1905 Trains _FRENCH

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1905 Trains _FRENCH
RETOUR SUR LA « GOURBAYE »
(From Diaspora Sfaxienne 2005, p81)
Dans l'article intitulé « engins mécaniques mobiles vus à Sfax après la guerre », et
paru en 1997 dans le numéro 31 de notre revue annuelle, je disais que c'était le nom que les
mécaniciens et chauffeurs tunisiens du Sfax-Gafsa donnaient aux deux vieilles locomotives à
vapeur de marque « Veuve CORPE » qui avaient été remises en service pour faire face à
l'augmentation du trafic ferroviaire conséquence de celle du nombre de navires accostant aux
embarquements pour y charger du phosphate.
De mémoire, j'avais dessiné un rouleau compresseur, une des deux sonnettes à vapeur,
et une des deux locomotives en question. Je me fais le plaisir de reproduire ici celui de ce
dernier engin.
J'aurais bien aimé qu'un ancien du Sfax-Gafsa, qui en aurait possédé une photo, l'ait
envoyée à la D.S. pour que je puisse constater jusqu'où ma mémoire était fidèle. Mon attente
a été vaine.
C'est donc avec joie que j'ai pu consulter le livre « Les petits trains de chez nous »
publié en 1997 par MM Claude WAGNER et Jean-Louis POGGI aux éditions MDM, qu'a
bien voulu me prêter M. Jacques CAGNIEUL. que je remercie bien vivement. Ce livre
recense toutes les compagnies ferroviaires françaises ayant exploité des réseaux ferrés
secondaires utilisant souvent des voies métriques (écartement d'un mètre entre les deux rails),
comme c'était le cas pour le Sfax-Gafsa et la CFT entre Tunis et Sfax. Jusqu'en 1925 c'était le
règne des locomotives à vapeur. Celles-ci avaient en général trois essieux moteurs accouplés
par des bielles. Parfois on les munissait d'un essieu porteur supplémentaire, soit à l’avant, soit
à l'arrière. On avait donc trois types de standards (030, 130 et 031) pour les caractériser.
Première satisfaction pour moi : j'avais dessiné la «Gourbaye » comme étant une 130
disant, soyons honnête, que cela aurait pu être une toute autre combinaison. Ce livre montre
des photographies de locomotives de marque CORPET de type 031 ou 030 d'un poids
d'environ 14 tonnes, construites entre 1890 et 1896, et d'autres, plus lourdes (16 à 20 tonnes)
construites entre 1912 et 1926, toutes utilisées sur des voies métriques.
En ce qui concerne les 130, les photographies du livre représentent des locomotives
CORPET-LOUVET, plus lourdes et construites entre 1913 et 1915. Je présente ci-dessous la
130T No 75, dénommée « Gespunsart », qui a circulé sur l'ancien réseau des chemins de fer
départementaux des Ardennes où l'exploitation pour le transport des betteraves dura jusqu'en
1961. La photographie date du 14 octobre 1956.
Si on compare cette photo à celle de mon dessin, on constate des similitudes et
quelques différences plus on moins importantes. La cheminée est très haute, et il y a deux
bosses sur le corps de la locomotive, entre la cheminée et la cabine. Je vous concède que j'ai
accordé la même importance au dôme de prise de vapeur, renfermant le régulateur, (c'est
celui qui est le plus près de la cheminée), qu'à la sablière. Le premier est en fait plus haut et
un peu plus gros que la seconde. On voit courir un tuyau allant de la cabine jusqu'à la base de
la cheminée. Il devait probablement servir à l'évacuation du trop plein de vapeur, en
remontant le long de la cheminée, mais de l'autre côté comme sur mon dessin. Cette 130 a des
réservoirs d'eau sur les côtés, le charbon étant stocké à l'arrière de la cabine, d'où l'appellation
130T.
Il en allait de même pour cette autre qui, équipée de freins à air, possède deux
réservoirs cylindriques au dessus des soutes à eau latérales, et un compresseur, visible à
l'avant, dénommé « petit cheval » par les gens du métier.
Ceci n'était pas le cas pour la « Gourbaye » qui était, elle, attelée à un tender. Or
qu'est-ce qu'un tender ? C'est une grosse citerne d'eau avec, en son centre, une petite
excavation où l’on mettait le charbon. En Tunisie l'eau était plus rare qu'en France, et le trajet
entre Sfax et les mines de Metlaoui et Redeyef, bien plus long que ceux effectués
habituellement par les trains sur les réseaux secondaires français. Il fallait donc pouvoir
stocker beaucoup plus d'eau, d'où la nécessité d'un tender.
C'est ce qui est confirmé par la reproduction ci-dessus, d'une carte postale ancienne,
vendue courant septembre, plus de 25 euros aux enchères sur Internet (pas à moi). Elle
représente le pont de chemin de fer enjambant l'oued Baïech à l'entrée de Gafsa. On y
distingue une locomotive ressemblant en bien des points à celle de mon dessin, n'ayant pas de
réservoirs d'eau latéraux, et associée à un tender. Mais on ne voit pas les roues et ce n'est pas
la « Gourbaye » de mes souvenirs! La vraie est celle de cette photo prise devant la rotonde du
dépôt de Sfax vers 1925-1930. C'est bien une 130, et elle est équipée de freins à air
Westinghouse, le « petit cheval » étant bien visible au niveau du deuxième essieu porteur.
Mme FORTIER, que je remercie bien vivement, m'a communiqué cette photo alors
que je considérais cet article comme terminé. J'ai donc ajouté quelques lignes à ce
paragraphe, sans changer un iota aux deux suivants.
Se pose maintenant la question du constructeur des premières locomotives du SfaxGafsa. Sur la cabine des deux que j'ai vu opérer à l'entrée de « la petite vitesse », la plaque
indiquait « Veuve CORPET » (même si dans ma mémoire le T final avait disparu). La mise
en exploitation de la ligne entre Sfax et Gafsa datant de 1898, la photo de la carte postale cidessus, doit dater d'entre 1902 et 1910 au vu des oblitérations que j'ai pu relever sur les cartes
postales anciennes de Sfax en ma possession. La locomotive a été, bien évidemment
construite antérieurement. Sur la photo d'une locomotive 031 de 1890, on lit sur la plaque L.
CORPET, constructeur à Paris, l'adresse en étant illisible. A partir de 1913 on trouve aussi
l'appellation CORPET-LOUVET.
Y aurait-il eu jusqu'à la fin du XIX ème siècle un L.CORPET, dont la veuve aurait
pris la succession à la tête de l'usine ? Se serait-elle par la suite associée à un dénommé
LOUVET ? Il faudrait pouvoir approfondir la question, ce qui pour moi est actuellement hors
de question car j'ai d'autres centres d'intérêt. N'empêche que si quelqu'un avait une photo
d'une des deux CORPET, ou de toute autre locomotive à vapeur du Sfax-Gafsa, ainsi que des
« sonnettes » à vapeur qui servaient à enfoncer les pieux pour les fondations des immeubles à
Sfax, je suis preneur. Si on me les envoie chez moi à Toulouse (voir mon adresse sur
l'annuaire 2004 de la D.S.), je m'engage à les retourner à leur propriétaire, dans les délais les
plus brefs, après les avoir fait scanner (Merci Christian ATTARD). Ceux et celles qui m'en
ont déjà confié peuvent attester que j'ai toujours tenu cet engagement.
Toulouse, novembre 2004. G. Bacquet

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