Quelles frontières pour l`Europe

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Quelles frontières pour l`Europe
Quelles frontières pour l’Europe ?
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Les Clionautes au festival de géopolitique de Grenoble–septième édition–mars
2015.
Quelles frontières pour l’Europe ?
avec Gérard–François Dumont, professeur, université de Paris IV Sorbonne ; Pierre
Verluise, directeur de Diploweb
par Bruno Modica
Mise en ligne : dimanche 22 mars 2015
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Clio-Conférences i Comptes Rendus i Festival de géopolitique de Grenoble 2015
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Quelles frontières pour l’Europe ?
Géopolitique de l’Europe. De l’Atlantique à l’Oural", cosigné avec Gérard-François Dumont.
Illustré de 30 cartes. (En librairie le 11 mars 2015) Edition Major PUF.
C’est en introduction de cette conférence à l’auditorium de l’école de management de Grenoble
que Jean-Marc Huissoud a annoncé le thème du prochain festival, dans son édition 2016, qui sera
consacré à l’Afrique.
Géopolitique de l’Europe de l’Atlantique à l’Oural.
Les deux auteurs de l’ouvrage du festival, publié aux presses universitaires de France dans la
collection « géopolitiques » dirigée par Pascal Gauchon, on fait également auditorium comble, tant
la question de ces frontières de l’Europe nous interpelle.
http://www.diploweb.com/Geopolitique-de-l-Europe-De-l.html
Il est évidemment possible d’évoquer cette frontière physique de l’Europe,
La frontière au milieu de la Russie d’Europe, sur les rives de la mer Noire, au cœur du Caucase, et
au nord avec l’océan Glacial Arctique. Le conseil de l’Europe réunit 47 pays, mais l’Europe est
aujourd’hui à géométrie variable, avec l’OTAN, la zone euro, l’espace Schengen auquel participent
pas le Royaume-Uni et l’Irlande ou encore la Bulgarie et la Roumanie. Les problèmes de frontières
entre pays européens peuvent encore demeurer à régler, comme celle de la Slovénie et de la
Croatie, mais on aurait pu également évoquer celle de la Hongrie, avec la Roumanie et la
Slovaquie. Les frontières de l’Union européenne sont des frontières évolutives, au gré des
élargissements successifs. Il peut y en avoir d’autres encore.
Quelles frontières pour l’Europe ?
Les deux professeurs sont intervenus en binôme, pour présenter successivement l’ensemble des
facettes qui permettent d’aborder ce sujet « quelles frontières pour l’Europe ? », Une thématique
sur laquelle le public présent avait toutes les raisons de chercher des réponses.
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Quelles frontières pour l’Europe ?
I. Des frontières évolutives
A. Une « success story » pendant la guerre froide.
Dès les débuts de ce processus de construction de l’Europe, au lendemain de la seconde guerre
mondiale, la question du Royaume-Uni, plus ou moins ancré à l’Europe a pu se poser. La question
était de faire un choix entre l’Europe ou le grand large. Et on connaît bien évidemment la réponse
du général De Gaulle.
La carte des élargissements successifs montrent tout de même cette extension continue, de
l’Europe des six, à celle des neuf, puis des 10 avec la Grèce, des 12 avec l’Espagne et le Portugal,
jusqu’aux grandes intégrations de 2007 puis de 2007, jusqu’à l’entrée du dernier pays, la Croatie.
Mais ce mouvement n’a pas fait toujours l’unanimité. Un pays comme la Norvège, a refusé par
deux fois, et par référendum, son intégration. Les risques sur les quotas de pêche et le refus de
partager, d’envisager une sorte de répartition de la rente pétrolière, a conduit cette attitude de la
population. Le Maroc aurait pu, et le roi Hassan II en avait bien intention, candidater, mais le pays
a été refusé. Les frontières de l’Europe s’arrêtent a Gibraltar.
B. Comme après 1990.
Avec un heureux sens de la formule, les deux intervenants ont parlé de cette Europe post-guerre
froide : L’OTAN donne le rythme, l’Europe court derrière. 1999. Pour tous les pays de l’Est,
anciennement membre du bloc soviétique, ou anciennes républiques soviétiques, comme les trois
pays baltes, l’adhésion à l’OTAN était une nécessité, avant même l’intégration à l’union
européenne, et pour l’un d’entre eux, dernièrement, à la zone euro. Le problème des pays satellites
qui sont entrés dans l’OTAN a bien évidemment suscité de fortes réserves de la part de la Russie,
surtout avec l’arrivée à la fin 1999 de Vladimir Poutine aux affaires.
Dans ces pays anciennement membre du bloc soviétique, et liés par le pacte de Varsovie
aujourd’hui disparu, la gratitude est plus forte envers l’OTAN qu’envers l’union européenne. En
2009, La Croatie et l’Albanie rejoignent l’OTAN. Et seulement en 2013 la Croatie entre dans l’UE.
L’OTAN est donc bien devenue la porte d’entrée dans l’UE. L’union européenne doit gérer
l’intendance, celle des financements, de la mise en ordre d’économies fragiles et pour certaines à
totalement reconstruire..
Au final, il convient de se poser cette question :
L’Europe élargie est-elle une puissance ? L’élargissement de l’Europe a favorisé une hétérogénéité
croissante, et il suffit de regarder la carte des différentiels de produit intérieur brut par habitant
pour s’en rendre compte.
Des pays qui essayent de rattraper leur retard, mais pour certains en matière de gouvernance, le
chemin semble bien difficile, et surtout coûteux pour le reste des pays de l’Union.
L’Union européenne est une puissance structurellement déficitaire. Avec 65 % des échanges intra
communautaires, elle ne compte qu’un seul champion à l’exportation, la république fédérale
allemande. Et, pour les deux auteurs, le processus de la mondialisation échappe à l’UE. Cela se
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vérifie avec le différentiel de pourcentage du produit intérieur brut consacré à la recherchedéveloppement.
De plus, politiquement, l’Europ a pu se diviser en 2003, à propos de l’intervention des États-Unis
en Irak. Et aujourd’hui, il existe incontestablement, avec l’Allemagne et la Pologne une sorte de
tropisme oriental, que le triangle de Weimar et c’est peut-être de compenser, mais de façon
limitée. Pour la France, depuis 2008, l’alternative qui aurait pu être constituée par l’union pour la
Méditerranée, ne s’est pas véritablement réalisée, la situation au Proche-Orient ne peut que
ralentir ce processus.
L’union européenne souffre incontestablement d’un déficit de puissance, et sa politique l’a conduit
à préférer plutôt le compromis, voire certainement la compromission, plutôt que l’affirmation.
Et depuis 2008 avec la crise qui a fait apparaitre des déficits abyssaux, l’union européenne a
changé de nature, passant d’un fédéralisme monétaire un fédéralisme budgétaire. La question qui
aujourd’hui se pose est de savoir à quel moment il sera envisageable de passer un fédéralisme
politique ?
II. En 60 ans, l’union européenne est passée de 6 à 28 pays...
A. De vrais et faux candidats.
Les critères de Copenhague en 1993 s’appuyer sur la démocratie et l’attitude réglementaire
intégrait les normes européennes et l’ensemble des dispositifs législatifs de l’union. La poursuite
des demandes d’adhésion est toujours en cours et il existe un statut pour les pays candidats, six
actuellement. Comme la Serbie ou le Monténégro.
Le problème est incontestablement celui de la Turquie, dont le poids démographique, modifierait
considérablement la situation et les équilibres politiques au sein des instances européennes.
B. Des candidats officieux.
Pour intégrer ces candidats officieux, et la Russie n’en fait absolument pas partie, car l’Eurasie et
son horizon, l’union européenne a développé la politique européenne de voisinage à partir de mai
2004, et aussi ce partenariat oriental qui a ouvert la boîte de pandore en Ukraine. Plusieurs pays
sont concernés, mais la Russie aussi par l’éventuelle entrée de la Moldavie, la Géorgie et l’Ukraine
dans ce partenariat oriental.
Les accords d’association avec l’union européenne sont multiples, mais ils conduisent
inéluctablement à un frottement avec la Russie qui ne fait pas mystère de ses ambitions de
contrôler ce qu’elle appelle son étranger proche et même pour une partie du territoire ukrainien la
Nova Rossia
C. La fatigue des élargissements
Pour les opinions publiques européennes, on assiste à une sorte de fatigue des élargissements, car
la plupart ont été décidés sans consultations démocratiques. Qui se souvient encore du référendum
de 1972 proposé par le président Georges Pompidou pour l’entrée du Royaume-Uni de l’Irlande et
le Danemark au sein de la communauté économique européenne ?
La question qui se pose aujourd’hui avec Europe à 28 est celle de savoir si celle-ci a les moyens de
fonctionner et si elle dispose de nouvelles capacités d’absorption.Pb.
A priori aucune nouvelle adhésion ne devrait avoir lieu avant 2020. Il semble évident que de
nouvelles adhésions peuvent susciter des réactions dans les opinions publiques, et que des
engagements en matière de validation par la voie d’un référendum dans certains pays, ayant été
pris, il sera difficile de faire l’impasse sur un processus démocratique.
III. Ou avec l’immigration.
A. Historique
La croissance migratoire est le moteur de la croissance de l’UE, même s’il y a eu inflexion depuis
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2008. Les dernières adhésions à l’union sont celles de pays vieillissants, la question du dynamisme
démographique se pose, à l’exception de certains pays, comme la France et l’Irlande. Le poids
relatif de l’Union européenne dans la population mondiale est de plus en plus faible, et même son
solde migratoire relatif est en baisse.
Indépendamment des effets de tribunes électoraux, l’émigration clandestine massive ne
correspond pas à la réalité à l’échelle de l’union, les plus forts contingents sont représentés par les
d les regroupements familiaux.
L’immigration est également très différenciée d’un pays à l’autre de l’Union, avec des constantes
fortes
B. Pourtant les écrans sont pleins d’images qui mettent au défi FRONTEX et
SHENGEN
Ces images ne correspondent pas vraiment à la réalité statistique, mais il n’en reste pas moins que
l’Union doit relever des défis. Celui de l’immigration de travail, celle de l’accueil, et de
l’intégration.
Par ailleurs, la question du terrorisme pose de véritables défis de sécurité, et les états de l’Union
ont commencé à mettre en œuvre une politique commune dans ce domaine, mais elle se heurte à
des questions de souveraineté nationale évidemment, mais aussi simplement à des problèmes
financiers et techniques.
Conclusion
L’enjeu de l’élargissement de l’Union européenne et par voie de conséquence la question des
frontières de l’Europe, pose évidemment un problème démocratique et économique, mais aussi
démographique.
Les enjeux s’inscrivent dans une géopolitique interne et externe, sur la place de l’Europe dans la
mondialisation, dans le monde aujourd’hui tout simplement.
Les élargissements de facto ont s’inscrivent dans le déploiement d’une politique étrangère
spécifique de l’union, attractive, par le biais de l’OTAN, mais aussi par ce que l’Union européenne
peut apporter aux pays qui la rejoignent.
Pour autant, sur cette définition des frontières de l’Europe, et jusqu’à présent, on assiste à une
sorte de « refus de choisir une délimitation » et c’est sans doute cela qui génère une approche
anxiogène de l’Europe, marquée par des incertitudes et des inquiétudes qui se retrouvent dans les
comportements électoraux à propos des élections européennes, et sans doute dans la montée de
partis europhobes.
Bruno Modica
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