Indications des endométrectomies
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Indications des endométrectomies
réalités en gynécologie-obstétrique # 169_Septembre/Octobre 2013 Revues générales Chirurgie Indications des endométrectomies Résumé : L’endométrectomie a pour objectif de faire disparaître la muqueuse endométriale (endometrial ablation, en langue anglo-saxonne). Cette endométrectomie peut être réalisée par des techniques de résection à l’anse ou par des techniques de destruction (vaporisation, thermodestruction, etc.). La plus classique est profonde (jusqu’au myomètre) et complète (toute la surface de la muqueuse doit être détruite). Il existe cependant quelques indications d’endométrectomie focale ou d’endométrectomie superficielle. Notons toutefois d’emblée que même les techniques d’endométrectomie “profonde et totale” ne s’accompagnent d’une aménorrhée définitive que dans la moitié des cas, témoignant du caractère incomplet de cette destruction d’endomètre. Le risque de cancer de l’endomètre existe donc bien après endométrectomie. L’ objectif de l’endométrectomie peut être thérapeutique (arrêt des saignements en alternative à l’hystérectomie), mais aussi diagnostique (endométrectomie pour analyse histologique d’une hypertrophie de l’endomètre). À l’heure actuelle, compte tenu du développement des techniques hystéroscopiques, il n’y a plus d’indication à réaliser des “curetages” thérapeutiques à l’aveugle. ➞X. DEFFIEUX, A. VIOT, T. THUBERT, E. FAIVRE AP-HP, Hôpital Antoine-Béclère, Service de Gynécologie-Obstétrique et Médecine de la Reproduction, CLAMART. [ Ménométrorragies idiopathiques, dites “fonctionnelles” On distingue les ménométrorragies “fonctionnelles” (sans pathologie retrouvée, c’est-à-dire qu’il s’agit d’un diagnostic d’élimination) et les ménométrorragies “organiques”, c’est-à-dire pour lesquelles une pathologie est mise en évidence (polype de l’endomètre, fibrome, adénomyose, cancer de l’endomètre, hyperplasie endométriale, tumeur bénigne ou maligne de l’ovaire ou de la trompe). 1. Dispositif intra-utérin Selon les recommandations du CNGOF (Collège national des gynécologues 28 obstétriciens français), les ménométrorragies idiopathiques doivent être traitées en première intention par un dispositif intra-utérin (DIU) délivrant du levonorgestrel (Mirena) ou par lacide tranéxamique par défaut [1]. 2. Technique chirurgicale conservatrice Pour les femmes ne désirant plus de grossesse, en cas d’échec de ces traitements, une technique chirurgicale conservatrice de l’utérus (destruction de l’endomètre) peut être proposée (grade A). Quand on compare les techniques de première génération (résection à l’anse, roller-ball ou laser) et celles de deuxième génération (ballonnet chauffant type Thermachoice, microondes type Microsulis, radiofréquence type Novasure), l’efficacité de toutes ces techniques semble comparable à 1 an de suivi [2]. Les techniques de deuxième génération sont associées à plus de dysfonctionnements techniques (interruption de procédure si les paramètres de contrôle de sécurité du dispositif ne sont pas tous favorables), mais leur courbe d’apprentissage est plus courte et elles sont associées à réalités en gynécologie-obstétrique # 169_Septembre/Octobre 2013 Techniques G1 (Loop, Roller) Techniques G2 (Ballon, MO, RF) = = Efficacité Échec procédure Durée opératoire OR = 4,6 (IC 95 % 1,4-14) 15 minutes de plus Nausées, vomissements OR = 2,4 (IC 95 % 1,6-3,9) OR = 0,17 (IC 95 % 0,04-0,77) Résorption excessive Perforation uterine Plaie cervicale = = OR = 0,22 (IC 95 % 0,08-0,6) Tableau I : Efficacité, durée opératoire et effets secondaires des principales techniques de destruction d’endomètre. Abréviations : Ballon, ballonnet chauffant (Thermachoice) ; G1, techniques de première génération ; G2, techniques de deuxième génération ; IC, intervalle de confiance ; Loop, résection à l’anse ; MO, micro-ondes (Microsulis) ; OR, odds ratio ; RF : radiofréquence (Novasure) ; Roller, destruction à la roller-ball. une durée opératoire plus rapide et à une diminution des complications due à une résorption excessive du produit de distension et des déchirures cervicales (tableau I) [2]. Les recommandations du CNGOF précisent donc que les techniques de deuxième génération sont préférées aux techniques de première génération, lorsqu’elles sont disponibles (grade A) [1]. Concernant l’efficacité respective des différentes techniques de deuxième génération, il semble que les techniques de type micro-ondes et radiofréquence sont associées à de meilleurs taux d’aménorrhées à 12 mois, mais il n’existe pas de différence en termes de satisfaction des patientes [1-3]. Toutefois, en cas de malformation utérine (cloison), il peut être indispensable de réaliser une résection à l’anse ou à la roller-ball plutôt que d’utiliser une technique de deuxième génération (contre-indiquée en cas d’utérus malformé). 3. Biopsie de l’endomètre Quelle que soit la technique choisie, une biopsie de l’endomètre doit être systématiquement réalisée en début de procédure, en particulier pour les techniques de destruction pure (radiofréquence ou micro-ondes). 4. Grossesses rares mais à haut risque Les grossesses observées après endométrectomie sont rares (de 0,5 % après résection à l’anse, jusqu’à 5 % après technique de seconde génération) et elles sont à haut risque de complications (anomalies d’insertion placentaire et hémorragie, ruptures prématurées des membranes, etc.). Le patiente doit être informée que l’endométrectomie n’est pas une méthode de contraception et qu’il faut éviter toute grossesse après ce geste car les grossesses sont alors à très haut risque. Il est donc indispensable de réserver les endométrectomies aux femmes ne souhaitant plus de grossesse et il convient de leur assurer une méthode de contraception jusqu’à 50 ans au moins. Un choix séduisant est la réalisation concomitante d’une stérilisation tubaire définitive par voie hystéroscopique. [ Adénomyose 1. DIU ou endométrectomie Le traitement de première intention repose sur le DIU au levonorgestrel (grade C), la résection ou destruction de l’endomètre (grade C). 2. Analogues de la GnRH En cas d’échec ou de refus, une hystérectomie peut être envisagée. Les analogues de la GnRH ont également prouvé leur efficacité dans cette indication. Il n’existe pas d’étude spécifique concernant l’efficacité des différentes techniques de destruction sur l’adénomyose, car son diagnostic est toujours difficile à affirmer en dehors de l’analyse histo logique après hystérectomie. Il est certain que beaucoup de ménométrorragies “fonctionnelles” sont en fait des cas d’adénomyose ignorés. La particulité de l’atteinte adénomyosique est qu’elle s’accompagne souvent d’une augmentation de taille de la cavité utérine. Or, c’est une limite importante de certaines techniques de destruction d’endomètre de seconde génération. Au-delà de 10-12 cm de longueur de cavité, ces techniques sont contreindiquées, car inefficaces. Il faut alors préférer une résection à l’anse ou rollerball. Par ailleurs, plus l’adénomyose est superficielle (moins elle pénètre en profondeur le myomètre), plus les chances de succès sont importantes. [ Fibromes utérins 1. Traitement de première intention Un traitement médical (acide tranéxamique, fer, analogues de la GnRH) peut être proposé en première intention pour réduire les saignements, corriger l’anémie, préparer une intervention chirurgicale (grade B), ou attendre la disparition spontanée des symptômes à la ménopause (grade C). 2. Traitement de seconde intention >>> L’embolisation artérielle peut être proposée comme traitement de deuxième ligne (grade A), en alternative à la chirurgie : hystérectomie, traitement le plus efficace des fibromes, ou en cas de refus, 29 réalités en gynécologie-obstétrique # 169_Septembre/Octobre 2013 Revues générales Chirurgie myomectomie. La localisation, la taille et le nombre de fibromes sont les paramètres indispensables à obtenir pour orienter la prise en charge thérapeutique en respectant le choix de la patiente. >>> Le DIU au levonorgestrel réduit de façon significative les ménorragies liées aux myomes (hors myomes sousmuqueux). Il est donc recommandé dans cette indication (grade B). >>> En présence de myomes sousmuqueux, les techniques d’endométrectomie sont efficaces (efficacité sur le score de Higham et sur le taux d’hémoglobine), seules ou en association à la résection hystéroscopique du myome chez les femmes sans souhait de préserver leur fertilité [1, 3]. Dans notre pratique, pour les femmes ne désirant plus de grossesse et présentant des ménométrorragies, si un fibrome sous-muqueux est diagnostiqué, nous associons donc à la résection du fibrome une résection endométriale. De plus, il semble que la destruction de l’endomètre de manière concomitante à la destruction du myome sous-muqueux soit plus efficace sur le contrôle des saignements que la myomectomie seule. [ Polypes de l’endomètre Le traitement de référence des polypes de l’endomètre est la résection hystéroscopique du polype (grade C), éventuellement associée à une résection d’endomètre ou à la pose d’un DIU au levonorgestrel chez les femmes non ménopausées (grade C), afin de limiter au maximum le risque de récidive des polypes endométriaux. [ ypertrophie endométriale H et femmes à risque de cancer de l’endomètre L’obésité est le principal facteur de risque de cancer de l’endomètre (production 30 Fig. 1 : Hypertrophie endométriale suspecte, cérébroïde avec hypervascularisation superficielle. d’estrone par aromatisation de l’andro stènedione). L’endométrectomie n’est pas contre-indiquée dans cette population à risque de cancer de l’endomètre, mais il faut alors opter pour une technique de première génération avec résection endométriale à l’anse, permettant l’analyse exhaustive des copeaux de résection. De la même façon, si une indication d’endométrectomie est posée devant une hypertrophie endométriale, si la femme présente des facteurs de risque de cancer de l’endomètre (obésité), même si la biopsie est rassurante, il faudra opter pour une résection à l’anse, afin d’avoir un examen histologique complet de l’endomètre. La figure 1 montre une hypertrophie endométriale suspecte. Si la biopsie d’endomètre préopératoire a mis en évidence l’existence d’une hyperplasie complexe et/ou des atypies, une hystérectomie est recommandée compte tenu du risque d’évolution vers un adénocarcinome. Si toutefois la patiente refuse cette hystérectomie et qu’une destruction d’endomètre est décidée, c’est bien entendu une résection à l’anse qui est requise pour permettre un examen histologique exhaustif. yperplasie complexe [ Het/ou atypies >>> Un traitement focal conservateur pour les femmes jeunes. Il est possible de proposer un traitement hystéroscopique conservateur pour les femmes jeunes présentant un polype avec hyperplasie complexe ou atypique (pour celles qui ont un désir de grossesse). Le risque de récidive des lésions avec atypies est faible à court terme, ce qui peut permettre d’obtenir une grossesse après contrôle hystéroscopique et biopsique. La mise en place d’un dispositif intra-utérin délivrant du levonorgestrel diminue encore le risque de récidive des polypes endométriaux simples chez ces femmes, mais il empêche d’obtenir une grossesse. ndométrectomie [ Esuperficielle L’épaisseur endométriale varie selon le moment du cycle avec une vitesse de croissance de 0,5 mm/j. Le nadir réalités en gynécologie-obstétrique # 169_Septembre/Octobre 2013 est à 2-4 mm au 3e jour du cycle et le aximum est observé au 14e jour du m cycle à 10-12 mm (jusqu’à 16 mm), puis il y a une phase de plateau jusqu’aux menstruations. L’hypertrophie de l’endomètre apparaissant en cours de stimulation ne semble pas délétère pour l’implantation en fécondation in vitro et n’augmente pas le taux de fausses couches. Il n’y a donc pas d’indication à arrêter une stimulation pour l’hypertrophie de l’endomètre, dès lors que l’échographie réalisée à J3 retrouvait un endomètre fin et sous couvert d’une hystéroscopie diagnostique normale préalable. En revanche, la découverte d’une hypertrophie endométriale chez une femme infertile doit faire discuter la réalisation d’une endométrectomie superficielle, surtout si aucune autre cause n’est mise en évidence et si cette hypertrophie résiste aux progestatifs. Il peut s’agir d’une hypertrophie symptomatique (dysménorrhée et/ou métrorragies) ou non. La technique chirurgicale est délicate. Il faut respecter la couche glandulaire basale (aspect piqueté de la base des glandes endométriales). Seule une anse de résection bipolaire doit être utilisée. Nous avons réalisé cette technique de résection superficielle d’endomètre dans une vingtaine de cas d’hypertrophie endométriale (> 15 mm) chez des femmes infertiles prises en charge en assistance médicale à la procréation. Un contrôle hystéroscopique a été réalisé dans tous les cas, vérifiant l’absence de synéchie utérine. Sur ces 20 femmes, 12 ont pu obtenir une grossesse. POINTS FORTS û L’endométrectomie complète et profonde réalisée soit par les techniques de première génération (résection à l’anse, roller-ball), soit par les techniques de seconde génération (micro-ondes, ballonnet chauffant, etc.) est indiquée pour toute femme ne désirant plus de grossesse et présentant des ménométrorragies fonctionnelles, une adénomyose, des fibromes utérins ou des polypes de l’endomètre. Il est important de prescrire après ce geste une contraception ou bien de proposer une stérilisation tubaire concomitante et ce, jusqu’à l’âge de 50 ans. FORTSfocale est préconisée lors d’hyperplasie endométriale L’endométrectomie ûPOINTS focale et lorsque subsiste chez la patiente un désir de grossesse. Cette technique est à réserver aux femmes jeunes désirant conserver un potentiel de grossesse. Il est important dans cette technique d’utiliser l’énergie bipolaire et de pratiquer une hystéroscopie de contrôle systématique (avec risque de récidive). û L’endométrectomie superficielle est indiquée lors d’hypertrophie endométriale associée à une infertilité. Il ne faut pas oublier que cette indication est limitée uniquement aux hypertrophies > 16 mm, persistantes et résistantes aux progestatifs. L’utilisation de l’énergie bipolaire est requise. Il est important de respecter la couche glandulaire basale (aspect piqueté de la base des glandes endométriales). L’hystéroscopie de contrôle doit être systématique, car il existe des risques de synéchies. [ Conclusion L’endométrectomie est donc un des piliers du traitement des ménométrorragies des femmes ne souhaitant plus de grossesse, quelle que soit l’étiologie bénigne sous-jacente. Ces femmes doivent se voir proposer une contraception après le geste ou une stérilisation tubaire hystéroscopique concomitante. agement of abnormal uterine bleeding before menopause. Eur J Obstet Gynecol Reprod Biol, 2010;152:133-7. 2. Lethaby A, Hickey M, Garry Ret al. Endometrial resection / ablation techniques for heavy menstrual bleeding. Cochrane Database Syst Rev, 2009;(4):CD001501. 3. Daniels JP, Middleton LJ, Champaneria R et al. On behalf of the International Heavy Menstrual Bleeding IPD Meta-analysis Collaborative Group. Second generation endometrial ablation techniques for heavy menstrual bleeding: network meta-analysis. BMJ. 2012;344:e2564. [doi:10.1136/bmj.e2564]. Bibliographie 1. Marret H, Fauconnier A, Chabbert-Buffe N et al. CNGOF Collège National des Gynécologues et Obstétriciens Français. Clinical practice guidelines on menorrhagia: man- L’auteur a déclaré ne pas avoir de conflits d’intérêts concernant les données publiées dans cet article. 31