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Culture
SPECTACLE
DISPARITION
La World pleure
R. Kolpa Kopoul
midilibre.fr
LUNDI 4 MAI 2015 ❘ R1---
“La Légende du roi Arthur“ ❘ A Montpellier du 27 au 29 mai 2016
Du côté de Brocéliande
Toujours ambitieux, Dove Attia s’attaque, après la Bastille, à la grande romance arthurienne.
Q
■ RKK aux platines à Fiest’ASète
en 2011.
Photo Vincent DAMOURETTE
C’est avec beaucoup de tristesse que de nombreux amateurs
de musiques du monde ont appris, hier, la mort, à 65 ans, de
Rémy Kolpa Kopoul, voix majeure de Radio Nova depuis
quelques années mais qui fut
de toutes les aventures médiatiques pourvu que la musique
y ait sa place. Dans la région,
on le voyait souvent, avec familiarité pour beaucoup, de
l’amitié pour quelques-uns, notamment à Sète où il ne dédaignait pas mixer pour Images
Singulières et pour s’investir
dans un partenariat passionné
de longue date avec Fiest’ASète qui, bien naturellement, lui
rendra hommage lors de la
prochaine édition.
Né à Paris en 1949, “RKK” a
été l’un des premiers à se lancer dans la world music, à partir d’une grande culture brésilienne. S’il fait partie des fondateurs de Libération en 1973,
il est encore lycéen quand il
participe au Pop Club de José
Artur. Pilier de Radio Nova depuis 1990, il s’y définissait
comme un “conneXionneur”.
uinze ans après Les Dix Commandements et fort d’autres
spectacles musicaux d’envergure comme Le Roi Soleil,
Mozart l’Opéra rock et 1 789
les Amants de la Bastille, le prochain
“tube” de Dove Attia, producteur solide mais également compositeur et
auteur, aura peut-être quelque chose
à voir avec Excalibur, de John Boorman, pour l’ambition du sujet ; Kaamelott, d’Alexandre Astier, et Monty
Python sacré graal, de Terry Jones et
Terry Gilliam, pour la distance nécessaire. Voire même Game of thrones,
sans doute, pour la noirceur des traitres et la passion des amants... Ça fait
beaucoup, dit comme ça, pour cette
Légende du Roi Arthur, mais Dove
Attia n’est pas pingre et ne lésine jamais sur ce qu’un grand spectacle musical populaire réclame. A commencer par des musiques qui comprennent si possible quelques tubes imparables, déjà disponibles en CD (Warner music) et dont les premiers singles tournent déjà depuis plusieurs
semaines (Mon combat interprété
par Florent Mothe et Zaho et Quelque chose de magique par le même
Florent Mothe et Camille Lou).
Bâtard mais bon roi
Lors d’un showcase récemment organisé au siège parisien de Warner, on
pouvait constater que les paroles
étaient déjà rentrées dans pas mal de
têtes. Des mélodies franches, des textes pas trop compliqués et une énergie pop-rock-variétoche réhaussée ça
et là d’instruments anciens ou bretonnants (la cornemuse apportant la couleur locale dominante de cette belle
légende celtique).
L’histoire donc d’un bâtard bien éduqué dans une époque où la Bretagne
se déchire et qui attend son roi. Ce sera lui, le jeune écuyer élevé dans l’om-
■ Lors du showcase parisien, de g. à dr. : Fabien Incardona, Zaho, Florent Mothe, Camille Lou et Charlie Boisseau.
bre et protégé de Merlin, qui tirera
sans effort l’épée Excalibur du roc
où elle fut un jour enchâssée. Mais
vous savez ce que c’est. Certains chevaliers feront allégeance, d’autres feront sécession.
Des guerres donc, mais surtout de
l’amour. Avec Lancelot, trop beau
pour être tout à fait honnête, Guenièvre, trop belle pour ne pas souffrir et
ce jeune roi Arthur, trop cool pour ne
pas être trahi. On connaît les méchants, Méléagant, que les bagarres
démangent et surtout cette roublarde
vicieuse de Morgane, une prête-à-tout comme on n’en fait plus. Et
tout cela va chanter, va danser, va remuer. Il y aura du monde sur scène :
50 chanteurs, danseurs, comédiens
et musiciens, tous sous la responsabilité du chorégraphe et metteur en scène Giuliano Peparini, déjà à l’œuvre
pour 1 789 les Amants de la Bastille
et en charge, l’an dernier, d’un grand
classique aux arènes de Vérone, Roméo et Juliette.
Un joli plateau
C’est à Florent Mothe, à qui l’on doit
un premier album solo très estimable
(Rock in chair), qu’échoit le rôle du
roi Arthur. Il a l’étoffe vocale et l’auto-
Photo CYRIL MOREAU
rité pour ça et se trouve bien encadré, notamment par Zaho dans le rôle
de Morgane et la jeune Camille Lou
(Olympe dans 1 789) dans celui de la
blonde Guenièvre. Charlie Boisseau,
vu dans The Voice 3 et originaire
d’Alès, sera un très mignon Lancelot
alors que le belliciste prince Méléagant sera tenu par Fabien Incardona.
Plus de vingt décors (signés Bernard
Arnould) et quatre cents costumes
(Frédéric Olivier) donneront un univers à cette jeune troupe qui ne demande qu’à en découdre.
JEAN-FRANÇOIS BOURGEOT
[email protected]
LES DISQUES DE LA SEMAINE
Jazz Tore Brunborg
● “Slow Snow” (ACT)
Évidemment moins célèbre
que son aîné Jan Garbarek, et
peut-être moins tendance que
son cadet Marius Neset, Tore
Brunborg s’avère pourtant un
des saxophonistes qui font le
jazz norvégien. Esthète trop
modeste, il publie, à 54 ans,
son premier album en quartette
pour ACT. La “neige lente” que
nous promet le titre ne glace
pas les dix compositions ; au
contraire, elles nous semblent
autant de variations musicales
de la fonte printanière et de la
montée subséquente de l’eau
des rivières. Exposition d’un
thème minimaliste et de motifs
délicats, leur réchauffement
lent par couches harmoniques,
rythmiques et mélodiques, et
montée progressive jusqu’à
épanouissement total (plus
qu’explosion)... l’architecture
diffère assez peu d’un titre à
l’autre, le résultat non plus : on
est systématiquement apaisé
et émerveillé par la beauté et
l’élan de vie ici à l’œuvre !
J. BE
Chanson
Populaire
Charles Aznavour en veut
encore et...“encores”
● Falla, Granados,
Piazzolla, Villa-Lobos…
Ophélie Gaillard,
● “Encores”, CD 12 titres, Barclay/Universal
Deux données appellent un
peu le tournis: 91 ans,
51e album... ! Et pour bien que
l’on comprenne, Charles
Aznavour explique qu’il en a
déjà un 52e en tête. Pourtant,
dès le premier titre, ça sent
objectivement le sapin: « Je
n’attends plus rien de la vie/je
vis ma vie au jour le jour/le
cœur brûlé de mes amours et
de nostalgie...». Un constat de
maison de retraite, une façon
de dire qu’il n’y a plus vraiment
de combats à gagner ou à
perdre. Un monde devenu
“vain et vide” et où les “toi” et
les “tu” ne savent plus très bien
à qui ils s’adressent, à quelle
jeune femme du temps jadis, à
quelle dernière amante, à
quelle essentielle égérie... On
ne mettra pas longtemps à se
retrouver le cul entre deux
chaises, à l’écoute de cet
album qui est, à n’en pas
douter, de l’Aznavour pur jus
mais navigue à vue entre
sublime et pathétique. La fuite
du temps est trop vertigineuse
pour ne pas refiler le blues.
Pour autant, infatigable,
Charles Aznavour sait laisser
remonter à la surface du
temps, entre vieux échos de
fêtes charnelles, des choses
essentielles, comme les
jeunesses sacrifiées des
années noires (Des ténèbres à
la lumière), il sait imaginer des
solutions originales pour
repeupler et refaire fonctionner
les villages et il s’en est même
ouvert à François Hollande.
De cet exode qu’il imagine
réversible, il tire une chanson
pour vieux cultivateur solitaire,
Et moi je reste là. Étonnant.
Pour finir, il évoque Édith Piaf
mais s’offre un duo avec
Benjamin Clementine: difficile
de faire plus “in”!
J.-F. B.
Alvorada
violoncelle (2 CD Aparté)
Avec une vingtaine d’artistes,
Ophélie Gaillard explore
l’Espagne, l’Argentine, le
Brésil et Cuba. Dans des
arrangements signés par
Gabriel Sivak, on rencontre la
grande Sandra Rumolino ou la
soprano Sabine Devieilhe, et
surtout le légendaire Toquinho. Irrésistible dans Falla et
Granados, la violoncelliste fait
découvrir la chanson de
Afrobeat ©© Les frères Smith
● “Free to Go” (So Watt)
La Révolution, Danton vous le dira,
c’est bien, mais pas toujours drôle,
parfois même rasoir... ©© Les frères
Smith, un groupe parisien de 12 musiciens en (hyper)activité depuis une
quinzaine d’années, se fichent pas
mal de révolutionner l’afrobeat, mais
leur copie est sans doute la moins
triste et la plus jouissive qu’il nous ait
été donnée d’entendre de longue
date ! Pour le dire autrement, si les compos ne se démarquent
guère de la formule du cocktail nigérian (à base de funk, highlife
et jazz) inventé par Fela Kuti et Tony Allen, l’interprétation fait la
différence... et explose la concurrence ! Ces cuivres jupitériens,
par tous les diables, c’est à en perdre la tête !
J. BE
Electro Nôze
● “Come with us” (Circus Compagny)
Cartola Alvorada et met autant
de cœur dans le tango que
dans la bossa nova. Emmanuel Rossfelder à la guitare et
Juanjo Mosalini au bandonéon
enchantent le voyage. Le
dernier solo d’Ophélie Gaillard, une Suite de Cassadó,
boucle cette quête enthousiaste des racines populaires.
Le cinquième album du duo français house Nôze est déroutant.
Ezechiel Pailhès et Nicolas Sfintescu se sont taillés une réputation - méritée - de bêtes de scène en fusionnant électronique et
organique (avec des apports de cumbia ou de klezmer) mais,
pour Come with us, ils se lancent dans la balade pop et romantique où les histoires d’amour s’égrènent au fil d’un élégant
blues électro. On peut trouver ça parfois mielleux, surrané, trop
70’s, mais les mélodies, emplies de spleen, portées par un riff
de guitare ou trois notes de piano
sont souvent imparables et
accrochent l’oreille (Apache, Saint
ou I need to know magnifiée par la
voix de Dani Siciliano). Et comme
Nôze ne fait pas les choses à moitié,
il propose aussi les dix titres déjà
remixés dans des versions plus
“énervées” pour le dance-floor.
MICHÈLE FIZAINE
Y. PHILIPPONNAT