Collège au Cinéma

Transcription

Collège au Cinéma
Wadjda
Notes pour présentation Collège au cinéma - Mélanie Leblanc
Introduction
Wadjda est connu avant tout comme le premier film saoudien, qui plus est réalisé par une
femme, dans un pays où les droits des femmes ne sont pas respectés. Haifaa Al-Mansour est
donc la première réalisatrice de son pays. Elle est née le 10 août 1974 en Arabie Saoudite.
Après avoir étudié la littérature à l’Université Américaine du Caire, elle obtient un master en
cinéma à l’Université de Sydney. Voici ce qu’elle dit de son film (site de Pretty Pictures) :
NOTE DE LA RÉALISATRICE
Je suis si fière d’avoir écrit et mis en scène le premier long métrage jamais réalisé dans
le Royaume. Je viens d’une petite ville en Arabie Saoudite où on trouve beaucoup de
petites filles comme Wadjda. Des petites filles qui ont de grands rêves, de fortes
personnalités et tant de potentiel. Des petites filles qui peuvent, et pourront re-façonner
et re-définir notre nation.
Il était important pour moi de travailler avec un casting entièrement saoudien, de
raconter cette histoire avec des voix authentiques. Le tournage a été une incroyable
collaboration qui a rassemblé des équipes talentueuses, de l’Allemagne à l’Arabie
Saoudite, jusqu’au cœur de Riyad.
J’espère sincèrement que le film offre une vision intérieure unique de mon pays, et
qu’il parlera à tous, à travers ces thèmes universels que sont l’espoir et la
persévérance.
Comme le suggère la réalisatrice, Wadjda est un film qui donne une vision intérieure de
son pays en montrant comment réaliser son rêve quand on est une jeune fille en Arabie
saoudite. Mais il a aussi une dimension universelle, par ses thèmes et par les questions
qu’il soulève : comment trouver sa liberté et se trouver soi, malgré l’autre et grâce à
l’autre.
I/ Une liberté à conquérir
1.1. Contexte saoudien
1.2. Contexte mondial
1.3. Un récit initiatique : comment grandir face à l’adversité
T : Comment se construit la quête de soi ?
II/ Le vélo comme le cinéma : un rêve à réaliser
2.1. L’apparition du vélo
2.2. Réaliser son rêve
2.3. Wadjda actrice : la mise en abyme
T : Un film ne se réalise pas seul
III/ Une altérité à repenser : faire de l’Autre un ami.
3.1. Se libérer de l’Autre
3.2. L’Autre, un antagonisme à dépasser
3.3. Faire de l’autre un allié
Conclusion
I/ Une liberté à conquérir
1.1.Contexte saoudien
1.1.1. Une société avec de nombreux interdits
Bien faire la distinction entre les pays du Maghreb et l’Arabie saoudite. En parler avant la
projection. Situer sur une carte. Interroger les images que se font les élèves (enfants de
confession musulmane connaissent pays d’où l’on revient Haj ou Haja). Arabie saoudite =
pays où les femmes sont voilées entièrement dans la rue. Beaucoup d’interdits, certains
inscrits dans la loi, d’autres prononcés par fatwa qui sont normalement prescriptives, d’autres
encore juste parce que c’est « mal vu ». Parmi les interdits : conduire une voiture cf article Le
Monde sur les appli VTC pour voiture avec chauffeur qui rencontrent un gros succès en
Arabie saoudite :
Chaque mois, Samar Nassar, une femme d'affaires de 38 ans circulant régulièrement
entre Riyad, la capitale, et Jedda, avoue dépenser près de 800 $ (630 euros) en
réservations. "Ils me conduisent au travail, viennent me chercher à l'aéroport, ils
m'emmènent où je veux", raconte-t-elle au Wall Street Journal.
Un budget mensuel qui peut sembler déraisonnable au regard du coût de location ou de
financement d'une voiture. Mais Samar Nassar n'a pas le choix, elle vit dans un pays
où les femmes n'ont pas le droit de conduire. "Cela nuit aux ovaires", a rappelé l'année
dernière un membre du conseil des oulémas.
Une croissance de 50 % par mois
Uber, Rocket Internet AG's Easy Taxi... une foule d'applications se sont lancées dans
le royaume ces dix-huit derniers mois et, se félicitent-elles en cœur, 80 % de leurs
clients sont des clientes. L'allemand Rocket Internet affirme que son application a été
téléchargée 300 000 fois depuis février, et au moins trois autres services sont
disponibles ou sont en train de se lancer.
"Des Saoudiennes nous utilisent trois à quatre fois par jour, tous les jours"
cf dans le film nombreuses scènes de conflit entre mère et son chauffeur. Autres interdits : se
déplacer sans autorisation d’un tuteur, nombreuses professions, travailler à visage découvert,
se marier par amour et… FAIRE DU VELO, sujet du film.
Or il est un interdit qui concerne tous les Saoudiens : CINEMA ! aucun cinéma, aucun
tournage. Haifaa Al-Mansour 1ère femme real ET 1er film saoudien !
Donc lien entre ces deux interdits semble évident.
Précision : Le succès des trois premiers courts-métrages d’Haifaa Al-MAnsour, et de son
documentaire multi-récompensé Women Without Shadows (Des Femmes sans Ombres,
2005), a permis de poser la question de l’ouverture de salles de cinéma dans le Royaume.
1.1.2. Histoire
Attention ! Pas tjs été comme cela ! cf doc Women without shadows (de Haifaa Al-Mansour,
dispo ds DVD) : grand-mères plus libres ! Situation stagne voire empire depuis une vingtaine
d’années selon plusieurs femmes interviewées. Liée à croissance économique ! Arabie
saoudite = pays riche par rapport aux pays du Maghreb. Avec rues plus grandes, gens se sont
éloignés les uns des autres. Déconstruire clichés : voile pas lié à une société archaïque. Dans
campagne marocaine par exemple, les femmes portent juste un foulard sur les cheveux, pas de
voile. Voile plus présent en ville.
Aujourd’hui : petites évolutions, par exemple août 2013 1ère loi contre la maltraitance mais
« la Société nationale des droits de l'homme a cependant tenu à nuancer, mardi, l'impact
espéré de cette loi, dans la mesure où les femmes devront toujours solliciter l'autorisation et
l'accompagnement de leur mari pour porter plainte, quand bien même ce dernier serait
l'agresseur. » Projet énorme de construction d’un métro à Ryad mais on ne sait toujours pas si
les femmes pourront y avoir accès.
1.1.3. Les espaces, lieux où s’expriment interdits et libertés.
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Lieu majeur de l’interdit = la rue. Interdit pour une femme de marcher seule dans la
rue, d’y conduire, de ne pas être voilée. Espace de liberté pour Wadjda qui est encore
enfant. Lieu où elle retrouve Abdallah, lieu où apparaît le vélo, où elle va le voir, où
elle fait du vélo pour la première fois, lieu aussi de la séquence finale qui exprime
liberté. Mais aussi menace de danger cf harcèlement ouvrier.
La voiture : femmes prisonnières espace clos mais public : voilées et chaleur (mère
s’en plaint), trajet très long, dépendantes des chauffeurs. Lieu où s’expriment rapport
de force homme/femme (mère fait attendre chauffeur mais dépend de lui),
enfant/adulte (Wadjda défend sa mère), citoyen du pays/étranger (Wadjda l’humilie
car il ne parle pas bien l’arabe).
la maison : espace fermé mais caché donc espace d’une certaine liberté, surtout quand
mère et fille sont seules. Cf scène dans la cuisine où elles chantent. Peut être vu
comme une prison Cf docu : « marre de ma cage dorée ». Mais permet de relativiser
une image de la femme qui aurait perdu toute liberté : à la maison encore place
relative. Mais moins qu’auparavant, pas écoutée par mari à laquelle elle est
complètement soumise. Accessoire de liberté à la maison : le téléphone. cf scène où
Wadjda apprend par commérages de sa mère que les jeunes gens de la lettre ont été
pris.
la chambre de W : espace de liberté pour W, chambre qui ressemble à chambre d’une
adolescente occidentale : elle la décore comme elle veut, slogans sur les murs, collage
avec dessins, tête de mort, « cool » (plan serré sur collage le matin de son départ pour
gagner le concours)
le toit de la maison : espace sans doute où peut s’exprimer la plus grande liberté, car à
la fois caché et ouvert. C’est le lieu où Wadjda apprend à faire du vélo, lieu de
complicité avec Abdallah. Lieu aussi d’où elle observe fête électorale avec sa mère,
signe avec Abd, puis s’assoient côte à côte pour important moment de complicité
mère-fille, liberté intérieure. Balcon aussi lieu où mère fume.
l’école : Différents espaces : dans la cour, espace surveillé, peu de libertés mais c’est
justement là qu’ont lieu le plus d’interdits ! vente de bracelets, lettre d’amour, vernis.
Jusque dans la cour filles persécutées : se cachent quand voient ouvriers au loin ! Mais
vient des jeunes filles elles-mêmes, W. reste à jouer à la marelle : en fait un espace de
l’enfance et du jeu malgré ce qu’en pensent les autres. En classe : lieu d’oppression (cf
scène 1, punition au soleil) mais aussi en classe que Wadjda entend rumeur sur le
prétendu voleur venu visiter la directrice. Bureau : lieu d’un pouvoir autoritariste, où
l’on pousse Wadjda à commettre trahison (mais résiste au pouvoir). Ecole = pas
femme voilée. Permet d’apprécier comme la directrice, très exigeante, relais du
pouvoir, est séduisante, donc ambivalente.
1.2. Contexte mondial
Intéressant en tant que spectateur de découvrir une culture très peu connue de l’intérieur, mais
aussi intéressant d’interroger en retour nos propres modes de vie en occident.
1.2.1. Liberté des filles en Occident : un acquis ?
Rien à voir avec Arabie saoudite. Mais encore des inégalités, notamment par rapport aux
activités péri-éducatives. cf livre qui vient de sortir, « La fabrique des garçons », de Sylvie
Ayral et Yves Raibaud. Extrait de l’article paru dans Les inrocks:
Le premier constat est que si filles et garçons sont presque à égalité dans les activités
périscolaires à la fin de l’école primaire, les filles décrochent massivement à partir de
la sixième. D’où ce chiffre alarmant, issues de recherches faites à Bordeaux et
Toulouse : les loisirs destinés aux jeunes, organisés ou subventionnés par les
municipalités, profitent à deux fois plus de garçons que de filles, toutes activités
confondues. Et si l’on considère que les loisirs masculins sont toujours plus coûteux
que ceux des filles, on arrive à ce résultat incroyable : pour 4 euros d’argent public
dépensés pour les enfants et les jeunes, 3 euros le sont pour les garçons et 1 pour les
filles !
On peut interroger dans la classe activités et sports choisis par filles et garçons.
Cf Tomboy, l’an dernier programmé : difficile pour une fille d’être acceptée sur un terrain de
foot.
Cf docu Hélène Harder sur le football féminin au Sénégal, Ladie’s turn. Docu arte. A bcp
tourné dans festivals et réal m’a dit qu’elle avait reçu de nombreux témoignages de filles qui
font foot en France et vivent des difficultés similaires à celles des sénégalaises.
1.2.2. Les personnages féminins
- Dans les histoires pour enfants : moins présentes que garçons, car on part du principe que
petite fille s’identifie facilement à un héros, mais pas petit garçon à une héroïne.
Princesses dans conte stéréotypées et bonheur = se marier et avoir bcp d’enfants. Encore bcp
de livres de princesses même si tout une littérature jeunesse féministe depuis années 70 (ex
Julie qui a une ombre de garçon).
- Au cinéma : héroïnes longtemps très genrées, encore aujourd’hui.
Filles rares dans l’histoire des rebelles au cinéma :
- d’abord des adolescents ou de jeunes hommes : James Dean, Jean-Paul Belmondo
dans les films de la Nouvelle Vague.
- ! symbole liberté et rebellion = moto dans Easy rider (1969) et L’équipée sauvage
(1953) // Wadjda avec vélo !
- enfants rebelles : Zéro de conduite de Jean Vigo, Les mistons puis Antoine Doisnel
dans les 400 coups de Truffaut.
quelques filles rebelles : ex Zazie dans Zazie dans le métro, l’héroïne de film vu juste avant,
Cyclone à la Jamaïque (faire lien avec élèves) plus récemment (2000) Samia, de Ph. Faucon
par ex.
1.2.3. Les femmes qui travaillent dans cinéma
Beaucoup de femmes dans le cinéma, mais encore sectorisé, cf « script-girl » ! Très peu
femmes réalisatrices. cf dossier dans Les Cahiers du cinéma en septembre 2012 « Où sont les
femmes ? ». Article d’Aurélie Godet « Un monde (presque) sans femmes » :
Les femmes ne représentent dans les faits qu’un quart au plus des réalisateurs (…) La
France fait pourtant figure de première de la classe, ces pourcentages étant inégalés en
Europe et dans le monde. (…) Les études américaines affichent des chiffres effarants
(5%). (…) aucune étude approfondie n’a à ce jour détaillé les choix et obstacles qui
affectent les femmes en particulier à chaque étape du développement et de la
production d’un film. Si elles postulent, leurs projets font-ils l’objet de
discrimination ? Et si elles sont moins nombreuses à demander un financement, ou à
mener une production à terme, qu’est-ce qui les fait reculer ?
Demander aux élèves de citer une réalisatrice. Ils pourront retrouver peut-être Céline
Sciamma – Bande de filles cette année, Tomboy l’an dernier au programme Collège au
cinéma, peut-être connaissent-ils Mélanie Laurent, Respire en 2014, d’abord connue comme
actrice. En règle générale les réalisatrices sont plus présentes dans docu que dans fiction.
1.3. Un récit initiatique : comment grandir face à l’adversité
- Schéma actanciel cf contes et récits initiatiques (lien possible avec le programme de 6e en
français) : situation initiale, quête vélo, épreuves/péripéties, opposants & adjuvants, situation
finale : objet de la quête acquis.
- Epreuves rencontrées par W l’aident à se définir, à progresser. Au cinéma, pour qu’un
personnage existe, prenne de l’épaisseur, il est bon qu’il soit dans des situations complexes
qui l’obligent à faire des choix, à se définir. La pression met le personnage face à des
dilemmes qui l’aident à se définir. Cas exemplaire pour Wadjda : obstacles nombreux car vélo
interdit et cher !
- Analyse des personnages comme des doubles de Wadjda qui l’aident à se définir (exercice
possible avec les élèves : chercher les doubles de W)
Abdallah : double masculin. Ami. Est un garçon mais le premier des adjuvants : lui
apprend à faire du vélo, l’encourage, lui offre un casque. Elle se mesure à lui dès début avec
course et veut se mesurer à lui en vélo : moteur initial. abdallah-wadjda sur arbre
généalogique : se donne nom de garçon pour pouvoir y figurer et choisit le nom de son ami ?
accentue alors effet double. Ou futur mari ???
Mère : double + âgé. Complicité mais refuse vélo, donc au début opposant, mais à la
fin adjuvant : offre le vélo. W se pose comme différente de sa mère, ex elle sait jouer à la
console et peut jouer avec le père, dans le taxi, plan sur les deux visages, regards divergents.
W prend position adulte qd mère a peur qu’Iqbal (taxi) n’attende pas « n’aie pas peur ».
Intéressant jeu de miroir cf plans avec miroir après les ablutions, dans la salle de bain, à
propos du fait de faire du vélo « si tu en fais, tu ne pourras pas avoir d’enfant » cf pb perso
mère ! Mère se regarde dans miroir : dans l’image, la représentation. Wadjda ne se regarde
pas dans miroir. Education de la mère ambivalente : relaie les « on dit » de la société (cf
conversation tel, amie qui travaille visage découvert), refuse vélo, interdit chanter quand
hommes présents MAIS chante chansons d’amour avec sa fille quand elles sont seules à la
maison, lui fait remarquer qu’il n’y a que des hommes sur « le glorieux arbre généalogique de
(son) père » où elle ne figure même pas. Mère permet à Wadjda de vraiment progresser pour
psalmodier le Coran, elle donne du sens. Mère si sensible au regard des autres est pourtant
celle qui conseille : « oublie les autres » puis après concours « t’as pas besoin d’elles, ni de
leur argent ». Belle progression de ce personnage : relais de la spectatrice saoudienne ? Peutêtre qu’elle évoluera au contact de ce film comme mère W a évolué au contact de sa fille ?
Directrice école : opposant (même si passage heureux, avant que W n’avoue sa vraie
motivation). Assez tyrannique. Mais se reconnaît en Wadjda, lui confie qu’elle était comme
elle à son âge. Elle impose une loi morale dont elle souffre elle-même. Séductrice (cf histoire
du voleur) mais dans la répression. W se construit par opposition à cette directrice : double
inversé.
Adolescentes rebelles : doubles de W car filles rebelles mais pas la même rébellion.
Elles se rebellent pour amour et séduction (lettre, vernis), alors que W pour sa liberté.
Rébellion des autres adolescentes mène à l’échec : se font prendre et punir. Rébellion vaine,
car séduire = tomber dans une autre dépendance, celle de l’autre.
Selma (camarade de classe) : jeune fille, même âge que W. Moquée par ses camarades
car pas assez belle selon elles pour qu’un garçon s’intéresse à elle (W ne s’associe pas aux
moqueries, pas préoccupée par ces questions). Puis, lors du cours de récitation du Coran, son
mariage est annoncé ! Professeure demande l’âge du mari : 20 ans. Fait rire les autres. cf docu
quand une femme mariée alors qu’elle était enfant explique qu’ils ont mis 5 ans avec son mari
à comprendre « leur devoir ». Selma se fait prendre avec photos de mariage mais pas punie.
Professeur la donne en modèle pour la psalmodie du Coran. Elle fera d’ailleurs partie des 3
dernières en liste pour le concours.
T : Wadjda s’affirme comme une jeune fille libre. Mais comment se construit la quête de soi ?
II/ Le vélo comme le cinéma : un rêve à réaliser
2.1. L’apparition du vélo : l’émerveillement
Montrer sequ apparition vélo. Préciser qu’on peut la retrouver avec commentaires sur
transmettrelecinéma.com > vidéo
Compléter les commentaires proposés sur le site par mise en abyme du cinéma, réflexivité de
cette séquence :
2.1.1. magie du cinéma
- mur cf écran de cinéma (rappel : pas de cinéma en Arabie saoudite) : sur ce mur apparaît
objet du désir, la magie, la merveille.
- vélo qui roule tout seul = magie cf magie du cinéma. veine Meliès : 1ers truquages, effets
spéciaux. hypothèse : scène qui exprime fascination pour cinéma et désir de faire des films de
la réalisatrice, désir né d’un émerveillement.
Apparition comme un mirage (plan précédent désert rocailleux), cf Mille et une nuits
(interprétation proposée sur site transmettrelecinéma.com)
- films qui font écho :
A la conquète de l’air de Ferdinand Zecca, un film de 1901 qui utilise un truquage :
un homme semble voler au-dessus de paris en vélo.
Jour de fête de Jacques Tati, personnage principal = postier à vélo, scène avec un vélo
qui avance tout seul ! (truquage qui me fascinait enfant - mon grand-père fait partie des
cyclistes). Magie du cinéma.
Un film que les élèves peuvent trouver seuls : à la fin, quand elle part en pédalant, à
quel film cela peut-il faire penser ? un film avec enfants qui décollent avec leurs vélos ?...
E.T.
On peut montrer cette séquence finale d’E.T. et observer les points communs et les
différences. Point commun : vélo, liberté, fin sur de l’ouvert. Différence de genre, permet de
définir le genre de Wadjda avec les élèves : réaliste alors que E.T. fantastique. Fin ouverte
pour Wadjda : que va-t-il se passer ensuite ? route sur laquelle elle pédale est barrée ensuite
par une autre route – est-ce une piste d’interprétation ?
- faire lien avec scène où apparaît vélo sur le balcon : plan fond noir, mère chef opératrice
allume et il surgit. (deux plans, garder analyse scène pour la fin).
2.1.2. Lien vélo/cinéma d’un point de vue technique
roue : mouvement. cinéma = image fixe en mouvement + son
scène apparition vélo : Wadjda se met en mouvement (court) et le plan même, qui était fixe,
panote sur la droite. + musique qui se déclenche à ce moment.
roue cf mouvement circulaire de la bobine et mouvement que devaient faire premiers
cameramen pour filmer (cf films Lumière)
cf praxinoscope (le montrer) principe de la pertinence rétinienne. facile à expliquer avec flipbooks.
Idée de réalisation avec les élèves : leur faire fabriquer un zootrope avec une roue de vélo, soit
un cyclotrope. cf vidéo de l’anglais Tom Wheatley « the cyclotrope » sur youtube.
2.2. Réaliser son rêve
Wadjda = perso relais de la réal : comme Haifaa Al-Mansour, Wadjda poursuit un rêve a
priori inaccessible (vélo comme cinéma interdit aux femmes), pourtant va faire de son rêve
une réalité.
Les différentes étapes, proches de celles vécues par réal lors du processus créatif :
- L’idée, le projet : besoin de se mesurer à l’autre, de se dépasser, signe : apparition du
vélo « ce fut comme une apparition », projet de l’obtenir se consolide chez le
marchand, qd elle le touche. Dessine le vélo (cf story-board !) son rêve commence à
prendre forme, or ! dessin caché au moment de l’annonce du concours par la
directrice.
- La mise en mouvement : W se met en mouvement pour réaliser son rêve, par la
course. Lien cinéma/mouvement fort cf image-mouvement de Deleuze, cf Lola dans
Lola Montes de Max Ophuls : « la vie, pour moi, c’est le mouvement » : Lola fait
choix du départ, montre que vie tjs plus forte que tout, tant que mouvement
(danseuse).
- Wadjda en quête de financement : forte présence de l’argent. Scènes de négociations
avec le marchand, avec sa mère. Dans sa chambre, fait ses comptes, prépare bracelets.
Vente de bracelets : sans pitié, augmente les prix. Se fait payer deux fois pour la lettre
d’amour transmise. Accepte les 5 rials d’Abdallah pour arrêter de pleurer. Important =
parvenir à ses fins. Mais hésite à voler argent ds tiroir et finalement le repose.
- Les contraintes techniques et humaines, les obstacles. Obstacles d’une société qui ne
respecte pas les droits des femmes vécus par Wadjda comme par la réal. Cf makingoff ds laquelle on la voit diriger les acteurs dans la rue depuis sa voiture, cachée.
Pour W comme pour Haifaa Al-Mansour, acquérir un moyen technique (vélo/caméra) rend
plus libre, permet de réaliser rêve. Dans les deux cas, un défi cf making-off « pour moi c’était
un défi » car pas d’expérience pratique.
2.3. Wadjda = celle qui voit, celle qui entend.
Chercher avec élèves ce qu’est le cinéma, la définition concrète, simple : le cinéma, c’est de
l’image et du son. W possède cette sensibilité aux sons et aux images.
Image :
Nous sommes dans le point de vue de W. Perso principal et nbses sc vues par elle. (= relai de
la réalisatrice).
cf nbx surcadres, par ex scènes ds maison, qd mère seule ou en discussion privée avec mari,
on sent présence de W qui aperçoit ou écoute scène en secret grâce à ces sur cadres.
idem à l’école, scène avec jeune filles qui se font prendre vue par W. contre-champ sur W
cachée derrière un pilier. plan suivant : départ des jeunes filles avec directrices, moitié du plan
= mur : plan subjectif. Nbx plans subjectifs, par exemple au début du film quand elle est punie
au soleil, beau plan sur soleil, avec symbolique du ciel et du grillage, oblique. Plan subjectif
aussi quand elle observe fête depuis balcon.
Son :
W aussi celle qui choisit sa bande-son : met la musique pour ne pas entendre sa mère qui la
dispute et casse une assiette, chante qd elle fait à manger.
Repérer scènes avec musique : musique dramatique pour certaines scènes, mais souvent
musique qui accompagne la rêverie liée au vélo, ex : qd W voit vélo apparaître, 1ère fois
qu’elle fait du vélo dans la rue avec Abdallah, sur le balcon quand sa mère lui donne son vélo
et forte dans scène fin ale quand elle fait la course avec Abdallah.
Sensibilité à la voix de sa mère, en est fière, lui demande si elle a rêvé d’être chanteuse. Voix
de sa mère qui psalmodie le Coran = ce qui permet à W de donner sens, touche son cœur.
Musique comme langage de l’âme, cf pouvoir de la musique au cinéma pour dire l’indicible.
Référence image et son lors de la psalmodie de W : « Dieu a scellé leurs cœurs et leurs
oreilles ; et un voile épais leur couvre la vue et pour eux il y aura un grand châtiment. »
2.4. Wadjda actrice : mise en abyme
- W choisit le jeu, pas le jeu de la séduction (pas être belle, séduire) cf scène dans la cour où
elle continue de jouer à la marelle, alors que dans ce même lieu d’autres jeunes filles
mettaient vernis. Dit qlqchose sur être femme comme sur être actrice = celle qui joue, pas
forcément celle qui séduit. Ds making-off, Waad dit son désir d’être actrice et assure qu’elle
ne changera pas, pas prétentieuse. Image impressionnante lors de la Mostra de Venise, sur
tapis rouge !
- Montrer séquence dans la rue avec Abdallah, avant la mosquée, cf scène de mime, cinéma
muet. Hommage aux origines du cinéma. Interroger sur jeu des acteurs – peut paraître exagéré
en Occident, faire ref aux séries diffusées dans pays arabes, dans lesquelles jeu acteurs très
appuyé. De nouveau mime quand elle le voit depuis son balcon, ils font le même signe, se
grattent la joue.
- Répétitions pour apprendre le Coran cf apprentissage texte pour comédiens. Effort. Volonté
forte. Tant qu’elle fait semblant, joue mal. Besoin de mettre son cœur pour bien réciter le
Coran // pour bien jouer. Car elle joue le rôle de la bonne musulmane, vrai but est d’obtenir
vélo. Mais pas hypocrisie : quand la principale lui demande ce qu’elle va faire de cet argent,
elle répond avec honnêteté.
- Importance costume : converse (symb Occident et pas genré, rq de la directrice sur chauss,
gros plan ds séqu d’ouverture sur ses chaussures, différentes des chaussures noires avec
soquettes blanches, customise ses converses cf image et chaussures de sport cf désir vélo),
bracelets, abaya, T shirt : I am a great catch !, t-shirt avec guitares (rock symbole occident,
rebellion), sac en jean avec grigris, garde son casque de vélo sur la tête pendant qu’elle joue
au jeu pour apprendre le coran. Sensibilité au costume : pas pour séduction (scène de la robe)
mais comme symbole de libération cf qd W accompagne sa mère pour aller voir Leïla, l’amie
qui travaille à l’hôpital. Rit aussi de la moustache de l’oncle politicien d’Abdallah, moustache
accessoire, signe de reconnaissance pour personnage comique qui salue de la main à la
dernière scène sur son affiche, cf cinéma burlesque. Ressort comique comme une des voies
pour supporter et résister à l’oppression.
T : Un film ne se réalise pas seul, pas une seule star, art du collectif => quel rapport à l’autre ?
III/ Wadjda invite à repenser l’altérité.
(« Prise en compte d’autrui » cf programme 3e)
3.1. Se libérer de l’Autre
Extrait docu Women without shadows 34:00 à fin (8 min)
- de son regard, son jugement cf docu scène sur balcon, veille du concours, mère dit : « W,
oublie les autres ».
Dans le making-off : « le but du film est d’inspirer une façon de penser, sans tenir compte des
gens qui ne sont pas d’accord. » (prod saoudien)
- de l’Autre qui est en soi, c’est-à-dire pensée de l’autre tellement intégrée qu’on l’a faite
sienne. W = exemple de liberté de pensée, pensée divergente. cf sc de la marelle ds laquelle
W se différencie du groupe, sc familiale avec jeu électronique ds laquelle mère refuse de jouer
« je ne sais pas » et W prend sa place pour jouer avec le père. cf amie qui travaille à l’hôpital
et lui propose de venir : « Arrête avec ça, il a bon dos ton mari » puis qd mère va pour
postuler, elle est choquée par son amie et la juge.
- de son besoin de plaire à l’autre cf cheveux mère, « j’aimerais bien me couper les cheveux _
ben coupe-les _ ton père n’aime pas » scène de la robe « tu crois qu’elle plaira à ton père ? »
réponse de W = geste d’agacement.
- trouver en soi solutions, ne pas attendre que l’ho ou la société change (cf conclusion docu
Women without shadows )
« Je me suis rendue compte que le bonheur n’était pas lié aux hommes. Les hommes ne font
pas le bonheur. Dieu merci. Je suis heureuse car j’ai connu la liberté. »
« seule la femme peut transformer cette lueur en soleil qui irradie »
séquence finale : W seule sur son vélo.
making-off : « le pays s’ouvre, la condition des femmes évolue mais ça doit venir des
femmes, une femme doit être courageuse, faire ses preuves, sortir des sentiers battus, malgré
les ragots elle doit croire en elle et ses idéaux » Haifaa al Mansour
- ref cinématographique : court-métrage NO, de Kiarostami : arriver à dire non. Enfants !
cheveux…
3.2. L’Autre, un antagonisme à dépasser
3.2.1. Homme/femme ou garçon/fille : cf lien W/ami. Leur relation n’est pas genrée – qd il lui
offre une abaya elle répond qu’ils ne sont pas quittes, slt qd battu à la course. Egalité. Il est
son meilleur ami. Montre que lien garçon/fille peut être fort sans être forcément dans
séduction. Identification va loin : sur arbre-généalogique où son nom n’est pas inscrit, slt
prénoms ho, elle ajoute : « Abdallah-Wadjda ».
W ne cherche pas à séduire l’Autre, différente autres jeunes filles cf scène de la lettre d’amour
et sc du vernis. dans les deux cas, finit mal pour les jeunes filles.
3.2.2. enfant/adulte : W est une enfant mais elle est un modèle pour les adultes. Elle aide sa
mère à trouver sa liberté. Plus largement, ce personnage, à travers ce film, montre aux femmes
saoudiennes que c’est possible, il suffit de le vouloir. (cf docu : ce qu’il faut c’est montrer
exemple cf prof visage découvert). Détour par l’enfance sans doute un moyen de mieux parler
aux adultes, vis-à-vis censure mais aussi si un enfant l’a fait, comment un adulte ne pourrait-il
pas le faire ?
3.2.3. orient/occident : difficultés compréhension entre deux cultures très différentes pas niée,
mais ce film est la preuve que possible dépasser clivages. Cf making-off. : « Je n’avais pas
peur du contraste. Chacun était surpris par l’autre. Les Allemands sont parmi les gens les plus
travailleurs du monde. Les Arabes sont plus décontractés par rapport au travail. Le niveau des
attentes m’inquiétait. Mais en fait, les Allemands se sont détendus et les Saoudiens
onttravaillé davantage. C’était fantastique, il y a eu un véritable échange. Le plus important,
c’est l’échange d’expériences. » Equipe tournage allds/saoudiens. Prod partagée aussi. On
peut avoir image très caricaturale de la femme voilée en occident. Nous montre que forme de
liberté à l’intérieur, capacité de rebellion. Et pas seulement quelques femmes d’exception, car
là encore caricature (cf début docu : cite fe saoudiennes connues mais cherche la femme
saoudienne commune). Ici une jeune fille donc pas encore « réalisée » et dans banlieue Ryad,
classe moyenne. Proposition exercice : comparer les affiches du film selon pays.
3.2.4. croyant / athée : obscurantisme religieux clairement dénoncé. superstitions par ex
« ferme le coran, satan crache dessus ». mais religion n’est pas moquée. place pour la foi cf
mère « ma chérie, il faut que ça vienne du cœur ». Sourate de la vache psalmodiée par Wadjda
lors du concours : texte important, car vient du Coran et dans la bouche de l’héroïne : « Dieu a
scellé leurs cœurs et leurs oreilles ; et un voile épais leur couvre la vue et pour eux il y aura un
grand châtiment. Parmi les gens il y a ceux qui disent Nous croyons en Dieu, tandis qu’en fait
ils n’y croient pas. Ils cherchent à tromper Dieu et les croyants ; mais ils ne trompent qu’euxmêmes, et ils ne s’en rendent pas compte. Il y a dans leurs cœurs une maladie et Dieu laisse
croître leur maladie. Ils auront un châtiment douloureux pour avoir menti. Et quand on leur dit
‘Ne semez pas la corruption sur la terre’, ils disent :’Au contraire nous ne sommes que des
réformateurs. certes, ce sont eux les véritables corrupteurs » Très habile : message peut être
entendu par croyants comme par ceux qui sont d’une autre religion ou athée. Importance du
texte cf Haïfaa al-Mansour fille de poète.
3.3. Faire de l’autre un allié
3.3.1. L’autre n’est pas forcément un ennemi. cf figures masculines dans le film.
Abdallah aide W : pour se diriger ds ville qd vengeance, devant chez Iqbal dit à W que ne va
pas l’aider, W premier plan, commence, mais Abd intervient avant que porte ne se ferme pour
faire pression sur papiers. L’aide aussi pour apprendre à faire du vélo…
Père : ne dit rien quand elle lui annonce qu’elle économise pour acheter un vélo
Commerçant complice : lui garde son vélo, lui fait un prix pour jeu Coran, lui sourit à la fin
quand il la voit passer en vélo.
3.3.2. Rien à gagner sur l’autre, contre l’autre, doit être trouvé en soi, mais l’autre peut être un
allié pour mieux se trouver soi. Passage par l’altérité pour mieux être soi-même.
Garçon n’est pas l’ennemi pour Wadjda : son ami lui apprend à faire du vélo, il est prêt à lui
donner le sien. Son père lui donne caillou, qui devient objet fétiche (elle le récupère sur le
bureau de la directrice, l’a dans sa main avant d’aller au concours, puis gros plan pendant le
concours) : père n’est ni l’ogre ni le père infanticide du Petit Poucet ! La félicite , « je suis fier
de toi, championne ». père = menace surtout ds propos mère, pas représenté, ordre imaginaire
symbolique plus fort que ce que l’on voit
Figure de l’ennemi = directrice, mais en fait une alliée pour arriver à ses fins, obtenir un vélo.
Idem pour Coran : séquence d’ouverture : ennui en répétant Coran, puis apprend à le
connaître avec le cœur et en fait son allié.
Relation mère/fille : leur union dans le plan souligne points communs/différences,
union/désaccord. Regards dans directions opposées, éloignement dans le plan, couleurs
différentes, tenues différentes pendant prière, activités différentes (repassage/études) mais
aussi complicité sur balcon.
Conclusion :
Film riche, tant dans sa forme que dans son contenu. J’espère avoir pu donner pistes. Sûre que
vous en trouverez plein d’autres.
Wadjda est un film militant, qui ouvre une voie aux femmes saoudiennes, mais aussi à toutes
celles et à tous ceux qui ont à rêve et à qui l’on dit non. Film qui donne espoir, force et
courage pour persévérer, afin de réaliser ses rêves.
Proposition pistes supplémentaires :
- les gros-plans sur les pieds. Puissance symbolique. nbx plans sur les pieds :
chaussures, pieds qui servent de raccord pour ablutions, ablutions aussi avec pieds
mère, pieds que l’on peint (filles puis W)
- faire repérer aux élèves la progression dramatique, avec les climax négatifs et
positifs qui s’accentuent de plus en plus.
- analyse dernière scène du balcon