donné lieu à un séjour hospitalier. Un peu déçus par le manque de coordination sur le plan national, nous avons été heureux de bénéficier des résultats d'une enquête faite par un organisme tiers (ni Caisse d'assurance maladie, ni Etat) à savoir celle de la Société Française d'AnesthésieRéanimation (SFAR) menée avec l'Institut National de la Santé et de la Recherche Médicale (INSERM) " Trois jours d'anesthésie en France en 1996 ". Les données de ce travail vous sont exposées plus loin par Madame le Professeur M.C. Laxenaire. À ce jour, malgré les nombreuses portes permettant d'accéder au labyrinthe administratif, il n'est pas possible d'avoir une synthèse officielle sur la traumatologie de la main et, a fortiori, sur l' ensemble de la pathologie de la main. 6 7 8 9 10 Aperçu des activités de chirurgie orthopédique et traumatologique au travers des activités anesthésiques (enquête SFAR1 1996) M.C. LAXENAIRE*, Y. AUROY**, F. PÉQUIGNOT***, F. CLERGUE**** * CHU Hôpital Central, Nancy ** Hôpital Militaire Percy, Clamart *** INSERM SCo°, Le Vésinet **** Hôpital Cantonal, Genève 1. Société Française d'Anesthésie et de Réanimation, 74, rue Raynouard, 75016 Paris. * Professeur d'Anesthésie-Réanimation, Département d'Anesthésiologie, CHU Hôpital Central, 54035 Nancy cedex. ** Praticien d'Anesthésie-Réanimation, Hôpital Militaire Percy, 92141 Clamart cedex. *** INSERM SC8, 44, Chemin de Ronde, 78110 Le Vésinet. **** Professcur d'Anesthésie-Réanimation, Hôpital Cantonal, Genève. Lors de la mise en place du décret n° 94-1050 du 5 décembre 1994 sur la sécurité anesthésique [12], la Société Française d'Anesthésie et de Réanimation (SFAR) a souhaité réaliser avec précision une évaluation quantitative de la pratique anesthésique en France. C'est en effet un préalable indispensable à toute étude ultérieure sur la morbidité/mortalité en rapport avec l'anesthésie. Cette évaluation quantitative était d'autant plus justifiée que depuis 1980, date de l'enquête INSERM sur l'anesthésie [14], il n'existait pas de données actualisées complètes sur ce point, officielles ou professionnelles. Pendant l'année 1996, la SFAR a donc mené, avec le soutien des syndicats professionnels et l'aide méthodologique et technique de 1'INSERM (SC8SC25), une enquête dans tous les établissements français où sont pratiquées des anesthésies (enquête intitulée " trois jours d'anesthésie en France "). Les objectifs de cette enquête étaient de connaître le nombre annuel d'anesthésies, les techniques, les conditions de réalisation (urgence, ambulatoire, moment dans la journée, durée), pour quels actes, pour quels patients, avec quelle pratique transfusionnelle... afin de comparer ces chiffres aux données de 1980. Pour que les résultats de l'enquête soient valables, il fallait que les 1 583 établissements français (métropole et DOMTOM) où sont pratiquées des anesthésies participent. Les anesthésistes-réanimateurs de chaque établissement devaient consigner, pendant 3 jours consécutifs tirés au sort, toute leur activité anesthésique en utilisant une fiche de recueil de données pour chaque patient anesthésié (cf. annexe 1). 11 Grâce à une parfaite campagne nationale d'information, et une motivation exceptionnelle de tous les anesthésistes-réanimateurs, le taux de participation a été de 98 % (100 % CHU et PSPH, 99 % CHG, 97% cliniques privées) et a permis de recueillir un échantillon de 62415 fiches, représentatif des activités nationales. Une procédure de vérification des fiches a posteriori a été réalisée dans 5 % des établissements tirés au sort. Elle a consisté à aller comparer, sur le terrain, les fiches transmises avec les données des cahiers opératoires. Le faible taux de données manquantes (2'\o) a confirmé que les variables relevées étaient correctes et autorisaient l'extrapolation à l'échelle nationale [16]. Les résultats ont montré qu'en 15 ans, le nombre d'anesthésies a plus que doublé, passant de 3 600 000 +/- 240000 en 1980 à 7 937 000 +/- 387000 en 1996. Tous les types d'établissements ont augmenté leurs activités, mais cette progression est plus forte dans le secteur privé qui réalise 58 % des actes. L'anesthésie pour des actes chirurgicaux ne représente désormais que 70% des activités anesthésiques (= 5879000 interventions chirurgicales), alors qu'elle représentait 90 % en 1980 (= 3 240 000). Figure 1 Répartition des principales activités pratiquées en 1996 sous anesthésie générale ou locorégionale. La chirurgie orthopédique et traumatologique (COT) réalisée sous anesthésie générale ou locorégionale correspond actuellement à 26% de l'activité chirurgicale, toutes spécialités confondues (Figure 1). C'est la spécialité chirurgicale la plus pratiquée en France, équivalant à 1450000 interventions chirurgicales nécessitant la présence d'un anesthésiste- réanimateur. Cette activité a doublé en 15 ans, puisqu'en 1980 elle ne représentait que 650000 actes [14]. Il faut signaler que, pour toutes les spécialités chirurgicales, le nombre d'actes a augmenté 12 depuis 1980, à l'exception de la chirurgie digestive qui s'est maintenue aux alentours de 700 000 interventions par an [14-16]. La chirurgie pratiquée sur le membre inférieur représente 57 % de l'ensemble de la COT, celle pratiquée sur le membre supérieur 43 % se décompose en 5 % pour la chirurgie de l'épaule et 38 % pour la chirurgie du membre supérieur (épaule exclue). Ces 38% englobent la traumatologie du membre supérieur traitée chirurgicalement, la chirurgie programmée du coude, du poignet et de la main. En 1980, la chirurgie de la main représentait 13% de l'activité totale de la COT [14]. Tableau 1 Activités de chirurgie orthopédique et traumatologique réalisées en 1996 selon le type d'établissement. Comparaison par rapport à la pratique générale de l'anesthésie [16] La COT est relativement plus pratiquée dans les hôpitaux généraux que dans les établissements privés et les CHU (Tableau 1). En effet, environ 30% de la COT s'effectuent dans les CHG, alors qu'ils n'assurent que 20 % de l'ensemble des anesthésies, et 50 % des cliniques font de la COT, alors que ces établissements privés effectuent 58 % de l'ensemble des anesthésies. La COT du membre supérieur est prédominante dans les CHG (32 %), alors que dans les cliniques c'est la COT du membre inférieur (51 %). Cette différence de pratique suivant le type d'établissement tient probablement à la mission d'accueil des urgences traumatiques de l'ensemble des établissements publics et surtout des CH de proximité. Il est par ailleurs clairement apparu que 36 % de la COT du membre supérieur (épaule exclue) avaient été réalisés en urgence, contre seulement 17% pour la COT du membre inférieur. Cela avait déjà été noté en 1980[22]. La COT est pratiquée sur le mode ambulatoire pour 21 % des cas. Ceci est superposable à l'ensemble des actes chirurgicaux. En effet, on a montré qu'en France en 1996, la part du mode ambulatoire était de 20 % de tous les actes chirurgicaux réalisés sous anesthésie 13 générale ou locorégionale [16]. La moitié de ces actes rénlisés en ambulatoire correspondait à la COT et l'ORL (à part égale). Les procédures orthopédiques du membre supérieur ont été plus volontiers réalisées sur le mode ambulatoire (36 %) que celles du membre inférieur (10%). La répartition des types d'actes orthopédiques ambulatoires a été identique quel que soit le type d'établissement. Figure 2 Age des patients anesthésiés pour chirurgie orthopédique et traumatologique. 2. Risque anesthésique selon la classification de l'American Society of Anesthesiologists (ASA): ASA 1: Absence d'une affection autre que celle nécessitant l'acte; pas de perturbation d'une grande fonction. ASA 2: Perturbation modérée d'une grande fonction, en relation ou non avec l'affection chirurgicale. ASA 3: Perturbation sévère d'une grande fonction, en relation ou non avec l'affection chirurgicale. ASA 4: Atteinte d'une grande fonction, faisant courir un risque vital imminent. ASA 5: Patient moribond. 14 Les caractéristiques des patients opérés de COT sont légèrement différentes suivant que la chirurgie porte sur le membre supérieur ou sur le membre inférieur. Ainsi, si le sexe est identique pour les patients opérés du membre inférieur (50 % d'hommes, 50 % de femmes), il y a prédominance masculine pour la COT du membre supérieur, épaule exclue: 54 % contre 46 %. L'âge des patients opérés du membre supérieur est moins élevé que celui des patients opérés du membre inférieur (Fig. 2): la majorité des patients se situe entre 10 et 55 ans pour le membre supérieur, alors que le pic maximum de patients opérés du membre inférieur est aux alentours de 70 ans. Quant au risque anesthésique2, il est moins élevé pour les patients opérés de COT du membre supérieur que du membre inférieur: 70 % sont en effet de classe ASA 1, 25 % sont ASA 2 pour le membre supérieur, alors que pour le membre inférieur 50 % sont ASA 1, 33 % ASA 2 et 13 % ASA 3. Comparés à l'ensemble de la population française anesthésiée en 1996, les patients opérés d'une COT du membre supérieur sont en moyenne à plus faible risque anesthésique: en effets 70% ont été classés ASA 1 contre 59 % de l'ensemble des Français anesthésiés, et 25% étaient ASA 2 contre 29% de l'ensemble des Français. Ce moindre risque pour les patients de COT du membre supérieur tient au fait que les pathologies opérées (fractures, accidents du travail...) sont l'apanage de sujets plus jeunes que ceux opérés de pathologies arthrosiques du membre inférieur où des facteurs tiers viennent grever la morbidité et mortalité anesthésiques. Les techniques d'anesthésie qui ont été utilisées pour la COT ont beaucoup évolué depuis 1980. En effet, à cette époque n'étaient réalisées que 4 % d'anesthésies locorégionales (ALR) pour les actes de chirurgie, alors qu'il y en a eu 23% en 1996. Environ 45 % des ALR ont été faites pour de la chirurgie orthopédique: les plus souvent pratiquées pour le membre supérieur ont été des blocs plexiques dans 55 % des cas, des ALR intraveineuses avec garrot dans 29 % des cas et des blocs tronculaires dans 12 % des cas. Concernant la COT du membre inférieur, la pratique de l'ALR est moins fréquente que pour la COT du membre supérieur. C'est la rachianesthésie qui a été prioritairement pratiquée, représentant 71% des ALR des membres inférieurs, suivie des anesthésies tronculaires (12%) puis plexulaires (9%), et enfin de l'anesthésie péridurale (5 %). 15 Figure 3 Durée des anesthésies pour la chirurgie orthopédique et traumatologique La durée des anesthésies, donc des interventions chirurgicales, est moindre pour la COT du membre supérieur que pour celle du membre inférieur (Figure 3). Ainsi 41 % de la chirurgie du membre supérieur durent moins de I h, 30 % moins de 2 h, alors que pour la chirurgie du membre inférieur 39 % durent moins de 2 h et 19 % moins de 3 h. Conclusion Bien que les objectifs de l'enquête SFAR n'étaient pas ciblés sur les activités chirurgicales, la connaissance des pratiques anesthésiques a permis de cerner les activités nécessitant la présence d'un anesthésiste-réanimateur. La codification plus précise des actes chirurgicaux dont les intitulés ont été notifiés par les anesthésistes-réanimateurs sur les fiches de saisie, pourrait être réalisée dans un temps ultérieur et devrait permettre d'affiner les données actuellement disponibles. Quoi qu'il en soit, il apparaît que la chirurgie orthopédique et traumatologique représente actuellement la principale discipline chirurgicale, équivalant à plus du quart de tous les actes de chirurgie. Ce chiffre est d'ailleurs probablement sous-estimé puisque les interventions réalisées en dehors de la présence d'un anesthésisteréanimateur n'ont pas été répertoriées. Presque 40 % de la chirurgie orthopédique et traumatologique correspondent à des interventions sur le membre supérieur (épaule exclue) où la chirurgie de la main tient une place certainement supérieure à celle relevée dans l'enquête INSERM de 1980. Les procédures chirurgicales du membre supérieur sont plus volontiers pratiquées sur le mode ambulatoire que le reste de la chirurgie, et l'utilisation des anesthésies locorégionales s'est considérablement accrue. Dans la mesure où 70% des interventions durent moins de 2 h, qu'elles touchent majoritairement des patients à faible risque anesthésique et qu'elles sont de plus en plus souvent réalisées sous anesthésie locorégionale plexiques ou tronculaires, la pratique ambulatoire de ces procédures devrait prendre un essor particulier. 16 Accidents de la main. Donnees socio-economiques M. LE BOURG Clinique Saint-Vincent, Saint-Grégoire Introduction Il y a 10 ans, Y. Allieu organisait dans le cadre d'Euromédecine 87 à Montpellier un colloque sur la main traumatique; en introduction, R. Tubiana [1-23] situait le poids socio-économique des accidents de la main: - 1/3 des accidents du travail concerne la main; - 1/4 des journées de travail perdues est dû à ces traumatismes; - 1/10 des accidents entraîne une incapacité permanente partielle(IPP); - 1/3 de l'ensemble des IPP résulte des accidents de la main. "Ces chiffres ne tiennent pas compte des accidents dits domestiques. Si on ajoute ces derniers à ceux du travail, le total des accidents de la main dépasse en France 500 000 par an. " Ce chiffre de 500 000 accidents de la main par an a été souvent repris, mais a été peu précisé; nous savons que, depuis 10 ans, la prévention s'est améliorée, l'emploi s'est modifié et que la chirurgie de la main s'est structurée, mais le nombre des accidents a-t-il varié et leur incidence économique a-telle changé ? Notre propos est une synthèse actualisée. Méthodologie Les difficultés sont nombreuses, liées au manque de données, ou à leur caractère partiel (étude de groupes spécifiques), et à leur manque d'homogénéité: il existe des différences dans le mode de recueil qui peut être exhaustif ou statistique et surtout dans le type de données recueillies qui rendent les comparaisons difficiles et nécessitent des extrapolations. Certains chiffres sont donc des estimations. On peut distinguer trois types de traumatismes ayant chacun leur mode de recueil de l'information: - les accidents du travail; - les accidents de circulation; - les accidents de " vie courante ". Les accidents du travail 17 Ce sont les mieux documentés, car ils impliquent le recueil d'un diagnostic. On dispose de deux grandes sources mises à jour chaque année: - celle du régime général de l'assurance maladie (14 499 318 salariés); - celle de la mutualité sociale agricole (1 332 632 salariés). Nous avons utilisé les statistiques de 1995. Mais, il manque: les agriculteurs exploitants, les travailleurs indépendants, les professions libérales... Ils représentent 6 512 000 personnes soit 29 % des actifs occupés (source INSEE: enquête emploi mars 1995). Les accidents de circulation Il n'existe pas à notre connaissance de bilan global des accidents de circulation avec un diagnostic lésionnel. Nous disposons de deux sources qui comportent des renseignements diagnostiques: - l'étude du laboratoire d'accidentologie et de biomécanique PSA Peugeot Citroen/Renault qui recueille les données expérimentales d'accidents provoqués, pour les occupants de voitures. Elle a débuté en 1970 et porte sur 11 752 occupants; - l'enquête du laboratoire d'épidémiologie appliquée à la sécurité des transports (INRETS) qui recense les victimes d'accidents de la circulation du département du Rhône. Elle utilise la classification lésionnelle internationale AIS (Abbreviated Injury Scale) qui associe diagnostic topographique et lésionnel, et indice de gravité. Elle est exhaustive. Les accidents de " vie courante " Ils incluent les accidents domestiques, scolaires, de sports et de loisirs et excluent les accidents de circulation, du travail, ainsi que les agressions. Il n'y a pas de recueil exhaustif de données par manque d'information diagnostique. On dispose de deux enquêtes: - une enquête épidémiologique: l'enquête EHLASS (European Home and Leisure Accident Surveillance System) débutée en 1986. Elle étudie les patients admis aux urgences de 9 hôpitaux (Aix-en-Provence, Annecy, Besançon, Béthune, Bordeaux, Clermont-Ferrand, Limoges, Reims et Vannes). Elle ne constitue pas un échantillon représentatif et ne peut pas être extrapolée [13]. 18 - une enquête statistique: l'enquête CNAMTS sur les accidents de la vie courante réalisée de 1987 à 1994 [6]. C'est une enquête postale rétrospective qui interroge un échantillon représentatif des assurés du régime général sur les accidents de vie courante survenus dans les 12 derniers mois. Elle porte sur 606 716 personnes. Résultats Nous avons essayé de chiffrer le nombre d'accidents de la main et d'apprécier leur degré de gravité. Tab.01 Les accidents du travail (Tableau 1) Lorsqu'il y a un arrêt de travail, plus d'une fois sur quatre la main est blessée, mais les données de la CNAMTS ne prennent pas en compte les accidents sans arrêt de travail. On peut faire une estimation: - soit à partir des données de la MSA 1995 (55,6% des accidents donnent lieu à arrêt de travail): le nombre total serait d'environ 338 000; - soit à partir des données de la CRAM de Haute Normandie 1995 [4] (48,7% des accidents donnent lieu à arrêt de travail): le nombre total serait alors d'environ 385 000. Les accidents du poignet ne sont pas comptabilisés. Ils représentent 3,81 % du total des accidents avec arrêt (source CRAM Bretagne 1995), soit environ 25 600. Ces chiffres sont par défaut: si les salariés de la CNAMTS et de la MSA sont les catégories les plus à risque pour les accident du travail de la main, il faut rappeler que 29 % des actifs ne sont pas comptabilisés. Pour mesurer la gravité des accidents, nous avons retenu (Tableau 2): 19 - l'existence d'un arrêt de travail; - la durée de l'arrêt de travail; - l'existence d'une IPP et son taux. Nous avons répertorié près de 200 000 accidentés de la main étiquetés graves, avec une fréquence plus élevée en milieu agricole quant à l'IPP (9,57 % CNAMTS- 16,54% MSA) alors que le taux moyen est identique de 5,64 %. Les accidents de la main totalisent 29,8 % des IPP et 18,7% des jours perdus par incapacité temporaire (IT). Les accidents du poignet ont une durée moyenne d'arrêt de travail de 41,3 jours. Ils entraînent une IPP dans 8,16 % des cas, d'un taux moyen de 8,5 % (source: CRAM Bretagne 1995). Les accidents de la circulation Le ministère des Transports ne fournit qu'un bilan global: en 1995, 132 949 accidents ont entraîné 8 412 tués et 181403 blessés dont 32 957 graves. L'enquête du laboratoire d'épidémiologie appliquée à la sécurité des transports (LEAT) est plus exhaustive, selon les mêmes critères d'inclusion que les bulletins d'analyse d'accidents corporels de la circulation (" BAAC ") à l'origine de la statistique officielle, la statistique du ministère ne prend en compte que 61 % des blessés relevant de soins. Les traumatismes de la main et de l'avant-bras représentent 19% du total, environ 1/3 de ces traumatismes relève de la consultation chirurgicale ou de la chirurgie. On peut situer le nombre de ces accidents autour de 56000 dont environ 18 500 graves. L'étude expérimentale du laboratoire d'accidentologie montre une fréquence inférieure: 13,3 % d'accidents de la main dont 24 % de graves (parallèlement 10% des blessés graves ont une fracture déplacée de l'avant-bras), mais elle n'étudie que des accidents de voiture. 20 Les accidents de " vie courante " L'enquête sur les accidents de vie courante de la CNAMTS [6] estime la fréquence des accidents de la main à 16,45 accidents pour 1 000 personnes et par an, soit 954 860 (pour une population de 58 020 080 habitants). Les accidents de la main représentent 21,7% des accidents de vie courante. L'enquête EHLASS [13] donne un résultat comparable: doigts 14,4 %, main sauf doigts 4,4 %, poignet 5,5 % du total des accidents recensés. Les critères de gravité sont plus difficiles à définir, car cette population ne comprend que 40% d'actifs. On peut cependant retenir que: - 1/2 des patients (501 862) ont eu recours à un médecin; - 1/3 des patients (293198) ont été admis dans un établissement hospitalier; - 22,2 % des patients ayant un emploi ont eu un arrêt de travail d'une durée moyenne de 24,4 jours; - les accidents scolaires entraînent un arrêt dans 5,6% des cas et une dispense de sport dans 26,9 % des cas. Au total, on peut retenir le chiffre d'environ 1 400 000 accidents de la main par an. 21 Fig.01 L'appréciation de la gravité, en l'absence de critères définis et communs aux différentes sources, est plus approximative. Le chiffre de 620 000 paraît une estimation raisonnable (Figure 1). Coût financier Le coût global peut être divisé en plusieurs postes, à savoir ceux: - des dépenses liées aux soins: · frais médicaux et paramédicaux: honoraires, pharmacie, examens complémentaires, rééducation, frais de transport...; · frais d'hospitalisation. Le budget global, dans le secteur public, rend difficile l'analyse de ces différents postes. - des dépenses d'indemnisation: · indemnités journalières pour arrêt de travail; · indemnités pour incapacité permanente partielle. Elles peuvent être versées sous forme de capital ou de rente annuelle dont le montant prévisionnel tient compte de l'espérance de vie. Ces indemnités dépendent éventuellement de la prise en charge ou non au titre de l'accident du travail. Ces chiffres peuvent être modifiés en raison de l'éventuelle nécessité de traitements complémentaires. Ce coût global est actuellement difficile à estimer, ce qui peut étonner. Les accidents de vie courante et les accidents de la circulation n'ont pas fait l'objet d'étude de leurs coûts en dehors d'enquêtes ponctuelles de la CNAM ou d'assurances privées [19]. L'étude des coûts des accidents du travail est plus précise mais elle est rarement associée à un diagnostic lésionnel. Nous disposons cependant des études spécifiques des coûts des accidents de la main réalisées par la MSA nationale et la CRAM de Haute-Normandie. Le coût moyen d'un accident de la main avec arrêt (source: au CRAM Haute Normandie 1994) est de 10802 F tandis que le coût moyen est de 11469 F pour un accident en général, pour la même caisse [4]. 22 Pour la MSA, le coût moyen d'un accident de la main avec arrêt est de 12503 F tandis que le coût moyen global, avec ou sans arrêt, est de 7509 F [5]. La majeure partie des dépenses est liée aux indemnités. Pour les accidents en général (source: CRAM Bretagne 1995), cette part atteint 79 %, l'hospitalisation 9%, et les frais médicaux et paramédicaux 12% (ce budget frais médicaux et paramédicaux est sensiblement égal au budget consacré à la prévention des accidents). Pour les accidents de la main (source: CRAM Haute Normandie 1994), la répartition est sensiblement la même: les indemnités représentent 81% (43 °/O IJ + 38 % IPP), l'hospitalisation 7 % et les frais médicaux et paramédicaux 12 %. Les chiffres MSA (source: MSA 1995) sont encore plus significatifs: la part des indemnités atteint 83,8 % (37,9% d'IJ + 45,9% d'IPP) pour 16,2% à la part des soins de santé. Cette part plus importante des IPP peut être liée à leur fréquence: 16,5% des accidents ont une IPP contre 9,5 % dans le régime général. Le mode d'indemnisation de l'IPP d'un accident du travail, par capital pour un taux inférieur à 10%, et par rente pour un taux supérieur à 10% majore encore cette part de la dépense d'indemnisation (Tableau 3). Tab. 3 Le coût moyen d'un accident de travail en général est de 13488 F. il est de 9063 F si l'IPP est < 10% et de 448373 F si l'IPP est > 10% soit un ratio de 1 à 50 (source CNAMTS 1995). 23 Cet intérêt économique à réduire le taux des IPP a été souligné dans des études préalables [1117] qui analysaient plus spécialement les bénéfices de la microchirurgie et de la replantation. Les données d'une assurance privée (MACIF Loir-Bretagne) (Tableau 4) montrent également des écarts de coût très importants pour des pathologies fréquentes apparemment plus simples, et justifient le même effort pour proposer le meilleur traitement possible d'emblée. Tab. 4 Une assez grande homogénéité des différentes régions de France existe dans les écarts des taux d'IPP (Figure 2). Pour la main, les taux suivent ceux de l'ensemble des accidents, les différences les plus significatives concernent la durée moyenne du nombre de jours d'arrêt (IT) (Figure 3), mais elles ne sont pas non plus spécifiques de la traumatologie de la main. Fig 2 24 Fig 3 Tendances Le nombre d'accidents du travail a nettement diminué depuis 1955 mais, depuis 1985, un palier est atteint. Ceci est vrai pour les accidents en général mais également pour ceux de la main (Figure 4) et révèle une certaine limite à la prévention. Fig 4 Le nombre d'accidents avec IPP (Figure 5), le taux moyen d'IPP (Figure 6) montrent des évolutions identiques. 25 Fig 5 Fig 6 Le nombre de jours d'arrêt de travail d'abord croissant évolue aussi vers un palier (Figure 7). 26 Fig 7 Le coût global est stable depuis quelques années mais reste très lié au pourcentage d'accidents avec IPP et au taux moyen d'IPP (Tableau 5) reflétant la part importante de l'indemnisation de l'IPP. La part du coût des soins pour les accidents de la main, très modeste en valeur absolue, montre également une stabilisation (Tableau 6). Tab 5 27 Tab 6 Conclusion Les accidents de la main sont fréquents (1400 OOO/an), ils gardent une place prépondérante en traumatologie et justifient l'intérêt spécifique qu'on leur porte, tant par leur fréquence que leur gravité pour 620 000 d'entre eux. I1 faut admettre qu'il restera toujours un nombre plancher d'accidents de la main au-dessous duquel il sera difficile de descendre. La prévention sur les lieux du travail a ses limites et le champ de la vie courante est moins accessible à la prévention. Les dépenses d'indemnisation représentent 80 % du coût global d'un accident de la main. Si la durée de l'arrêt de travail est un élément difficile à maîtriser car lié à l'environnement, la diminution du taux IPP passe par l'amélioration du résultat. Espérer avoir de meilleurs résultats fonctionnels, c'est aussi envisager de diminuer ce poste de dépense. Les frais d'hospitalisation peuvent diminuer par une plus grande efficacité de la prise en charge et par le développement de la chirurgie ambulatoire. Une meilleure évaluation des résultats passe par un recueil plus exhaustif et plus homogène des données tant médicales qu'économiques; elle peut contribuer à optimiser les réseaux de soins. Les chirurgiens, acteurs principaux du traitement des accidents de la main, devraient s'impliquer activement dans l'évaluation et le suivi des soins pour lesquels les "économies " ne doivent pas se faire aux dépens de la qualité. 28 La chirurgie de la main à Nantes Analyse d'un an d'activité F. CHAISE Clinique Mutualiste, Nantes " Il est plus facile d'affirmer ex cathedra que de prouver " J.I. Comtet, La Main 1996;1: 77-78. Introduction Cette enquête, dont nous rapportons les principaux éléments, a été réalisée par les médecins du service médical de l'assurance maladie de Nantes. Il trouve sa place dans une perspective large de santé publique dépassant le secteur strictement nantais. Il s'agit d'une étude de l'offre de soins en matière de chirurgie de la main, activité qui n'est pas reconnue comme une spécialité à part entière et dont la place reste à définir en termes administratifs. L'objectif était d'évaluer le volume et la nature des actes pratiqués (urgents ou programmés), les méthodes de prise en charge (anesthésie, type d'hospitalisation, qualification des opérateurs) ainsi que la répartition des actes entre les divers établissements publics ou privés dans lesquels la chirurgie de la main est pratiquée d'une façon régulière depuis de nombreuses années à Nantes. Méthodologie Les opérateurs ont tous été d'accord pour autoriser les médecins de l'assurance maladie à accéder à l'ensemble de leurs dossiers. Cinq étapes ont été définies pour établir un protocole d'étude qui a été accepté par l'ensemble des opérateurs de la spécialité impliqués dans cette analyse. - Identification des pathologies spécifiques de la chirurgie de la main. - Construction d'un catalogue permettant ensuite l'analyse statistique par des moyens informatiques. - Identification des opérateurs spécialisés. - Mesure quantitative des activités entre le 1/07/95 et le 30/06/96. - Conclusions. Catalogue des actes spécifiques à la chirurgie de la main L'ensemble des pathologies et des thérapeutiques concernant la main et le poignet, à l'exclusion des fractures du poignet dont la prise en charge actuelle revient plus aux chirurgiens orthopédistes, a été pris en compte. Les autres pathologies du membre supérieur 29 ont été exclues, même si certains opérateurs en avaient la pratique régulière. Il s'agit donc d'une étude de la pratique de la chirurgie de la main au sens strict du terme sur une période d'un an, entre le 1er juillet 1995 et le 30 juin 1996. Identification des " équipes " à Nantes Quatre équipes exercent dans la spécialité considérée. - Deux opérateurs exercent d'une façon quasi exclusive la chirurgie de la main, chacun dans un établissement privé polyvalent. Un des deux opérateurs est membre de la Société Française de Chirurgie de la Main. - Une équipe de quatre chirurgiens exerce exclusivement la chirurgie de la main dans un établissement privé mutualiste participant au service public hospitalier (PSPH) et pour une part limitée dans un établissement privé. Les quatre opérateurs sont membres de la Société Française de Chirurgie de la Main. Le service PSPH est membre de la Fédération Européenne des services d'urgence de la main sous le label Nantes assistance main, et est qualifiant pour le Collège de chirurgie de la main. - Le centre hospitalier régional universitaire (CHU): dispose d'une équipe constituée de deux praticiens hospitaliers, un chef de clinique et un interne. Dans le cadre de l'urgence, d'autres opérateurs interviennent comme le montre le tableau 11. Résultats de l'étude Divers tableaux schématisent les résultats de l'enquête. Tableau 1 : Nombre de patients par secteur opératoire Privé 2100 = 23% PSPH 5500 = 60% CHU 1638 = 17% Total : 9238 (hors fractures du poignet) Tableau 2 : Activité opératoire par secteur urgences / programmé en % de l’activité globale du service CHU PSPH PRIVE Prog 29% 61% 90% Urg. 71% 39% 10% Total 1638 5500 2100 30 Tableau 3 : Interventions et Type d'anesthésie CHU PSPH PRIVE Générale 70% 16% 29% Régionale 26% 80% 66% Locale 4% 1% 2% Tableau 4 : Interventions et Type d'hospitalisation CHU PSPH PRIVE Hospit 43% 32% 71% Amb 23% 67% 28% Ext. 34% 1% 1% Tableau 5: Type d'hospitalisation et chirurgie du syndrome du canal carpien CHU PSPH PRIVE Amb. 66% 54% 29% Hosp. 46% 34% 71% Tableau 6 : Interventions programmées et origine des patients CHU PSPH Privé Circons. 81% 63% 59% Hors circons. 19% 37% 41% Tableau 7 : Interventions urgentes et origine des patients CHU PSPH PRIVE Circons. 87% 75% 95% Hors circons. 13% 25% 5% 31 Tableau 8 : Type de pathologie programmée CHU PSPH PRIVE Synd canal. 11% 19 % 51% Dupuytren 2% 8% 11% Tumeurs 15% 15% 18% Rhumato. 7% 22% 8% Polyarthrite 5% 4% 0,1% Ablat mat. 18% 15% 1% Tableau 9 : Urgences et délai de prise en charge CHU PSPH PRIVE Immédiate 72% 87% 66% Différée 28% 13% 34% Tableau 10 : Durée d'hospitalisation en jours Privé et PSPH 2,39 ± 0,76 J Public 5,4 ± 8,1 J Tableau 11 :Répartition de la prise en charge de urgences en fonction de la qualification des opérateurs sur 542 cas Qualification du chir. CHU PSPH PRIVE TOTAL Main 35 222 38 295 Orthopédiste 22 1 23 Chir. Pédiatrique 6 6 Chef de clinique 77 77 Interne 141 141 Total 281 223 38 542 Tableau 12 : Répartition des interventions en fonction de l’âge des patients Age CHU PSPH PRIVE Moins de 15 ans 17% 6% 1,8% Plus de 15 ans 83% 94% 98,2% nb tot. Patients 1638 5500 2100 32 Discussion Les résultats de ce travail qui représente l'analyse d'une année d'activité à Nantes en chirurgie de la main sont exclusivement présentés par type d'établissement et ne prennent en compte que l'activité opératoire réalisée dans des salles d'intervention dûment identifiées. Les actes externes ne sont pas comptabilisés bien qu'ils puissent représenter un certain volume. On observe que les établissements privés dans leur ensemble effectuent de loin le plus grand nombre d'interventions puisqu'il est annuellement de 7532 pour six opérateurs. La charge moyenne annuelle par opérateur est ainsi de 1200 patients. Le nombre d'interventions répertoriées au CHU est de 1638 pour un nombre d'équivalent temps plein difficile à apprécier mais qui de toute façon est supérieur à 2 (Tableau 11). Cette charge différente par opérateur exprime certainement aussi le fait qu'au CHU, les opérateurs exercent des activités parallèles qui n'appartiennent pas en propre à la chirurgie de la main. En ce qui concerne la prise en charge des urgences, le CHU et le secteur PSPH assurent massivement le rôle prédominant. Cependant, il apparaît que le secteur PSPH qui prend en charge le plus grand nombre de patients en urgence (Tableau 2) diffère moins l'heure d'intervention, alors que les causes de report ont toutes les raisons d'être les mêmes pour le PSPH et pour le CHU, à savoir: - occupation des plateaux techniques - ce qui pose le problème des plateaux techniques polyvalents dans lesquels la chirurgie de la main trouve difficilement sa place car il ne s'agit pas d'urgence vitale; - raisons d'ordre anesthésique - enfant non à jeun, problème médical grave; - indisponibilité des opérateurs occupés à d'autres tâches urgentes - ce qui pose le problème de la coordination entre établissements ou celui de la mise en commun de moyens. Pour ce qui est de la chirurgie programmée, il est clair que le secteur privé a développé d'une façon considérable une activité sur un créneau étroit qui représente deux tiers de son recrutement (syndrome du canal carpien et maladie de Dupuytren). Néanmoins, l'activité complémentaire de ce secteur est loin d'être négligeable tant en termes de quantité que de diversité. Les différents tableaux montrent aussi des différences de pratique entre les établissements pour les types d'hospitalisation, le mode d'anesthésie utilisé, la durée d'hospitalisation sans que ces disparités s'expliquent par le type de pathologie, le type de lésions associées ou la provenance des patients. L'analyse de ces paramètres sur une pathologie fréquente, comme celle du syndrome du canal carpien, montre bien les différences d'approche qui tiennent au dé terminisme et à l' organisa ti on même de chacun des secteurs étudiés et, pour le CHU, à l'hétérogénéité des équipes, en particulier d'anesthésistes. Conclusion Ce travail mené par le service médical de l'assurance maladie de Nantes, outre son côté novateur pour ce qui concerne la chirurgie de la main qui est ici étudiée en tant que telle, 33 permet de faire quelques suggestions sans doute applicables dans d'autres secteurs géographiques. - La coordination entre les services ou la mise en commun de moyens humains et techniques devrait lutter contre l'éparpillement et la dilution des compétences; - La spécificité de la chirurgie de la main pourrait alors s'exprimer pleinement et les caractéristiques de fonctionnement propre à cette spécialité être appliquées aux patients: . recours aux anesthésies loco-régionales, . développement des actes réalisés en ambulatoire, . formation des jeunes chirurgiens de la spécialité en privilégiant les binômes chirurgiens formés - chirurgiens en formation, . enfin et surtout l'exploitation parallèle d'un plateau technique double permettant la prise en charge simultanée des urgences et de la chirurgie programmée sans attendre la fin d'un programme, . les centres dédiés nous paraissent devoir conserver leur double activité urgences et actes programmés, car celle-ci permet la formation des plus jeunes qui doivent apprendre la chirurgie tant en urgence qu'en programmé. 34 Faut-il avoir peur des nouveaux textes réglementaires ? F. MARIN BRAUN Clinique du Parc, Strasbourg Les premiers décrets sur l'accueil et le traitement des urgences sont parus en mai 1995 mais n'ont guère été réellement appliqués. Ils ont été en partie repris et modifiés en 1997: - Décret N° 97-615 du 30 mai 1997 concernant l'accueil et le traitement des urgences; - Décret N° 97-616 du 30 mai 1997 sur les conditions techniques de fonctionnement. Ces deux décrets réglementent et organisent l'activité d'urgence dans les établissements publics et privés et précisent le rôle des Agences Régionales pour l'Hospitalisation (ARH) dans cette organisation. Le postulat de base est que désormais le traitement des urgences est subordonné à une autorisation de l'ARH et que seules trois structures sont possibles pour cette pratique: - Les SAU: Service d'Accueil et de traitement des Urgences; - Les POSU: Pôle Spécialisé d'accueil et de traitement des Urgences; - Les UPATU: Unité de Proximité d'Accueil et de Traitement des Urgences. Pour chacune de ces structures, il faut considérer des conditions d'autorisation d'une part, et des conditions techniques de fonctionnement d'autre part. Si ces conditions sont remplies, une demande d'autorisation auprès de l'Agence Régionale pour l'Hospitalisation est possible. Conditions d'autorisation S.A.U. - Accueil et traitement sans sélection de toutes les urgences; - Ouverture 24 h/24 h et 365 jours par an; - Comporte au moins des services de réanimation, médecine, cardio-vasculaire, pédiatrie, anesthésie-réanimation, chirurgie orthopédique et viscérale; 35 - Présente en même temps une demande de SMUR (Service Mobile d'Urgence et de Réanimation). L'énumération de ces conditions d'autorisation montre que le titre de SAU ne pourra être accordé qu'à des centres hospitalo-universitaires ou des gros centres privés qui constitueront la colonne vertébrale de l'organisation de l'accueil et du traitement des urgences en France. POSU - Autorisation exceptionnelle donnée par l'A.R.H. après avis du Comité Régional d'Organisation Sanitaire et Sociale (CROSS) et subordonnée à une convention avec un SAU. - Le POSU accueille et traite sur site unique, de façon prépondérante et hautement spécialisée, des affections touchant un même organe ou altérant une même fonction. UPATU - Accueil sans sélection de toutes les urgences; - Traitement des actes simples; - Transfert des autres à l'aide d'un " contrat de relais>> vers un autre établissement de santé capable d'accueillir ces urgences; - Ouvert 24 h/24 h et 365 jours par an mais pouvant cependant fonctionner une partie de l'année de façon saisonnière; - La présence d'un service de médecine est obligatoire. Ces deux structures POSU et UPATU, moins importantes que le SAU, montrent la volonté des services publics d'utiliser des structures soit plus spécialisées (POSU), soit mieux réparties sur le territoire (UPATU), de façon à réaliser un maillage le plus efficace possible. Conditions techniques de fonctionnement - Les locaux: quelle que soit la structure, ils devront comporter: · une zone d'accueil, · une zone d'examen et de soins, · une zone de surveillance. - Le secteur opératoire devra comporter deux salles d'opération et une salle de surveillance disponible 24 h/24 36 - L'imagerie devra comporter pour les SAU: · un service de radiologie, · une échographie, · un scanner, · une angiographie 24 h/24. Dans le cas des UPATU, seul un service de radiologie avec une interprétation des clichés dans un délai de moins de 12 heures est nécessaire. - Le laboratoire doit fournir les examens biologiques 24 h/24 en urgence. Pour les UPATU, une convention avec un laboratoire extérieur à l'établissement est autorisée. - Psychiatrie: quel que soit l'établissement, une convention avec un établissement participant au service public hospitalier est obligatoire pour l'accueil et le traitement des urgences psychiatriques ou mixtes. - L'équipe médicale doit comporter: · un médecin coordonnateur formé, · un médecin de garde qualifié, · un certain nombre d'étudiants internes ou résidents. À noter que dans le cadre d'un UPATU les médecins de l'établissement peuvent participer à ce service de garde. - L'équipe paramédicale doit comporter: · un cadre infirmier, · deux infirmiers diplômés d'état pour les SAU, · un seul pour les UPATU, · des aides-soignants, · des agents de service, · un assistant-social, · un agent des admissions. Demande d'autorisation auprès de 1'ARH Elle ne peut être formulée que si ces conditions d'autorisation et ces conditions techniques de fonctionnement sont réalisées; une demande d'autorisation doit être faite auprès de l'ARH. 37 Il faut cependant tenir compte du planning de révision des <<SROS urgences" (Schéma Régional de l'Organisation Sanitaire) qui devront être obligatoirement révisés avant le 1er janvier 1999. Auparavant, le directeur de l'Agence Régionale pour l'Hospitalisation organisera une session régionale d'études et des propositions sur l'offre des soins en urgence. Cette session a pour but de: - proposer un projet de répartition territoriale, - préciser les établissements possibles, - indiquer les contrats-relais et les réseaux necessa~res, - indiquer le rôle du médecin traitant. Après la publication du SROS, révisé donc au plus tard à partir du 1/1/1999, un délai de quatre mois est accordé par le ministre de la Santé pour le dépôt des demandes d'autorisation. Poursuite de l'activité d'urgence Le directeur de l'ARH peut, de sa propre initiative, organiser une mission d'expertise interrégionale qui aura pour mission d'examiner: - les moyens humains et techniques, - les références médicales et professionnelles, - les qualifications urgences, - les garanties de sécurité, - les garanties de qualité médicale. L'avis de la mission sera transmis au CROSS, à la suite de quoi une autorisation pourra être donnée, touj ours limitée dans le temp s et cons tamment soumise à une évaluation basée sur des référentiels de qualité. Mission de service public ? Pour faire la synthèse, il faut comprendre que, pour le législateur, l'accueil et le traitement des urgences constituent des missions de service public: - Ces missions sont encadrées par des décrets. - Il s'agit d'un acte volontaire soumis à une demande d'autorisation. - La sélection se fera en fonction de la compétence et non pas par rapport aux patients, c'est-àdire l'égalité " public-privé " concerne les droits et les devoirs. - L'évolution voulue par les services publics se fait vers l'autonomie des services d'urgences, et surtout, vers la création de réseaux de soins. Un réseau ? Pour quoi faire ? La créntion de réseau correspond à une orientation de santé publique. 38 - Son but ? Il s'agit de la prise en charge globale du blessé depuis la prévention jusqu'à la reprise de ses activités. - Comment? Il faudra élaborer un partenariat entre les différents professionnels complémentaires, coordonner leurs interventions, adapter l'offre de soins, et garder sa spécificité à la chirurgie de la main. - Quelle structure? La réalisation de contrats écrits et validés par l'ARH est obligatoire. L'expérience du service SOS MAIN dans le bassin sanitaire de Strasbourg Un embryon de réseau a été réalisé dans le bassin sanitaire de Strasbourg à partir de 1995. En effet, avant cette date, deux services indépendants assuraient en parallèle le traitement des urgences de la main 365 jours par an et 24 h/24: - SOS MAIN Strasbourg - et le Centre de Traumatologie. À partir de 1995, le Centre de Traumatologie obtenant son affiliation à la FESUM (Fédération Européenne des Services d'Urgences de la Main) rejoint ainsi SOS MAIN Strasbourg, membre fondateur depuis 1975. Les deux services répondant aux critères de la FESUM ont décidé d'un commun accord d'engager une collaboration afin de mieux organiser l'offre de soins pour le traitement hautement spécialisé des traumatismes de la main dans le bassin sanitaire de Strasbourg. En effet, l'étude des caractéristiques des deux centres, de leurs activités respectives constatées et prévisibles, et des flux saisonniers des urgences de la main les a conduits à partager la garde pour les urgences tout en continuant à exercer leur activité propre de chirurgie réglée comme par le passé. Ainsi, pour toute urgence de la main, un seul centre SOS MAIN avec un numéro de téléphone unique est à la disposition du public orientant les blessés vers SOS MAIN Strasbourg-Centre, les semaines impaires, et SOS MAIN Strasbourg-Sud, les semaines paires. Cette collaboration entre une structure publique et une structure privée donne actuellement satisfaction tout en assurant comme auparavant le traitement des urgences de la main. Elle permet de réduire de deux à un le nombre des services de garde 365 jours par an et 24 h/24. L'étude des activités respectives des deux services et de leur activité globale montre que cette collaboration a été bénéfique en termes de volume d'activité (Figures 1 et 2). 39 Fig 1 Fig 2 40 Conclusion En conclusion, on peut se poser la question: pourquoi faire des urgences ? En effet, il s'agit d'une activité complexe très réglementée et souvent dévalorisée. À ces remarques, il faut opposer une bonne image de marque pour cette activité très médiatique et très importante sur le plan du volume puisque environ 1400 000 cas de traumatismes de la main surviennent chaque année en France. De plus, si la participation au service d'urgence exige une disponibilité et une motivation de tous les instants, l'image de service public et la possibilité d'en faire une activité pilote pour un établissement ne doivent pas être négligées. Si les traumatismes mineurs, soit disant peu intéressants, représentent un cas sur deux, il ne faut pas oublier que l'autre moitié des cas sont de vraies urgences nécessitant un traitement hautement spécialisé et confirmant, s'il en était besoin, la spécificité de cette chirurgie. Enfin, pour les jeunes chirurgiens, le traitement des urgences peut assurer un recrutement non négligeable et, pour les plus anciens, continuer à participer à un service d'urgence leur permet de conserver une activité microchirurgicale de base. 41 La réalité de la chirurgie de la main G. RAIMBEAU Centre de La Main, Angers La chirurgie de la main est une réalité médicosociale. La population touchée est importante par le nombre de blessés - 1400 000 blessés de la main dont 620 000 graves par an en France - mais aussi par le nombre de patients opérés de lésions dégénératives. Celles-ci s'expliquent par le vieillissement de la population et la multitude des articulations, des structures nobles regroupées - " compactées " - pour assurer une fonction à laquelle tout un chacun est très attaché. Les blessés de la main sont, le plus souvent, en bonne santé et souhaitent être dépannés au plus vite et surtout au mieux. Il ne leur apparaît pas nécessaire d'être hospitalisés voire d'être "endormis ". L'exigence de résultat s'accroît chaque année par la communication familiale, celle du voisinage mais aussi des grands médias. Les accidents de vie courante envahissent les structures hospitalières et touchent la main plus d'une fois sur cinq. L'innovation en matière de chirurgie de la main repose sur l'amélioration technologique. La microchirurgie a permis de voir et donc de travailler des structures de l'ordre du millimètre, reculant ainsi les limites de la réparation. Cette innovation s'est accompagnée d'une meilleure connaissance de la biologie vasculaire, tendineuse et de la miniaturisation des implants d'ostéosynthèse. En 25 ans, il y a eu plus de progrès qu'en 150 ans, si l'on se réfère à l'époque des Dupuytren, Larrey... Cette accélération de la maîtrise chirurgicale par un groupe restreint de chirurgiens est peut-être une des explications de l'insuffisance de reconnaissance par la tutelle et du faible niveau de connaissance de nombreux médecins dans ce domaine chirurgical. Les règles de l'art se sont modifiées; à ce jour, personne ne remet en question la réalité de la neuro-chirurgie et aucune boîte crânienne n'est ouverte en urgence par un chirurgien non habilité. Pourquoi n'en est-il pas de même pour la traumatologie de la main? En urgence, la chirurgie de la main a toujours été considérée comme secondaire vis-à-vis de la chirurgie noble, à incidence vitale. Dans les centres d'accueil, avec le s difficulté s de triage des plaies, les blessés de la main sont confiés le plus souvent aux plus jeunes. Les séquelles traumatiques de la main ne sont jamais vitales, c'est peut-être une des raisons historiques associée au fait que l 'on peut toujours mettre dans la poche une main handicapée. C'est pour lutter contre cet état d'esprit que furent créés, en 1972 sous l'impulsion de Raymond Vilain à l'Hôpital Boucicaut de Paris, les SOS Mains qui donnèrent naissance à la Fédération Européenne des Services Urgences Mains (FESUM), premier réseau de prise en charge organisée des blessés de la main. 42 Fig.1 À partir d'un questionnaire qui devait être rempli immédiatement, nous avons obtenu la réponse de 21 centres FESUM sur 33 (Figure 1). L'analyse révèle que l'échantillonnage est représentatif et que, par extrapolation, seuls 10 % des blessés de la main sont pris en charge par les centres structurés. On met en évidence que plus de la moitié des blessés sont porteurs de lésions qui peuvent être traitées avec peu ou pas de séquelles. La difficulté pour le blessé est d'atteindre un bloc opératoire avec un chirurgien ayant l'expérience et l'habitude de la chirurgie de la main. Le piège est l'erreur d'appréciation des lésions et l'étiquetage "bobologie"; il est. en effet, impossible d'assurer dans les services d'accueil et d'urgence un triage visuel, centimétrique, voire radiologique; seul l'audit au bloc opératoire permet à toute plaie d'être explorée dans les règles de l'art et d'être traitée en fonction des lésions [10]. Les soins externes ne s'adressent qu'aux contusions, érosions cutanées, à certaines plaies à distance de carrefours anatomiques stratégiques. La chirurgie ambulatoire doit se développer car, si tout acte de chirurgie de la main nécessite d'être réalisé sous garrot pneumatique, avec une anesthésie de mode variable et l'utilisation d'un moyen optique grossissant adapté, l'hospitalisation n'est indiquée que lorsqu'il existe une contre-indication médicale ou sociale à la pratique ambulatoire. En général, l'hospitalisation est très courte de 24 à 48 h, sauf pour les actes de micro-chirurgie lourde, type replantation, qui nécessitent un séjour de 5 à 7 jours pour surveiller l'évolution vasculaire. La prise en charge spécialisée s'imposera d'autant plus vite qu'il y aura une traçabilité des séquelles. En effet, cette chirurgie est peu coûteuse pour l'hôpital public ou privé car le plateau technique consomme peu de produits pharmaceutiques, sanguins, d'implants, de moyens de réanimation, et l 'hospitalisation est courte ou sans objet. À l'opposé, les rentes (IPP) et les allongements d'incapacité temporaire totale (ITT) représentent plus des 3/4 des coûts de la traumatologie de la main. Enfin, la chirurgie secondaire après un premier traitement inadapté génère des coûts supplémentaires, avec un résultat fonctionnel inférieur à celui qui eût été obtenu par une prise en charge initiale adaptée [20]. Wittemann [24] a montré 43 un surcoût de 100000 francs par blessé devant être réopéré en milieu spécialisé, pour le plus souvent des traumatismes étiquetés mineurs en urgence. Si la chirurgie de la main développe des coûts modérés pour les plateaux techniques, elle génère par contre des coûts humains et des frais de personnel. - Des coûts humains. Il s'agit d'une chirurgie en urgence très chronophage, difficile à maîtriser dans son organisation en dehors des unités dédiées à la chirurgie de la main. L'activité non programmée est difficile à maintenir par un chirurgien isolé; la mise en commun des moyens humains et plateaux techniques permet de faire face aux situations de surcharge de travail et d'imprévu. La spécialisation technique demande une longue formation en chirurgie orthopédique, plastique et vasculaire, en plus de celle de la microchirurgie qui s'apprend au laboratoire d'entraînement sur l'animal et s'entretient par la pratique régulière. Ce savoir-faire doit être transmis et c'est la mission de l'enseignement avec toutes les difficultés liées au fait qu'il s'agit d'un travail d'équipe qui doit inclure du compagnonnage. La maîtrise de l'analgésie postopératoire prend de plus en plus d'importance et, à un certain niveau, associée à l'amélioration de la communication orale et écrite elle permet de faire chuter le taux d'algodystrophie qui est la complication la plus redoutable. La chirurgie de la main a pour particularité de ne pas donner de résultat automatique; la prouesse chirurgicale ne suffit pas, il faut également informer chaque patient de son programme thérapeutique afin qu'il puisse comprendre, adhérer et participer. Tout ceci représente du temps et des hommes. - Les coûts de personnel sont importants. Il faut canaliser les flux des patients, surtout en postopératoire: pansements, consultations de surveillance pour le contrôle des mobilités articulaires et des jeux tendineux, prise en charge de rééducation spécialisée avec orthèses adaptées et modifiées régulièrement, ergothérapie et réadaptation des mains au poste de travail. Cette importance du secteur "hors hospitalisation " est un préalable à connaître pour réussir l'implantation d'une unité de chirurgie de la main. Seuls 2 % des blessés de la main et du poignet sont hospitalisés, 13 % sont opérés en pratique ambulatoire; ces chiffres, issus d'une étude danoise [3] rapportée sur deux ans dans le cadre de l'enquête EHLASS qui portait sur 50 272 blessés (28,6% de toutes les urgences), sont ceux qu'il faut annoncer pour préparer l'avenir; la chirurgie de la main, en urgence, ne se résume pas à l'épisode de la salle interventionnelle. 44 Centres d'urgences et centres formateurs en France Analyse et réflexion sur les acteurs F. MOUTET Hôpital A. Michallo, SOS Mains Grenoble Introduction Il s'agit ici de faire un état des lieux et d'essayer de voir qui est censé faire quoi et dans queues structures. L'objectif de cette analyse est de dégager les nécessités de fonctionnement pour construire l'avenir. En se penchant sur le problème, on soulève plus de questions que l'on en résout, mais les questions ne sont-elles pas plus importantes que les réponses ? Définitions et remarques Il convient avant tout de définir la chirurgie de la main. Si cette définition est évidente pour les praticiens, elle ne l'est peut-être pas autant pour les instances et les interlocuteurs de notre spécialité. On peut retenir qu'il s'agit de la chirurgie de la main, entité anatomique, mais aussi, de ses moteurs, de ses nerfs, de ses vaisseaux et de toutes les structures qui concourent à sa fonction. Il n'en reste pas moins des zones frontières: le poignet traumatique, le coude et l'épaule. Une autre remarque s'impose: les tutelles vent toujours plus sensibles au nombre de praticiens qu'à la qualité de leur pratique. En matière de chirurgie de la main, la démographie nécessaire estimée pour les pays de la CEE varie de 1 pour 125 000 à 1 pour 250 0000 habitants. Pour la France, la fourchette serait donc de 240 à 400 chirurgiens spécialisés potentiels. Il y a, à l'heure actuelle, 219 membres titulaires ou associés à la Société Française de Chirurgie de la Main. Tous les membres de cette société ne vent pas, et il s'en faut, des chirurgiens exclusifs de la main. Il reste donc encore de vastes espaces de pratique pour les plus jeunes dans cette voie. Le présent Actuellement, les trots piliers sur lesquels peut s'appuyer la reconnaissance de la chirurgie de la main, vent la Fédération Européenne des Services d'Urgence de la Main (FESUM), le Collège français des enseignants en chirurgie de la main et les formations dispensées par les DU et DIU. 45 Figure 1 : Répartition des centre FESUM en France, 33 centres dont 8 en Ile de France 46 Figure 2 : Répartition des centre FESUM en Europe, 58 centres dont 33 en France 47 Figure 3 : Répartition des centre formateurs du collège, 22 centres dont 5 en Ile de France . La FESUM Elle possède 33 centres en France (Figure 1), dont 8 dans la région Ile de France. Ils gèrent donc l'urgence 24 h sur 24/365 jours par an. On notera la forte implantation dans le sillon Rhodanien et la région Province-Alpes-Côte d'Azur (PACA). En Europe, la FESUM représente à ce jour 59 centres avec une concentration notable de part et d'autre des sillons Rhodanien et Rhénan (Figure 2). La croissance nationale des urgences hospitalières publiques est de l'ordre de 5 à 7% par an. L'augmentation d'activité des services d'urgence de la main est régulière de l'ordre de 10 à 15% par an, pour certains bien davantage, alors même que les installations de chirurgiens libéraux se multiplient. Ceci pousse à la réflexion sur la gestion de l'urgence. Le collège 48 Structure plus jeune que la FESUM, il établit petit à petit son maillage national et compte 22 centres formateurs à l'heure actuelle (Figure 3). Pour devenir centre formateur, il faut répondre à certains critères et, pour le demeurer, continuer à les respecter. Ceci implique la "revisite" des centres existants prévue dans les statuts. Cette auto-évaluation permanente est le meilleur garant du maintien du niveau souhaité par le directoire du collège. Sur ces centres, 13 vent des CHU et 9 vent des structures privées. Dans les CHU, 5 centres vent sous la responsabilité de chirurgiens orthopédistes et 8 de chirurgiens plasticiens. L'évolution hospitalo-universitaire actuelle tend progressivement vers une couverture complète par les plasticiens de la formation des chirurgiens de la main. Ceci ne paraît pas souhaitable et l'indispensable biappartenance (orthopédie-plastique) de la formation du chirurgien de la main doit être maintenue. C'est pourquoi il faut d'autant plus songer à la création d'une sous-spécialité ou d'une compétence qui serait soutenue, parrainée et portée par les deux grandes spécialités mères. La belle est dans le camp des instances. Les centres privés ne valident que pour 6 mois dans un cursus de formation, et les CHU forment en 2 ans de post-internat, au moins, des spécialistes. Ce collège comme tous les autres est une association privée à valeur consultative et n'a que le poids que veulent bien lui accorder les tutelles, le conseil de l'ordre et les autres interlocuteurs. Sa crédibilité passe par la rigueur et la fiabilité. 49 Figure 4 : Les DU et DIU de Chirurgie de la Main - Un dans le grand Sud - Un dans l'Est - Un dans l'Ouest - Deux à Paris Les DU et DIU La formation en chirurgie de la main est aussi encadrée par cinq grands DU et DIU (Figure 4) à ['assistance nombreuse, attentive et de bon niveau en général, mais pas toujours vouée à l'exercice de la spécialité, en France en tout cas. Ils sont indispensables à la formation théorique mais ne sauraient excéder les 10 % qu'ils représentent à l'heure actuelle dans la notation des candidate à l'examen du collège. L'harmonisation des contenus et des cursus de ces DU et DIU est à faire, celle de la docimologie est à peu près acquise. I1 resterait à harmoniser le niveau national, sans doute, mais aussi européen avec la FESSH. Ce travail est engagé et nous espérons bien lui voir porter ses fruits. 50 Les problèmes Le niveau de compétence Suivant le type de structure, les impératifs de niveau de compétence ne vent pas identiques. Le fonctionnement d'une structure accueillant les urgences nécessite une disponibilité effective 24 h/24 - 365 jours par an et donc une équipe avec une pratique régulière et rodée de la microchirurgie, une compétence en chirurgie orthopédique et plastique et une structure de rééducation spécialisée. Une structure ne pratiquant que la chirurgie réglée ne nécessite pas les mêmes impératifs et un chirurgien isolé de qualité, compétent en orthopédie ou en plastique associé à une structure de rééducation peut être éminemment formateur. Dans tous les cas, la formation dans un type de ces structures ne dispense en rien de la formation dans l'autre. Les problèmes structurels Certains vent endémiques et liés aux structures lourdes que vent les CHU et doivent être résolus. - L'absence de postes fléchés " main ", la formation "main" dépendant du bon vouloir du chef de service. - La dispersion des "urgences main" dans les centres non FESUM et dont le recrutement dépend souvent du bon vouloir du chirurgien de garde ou de porte. - La gestion de consultations pléthoriques embolisées par des pathologies bénignes. Mais il faut le souligner, il n'y a pas de " bobologie " et c'est par les petites choses que l'on se perd. - La masse critique de formation, 10 réimplantations par an, 25 mains complexes et au moins 1000 à 1500 mains opérées par an, semble un ordre de grandeur minimum pour assurer une formation crédible et valide. Les structures privées ont un mode de fonctionnement plus souple puisqu'il relève de leur propre choix de fonctionnement. Les réseaux Ils restent à inventer et l'on peut s'inspirer des succès de collaborations existantes comme à Strasbourg ou Angers entre secteurs public et privé. La télémédecine, la circulation de ['information et la meilleure communication entre les hommes devraient permettre d'intégrer les compétences dans une filière de soins cohérente et du meilleur niveau, et ce pour le plus grand bénéfice des patients et ['incidence sur le coût de la santé publique. La différence de fonctionnement des centres formateurs ne se pose pas en termes de public ou privé mais en termes de structure d'urgence ou non. 51 L'avenir Des structures I1 passe de façon incontournable par des évaluations et des accréditations. Celles-ci devraient être envisagées sur les bases des éléments d'évaluation et les critères d'inclusion et d'exclusion mis en place par le collège et la FESUM. Des hommes L'avenir des individus passe par la reconnaissance du chirurgien de la main. La création d'une spécialité à part entière semble illusoire à court terme, mais la reconnaissance d'une sousspécialité ou d'une compétence apparaît manifestement comme la solution de choix. Au niveau européen, la création d'une spécialité nécessite la reconnaissance de celle-ci par 2/3 des états membres alors que celle d'une sous-spécialité n'en nécessite qu'un tiers et que la décision de la reconnaissance d'une compétence ne relève que de l'avis du conseil de l'ordre. Accréditations ou validations dépendent des lectures que l'on en fera et il faut rester vigilant si l'on ne veut pas voir une grande idée pervertie par l'usage qu'on peut en faire. Conclusion En la matière, la bêtise consiste à vouloir conclure. La structuration grandissante de notre spécialité, son poids socio-économique en matière de coût de santé, son intérêt pour le bienêtre des patients nous rendent incontournables. Rien ne doit entamer notre crédibilité aux yeux de nos interlocuteurs et nous faire rater l'occasion que notre intérêt nous permet d'avoir. Il faut regrouper nos compétences avant que les filières ne nous soient imposées. Le moment est stratégique. En harmonisant la formation, la docimologie et le niveau des critères d'inclusion, nous nous présenterons sur un front uni et cohérent. 52 Conclusion: quel futur ? G. RAIMBEAU Centre de La Main, Angers Personne n'a la connaissance de la teneur exacte de ce qui est fait en chirurgie de la main, malgré le poids de ['Administration française. Il existe une réalité quantitative que les praticiens ne doivent pas méconnaître: plus d'un million quatre cent mille blessés de la main par an dont 620 000 sérieux. Ce chiffre démontre que le marché de la traumatologie de la main n'est pas saturé. La réalité qualitative pointe son exigence et l'appréciation du rapport " qualité-prix " est inéluctable dans toute approche comptable, quels que soient le décideur et/ou le payeur. C'est bien dans ce contexte " d'offre de soins " et de rapport " qualité-prix" que les unités de chirurgie de la main vont s'implanter et se développer. L'effet prévention est stable depuis plus de dix ans. Pour réduire les coûts, il faut s'attaquer aux plus lourds à savoir ceux de l'indemnisation des incapacités temporaires et définitives. "Les moyens de diminuer la charge écrasante que représentent les séquelles des plates de la main pour la nation existent. Le traitement moderne des plates de la main est actuellement codifié. Il reste à faire ['effort de le promouvoir et de le généraliser" Y. Allieu [2]. La raison économique entraînera un appel à des professionnels, spécialistes de chirurgie de la main lorsque la traçabilité des séquelles sera mise en place; la quote-part du coût des honoraires des plateaux techniques est bien éloignée de celle du coût des indemnisations, et on ne tardera pas à prendre en compte l'intérêt de la qualité des traitements primaires et, par là, à ajuster une rémunération plus adéquate. Le nombre d'accidents ne peut plus beaucoup diminuer car les accidents de vie courante vent plus nombreux que ceux du travail, le temps libre se développe et la durée de vie s'allonge. Si la recherche d'une meilleure sécurité, d'une meilleure ergonomie de l'instrument a porté ses fruits en matière de prévention d'accident du travail, il faut rappeler que la main est toujours en première ligne dans l'utilisation d'un outil avec l'interface de la peau incontournable. La traumatologie de la main est un problème de santé publique mais, à l'heure actuelle, il n'est pas prioritaire. Lorsqu'il le sera, les théoriciens engageront une planification; il faut éviter que les unités de chirurgie de la main se développent selon un quadrillage qui serait imaginé sans aucune concertation avec la haute administration. Anticipons dès maintenant, utilisons le tissu existent, à savoir celui des praticiens de terrain et, là, la FESUM peut être le moteur à condition de fédérer sans exclure. La séparation public-privé est d'une autre époque, il faut aller vers des partenariats et des réseaux, et ce d'autant que le législateur restreint le champ de liberté dans la prise en charge des urgences. Les regroupements doivent se faire, déjà dans les grands CHU où parfois la prise en charge des urgences de la main reste inhomogène voire aléatoire, pour des raisons d'organisation (au quotidien) et de pénurie de personnel. 53 Chaque chirurgien intéressé et entraîné à la chirurgie de la main doit apporter son temps de soin, d'enseignement voire de recherche, afin de créer des unités fonctionnelles référentes qui se devront de travailler en réseau sur le plan régional et national. Il faut mener ensemble, au niveau de la Société de Chirurgie de la Main, avec la FESUM et le collège, une démarche de qualité pour arriver en 2001, date à laquelle, depuis les ordonnances de 1996, l'accréditation sera obligatoire dans tout établissement de santé en France. Cette démarche doit inclure une réflexion sur la taille de l'unité référente, sur la validation de ce qui peut être fait en a priori (critères d'inclusion) et sur ce qui a été fait a posteriori) (critères d'exclusion). Ne soyons pas trop rigides, car notre métier est l'exercice d'un art qui s'entretient par la répétition du geste et qui s'apprend par le compagnonnage, soyons plutôt stricts sur l'objectivité et la transparence de nos activités. Nous ne pensons pas que les unités de chirurgie de la main, dévolues uniquement à une activité programmée, aient un grand avenir hormis quelques exceptions, car c'est avant tout l'activité en non programmé, autrefois appelée activité d'urgence, qui restera le moteur de productivité, de formation et le produit d'appel pour la population. Il faut rappeler que celleci, certes, peut se déplacer dans le cadre de l'urgence fonctionnelle, mais que l'attractivité de chaque centre reste régionale. La chirurgie de la main, par sa présence soutenue en traumatologie, est une réalité. Si elle a été initiée par certains, dans un contexte historique ou local, en particulier par les membres fondateurs du GEM, elle est aujourd'hui malmenée par certains responsables qui acceptent la réduction budgétaire du traitement des bouts de doigts. Cette vision réductrice est à contre-courant de la réalité de demain. Il faut imposer notre activité chirurgicale spécialisée et dévolue à une fonction, et ce d'autant que la dégradation fonctionnelle est de moins en moins acceptée par le grand public, quels que soient son status social et son âge. La chirurgie de la main, "fille de l'orthopédie et de la plastique" [15], est une spécialité à part entière par les contraintes techniques et d'environnement qu'elle impose. Le long apprentissage du travail à travers un système optique grossissant, le poids de l'accompagnement du postopératoire, tant en réadaptation qu'en soutien psychologique, la nécessité pour les opérateurs de maîtriser plusieurs spécialités chirurgicales reconnues, à savoir celles d'orthopédie, de plastique et de vasculaire, ne sont que quelques exemples pour plaider la spécificité de la chirurgie de la main. La chirurgie de la main, par sa spécificité, prend une part prépondérante dans le développement de l'anesthésie locorégionale et de la chirurgie ambulatoire, pratiques ô combien intéressantes dans cette époque de pénurie d'anesthésistes et de difficultés de gestion des plateaux techniques. Même en urgence, et grâce à l'anesthésie locorégionale, la chirurgie de la main est adaptée à la chirurgie ambulatoire car il s'agit d'une chirurgie périphérique sans enjeu vital et dont l'analgésie postopératoire est maîtrisée. Alors, quel avenir ? La reconnaissance de l'entité " unité de chirurgie de la main " est un préalable que la population a déjà notifié. 54 Le développement de la chirurgie ambulatoire est incontournable, la chirurgie de la main restera l'une des spécialités prépondérantes dans cette pratique qui supprime l'hospitalisation inutile. Les Unités de chirurgie de la main, même privées, jouent un rôle sur le terrain de mission de service public par le grand nombre de blessés à traiter, les faire travailler en réseau permettra de contenir ce problème de santé publique. L'enjeu économique lié au poids de la part de 80% des indemnisations ne peut échapper aux gestionnaires qui vont chercher à promouvoir le professionnalisme et surtout à le conserver. En conclusion, les unités de chirurgie de la main ont un bel avenir grâce à la demande des consommateurs tant en traumatologie qu'en orthopédie, l'allongement de la vie, la multitude d'articulations à traiter, et la spécificité chirurgicale. Ceci assure aux plus jeunes d'entre nous un avenir assez serein à condition de prendre en charge, dès aujourd'hui, l'organisation de l'implantation des unités de chirurgie de la main. 55 Références bibliographiques [1] Allieu Y. La main traumatique: Montpellier. Euro Médecine, 10-14 novembre 1987; 87. [2] Allieu Y. Chammas M. Le traitement moderne des plates de la main: le SOS MainRéimplantation. Actes du colloque de ['association de promotion, perfectionnement et recherche en médecine du travail (Pro. Per. MeT), 1994, Montpellier. [3] Angermann P. Lohmann M. Injuries to the hand and wrist. A study of 50,272 injuries. JHand Surg 1993; 18 B: 642-644. [4] Auquit-Auckbur I. La prise en charge des traumatismes de la main. Expérience du SOS Main Lille. Évaluation et perspective sur la région Haute Normandie. Thèse médecine Rouen, 1997. [5] Caisse Centrale de la Mutualité Sociale Agricole. Le risque accident des salariés agricoles 1976-1996. 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Partenariat Centre de la Main - CHU. 58