Deux textes sur les fontaines et les thermes Fichier
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2013-2014, S1 Université Paris 1 L1 - Histoire de l’art et archéologie Art et archéologie de Rome et de l’Italie E. Letellier [email protected] Thermes, aqueducs, fontaines Les fontainiers de Rome Frontin, Les aqueducs de Rome, 116-118. Texte traduit par C. Salles (In C. Salle, L’Antiquité romaine. Paris : Larousse, in extenso, 1993.) Frontin, homme politique et militaire romain, envoyé un temps comme gouverneur dans la province de Bretagne, devint curator aquarum à Rome en 97 ap. J.-C., c’est-à-dire qu’il avait en charge la direction des équipes qui surveillaient et maintenaient le réseau d’eau pour la Ville. C’est pour rassembler les données disponibles et nécessaires à l’accomplissement de cette tâche qu’il écrivit son traité sur les aqueducs de Rome. Il y décrit les aqueducs de Rome, leur histoire, leur tracé, les données techniques qui les concernent et explique comment l’on doit entretenir les conduites d’eau. Il revient également sur les différents types de fraudes liés à la distribution de l’eau et à la législation à ce sujet. C’est donc une source très précise et détaillée sur l’administration de l’eau à Rome à la toute fin du Ier siècle après J.-C.. « Avant de parler de l’entretien des conduites d’eau publiques, il faut que je donne quelques explications sur les employés de ce service. Il y a deux groupes de fontainiers, ceux qui appartiennent à l’Etat, ceux qui appartiennent à l’empereur. Les fontainiers de l’Etat sont les plus anciens, car ils ont été légués par Agrippa à Auguste qui les a donnés à l’Etat. Ils sont à peu près au nombre de deux cent quarante. Le nombre des fontainiers appartenant à l’empereur est de quatre cent soixante et ils ont été organisés par Claude, lorsqu’il fit construire ses aqueducs dans la ville. Dans les deux groupes d’esclaves, il existe de nombreuses spécialités : intendants, gardiens des châteaux d’eau, inspecteurs, paveurs, stucateurs et autres ouvriers. Parmi eux, il faut qu’il y en ait en dehors de la ville pour les travaux sans grande importance qui demandent une intervention rapide. A l’intérieur de la ville, les employés, que ce soit dans les châteaux d’eau et dans les fontaines, s’occuperont de toutes les tâches, et plus précisément en cas d’imprévu, pour qu’on puisse envoyer de grandes quantités d’eau venant de différents postes dans celui qui en a besoin1. Ces deux familles d’esclaves en nombre si important étaient souvent détournées vers des travaux privés pas les complaisances ou la négligence des responsables. Je décidai de les rappeler à la discipline et au ministère public en dictant la veille la liste des tâches à accomplir le jour suivant et en faisant inscrire les travaux qui avaient été accomplis chaque jour. 1 L’auteur pense ainsi particulièrement aux incendies Les appointements du personnel d’Etat sont payés par le Trésor public et cette dépense est financée par les taxes prélevées pour le droit à l’utilisation de l’eau. Ces taxes viennent de terrains ou de bâtiments qui entourent les conduites, les châteaux d’eau, les fontaines ou les bassins. Ce revenu, atteignant presque 250 000 sesterces, était auparavant détourné et indéterminé ; récemment, il était versé dans les cassettes de Domitien, mais, grâce à la justice du divin Nerva, il fut rendu au peuple. Par mes soins, il a été ramené à une règle fixe pour que l’on sache quels étaient les endroits soumis à cette redevance. Le personnel de l’empereur reçoit des appointements venant du Trésor impérial et celui-ci règle aussi les frais du plomb et toutes les dépenses touchant les conduites, les châteaux d’eau et les bassins. » Le vacarme des thermes Sénèque, Lettres à Lucilius, 56. Texte traduit par C. Salles (In C. Salle, L’Antiquité romaine. Paris : Larousse, in extenso, 1993.) Sénèque (autour du changement d’ère – 65 ap. J.-C.) est un des plus célèbres auteurs latins. Adepte de la philosophie stoïcienne, avocat, précepteur de Néron, puis homme politique et courtisan de premier plan, il s’adonna à la littérature dans de nombreux genres différents, des traités scientifiques à la tragédie. Il écrivit à la fin de sa vie les 20 livres des Lettres à Lucilius, qui prennent pour point de départ tous les menus événements de la vie quotidienne pour encourager leur destinataire à suivre la voie de la morale stoïcienne : chercher la tranquillité de l’âme en se pliant aux nécessités de la vie sans en être prisonnier, s’élever au-dessus de toute atteinte extérieure. « J’habite juste au-dessus d’un établissement de bains. Imagine donc tous les genres de bruits dont mes oreilles ont à souffrir. Lorsque les sportifs s’entraînent et soulèvent avec difficulté leurs haltères de plomb en souffrant ou en faisant semblant de le faire, j’entends leurs sifflements, leurs respirations haletantes. Lorsque l’un d’eux, par hasard, fait une pause et reçoit un banal massage, j’entends le claquement de la main frappant sur ses épaules et variant de sonorité, selon qu’elle se trouve à plat ou repliée sur elle-même. Et s’il arrive qu’un joueur de balle se mette à compter les points, c’est le comble ! Ajoute à cela les cris de celui qui se chamaille, du voleur pris la main dans le sac, de celui qui est tout content de faire des vocalises dans le bain. Ajoute encore le vacarme de ceux qui plongent dans la piscine en faisant gicler des gerbes d’eau. En plus de tous ces individus dont les cris sont en quelque sorte naturels, imagine l’épileur qui, pour faire remarquer sa présence, lance à intervalles réguliers ses glapissements aigus et ne s’arrête qu’au moment où il arrache les poils des aisselles d’un client en le faisant crier à sa place. Et puis voici le marchand de boissons avec ses braillements variés, le vendeur de saucisses, celui de gâteaux et tous les employés des tavernes, chacun vantant sa marchandise avec sa mélopée caractéristique. »