Les Algériens confirment leur rejet des élections LA

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Les Algériens confirment leur rejet des élections LA
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Mourad Dhina
restera
en Suisse
Les Algériens confirment leur rejet des élections
Berne refuse d’extrader
vers l’Algérie Mourad Dhina,
le nouveau chef de
l’exécutif du Front islamique
du salut (FIS dissous),
condamné par contumace
en 1997 à vingt ans de
réclusion criminelle. C’est
ce qu’a répondu jeudi
dernier Folco Galli, le porteparole de l’Office fédéral de
la justice helvétique, à la
demande formulée la veille
par Mohamed-Salah
Dembri, le représentant
algérien auprès des Nations
unies.
(Page 11)
Intempéries :
10 morts
à Batna
et Biskra
Photo : Moh > Le Matin
LA DEBACLE
DE BOUTEFLIKA
Le jeudi 10 octobre à Tizi Ouzou.
Impressionnant dispositif
sécuritaire pour encadrer
les élections.
Dix personnes sont mortes
et une a été portée disparue
mercredi dernier dans des
inondations dans les
régions de Batna et Biskra,
respectivement à 430 km à
l'est et 435 km au sud-est
d'Alger.
(Page 11)
La Kabylie a confirmé, jeudi dernier, son rejet des élections, dont les
résultats officiels, amputés de ceux de cette région, donnent un taux de
participation ne dépassant pas les 50 %. Le forcing exercé pendant des
mois par l’Administration de Yazid Zerhouni et l’intégration du FFS
dans le jeu électoral n’ont pas été d’un grand apport pour le Président
Bouteflika, qui a encore une fois échoué à imposer ses choix
(Lire pages 2 à 9)
La gifle de la Kabylie à Aït Ahmed
Un reportage
de Mohamed Benchicou
L
a Kabylie est décidément
plus majestueuse dans le
silence : Tizi Ouzou, Mekla,
Azzazga, Larbâa Nath Irathen,
toutes ces cités kabyles respectant la
consigne « villes mortes » des
aârouch, ce n'était plus, à bien y
regarder, que d'imposantes étendues
abandonnées à la pluie capricieuse,
aux CNS épuisés et aux illusions
électorales. Dans une ville morte,
seul le pain est disponible, le pain et
le domino, quoique, pour reprendre
la formule du jeune délégué des
Genêts, « personne n'a idée d'avoir
faim aujourd'hui ». Alors, va pour le
domino. Dans ce café de Bouhenni,
banlieue de Tizi où on vote FFS de
père en fils, le « double six » a remplacé Aït Ahmed. Les « anciens »,
amers, perplexes, sans doute un peu
perdus, comptent les points autant
que les jours perdus. « Ils ont toujours cru en lui, et aujourd'hui ils ne
comprennent pas. Ils ont vu couler
le sang de leurs enfants et celui de
leurs petits-enfants, comment pourraient-ils aller voter aujourd'hui ? »
Le zaïm a perdu hier sa patrie politique : il sait désormais qu'il ne
représente plus que 2 à 3 % dans
cette Kabylie contestatrice, agitée et
rebelle qu'il n'a pas vu grandir, dont
il a refusé d'écouter la colère et à
laquelle, suprême offense, il aurait
préféré Yazid Zerhouni. « Pour le
conduire finalement dans l'impasse
car on voit mal comment le Pouvoir
va s'en sortir avec des maires FFS
élus avec une dizaine de voix »,
assène ce jeune fonctionnaire de
Larbâa Nath Irathen où, il est vrai,
seuls 11 électeurs sur 4 800 avaient
déposé leur bulletin de vote à 15 h.
La Kabylie fière et blessée a désobéi
jeudi à Aït Ahmed, à l'exception de
quelques localités comme Tadmaït
où l'atmosphère était plutôt bon
enfant en milieu de matinée et Draâ
Ben Khedda qui « tombera dans
l'escarcelle du FLN, vous verrez »,
jure le représentant local de Benflis.
Partout ailleurs, Aït Ahmed a subi la
déroute, et même l'offense : « FFS
harkas », « FFS = CNS » et,
comble de l'insulte, « FFS = DRS »,
dénoncent de féroces graffitis sur la
route escarpée qui mène à
Aïn El Hammam et Aït Yahia, bastions légendaires de Aït Ahmed.
Graffitis un peu sacrilèges et qui
mettent tout le monde dans l'embarras, à commencer par ce délégué de
Mekla, un médecin aux cheveux grisonnants, qui avoue une ultime compassion : « Jusqu'à ce matin, il
n'était pas encore trop tard… J'ai
proposé aux militants du FFS de se
retirer avant le déshonneur, de nous
réunir autour d'un couscous, ils ne
m'ont pas écouté… » Résultat :
à 15 h, seuls 9 citoyens avaient voté
à Mekla. Je vois Belaïd Abrika à
l'hôpital de Tizi Ouzou, au chevet
d'un jeune blessé de Ouaguenoun. Il
est calme et confiant : « On a réussi
à boycotter le vote sans qu'il y ait les
torrents de sang qu'attendait le
Pouvoir. Nous avons donné des instructions pour éviter la violence.
C'est une victoire historique de la
population de Kabylie… »
M. B.
(Suite page 5)
LE DEVOIR DE VERITE — ISSN 1111-1100 — n° 3238 ven. 11 - sam. 12 octobre 2002 — Prix : 10 DA - 0,80 a