Présentation de l`aménagement liturgique de la cathédrale, église
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Présentation de l`aménagement liturgique de la cathédrale, église
Présentation de l’aménagement liturgique de la cathédrale, église paroissiale St Denys à Saint-Denis La force de l’Histoire Des origines à la fermeture de l’abbaye en septembre 1792 La cathédrale succède à une basilique attestée dès le VIe siècle. Le monastère qui lui est attaché est mentionné en 654 dans un diplôme de Clovis II (634-657). Des inhumations sont pratiquées particulièrement au nord de l’édifice, dès le IVe siècle. Des sépultures des Ve, VIe siècles ont été découvertes dans la crypte carolingienne ou dans son prolongement occidental. Citons un des plus beaux témoins, la tombe d’Arnégonde (ca 510-580/590). Elle enfermait encore ses parures textiles et d’orfèvrerie. La basilique est édifiée sur le lieu de la sépulture des trois saints Denis, Rustique et Eleuthère, martyrs au IIIe siècle. Grégoire de Tours (539-594), utilise le terme basilica pour une église à reliques. Ce nom est assimilé à martyrium, sanctuaire renfermant la tombe d’un martyr ou d’un confesseur de l’église locale. On compte en France au moins treize basiliques qui deviennent monastères ou collégiales à partir de la réforme carolingienne. À SaintDenis, l’existence d’un monastère devance la réforme carolingienne de 816. Pendant près de mille deux cents ans, la vie monastique n’est interrompue ou malmenée que pendant les guerres qui jalonnent ce millénaire. Le sac de 1567 et le vandalisme révolutionnaire restent dans la mémoire les événements les plus dramatiques. La basilique puis abbatiale est une église à crypte entourée et installée sur un cimetière. Les sépultures se veulent au plus près de celles des trois martyrs. L’agrandissement de la crypte au IXe siècle permet à l’abbé Suger d’asseoir un chœur haut. Certes, il allonge la crypte carolingienne et l’amplifie avec les chapelles absidiales. Puis Suger respectera le plan basilical de l’église carolingienne en l’enserrant dans un massif occidental (1137-1140) et dans un chœur peu élevé avec un chevet haut (1140-1144). Soulignons les dimensions de l’édifice inchangées en longueur, soit 108 m. mais rehaussées en hauteur au XIIIe siècle, soit 29 m. Saint-Denis est une abbaye royale, au statut unique en quelque sorte. Si elle n’est pas chef d’ordre, elle ne dépend néanmoins d’aucune abbaye, sauf pendant quelques années au début du XIe siècle. Odilon, abbé de Cluny y rétablit l’observance monastique à la demande de Robert le Pieux (972-1031). Puis du XVIIe siècle à la Révolution, elle perd son autonomie en s’agrégeant à la Congrégation de Saint-Maur qui réforme en 1633 l’ordre bénédictin. Pourquoi un chevet haut ? L’abbatiale est un lieu de pèlerinage ; la dévotion aux trois saints attire les foules et la crypte carolingienne est trop exiguë. Ainsi le chœur haut à double déambulatoire facilite les processions des pèlerins venus vénérer les reliques. Les commanditaires du XIII e siècle ont respecté le projet de Suger en surélevant les voutes à partir de 1231. Le cimetière aux rois Dagobert (602/605-639) est le premier roi inhumé, auxquels viendront à sa suite, les carolingiens, Pépin le Bref (725-768) et Charles le Chauve. (823-877). Suger veut faire de Saint-Denis la nécropole des rois. Les capétiens seront les plus nombreux, Louis XVIII (1755-1824) clora la liste. Au XIIIe siècle le chantier est d’envergure. Le transept en est la première opération à partir de 1245. Ce sont deux grands carrés consacrés aux sépultures royales. La reconstruction de la nef carolingienne s’effectue par groupe de travées entre 1245 et 1281. Les traces de l’Histoire L’Histoire laisse des traces visibles et symboliques qui sont des données structurelles, certainement des contraintes comme toute architecture romane, gothique, baroque ou néo-gothique conçue pour une liturgie propre à ces époques sans anticipation sur l’avenir. Pourtant, il apparaît que tous les bâtiments s’adaptent aux évolutions liturgiques. Les temps désastreux de la Révolution ont tout bouleversé et détruit, mais les architectes des XIXe , XXe et XXIe siècles ont eu et ont à cœur de restaurer les pierres et de restituer les espaces. Rappelons les traces visibles : - la crypte carolingienne avec la mémoire de la sépulture des trois saints, - l’autel des reliques dans le chevet haut, - la réimplantation à partir de la deuxième moitié du XIX e siècle des tombeaux devenus cénotaphes des rois, princes et princesses ; ils occupent les deux transepts, et le pourtour du chevet, - le projet de marquage au sol par une plaque de bronze du caveau des cérémonies prolongé par un couloir qui mène au caveau des Bourbons situé dans la chapelle d’Hilduin (crypte). Rappelons les traces symboliques : - l’autel majeur au-dessus de la crypte carolingienne, - l’autel des reliques sous la clef de voute octopartite du chevet. Il est au centre d’un cercle, telle une rotonde, enrichi de sept chapelles rayonnantes. Ainsi tout le chevet devient alors un reliquaire précieux, selon Alain Erlande-Brandenburg. Si l’on reprend les plans du XVIIIe siècle - dom Félibien, Inselin -, il apparaît que le maître-autel est couronné par les douze piliers qui bordent le premier déambulatoire du chevet. Cette distribution est fortement symbolique. L’autel, table de la Cène, symbolise le Christ, entouré des douze apôtres ; les douze piliers en sont une image. Cette disposition ne peut plus être reproduite. La réforme liturgique voulue par Vatican II exige que la célébration se fasse face au peuple, près du peuple, au milieu même. L’autel sera donc avancé mais il se trouvera dans le même espace où l’Eucharistie est célébrée depuis près de neuf siècles. L’autel des reliques au chevet est un espace de prière dans l’abbatiale. Lieu de dévotion envers les corps saints, il servait aussi au dépôt des corps royaux pendant les quarante jours qui précèdent la messe des funérailles. Du chapitre impérial à nos jours Il est d’autres contraintes plutôt administratives. Ce monument est inséparable de la mémoire nationale comme s’exprimait Jules Simon en 1872 : Quand je visite la basilique de Saint-Denys, ce n’est pas seulement l’art qui m’y attire, ce sont ces grands souvenirs de notre histoire que je ne me crois pas le droit et que je n’ai pas le désir de répudier. La basilique abbatiale n’a jamais cessé d’être affectée au culte mis à part les dix-huit années de bouleversement révolutionnaire, elle fut église capitulaire en 1806, puis église paroissiale en 1895 et cathédrale depuis 1966. La restauration de la basilique au début du XIXe siècle, allait de pair avec la fondation du chapitre impérial. Les tombeaux sauvés du vandalisme ont repris leur place, et les restaurations et les découvertes archéologiques se poursuivent depuis plus de deux siècles. Ainsi le bâtiment n’a qu’un propriétaire, l’État mais il a deux affectataires, le clergé et le Centre des monuments nationaux, tous deux très à l’étroit puisque les dépendances ou bâtiments monastiques sont dévolus à la Maison d’éducation de la Légion d’honneur. La cohabitation est possible grâce à de bonnes relations réciproques, Ceci évite d’affliger la basilique cathédrale de Saint-Denis du syndrome du Saint Sépulcre et de ne pas donner prise à la solution que connaît Sainte Sophie à Istanbul. L’église de Justinien n’est plus qu’un monument historique d’État ! - Cependant, l’espace cultuel est restreint puisque le transept, les chapelles du chevet et son double déambulatoire relèvent de la visite payante du monument. - Il serait souhaitable que l’autel des reliques reste un lieu priant et non un lieu archéologique ou historique. On passe indifféremment devant les reliquaires ; or ce sont des objets de dévotion. - Il conviendrait qu’un signe chrétien soit placé au-dessus de la fosse dite des martyrs dans la crypte carolingienne. Le Concile Vatican II (1962-1965) Le Concile n’énonce aucun dogme. Les Pères conciliaires se penchent sur la pastorale, le dialogue avec le monde et la liturgie. Ils élaborent des textes forts qui engagent notre foi et la vie des églises locales. Les textes fondamentaux qui dictent notre réflexion sur l’aménagement liturgique du chœur sont Sacrosanctum concilium, Inter oecumenici et le Cérémonial des évêques. C’est en 1959 que Formigé reconstruit l’autel de Viollet-le-Duc, tous deux frontaux pour une célébration dos aux fidèles ; puis dans les années 1960, un autel provisoire est placé en avant, au centre d’un ensemble d’emmarchements qui rendent les célébrations périlleuses. C’est en 1997 que l’aménagement liturgique du chœur de la cathédrale est évoqué pour la première fois, lors d’un entretien au ministère de la Culture, entre Monsieur François Barré Directeur général du Patrimoine et Mgr Olivier de Berranger évêque de Saint-Denis. Monsieur Mouton, architecte en chef des Monuments historiques rend aux alentours de 2000, une étude visant à uniformiser le podium sur lequel repose l’autel et ce n’est qu’en 2010 que le Père Eugène Doussal fabrique toujours en provisoire le projet de Monsieur Mouton. C’est une réussite. Mais le provisoire lasse. Notre Père évêque est décidé à faire appel à des artistes pour la création d’un autel, d’un ambon, d’un chandelier pascal, et la mise en valeur de la cathèdre – copie du siège dit de Dagobert. Notre évêque a donc institué un comité de pilotage qui s’est réuni pour la première fois le 1er février ; il en est à sa 5e séance. En sont membres Georges Khamis, responsable diocésain de la liturgie, Bruno Gauthier, économe diocésain, Père Jean Jannin, recteur, trois membres de la commission diocésaine d’art sacré ; notre Père évêque préside. Bruno Rastoin, responsable de la communication est sollicité. Notre Père évêque vient de nommer une responsable chargée de rechercher le financement par le mécénat et la générosité des fidèles. Un concours à deux degrés est prévu pour le choix de l’artiste. La situation actuelle est propice à la réalisation d’une belle commande de mobilier liturgique. Le ministère de la Culture entreprend en trois tranches la restauration de la façade occidentale ; Il a approuvé le transfert à Saint-Denis de la couronne de lumière que Viollet-le-Duc avait créée pour Notre-Dame et qui est sans objet depuis l’aménagement liturgique dans le transept de l’église métropolitaine. Des réunions de travail avec Monsieur Jacques Moulin, architecte en chef des Monuments historiques ont lieu régulièrement - 30 janvier, 26 février, 22 avril, et le 4 juillet prochain. Propositions d’aménagement Ont été validés par notre Père évêque et l’ACMH les points suivants : Le chœur liturgique a récupéré le maximum de l’espace avec la destruction de l’autel de Formigé en 2009. Pour ouvrir le chœur vers l’assemblée, il y aura dépose de la table de communion qui sera réimplantée deux marches plus bas, c’est-àdire sur le sol de la nef et suppression des deux vantaux remplacés par un cordon. La statue de la Vierge à l’Enfant de Saint-Martin-des-Champs restaurée sera déplacée au nord près du premier pilier ; elle sera plus visible ; actuellement elle est en concurrence avec l’ambon. Le tabernacle et son prolongement seront détruits. Une crédence de qualité et modeste prendra place. Des grilles de Viollet-le-Duc pourvues de bras de lumière seront réinstallées dans le chœur par suite des décaissements prévus pour retrouver le sol de la nef : au nord enfouissement partiel de l’orgue de chœur ; au sud pose de la plaque marquant l’ouverture du caveau des cérémonies, lieu de première inhumation des Bourbons depuis Henri IV. Au fond du chœur, il existe une frontalité agressive et anachronique due au massif structurel qui distingue le chœur bas du chœur haut et qui soutient le plafond en béton de la crypte ; elle est accentuée par la belle garniture d’autel en bronze doré – la croix et trois chandeliers de part et d’autre – vestige d’un autel disparu. Il est donc suggéré que la cathèdre au centre des six sièges des vicaires généraux et épiscopaux soit adossée à une légère courbure travaillée par un artiste. La garniture présentée selon cette courbure ferait un espace de gloire. Il est demandé que le massif de béton soit arasé au niveau de la dernière marche de l’escalier latéral et que les deux girandoles soient abaissées ; elles ne peuvent pas être sur le même plan que les six chandeliers. La cathèdre devrait être repérable du fond de la nef. Les sièges du prêtre célébrant et des acolytes seront installés en diagonale du côté nord. La visibilité des reliques depuis l’autel – les trois reliquaires des saints Denis, Rustique et Éleuthère en bronze doré et du reliquaire de saint Louis dans la chapelle axiale - devra être assurée. Est-ce seulement un problème d’éclairage ? Quel changement dans les semaines à venir ? L’autel doit être le point focal ; l’architecture et le mobilier sont à son service si l’on peut dire. Un nouvel autel de table carrée d’1,40 m de côté sera installé dans l’été et expérimenté pendant de longs mois. Les cotes données par l’ACMH permettront au Père Doussal de le fabriquer. Il sera placé à 1,30 m de l’emmarchement. Il doit être au centre d’un espace permettant des déplacements et des regroupements pour les différentes liturgies : appel décisif, ordination, confirmation, messe chrismale, concélébration. Faute de surface suffisante, la prostration aura lieu dans la nef au plus près de l’autel. La couronne de lumière part en restauration. Quelques prescriptions conciliaires LA CATHEDRE. - Cérémonial des évêques, art. 42 : L’église cathédrale est celle où est placée la cathèdre, siège de l’évêque, signe du magistère et du pouvoir du pasteur de l’Église particulière, signe aussi de l’unité des croyants dans la foi qu’annonce l’évêque en tant que pasteur de son troupeau. - Cérémonial des évêques, art. 47 : La cathèdre sera unique et fixe, placée de telle sorte que l’évêque paraisse bien présider toute la communauté des fidèles. On ne disposera pas de baldaquin au-dessus de la cathèdre. SIEGE DU CELEBRANT. - Cérémonial des évêques, art. 47 : Le siège destiné au prêtre célébrant sera posé à un endroit distinct. L’AUTEL - Cérémonial des évêques, art. 48 : On veillera à donner à l’autel l’emplacement qui en fera le centre vers lequel convergera spontanément l’attention de toute l’assemblée des fidèles. L’autel de l’église cathédrale est fixe et dédicacé, à une distance du mur qui permette d’en faire facilement le tour et d’y célébrer face au peuple. L’AMBON PGMR – Présentation générale du missel romain – article 272 : La dignité de la Parole de Dieu requiert qu’il existe dans l’église un lieu qui favorise l’annonce de cette parole et vers lequel, pendant la liturgie de la Parole se tourne spontanément l’attention des fidèles. Il convient que ce lieu soit en règle générale un ambon stable et non un pupitre mobile. On l’aménagera de telle sorte que les fidèles voient et entendent bien les ministres. LE TABERNACLE - Cérémonial des évêques, art. 49 : Il est recommandé de placer le tabernacle, selon une tradition très ancienne conservée dans les églises cathédrales, dans une chapelle séparée de la nef centrale. Nous remercions Brigitte Lainé, Conservateur en Chef honoraire du Patrimoine, et paroissienne de St Denis, pour sa présentation. Père Jean Jannin Août 2013