La Pentecôte dans la tradition juive

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La Pentecôte dans la tradition juive
La Pentecôte dans la tradition juive
Selon le livre du Deutéronome, la fête des semaines est une fête agricole.
Pourtant, dans la tradition essénienne, c'est la fête de l'Alliance, et chez les pharisiens, c'est la fête du don de
la Torah.
Comprendre cela est d'une grande importance car la Pentecôte chrétienne est une fête de la nouvelle
Alliance et de la Torah céleste révélée en Jésus, dans son Esprit Saint.
Dans la tradition essénienne : fête de l’Alliance et des serments
Cett fête tombait toujours un dimanche (comme pour les chrétiens).
La fête la plus importante de l'année
Le livre des Jubilés, dont on a retrouvé des fragments de manuscrits à Qumrân, nous permet de connaître la
conception que les Esséniens se faisaient de la fête de la Pentecôte. Pour eux, c’était la plus importante de l
’année.
La fête du renouvellement de l'Alliance
Selon le livre des Jubilés, Noé avait célébré cette fête de l’Alliance, et il son exemple les patriarches,
Abraham, Isaac et Jacob. Oubliée des hommes, l’ange révèle de nouveau l'Alliance à Moïse : « Il a été
ordonné et écrit sur les tablettes du ciel qu’on doit célébrer la fête des Semaines en ce mois une fois par an
pour renouveler l’Alliance chaque année » (6,17).
C’est en ce jour qu’ont eu lieu les grands événements de l’histoire : l’alliance avec Abraham parmi les
animaux partagés, la promesse de la naissance d’Isaac, la naissance d’Isaac, l’alliance avec Jacob. L
’Alliance du Sinaï a eu lieu aussi ce jour-là.
L’événement historique du Sinaï, tel qu’il est raconté dans la Bible, n’intéresse guère les milieux sectaires,
puisque toute leur doctrine repose sur les révélations particulières reçues par les fondateurs de la secte.
De plus, pour la tradition essénienne, ce qui importe c’est le renouvellement annuel de l’Alliance, plus que
la conclusion de l’Alliance au pied du Sinaï. Celle-ci n’est d’ailleurs pas la première, ni la plus importante.
La fête des serments
La Pentecôte garde son caractère agricole primitif (fête des prémices). (livre des jubilés 6,20 //
Deutéronome 16)
Mais la ressemblance entre Shabu’ot (semaines) et Shebu’ot (serments), et l’insistance du livre sur le
Mais la ressemblance entre Shabu’ot (semaines) et Shebu’ot (serments), et l’insistance du livre sur le
renouvellement des serments en ce jour, amènent à penser que le titre qui revient à la fête est celui de : fête
des Serments.
D’après des manuscrits de Qumrân, on sait maintenant qu’en ce jour se célébraient
- l’entrée des nouveaux membres dans la communauté
- et le renouvellement de l’Alliance.
Dans la tradition rabbinique : le rappel du don de la Torah
La fête de la Pentecôte ne tombe pas un jour fixe de la semaine, et c'est ainsi dans le judaïsme actuel.
Le don de la Torah, un événement historique unique
Il faut attendre le II° siècle de notre ère pour trouver les premières attestations rabbiniques mettant en
relation la fête de la Pentecôte et le don de la Torah.
Ensuite, le caractère agraire primitif de la fête disparaîtra peu a peu au profit du rappel de l’événement du
Sinaï, le don de la Torah.
Le premier témoignage est celui de Rabbi ben Chalaphta (vers 150) dans le Seder Olam (V) : le Talmud de
Babylone (Pes. 68b) donne une affirmation de R. Éleazar (vers 250) qui va dans le même sens.
Pour la tradition rabbinique, le don de la Torah est historique et unique. Il n’est pas un événement
intemporel, même si la Torah est éternelle ; il a eu lieu dans le temps, dans des circonstances précises.
Conclusion et hypothèse
Les deux conceptions de la fête ne sont pas en contradiction. Elles reflètent seulement deux théologies
différentes.
C’est pourquoi il n’est pas impossible que la tradition pharisienne ait interprété, selon sa propre théologie,
une fête de l’Alliance qui existait déjà avant le schisme essénien, mais qui était devenue de plus en plus la
fête d’une secte. On voit difficilement, en effet, l’école pharisienne se laissant influencer par une tradition
qui n’aurait appartenu qu’à des milieux constitués en secte.
Aussi pensons-nous que la relation entre la fête des Semaines et les événements du Sinaï doit remonter plus
haut que la tradition essénienne attestée pour la première fois dans le livre des Jubilés.
Excursus : Les différents calendriers
Dans le Lévitique, la fixation de la fête des Prémices (Pentecôte) se fait en relation avec la fête de Pâque qui
Dans le Lévitique, la fixation de la fête des Prémices (Pentecôte) se fait en relation avec la fête de Pâque qui
correspond à l’époque où l’on commence la moisson de l’orge. Les premiers fruits de cette récolte, il
convient de les offrir à Dieu par la présentation d’une gerbe, l’Omer. Cette offrande est fixée pour « le
lendemain du sabbat » (Lv 23,11). C’est à partir du lendemain de ce sabbat que doivent être comptées les
sept semaines qui fixent la fête des Prémices (Lv 23,15-16).
A partir de cela, trois interprétations sont possibles :
a) Sabbat est pris dans son sens ordinaire de 7e jour de la semaine. Telle fut la manière de compter des
Boéthusiens [un groupe lié aux Sadducéens, aux Maccabées et au "maitre de justice"], et parmi les
Samaritains, des Sabbéens.
La fête tombera toujours le dimanche.
b) Sabbat est pris dans le sens de semaine. L'Omer est offerte au 1er jour de la semaine qui suit celle des
Azymes. C'est à partir de ce jour que l'on doit compter les sept semaines entières. La fête tombera toujours
le dimanche, comme dans le Comput précédent. Tel est le calendrier attesté par le livre des Jubilés, et qui
fut utilisé à Qumrân.
c) Sabbat est pris dans le sens de jour de fête. D’après cette interprétation, le sabbat dont il est question dans
le texte biblique est la fête même de Pâque, le 15 nisan. L’Omer est offerte le 16 nisan. Le 50e jour sera le 6
siwan. D’après ce calendrier, la fête des Semaines ne tombe pas à un jour fixe de la semaine, comme elle
le fait dans les deux précédents. Les Pharisiens ont été les promoteurs de cette manière de calculer la date de
Pentecôte, et elle est devenue traditionnelle dans le judaïsme jusqu’à nos jours.
Jean POTIN, La fête juive de la Pentecôte, tome I,
Cerf, Paris 1971 p. 121-125
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