ce que j`appelle oubli

Transcription

ce que j`appelle oubli
FESTIVAL
D’HIVER
2014/2015
CE QUE J’APPELLE OUBLI
DOSSIER PEDAGOGIQUE
Mercredi 18 mars et jeudi 19 mars à 20h
Théâtre d’O / Entrée sud
Texte : Laurent Mauvignier
Conception et interprétation : Alex Selmane
Collaboration artistique : Michel Quidu
Durée 1h05
A partir de 16 ans
- Pôle Public et Communication - Service Educatif
‘Théâtre et Patrimoine’ - Marion Blanchaud – [email protected]
‘Théâtre et Sciences’ - Daniel Bresson – [email protected]
Responsable des relations publiques - Valérie Picq – [email protected] /04 67 67 31 22/06 74 63 44 32
DOMAINE D’O
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I / L E S P E C T A C L E : C E Q U E J’ A P P E L L E O U B L I
NOTE D’INTENTION
Ce dossier pédagogique est décliné en deux parties complémentaires.
La première partie est une est une approche non exhaustive du texte de Laurent Mauvignier, Ce que
j’appelle oubli à partir duquel le spectacle a été créé. Les pistes proposées permettent à l’enseignant de
construire des séquences qui lui soient personnelles ou d’apporter quelques informations
supplémentaires dans le cadre de recherches (TPE, exposés…)
La seconde partie met en lumière le lien entre spectacle vivant et site patrimonial : le Domaine d’O offre
au spectateur-visiteur un parcours singulier qui le conduit de l’ancienne métairie du XVIIe siècle au lieu
artistique dédié au spectacle vivant du XXIe siècle. Le bâtiment et les jardins, conçus par Charles-Gabriel
Le Blanc en 1722, reflètent sa volonté de transformer et d’aménager un site agricole en lieu de
divertissement ; cette « folie » matérialise à la fois la richesse du propriétaire, son appartenance aux
usages d’une classe bourgeoise, et son inscription dans la modernité du XVIIIe siècle.
Il nous semble enrichissant pour les élèves de « faire parler » le lieu d’accueil autant que les artistes, de
présenter l’écrin au sein duquel le spectacle se livre, pour tâcher de les sensibiliser à la nécessité de
l’espace théâtral comme lieu privilégié et partagé, lieu de divertissement décliné au passé, au présent et
au futur qui accueille les patrimoines que constituent les textes, les musiques, les arts graphiques et
visuels…
Le domaine d’O représente plus qu’un lieu de spectacle vivant : son parc et ses jardins appartiennent au
domaine public, et leur libre accès s’inscrit dans la politique culturelle de l’équipe du domaine d’O, dont
une des missions est de valoriser ce patrimoine architectural et naturel d’exception
FOCUS SUR L’ŒUVRE
Un homme prend une canette de bière dans un rayon de supermarché et boit sur place. Quatre vigiles
l'entrainent dans la réserve du magasin et le frappent à mort.
Fait divers dont Laurent Mauvignier s’empare en une seule longue phrase, ponctuée de points
d’interrogation, le récit tourne autour de la question : pourquoi ? et renvoie à notre humanité.
Le texte s’ouvre sur la phrase terrible du procureur : « c’est qu’un homme ne doit pas mourir pour si
peu » ; le point de vue du narrateur évolue en cercles concentriques, tout à tour l’homme, son frère, les
vigiles, un autre personnage, des gens, le spectateur enfin et surtout. L’écriture se déroule comme les
travées du supermarché, dont les rayons croulent mais qui imposent des retours en arrière, pour mieux
voir, mieux comprendre, mieux « s’informer », jusqu’à la nausée.
Laurent Mauvignier met en scène la triste humanité, caractérisée par le cri de celui qui va mourir.
L’écriture tient tête à la mort parce qu’elle établit l’instant qui va permettre de « sortir de l’oubli, ce que
j’appelle oubli », cet instant dont nous rêvons et qui ne se produit que rarement, cet instant refusé à
l’homme du récit.
Ce que j’appelle oubli a été mis en scène en 2012 par Denis Podalydès, puis chorégraphié par Angelin
Preljocaj.
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BIOGRAPHIE DE LAURENT MAUVIGNIER
Né à Tours en 1967
Diplômé des Beaux-Arts en 1991, il publie son premier roman, Loin
d'eux, en 1999. Suivront entre autres, et toujours aux Editions de Minuit,
Dans la foule (2006), Des hommes (2009) et Ce que j'appelle oubli en
2011 (librement inspiré d'un fait divers et qu'il définit comme une sorte
d'élégie en prose).
Certaines de ses œuvres ont fait l'objet de spectacles ou de mises en
espace (Denis Podalydès, Angelin Preljocaj, le collectif Les Possédés). Sa
première pièce de théâtre, Tout mon amour, a paru en 2012 chez
Minuit.
E X T R A I T D ' U N EN T R ET I EN A V E C LA U R E N T M A U V I G N I E R ( L A T E R R A S S E N O V . 2 0 1 2 )
«Le monologue s'affirme comme une parole adressée, même si le public en est le lecteur dans son
Intimité.
Mes personnages peuvent choisir l'oubli et préférer la liberté dans ce qu'elle a de sauvage, de résolument
violent. Il faut donner à voir les paradoxes parce que c'est par eux que se dessine l'humanité en chacun de
nous ».
Laurent Mauvignier parle de son travail d'écrivain comme une tentative de saisir le réel dans sa dimension
indicible, et s'inspire de faits divers ou d'évènements historiques. Ecrire, c’est mettre des mots sur
l’absence et le deuil, l’amour ou le manque pour retenir l’instant fugace.
E X T R A I T S DE C E QU E J ’ A P PE L L E O UB LI
« de le voir contre le mur de conserves, apeuré, l’air fou bientôt, ça les excite encore, sans qu’ils le disent,
à cause du droit qu’ils se donnent et de la force qu’ils y trouvent, les uns après les autres, ils y vont, de
leurs coups de pied et des coups de poing qui tombent et retombent encore »
« ma mort n’est pas l’événement le plus triste de ma vie, ce qui est triste dans ma vie c’est ce monde avec
des vigiles et des gens qui s’ignorent dans des vies mortes »
« ils espèrent échapper à leur propre misère, ce que l’appelle misère »
« pourquoi ce qui était si beau devient fade dès qu’ion le raconte ? »
NOTES DE MISE EN SCENE PAR ALEX SELMANE
L'acteur ET le spectateur, c'est le même qui opère. L'un parle à
haute voix. Comme le spectateur pourrait le faire dans son silence
et sa conscience.
L'espace de la représentation est le plateau mis à nu. La lumière
prend en contre l'acteur, parfois le surexpose. Sa parole est
sonorisée par un micro. Le trou noir du plateau, des lumières très
précises pour construire cet espace commun de l'acteur et du
spectateur.
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P I S T E S D E R E F L E X I O N ( P R O P O SI T I O N S N O N E X H A U S T I V E S )
1. Philosophie : la mort, la violence, la société, le double, le contrat social
2. Lettres : la construction d’un récit bref ; le fait-divers comme point de départ de l’écriture ; le
rapport réel/fiction ; les points de vue et la polyphonie; le choix de la phrase unique ; les
niveaux de langue ; en quoi ce récit est-il une « élégie » ? Thématiques : la société des
hommes, la violence, la mort ; l’ironie tragique
3. Histoire/Géographie : marginalisation et exclusion ; le droit ; le contrat social
4. Cinéma : l’écriture du scénario ; le montage parallèle ; une «écriture cinématographique »
5. Danse : la relation geste/parole. cf. Ballet Preljocaj :
www.preljocaj.org/menu.php?lang=en&m=1&a=4&m2=88
6. Thématiques transversales :
La violence - le récit orchestre plusieurs violences selon qu’elles sont exercées ou subies : la
violence des vigiles ou de la société indifférente se conjuguent dans l’écriture à celle que
subissent la victime ou son « frère ».
La solitude et l’indifférence - le texte est un acte d’accusation envers notre société qui rejette
ceux qui ne possèdent plus rien : « attendant quoi puisque personne n’est venu ni ne lui a
demandé s’il voulait de l’argent […] tous ont baissé les yeux parce qu’ils ont du travail qui les
attend […], et aussi parce qu’ils espèrent échapper à leur propre misère, ce que j’appelle
misère quand sur leur chemin c’est un type comme lui qu’ils croisent »
7. Réflexions à partir des extraits de presse suivants :
«Une écriture inscrite dans une certaine tradition Minuit – qu’il s’agisse de jouer avec
l’héritage du réalisme, de se laisser hanter par le cinéma ou de jouer de l’indétermination des
voix » ;
«[…] dans la lignée du roman réaliste français bien qu’il reprenne cette tradition pour
élaborer un réalisme de l’intime, saisi à travers le prisme de l’intériorité. Il en découle un
rapport à l’image important et particulier voué à rendre compte de la multiplicité des
subjectivités. »
« Nourri de cinéma, Mauvignier élabore une écriture en mouvement qui invente une nouvelle
forme de continuité »
« […] une façon d’entremêler les voix, de les faire ‘résonner’, jusqu’à la fusion parfois »
A P R E S LE S P E C T A C L E : S U J E T S D E R E F L EX I ON
- En quoi la mise en scène épurée renforce-t-elle l’intensité du propos ?
- Le choix des lumières répond à une démarche, à un point de vue. Proposez des interprétations.
- A quels moments l’acteur fait-il « jouer » son corps ? Pourquoi ?
- Quel(s) passage(s) vous ont marqué/e ? Décrivez et expliquez votre choix.
- La mise en scène d’un texte littéraire : comment dire/jouer le texte ?
- A la lecture du récit, commentez la pertinence des extraits choisis pour le spectacle.
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P O U R A LL E R P L U S L OI N - E X T R A I T S D E P R E S S E
Jean-Baptiste Harang, Magazine Littéraire, avril 2011
« le vrai scandale ce n'est pas la mort, c'est juste qu'il n'aurait pas fallu mourir pour ça »
C’est seulement en revenant au début, avec l’idée de recopier la première phrase, qu’on découvre qu’il
n’y en a pas, que le livre commence par une phrase en route, comme on pose le pied sur un tapis roulant
irréfragable, au milieu d’une phrase unique, sans majuscule initiale et qu’on vient d’en être éjecté pareil,
sans point final, planté là par un texte qui retourne sous la terre d’où il avait surgi tout à l’heure. Mais de
tout cela on ne sait rien à la première lecture, c’est une lecture primale, fiévreuse, compassionnelle,
presque coupable de n’avoir pu éviter ça : un jeune homme entre dans un supermarché, prend une
canette de bière dans un rayon et la boit, quatre vigiles l’entourent, l’entraînent dans les réserves et le
battent à mort. C’est tout. Il est écrit derrière le livre : « Cette fiction est librement inspirée d’un fait
divers, survenu à Lyon, en décembre 2009. » Voilà pourquoi les mots attrapés au vol étaient : « et ce que
le procureur a dit c’est qu’un homme ne doit pas mourir pour si peu ». À force de chercher la fin de la
phrase, on recroise ces mots page 54 : « dire la vérité avec la voix blanche d’un présentateur télé débitant
la mort des autres », et l’on pense à Coluche pour qui, « à chaque fois qu’un avion tombe dans le monde,
c’est sur les pompes à Roger Gicquel ». À chaque fois qu’on ouvre un livre de Laurent Mauvignier le
malheur du monde semble gonfler ses pages. Mais Mauvignier n’est pas ce cocker triste chargé
d’annoncer les mauvaises nouvelles, c’est un écrivain. Toute son œuvre démontre que la compassion n’a
pas besoin du mélodrame, que le deuil n’est pas une consolation, ni la douleur une rente, que le silence
est un cri. Mauvignier sait donner une voix, une vraie voix, à ses narrateurs - leur parcours social souvent
les en prive. Ici, il donne à écouter une phrase, une seule phrase, adressée par dieu sait qui au frère de la
victime. Le livre ne fait pas le départ entre le fait divers et la fiction qu’il inspire. Au magasin Carrefour de
Lyon Part-Dieu, le 28 décembre 2009, quatre vigiles ont tué Michaël Blaise, 25 ans, martiniquais. Une
caméra de surveillance a tout enregistré, ils l’ont traité de pédé, pas de sale Noir, il est mort la cage
thoracique enfoncée, le procureur a vraiment dit qu’un homme ne devait pas mourir pour si peu. De cette
histoire, Mauvignier fait un portrait oblique, touchant, ce n’est pas la victime qui parle mais curieusement
on entend son silence, le peu qu’il a à dire, son regret de mourir maintenant, on comprend qu’avec la
mort s’achève la peur de mourir. Il n’est pas dit que quelqu’un est noir, il n’est pas dit que personne n’est
pédé, le Rhône est loin, on parle de bords de Loire, de Paris, de détresse, d’hommes. Des hommes était le
titre du dernier roman de Mauvignier, en voici d’autres, désolés et désolants, humains et inhumains,
comme vous et moi.
Marine Landrot, Un homme ne doit pas mourir pour si peu, Télérama n° 3193, 26 mars 2011
Après celles du Heysel (Dans la foule) et de la guerre d'Algérie (Des hommes), Laurent Mauvignier explore
une nouvelle tragédie, survenue à Lyon en 2009 : la sauvage mise à mort d'un voleur de bière par quatre
vigiles, dans l'arrière-boutique d'un supermarché. Son style désormais consacré, hagard, submergeant,
inextinguible, fait une nouvelle fois mouche. Après les raz de marée des précédents romans, dans lesquels
des êtres blessés tentaient de résister au flot de l'Histoire, une extermination individuelle en catimini, sans
cris ni témoins. Pour passer de l'infiniment grand à l'infiniment petit, de la page d'histoire collective au
brouillon de vie jeté au caniveau, Laurent Mauvignier s'est glissé dans un tout petit livret de survie. Son
nouveau roman est composé d'une seule phrase de soixante pages, expectorée comme un dernier souffle,
où la panique le dispute à l'espoir (« ils vont arrêter de frapper, je vais retrouver mon souffle, ça ne peut
pas finir ici, pas maintenant et pourtant il ne pouvait plus respirer ni sentir son corps ni rien entendre, ni
voir non plus et il espérait malgré tout, quelque chose en lui répétant, la vie va tenir, encore, elle tient, elle
tient toujours, ça va aller encore, ils vont cesser parce qu'ils vont comprendre que ma vie est trop petite
dans mon corps et qu'elle s'amenuise trop maintenant pour durer plus qu'une bulle de savoir qui monte et
éclate »). Ce cri de révolte contre l'effervescence des existences que la misère a rendues transparentes est
d'une insoutenable stridence. Mais l'écriture est là, attentive, suspendue, pour offrir des parenthèses de
réconfort. En signe de résistance, ce que Mauvignier appelle l'oubli, c'est le souvenir, ce droit à continuer
de vivre dans le havre des têtes accueillantes.
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Pierre Assouline, Blog la république des lettres, 13 février 2011
Un homme vêtu d'un survêtement et d'un tee-shirt jaune et noir entre dans un supermarché. La soif le
prend en passant devant le rayon des liquides. Il prend une canette de bière, l'ouvre et la boit. Deux vigiles
l'entourent aussitôt. A croire qu'il a dégoupillé une grenade. Le bruit n'est pourtant pas le même, l'effet de
souffle non plus. Ils sont bientôt quatre. S'en saisissent sans ménagement et l'emmènent dans un local de
sécurité. Ils lui fichent des claques, le traitent de pédé, le houspillent, le cognent. Ils sont assez pervers
pour jouir de sa souffrance. Se font plaisir, voilà tout. Ils s'excitent « à cause du droit qu'ils se donnent et
de la force qu'ils y trouvent ». Il se débat, se récrie, les engueule, tente de se protéger. Ils le plaquent
contre un mur puis sur une table. Le voilà à terre. Les vigiles cognent de plus belle, au ventre, au visage,
partout. Il râle et meurt. Six minutes s'écoulent avant qu'ils relâchent leur pression. Ils diront que son
cœur a lâché inopportunément. Ils diront aussi qu'il les avait insultés, qu'il refusait d'obtempérer et qu'il
brandissait un couteau. On n'a retrouvé ni les insultes, ni le refus, ni le couteau. L'enregistrement de la
vidéosurveillance en témoigne. Le rapport d'autopsie précise : « Asphyxie mécanique par compression de
la cage thoracique et une obstruction des voies respiratoires supérieures ». Ce serait obscène de se
demander s'il avait voulu voler la bière en la buvant ou s'il était pressé de la boire avant de la payer car
même pour le vol d'une canette on ne doit pas mourir, en principe.
La scène se passe de nos jours en France dans Ce que j'appelle l'oubli (62 pages, 7 euros, Editions de
Minuit), un récit de Laurent Mauvignier, aussi sec que son précédent livre, Des Hommes (en poche chez
Double), roman sur la guerre d'Algérie, ne l'était pas ; dans celui-ci déjà, il avait suffi de presque rien, un
cadeau dans une poche un jour d'anniversaire en hiver, pour que resurgisse un passé inquiétant. Celui-là
est fait d'une phrase sans la moindre respiration. Une seule de soixante-deux pages. Comme pour
provoquer notre propre suffocation. Ce n'est pas une prouesse : Mathias Enard a écrit Zone d'un trait de
520 pages. La prouesse est ailleurs. Il faut un peu plus que du talent pour nous attraper, nous serrer et
nous relâcher d'un coup au dernier mot. C'est bref mais si tendu que ça suffit. Ce n'est pas une enquête
mais un geste de dégoût sublimé par l'écriture. Le narrateur s'adresse au frère de la victime pour lui
raconter. Pas de pathos, ni lamentation, ni jérémiade. Inutile de convoquer le tribunal international des
droits de l'homme. La littérature va plus loin. Ni noms, ni lieux, ni date. L'identification est impossible.
Mauvignier ne dénonce personne mais son récit est le plus terrible des actes d'accusation. L'excipit boucle
l'incipit du récit : la remarque entêtante du répétant qu'un homme ne doit pas mourir pour si peu, pas
maintenant, pas comme ça. En creusant un peu, mais ailleurs que dans le strict territoire du livre, on
apprend que cette histoire lui a été librement inspirée par un fait divers survenu dans un Carrefour de La
Part-Dieu (3ème arrondissement de Lyon) il y a un peu plus d'un an. Autant dire que ça s'est passé hier
près de chez vous. L'homme s'appelait Michael Blaise, il était originaire de la Martinique, il avait 25 ans. Il
était comme vous et moi dans la France de 2011 et ne soupçonnait pas qu'en entrant dans un
supermarché il n'en ressortirait pas vivant.
POUR ALLER ENCORE PLUS LOIN…
http://www.laurent-mauvignier.net
https://www.youtube.com/watch?v=wnmsEp1RTfY (lecture du texte)
https://www.enviedecrire.com/laurent-mauvignier-pourquoi-ecrire/ (entretien avec Laurent
Mauvignier)
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II / LE PA TRIMOIN E : LE PARC DU DOMA IN E D'O
A LA RECHERCHE DU ....
... XVIIIEME SIECLE
Plusieurs noms pour un site
1722 : Monsieur Claude-Gabriel Le Blanc, parisien d'origine et contrôleur général des gabelles* en
Languedoc, acquiert la métairie* du XVIIe s de la famille Saporta, sur le site appelé Puech Villa. Il s’agit
d’un ensemble de mas et des terres dépendantes - dont une oliveraie -, que Le Blanc va transformer en
château. ; on appelle couramment „folie“ ce type de belle maison de campagne. Le château de Puech Villa,
d‘une architecture sobre, est entouré de terres cultivées irriguées par deux sources, deux puits et le
ruisseau des Molières, collecteur d’eaux pluviales.
•
•
Gabelle : impôt sur le sel
Métairie : domaine agricole géré par un métayer ; les propriétaires délèguent au métayer l’exploitation
et l’entretien du domaine, à charge pour eux d’en tirer des bénéfices.
Dans la première partie du XVIIIe s., Le Blanc procède à de grands travaux, qui concernent tant les
bâtiments que les terres environnantes, plantées principalement de vignes.
La circulation de l'eau, essentielle aux cultures comme au jardin d''agrément, est au centre des premières
préoccupations du nouveau maître des lieux, qui fait édifier un vaste réseau de canalisations et un grand
bassin de rétention. Le projet est d'aménager un parc et un jardin d’agrément selon la mode de l'époque :
arbres fruitiers, bosquets, bassins et fontaines, statues et bancs...
Le nom actuel domaine d’O reflète l’importance revêtue par la présence de l’eau ; en effet, lorsque
l’intendant Guignard de Saint-Priest acquiert le domaine en 1762, il fait aménager une prise d’eau sur
l’aqueduc - conduisant l’eau au Peyrou - qui traverse sa propriété. Le domaine de Puech Villa devient le
Château d’Eau. Au XIXe s., la graphie fait apparaître l’appellation château d’O (faute d’orthographe ou
premier texto ?), ou château d’Ô.
A l’origine, la folie de Puech Villa
La métairie est en partie démolie et reconstruite selon la mode de l’époque, et ses accès réaménagés
(pont, chemins, portail). Pour Claude-Gabriel Le Blanc, il s’agit d’afficher son train de vie luxueux, comme
les autres riches Montpelliérains.
Le bâtiment lui-même est modifié au fil des ans : façade, fronton, fenêtres à l’italienne, toitures,
rénovations intérieures, communs….
Simultanément, un premier réseau hydraulique est construit depuis la source de l’Euze et le ruisseau des
Molières, dont les eaux sont réunies dans un réservoir recouvert. L’eau est ensuite distribuée par des
canalisations en poterie ou en plomb, et arrive dans un bassin situé devant la métairie. Une fontaine
couverte est bâtie pour fermer le jardin.
Charles-Gabriel Le Blanc fait alors planter
l’oliveraie, le verger (abricotiers, poiriers,
pêchers, pommiers), le potager (asperges,
fraisiers, groseilliers), et le jardin d‘agrément
(buis).
Devant le bâtiment principal deux grands
axes Nord-Sud et Ouest-Est se croisent. Ces
deux allées perpendiculaires permettent
l'accès au domaine et se ramifient en de
nombreuses allées plus modestes, qui
quadrillent l'espace aménagé.
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1735 : Claude-Gabriel le Blanc acquiert la propriété des Jésuites, au
sud, qu'il transforme en chais. C'est l'emplacement actuel du Théâtre
d'Ô. L’achèvement de la restauration du château et l’extension du
domaine lui permettent de réaménager le jardin et le parc : nouveau
parterre face au château, plates-bandes et broderie de buis, bassin en
pierre et deux fontaines à cascades, bosquets de mûriers et de noyers,
cabinets de verdure avec bancs, allée de grenadiers, bassin décoré
d’une coquille de marbre, grille encadrée par deux piliers surmontés
de lions. Dans sa partie nord, le parc abrite des marronniers alternant
avec des buis, des peupliers et se clôt par une haie de cyprès ; au sud,
lauriers-tins et lauriers-cerise, carrés de luzerne, marronniers et buis.
Des platanes ont remplacé les mûriers au XIXe s.
Les essences actuelles ne correspondent pas nécessairement aux
plantations d’origine, remplacées par des pins, des micocouliers et des
troènes ; les cyprès et les platanes ne sont pas non plus les arbres
plantés par Claude-Gabriel Le Blanc.
LE JEU DE PISTE
1/ Sur l'ensemble du domaine : distinguez les jardins d'agrément, les bâtiments, les plantations et le parc
(cf. plan). Repérez-vous par rapport aux axes Nord-Sud et Est-Ouest.
2/ Dans la partie sud du parc, retrouvez :
- Sur l'axe Sud-Nord :
• "l'allée de sortie en droite ligne de la façade du château", avec deux piliers surmontés de lions en
pierre. Ils marquent l'entrée du Domaine d'Ô côté ville ;
• les fontaines, le bassin décoré d'une coquille ;
• les "broderies" de buis ; les plates-bandes garnies de plantes décoratives ;
• le puits ;
• les marches de pierre qui conduisent à une allée plantée ;
• les bosquets, qui forment des cabinets de verdure avec des bancs, de part et d'autre de l'axe SudNord ;
• les statues dédiées à la musique : le faune Syrinx (la flûte), la joueuse de tambourin, la Muse, Bacchus ;
• le grand bassin ; le grand banc ;
• le mur d'enceinte qui clôture le parc et les jardins.
- Sur l'axe Est-Ouest :
• le petit pont qui enjambe le ruisseau des Molières, une des ressources en eau du Domaine ; les statues
des Sphinges ;
• les allées transversales ;
• les oliveraies ;
• le mur d'enceinte qui clôture le parc et les
jardins.
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