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www.union-sainte-cecile.org Caecilia 5/2011 : Rencontre © Union Sainte Cécile - Strasbourg Bruno BELLIOT Directeur de l'Académie de Musique et d'Arts Sacrés de Sainte-Anne d'Auray Bruno Belliot, ancien organiste des églises St-Pierre le Vieux Catholique et St Jean de Strasbourg, ancien professeur d'orgue à l'’AFORGEP, nous parle de son travail de directeur de l'Académie de Musique et d'Arts Sacrés de Sainte-Anne d'Auray. Caecilia : Bruno, vous êtes aujourd'hui directeur de l'Académie de Musique et d'Arts Sacrés de SainteAnne d'Auray. Pouvez-vous nous présenter les activités de l'Académie ? Bruno Belliot : Fondée en 1999, sous le nom Centre de Musique Sacrée, l'Académie de Musique et d'Arts Sacrés (ADMAS), a pour but, selon ses statuts, de mettre en valeur par la musique et l'art sacré le patrimoine religieux et culturel, principalement en Bretagne. Il y a trois types d'activités. Premièrement, l'ADMAS mène des projets pédagogiques : - Les parcours musique-études avec la Maîtrise de Sainte-Anne d'Auray (dirigée par le britannique Richard Quesnel) et son antenne la Psallette de Malestroit (dirigée par l'alsacien Marc Huck) - L'École d'Orgue en Morbihan (école d'orgue décentralisée sur le territoire morbihannais largement inspirée par un séjour de 6 années en Alsace !) - L'École de bombarde Jean-Claude Jegat (enseignement de la bombarde et promotion du duo bombarde et orgue). La bombarde est un instrument traditionnel breton de la famille des hautbois. Deuxièmement, l'ADMAS présente une programmation annuelle : - la maîtrise de chapelle du sanctuaire demande une présence musicale continue des organistes, chanteurs, instrumentistes lors des célébrations dominicales, des fêtes et des pèlerinages - une saison de concerts avec les chœurs, les musiciens de l'ADMAS et des ensembles invités ponctuent l'année 1 Messe à Sainte-Anne d’Auray Au premier plan, les choristes de la Maîtrise - des expositions (notamment dans la galerie départementale datant du XVIIe siècle du cloître de Sainte-Anne d'Auray) sont organisées chaque année et remontées parfois même ailleurs (Château de Vincennes, Maison de la Bretagne à Paris). Enfin, depuis quelques mois, l'ADMAS s'engage dans la sauvegarde, la conservation et la restauration du patrimoine immobilier et des importantes collections du lieu. www.union-sainte-cecile.org Caecilia 5/2011 : Rencontre © Union Sainte Cécile - Strasbourg L'Académie propose à la fois un enseignement vocal et l'enseignement de l'orgue. Elle est liée à la vie liturgique de la basilique et porte le souci de la promotion de l'art et du patrimoine. Vous vivez de fait la complémentarité entre ces dimensions et vous les expérimentez dans leur unité. Comment en êtes-vous arrivés à cela ? B.B. : Même si l'Académie de Musique et d'Arts Sacrés a grandi de façon progressive - au départ, nos activités se résumaient presque exclusivement à l'École d'orgue en Morbihan et à la Maîtrise de SainteAnne d'Auray -, ces dimensions complémentaires étaient déjà inscrites dans le programme fixé, dans l'intuition des premiers jours. Les porteurs du projet (les acteurs mais aussi les nombreux partenaires) ont toujours visé, selon la réalité et l'histoire du lieu, un ensemble plus vaste, voire plusieurs éléments, à venir, et ont désigné cela à partir de 2004, comme une future Académie de Musique et d'Arts Sacrés. De ce fait, même si nous avons procédé par accumulation ou stratification dans notre développement, il n'y a jamais eu de rupture mais plutôt une croissance la plus organique et la plus naturelle possible. Enfin, sans vouloir développer ici le message même de Sainte-Anne d'Auray (un petit coin de terre où le ciel touche la terre), c'est du lieu lui-même, de son identité culturelle et liturgique forte (le Sainte-Odile breton !), de ses collections que tout découle continuellement. Le centre est rattaché à un lieu de pèlerinage et participe activement à la vie liturgique du lieu. Quels sont les principes et priorités qui guident votre action en la matière ? B.B. : Nous vivons en effet au cœur d'un des plus importants lieux de pèlerinage français (700 000 visiteurs annuels environ). Notre première priorité en matière liturgique est d'assurer une présence musicale et soignée le plus souvent possible. Le rythme liturgique propre à l'organisation du pèlerinage est assez important (laudes, trois messes, chapelet et vêpres chaque jour de l'année, sans compter évidemment les fêtes, les casuels de la paroisse, les pèlerinages spécifiques…). Ce sont ainsi plus de 300 célébrations annuelles qui bénéficient au minimum d'un chantre et d'un organiste, professionnels ou bénévoles. Nombreux sont les moments où s'ajoutent les différentes formations vocales (chorales d'adultes, chœurs de la maîtrise…) et instrumentistes (bombardes, hautbois, trompettes, violons…). En été, ce sont des jeunes organistes en formation qui se relaient pour accompagner cette fois toutes les célébrations de semaine (laudes et vêpres comprises). Dans nos principes et priorités, nous veillons aussi à la pleine participation des fidèles. L'expression musi- cale est vécue pour permettre à chacun de s'exprimer par son chant, ses réponses… et aussi comme une médiation qui permet de mieux entrer dans le mystère qui se vit selon la couleur propre au moment liturgique. Enfin, il nous paraît aussi très important de souligner les couleurs musicales bretonnes par l'association courante bombarde et orgue et/ou l'emploi des cantiques traditionnels. Aujourd'hui, comme musicien impliqué dans la vie de l'Église et la célébration de la foi, quels sont vos rêves pour l'avenir, à Sainte-Anne et ailleurs ? B.B. : Le premier « rêve » est de pouvoir simplement continuer de rêver, c'est-à-dire continuer, avec une équipe vraiment formidable et un environnement attentif, de creuser le sillon. Mais, comme souvent, en avançant, l'horizon ne donne que l'impression de reculer : seule la liturgie céleste, qui ne peut se refléter que bien imparfaitement, pourra vraiment nous combler. Ensuite, en reprenant cette idée de médiation exprimée précédemment, notre travail cherche à rejoindre dans notre monde contemporain, le plus grand nombre possible à chaque instant, lors de liturgies, sous la forme d'expositions, de concerts ou au cœur même de l'enseignement… Puisse tout cela constituer pour chacun une sorte de narthex ou d'hymne qui ouvre l'office, permettant d'accéder à une contemplation bien plus grande. Enfin, un flambeau nous a été transmis. Il est souhaitable que d'autres déjà s'en saisissent. C'est l'effort que nous poursuivons en faisant confiance à des plus jeunes, en leur confiant des responsabilités, en les accueillant lors d'un stage… comme ont pu déjà le faire avant nous en Bretagne ceux qui nous précèdent. Je pense ici particulièrement aux pères Yves Legrand (1910-2007) et André Guillevic (actuellement recteur du sanctuaire de Sainte-Anne d'Auray) qui ont toujours regardé vers l'avant. Un dernier vœu encore : que cette complémentarité au sein d'un même lieu, soulignée par vous-même, puisse aussi fleurir et être répétée (sous d'autres formes peut-être) ailleurs. Je dis souvent que nos métiers pris individuellement n'ont rien d'exceptionnel mais, leur réunion, dans un même montage, présente un caractère unique. Notre action étant tellement propre à Sainte-Anne d'Auray et à une réalité bretonne, qu'elle laisse la place à bien d'autres, ailleurs en France. Que nous puissions un jour partager et nourrir en réseau avec d'autres les mêmes problématiques est un vœu que je prononce fortement. 2