SEPTEMBRE

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SEPTEMBRE
SEPTEMBRE
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RUDO ET CURSI - Carlos Cuaron - 1h 43’ - Mexique
Diego Luna, Gael Garcia Bernal, Guillermo Francella, Dolores Heredia
Jouer avec le football et ses règles commerciales, faire d’un sport national
une comédie sociale en ces temps de fête mondiale par le biais d’un
affrontement familial est en soi un exploit qui atteint l’universel.
Deux frères péquenots mexicains recrutés par un agent argentin vont être
adulés dans leurs clubs respectifs, connaître et confondre gloire, argent et
amours avant d’être sauvés par les narco-trafiquants de leur village.
La morale est presque sauve, le film est lucide dans son analyse, les
acteurs sont burlesques à souhait et le tout permet de rire sans remords.
ONCLE BOONMEE celui qui se souvient de ses vies antérieures Apichatong Weerasethakul - 1h 53’ - Thaïlande/Grande Bretagne/
Allemagne/France/Espagne
Thanapat Saisaymar, Jenjira Pongpas, Sadka Kaewbuadee, Natthakarn
Aphaiwonk
Les nuits de la jungle, propices à l’onirisme, nous abusent entre le mal
être des corps et le bien être des cœurs, les souvenirs et l’avenir de vies
réincarnées, compagnes des derniers instants. La réalité se confond alors
avec les rêveries, les personnages symboles d’existences vécues ou
futures, s’entrecroisent dans les temps, leur présence tangible s’intégrant
naturellement dans la magie des esprits et des sens. La quête de sérénité
joue avec l’érotisme dans la pénétration des grottes et les eaux troubles
des lacs, en vagabondages où cultures et religions se rejoignent dans
l’universalité d’un destin.
Cette Palme d’Or exigeante se veut la reconnaissance d’un certain cinéma,
reflet des traditions passées, à la fois film de genre et d’auteur, œuvre
sophistiquée et conte naïf qui se regarde comme un livre d’images aux
pages illustrées dans le désordre de la mémoire, brouillées par les
fantômes et inspirées par le bouddhisme.
A nous de les feuilleter, de céder à l’inconnu chimérique et de nous laisser
ensorceler par l’imaginaire, ou pas.
KRACH - Fabrice Genestal - 1h 27’ - France/Canada/Belgique
Gilles Lellouche, Vahina Giocante, Ch Berling Michael Madsen, Lisa Ray
Un thriller boursier nous entraine dans l’univers hors limites du risque et
du jeu. La spirale infernale de l’appât du gain et de la réussite fait tourner
les têtes des traders, tourbillonner les marchés, tel un corps virevoltant
entre ciel et terre dans une ivresse incontrôlable. L’engrenage de cette
quête d’argent abolit toute maîtrise de soi, toute lucidité, toute humanité
détruisant les sentiments et l’amour. Héros de cette chute annoncée
notre coq français égaré parmi les hedge fund américains y perd ses ailes
au rythme mécanique d’une démonstration mathématique et efficace,
reflet cinématographique d’un produit à vendre.
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DES HOMMES & DES DIEUX – Xavier Beauvois – 2h – France
Lambert Wilson, Michael Lonsdale, Olivier Rabourdin, Philippe
Laudenbach, Jacques Herlin, Loïc Pichon, Jean Marie Frin, Abdelhafid
Metalsi
Des youyous au silence il y a les hommes leurs fanatismes et sacrifices,
leur foi et ses doutes, leurs convictions et la manipulation. Les prières des
uns s’élèvent vers le ciel, celles des autres vers La Mecque, la mission des
moines de Tibehirine s’incarnait dans les chants dédiés à l’humanité, à
l’unisson contre la mort. La paix des âmes passait par de perpétuels
questionnements sur l’amour de Dieu par la fraternité, le don de soi pour
l’autre. Ce combat de frères missionnaires rejetant le terrorisme pour la
tolérance dans le respect d’aspirations différentes, s’incarne dans chaque
plan, chaque séquence, chaque musique, chaque dialogue, chaque regard
de chaque acteur pour faire de ce film un miracle entraînant le spectateur
dans une communion de l’esprit et de l’image où le cinéma se fait art.
LE DERNIER ETE DE LA BOYITA - Julia Solomonoff - 1h 30’ Argentine/Espagne/France
Guadalupe Alonso, Nicolas Treise, Mireilla Pascual, Gabo Correa
Avoir 8 ans ou en avoir 12 et rien n’est plus pareil pour deux sœurs en
vacances. A l’âge de la pré-adolescence et de la séduction s’oppose celui
de l’innocence, chacun affrontant la découverte des corps en devenir.
Cette mutation magique passe par le refus, la révolte, l’écoute d’une
petite fille complice d’un secret. Cet éveil à soi-même et à l’autre éclate
entre rires et pudeurs révélant le mystère de l’identité dans l’immensité
de la pampa argentine. La brutalité de la nature liée à l’univers des
adultes se mêlent à ce conte d’enfance intimiste et tendre.
UNE CHINOISE - Guo Xiaolu - 1h 38’ - Chine/Grande Bretagne Huang
Lu, Wei Yibo, Geoffrey Hutcings, Chris Ryman
En écho au « Moi, un noir » de Jean Rouch répond « Moi, une chinoise »
de Guo Xialu. Le film, découpé en chapitres tels des tranches de vie du
quotidien, trace le destin d’une jeune campagnarde. De son village à la
ville voisine, d’un violeur à un tueur, de l’innocence à la prostitution et à
l’amour, le hasard des rencontres et des événements la conduit d’Est en
Ouest jusqu’à Londres. Métaphore de l’identité de la Chine où demeure
l’empreinte du confucianisme au-delà des socialisme et capitalisme, cette
chronique intimiste se lit dans le regard et les silences d’une femme
déterminée dans son errance solitaire.
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HAPPY FEW - Antony Cordier - 1h 43’ - France
Marina Foïs, Elodie Bouchez, Roschdy Zem, Nicolas Duvauchelle
Une rencontre et un désir de hasard font naître l’échange entre deux
couples installés dans un quotidien sans histoire. Construits sur des règles
strictes, les jeux érotiques échappent un temps aux sentiments mais les
parenthèses n’existent que par l’enchantement de l’éphémère.
Insensiblement l’escalade du plaisir des corps se heurte aux vertiges des
pensées, attirance et nouveauté rattrapés par la curiosité et la jalousie.
Rien à voir pour les amateurs d’échangisme ou de sexe débridé dans cette
comédie douce amère qui caresse les cœurs et les mœurs avec une
finesse partagée par les quatre acteurs mais aussi certaine langueur ou
longueur.
MIRAL - Julian Schnabel - 1h 52’ - France/Israël/Italie/Inde –
Hiam Abbass, Freida Pinto, Yasmine Al Massri, Ruba Blal, Alex Siddig
L’histoire de la Palestine de 1947 à 1993 vue et vécue par les femmes.
Cette reconstitution adaptée d’une œuvre autobiographique romancée
mêle les archives à la fiction les ralentis d’images aux ruptures de sons
pour exprimer la tolérance au rythme des violences et souffrances
endurées par les populations. Soixante cinq ans de guerres et tentatives
vaines pour y mettre fin sont difficiles à résumer en un film qui aussi
brouillon soit-il a pour mérite de répercuter le cri des réfugiés et l’espoir
infini de justice et de paix.
BLACK DIAMOND - Pascale Lamché - 1h 41’ - France Documentaire
Le sous-titre de « Conte africain dans l’univers du footbiz » résume
parfaitement le fond et la forme de ce passionnant documentaire dont la
sortie ne se fera, et pour cause qu’après le Mondial.
Telle l’araignée gigantesque Ananse, figure ancestrale du folklore, le
pouvoir de l’argent du football fait commerce des enfants au même titre
que la traite négrière, pour les recruter, embrigader et dévorer.
Les chercheurs de nouveaux talents ne sont que des vendeurs et leurs
victimes n’ont d’autre choix que d’être éblouies par ce miroir aux
alouettes qu’est devenu ce sport. Ce sont évidemment les pays les plus
riches qui gèrent cette gigantesque exploitation des plus pauvres,
florissant marché de dupes. En mêlant et superposant les prises de vues
réelles aux images de dessins animés, les discours de ces organisations
aux aspirations des jeunes joueurs et aux souhaits de leurs parents, la
réalisatrice met en parallèle et en évidence rêve et réalité, innocence et
escroquerie. Trois journalistes africains se sont également impliqués dans
ce travail de pure information qui mériterait au surplus une diffusion
obligatoire sur tous les réseaux de télévision mondiaux.